M. le président. Par amendement n° 48, MM. Garcia, Bony, Chervy, Courteau, Fatous, Mélenchon, Peyrafitte et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« La sous-section 1 de la section 3 du chapitre V du titre Ier de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire est modifiée comme suit :
« I. - L'intitulé de la sous-section 1 est ainsi rédigé :
« Du schéma multimodal des infrastructures de transport et des schémas sectoriels des transports »
« II. - Avant l'article 17, il est inséré un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Il est établi à l'échéance 2015 un schéma multimodal des infrastructures de transport conformément aux principes définis au chapitre Ier du titre Ier de la loi n° 82-1153 d'orientation des transports intérieurs.
« Les schémas sectoriels mentionnés aux articles 17, 18 et 19 de la présente loi sont établis conformément au schéma mentionné à l'alinéa précédent. »
La parole est à M. Garcia.
M. Aubert Garcia. La loi d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire a prévu l'établissement de cinq schémas sectoriels des transports - schéma directeur routier, schéma directeur des voies navigables, schéma des ports maritimes, schéma des infrastructures ferroviaires et schéma des infrastructures aéroportuaires - mais elle n'a pas prévu la mise en place d'un schéma multimodal des transports, seul outil capable de permettre un développement harmonieux et complémentaire des infrastructures de transport. Il est donc proposé de créer un tel schéma, à partir duquel pourra être déclinée chaque politique sectorielle des transports. Par ailleurs, il est précisé que ce schéma devra être établi pour permettre la mise en oeuvre du droit au transport, tel qu'il est défini par la LOTI, la loi d'orientation des transports intérieurs, et conformément aux principes qu'elle énonce.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Gerbaud, rapporteur. La commission, qui a étudié avec beaucoup d'intérêt cet amendement, a considéré que le schéma qu'il vise à établir constituait, en quelque sorte, un doublon avec le schéma national d'aménagement du territoire. Aussi émet-elle un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Pons, ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme. Pour les raisons que vient d'exposer M. le rapporteur, le Gouvernement émet un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 48, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 70, Mme Luc, MM. Billard, Leyzour et Minetti, et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel rédigé comme suit :
« Dans le cadre de la Conférence intergouvernementale des Etats de l'Union européenne, le Gouvernement proposera une réforme de l'article 90 du traité de Rome repris par le traité de Maastricht afin qu'il garantisse mieux l'existence et le fonctionnement particulier dérogeant aux règles de concurrence des entreprises publiques de transport ferroviaire chargées de la réalisation de missions d'intérêt économique générale et que soit supprimé le 3. de cet article qui attribue à la Commission des prérogatives exorbitantes. »
La parole est à Mme Luc.
Mme Hélène Luc. Notre amendement cherche à atteindre deux objectifs particulièrement importants puisqu'ils sont l'objet de notre première proposition. Il s'agit, d'une part, d'amener l'Europe à prendre réellement en compte la nécessité des services publics de transport ferroviaire et de leur développement pour la satisfaction des besoins des populations européennes. Il s'agit, d'autre part, de remettre en cause le pouvoir conféré par l'article 90-3 du traité de Rome à la Commission, qui, je le rappelle, lui confère, notamment en manière de commerce, un pouvoir exorbitant, exempté de tout contrôle démocratique.
La remise en cause fondamentale des services publics dans le cadre de la construction européenne actuelle a constitué l'une des principales raisons de notre opposition à la ratification du traité de Maastricht par notre pays.
Ce traité confirmait clairement la prédominance des règles de libre concurrence de la logique de l'argent sur celle de la satisfaction des besoins des populations. Les dogmes de l'ultralibéralisme, de la deréglementation, ne doivent plus ainsi avoir de frontières ; ils doivent s'imposer aux peuples.
Le premier point de l'article 3 A est, à ce sujet, sans ambiguïté et fonde la remise en cause actuelle des services publics qui font la spécificité et l'honneur de notre pays.
Je tiens à rappeler l'essentiel de ces dispositions : « ... l'action des Etats membres et de la Communauté comporte l'instauration d'une politique économique fondée sur l'étroite coordination des politiques économiques des Etats membres, sur le marché intérieur et sur la définition d'objectifs communs, et - j'insiste sur ces mots - conduite conformément au respect du principe d'une économie de marché ouverte où la concurrence est libre ».
