I. LE DÉBAT INTITULÉ « POUR DES RÈGLES DU JEU ÉQUITABLES, METTRE FIN À LA DISCRIMINATION À L'ÉGARD DES FEMMES DANS LE MONDE DU SPORT »

1. L'intervention de Mme Anne Stambach-Terrenoir, au nom du groupe GUE

Merci, Monsieur le Président.

Tout d'abord, chers collègues, je veux vous dire que je suis très émue et honorée de m'exprimer pour la première fois dans cette illustre Assemblée et je suis très heureuse de le faire à l'occasion de ce beau rapport sur les droits des femmes dans le monde du sport ; d'autant que, comme le souligne la conclusion, les points communs entre le traitement stéréotypé des sportives et celui des femmes engagées en politique sont nombreux.

Nous nous accordons particulièrement avec la nécessité de permettre aux femmes de vivre dignement de leur sport quand elles le pratiquent à un haut niveau, au même titre que les hommes. Cela implique des aménagements pour concilier vie professionnelle et vie personnelle et disposer du temps nécessaire pour se consacrer pleinement à la pratique du sport.

Le rapport montre également que dans les sports collectifs, les hommes gagnent en moyenne plus de 100 fois le revenu des femmes : un écart pareil est inacceptable au XXIe siècle et il nous faudra impérativement suivre l'évolution de cette donnée dans les prochaines années. Enfin, nous affirmons à vos côtés, que les femmes doivent être largement plus représentées au sein des instances décisionnaires. Les fédérations sportives internationales et nationales doivent donc donner l'exemple et imposer des quotas. La résolution propose un quota de 40 % : c'est une bonne avancée mais il nous faut viser la parité réelle et donc atteindre un quota de 50 %.

Le rapport s'attache à juste titre à la discrimination envers les femmes LBTI dans le sport. L'existence de « tests de féminité » est à notre sens une insulte à la dignité humaine. Cette pratique est contraire aux droits fondamentaux défendus par le Conseil de l'Europe et doit être définitivement abolie. Il faut aussi saisir ce problème à la racine en proposant aux États membres de réformer leur système éducatif pour que les nouvelles générations soient formées sur les questions d'égalité de genre et dotées des outils nécessaires pour combattre l'émergence de discriminations.

Concernant la couverture médiatique du sport féminin, nous sommes loin du compte. Les femmes pâtissent d'une plus faible médiatisation et elles sont aussi trop souvent victimes d'une hypersexualisation de la part des commentateurs, voire d'un sexisme totalement décomplexé. Nous disons aux médias qu'il est urgent d'adopter des pratiques inclusives et non discriminatoires.

Le rapport pointe enfin très justement la question des violences faites aux femmes. Mon pays, la France, n'est pas épargné. Tout récemment, un grand club de football a été sanctionné par notre Défenseur des droits pour atteinte au principe de non-discrimination fondée sur le sexe ; et une joueuse de tennis a obtenu la mise en examen de son ancien entraîneur pour viol et agression sexuelle. Le mouvement « Me Too » a permis de libérer la parole des victimes mais elles sont encore aujourd'hui trop nombreuses à se taire par peur, par pression sociale.

Et la France, comme hélas beaucoup de pays, ne met pas les moyens nécessaires dans la lutte contre les violences sexistes et sexuelles. Par ailleurs, nous regrettons que la Türkiye se soit retirée de la Convention d'Istanbul et nous espérons que ce rapport aidera à une prise de conscience générale et à une amélioration dans le milieu du sport.

Je salue donc ce beau travail et j'aimerais suggérer à Madame la rapporteure la réalisation d'un bilan - auprès de la commission compétente - sur l'évolution de la situation pour les États membres dans les prochaines années, car le sujet est important. Les sportives de haut niveau sont des exemples pour les jeunes générations : elles donnent envie aux petites filles et aux jeunes femmes de s'engager, de se dépasser ; et le sport amateur est un facteur majeur d'émancipation, de cohésion sociale, de santé, d'épanouissement tout simplement. Il est donc capital de garantir un accès équitable et les mêmes règles du jeu pour tous et toutes.

Je vous remercie.

2. L'intervention de Mme Mireille Clapot

Monsieur le Président.

Lorsqu'une petite fille regarde la cour de récréation de son école, elle peut y voir des garçons qui jouent au foot et qui se moquent des filles reléguées aux marges et qui les renvoient à jouer à la poupée ; ou alors, elle peut y voir ses amis, filles et garçons mélangés, qui jouent aux jeux de balle ou à cache-cache, qui courent, qui sautent, bref, qui découvrent les possibilités de dépassement de leur corps.

Lorsqu'une petite fille regarde la télévision, elle doit pouvoir s'identifier à une championne et dire à son frère ou à ses parents : « Un jour, je serai comme elle », sans qu'on lui réponde « Non, ce sera trop dur pour toi, tu n'auras pas de vie de famille, tu devras faire des efforts inouïs et tu gagneras moins que tes collègues masculins. »

Lorsqu'une petite fille surfe sur Internet, elle est souvent confrontée à une représentation stéréotypée l'assignant à un corps sexualisé, érotisé et un objet de désir masculin. Elle doit pouvoir y trouver des images diverses, une reconnaissance de sa spécificité en matière d'orientation sexuelle et jamais, jamais n'être confrontée à des commentaires haineux.

Lorsqu'une jeune fille s'engage dans un sport, elle rentre dans une famille où l'entraîneur devient l'adulte de référence ; celui à qui on se confie ; celui qui voit les possibilités du corps, les limites du corps ; celui qui assiste aux transformations du corps à la puberté ; celui qui voit les émotions naissantes liées à l'éclosion de la sexualité. Elle rentre dans une dépendance par rapport à cet adulte, qui peut alors soit l'aider sur le chemin de performance ou alors abuser de cette domination psychologique.

Chère rapporteure, chers collègues,

Je crois que le sport est une activité où l'on apprend le respect des règles, où le corps et l'âme se dépassent, où l'on crée du lien social bénéfique. Le sport, s'il est pratiqué sans excès et s'il n'est pas instrumentalisé par un nationalisme ou un prosélytisme religieux, est une activité pleine de bienfaits. Le sport, s'il n'est pas un espace de domination, est un formidable vecteur d'émancipation.

De nombreux témoignages recueillis par votre excellente enquête, Madame la rapporteure, montrent que la jeune fille sportive est fragilisée et qu'elle doit être protégée de façon institutionnelle.

Longtemps, c'est la loi du silence qui a prévalu. Mais les langues se sont déliées : Sarah Abitbol, la patineuse artistique française, a dénoncé les violences sexuelles imposées par son entraîneur.

Alors, nous devons saluer les programmes de prévention des violences et des inégalités lorsqu'ils existent et nous devons inciter les États à prendre leur part par des politiques publiques adaptées. Les outils existent. Donnons l'exemple dans les États membres ; incitons nos fédérations à garantir l'égalité, y compris en aménageant les infrastructures et en les aidant à accéder aux formations d'entraîneuses et d'arbitres ; incitons les médias à être équitables dans les retransmissions et les commentaires ; oeuvrons pour l'égalité de revenus.

Grâce à votre rapport, chère collègue Edite Estrela, et grâce à la résolution que nous allons voter, chaque petite fille pourra se projeter dans un avenir de championne et pourra vivre la compétition en harmonie avec son développement personnel harmonieux, avec les hommes et non dans la méfiance des hommes.

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