Rapport d'information n° 191 (2022-2023) de M. Mathieu DARNAUD et Mme Françoise GATEL , fait au nom de la commission des lois, déposé le 7 décembre 2022

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N° 191

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 7 décembre 2022

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission des lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur : « Métropole d' Aix-Marseille-Provence : une métropole à la croisée des chemins »,

Par M. Mathieu DARNAUD et Mme Françoise GATEL,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : M. François-Noël Buffet , président ; Mmes Catherine Di Folco, Marie-Pierre de La Gontrie, MM. Christophe-André Frassa, Jérôme Durain, Marc-Philippe Daubresse, Philippe Bonnecarrère, Mme Nathalie Goulet, M. Thani Mohamed Soilihi, Mmes Cécile Cukierman, Maryse Carrère, MM. Alain Marc, Guy Benarroche , vice-présidents ; M. André Reichardt, Mmes Laurence Harribey, Muriel Jourda, Agnès Canayer , secrétaires ; Mme Éliane Assassi, MM. Philippe Bas, Arnaud de Belenet, Mmes Nadine Bellurot, Catherine Belrhiti, Esther Benbassa, MM. François Bonhomme, Hussein Bourgi, Mme Valérie Boyer, M. Mathieu Darnaud, Mmes Françoise Dumont, Jacqueline Eustache-Brinio, M. Pierre Frogier, Mme Françoise Gatel, MM. Loïc Hervé, Patrick Kanner, Éric Kerrouche, Jean-Yves Leconte, Henri Leroy, Stéphane Le Rudulier, Mme Brigitte Lherbier, MM. Didier Marie, Hervé Marseille, Mme Marie Mercier, MM. Alain Richard, Jean-Yves Roux,
Jean-Pierre Sueur, Mme Lana Tetuanui, M. Dominique Théophile, Mmes Claudine Thomas, Dominique Vérien, M. Dany Wattebled .

AVANT-PROPOS
DU PRÉSIDENT FRANÇOIS-NOËL BUFFET

Alors que l'organisation et le fonctionnement de la métropole d'Aix-Marseille-Provence ont récemment été affectés en profondeur par l'article 181 de la loi du 22 février 2022 relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale dite « 3DS » , il incombe au Parlement, et en premier lieu au Sénat, représentant constitutionnel des collectivités territoriales, de procéder à un premier point d'étape sur la conduite de cette réforme , sans préjudice des conclusions qui seront tirées par le Gouvernement dans le cadre du rapport qu'il doit remettre au Parlement au terme de l'année 2023 1 ( * ) .

Cette première évaluation s'avère d'autant plus essentielle que le processus législatif ayant conduit à l'adoption de ces dispositions est entaché d'un défaut de méthode tenant, d'une part, à la faiblesse de l'étude d'impact sur ces dispositifs, insérés par le Gouvernement en cours de discussion parlementaire au Sénat, et d'autre part, au calendrier des discussions entre l'État et les acteurs locaux qui se sont poursuivies parallèlement à l'examen du texte par le Parlement.

Enfin, le contexte d'un investissement renouvelé et significatif de l'État au bénéfice de la ville de Marseille dans le cadre du plan « Marseille en grand » , implique d'évaluer la qualité des instruments institutionnels à disposition des décideurs locaux et nationaux pour la conduite des politiques publiques au niveau local, parmi lesquels une métropole fonctionnelle et engagée en faveur de la réussite de son territoire s'avère essentielle.

Menant leurs travaux au Sénat comme à Marseille et Aix-en-Provence, les rapporteurs, accompagnés des membres de la mission, ont porté une attention particulière à la genèse de la réforme et au contexte de sa mise en oeuvre. Au terme de plusieurs mois d'échanges avec les acteurs concernés, ils partagent le constat qu'il n'est, aujourd'hui, nullement question de « détricoter » une réforme qui vient d'être adoptée , formulée par le Gouvernement au prix d'une concertation avec les acteurs locaux dont ils mesurent pleinement la difficulté, et dont la nécessité n'est nullement démentie.

Le présent rapport n'entend donc pas revenir sur les principes ayant guidé cette réforme, à savoir :

- clarifier l'organisation interne de la métropole ;

- et doter celle-ci de moyens, à la fois juridiques et financiers, d'exercer les compétences et attributions qui lui revenaient 2 ( * ) .