C'est au nom de ces deux derniers concepts, économie de marché ouverte et libre concurrence, que la Commission mène une offensive violente, persévérante contre les grands services publics français qui ont fondé leur efficacité sur l'appartenance à la collectivité publique.
Aussi, nous estimons que, à l'occasion de la Conférence intergouvernementale qui se poursuit aujourd'hui, la modification du traité de Rome en matière de service public doit être à l'ordre du jour et, en tout cas, doit être l'un des soucis majeurs du Gouvernement de notre pays. L'objectif de libre concurrence doit être en effet abandonné au profit de celui de la réponse aux besoins de l'homme.
Une telle orientation doit s'accompagner, je l'indiquais d'entrée, d'une remise en cause de l'article 90-3 du traité de Rome, qui précise : « La Commission veille à l'application des dispositions du présent article et adresse, en tant que de besoin, les directives ou décisions approuvées aux Etats membres. »
Il s'agit en quelque sorte d'une arme absolue de la Commission, instance sans légitimité de société, au détriment des gouvernements et des parlements nationaux.
M. Borotra, ministre de l'industrie, ne pouvait que nous approuver puisque, en octobre 1995, dans son rapport « Faut-il défendre le service public ? », il précisait : « l'utilisation faite par la Commission de cet article s'avère inacceptable, car elle a abouti à doter cette seule instance d'un quasi-pouvoir législatif qui lui a permis, par exemple, d'engager la déréglementation du secteur des télécommunications à sa seule initiative ». M. Borotra concluait : « Au total, il est donc impératif que le gouvernement français demande l'abrogation de l'article 90-3 à l'occasion de la conférence intergouvernementale de 1996. »
Je tiens à rappeler, avant de conclure, que la directive 91/440 relative aux transports ferroviaires qui, idéologiquement, fonde l'actuelle réforme est une initiative de la Commission dans le cadre de l'article 90-3 précité.
Vous comprendrez donc, mes chers collègues, l'importance de cet amendement, notamment dans le cadre du présent débat relatif à l'avenir de la SNCF, amendement que nous vous proposons d'adopter dès l'ouverture de la discussion des articles de ce projet de loi, et c'est pourquoi nous demandons un scrutin public.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Gerbaud, rapporteur. La commission considère que cet amendement relève de l'injonction au Gouvernement. Quant à l'expression « prérogative exorbitante », elle prête à discussion, mais avouez que ce n'est ni le lieu ni le moment d'en discuter. Aussi, la commission émet un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Pons, ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme. Cet amendement n'est pas de nature législative. Le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 70.
M. Jean-Luc Mélenchon. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Je veux solennellement donner raison à nos collègues communistes lorsqu'ils demandent que, dans le déroulement de la conférence intergouvernementale, la France fasse peser tout le poids de ses traditions dans le domaine du service public et que l'on sorte enfin des ambiguïtés - en cet instant, je veux être charitable et c'est pourquoi j'emploie ce mot - sur la définition de ce qu'est le service public et la manière dont nous l'entendons.
En effet, comme vous le savez, les Anglo-Saxons et, d'une manière générale, les libéraux qui tiennent le haut du pavé dans toute l'Europe n'en ont pas du tout la même définition que nous, que ce soit dans le contenu du terme comme dans la manière d'organiser ces services publics. Ils les confondent avec un service minimum, un service universel, distinguant les missions de service public, qui pour eux sont plutôt des formes de charité publique, et les outils de mise en oeuvre de ces politiques publiques. Voilà la première raison.
La seconde raison est la suivante : je suis surpris de la réponse que vous venez de nous faire, monsieur le ministre, parce que, après tout, c'est tout de même bien le Premier ministre, chef du Gouvernement dans lequel vous siégez, qui a prétendu qu'il ferait introduire dans les discussions de la conférence intergouvernementale l'exigence des Français que le service public soit défendu et protégé et que nul ne puisse les obliger à renoncer à leur propre conception du service public.
J'ai le sentiment qu'aujourd'hui vous vous déjugez. Le propos n'est absolument pas hors sujet. Il est même, au contraire, tout à fait au centre des débats que nous avons à cet instant.
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 70, repoussé par la commission et par le Gouvernement.
Je suis saisi d'une demande de scrutin public émanant du groupe communiste républicain et citoyen.
Il va être procédé au scrutin dans les conditions réglementaires.

(Le scrutin a lieu.)
M. le président. Personne ne demande plus à voter ?...
Le scrutin est clos.

