M. le président. La séance est reprise.
Nous poursuivons l'examen des dispositions du projet de loi de finances pour 1997 concernant la sécurité.
J'indique au Sénat que, compte tenu de l'organisation du débat décidée par la conférence des présidents, les temps de parole dont disposent les groupes pour cette discussion sont les suivants :
Groupe du Rassemblement pour la République, 31 minutes ;
Groupe socialiste, 18 minutes ;
Groupe de l'Union centriste, 13 minutes ;
Groupe des Républicains et Indépendants, 15 minutes ;
Groupe communiste républicain et citoyen, 5 minutes.
La parole est à M. Hyest.
M. Jean-Jacques Hyest. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, après les excellents rapports de MM. Cabanel, Masson et Laurin, qui, pour être synthétiques, n'en étaient pas moins très précis - ce qui prouve qu'on n'est pas obligé de parler très longtemps pour bien parler - je voudrais souligner les modifications importantes qui ont concerné la police depuis deux ans.
C'est, d'abord, la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité de janvier 1995, qui, pour la première fois, définit un cadre à moyen terme pour la politique de sécurité et recense les moyens correspondants nécessaires. J'aurai, bien entendu, l'occasion d'y revenir.
C'est également, depuis le printemps 1995, la réforme des corps et des carrières, qui, conjuguée au règlement général d'emploi de juillet 1996, modifie en profondeur le cadre et les modalités de l'action au quotidien de la police.
Monsieur le ministre, l'ancienne école des inspecteurs de la police nationale étant située dans mon département, je peux attester que la fusion des corps se déroule dans de bonnes conditions et que la nouvelle formation des lieutenants et des capitaines de police répond tout à fait à vos préoccupations, et surtout aux préoccupations de ceux qui sont désormais appelés à être les cadres de la police nationale.
Je tiens aussi à rappeler les efforts qui ont été faits en matière d'équipement.
Si les crédits de paiement affectés à l'équipement mobilier lourd de la police nationale régressent de 110 millions de francs à 75 millions de francs, il ne faut pas pour autant oublier que 1995 et 1996 ont été deux années de fort rattrapage, notamment pour le parc automobile.
De même, en termes d'efficacité - M. Masson a insisté tout à l'heure sur ce point - malgré un sentiment d'insécurité persistant, il ne faut pas oublier que la police nationale a géré, en 1995, 3,6 millions d'infractions, ainsi que l'entrée et la sortie de 84 millions d'étrangers.
De plus, on constate une baisse statistique sensible de la criminalité depuis deux ans. Cette baisse est en effet de 6,47 % et dépasse l'objectif de 5 % assigné en juin 1995 par le Premier ministre.
Les efforts sont donc réels, et il est dommage qu'au niveau de la perception il y ait un si grand décalage, la montée du sentiment d'insécurité s'observant aussi bien en ville que dans les campagnes.
Comme l'a fort bien noté M. Masson, beaucoup d'infractions de proximité, telles que les violences contre les personnes et les dégradations des biens privés, connaissent une forte progression. Or c'est ce type d'infractions qui, parce qu'elles touchent les gens au quotidien, entretiennent un sentiment diffus d'insécurité.
Reste, bien entendu, un grave sujet de préoccupation, cause de multidélinquances : la drogue. Je ne pense pas que, dans ce domaine, les dernières statistiques connues soient aussi bonnes, car on constate une diminution des saisies et, bizarrement d'ailleurs, du nombre des infractions relevées, ce qui est extrêmement préoccupant.
On ne peut pas non plus être aussi optimiste concernant les perspectives pour l'année 1997.
En effet, s'agissant de la police nationale, on constate indéniablement qu'une pause est marquée. D'abord, les crédits sont quasiment stabilisés, avec près de 28 milliards de francs, soit une diminution de 0,3 % par rapport à 1996. Ensuite, l'objectif quinquennal fixé par la loi d'orientation et de programmation du 21 janvier 1995 ne pourra être atteint.
L'amélioration de la productivité de la police nationale par la création de 5 000 emplois administratifs, scientifiques et techniques, pour décharger les personnels actifs de tâches qui les détournent de leurs véritables missions, et par la fourniture de moyens informatiques et de transmission plus performants en est donc retardée, comme le démontrent les données du budget.
En effet, seuls 700 emplois administratifs, scientifiques et techniques ont été budgétés en 1996 et, pour 1997, on prévoit même une suppression d'emplois. Ce n'est pas ce qui était prévu dans la loi de programmation !
Ainsi, l'objectif de rendre les policiers à leurs tâches en recrutant des agents administratifs, scientifiques et techniques ne pourra pas être atteint cette année. Même si je comprends parfaitement les raisons de ce retard, cela signifie que l'on n'ira pas aussi vite que ce qui avait été prévu, alors que c'est pourtant une nécessité.
Ce sont donc 500 emplois de policiers auxiliaires qui vont disparaître et, à ce propos, je m'interroge non sur l'aspect budgétaire de cette mesure, qui correspond en fait à un ajustement à la réalité, mais plutôt - le rapporteur de la commission des finances y a fait allusion - sur l'avenir des policiers auxiliaires, maintenant que le service national repose sur le volontariat. C'est là une préoccupation d'autant plus grande que les policiers auxiliaires ont rempli des tâches tout à fait utiles pour la police nationale.
Le projet de loi sur le service national n'est pas fait pour me rassurer, car, s'il est vrai qu'il y aura encore des volontaires - ceux qui se destineront à une carrière dans la police - leur nombre sera-t-il aussi important quand il n'y aura plus d'obligation de service national ? Mon inquiétude est la même pour la gendarmerie et les unités d'instruction de la sécurité civile, dont j'ai parlé tout à l'heure. En effet, faire reposer le recrutement de ces auxilaires sur le seul volontariat me paraît poser des problèmes, sauf à les rémunérer dans des conditions suffisantes, ce qui n'est pas prévu dans le budget pour 1997.
S'agissant du système de communication numérique crypté, donc inviolable, l'achèvement de sa généralisation n'est plus daté. Cela sous-entend le maintien en service d'instruments de transmission obsolètes qui coûtent de plus en plus cher. Je sais que, dans les domaines informatiques et de transmission, il n'est pas facile de mettre au point des dispositifs efficaces et qu'il ne faut surtout pas se tromper dans les choix technologiques. Tout retard en matière de communication moderne ne peut que nuire à l'efficacité de la police.
Enfin, monsieur le ministre, j'en viens à un sujet qui vous préoccupe et pour lequel vous avez engagé une réforme : les conditions de travail des policiers, qui restent alarmants, voire inacceptables.
La question des suicides est d'ailleurs souvent évoquée dans la police. C'est une réalité. Certains cherchent des causes très compliquées. Ces suicides sont, en fait, bien souvent, la conséquence des conditions de travail des policiers, d'où l'importance du programme que vous avez affecté au logement pour que les policiers aient de meilleures conditions de vie familiale ; il est évident qu'il faut continuer dans ce sens. Je me réjouis que dans le budget pour 1997, malgré les difficultés, l'effort soit maintenu dans ce domaine.
Je ne peux, monsieur le ministre, que soutenir les actions que vous entreprenez pour changer les conditions de travail. Malgré les traditions, que je ne comprends pas très bien d'ailleurs, ou les résistances de certains syndicats, qui ne veulent rien changer dans ce domaine, il est extrêmement important que cette réforme destinée à donner aux policiers des conditions de travail acceptables aboutisse.
Les conflits sociaux que nous connaissons le prouvent : l'éloignement prolongé de la famille et les horaires complètement décalés désorganisent, perturbent psychologiquement ceux qui y sont soumis. Il faut changer les choses ; c'est très important pour le moral des policiers.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Jean-Jacques Hyest. Bien entendu, et vous vous y attachez, il faut insister encore sur la formation, notamment des policiers au premier échelon, en prenant mieux en compte les aptitudes psychologiques que suppose ce métier.
Il faut encore faire un effort dans ce domaine, car un Etat ne peut se permettre de négliger une de ses fonctions, la sécurité intérieure, sans remettre en cause l'ensemble du fonctionnement de la société.
Mais il est vrai aussi que les Français - et ils le savent - ne peuvent pas se passer de la police nationale et que, sans vouloir engager une polémique inutile, ils lui doivent le respect que mérite cette fonction essentielle de l'Etat.
M. Emmanuel Hamel. Très bien !
M. Jean-Jacques Hyest. En résumé, monsieur le ministre, si la police lutte efficacement contre la délinquance et l'immigration clandestine - j'en veux pour preuve le démantèlement des ateliers clandestins, l'organisation d'opérations de reconduite groupées et la création d'un nouvel office central, - elle a simplement besoin de moyens plus performants, voire d'une plus grande souplesse de gestion afin de faciliter la mise en oeuvre d'une action plus efficace, et donc plus crédible.
On a aussi le droit d'exiger de la police qu'elle ait une attitude toujours correcte. Les comportements individuels qui ne le seraient pas - il peut en exister, comme dans tout corps social - doivent être sanctionnés. Il n'empêche que, comme l'a dit l'un des rapporteurs, le Parlement doit apporter son soutien à l'action difficile et dangereuse de la police, comme de la gendarmerie, qui exerce les mêmes fonctions dans les campagnes.
Dans le domaine de la sécurité civile, le budget échappe aux rigueurs budgétaires, puisqu'il progresse de plus de 2 %. Cette progression est essentiellement due à la poursuite du programme des Canadair. Nous sommes heureux que la dotation soit enfin à la hauteur de ce qui était prévu depuis de longues années. La modernisation du parc des Canadair est une bonne chose, de même que l'achèvement du programme de remotorisation des Tracker.
S'agissant de la modernisation du parc des hélicoptères, évoquée par M. Laurin, je me permettrai d'avoir un avis légèrement divergent sur le plan technique : je ne crois pas aux hélicoptères porteurs d'eau, sauf peut-être pour les départs de feu. Mais les tâches ne manquent pas pour ces appareils de la sécurité civile en matière de transport de personnes. Ils sont notamment nécessaires en cas de catastrophe.
Toutefois, monsieur le ministre, je ne voudrais pas que le budget de la sécurité civile ne soit, comme d'habitude, qu'un budget de lutte contre les incendies de forêt du Midi.
Vous savez très bien que la sécurité civile en France repose largement sur les collectivités territoriales. M. Laurin a évoqué largement les lois qui ont été votées par le Parlement, à la fois sur l'organisation des services d'incendie dans les départements et sur le volontariat. Je ne reviendrai pas sur ce qu'il a dit concernant les décrets d'application en attente.
Il faut faire vite, monsieur le ministre. En effet, le vote d'une loi crée une dynamique pour les collectivités locales ; si on tarde à la faire appliquer, le sentiment de nécessité retombe un peu.
En l'occurrence, un certain nombre de collectivités locales réticentes avaient fini par se convaincre de l'opportunité de cette nouvelle organisation des services d'incendie ; aussi, ne tardez pas trop, faites en sorte que la plupart des décrets soient publiés rapidement pour que la loi entre effectivement en application.
Il en va de même, bien entendu, pour les lois relatives aux sapeurs-pompiers volontaires. Ces derniers se sont réjouis de leur adoption, mais, maintenant, il est souhaitable que leur mise en oeuvre intervienne rapidement.
Monsieur le ministre, permettez-moi d'évoquer un dernier point.
