II. DES INSTANCES AU RÔLE LIMITÉ POUR UN SYSTÈME DE REPRÉSENTATION QUI DEMEURE COMPLEXE

A. L'ASSEMBLÉE DES FRANÇAIS DE L'ÉTRANGER : UNE ASSEMBLÉE CONSULTATIVE QUI N'A PAS TROUVÉ TOUTE SA PLACE

La loi du 22 juillet 2013 a uniformisé la composition de l'Assemblée des Français de l'étranger, en supprimant la présence des députés et sénateurs ainsi que celle des personnalités qualifiées désignées par le ministre de l'Europe et des affaires étrangères.

Pour autant, l'articulation entre les conseils consulaires et l'AFE reste complexe pour les Français établis hors de France. La mesure de simplification institutionnelle envisagée un temps par le Gouvernement14(*), selon laquelle l'ensemble des conseillers des Français de l'étranger siègeraient à l'AFE, apparaît toutefois difficile à mettre en oeuvre.

Pour les rapporteurs, le manque de lisibilité du système aux yeux des Français expatriés tient pour beaucoup à l'absence de fonctions décisionnelles exercées par l'AFE. Le rôle exclusivement consultatif qui lui a été dévolu par la loi du 22 juillet 2013 l'empêche de prendre sa place en tant qu'échelon intermédiaire entre la représentation locale - les conseils consulaires - et la représentation nationale - le Parlement15(*).

Aussi les rapporteurs souhaitent-ils pousser à son terme la logique de la réforme de 2013, et faire de l'AFE une assemblée délibérative, en la dotant de pouvoirs décisionnaires dans trois domaines : en matière de bourses scolaires, l'AFE déciderait de l'attribution conjointement avec l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE)16(*). Elle instruirait également, avec la direction des Français de l'étranger et de l'administration consulaire, les demandes de versement des aides sociales17(*) et des aides de soutien au tissu associatif des Français à l'étranger (STAFE)18(*), dont le principe serait inscrit dans la loi.

B. UN RATTACHEMENT ADMINISTRATIF ET BUDGÉTAIRE AU MINISTÈRE DE L'EUROPE ET DES AFFAIRES ÉTRANGÈRES, UN PORTAGE POLITIQUE PAS TOUJOURS À LA HAUTEUR

Depuis 2011, le portefeuille gouvernemental des Français de l'étranger relève d'un ministère délégué ou d'un secrétariat d'État, et non pas d'un ministère de plein exercice. Sous la tutelle du ministre de l'Europe et des affaires étrangères, le ministre délégué peut seulement disposer des services placés sous l'autorité de ce dernier : aujourd'hui, il n'a donc pas d'autorité hiérarchique directe sur la direction des Français à l'étranger et de l'administration consulaire. Cette situation singulière est jugée par les rapporteurs préjudiciable à la bonne mise en oeuvre des politiques publiques intéressant les Français de l'étranger ainsi qu'à la poursuite d'un dialogue sur un pied d'égalité avec l'AFE ; c'est pourquoi ils suggèrent de réserver le portefeuille des Français établis hors de France au ministre chargé des affaires étrangères lui-même.

Plus généralement, les rapporteurs déplorent que l'AFE se soit retrouvée prisonnière d'un dialogue exclusif avec le membre du Gouvernement dédié à la relation avec les Français de l'étranger. Alors que la loi de 2013 visait, dans son esprit, à permettre un échange entre l'AFE et le ministre compétent pour chaque domaine considéré - ministre chargé du budget ; ministre chargé des affaires sociales ; etc. -, en pratique, seul le ministre délégué aux Français de l'étranger se déplace devant l'AFE, quel que soit le thème abordé.

Les questions intéressant les Français établis hors de France ont pourtant une dimension intrinsèquement interministérielle, comme l'ont montré la crise liée à la covid-19 et la réforme des retraites ; aussi les rapporteurs proposent-ils d'extraire du programme 151 « Français à l'étranger et affaires consulaires » les crédits relatifs à l'AFE19(*), pour les rattacher auprès du Premier ministre.


* 14 Voir le rapport n° 251 (2018-2019) de Jacky Deromedi fait au nom de la commission des lois.

* 15 Les onze députés représentant les Français établis hors de France ont été élus pour la première fois en 2012, sur le fondement de l'article 24 de la Constitution tel qu'issu de la révision constitutionnelle du 23 juillet 2008

* 16 Le montant des bourses scolaires s'est élevé à plus de 115 millions d'euros en 2021.

* 17 Le montant des aides sociales s'est élevé à 15,4 millions d'euros en 2022.

* 18 Le budget alloué au STAFE par la loi de finances pour 2023 s'est élevé à 2 millions d'euros.

* 19 En loi de finances initiale pour 2023, ils se sont élevés à 420 000 euros (dont 180 000 euros de budget de fonctionnement).