(Il est procédé au comptage des votes.) M. le président. Voici le résultat du dépouillement du scrutin n° 69 :

Nombre de votants 317
Nombre de suffrages exprimés 317
Majorité absolue des suffrages 159
Pour l'adoption 94
Contre 223

Par amendement n° 71, MM. Billard, Leyzour, Minetti et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel rédigé comme suit :
« Dans les six mois à compter de la promulgation de la présente loi, le Gouvernement présentera au Parlement un rapport proposant les mesures législatives nécessaires au maintien et au développement des services publics de transport ferroviaire dans le cadre de la construction européenne. »
La parole est à Mme Beaudeau.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, cet amendement vise à permettre au Gouvernement de faire le point devant les assemblées parlementaires sur l'évolution des services publics de transports ferroviaires et sur leur place, dans le cadre de la construction européenne.
Dans notre motion de renvoi à la commission, nous avons souligné la pression très importante effectuée par la Commission européenne, qui, je le rappelle, est dépourvue de toute légitimité démocratique, pour accélérer la déréglementation des services publics, au profit des opérateurs privés.
Madame le secrétaire d'Etat, lors de votre audition par la délégation européenne à l'Assemblée nationale, le 21 novembre 1996, vous avez vous-même souligné les aspects inquiétants du récent livre blanc de la Commission sur les transferts.
Vous avez vous-même indiqué alors, selon le compte rendu, que « le gouvernement français refuse donc de faire siens les objectifs de libéralisation définis par le livre blanc de la Commission ».
Pourtant, madame le secrétaire d'Etat, le projet de réforme que vous nous proposez aujourd'hui s'inscrit pleinement dans les objectifs préconisés par ce document, en l'occurrence l'éclatement des entreprises afin de favoriser à terme la libre concurrence.
Le Gouvernement se trouve ainsi pris, au moins sur le plan du discours, dans une contradiction majeure entre la volonté affichée de sauvegarder les services publics à la française et la soumission acceptée et même voulue aux objectifs du traité de Maastricht, traité dominé par l'idéologie ultralibérale.
Faut-il rappeler qu'il fut un temps, au lendemain du mouvement des mois de novembre et de décembre 1995, où le Gouvernement envisageait d'inscrire le principe du service public dans la Constitution ?
De toute évidence, l'influence de la politique sur l'avenir de nos services publics doit être l'objet d'un débat de fond. Voilà d'ailleurs à quoi vise notre amendement.
Dans le rapport de M. Bussereau, député UDF, paru en juin 1994, on pouvait déjà lire la réflexion suivante : « Seule la séparation opérationnelle permet de garantir l'optimisation des offres ferroviaires en facilitant l'ouverture du réseau aux opérateurs les plus efficaces sur un segment de marché donné. En ce sens, cette séparation est constitutionnelle à la logique de la directive 91/440 et donc à l'évolution du marché européen des transports ferroviaires, mais aussi à l'évolution du marché national où la prise en charge de certains services, par exemple certaines liaisons intra-régionales, par des opérateurs privés plus performants doit être favorisée ».
Je tiens une fois de plus à dénoncer le double langage qui confirme l'ambiguïté de la majorité. Celle-ci ne manque pas de superlatifs pour louer le service public lors des grands débats, mais, dans des rapports plus confidentiels, elle ne cesse d'appeler de ses voeux une libre concurrence effrénée.
Telle est la raison de l'amendement n° 71, qui tend à insérer un article additionnel avant l'article 1er.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Gerbaud, rapporteur. Cet amendement peut être considéré comme une sorte de « point de rencontre », comme il en existe dans les gares de la SNCF, puisqu'il rejoint une préoccupation de la commission. Il trouve partiellement satisfaction avec l'amendement n° 27 de la commission, qui vise à insérer un article additionnel après l'article 15. J'invite donc ses auteurs à bien vouloir le retirer. S'il n'en allait pas ainsi, la commission émettrait alors un avis défavorable.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Pons, ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme. Cet amendement n'est pas de nature législative, et le Gouvernement émet donc un avis défavorable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 71, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 72, MM. Billard, Leyzour, Minetti et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - A compter de 1997, tant que de besoin, la Société nationale des chemins de fer français est autorisée à émettre sur les marchés financiers des titres de créances sans intérêt, sur longue durée, garantis par l'Etat.
« II. - Le sixième alinéa de l'article 125-0 A du code général des impôts est ainsi rédigé :
« d) A 5 % lorsque la durée du contrat est égale ou supérieure à huit ans. »
La parole est à M. Renar.