Dans le domaine de la sécurité, comme dans d'autres d'ailleurs, les collectivités locales souhaitent que l'on ne change pas les règlements tous les jours, que l'on fasse preuve d'imagination. Cela a un coût pour chacun et ce n'est pas parce que certains n'ont pas fait leur métier qu'on doit édicter de nouvelles réglementations pour tous !
Sous le bénéfice de ces observations, le groupe de l'Union centriste votera bien volontiers les crédits de la sécurité. (Applaudissements sur les travées de l'Union centriste, du RPR, et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Chérioux.
M. Jean Chérioux. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, je limiterai mon intervention à un problème qui me tient particulièrement à coeur en tant qu'élu de Paris - je pense que tous les élus parisiens partagent mon sentiment, à savoir la situation de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris.
Ce corps - monsieur le ministre, je ne vous apprendrai rien - non seulement assure la sécurité des quelque dix millions de personnes qui vivent ou se déplacent à Paris et dans les départements des Hauts-de-Seine, de Seine-Saint-Denis et du Val-de-Marne, mais accomplit également des missions universellement reconnues qui vont bien au-delà, puisque les sapeurs-pompiers de Paris interviennent très souvent à l'étranger et disposent d'un centre de formation pour l'ensemble des pompiers de France.
La remarquable capacité opérationnelle de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris, son expérience, le dévouement de ses hommes, qui ont choisi de servir les autres dans les moments de grande difficulté, méritent qu'on leur rende un hommage appuyé et que les pouvoirs publics leur permettent de continuer leur mission, dans les années à venir, dans les meilleures conditions.
Or, la brigade des sapeurs-pompiers de Paris se trouve confrontée à deux problèmes importants.
Tout d'abord, le nombre de ses interventions est en constante augmentation. Ainsi, en 1968, pour un effectif de 5 549 personnes, le nombre des interventions s'est élevé à 50 000. En 1994, les 6 851 militaires de la brigade ont dû effectuer 353 000 interventions. Les conditions de travail sont dures, la durée hebdomadaire de travail des sapeurs-pompiers est souvent de plus de quatre-vingts heures. C'est dire le dévouement dont ils font preuve ! Il est par conséquent nécessaire de maintenir, voire d'augmenter, les effectifs.
De plus, la réforme du service national va avoir des conséquences immédiates sur les effectifs eux-mêmes et sur le coût de fonctionnement de la brigade des sapeurs-pompiers.
Aujourd'hui, 20 % du personnel est constitué d'appelés, ce qui représente 1 200 hommes. La restructuration des forces armées va, bien entendu, entraîner une nouvelle méthode de recrutement.
Quelle que soit la méthode choisie - professionnalisation, appel au volontariat - les incidences budgétaires de cette restructuration sont importantes et inéluctables.
Une première phase de recrutement devra en effet intervenir dès 1997, afin que la répercussion financière de la réforme soit étalée sur plusieurs années.
Il en est de même pour le repyramidage - je n'aime pas beaucoup ce terme, mais c'est, paraît-il, le terme consacré - c'est-à-dire la transformation des postes d'appelés de haut niveau en postes d'officier et sous-officier, et l'augmentation du taux de gradés, qui est actuellement de 35 %, c'est-à-dire un seuil très inférieur au taux moyen de l'armée de terre.
Par ailleurs, des dépenses vont intervenir immédiatement. Ainsi, la solde forfaitaire qui était versée aux militaires du rang sous contrat pendant la durée légale de dix mois du service national sera remplacée par la solde spéciale progressive attribuée aux caporaux et aux sapeurs servant au-delà de cette durée légale d'un coût largement supérieur.
Il est donc tout à fait indispensable de prévoir, à l'occasion de ce débat budgétaire, l'enveloppe financière qui permettra d'obtenir une répartition cohérente sur quatre ou cinq ans du surcoût budgétaire entraîné par la restructuration des forces armées, laquelle doit être assurée par l'Etat et non pas par les collectivités locales.
Compte tenu de l'importance de l'enjeu, monsieur le ministre, je voudrais que vous nous donniez l'assurance que la brigade des sapeurs-pompiers bénéficiera des moyens nécessaires pour faire face, comme elle l'a toujours fait, dans l'urgence, aux catastrophes et aux détresses d'une grande ville telle que Paris.
Il y va de la sécurité de la capitale et de la petite couronne, de leurs habitants et de ceux qui y travaillent, comme de la confiance et de la reconnaissance que les Français ont envers ceux qui leur viennent en aide, sans relâche et avec tant de dévouement, depuis si longtemps. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Rouquet.
M. René Rouquet. Monsieur le ministre, le débat sur le budget de la police intervient dans un contexte national particulièrement difficile, caractérisé par un accroissement du sentiment d'insécurité, qu'il s'agisse d'une insécurité morale, avec l'accroissement du chômage, la régression sociale et la hausse considérable de la pression fiscale, ou d'une insécurité physique, due au développement des phénomènes de violence et des atteintes répétées aux personnes et aux biens.
Loin de régresser, cette violence augmente dans les zones urbaines. Elle a gagné des domaines jusque-là préservés, comme les établissements scolaires ; elle se banalise, tout comme se banalisent les zones de non-droit, où la loi républicaine est bafouée.
Les collectivités territoriales sont de plus en plus sollicitées et multiplient les efforts de prévention avec des moyens qui diminuent. La population et les élus constatent le malaise qui grandit au sein des personnels de police, dont le découragement prend, trop souvent maintenant, une forme dramatique.
Plus que jamais, les policiers doivent être proches de la population, présents sur le terrain, parfaitement formés aux missions qui les attendent et disposer de moyens adaptés aux nouveaux défis lancés par la criminalité moderne.
Or, le projet de budget que vous nous proposez pour 1997 est en baisse, ce qui est alarmant au regard des besoins de la police et des attentes de la population dans le domaine de la sécurité.
A la lecture de votre budget, on ne peut que constater qu'il consacre l'abandon de la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité, tant on est loin des mesures qu'elle prévoyait, des financements et des délais qu'elle annonçait.
Votre projet de budget, monsieur le ministre, ne semble pas tenir compte de la réalité vécue quotidiennement par les Français. L'insécurité augmente, et vous diminuez les effectifs !
Cette situation est paradoxale. Vous ne pouvez espérer répondre aux besoins de sécurité des Français en supprimant 621 emplois et en repoussant, pour la quatrième année consécutive, la création de postes de titulaires, pourtant seuls garants d'une véritable professionnalisation de la police.
Les réductions d'effectifs prévues pour le corps des officiers et le corps des commissaires ne sont pas compensées par un recrutement supplémentaire de gardiens de la paix.
Elles entraîneront inévitablement un transfert de travail sur ces derniers et, par voie de conséquence, une diminution des policiers en tenue sur la voie publique.
Vous vous êtes fondé sur le fait que 500 postes de policiers auxiliaires prévus dans le budget pour 1996 n'avaient pas été pourvus pour les supprimer en 1997. Il est tout à fait regrettable de renoncer ainsi à la possibilité de recourir à un nombre supérieur de fonctionnaires dont les missions s'exerçaient au plus proche de la population.
Ce que l'on peut conclure de cette réduction des effectifs, c'est qu'elle est incompatible avec la mise en oeuvre d'une police de proximité, proche des citoyens. Elle marque aussi le renoncement à une police préventive, car, faute de moyens humains, elle devra se limiter à l'intervention et à la répression.
Cette insuffisance d'effectifs ne peut que favoriser la multiplication des sociétés de gardiennage, avec tous les risque que cela comporte. Elle aboutit, à terme, au transfert de nouvelles charges de l'Etat vers les collectivités territoriales en incitant à la création de polices municipales, qui alourdissent les budgets des communes et ne remplaceront jamais les fonctionnaires de la police nationale. Elle constitue, enfin, une remise en cause de la mission régalienne de l'Etat.
Il est par ailleurs tout à fait inquiétant de constater que la diminution des effectifs s'accompagne d'une réduction des crédits de formation.
Ces crédits, qui stagnaient depuis deux ans, sont en baisse de 7 % par rapport à l'année dernière. La dotation budgétaire pour l'école nationale de la police subit une importante diminution, alors que la dotation de l'institut des hautes études de sécurité intérieure régresse de 12 %.
Dans une société qui évolue, les policiers doivent savoir appréhender de nouvelles réalités sociales, de nouvelles formes de criminalité. Leur formation est seule garante de leur qualité et de leur efficacité. Ce dont les policiers ont besoin, c'est d'accroître leur professionnalisation, et donc leur formation !
Le souci d'économie qui prévaut dans votre budget, comme dans beaucoup d'autres, monsieur le ministre, concerne également les moyens mis à la disposition des fonctionnaires de police.
Comment la police peut-elle mener à bien sa mission alors que les crédits de fonctionnement régressent de 180 millions de francs ?
Comment espérer régler le problème de la vétusté des locaux alors que les crédits immobiliers accusent une nette diminution par rapport à 1996 ?
Relevons également que les moyens consacrés aux transmissions ne permettront pas de rattraper le retard accumulé dans la mise en place du réseau de transmission crypté ACROPOL, qui doit assurer l'inviolabilité des communications de la police. Il est, à ce titre, essentiel pour le bon fonctionnement de la police, l'efficacité et la sécurité des policiers.
Ce réseau devait être étendu à l'ensemble du territoire sur une période de sept ans. Nous sommes très loin de ces prévisions puisque, aujourd'hui, deux villes seulement sont équipées et que nul ne peut affirmer que le réseau ACROPOL sera opérationnel dans le département de la Seine-Saint-Denis pour la coupe du monde de football, en 1998.
Il reste, concernant l'évolution de la police nationale, de nombreux problèmes sur lesquels votre projet de budget n'apporte aucune perspective de solution.
C'est le cas pour les tâches indues de la police, qui continuent de mobiliser trop de policiers hors de leurs missions prioritaires.
C'est le cas pour l'allocation de service perçue par les commissaires au titre des vacations funéraires et d'assistance d'huissier : l'Etat ne parvient apparemment pas à collecter l'argent de ces vacations, ce qui alourdit d'autant la charge de trésorerie du ministère de l'intérieur. Monsieur le ministre, je réitérerai donc ici la question que vous a déjà posée Daniel Vaillant à l'Assemblée nationale : pouvez-vous nous dire pourquoi des sommes très importantes liées à ces vacations ne sont pas recouvrées par le ministère des finances ?
On peut également s'étonner que les CRS consacrent deux tiers de leur temps à des missions de sécurisation, ce qui se traduit par un surcoût élevé des frais de déplacement et de logement.
Par ailleurs, le partage actuel des responsabilités et des attributions entre la police et la gendarmerie soulève de nombreuses interrogations, car il ne s'intègre pas dans une politique globale de gestion des effectifs qui concourent à la sécurité.
Monsieur le ministre, pour répondre aux problèmes qui se posent aujourd'hui à notre pays dans le domaine de la sécurité, la police doit disposer de personnels suffisants, bien formés et bien équipés. Votre projet de budget ne permet pas d'avancer en ce sens. Aussi le groupe socialiste ne le votera-t-il pas.
M. Jean Chérioux. Quelle surprise ! C'est un scoop !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Et pendant quatorze ans, ils ont été au pouvoir ! Ils sont amnésiques !
M. le président. La parole est à M. Pagès.
M. Robert Calmejane. Qu'ont-ils fait pendant tout ce temps ? Rien !
M. André Rouvière. Et vous, que faites-vous ? Vous ne savez que vous tourner vers le passé !
M. le président. La parole est à M. Pagès, et à lui seul.
M. Robert Pagès. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, depuis plusieurs années, trop d'années, lors de la discussion du budget relatif à la sécurité, les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen commencent leur intervention par ce triste constat : l'insécurité se nourrit de la crise profonde de notre économie, de la dégradation importante du tissu social, des inégalités et des exclusions sociales grandissantes.