Il entend formuler des propositions pour améliorer le dispositif métropolitain, dans l'objectif d'offrir aux habitants de la métropole l'efficacité nécessaire dans la conduite de l'action publique de proximité. Ces propositions suivent trois axes.

En premier lieu, il importe de parachever la réforme initiée par l'article 181 de la loi dite « 3DS ». Afin que l'intention du législateur soit pleinement respectée, les acteurs locaux doivent se rapprocher au plus vite , pour tirer, avec l'accompagnement de l'État, les conséquences localement de cette réforme dans la répartition des compétences entre la métropole et les communes membres, la détermination de leurs relations financières futures ainsi que l'organisation déconcentrée de la métropole.

En deuxième lieu, il est apparu aux rapporteurs qu'une amélioration de la situation de la ville de Marseille constituait une condition sine qua non d'un rééquilibrage de la métropole. En la matière, le bon déroulement du plan « Marseille en grand » doit permettre de conforter à terme la cohérence métropolitaine.

En dernier lieu, les travaux menés par les rapporteurs ont conduit à constater qu'au-delà des dispositions contenues dans la loi dite « 3DS », l'avenir institutionnel de la métropole demeure très incertain . Le présent rapport ambitionne donc moins de définir des scenarii - qui sont en tout état de cause bien connus des acteurs locaux - que de proposer une démarche pour définir un projet partagé pour l'avenir du territoire ; dans un second temps ce projet métropolitain, qui fait encore cruellement défaut à la métropole d'Aix-Marseille-Provence, pourra conduire à des évolutions de structures, sur lesquelles il appartiendra aux acteurs locaux de se prononcer, en responsabilité et avec l'accompagnement de l'État .

L'ESSENTIEL

L'organisation et le fonctionnement de la métropole d'Aix-Marseille-Provence ont récemment été modifiés en profondeur par la loi dite « 3DS ». Alors que la discussion parlementaire sur ces dispositions n'a pas permis d'en appréhender la pleine mesure et que le plan « Marseille en Grand » commence à déployer ses effets, il apparaît nécessaire de procéder à un premier point d'étape sur la conduite de cette réforme .

Après plusieurs mois d'échanges avec les acteurs concernés, les membres de la mission 3 ( * ) partagent le constat qu'il n'est, aujourd'hui, nullement question de « détricoter » la réforme qui vient d'être adoptée .

Toutefois, constatant l'incomplétude d'une réforme constituant le plus petit dénominateur commun entre les acteurs locaux, ils entendent formuler des propositions pour améliorer le dispositif métropolitain, dans l'objectif d'offrir aux habitants de la métropole l'efficacité nécessaire dans la conduite de l'action publique de proximité . Ces propositions suivent trois axes :

- parachever la récente réforme de la métropole d'Aix-Marseille-Provence ;

- accélérer les mesures de rééquilibrage pour la ville de Marseille afin de conforter la cohérence métropolitaine ;

- engager une réflexion pour une organisation institutionnelle de la métropole choisie par les acteurs locaux .

I. UNE MÉTROPOLE AU MILIEU DU GUÉ

A. NÉE D'UNE CRÉATION HEURTÉE, UNE MÉTROPOLE ENCORE INACHEVÉE

Fruit de multiples compromis législatifs et locaux, la métropole d'Aix-Marseille-Provence a rencontré, dès sa création, des difficultés à faire émerger un projet métropolitain sur son périmètre.

1. Une métropole construite sur une promesse de résorption des déséquilibres et des contrastes existants

Si l'aire urbaine d'Aix-Marseille remplissait les critères objectifs pour prétendre devenir une métropole, il a été constaté dès sa création d'importants déséquilibres sur son périmètre rendant l'enracinement du fait métropolitain plus complexe qu'ailleurs : un polycentrisme particulièrement affirmé et des dynamiques économiques, démographiques, sociales et culturelles divergentes.

En conséquence, il a été prévu dès la genèse de la métropole qu'il serait nécessaire de bâtir une structure innovante à même « de dépasser les concurrences internes » 4 ( * ) au profit d'un projet à destination des citoyens.

2. Une construction particulièrement malaisée

La création de la métropole d'Aix-Marseille-Provence a pâti d'une opposition des élus locaux assise sur un double rejet : sur la méthode, le projet a pu être considéré comme largement imposé depuis Paris ; sur le fond, il n'était pas assis sur un socle solide et préexistant de coopération intercommunale à l'échelle du futur périmètre métropolitain.