M. Ivan Renar. Monsieur le président, monsieur le ministre, madame le secrétaire d'Etat, mes chers collègues, les principes qui ont guidé, lors des années de l'immédiat après-guerre, le développement des investissements d'infrastructure du pays ont été largement abandonnés, depuis une vingtaine d'années, au nom de deux principes aux effets pervers préoccupants pour les entreprises publiques : celui de l'autofinancement des investissements et celui de la rercherche, sur les marchés financiers, des moyens complémentaires de financement non dégagés par l'autofinancement.
L'ensemble des entreprises publiques ont donc été placées dans une situation de plus en plus préoccupante d'alourdissement de la charge de leurs dettes financières, du fait de la réduction ou de l'absence, dans certains cas, des concours financiers accordés par l'Etat.
Nous avons déjà eu l'occasion de souligner, lors d'autres débats, ce que cette orientation avait de pervers et créait de pression pour les entreprises publiques, singulièrement les entreprises publiques de réseau, d'infrastructure ou encore de gestion et de développement de services de transport.
Dans le cas de la Société nationale des chemins de fer français, nous sommes confrontés à une situation particulièrement critique.
D'une part, la société nationale a dû, dans le cadre de la mise en oeuvre du réseau à grande vitesse, consentir des investissements particulièrement importants, et ce d'autant plus que la loi Pasqua relative à l'aménagement et au développement du territoire fait de l'achèvement de ces liaisons l'une des priorités de la politique nationale d'aménagement du territoire à l'horizon 2015.
Elle les a mis en oeuvre dans un environnement financier qui, de relativement favorable dans les années 1975-1985 du fait du niveau de l'inflation, s'est progressivement retourné dans le cadre de la désinflation et a renchéri le coût d'emprunts, lesquels - il convient de le rappeler - sont, d'une part, isolés - ils sont consentis ponctuellement opération après opération - et, d'autre part, sont non négociables.
Il convient dès lors de poser avec force la question du développement des investissements de la Société nationale des chemins de fer français dans le cadre d'un financement différencié du financement banalisé sur les marchés financiers.
On ne peut en effet oublier que la société nationale dispose d'un actif matériel, immobilier et foncier d'une valeur supérieure à 230 milliards de francs qu'il convient de renouveler, de moderniser autant que de besoin et d'étendre. Les missions de service public de la SNCF imposent la construction de nouvelles voies, la réalisation de nouvelles gares, la commande de nouvelles motrices et de nouvelles voitures, etc.
Nous proposons donc que la SNCF bénéficie, dans le cadre de l'émission de ses futurs emprunts obligataires, de la garantie de l'Etat, et que cette dernière soit caractérisée notamment par la fixation d'un taux d'intérêt nul sur les emprunts concernés.
Posons la question : ce qui est possible pour le logement en accession à la propriété avec le prêt Périssol pour un coût budgétaire de plus de 8 milliards de francs et un volume global d'émissions de prêts de 60 à 65 milliards de francs ne le serait-il pas pour la SNCF, dont le volume annuel d'émissions est de 15 à 20 milliards de francs ?
Autre question : pourquoi la SNCF ne bénéficierait-elle pas des conditions de financement particulièrement avantageuses accordées à la Deutsche Bahn, qui dispose aujourd'hui d'emprunts sans intérêt d'une durée de quinze à quarante années, ce qui devrait lui permettre, avec un territoire pourtant déjà largement couvert par le réseau et, par ailleurs, moins étendu que le territoire français, de faire face à ses obligations de développement du transport ferroviaire ?
L'amendement n° 72, texte de bon sens et de cohérence politique, vise à déconnecter pour partie le financement de la SNCF de la contrainte des marchés financiers, contrainte dont on sait aujourd'hui qu'elle est à la base de la variation de la tarification des prestations et de la remise en cause de leur consistance et de leur qualité.
C'est sous le bénéfice de ces observations que je vous invite à adopter cet amendement, mes chers collègues.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. François Gerbaud, rapporteur. Cet amendement est très intéressant, mais il est hors sujet : la gestion de la SNCF est autonome grâce à la LOTI, la loi d'orientation des transports intérieurs. N'empiétons pas sur l'exercice de ses responsabilités !
La commission émet donc un avis défavorable sur cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Pons, ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme. Monsieur le président, cet amendement n'est pas réaliste. Le Gouvernement y est donc défavorable.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 72.