Et, selon nous, ce ne sont pas les orientations du gouvernement actuel qui vont atténuer la crise profonde que traverse notre pays. Le projet de loi de finances pour 1997, dans son ensemble, en est l'illustration flagrante, marqué qu'il est du sceau de Maastricht.
Votre projet de budget, monsieur le ministre, n'y échappe pas et ne peut donc répondre aux attentes de la population en matière de sécurité.
En effet, les critères exigés pour la réalisation de l'union économique et monétaire étant la « réduction des déficits publics » et la « compression drastique des dépenses publiques », on comprend les difficultés dans lesquelles se trouve votre ministère.
Ainsi, pour 1997, le budget géré par le ministère de l'intérieur, regroupant l'administration générale, l'administration territoriale, la sécurité civile et la police nationale, est en baisse de 0,3 % par rapport au budget voté de 1996.
S'agissant des effectifs, votre ministère comptait 137 459 agents en 1996. En 1997, ils ne seront plus que 136 839, soit une réduction de 621 agents. Comment peut-on penser un instant qu'il y a trop de fonctionnaires dans la police ?
En huit ans, ce sont plus de 1 000 fonctionnaires de la police urbaine qui ont disparu !
Depuis 1985, pour combler le manque criant de personnel, on a eu recours à des appelés du contingent. Si, au début, ces derniers ne représentaient qu'un apport complémentaire, ils sont devenus, au fil du temps, un élément essentiel de la police, alors qu'ils n'ont pas reçu de formation suffisante.
Et ce n'est pas la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité qui viendra pallier le manque d'effectifs puisque non seulement l'application du plan a été rééchelonnée mais le recrutement de 5 000 agents administratifs et techniques qui était prévu n'a pas reçu les crédits nécessaires à son financement.
M. Cabanel, rapporteur spécial, reconnaît lui-même dans son rapport écrit que « le projet de budget de la police nationale pour 1997 marque une pause dans la mise en oeuvre du volet programmation de la loi d'orientation du 21 janvier 1995 ».
Il note également : « Si le ministère de l'intérieur évoque, pour l'instant, un étalement sur une seule année supplémentaire, la nécessité de l'action du Gouvernement imposerait plutôt d'annoncer un échéancier sur sept ou huit exercices, tant les retards sont devenus manifestes. »
Voilà où en est votre plan quinquennal. Est-ce là votre conception de la sécurité publique, laquelle constitue pourtant une mission souveraine, inscrite dans la Constitution ?
Je regrette d'avoir à faire une nouvelle fois un tel constat cette année.
Outre que ce budget est insuffisant, nous n'avons aucune garantie quant à son exécution. Déjà, en 1996, est intervenu un gel de 5 % des crédits. Qu'en sera-t-il en 1997 ?
Le temps me manque pour traiter de la situation en Corse. J'évoquerai seulement l'inefficacité chronique de l'action gouvernementale pour y rétablir la sécurité et le respect des droits démocratiques. Nous attendons toujours l'engagement d'une action déterminée contre le terrorisme.
Je déplore, étant donné l'ampleur des problèmes, le fait que, cette année, mon groupe ne dispose que de cinq minutes pour intervenir sur un budget aussi déterminant pour les populations que celui de la sécurité. Les budgets ne sont pas les seuls à subir des réductions drastiques : les temps de parole, surtout ceux du groupe communiste républicain et citoyen, aussi !
Je devrai donc intervenir de nouveau lors de l'examen du titre III pour apporter quelques compléments, mais chacun aura d'ores et déjà compris que les sénateurs du groupe communiste républicain et citoyen voteront contre ce projet de budget. (Applaudissements sur les travées socialistes.)
M. le président. La parole est à M. Plasait.
M. Bernard Plasait. Monsieur le président, monsieur le ministre, mes chers collègues, « le but de toute association politique est la conservation des droits naturels et imprescriptibles de l'homme : ces droits sont la liberté, la propriété, la sûreté et la résistance à l'oppression ».
Ainsi, aux termes de l'article II de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen, la sécurité est un droit de l'homme, et le rôle fondamental de l'Etat est un rôle de protection du citoyen.
Et pourtant, un siècle plus tard, en 1905, un certain Eugène Villiod, détective, publiait un ouvrage au titre suggestif, Comment on nous vole, comment on nous tue, dans lequel on pouvait lire : « Une des caractéristiques de notre époque est la progression effrayante de la criminalité : il n'est pas de jour où les journaux n'enregistrent de nombreux et monstrueux attentats contre les personnes ou la propriété.
« Particularité plus navrante encore, ces forfaits sont généralement l'oeuvre de jeunes gens agissant non isolément. Aussi n'y a-t-il qu'une voix pour accuser l'insuffisance de la préservation sociale. L'audace toujours croissante des malfaiteurs, leur nombre chaque jour grandissant sont la meilleure preuve qu'elle ne répond pas aux nécessités d'une situation qui devient de plus en plus inquiétante. »
D'une actualité évidente avant 1993, ce propos devient chaque jour plus inexact grâce à la politique ambitieuse et courageuse que vous conduisez, monsieur le ministre, dans le droit-fil des orientations de votre prédécesseur.
En effet, dans la plupart des domaines, qu'il s'agisse de la délinquance, de la drogue, de l'immigration clandestine ou du terrorisme, vous avez obtenu, depuis dix-huit mois, de très bons résultats.
Les chiffres rappelés par notre collègue Paul Masson dans son excellent rapport l'attestent : 254 000 crimes ou délits de moins constatés en 1995, ce qui correspond à une diminution de la criminalité de 6,50 % par rapport à l'année précédente. Et les premières indications disponibles pour 1996 confirment cette tendance : sur les sept premiers mois de cette année, la diminution de la délinquance constatée dans la seule ville de Paris est de près de 10 %.
Néanmoins, je partage l'opinion exprimée par nos collègues de la commission des lois, qui ont souligné le décalage existant entre, d'un côté, des chiffres objectivement favorables et, de l'autre, la montée concomitante d'un sentiment d'insécurité, qui s'observe aussi bien dans les villes que dans les zones rurales.
Il est vrai que la narration de certaines mésaventures individuelles participe de cette atmosphère. Elu parisien, je ne peux qu'être inquiet devant le développement de nouvelles formes de piraterie de la route en milieu urbain. Un de mes administrés en a été récemment victime.
Après avoir été intercepté alors qu'il se trouvait dans sa voiture avec son épouse, il en a été extrait, si j'ose dire, manu militari, pour être finalement dépossédé de son véhicule. J'espère que ce n'est qu'un cas isolé !
Cela étant, la police nationale connaît aujourd'hui une profonde réorganisation, engagée par la loi d'orientation et de programmation relative à la sécurité du 21 janvier 1995. Avec près de 28 milliards de francs, le projet de budget de la police qui nous est présenté reste stable et permet de poursuivre la modernisation entreprise tout en affichant la contribution du ministère de l'intérieur à l'indispensable maîtrise des dépenses publiques.
En effet, ce projet de budget engage plus avant la police dans la voie de la modernité et, guidé par le souci de la proximité, il permettra d'améliorer sensiblement les conditions de vie et de travail des personnels.
Ainsi, l'effort en faveur du logement des policiers bénéficie de dotations importantes : 160 millions de francs d'autorisations de programme, ce qui se traduira par neuf cents logements nouveaux offerts aux personnels de police.
Dans le même esprit, le programme immobilier sera poursuivi, avec la livraison de 50 000 mètres carrés de locaux en 1997.
Concernant les personnels, les engagements en matière indemnitaire sont respectés et les effectifs de police globalement maintenus.
A cet égard, monsieur le ministre, je formulerai deux observations.
La première concerne la médaille d'honneur de la police, créée voilà plus de trente ans pour récompenser les agents ayant effectué vingt ans de service. Cette médaille est accompagnée d'une prime de 100 francs, dont le montant n'a jamais été revalorisé. Aussi, m'associant à l'hommage qui a été rendu aux 137 000 fonctionnaires de police qui assument avec dévouement et compétence leurs missions dans un contexte toujours plus difficile, je pense que, par redéploiement budgétaire, on pourrait revaloriser substentiellement cette prime. La reconnaissance de la nation à ses protecteurs s'exprimerait ainsi pleinement.
Ma seconde observation a trait aux effectifs et aux interrogations qui s'y attachent. Si la suppression de cinq cents emplois de policiers auxiliaires correspond à un ajustement justifié, la substitution du volontariat au service national aura des répercussions en termes de recrutement pour la police. J'espère qu'elle ne se traduira pas par un transfert de charges supplémentaire pour les collectivités locales.
Enfin, comment ne pas rappeler l'impérieuse nécessité de tenir les engagements de l'article 4 de la loi d'orientation ? Il est, en effet, essentiel de décharger les policiers des trop nombreuses tâches indues qui les accaparent, en particulier des tâches purement administratives.
Les conclusions du rapport Danilet révèlent par ailleurs que 40 % des tâches indues, en 1995, sont des tâches parajudiciaires, représentant 2 646 équivalents-fonctionnaires détournés de leur mission première.
Tout aussi importante est la réforme qui doit conduire à l'abandon de la cinquième brigade ou du système dit « 3-2 » - trois jours de travail, deux jours de repos - dont les effets pervers ont été largement démontrés, au profit d'un système fondé sur des rythmes plus réguliers : quatre jours de travail, deux jours de repos.
Vous avez, monsieur le ministre, le courage de remettre à plat ce système totalement inadapté qui aboutit, en moyenne, à 209 jours « hors service » sur 365 et qui, pour assurer un minimum de service, oblige à recourir aux heures supplémentaires, que l'on n'a, bien entendu, pas les moyens de payer et que l'on dédommage donc par des congés de récupération majorés. J'avais ainsi pu calculer en 1985, qu'au rythme où allaient les choses toute la police parisienne aurait été, vers l'an 2000, en congé de récupération !
Point n'est besoin d'augmenter les effectifs dès lors qu'une organisation plus intelligente accroît la présence effective sur le terrain.
Malgré les bons résultats obtenus à ce jour et les bonnes dispositions prises pour l'avenir, des inquiétudes demeurent. La délinquance des mineurs croît dangereusement depuis l'année dernière. La drogue reste un véritable fléau. La prévention et la répression devront être encore accentuées. De même, l'amélioration du taux d'élucidation devra faire l'objet de toutes les attentions. On ne dira jamais assez, monsieur le ministre, que le laxisme est une injustice faite aux victimes.
On l'a rappelé tout à l'heure, la lutte contre l'insécurité est une chaîne ne tolérant pas de discontinuité. Clemenceau n'avait de cesse de dire que « la police est faite pour rassurer les honnêtes gens et inquiéter les malfaiteurs ». Encore faut-il qu'elle ne soit pas contrainte à un travail de Sisyphe parce que le voleur arrêté hier est libéré aujourd'hui et recommencera à voler demain. Et le professeur Jean-Claude Soyer de conclure : « Police sans justice ne vaut ». Mais c'est un autre débat !