Révélateur de dissensions locales, le parcours législatif de la métropole d'Aix-Marseille-Provence a été heurté et a accouché d'un objet métropolitain non identifié, marqué par les caractéristiques suivantes, fruit de trois compromis successifs qui n'ont pas résolu les difficultés :

- une date d'entrée en vigueur de la réforme repoussée d'un an ;

- la création d'un échelon déconcentré de la métropole, les conseils de territoires, s'étant vu déléguer automatiquement l'exercice de compétences métropolitaines ;

- la garantie d'une représentation de l'ensemble des communes du périmètre au sein du conseil métropolitain aboutissant à instituer un conseil pléthorique ;

- un panier de compétences, dérogatoire au régime de droit commun des métropoles .

3. Une métropole qui ne remplissait qu'imparfaitement ses objectifs

Préalablement à l'entrée de la réforme prévue par la loi dite « 3DS », la métropole d'Aix-Marseille-Provence pâtissait de trois principaux défauts.

En premier lieu, la répartition des compétences entre communes et métropole n'a pas permis à cette dernière de s'approprier pleinement les compétences qui lui étaient dévolues par la loi. Cela se traduit également, pour les citoyens, par une absence d'intelligibilité de la répartition réelle des compétences et de dynamiques territoriales fortes au service du développement économique, social et culturel de l'espace métropolitain.

En deuxième lieu, la permanence de conseils de territoire a rendu difficile l'émergence de la métropole comme entité territoriale à part entière. Tout en alourdissant le fonctionnement métropolitain, ces instances ont limité le champ de compétences dévolu à la métropole comme les marges de manoeuvre financières de celle-ci pour la conduite de ses projets.

En dernier lieu, la situation financière de la métropole ne permettait pas au territoire de bénéficier d'une capacité d'investissement à la hauteur de ses besoins. Cette situation posait une contrainte financière majeure pour le développement futur de la métropole.

B. UNE MÉTROPOLE À L'ORGANISATION RÉCEMMENT RÉFORMÉE

1. Un récent renforcement de l'investissement de l'État dans le territoire conditionné, en particulier, à des évolutions de la gouvernance de la métropole

Dans un discours prononcé le 2 septembre 2021 depuis le Pharo, le président Emmanuel Macron a annoncé le plan « Marseille en Grand » découpé en cinq axes 5 ( * ) et financé par l'État à hauteur de 1,5 milliard d'euros, dont 1 milliard d'euros fléchés directement sur les transports comprenant 250 millions d'euros de subventions, le reste étant constitué de prêts garantis par l'État.

Toutefois, comme l'a annoncé le président de la République à la création de ce plan, l'État « financer[a] à la condition qu'on règle les problèmes d'organisation et de gouvernance » de la ville de Marseille et de la métropole .

2. Le corollaire : la refonte de l'organisation de la métropole par le législateur en 2022

Pour ce faire, le Premier ministre avait annoncé trois nécessaires évolutions institutionnelles : « la simplification de la gouvernance métropolitaine , (...) la clarification de la répartition des compétences entre la métropole et les communes membres , et la révision des (...) relations financières » entre les communes membres et la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

En conséquence, lors de l'examen du projet de loi dit « 3DS » la ministre Jacqueline Gourault a proposé, dans le texte initial puis par amendement à l'Assemblée nationale, une nouvelle architecture institutionnelle pour la métropole d'Aix-Marseille-Provence qui s'articule autour de trois axes :

- la suppression des conseils de territoire , le conseil de la métropole devant délibérer pour arrêter l'organisation déconcentrée des services au plus tard le 1 er juillet 2022 ;

- la « redescente » de plusieurs compétences dites « de proximité » aux communes membres : soit en les attribuant en intégralité aux seules communes 6 ( * ) , soit en conditionnant leur exercice par la métropole à la reconnaissance d'un intérêt métropolitain 7 ( * ) ;

- et le renvoi de la redéfinition des relations financières entre la métropole et ses communes membres à une prochaine CLECT, nourrie de deux avis de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur 8 ( * ) .

II. REDONNER DE L'ÉLAN À LA MÉTROPOLE D'AIX-MARSEILLE-PROVENCE

A. ÉVITER L'ÉCLATEMENT MÉTROPOLITAIN EN COMBINANT MESURES ORGANISATIONNELLES ET RÉÉQUILIBRAGE

1. Parachever la récente réforme de la métropole : premier jalon du renforcement de la cohésion métropolitaine

La réforme souhaitée par le législateur dans le cadre de la loi dite « 3DS » doit permettre de rendre la métropole d'Aix-Marseille-Provence davantage fonctionnelle. Elle doit pour ce faire être parachevée, sur chacun de ses axes .