M. Jean Chérioux. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Avant d'émettre mon vote, je voudrais poser une question à l'orateur : qui souscrira des titres ne présentant aucun intérêt, si ce n'est le pensionnaire d'un asile de fous ?
Avec cet amendement, vous poussez assez loin le bouchon en matière de propositions démagogiques ; c'est pourquoi je voterai contre ce texte.
M. Ivan Renar. C'est effectivement une loi anti-marché !
M. le président. Personne ne demande plus la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 72, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.) M. le président. Je suis saisi de deux amendements qui peuvent faire l'objet d'une discussion commune.
Par amendement n° 73, MM. Billard, Leyzour, Minetti et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - En 1997, l'Etat accorde à la Société nationale des chemins de fer français une aide équivalent au montant des déficits reportés constatés à la date de clôture du bilan de l'exercice 1996.
« II. - Les opérations menées sur les marchés monétaires sont soumises à une taxation égale à 1 p. 1000. »
Par amendement n° 74, MM. Billard, Leyzour, Minetti et les membres du groupe communiste républicain et citoyen proposent d'insérer, avant l'article 1er, un article additionnel ainsi rédigé :
« I. - Dans le cadre et sur la durée du contrat de plan Etat-SNCF, l'Etat accorde à la SNCF une aide équivalent au montant des déficits reportés constatés à la date de clôture du bilan de l'exercice 1996.
« II. - Le sixième alinéa de l'article 125-0A du code général des impôts est ainsi rédigé :
« d) A 5 % lorsque la durée du contrat est égale ou supérieure à six ans. »
La parole est à M. Leyzour, pour défendre l'amendement n° 73.
M. Félix Leyzour. La situation des comptes de la Société nationale des chemins de fer français soulève un certain nombre de questions fondamentales.
Il importe ici de rappeler que la détérioration de la situation financière de la SNCF provient de facteurs externes et internes.
Parmi les facteurs internes, soulignons une fois de plus le problème posé par les contraintes de financement des investissements, d'ailleurs particulièrement importants dans le contexte du développement des liaisons à grande vitesse, notamment de leur connexion avec les réseaux ferroviaires des autres pays européens, et la réduction spectaculaire des concours publics destinés à ces investissements, l'intervention de l'Etat étant majoritairement consacrée, depuis plusieurs années, à la prise en charge des retraites et à la prise en compte, d'ailleurs tout à fait légitime, des correctifs sociaux susceptibles de faciliter l'accès des usagers ou de certaines catégories d'usagers aux services rendus par la société nationale.
Parmi les facteurs externes, soulignons une fois encore les conséquences du retournement de tendance des marchés financiers aggravant lourdement le coût réel des emprunts contractés par l'établissement public et grevant sa capacité d'autofinancement. On doit d'ailleurs à une analyse plus complète de la situation de relever que ce retournement de tendance est relativement ancien puisque, depuis les exercices 1986 et 1987, le déficit de l'infrastructure est, dans les comptes de la société nationale, supérieur, parfois de plusieurs milliards de francs, au déficit comptable final de l'établissement public.
Mais il importe aussi de relever que les comptes de la société nationale ne traduisent pas, dans les faits, depuis de trop longues années, l'effort de l'établissement de l'Etat actionnaire, qui n'a procédé à aucune dotation en capital.
On nous dit d'ailleurs que l'Etat semble décidé, dans le cadre de la constitution de l'établissement public Réseau ferré national, à accorder à ce dernier une dotation de départ de quelque 8 milliards de francs. Mais si l'on regarde la situation des comptes de la société nationale, on observe que, fin 1995 - ce sont les derniers comptes publiés, à ma connaissance - les déficits cumulés de l'établissement public s'élevaient à 24,238 milliards de francs hors services annexes d'amortissement de la dette, et qu'ils devraient, compte tenu de la situation des comptes de la société nationale en 1996, friser ou dépasser les 55 milliards de francs au 31 décembre 1996.
Cette accumulation de déficit est pleinement liée aux coûts de développement des infrastructures, dont nous avons souligné qu'ils étaient particulièrement renchéris par le fait que l'essentiel de la dette obligataire est souscrit à taux fixe - nous y reviendrons - et que ces coûts pèsent sur les marges dégagées par l'exploitation des réseaux et entraînent qu'une part non négligeable des emprunts levés vient en fait faire face à des dépenses d'exploitation.