M. Emmanuel Hamel. Grand débat !
M. Bernard Plasait. Enfin, la lutte contre l'immigration irrégulière nécessitera encore un renforcement des moyens tant juridiques que matériels et humains. Le Parlement débattra prochainement d'un projet de loi sur l'immigration dont les dispositions, attendues par nos compatriotes, vont dans la bonne direction. Mais nul n'ignore que, si l'élaboration de la loi est importante, son application l'est plus encore, sous peine de voir un texte de plus rester lettre morte.
Dès votre plus jeune âge, monsieur le ministre, vous avez appris d'un grand homme d'Etat que « la faiblesse attire la foudre ». Vous conduisez, dans la ligne de cet enseignement, une politique forte, que ce budget réaliste traduit, et je l'approuve.
Cependant, il s'agit d'un travail herculéen. Pour nettoyer les écuries d'Augias, il vous faudra encore détourner bien des fleuves. Mais la bataille de la sécurité doit être gagnée. C'est seulement lorsque la paix intérieure aura été assurée que les Français pourront retrouver, selon la formule de Montesquieu, « cette tranquillité d'esprit qui provient de l'opinion que chacun a de sa sûreté ». (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, de l'Union centriste et du RPR, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Demuynck.
M. Christian Demuynck. Avant de développer quelques aspects de ce budget, je tiens tout d'abord à féliciter le Gouvernement et, en premier lieu, vous-même, monsieur le ministre de l'intérieur, des efforts accomplis en matière de sécurité publique. Depuis plus de dix-huit mois, les résultats sont très encourageants, même si l'insécurité reste, malheureusement, encore intolérable dans certains secteurs.
La délinquance a en effet diminué de 4,6 % sur les six premiers mois de 1996. Pour l'année 1995, cette baisse a été de 6,5 % par rapport à 1994.
Dans la luttre contre l'immigration clandestine, votre fermeté a permis l'augmentation du nombre des étrangers éloignés de France.
Enfin, je me dois de rappeler votre efficacité face à la vague terroriste qui a secoué la France voilà un peu plus d'un an. En quelques mois, les auteurs d'attentats aveugles et meurtriers ont été neutralisés ou mis à la disposition de la justice.
Monsieur le ministre, tous ces résultats montrent que vous êtes sur la bonne voie. Vous avez d'autant plus de mérite qu'il vous faut rétablir une situation qui s'était particulièrement dégradée sous les gouvernements de gauche.
Je mets bien évidemment entre parenthèses la période comprise entre 1986 et 1988, au cours de laquelle, alors que M. Jacques Chirac était Premier ministre, les chiffres de la délinquance étaient également à la baisse dans notre pays.
Le budget que vous présentez est un budget de raison, car il participe à l'effort de réduction des déficits publics tout en maintenant les priorités en matière de sécurité. Il est important d'expliquer aux Français, comme vous le faites, qu'il n'est pas utile de dépenser plus, mais qu'il faut dépenser mieux.
Notre pays a connu, dans le passé, un laxisme budgétaire sans précédent. Nous savons où ces comportements nous ont menés.
En 1981, la dette publique s'élevait à 400 milliards de francs ; en 1995, elle atteignait 3 255 milliards de francs. Si au moins cette flambée de la dépense publique s'était accompagnée de quelques résultats encourageants ! Mais chacun sait que tel n'est malheureusement pas le cas.
Les socialistes et les communistes responsables de cette dérive feraient bien de recouvrer la mémoire et de se garder de donner des leçons dans des domaines où ils ont échoué de manière si remarquable. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. André Rouvière. C'est toujours le même refrain !
M. Christian Demuynck. Nous savons également que ce sont vos prédécesseurs socialistes qui sont à l'origine de la dette de votre ministère à l'égard de France Télécom. Née en 1982, cette dette s'élevait à 250 millions de francs en 1986. Elle a triplé entre 1988 et 1993. Monsieur le ministre, pourriez-vous nous préciser quelles en sont les conséquences sur le budget que vous présentez aujourd'hui ?
Nous ne rappellerons jamais assez le courage et la persévérance des fonctionnaires de police, qui doivent assurer la sécurité de nos concitoyens. Nous devons, une fois de plus, leur rendre hommage. Dans les centres urbains et les banlieues sensibles, ils sont en prise directe avec les problèmes de dégradation, de toxicomanie et de violence, quelquefois au péril de leur vie. Nous savons qu'ils ont besoin de se sentir soutenus et reconnus, et non pas critiqués et accusés systématiquement.
Ce budget, qui s'inscrit dans le cadre de la loi d'orientation votée en 1995, va dans ce sens et prend en compte la mise en oeuvre de nouvelles mesures indemnitaires et catégorielles. Il engage également la police dans la voie de la réorganisation des rythmes de travail.
Actuellement, dans les services de sécurité publique, les fonctionnaires concentrent un très grand nombre d'heures sur trois jours. On imagine aisément les répercussions que peuvent avoir de tels rythmes de travail sur leur santé physique et psychologique.
Cette réforme horaire, qui s'est opérée dans la concertation, est fondée sur des rythmes plus réguliers, à savoir quatre jours de travail et deux jours de repos. Elle répond à une attente des policiers.
Monsieur le ministre, pourriez-vous nous dire, concrètement, quelles sont les conséquences de cette réforme non pas sur les rythmes de vie pour les fonctionnaires, mais sur l'efficacité des services de police ?
Depuis votre arrivée au pouvoir, les Français ont compris votre volonté de lutter sans relâche contre l'immigration clandestine. Dans ce domaine également, le Gouvernement doit gérer les années d'irresponsabilité des gouvernements socialiste et communiste. La régularisation de plus de 130 000 clandestins a été à l'origine de l'afflux de plusieurs centaines de milliers d'immigrants irréguliers.
M. Emmanuel Hamel. Cela a été souvent rappelé !
M. Christian Demuynck. Ce n'est qu'avec la fermeté que vous manifestez que la situation pourra s'améliorer. Sur les six premiers mois de 1996, les expulsions ont augmenté de 24 %. Depuis dix-neuf mois, plus de 18 500 étrangers en situation irrégulière, soit près de 1 000 par mois, ont été reconduits à la frontière. Nous ne pouvons que vous encourager à systématiser la méthode des charters. Outre son efficacité, elle a valeur d'exemple et dissuade les éventuels candidats à l'immigration.
Bien évidemment, les reconduites à la frontière doivent s'accompagner d'une amélioration des textes. C'est ce que vous avez prévu dans les deux projets de lois en préparation : le premier a trait à la lutte contre le travail clandestin, le second clarifiera le dispositif des reconduites à la frontière.
Nous avons tous bien évidemment en mémoire les événements qui se sont déroulés, l'été dernier, dans l'église Saint-Bernard.
Une fois de plus, les Français ont été témoins de votre volonté de lutter contre l'immigration clandestine, mais ils n'ont pas compris les lourdeurs administratives et judiciaires qui ont empêché un renvoi effectif en dehors de nos frontières. Ces événements illustrent bien la difficulté de votre tâche.
Il est surprenant que, de plus en plus, les nombreuses procédures et barrières administratives empêchent de traduire rapidement et efficacement sur le terrain la volonté des élus.
Nous retrouvons également, malheureusement, cette lourdeur administrative à l'échelon local. Je prendrai l'exemple de ma ville.
A la fin de l'année 1993, j'avais alerté votre prédécesseur sur l'urgente nécessité de réhabiliter le bâtiment vétuste - et quand je dis « vétuste », je suis loin de la réalité - et exigu qui abrite le commissariat de Neuilly-sur-Marne et de Neuilly-Plaisance, en Seine-Saint-Denis. J'ai réussi à obtenir 10,5 millions de francs pour cette réhabilitation.
La décision politique était donc prise et les crédits inscrits au budget. Tout était réglé. C'était compter sans la lenteur administrative !
En 1994, il était prévu que le chantier commence en janvier 1995 pour une durée maximale d'un an. Aujourd'hui, le chantier est toujours au point mort. Son démarrage est annoncé en mars 1997 pour une durée de dix-sept mois.
A quoi sert-il que des élus ou un ministre interviennent sans cesse pour obtenir l'avancement des dossiers, si l'administration chargée d'appliquer les décisions prises par les hommes politiques font traîner les choses ? Nous pouvons légitimement nous inquiéter de cette évolution, que trop d'élus connaissent bien.
Nous savons, monsieur le ministre, que vous avez déployé des moyens supplémentaires pour la police, notamment dans un département que je connais bien puisqu'il s'agit de la Seine-Saint-Denis. Grâce à ces efforts, le front de la délinquance y est resté stable en 1996. En 1995, sur l'année complète, la criminalité y a reculé de 7,27 %.
Vous avez, par ailleurs, engagé un vaste programme de réhabilitation des commissariats et, notamment, la reconstruction de celui de Bobigny, qui abritera la police judiciaire et les renseignements généraux. Toutefois, rien n'est prévu pour la direction départementale de la sécurité publique, la DDSP, qui souffre de la vétusté de ses locaux. Or, lors de la coupe du monde de football, qui se déroulera en juin 1998 à Saint-Denis, la surveillance et la gestion de la sécurité seront assurées par la DDSP.
Ne pourrait-on pas profiter de la coupe du monde pour engager une rénovation de ces bâtiments en même temps que ceux de la police judiciaire et des renseignements généraux ?
L'implantation du Stade de France aura également des conséquences à long terme en matière de sécurité publique. Outre les nombreuses manifestations sportives, on annonce déjà l'organisation de concerts pour 1998. La construction d'un commissariat de plein exercice, sur le site de La Plaine-Saint-Denis, qui est appelé à connaître un développement urbain considérable, me semble une réelle nécessité. Pourriez-vous, monsieur le ministre, me préciser si une décision peut être prochainement prise sur ce point ?
Enfin, pour en revenir au budget lui-même, le projet de loi de finances intègre les crédits nécessaires à la mise en oeuvre du réseau ACROPOL. Serait-il possible de concentrer tous les efforts pour que ce système de communication performant soit prêt et totalement opérationnel pour la coupe du monde, et ce même si nous sommes équipés avant la ville de Paris ? L'utilisation d'ACROPOL constituerait une garantie supplémentaire de réussite de cet événement mondial, qui nécessitera une grande vigilance en matière de sécurité.
Cela dit, monsieur le ministre, nous ne pouvons que soutenir votre budget, qui s'attache à préserver les missions régaliennes de l'Etat. Les crédits de la police nationale resteront stables, la réforme des cycles horaires est engagée, les effectifs de la police nationale seront en augmentation sensible et les crédits d'équipement resteront conformes à ceux de 1996.
Monsieur le ministre, je salue votre courage et votre souci d'une meilleure efficacité de notre police tout en participant à la nécessaire maîtrise des dépenses publiques. Votre politique est bonne. Poursuivez-la sans état d'âme. Vous pouvez compter sur nous. Nous vous soutenons et nous voterons votre budget. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Rouvière.
M. André Rouvière. Il est malheureusement facile de constater que les problèmes de sécurité sont d'une actualité inquiétante dans la vie quotidienne. Ils le sont aussi en matière financière, tant au niveau des collectivités locales, communes et départements, que du point de vue de vos propositions budgétaires, monsieur le ministre. Celles-ci s'inscrivent dans la démarche du Gouvernement tendant à maîtriser les dépenses publiques.
L'an dernier, vous avez diminué de 20 % le budget de la protection civile. Cette année, vous ne rattrapez pas cette diminution, mais vous stabilisez votre projet de budget, qui augmente globalement de 2 %.
Un examen plus attentif révèle que vous privilégiez les dépenses d'équipement au détriment de celles de fonctionnement. En effet, ces dernières baissent de 4,7 %.