En premier lieu, la mission estime primordial de stabiliser les compétences respectives des communes et de la métropole afin de permettre leur pleine appropriation : il appartient au législateur de ne pas modifier à nouveau un cadre de répartition de compétences qu'il vient juste de fixer et à l'État de renforcer son accompagnement dans le déploiement de cette nouvelle répartition . Par ailleurs, en cas de frictions ponctuelles sur la répartition des compétences, la métropole et ses communes membres devraient être incitées à faire plein usage des facultés de délégation prévues par la loi. Enfin, si une définition de l'intérêt métropolitain admise des acteurs est effectivement actée avant le 31 décembre 2022, il conviendra d'en assurer la mise en oeuvre rapide.

En deuxième lieu, les acteurs locaux doivent trouver les voies et moyens d'un retour à la normale au niveau financier. La CLECT qui se tiendra à l'occasion des nouveaux transferts de compétences doit être l'occasion de redéfinir ces relations : la constitution de nouvelles ressources, comme le recours aux finances du département, constitueraient des palliatifs et doivent être évités. Dès lors, la nécessaire révision des attributions de compensation doit être envisagée dans le cadre global de la conclusion d'un nouveau pacte financier, sous l'égide de l'État, entre la métropole et ses communes membres , s'adossant sur un nouveau projet de territoire.

En dernier lieu, la mission estime que la suppression des conseils de territoire a constitué une indéniable avancée, dont il convient désormais de prendre pleinement acte . À cette fin, la métropole doit arrêter au plus vite, ainsi que souhaité par le législateur, les contours d'une organisation déconcentrée claire et lisible pour les élus comme pour les citoyens ; l'accompagnement de l'État, dès lors qu'il est sollicité par la métropole pour la conduite d'une telle transition, doit être garanti.

2. Parallèlement, rééquilibrer les territoires pour écarter définitivement tout risque de scission

Si le projet métropolitain aixo-marseillais avait comme objectif assigné par le législateur de « favoriser l'accroissement et le rééquilibrage de la solidarité financière de territoires aux richesses disparates » 9 ( * ) , les travaux de la mission ont souligné que cette construction institutionnelle n'a permis, à elle seule, ni d'épuiser les risques d'éclatement ni de rééquilibrer les territoires en son sein .

En conséquence, outre la constitution d'éventuels outils métropolitains de péréquation, seules des mesures de rééquilibrage ciblées sur la ville de Marseille permettront de garantir, à court comme à long terme, la viabilité de la métropole .

Si les rapporteurs ne peuvent que se féliciter que Marseille recueille une attention renforcée de l'État au moyen du plan « Marseille en Grand » , ils déplorent néanmoins que celle-ci ne s'inscrive pas dans un cadre mieux défini et associant davantage les élus locaux . Ils proposent dès lors trois pistes d'amélioration en la matière :

- évaluer régulièrement les mesures du plan pour s'assurer de leur efficacité ;

- instituer rapidement un comité de suivi, associant les élus locaux et l'Etat, du plan « Marseille en Grand » ;

- inscrire le plan dans la durée et envisager son renforcement à mesure que les objectifs de politique publique seront atteints.

B. ENGAGER UNE RÉFLEXION POUR UNE ORGANISATION INSTITUTIONNELLE DE LA MÉTROPOLE CHOISIE PAR LES ACTEURS LOCAUX

Aucun consensus ne semble se dégager pour l'heure sur le contenu et le calendrier d'une réforme institutionnelle de la métropole . Les paramètres d'une réforme sont toutefois connus et les options évoquées par les personnes auditionnées pourraient chacune constituer en soi une amélioration du fonctionnement de la métropole, dès lors que les élus auront un tel projet en partage. Les membres de la mission soulignent à cet égard que les élus du pays d'Arles qu'ils ont rencontré doivent être entendus dans leur rejet catégorique d'une éventuelle inclusion de leur territoire dans la métropole.

Dès lors, les membres de la mission jugent prioritaire d'inscrire la nécessaire réflexion sur l'organisation institutionnelle dans le long terme , afin qu'elle soit pleinement choisie par les acteurs locaux et adossée à un projet de territoire consensuel.