Toutes proportions gardées, la société nationale se retrouve dans la situation des comptes de l'Etat lui-même, et est donc contrainte de produire des arbitrages néfastes à la qualité du service rendu aux usagers.
Nous sommes donc confrontés à une situation particulièrement préoccupante, qui nécessite des réponses adaptées. L'Etat doit pleinement assumer son rôle d'actionnaire de la Société nationale des chemins de fer français et donc accorder à l'établissement des moyens financiers nouveaux.
Nous proposons, par l'amendement n° 73, que les 50 ou 55 milliards de francs de déficit cumulé que représente aujourd'hui le bilan de la société nationale, soit environ l'équivalent de son chiffre d'affaires propre, soient repris en charge par l'Etat. Cela permettra de participer au redressement de la situation financière réelle de la société, qui est aujourd'hui contrainte d'emprunter pour supporter les conséquences de ce déficit reporté.
De plus, cette situation particulière du déficit reporté sera, en quelque sorte, représentative des engagements que l'Etat s'était, dans un premier temps, promis de tenir, lors de la présentation du contrat de plan, finalement abandonné après la lutte des cheminots des mois de novembre et de décembre 1995.
Monsieur le ministre, je vous rappelle que, à l'époque, vous n'aviez pas exclu que l'Etat mette sur la table quelque 37,5 milliards de francs, qui, me semble-t-il, ont disparu du présent projet de loi.
Je vous demande donc, mes chers collègues, d'adopter l'amendement que je viens de présenter. Il porte sur des questions de fond qui mériteraient d'être approfondies.
A ce sujet, je voudrais...
M. le président. Il va vous falloir conclure, mon cher collègue !
M. Félix Leyzour. J'en arrive à ma conclusion, monsieur le président.
M. le président. Je le souhaite !
M. Félix Leyzour. Je voudrais souligner, disais-je, que la demande formulée par mon collègue M. Minetti tendant au renvoi du texte à la commission n'était pas du tout une attaque contre le travail effectué par ses membres, par son président et par son rapporteur, mais que la commission aurait dû également, comme nous l'avions demandé, entendre les organisations syndicales pour approfondir toutes ces questions.
M. le président. Mon cher collègue, il vous faut vraiment conclure, maintenant !
M. Félix Leyzour. Monsieur le président, je n'avais pu donner tout à l'heure une explication que, s'agissant des rapports entre les hommes, vous me permettrez sans doute de présenter.
M. le président. Cette fois-ci, mon cher collègue, je ne vous le permets plus ! Je suis obligé de vous prier de conclure dans l'instant, sinon, je vous coupe la parole.
M. Félix Leyzour. Le débat, qui a été décalé dans le temps, aurait permis l'audition des syndicats. Mais ce n'est pas le travail, je le disais,...
M. le président. Monsieur Leyzour, je suis obligé de vous retirer la parole. Je suis désolé, mais vous dépassez vraiment trop le temps qui vous est imparti.
M. Félix Leyzour. Je regrette que, compte tenu des bonnes relations qui existent au sein de la commission, vous ne me permettiez pas de dire à mes collègues que...
M. le président. Vraiment, cette fois-ci, vous abusez ! Quelle que soit la compréhension que je peux avoir pour vos sentiments, je ne peux pas vous laisser poursuivre.
Je donne donc la parole à M. Billard, pour présenter l'amendement n° 74.
M. Claude Billard. Cet amendement, qui porte sur la question du déficit cumulé de la Société nationale des chemins de fer français, doit être considéré comme un amendement de repli par rapport à celui que nous venons de défendre sur la reprise intégrale, dès 1997, de ce déficit cumulé par l'Etat, dans le cadre de ses obligations d'actionnaire.
L'une des conséquences principales du mouvement social de novembre et de décembre 1995 a été, pour la société nationale, l'abandon du projet de contrat de plan tel qu'il avait été défini sous la responsabilité de M. Bergougnoux.
Il n'en demeure pas moins qu'il apparaît indispensable qu'une telle procédure contractuelle soit aujourd'hui mise en débat, discutée avec l'ensemble des parties concernées, à commencer par les salariés de la SNCF, ceux des filiales, les usagers, mais aussi avec les élus locaux et les populations, qui attendent légitimement du service public de transport ferroviaire qu'il participe à l'amélioration de leurs conditions de vie.