Ce recul important concerne les dépenses de personnel et les subventions : celles qui sont allouées aux services départementaux d'incendie et de secours, les SDIS, et aux collectivités locales diminuent de 43,4 %, passant de 24,1 millions de francs à 13,6 millions de francs. Cette amputation de 10,5 millions de francs est très grave, monsieur le ministre. Elle sera, je le crains, répercutée sur le budget des collectivités locales.
Ces dernières voudraient pouvoir faire comme vous, c'est-à-dire réduire ou, tout au moins, stabiliser leurs dépenses de sécurité civile. Or, elles ne le peuvent pas, non pas uniquement de leur fait, mais parce que leurs budgets dépendent souvent en grande partie des décisions que vous prenez ou non.
Parmi celles que vous prenez figure la mise en place d'un pacte de stabilité pour les aides aux communes. Pourquoi le Gouvernement ne fait-il pas de même pour les dépenses qu'il impose aux communes et aux départements ?
Dans votre projet de budget, vous réduisez le remboursement aux SDIS des opérations extradépartementales. Mais si leur coût, en 1997, dépasse vos prévisions, qui paiera la différence ? Les départements ?
Mon inquiétude est plus profonde. Le Gouvernement a décidé de supprimer le service national avant que nous en débattions. Or, de nombreux sapeurs-pompiers auxiliaires sont répartis dans plusieurs départements ; ils ne travaillent pas uniquement à Paris. Leur remplacement par des volontaires ou des militaires entraînera, c'est certain, un surcoût. Seront-ils remplacés ? S'ils le sont, qui supportera ce surcoût ? Les départements ? Les communes ? Certes, cette situation ne se produira pas en 1997, mais pourriez-vous me répondre, monsieur le ministre ? Votre budget de fonctionnement baisse, en 1997, et il ne prépare pas cet avenir, qui est proche.
Bien sûr, vous-même et ceux qui appartiennent au même courant politique que vous, évoquez sans cesse l'héritage socialiste.
M. René Rouquet. C'est vrai !
M. André Rouvière. Permettez-moi de parler du vôtre. Je crains que votre successeur n'ait une situation difficile à gérer, ne serait-ce que pour remplacer ceux que le service national mettait à la disposition des sapeurs-pompiers dans plusieurs départements.
M. René-Georges Laurin, rapporteur pour avis. Nous n'en sommes pas là !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Rassurez-vous, ce ne sera pas vous !
M. André Rouvière. Je sais bien que ce ne sera pas moi, je ne me fais pas d'illusion sur ce point,...
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Moi non plus !
M. André Rouvière. ... mais il y en aura d'autres et, là non plus, l'héritage ne sera pas facile à maîtriser. Nous pourrons alors parler du vôtre !
Les collectivités vont, une fois de plus, supporter le poids de décisions dont elles ne sont pas les auteurs. Déjà, certaines communes ont subi, d'une année à l'autre, des augmentations de l'ordre de 50 % en matière de dépenses de sécurité civile.
M. Jean-Jacques Hyest. Forcément, elles ne faisaient rien avant !
M. André Rouvière. C'est en partie le résultat de décisions semblables à celles que je viens de rappeler. C'est également le résultat d'un défaut de réglementation précise.
Un certain nombre de décisions pourraient être prises, monsieur le ministre, et, quant je dis cela, ce n'est pas pour polémiquer. Il s'agit d'être efficace et de mener une réflexion aussi objective que possible, même si tout n'est pas agréable à entendre.
Depuis le drame de Furiani, la plupart des sapeurs-pompiers, auxquels je rends hommage, vivent dans l'obsession quasi permanente du reproche ou de la sanction pour faute ou imprévoyance. Cela les conduit naturellement à développer des comportements sécuritaires, qui, souvent, se traduisent par des coûts très élevés.
Nous sommes tous d'accord pour accroître la sécurité. Mais nous sommes d'accord également pour nous demander jusqu'où et jusqu'à quand nous pourrons payer.
Je ne reproche pas aux commissions de sécurité d'être prudentes, mais il est urgent, monsieur le ministre, de préciser la réglementation et d'admettre que le risque zéro est une utopie. Il est urgent de préciser que la responsabilité n'incombe pas uniquement au décideur, à l'organisateur, et que l'utilisateur doit aussi assumer sa part de responsabilité.
La surenchère aux mesures de sécurité décidées par les commissions de sécurité devient financièrement insupportable.
Il serait d'ailleurs intéressant que ces mêmes commissions de sécurité, ou d'autres, appliquent la même rigueur à l'Etat en ce qui concerne son propre patrimoine : je pense aux routes nationales, même si ce n'est pas votre domaine, monsieur le ministre. Cela nous permettrait de voir comment vous et vos collègues du Gouvernement pouvez concilier rigueur financière et rigueur sécuritaire, car nous, élus locaux, nous n'y parvenons plus !
Monsieur le ministre, je souhaite la mise en place d'une réglementation qui fasse la part des choses, si je puis dire.
Il faut assurer un équilibre entre la recherche nécessaire de sécurité et son coût.
Il faut que les mesures de sécurité, en ce qui concerne aussi bien l'investissement que le fonctionnement, soient compatibles avec les moyens financiers des collectivités et des particuliers, de façon qu'elles soient supportables.
Il faut mettre en place une responsabilité partagée entre le décideur, le responsable légal et l'utilisateur.
Monsieur le ministre, nous attendons que vous réglementiez des comportements qui, aujourd'hui, nécessitent un effort financier trop important.
Je ferai une suggestion, et ce sera ma conclusion : les sapeurs-pompiers interviennent lorsqu'il y a accidents routiers ; dans la plupart des cas, deux, voire trois, véhicules se rendent sur les lieux, alors que, bien souvent, un seul suffirait.
Je ne suis pas opposé à cette façon de procéder, mais elle a un coût que, bientôt, les collectivités ne pourront plus assumer.
A l'heure où la communication entre un centre de secours et un véhicule de sapeurs-pompiers s'effectue dans l'instant, ne pouvez-vous pas préciser la réglementation, afin d'alléger le coût des interventions, tout en permettant aux sapeurs-pompiers d'agir au mieux sans être hantés par la crainte d'être accusés de ne pas avoir mobilisé a priori, j'y insiste, tous les moyens qui sont à leur disposition ?
Seule une réglementation nouvelle peut permettre d'harmoniser plusieurs exigences : besoins de sécurité dans des proportions raisonnables, coûts supportables, responsabilité partagée et équilibrée.
Monsieur le ministre, pour l'instant, vos propositions, vos actions ne vont pas dans ce sens. Telle est la raison pour laquelle le groupe socialiste ne votera pas votre projet de budget. (Applaudissements sur les travées socialistes, ainsi que sur celles du groupe communiste républicain et citoyen.)
M. Lucien Lanier. C'est une erreur !
M. le président. La parole est à M. Bonnet.
M. Christian Bonnet. Monsieur le ministre, c'est la première fois depuis quinze ans que j'interviens dans un débat sur le budget de l'intérieur. En effet, jusqu'ici, je m'en étais tenu à un devoir de réserve à l'égard de mes successeurs. C'est si facile de critiquer quand on n'est plus aux responsabilités !
Si je le fais, c'est pour vous aider à corriger à la fois un excès de zèle et une dérive dont je ne doute pas qu'elle vous préoccupe vous aussi.
L'« excès de zèle » - l'expression est de lui - c'est ce terrorisme normatif stigmatisé ces jours derniers devant le congrès des maires par M. Jean-Paul Delevoye. Ce terrorisme normatif, il se manifeste dans le domaine de vos compétences sous l'aspect du « syndrome de Furiani », qui a frappé les commissions de sécurité quasiment sur tout le territoire. C'est presque un passage de témoin, monsieur Rouvière !
M. André Rouvière. Vous voyez, les grands esprits peuvent se rencontrer !
M. Christian Bonnet. Ces commissions, dans la quête illusoire d'une société à risque zéro, font trop souvent montre, sur le terrain, d'exigences excessives.
Si le but est louable, il est des risques non « probabilisables », pour recourir à la terminologie des spécialistes, auxquels nulle société ne saurait échapper. Les précautions les plus sophistiquées n'ont pas empêché le sinistre du tunnel sous la Manche. Sourions, pour autant qu'on puisse sourire en évoquant des décès : les cinq décès déplorés ces jours derniers outre-Manche sont imputables à de la viande achetée chez un commerçant réputé qui venait tout juste d'être sacré « boucher de l'année » en Ecosse !
Le Gouvernement a respecté le pacte de stabilité en ce qui concerne les concours de l'Etat aux collectivités locales. Mais cette stabilité est un leurre, dès lors que les collectivités sont accablées par le poids de réglementations tatillonnes de plus en plus coûteuses, dont le contribuable supporte en définitive les conséquences.
Monsieur le ministre, ce que vous avez fait avec notre concours pour les vaillants sapeurs-pompiers au travers non seulement de votre loi mais également du sort que vous leur avez réservé dans votre budget vous permet aujourd'hui de redonner le sens de la mesure aux responsables des commissions de sécurité. Tous les élus de terrain comptent sur vous pour ce faire !
M. Jean Chérioux. Très bien !
M. Christian Bonnet. La dérive, second point de mon intervention, est d'un tout autre ordre et elle est autrement plus grave ; votre père l'eût, à n'en pas douter, jugée telle.
Il s'agit, monsieur le ministre, de la paupérisation de l'Etat dans ses fonctions régaliennes, et ce à une période où il en aurait plus que jamais besoin. Sans doute serait-il malséant d'insister !
Je vous demande instamment de plaider auprès de M. le Président de la République, dont chacun vous sait très proche, la cause essentielle d'un recentrage de l'action de l'Etat « touche à tout » sur ses missions fondamentales.
Monsieur le ministre, il n'est pas convenable que, dans la composition du Gouvernement, le ministère des affaires étrangères figure au cinquième rang, derrière le ministère de l'équipement et le ministère de l'intérieur, au septième rang, derrière le ministère du travail et des affaires sociales.
Monsieur le ministre, il n'est pas convenable que le nombre des magistrats de l'ordre judiciaire - vous en fûtes ! - soit à peine supérieur à ce qu'il était en 1910, alors que la France compte vingt millions de citoyens de plus et que l'Etat de droit tend à se muer de plus en plus en une société de contentieux.
Monsieur le ministre, il n'est pas convenable que 133 milliards de francs soient prévus pour des aides à l'emploi, dont « l'utilité n'était pas toujours évidente », selon un écrit de M. Edmond Maire publié le 2 novembre dernier dans un grand quotidien du soir, et que, dans le même temps, le budget de la justice s'élève à 24 milliards de francs et le vôtre, hors administration générale, territoriale et sécurité civile, à quelque 29 milliards de francs pour la police nationale. Tout juste 2 milliards de francs de plus que les crédits ouverts, très provisoirement, hélas ! pour la récapitalisation des entreprises publiques mal gérées par cet Etat touche à tout devenu impotent sur l'essentiel à force de se montrer omnipotent sur l'accessoire !
Cette idée force du recentrage impératif des actions de l'Etat sur ses fonctions régaliennes commence à faire son chemin : M. le garde des sceaux, auquel je tenais il y a peu le même langage dans cet hémicycle, l'a récemment faite sienne ; M. Alain Lambert, rapporteur général, y a fait expressément référence dans son propos introductif à la loi de finances ; de plus en plus nombreux sont les membres de la Haute Assemblée qui la font leur.