1. Le calendrier : un horizon à moyen terme

Les rapporteurs partagent le constat formulé par l'ensemble des acteurs locaux, élus ou représentants des services de l'État auditionnés qui estiment, au-delà de leurs divergences d'appréciation quant à la réforme institutionnelle devant éventuellement être déployée, qu'une telle réforme n'est pas à conduire dans l'immédiat .

Convaincus qu'aucune évolution durable de la métropole d'Aix-Marseille-Provence ne pourra être construite en l'absence de consensus sur un calendrier de réforme, les membres de la mission alertent les acteurs locaux sur la nécessité de faire émerger un tel calendrier avant d'enclencher les réflexions de fond et les concertations en la matière.

C'est pourquoi les membres de la mission proposent que deux échéances rythmant le processus de décision d'une réforme institutionnelle pour la métropole d'Aix-Marseille-Provence soient fixées :

- la première sur la définition d'un calendrier de réforme, si possible avant 2026 ;

- la seconde sur l'achèvement d'une éventuelle réforme institutionnelle.

Ils considèrent également qu'un calendrier de réforme entièrement lié aux échéances électorales emporterait davantage de risques politiques et institutionnels que d'avancées concrètes en la matière.

2. La méthode : responsabiliser les acteurs locaux dans la recherche d'un consensus tout en encadrant les processus de décision

La mission estime nécessaire que la réflexion sur l'évolution institutionnelle de la métropole soit menée, en toute liberté mais en responsabilité, par les élus locaux. Sans pour autant exclure la nécessité d'un encadrement des processus de décision afin d'éviter tout immobilisme, une telle philosophie doit être poursuivie dans deux directions complémentaires :

- d'une part, en responsabilisant les acteurs locaux dans l'émergence d'un projet métropolitain adossé à la réalisation de projets communs ;

- d'autre part, en réunissant toutes les conditions nécessaires à ce qu'ils choisissent, de façon consensuelle, l'avenir institutionnel de la métropole.

Ces conditions, au nombre de quatre, consistent en :

- l'établissement d'une méthode de concertation des élus locaux de l'aire départementale prévoyant des points d'étape réguliers ;

- l'octroi à l'État local un rôle d'accompagnateur et de garant de la tenue du calendrier décidé par les acteurs locaux ;

- l'adossement de la réflexion à une évaluation objective et actualisée des pistes de réforme ;

- et l'association aux discussions des acteurs de la société civile, notamment en matière économique , pour que le projet institutionnel soit partagé et cohérent avec le projet du territoire.

LISTE DES PROPOSITIONS

LISTE DES PROPOSITIONS DU RAPPORT RELATIF À LA MÉTROPOLE AIX-MARSEILLE-PROVENCE

Axe n° 1 : parachever la récente réforme de la métropole
d'Aix Marseille Provence

Proposition n° 1 : stabiliser les compétences respectives des communes et de la métropole afin de permettre leur pleine appropriation

Sous-proposition n° 1 : favoriser l'appropriation par les communes et la métropole de leurs nouvelles compétences

Sous-proposition n° 2 : renforcer l'accompagnement de l'Etat dans le déploiement de cette nouvelle répartition

Sous-proposition n° 3 : inciter la métropole et ses communes membres à faire pleinement usage des facultés de délégation prévues par le législateur

Sous-proposition n° 4 : mettre en oeuvre rapidement un accord sur l'intérêt métropolitain

Proposition n° 2 : proposer la conclusion d'un nouveau pacte financier, sous l'égide de l'État, entre la métropole et ses communes membres, s'adossant sur un nouveau projet de territoire

Proposition n° 3 : prendre pleinement acte de la suppression des conseils de territoire

Sous-proposition n° 1 : définir au plus vite une organisation déconcentrée de la métropole claire et lisible pour les élus comme pour les citoyens

Sous-proposition n° 2 : garantir l'accompagnement de l'État pour la transition de cette organisation et la suppression des conseils de territoire

Axe n° 2 : accélérer les mesures de rééquilibrage
pour la ville de Marseille afin de conforter la cohérence métropolitaine

Proposition n° 4 : évaluer régulièrement les mesures du plan « Marseille en Grand » pour s'assurer de leur efficacité

Proposition n° 5 : instituer rapidement un comité de suivi, associant les élus locaux et l'Etat, du plan « Marseille en Grand »

Proposition n° 6 : inscrire le plan dans la durée et envisager son renforcement à mesure que les objectifs de politique publique seront atteints

Proposition n° 7 : garantir l'application de mécanismes de péréquation à l'échelle de la métropole