Ce contrat de plan doit comporter des engagements précis de l'Etat au regard de ses obligations d'actionnaire envers la SNCF.
Livrée en effet à elle-même par la logique de l'autofinancement et de l'autonomie de gestion, la société nationale se trouve aujourd'hui confrontée à des difficultés financières majeures qui nécessitent des dispositions particulières et novatrices.
Il faut en effet la doter des moyens lui permettant d'assumer pleinement sa double mission, à savoir, d'une part, développer les infrastructures ferroviaires et, d'autre part, assurer l'exploitation optimale de ces infrastructures.
Chacun aura ici perçu que nous nous plaçons dans la perspective clairement définie d'une unicité des deux missions, unicité que le projet de loi met, à notre sens - et nous aurons encore l'occasion de le souligner dans ce débat - à mal, ouvrant la porte à des difficultés techniques et financières encore plus aiguës dans les années à venir.
Nous souhaitons donc que l'Etat s'engage, sur la durée du contrat de plan, notamment dans le cadre du service annexe d'amortissement de la dette, au besoin, à apurer le déficit cumulé de la société nationale, ce qui correspondrait, compte tenu des données de l'exercice 1996, à un engagement ferme de quelque 8 milliards de francs de dotation annuelle.
Nous avons déjà souligné l'économie que cette solution de refinancement permettrait de dégager pour l'entreprise publique, attendu qu'une part non négligeable des emprunts levés par la société nationale a pour objet de faire face à ce besoin de fonds de roulement constamment majoré du poids des déficits cumulés.
Chacun mesure ici l'effort accompli par la société nationale pour faire face à ses missions et chacun sait aussi que l'Etat n'a pas, dans la dernière période, accordé à la société les moyens réels de son renforcement.
L'effort demandé à la collectivité publique est-il trop important ?
Il importe donc, dans ce cadre, de poser quelques questions de fond.
Nous avons indiqué que l'Etat était disposé à mettre 8 milliards de francs dans la capitalisation de Réseau ferré national, afin de donner à ce nouvel établissement public les moyens de commencer son activité.
Il nous faut, cependant, souligner aussi que l'établissement sera, de façon structurelle et sans doute durable - sauf correction de sa politique de redevance qui fera exploser, selon toute vraisemblance, la fragile construction que le projet de loi nous propose - en situation de déficit chronique.
Les éléments à notre disposition, que nous nous permettrons de développer plus amplement par ailleurs, soulignent en effet que le niveau des produits de RFN se situera, grosso modo, et sauf utilisation de l'ensemble des outils de l'ingénierie financière que nous proposons par ailleurs de mobiliser, aux alentours de 60 % de ses charges.
Le différentiel sera situé, par conséquent, à un niveau d'environ 12 à 13 milliards de francs d'insuffisance de ressources, soit à peu près le déficit d'infrastructure connu aujourd'hui par la SNCF.
Posons la question, monsieur le ministre : comment s'y prendra-t-on pour couvrir le déficit, attendu que l'on ne pourra en toute objectivité le couvrir uniquement avec des ressources levées sur les marchés, c'est-à-dire des emprunts ? A ce sujet, un journal spécialisé annonçait ce matin que la SNCF allait lancer un emprunt euro-obligataire de 250 millions de dollars !
L'Etat ne sera-t-il pas amené à ajouter une contribution à l'assainissement des comptes de Réseau ferré national, après avoir feint de résoudre, dans le cadre de ce projet de loi, le problème des comptes de la société nationale ?
Autant gagner, par conséquent, un peu de temps et clarifier d'entrée les relations entre l'Etat et la société nationale en procédant, ainsi que nous le proposons, à l'apurement du déficit cumulé de la SNCF au travers d'une convention pluriannuelle de financement incluse dans le cadre du contrat de plan.
C'est le sens de cet amendement, que nous vous invitons à adopter.
M. le président. Quel est l'avis de la commission sur les amendements n°s 73 et 74 ?
M. François Gerbaud, rapporteur. Ces amendements sont généreux, mais ils relèvent de la stratégie du : « On efface tout sans nuance. »
Cette stratégie, vous le savez, comporte bien des inconvénients, car elle risque de creuser mécaniquement le déficit du budget si l'on alourdit la taxation des opérations sur le marché monétaire.
La commission est donc défavorable à ces deux amendements.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Bernard Pons, ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme. Le Gouvernement est également défavorable à ces deux amendements. Le problème des déficits antérieurs de la sécurité sociale...