Nous vous faisons confiance, monsieur le ministre, et c'est la raison pour laquelle le groupe des Républicains et Indépendants votera sans réserve votre budget, pour convaincre la plus haute autorité de ce pays de donner à Bercy, dans l'optique de la préparation du budget pour 1998, des directives aussi fermes que précises de redéploiement des crédits au bénéfice des départements qui constituent, aux yeux de ceux qui persistent à se faire une certaine idée de la France, les fondations mêmes de l'Etat. (Très bien ! et applaudissements sur les travées des Républicains et Indépendants, du RPR et de l'Union centriste, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. Jean-Jacques Robert.
M. Jean-Jacques Robert. Rude tâche que de m'exprimer après M. Bonnet ! Toutefois, je vais essayer, monsieur le ministre, de vous dire simplement ce que je souhaite.
Tout d'abord, nous sommes sensibles à votre conception de la sécurité et aux mesures que vous prenez en la matière. Vous le faites avec talent et efficacité.
Vous connaissez bien les situations que je souhaite évoquer. Au-delà de votre engagement, il y a la vie de tous les jours, hors statistiques, ratios et réformes possibles : les quartiers difficiles où la police et les pompiers ont des difficultés à intervenir ; les trains, où en plein jour, l'insécurité est permanente - je rends hommage à cette jeune femme qui a été agressée dans mon département, en soulignant qu'il ne s'agit pas d'un cas unique, vous devez le savoir ; les lycées et les collèges où l'on trouve, à l'intérieur comme à l'extérieur, la drogue toujours, la violence parfois, le racket et, aujourd'hui, depuis peu, les armes ; les débordements dans les quartiers et inter-quartiers ; les innombrables agressions au domicile et à la voiture ; la Corse, le Pays basque ; les insultes quotidiennes, accompagnées de menaces, que nos policiers subissent.
Etat de droit, où es-tu ?
Pour remplir la redoutable mission qui consiste à contrôler et à faire cesser ces désordres, vous disposez de près de cent mille policiers. Vous essayez, à l'image du plan Vigipirate, de faire face avec les moyens du bord. Ce n'est plus possible, malgré les succès que vous avez obtenus !
Mettre en cause l'organisation et le temps de travail, parler de réforme ne suffit pas. Nous devont bâtir en faisant du neuf.
J'ai visité des commissariats : même quand les locaux sont suffisants, les conditions de travail sont difficilement supportables. A la surcharge des plaignants et des délinquants s'ajoutent les obligations du service : tout en même temps !
J'ai également remarqué que 10 % au moins des postes ne sont pas pourvus ou ont quelque difficulté à l'être. Des postes sont affectés à des personnels dont le domicile se trouve à 300 ou 400 kilomètres ; devant l'impossibilité de se loger sur le lieu de travail, ils doivent regrouper leur temps de service et effectuer des trajets en voiture ou en train.
Votre tentative pour essayer de remédier à cette situation, que vous connaissez bien, doit recevoir notre concours.
Vos collaborateurs, vos collègues - ceux de Bercy, par exemple - vous affirment qu'en modifiant, en réformant, en triturant, en incitant, les choses iront mieux ! Toutefois - vous m'excuserez d'établir un parallèle avec la lessive - quelle qu'en soit la marque, c'est toujours le même produit ; seul l'emballage change ! Vous ne devez pas céder à la tentation de suivre ces conseils.
Je me prends parfois à rêver. Et si vous et moi, nous prenions ensemble, à la gare de Lyon, le train pour Corbeil-Essonnes, et si nous nous rendions dans les Tarterets ou à Grigny, sans personne, tous les deux ! Je pense que mes convictions et mes peurs seraient mieux partagées.
Nous devons prendre nos risques. Nous devons assurer une présence constante et une disponibilité totale de nos forces de police pour assurer partout, et pas seulement dans les quartiers difficiles, une sécurité que nos concitoyens considèrent comme normale.
Cela suppose que vous soyez doté de moyens suffisants, d'hommes en nombre pour être présents et à même de consacrer le temps nécessaire à leur travail et à leur action sans vivre constamment à cent cinquante à l'heure et sous pression.
Nos concitoyens attendent une mesure exceptionnelle. Une telle mesure, monsieur le ministre, l'opposition actuelle l'a prise, en son temps, dans un autre secteur, l'éducation nationale.
Vous avez besoin d'accroître les effectifs de 10 %. Il vous faut 10 000 policiers, de vrais policiers formés !
Je vous entends me rétorquer : oui, mais les restrictions budgétaires, le déficit ! Je me permets de vous répondre : pas dans le domaine de notre sécurité ! L'argent, peut-être, mais l'homme d'abord !
Monsieur le ministre, vous avez obtenu des résultats grâce à vos méthodes de travail. Aussi, je ne voudrais à aucun prix que vous preniez mes propos pour des critiques,...
M. René Rouquet. Non, ce sont des félicitations ! (Sourires.)
M. Jean-Jacques Robert. ... car je dois plutôt vous remercier. Je traduis là le sentiment de nos élus locaux et de nos concitoyens.
Nous sommes prêts à vous aider, à pousser en mêlée, pour que vous obteniez ces crédits exceptionnels que la France tout entière attend, tant elle aimerait pouvoir respirer sans être anxieuse pour sa sécurité.
Monsieur le ministre, je voterai, bien sûr, votre projet de budget et j'appuie votre action. (Applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants, ainsi que sur certaines travées du RDSE.)
M. le président. La parole est à M. le ministre.
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, le projet de budget du ministère de l'intérieur que j'ai l'honneur de vous présenter s'élève à 50,5 milliards de francs.
Au lieu de procéder à une analyse comptable, au demeurant incertaine, je préfère concentrer mon propos sur les objectifs politiques de ce projet de budget, tant il est vrai que tout budget reflète la politique que l'on veut suivre et que ce budget reflète la politique que je souhaite mettre en oeuvre en 1997.
Deux objectifs principaux doivent être mis en avant.
D'abord, le ministère de l'intérieur contribuera à la politique définie par M. le Président de la République et par M. le Premier ministre afin de réduire les déficits publics, et donc de mieux contrôler les dépenses de l'Etat.
En effet, il n'est pas admissible que, comme c'est encore le cas, l'Etat doive emprunter non pas pour construire l'avenir du pays, mais pour financer les dépenses courantes.
Je croyais, jusque voilà encore quelques jours, que les députés socialistes étaient les seuls à avoir perdu la mémoire, mais je constate que cette maladie est devenue une épidémie, car elle atteint aussi les sénateurs socialistes.
M. André Rouvière. Ce n'est pas comme cela que l'on résout les problèmes !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Ceux qui, pendant quatorze ans, ont endetté notre pays au point que, aujourd'hui, celui-ci est obligé, du fait de cette gestion, d'emprunter pour rembourser ses dettes...
M. André Rouvière. Qu'est-ce que cela veut dire ? Vous n'avez pas changé !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. ... devraient sans doute être un peu plus modestes ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. André Rouvière. Changez d'argument !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Je ne changerai pas d'argument, monsieur Rouvière, parce que j'ai été élevé dans une certaine idée de l'Etat.
M. André Rouvière. C'est toujours la faute des autres !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Celui-ci doit être crédible, c'est-à-dire qu'il ne doit pas dépenser plus qu'il ne récolte.
M. André Rouvière. Et le respect de ceux qui vous ont précédé ?
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Oui, il y a une façon de gérer l'Etat, et quand on est aujourd'hui dans l'opposition, on devrait être un peu plus modeste.
M. André Rouvière. Vous pourriez l'être un peu, vous, en ayant le pouvoir !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. En effet, si je dois faire face à tant de difficultés à la fois dans la police et dans les autres secteurs, c'est parce que vous avez semé et mal semé ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR, de l'Union centriste et des Républicains et Indépendants.)
M. René Rouquet. Vous êtes le ministre de la provocation !
M. André Rouvière. Jamais un parti n'a connu autant de problèmes que le vôtre !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. J'ajouterai que, depuis 1993, le ministère de l'intérieur a pris l'habitude de veiller à l'optimisation de ses dépenses,...
M. René Rouquet. C'est plus facile que de répondre à vos amis !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. ... et même, hélas ! de payer les dettes laissées par les autres,...
M. André Rouvière. C'est facile de répondre cela !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. ... ceux qui, au printemps de 1993, avaient quitté le ministère de l'intérieur en oubliant plus de 1,5 milliard de francs de dettes.
M. André Rouvière. Parlez de votre budget, pas de celui des autres !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Il est aujourd'hui facile, lorsque l'on est président de la Cour des comptes, de fustiger les dépenses et les dettes du ministère de l'intérieur...
M. André Rouvière. Parlez de votre budget !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur ... en oubliant de dire qui était au ministère de l'intérieur lorsque ces dettes ont été contractées.
M. André Rouvière. Parlez de votre budget ! C'est lui qui est à l'ordre du jour, et non celui des autres !
M. René Rouquet. Répondez à vos amis !
M. le président. Mes chers collègues, je vous en prie !
M. André Rouvière. C'est de la provocation, monsieur le président ! (Exclamations sur les travées du RPR.)
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Non, c'est la réalité !
M. André Rouvière. Nous n'acceptons pas la provocation !
M. René Rouquet. Qu'il parle de son projet de budget !
M. le président. Mes chers collègues, vous n'avez pas la parole !
M. André Rouvière. Si on nous provoque, nous répondrons !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Quand j'entends certains évoquer aujourd'hui la dette du ministère à l'égard de France Télécom, je rappelle seulement que cette dette, née en 1982, a triplé entre 1988 et 1993.
M. René Rouquet. Répondez aux questions !
M. André Rouvière. C'est sans cesse de la provocation, monsieur le président !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Depuis 1993 donc, nous payons « leurs » dettes et, en même temps, le ministère de l'intérieur assume ses missions.
M. André Rouvière. C'est scandaleux !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Naturellement, je veillerai, messieurs Demuynck et Cabanel, à ce que l'apurement nécessaire de cette dette ne pénalise pas mon ministère, qui a, par ailleurs, déjà fait un effort considérable.
Le deuxième objectif politique de ce projet de budget est de donner au ministère de l'intérieur, c'est-à-dire à la police nationale, aux préfectures et à la sécurité civile, les moyens nécessaires à l'exercice de leurs missions.
Chacun de vous ici, quelle que soit la travée sur laquelle il siège, connaît ces missions et, j'en suis sûr, apprécie les conditions dans lesquelles les quelque 175 000 fonctionnaires du ministère les exercent. Je voudrais d'ailleurs, avant d'entrer plus avant dans mon propos, rendre l'hommage de la nation aux onze policiers tués en service, dont trois lors d'opérations de police, et rendre hommage, comme vous l'avez fait monsieur Laurin, aux douze pompiers et au pilote de la sécurité civile morts dans l'exercice de leur mission depuis le début de l'année.
Cet hommage est plus que jamais justifié. En effet, qu'ils soient policiers, agents du cadre national des préfectures, fonctionnaires de la sécurité civile, agents des transmissions et de l'administration centrale, tous exercent, monsieur Bonnet, leur mission de service public et tous défendent une certaine conception de l'Etat. Ils le font dans des conditions difficiles, au sein d'une société inquiète : inquiète des terrorismes comme de la petite délinquance, commise, malheureusement, de plus en plus par des mineurs, et par des mineurs de plus en plus jeunes ; inquiète de l'inacceptable violence en Corse ; inquiète de la contestation de la loi et de l'ordre républicains dans certains quartiers où, la crise économique et les erreurs d'urbanisme aidant, se sont progressivement installés des réseaux qui refusent cette même loi républicaine ; inquiète du développement d'une délinquance due à la drogue.
