M. le président. Par amendement n° 43, Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent d'insérer, avant l'article 9, un article additionnel ainsi rédigé :
« Il est inséré, après l'article L. 620-7 du code du travail, un article additionnel ainsi rédigé :
« Art. ... - Sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées, l'autorité administrative compétente peut refuser les aides publiques à l'emploi ou à la formation professionnelle à toute personne ayant commis une infraction délictuelle aux dispositions du droit du travail. »
La parole est à M. Debarge.
M. Marcel Debarge. Cet amendement, dont l'objet peut sembler excéder quelque peu celui du présent projet de loi, concerne les aides à l'emploi ou les dispositifs qui sont considérés comme tels, qui peuvent constituer parfois un véritable pactole et alimenter les controverses.
Nous connaissons tous - cela est d'ailleurs rappelé dans un rapport de l'Assemblée nationale, même si nous ne souscrivons pas à toutes ses conclusions - l'importance des effets d'aubaine et la formidable déperdition due à l'attribution d'aides qui n'aboutissent qu'à subventionner des emplois précaires. Je n'insisterai donc pas sur ce point.
Par notre amendement, nous demandons que la possibilité pour l'administration de refuser une aide à l'emploi ou à la formation professionnelle soit étendue, au-delà des cas d'infraction en matière de travail clandestin, à tous les auteurs d'infraction délictuelle en matière de droit du travail. En effet, il n'est pas normal qu'un employeur qui aura, par exemple, commis une infraction ayant provoqué un accident du travail puisse bénéficier ensuite d'une aide de l'Etat.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission est défavorable à l'amendement n° 43.
En visant l'ensemble des infractions au code du travail, cet amendement dépasse très largement l'objet du présent projet de loi.
J'ajoute que, très souvent, le juge peut prescrire le remboursement des aides publiques à titre de peine complémentaire. La commission ne voit donc pas l'utilité de cet amendement.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. L'objet de ce texte, monsieur Debarge, est précisément d'instaurer une très grande fermeté en matière de répression du travail clandestin. Ne mélangeons donc pas les choses, parce que nous atténuerions la portée de ce dispositif.
En outre, la complexité de la mise en oeuvre de la mesure proposée se retournerait, dans certains cas, contre des salariés qui travaillent sous contrat d'apprentissage ou de qualification.
Tenons-nous-en donc à cette interdiction de l'attribution de toute aide publique à ceux qui, directement ou non, ont eu recours au travail clandestin ; l'extension proposée ne me paraît ni possible ni souhaitable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 43, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)

Article 9

M. le président. « Art. 9. - Il est inséré, au chapitre IV du titre II du livre III du code du travail, un article L. 324-13-2 ainsi rédigé :
« Art. L. 324-13-2 . - Lorsque l'un des agents de contrôle mentionnés à l'article L. 324-12 a constaté par procès-verbal l'existence d'une infraction définie aux articles L. 324-9 et L. 324-10 ainsi qu'aux articles L. 125-1 et L. 125-3, l'autorité administrative compétente, eu égard à la gravité des faits constatés, à la nature des aides sollicitées et à l'avantage qu'elles procurent à l'employeur, peut, pendant une durée maximale de cinq ans, refuser d'accorder les aides publiques à l'emploi ou à la formation professionnelle mentionnées par décret à la personne physique ou morale ayant fait l'objet de cette verbalisation, sans préjudice des poursuites judiciaires qui pourront être engagées. Elle peut également, dans les mêmes conditions, en suspendre le versement. »
Par amendement n° 44, Mme Dieulangard et les membres du groupe socialiste et apparentés proposent, dans la première phrase du texte présenté par cet article pour l'article L. 324-13-2 du code du travail, après les mots : « par procès-verbal », d'insérer les mots : « ou mise en demeure ».
La parole est à M. Debarge.
M. Marcel Debarge. L'intervention de l'inspection du travail aboutit le plus souvent non pas à un procès-verbal, mais à des observations ou à une mise en demeure, qui relèvent l'existence d'infractions dont l'employeur s'engagera à supprimer les causes dans les meilleurs délais. Il paraît donc opportun d'envisager que cette procédure plus fréquente puisse entrer dans le champ considéré par l'administration pour refuser une aide.
M. le président. Quel est l'avis de la commission ?
M. Louis Souvet, rapporteur. La commission a émis un avis défavorable sur cet amendement. En effet, la mise en demeure a pour objet de permettre au contrevenant de régulariser sa situation. S'il le fait, il n'y a alors pas de raison de supprimer les aides.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Comme vient de le dire M. le rapporteur, par définition, on peut mettre quelqu'un en demeure de mettre en conformité une machine ; mais, en l'occurrence, l'amendement n° 44 ne me paraît pas souhaitable.
M. le président. Personne ne demande la parole ?...
Je mets aux voix l'amendement n° 44, repoussé par la commission et par le Gouvernement.

(L'amendement n'est pas adopté.)
M. le président. Par amendement n° 20, M. Souvet, au nom de la commission des affaires sociales, propose de supprimer la dernière phrase du texte présenté par l'article 9 pour l'article L. 324-13-2 à insérer dans le code du travail.
La parole est à M. le rapporteur.
M. Louis Souvet, rapporteur. Il n'est pas opportun de supprimer une aide à l'emploi octroyée, même si un procès-verbal pour infraction à la législation relative au travail dissimulé est dressé par la suite. En effet, dans une entreprise, on trouve aussi des jeunes en contrat de qualification ou en contrat d'apprentissage, des personnes en contrat initiative-emploi, etc. Ces personnes-là seraient également sanctionnées en cas de suspension des aides, qui ne me paraît pas normal.
M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?
M. Jacques Barrot, ministre du travail et des affaires sociales. Le Gouvernement a déjà argumenté dans le sens de M. le rapporteur, à l'Assemblée nationale. Dieu sait si je tiens, personnellement, à la disposition consistant à interdire l'accès aux aides publiques à toutes les entreprises qui ont été impliquées dans une affaire de travail clandestin !
Mais interrompre une aide qui a été accordée serait absurde. Vous avez d'ailleurs donné un bon exemple, monsieur le rapporteur. J'ai en effet dû intervenir récemment dans une affaire : l'administration voulait supprimer l'aide déjà accordée en matière de contrat de qualification à une entreprise devant faire l'objet d'une mise en demeure. Pour ma part, je n'ai pas voulu sanctionner le jeune à la place de l'entreprise.
Par conséquent, le Sénat a raison : si la sévérité doit être absolue en la matière, il faut cependant tenir compte du fait que, lorsqu'un contrat a été passé, finalement au profit du salarié, l'application immédiate du dispositif aboutirait à pénaliser non pas seulement l'employeur de main-d'oeuvre clandestine, mais également la personne qui a obtenue l'aide.
A la limite, la meilleure punition consiste à demander à l'entreprise de poursuivre ce contrat quoi qu'il arrive. C'est la raison pour laquelle le Gouvernement émet un avis favorable sur l'amendement n° 20.
M. le président. Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'amendement n° 20, accepté par le Gouvernement.

(L'amendement est adopté.)
M. le président. Personne ne demande la parole ? ...
Je mets aux voix l'article 9, ainsi modifié.

(L'article 9 est adopté.)

Articles additionnels après l'article 9