M. Jean-Luc Mélenchon. Ah ! joli lapsus !
M. Bernard Pons, ministre de l'équipement, du logement, des transports et du tourisme. ... de la SNCF, voulais-je dire, est traité par la reprise de dette à hauteur de 134,2 milliards de francs.
M. le président. Je vais mettre aux voix l'amendement n° 73.
M. Guy Cabanel. Je demande la parole contre l'amendement.
M. le président. La parole est à M. Cabanel.
M. Guy Cabanel. Je voudrais qu'aucun malentendu ne subsiste entre nous : Mme Luc, citant M. Hérisson et moi-même, a dit tout à l'heure que nous nous étions interrogés sur le montage financier. Je tiens à dire publiquement que les réponses de M. le ministre m'ont donné satisfaction et que les éclaircissements qu'ils nous a fournis sont suffisants.
Cet amendement compliquerait encore les choses et il ne faut pas retarder la mise en oeuvre du projet.
Mme Marie-Claude Beaudeau. Voilà qui lève toute ambiguïté !
M. Jean-Luc Mélenchon. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Mélenchon.
M. Jean-Luc Mélenchon. Cet amendement présenté par nos collègues communistes est destiné, nous pouvons le deviner, à éclairer les aspects de notre débat pour valoir ce que de droit auprès des personnes concernées.
Le premier alinéa de cet amendement constitue, en quelque sorte, le coeur de ce qui nous oppose s'agissant de la stratégie à mettre en place.
Qui récupère la dette ? Vous l'attribuez à RFN ; nous pensons, nous, à gauche, que c'est à l'Etat de l'assumer.
Qu'est-ce qui s'y oppose vraiment ? Un intérêt de gestion, bien sûr, dans votre esprit, mais aussi et surtout le fait qu'il faut entrer dans les critères de Maastricht concernant la dette publique et, là, la pression est maximale sur les Français.
Nous, socialistes, pensons que le passage à la monnaie unique et l'application des critères de Maastricht devront relever d'une interprétation politique, et qu'en toute hypothèse cela ne saurait se faire, en tout cas de notre point de vue, que si quatre conditions sont observées, que je ne vais pas récapituler en cet instant puisque une explication de vote ne permet pas un développement aussi long.
Par conséquent, nous n'avons pas d'objection sur ce point et voter cette partie de l'amendement est conforme aux positions politiques qu'assume le parti socialiste.
Le second point de cet amendement concerne la taxation des opérations menées sur le marché monétaire.
Il faudra bien y venir un jour, car c'est cette fluidité du marché monétaire qui est l'ennemi juré de la régulation citoyenne et politique et du droit des Etats-nations, des Etats fédérés ou des instances politiques continentales à maîtriser l'arme monétaire et, par-delà, l'arme budgétaire.
Le chiffre de un pour mille, qui est avancé ici, correspond à la proposition du prix Nobel James Tobin, et le parti socialiste, par la voix de Lionel Jospin, lors de l'élection présidentielle, avait proposé que cette taxation soit mise en place.
Naturellement, nous savons très bien qu'elle ne pourrait trouver sa pleine efficacité qu'à la condition de donner lieu à un dispositif communautaire définissant un périmètre à l'intérieur duquel cette taxation a lieu.
Cependant, nous croyons utile, et non contradictoire par rapport à nos déclarations sur ce sujet, de rappeler ce principe et cette bonne idée qui, un jour ou l'autre, devront entrer en application.
M. Félix Leyzour. Je demande la parole pour explication de vote.
M. le président. La parole est à M. Leyzour.
M. Félix Leyzour. Comme je n'ai pu le faire tout à l'heure, je souhaite lever toute ambiguïté sur la manière dont le débat a eu lieu en commission.
En défendant notre motion tendant au renvoi à la commission, nous ne nous en prenions ni à son rapporteur ni à son président !
D'une façon générale, nous participons, comme tous nos collègues, aux travaux de la commission en respectant ceux qui conduisent ses débats et ceux qui y prennent part. Si nous avons insisté, ce n'était pas parce que nous avions des doutes par rapport à M. le rapporteur, mais parce que nous pensions que, sur un sujet aussi important que celui-là - et tous les arguments qui viennent d'être développés le montrent - il aurait été intéressant de connaître l'analyse des syndicats.
C'était le sens de notre démarche et le présent débat prouve que nous n'avions sans doute pas tort.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 73, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 74, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 1er