En ce qui concerne ce dernier problème, je peux dire d'emblée qu'il faut que chacun prenne ses responsabilités. On parle beaucoup de l'Europe, de la construction de l'Union européenne. Il faut que ceux qui participent à cette grande ambition qu'est la construction d'une Europe prennent leurs responsabilités et sachent que la France ne changera pas de position.
La lutte contre le trafic, mais aussi contre la fabrication de substances toxiques, est naturellement une lutte nationale, mais elle est aussi une lutte européenne. Que nos voisins prennent conscience de leurs responsabilités à notre égard ! (M. René-Georges Laurin, rapporteur pour avis, applaudit.)
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. On ne peut pas à la fois se dire européen et accepter que, dans son pays, on fabrique et on vende de la drogue. (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Et qu'on la cultive pour la fabriquer !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Eh bien, dans ce contexte difficile, souvent dangereux, les fonctionnaires du ministère de l'intérieur travaillent.
Oui, monsieur Demuynck, la délinquance a baissé de 6,5 % en 1995. Toutefois, ce qui est important, c'est que cette baisse n'est pas l'expression ou le résultat d'une seule année ; elle se poursuit. C'est le résultat d'un travail exemplaire des forces de police. Elle se poursuit, puisque le premier semestre de 1996 enregistre une baisse de plus de 4,5 %.
Oui, la police a mis un terme aux opérations terroristes de l'année dernière et, avec la justice, s'est engagée dans une politique déterminée, en Corse, pour faire respecter la loi.
Oui, nous avons mis vingt-six terroriste corses en prison. Ce n'est pas nous qui, en 1981 ou en 1988, avons amnistié des terroristes que nous reprenons aujourd'hui. C'est vous, messieurs les socialistes ! (Marques d'approbation sur les travées du RPR.) Ne l'oubliez jamais, car c'est la réalité.
M. Paul Masson, rapporteur pour avis. Très bien !
M. Christian Demuynck. C'est effectivement la réalité !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Oui, environ 10 000 étrangers en situation irrégulière ou ayant troublé l'ordre public ont été reconduits au cours des dix premiers mois de l'année, et ce nombre a augmenté de 25 % par rapport à 1995.
Mais, là encore, je gère des années d'irresponsabilité, où on a laissé s'installer en France des hommes et des femmes qui ne respectent l'ordre ni la loi républicaine,...
M. André Rouvière. En Corse, qui est allé voir les cagoulés ? Qui est allé négocier avec les plastiqueurs ?
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. ... des hommes et des femmes que je suis forcé d'expulser de France, alors que vous auriez dû le faire, messieurs !
Oui, la création de l'office central pour la répression de l'immigration irrégulière et de l'emploi des étrangers sans titre, créé en août dernier, a permis de renforcer la lutte contre les filières de passeurs, de trafiquants de drogues et d'employeurs de clandestins, comme il vient d'être démontré encore la semaine dernière.
Oui, enfin, et ce résultat atteste autant de notre politique de prévention que des facteurs climatiques - le bilan des feux de forêts pour 1996 - monsieur Laurin, vous l'avez remarqué - se limite à 13 000 hectares, c'est-à-dire un recul, d'ailleurs particulièrement sensible autour de la Méditerranée, d'environ 30 % par rapport à 1995.
M. André Rouvière. Il a plu !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Nous allons continuer. Notre pays est aujourd'hui confronté à une situation difficile.
L'Etat doit faire mieux, et le ministère de l'intérieur, monsieur Bonnet, assumera pleinement ses responsabilités. Il faut que nos interventions soient encore plus nombreuses, encore plus efficaces.
La sécurité civile modernise sa flotte. Les préfectures, outil pivot de l'Etat dans les départements, renforcent leurs missions dans le cadre de la réforme de l'Etat. La police se réforme et s'adapte aux défis actuels.
L'année dernière, dans les mêmes circonstances, j'avais eu l'occasion de dresser un premier bilan de la mise en oeuvre de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité.
Permettez-moi d'abord de vous préciser que, conformément à mes engagements, j'ai déposé un rapport d'exécution de cette loi. Ce rapport est à votre disposition.
M. Christian Demuynck. Très bien !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Concernant cette réforme, plus de cent soixante textes sont maintenant adoptés. Je ne vous en donnerai pas le détail, que vous trouverez dans ce rapport.
Je voudrais seulement insister sur certains textes, particulièrement importants, comme le règlement général d'emploi et les règlements particuliers à chaque service.
Comme vous l'avez souligné, monsieur Masson, ces textes ont fait l'objet d'une concertation d'une densité exceptionnelle, au sein du comité technique paritaire national de la police et, des centaines d'heures durant, pour préparer ce comité, avec l'ensemble des syndicats.
Afin d'expliquer et de faire comprendre la réforme, j'ai demandé au directeur général de la police nationale d'aller sur le terrain pour rencontrer 12 000 fonctionnaires à l'occasion d'une quinzaine de réunions qu'il a organisées avec l'ensemble des directeurs. Je voudrais ici rendre un hommage particulier à M. Claude Guéant, directeur général de la police, et à M. Michel Gaudin, directeur de la police nationale, mais aussi à tous les commissaires et officiers de police que nous avons rencontrés et qui ont été les artisans inconnus, modestes, mais déterminés d'une réforme.
Vouloir faire croire le contraire, vouloir expliquer, comme je le vois ici ou là, que cette réforme qui se met en place a été faite sans concertation,...
M. Christian Demuynck. C'est scandaleux !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. ... c'est l'expression soit d'un esprit partisan, soit d'un esprit qui n'est pas au courant de la réalité.
A cette fin, j'ai créé des comités techniques départementaux dans tous les départements de France, chargés, sous la responsabilité des préfets, que j'ai reçus, d'analyser les meilleures solutions, celles qui sont les mieux adaptées, dans le contexte local, pour remplacer le fameux système du 3-2 par le système du 4-2.
Les comités techniques départementaux sont eux-mêmes précédés de multiples réunions associant l'ensemble des personnels pour expliquer, faire comprendre et faire adopter par ces derniers des changements de rythmes de travail.
Il faut que le Parlement sache ce qu'a coûté à la police nationale ce fameux système des trois jours de travail et deux jours de repos, introduit en 1984, à titre provisoire : il a coûté l'équivalent de 10 000 emplois, sans compter une évolution préjudiciable au bon fonctionnement des services de police. Qui croira qu'on est bien dans sa tête et dans son corps de policier quand on doit concentrer trente-neuf heures de travail en trois jours ? Ce n'est pas acceptable, et je ne l'accepte pas !
Pour toutes ces raisons, j'ai voulu, avec l'ensemble des directeurs, avec l'ensemble des cadres policiers de cette maison, une nouvelle organisation, celle du 4-2 : quatre jours de travail, deux jours de repos.
Je considère qu'il s'agit là d'un progrès considérable pour les fonctionnaires concernés, c'est-à-dire pour ceux qui travaillent en brigades de roulement, ceux de la sécurité publique et ceux de la DICCILEC, la direction centrale du contrôle de l'immigration et de la lutte contre l'emploi des clandestins : pas une heure de travail en plus, mais une autre organisation du travail, afin d'être plus proche des réalités et d'être plus efficace.
Je sais bien que cela heurte les conservateurs, les propagandistes du conformisme et de l'immobilisme. Mais cela m'est égal ! Etre ministre, diriger une administration, c'est ne pas écouter celles et ceux qui prônent de ne rien faire et qui sont réformateurs uniquement dans les discours, dans les incantations devant leurs militants. Je continuerai ! (Très bien ! et applaudissements sur les travées du RPR.)
M. René Rouquet. Ce n'est pas vraiment digne d'un ministre ! On se croirait dans un meeting !
M. André Rouvière. Cela ne grandit pas la fonction !
M. Jean-Louis Debré, ministre de l'intérieur. Je constate avec satisfaction que la réforme avance, qu'elle se met en oeuvre ; en dépit de ce que je peux voir ou entendre ici ou là, plus de quatre-vingt-dix comités départementaux sont aujourd'hui installés, et la réforme des horaires a déjà été votée dans près de quarante-quatre départements. Cela s'est naturellement fait sans déclaration ni clairon. Mais la réforme est en marche, et vous ne l'arrêterez pas ! En tout cas, tant que je serai ici, elle continuera !
Ainsi, grâce au Gouvernement, la police nationale est en train de franchir une étape majeure à son profit, au profit de l'Etat, de la collectivité nationale, c'est-à-dire au profit des Françaises et des Français.
Je suis convaincu - je crois avoir compris que MM. Cabanel et Masson partageaient cette conviction - que cette réforme permettra une efficacité accrue des services de police.
Sachez, en effet, que le nouveau régime permettra de récupérer, par exemple, soixante-quinze agents à Marseille, c'est-à-dire de doubler les équipes de police-secours, ou encore trente et un agents à Nantes, pour compléter la section d'intervention et renforcer les services de roulement des petites circonscriptions de l'agglomération. Voilà pourquoi je suis déterminé.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, un bon budget est un budget permettant l'exercice des missions régaliennes de l'Etat. Je considère que tel est le cas du projet de budget que j'ai l'honneur de vous présenter aujourd'hui. Je remercie les rapporteurs, MM. Cabanel, Masson et Laurin, de partager cette analyse.
Les crédits de la police, tout d'abord, approchent 28 milliards de francs. L'enveloppe est donc stable par rapport à 1996.
S'il y a stabilité - j'ai également utilisé le mot « pause » - il n'y a pas recul, ni a fortiori remise en cause de la loi d'orientation et de programmation pour la sécurité, la LOPS. Prétendre le contraire est inexact. J'aurai l'occasion de l'expliciter dans quelques instants en détaillant le projet de budget de la police.
S'agissant des emplois, 305 postes de brigadiers-majors sont créés pour remplacer des postes de commissaires et d'officiers, dont les effectifs doivent diminuer conformément à la réforme des corps.
Sont également créés 300 postes de brigadiers-majors remplaçant un nombre équivalent de postes d'officiers de paix, au titre de la promotion sociale.
Par ailleurs, 180 postes d'agents administratifs et techniques, destinés à remplacer des policiers actifs devant revenir sur la voie publique, seront disponibles par dégel.
Cela signifie, monsieur Hyest, puisqu'il s'agit d'un objectif de la LOPS, que, entre 1995 et 1997, le nombre d'agents administratifs et techniques venus renforcer la police nationale dépassera 1 800 pour un objectif sur cinq ans de 5 000.
Oui, monsieur Masson, il y a décalage, mais en aucune sorte catastrophe. Simplement, compte tenu de la situation actuelle, la mise en oeuvre de la LOPS devra être étalée sur un ou deux ans supplémentaires sur le plan budgétaire.
Enfin, pour en finir avec les emplois, prenant acte des difficultés à recruter les policiers auxiliaires et de la réorganisation du service national, j'ai accepté de renoncer à 500 postes de policiers auxiliaires qui n'étaient pas pourvus, puisque, sur les 9 725 postes ouverts, seulement 8 300 sont occupés. Notre marge de progression reste de 1 000 policiers auxiliaires.
