M. le président. Par amendement n° 5, MM. Charmant et Autain, les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, après l'article 12 bis , un article additionnel ainsi rédigé :
« Un rapport sur le droit de la responsabilité et de l'indemnisation applicable à l'aléa thérapeutique sera déposé par le Gouvernement sur les bureaux des deux assemblées avant le 31 décembre 1998.
« Il aura notamment pour objet de préciser les conditions d'application de l'article 12 aux produits issus du corps humain ou à tout autre produit de santé destiné à l'homme à finalité préventive, diagnostique ou thérapeutique. »
La parole est à M. Autain.
M. François Autain. Je voudrais, à titre personnel, me réjouir de l'adoption par le Sénat des deux amendements de suppression présentés respectivement par M. Hyest et par M. Fourcade.
Je regrette que mes obligations de questeur délégué ne m'aient pas permis de participer à ce débat très enrichissant ; j'espère bien néanmoins le compléter en défendant cet amendement n° 5, dont l'un des objets est de permettre à l'opinion publique de bien comprendre les décisions prises aujourd'hui.
Toutes les raisons ayant conduit le Sénat à maintenir la cause d'exonération pour risque de développement ont été parfaitement exposées par les uns et les autres.
Il n'en reste pas moins que vous avez tous été d'accord pour considérer qu'il y avait, au vu de la jurisprudence actuelle, de l'évolution des techniques de production des produits de santé comme de celle de l'opinion publique, à répondre définitivement à la question de savoir s'il convient ou non de doter la France d'une législation particulière sur l'aléa thérapeutique.
On ne peut pas contester le lien entre l'aléa médical et le risque de développement, comme plusieurs des intervenants l'ont fait remarquer. Mieux, dirais-je, il s'est instauré un mécanisme d'indemnisation de l'aléa médical : l'exonération du risque de développement devient de ce fait d'autant plus envisageable.
S'il nous est donc apparu plus prudent pour la France de ne pas écarter la cause sans avoir défini parallèlement un régime particulier de prise en charge de l'aléa thérapeutique, il semble en revanche indispensable de réfléchir à l'opportunité de la définition d'un tel régime. Il n'est pas sûr qu'une loi soit absolument nécessaire.
Il convient donc d'engager sur ce point une réflexion très attentive. C'est à cette dernière qu'invite l'amendement n° 5 que j'ai déposé conjointement avec mon collègue et ami Marcel Charmant : nous demandons au Gouvernement de présenter avant le 31 décembre prochain un rapport faisant le point sur cet important sujet. Si loi il doit y avoir, ce rapport devra le dire, et le Gouvernement devra alors nous proposer un texte dans les meilleurs délais.
Tel est donc, rapidement défendu, l'objet de l'amendement que je demande au Sénat de bien vouloir adopter. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. La commission a considéré que cet amendement présentait un intérêt réel, sous réserve de la proximité de la date proposée. Mais le vote intervenu tout à l'heure risquant d'être plutôt défavorable aux victimes, comme je me suis permis de le dire, il devient encore plus urgent d'organiser les choses de manière satisfaisante pour tout le monde. Néanmoins, la commission souhaite, avant de se prononcer, connaître l'avis du Gouvernement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
Mme Elisabeth Guigou, garde des sceaux. Je comprends tout à fait le souci des auteurs de l'amendement.
Je l'ai dit tout à l'heure : la question de la responsabilité du fait des produits défectueux ne se confond pas avec celle de l'aléa thérapeutique, et il est certain que se pose, dans l'un et l'autre cas, la question de l'indemnisation de dommages dus à ces médicaments et à des dispositifs médicaux.
C'est une question particulièrement délicate sur laquelle l'opinion publique est à juste titre sensibilisée.
Je l'ai indiqué et je le répète : le Gouvernement réfléchit actuellement à ce problème et ne peut que partager le souhait des auteurs de l'amendement de voir diffuser la plus large information en la matière.
Je ne suis donc nullement opposée à ce qu'un débat ait lieu devant le Parlement, avec des échéances précises.
Cependant, j'observe que la disposition qu'introduirait cet amendement ne présente aucun caractère normatif, et, sur ce point, la jurisprudence du Conseil constitutionnel est sans ambiguïté. C'est la raison pour laquelle on pourrait s'interroger sur l'utilité d'inscrire formellement dans la loi le principe d'un débat, principe sur lequel le Gouvernement, comme vous l'avez compris, est tout à fait prêt à s'engager.
Cette réserve juridique et formelle étant formulée, je m'en remets à la sagesse de la Haute Assemblée. (Très bien ! sur les travées socialistes.)
M. le président. Quel est, en définitive, l'avis de la commission ?
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Favorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 5.
M. Charles Descours. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Descours.
M. Charles Descours. Madame le ministre, nous avons assez bataillé depuis un moment pour que nous vous remerciions de l'ouverture d'esprit que vous manifestez sur ce point.
Les auteurs de l'amendement proposent qu'un rapport soit présenté par le Gouvernement. Je suis prêt à voter ce texte, considérant néanmoins que le délai fixé est très court. Je me demande si l'on ne pourrait pas retenir la date du 30 juin 1999.
M. Michel Dreyfus-Schmidt. Vous êtes plus royaliste que le roi !
M. Charles Descours. Très bien ! Je vous fais néanmoins remarquer que, d'ici au 31 décembre prochain, le délai, compte tenu des vacances, est très court. Mais, puisque tout le monde maintient la date, je voterai l'amendement en l'état.
M. Pierre Fauchon, rapporteur. Le Gouvernement ne prend pas de vancances !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 5, accepté par la commission et pour lequel le Gouvernement s'en remet à la sagesse du Sénat.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. En conséquence, un article additionnel ainsi rédigé est inséré dans la proposition de loi, après l'article 12 bis.
Les autres dispositions de la proposition de loi ne font pas l'objet de la deuxième lecture.

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