Bien entendu, messieurs Masson, Plasait, Laurin et Chérioux, je suis très attaché à ce que la réforme du service national n'entame pas les moyens de la police nationale, pas plus, d'ailleurs, que ceux de la brigade des sapeurs-pompiers de Paris ou du bataillon des marins-pompiers de Marseille. Les concertations interministérielles appropriées sont en cours. Sur ce point, je vous rassure, monsieur Chérioux : je suis très attaché à ce que la brigade des sapeurs-pompiers de Paris fonctionne dans les meilleures conditions ; pour ce faire, elle doit disposer des moyens nécessaires. Croyez bien que j'y veillerai. (Très bien ! et applaudissements sur certaines travées du RPR et des Républicains et Indépendants.)
Après l'emploi, j'évoquerai maintenant le fonctionnement.
Les crédits approcheront 4 milliards de francs. Ils reculent donc, tout en affichant une progression supérieure à 7 % en quatre ans.
C'est justement cette progression qui, combinée à l'effort de gestion engagé depuis 1993, me fait dire que les moyens des services opérationnels ne seront pas affectés ; je remercie MM. Masson et Cabanel de partager cette analyse.
Là aussi, pour répondre à de nombreuses assertions, je voudrais insister sur le renforcement et la modernisation des moyens de la police.
Le parc automobile, par exemple, a été quasiment renouvelé depuis 1993 et, dans le même temps, augmenté de près de 2 000 véhicules.
De même, l'informatique a progressé par la mise en oeuvre d'outils comme Canonge et, demain, TESA, favorisant la police de proximité et la police technique et scientifique.
Il y a donc des progrès ; mais, évidemment, les besoins des services et l'attente légitime de la population ne se réduisent pas. Je resterai donc particulièrement attentif à ce que la pause dans les crédits de fonctionnement ne se poursuive pas. Et je rejoins votre souci, monsieur Masson, d'avoir recours, en informatique, le plus possible à des progiciels achetés « sur étagère » plutôt qu'à des programmes spécifiques.
J'en viens à l'équipement. Il mobilisera environ 900 millions de francs au profit principalement d'ACROPOL et de l'immobilier.
Pour la première fois en 1997, le projet de loi de finances initial intègre les crédits nécessaires à la mise en oeuvre d'ACROPOL.
Cette inscription devrait rassurer ceux qui, comme MM. Demuynck, Masson et Cabanel, se sont inquiétés de la mise en oeuvre de ce projet prioritaire, destiné à donner à la police nationale des équipements de transmissions efficaces et confidentiels.
ACROPOL fonctionne à Grenoble et à Lyon, où il a d'ailleurs donné pleinement satisfaction lors du dernier G7. Il est en cours d'implantation en Picardie.
Les crédits inscrits au budget sont destinés à la région parisienne, où les difficultés techniques se révèlent beaucoup plus grandes qu'on ne l'avait imaginé. Naturellement, je suis déterminé à ce qu'ACROPOL aille à son terme, et vite. Mais il faut savoir que la région parisienne est un secteur dans lequel les contraintes techniques sont considérables. Actuellement, les spécialistes étudient la façon de régler ces difficultés.
Quant à l'immobilier, c'est-à-dire la rénovation et la construction de commissariats et d'hôtels de police, grâce aux efforts combinés des crédits d'équipement et au recours à des solutions innovantes, nous livrerons environ 50 000 mètres carrés de locaux, comme en 1995 et en 1996.
A ceux qui s'interrogent sur la LOPS, je rappelle qu'en 1992-1993 le ministère ne livrait guère plus de 30 000 mètres carrés de bureaux. Cela fait trois ans que nous en livrons plus de 50 000 mètres carrés !
Pour terminer avec le projet de budget de la police, je voudrais évoquer les crédits réservés à la formation et à l'action sociale.
J'entends dire, ici ou là, qu'il importe que la police soit mieux formée. Il est effectivement essentiel d'avoir une police de professionnels et une formation de haut niveau.
Actuellement, monsieur Hyest, 2 800 fonctionnaires, dont 2 000 formateurs, travaillent dans la formation.
La convention avec la formation publique prévoit cinq jours de formation pour un fonctionnaire exerçant dans la police. Or, nous en sommes à sept jours. Nous dépensons 300 millions de francs pour le fonctionnement des vingt-deux écoles de police.
Le budget pour 1997 de l'école nationale de police sera identique à celui de 1996. S'agissant de l'institut des hautes études de la sécurité intérieure, l'IHESI, qui n'a pas de budget spécifique, ses moyens seront maintenus, et même augmentés grâce à la renégociation de son loyer.
Je l'ai dit et je le répète, la police nationale, ce sont d'abord des hommes et des femmes exerçant un métier passionnant mais difficile, comme malheureusement l'actualité vient encore de le démontrer.
Il faut donc que l'environnement professionnel proposé par l'administration aux policiers tienne compte au maximum de ces difficultés.
Dans cette perspective, je voudrais évoquer deux éléments de l'action sociale qui seront encore renforcés l'année prochaine.
Je pense tout d'abord au logement, qui constitue, à mes yeux, un élément prioritaire pour le mieux-vivre des policiers.
Nous en avons fait une priorité dès le budget de 1994, en multipliant par 2,5 les crédits ; en 1997, pour la troisième année consécutive, plus de 900 logements seront proposés aux fonctionnaires de la police nationale, ainsi que vous l'avez noté, monsieur Hyest. Par conséquent, pour la troisième année consécutive, nous serons en avance sur la LOPS !
Parallèlement au logement, sera privilégié le soutien médical et psychologique au profit des policiers. Les quelque soixante suicides enregistrés, hélas ! en 1996 dans la police, soulignent, s'il le fallait, par chaque drame qu'ils représentent, la fragilité de beaucoup de fonctionnaires.
Dans la plupart des cas, il s'agit naturellement de difficultés personnelles ; mais il ne peut s'agir que de cela, et l'administration se doit d'écouter et d'aider les policiers confrontés à des difficultés physiologiques ou psychologiques.
La réforme des horaires, je l'ai déjà dit, contribuera à un meilleur environnement, à des conditions de travail et de vie personnelle plus équilibrées.
Je souhaite aussi réserver des crédits supplémentaires importants pour financer des vacations de praticiens et d'assistantes sociales.
Après la police nationale, je voudrais maintenant présenter les crédits réservés à l'administration territoriale et à la sécurité civile.
Avec 6,3 milliards de francs, les crédits de l'administration territoriale progressent de 4 %.
Les moyens de fonctionnement sont maintenus, tandis que les crédits immobiliers progressent de manière sensible.
Les effectifs évoluent favorablement à la suite du renfort de cent postes dégelés, auxquels il faut ajouter vingt-cinq emplois transférés de l'administration centrale, ainsi que les emplois redéployés dans le cadre de la réforme de l'Etat : je pense notamment à la suppression des commissions administratives de suspension du permis de conduire, qui mobilisent encore aujourd'hui deux cents agents.
En contrepartie, disparaissent quatre cents emplois gelés depuis plusieurs années, et donc inutilisables en l'état.
Sans compter les crédits qui seront ouverts au prochain collectif pour le renouvellement des trente-deux hélicoptères, prévu sur six ans -, pour un coût global de un milliard de francs, avec six premiers hélicoptères achetés dès 1997 - le projet de budget de la sécurité civile approche 1,2 milliard de francs, en progrès de 2 %.
Cette évolution souligne la dynamique de la politique engagée par l'Etat, via le ministère de l'intérieur, pour exercer ses responsabilités au profit d'une meilleure protection de la population contre les risques naturels et technologiques. Cette dynamique, je la constate dans l'adoption, grâce au Parlement, des deux lois importantes sur les SDIS, les services départementaux d'incendie et de secours, et sur le volontariat des pompiers, ainsi que dans la sortie rapide des textes réglementaires correspondants.
Je remercie l'ensemble des fonctionnaires de la sécurité civile - notamment l'ancien directeur, M. Canépa, et le nouveau, M. Denis - de m'accompagner dans cette voie.
Je remercie aussi M. Laurin, l'un de vos rapporteurs pour avis, d'avoir relevé les efforts que nous avons faits dans ce domaine, car je crois qu'il s'agit effectivement d'avancées décisives pour les sapeurs-pompiers.
Je retrouve cette dynamique dans l'achèvement du programme Canadair, qui mettra à notre disposition douze nouveaux appareils pour la prochaine campagne de feux, douze appareils qui auront coûté à l'Etat français 1,6 milliard de francs.
Enfin, cette dynamique est vérifiée par le prochain déménagement de la direction de la sécurité civile de Levallois à Asnières et par le regroupement de cette direction avec le service du haut-fonctionnaire de défense, au profit d'un concept renforcé de défense et de sécurité civile réunifiées.
Monsieur le président, mesdames, messieurs les sénateurs, nous nous sommes engagés dans une réforme majeure de la police nationale.
La gestion des finances publiques rend indispensable une stabilisation des dépenses.
Malgré cette hausse, les moyens figurant dans le projet de loi de finances que j'ai eu l'honneur de vous présenter permettront au ministère de l'intérieur d'exercer ses missions ; non seulement ses missions de police, mais aussi les missions de l'Etat et, avec le préfet Blangy, nous veillons à ce que l'Etat soit représenté, et bien représenté, dans les départements.
Les efforts de rigueur que je fais, avec la collaboration de M. Jévakhoff, dans l'utilisation des crédits de fonctionnement et le recours à des solutions innovantes en matière immobilière donneront en effet à la police les moyens financiers nécessaires.
Parallèlement, la réforme engagée en matière d'horaires favorisera son adaptation, pour une plus grande efficacité dans la lutte contre toutes les délinquances et pour de meilleures conditions de travail des policiers.
Les moyens des préfectures sont sauvegardés, la sécurité civile se modernise.
Je vous remercie donc d'approuver ce projet de budget, pour me permettre de continuer cette politique avec une détermination sans faille. Une politique, monsieur Bonnet, qui n'a d'autre ambition que de restaurer l'Etat, un Etat capable de dominer les intérêts particuliers, un Etat qui assume pleinement ses missions régaliennes, un Etat qui ne laisse à personne la possibilité, la volonté, la velléité de se substituer à lui du fait de sa carence, un Etat qui soutient ses fonctionnaires, et qui soutient notamment ses policiers lorsqu'ils sont l'objet d'injustes ou d'injurieuses critiques - je vous le dis, chaque fois qu'un policier sera critiqué, je me lèverai et je dirai qu'au nom de l'Etat on n'a pas le droit d'attaquer la police (Applaudissements sur les travées du RPR) - un Etat, monsieur Bonnet, qui fait en sorte que la loi votée par vous soit respectée par tous, un Etat qui fait que vous, le matin, dans cet hémicycle, vous votez la loi et que, l'après-midi, à l'adresse de ceux qui défilent dans la rue, ne prône pas la désobéissance à cette loi, à une loi qui est - parce que c'est le fondement de l'Etat - la même pour chacun, quelle que soit son appartenance politique, quelle que soit son origine, parce que c'est la loi de la République.
Finalement, ce budget, monsieur Bonnet, est l'expression d'une certaine conception de l'Etat, mais aussi et surtout d'une certaine conception de la République. (Applaudissements sur les travées du RPR, des Républicains et Indépendants et de l'Union centriste.)
M. le président. Nous allons procéder à l'examen et au vote des crédits concernant l'intérieur et la décentralisation et figurant aux états B et C.
Je rappelle au Sénat que les crédits affectés à la décentralisation ont été examinés hier, jeudi 28 novembre.

ÉTAT B