Axe n°3 : engager une réflexion pour une organisation institutionnelle de la métropole choisie par les acteurs locaux

Proposition n° 8 : adosser toute évolution législative future à l'émergence d'un consensus local

Proposition n° 9 : faire émerger un calendrier de réforme consensuel parmi les acteurs du dossier, préalable nécessaire à toute évolution, si possible avant 2026

Sous-proposition n° 1 : prévoir deux échéances enserrant le processus de décision : la première sur la fixation d'un calendrier, si possible avant 2026 ; la seconde sur l'achèvement d'une éventuelle réforme institutionnelle

Sous-proposition n° 2 : délier le calendrier de réforme des échéances électorales locales

Proposition n° 10 : mettre les élus locaux en mesure de trancher parmi les options existantes quant à l'avenir institutionnel de la métropole

Sous-proposition n° 1 : établir une méthode de concertation des élus locaux de l'aire départementale prévoyant des points d'étape réguliers

Sous-proposition n° 2 : octroyer à l'Etat local un rôle d'accompagnateur et de garant de la tenue calendrier décidé par les acteurs locaux

Sous-proposition n° 3 : nourrir la concertation d'une évaluation objective et actualisée des options de réforme

Sous-proposition n° 4 : associer aux discussions les acteurs de la société civile, notamment en matière économique, pour que le projet institutionnel soit partagé et cohérent avec le projet du territoire

PREMIÈRE PARTIE
UNE MÉTROPOLE PERFECTIBLE À LA CROISÉE
DES CHEMINS

Dans le prolongement des États généraux de la démocratie territoriale de 2012, la création de la métropole Aix-Marseille-Provence (AMP) a été initiée par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles dit « MAPTAM », déposé sur le bureau du Sénat le 10 avril 2013. Ce texte visait, comme exposé dans l'étude d'impact, à « prend[re] acte du fait métropolitain en matière d'attractivité économique, sociale et culturelle » et, dans ce cadre, à confier « un nouveau statut et de nouvelles compétences aux métropoles, avec un régime particulier pour celles de Paris, Lyon et Aix-Marseille-Provence » 10 ( * ) .

En raison d'oppositions locales franches au projet métropolitain et des difficultés rencontrées pour faire émerger cette nouvelle structure institutionnelle, le fonctionnement de la métropole a par la suite été à plusieurs reprises modifié. F ruit de multiples compromis législatifs et locaux, la métropole d'Aix-Marseille-Provence n'a pu qu'imparfaitement remplir ses objectifs . Ce constat se pose aujourd'hui avec une acuité nouvelle, compte tenu tant des importants défis et des difficultés rencontrées par la ville-centre que du manque de dynamiques territoriales fortes sur le territoire métropolitain.

Face à ce constat, le récent renforcement de l'investissement de l'État dans le territoire et la refonte de l'organisation de la métropole par le législateur en 2022 ont constitué les premiers jalons de solutions pour permettre à la métropole Aix-Marseille-Provence de mieux répondre à ces défis.

I. UNE MÉTROPOLE ENCORE INACHEVÉE DIX ANS APRÈS SA CRÉATION HEURTÉE

A. LA CONSTRUCTION HEURTÉE D'UN OBJET MÉTROPOLITAIN NON IDENTIFIÉ AU COURS DES DIX DERNIÈRES ANNÉES

1. Une métropole construite sur une promesse de résorption des déséquilibres et des contrastes existants

a) Une aire urbaine pouvant légitimement prétendre au statut de métropole

Forte de sa densité et de la concentration de fonctions économiques comme culturelles, l'aire urbaine d'Aix-Marseille-Provence pouvait légitimement prétendre au statut de métropole .

Comme l'indiquait le Gouvernement dans l'étude d'impact sur le projet de loi dit « MAPTAM », l'agglomération de Marseille dispose en 2013 d'une ville-centre, deuxième ville la plus peuplée de France, d'une vaste communauté urbaine et d'une unité urbaine sur un périmètre incluant Aix-en-Provence et Marseille comptant plus d'1,5 million d'habitants 11 ( * ) .

En effet, d'après les données transmises à la mission, la métropole comptait, à sa création, 1,85 million d'habitants, soit 93 % de la population du département des Bouches-du-Rhône et 37 % de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur .

Au surplus, un ensemble métropolitain se dessinait, dès avant la consécration législative de la métropole d'Aix-Marseille-Provence, grâce aux déplacements des habitants, à la répartition des activités économiques, à la présence de pôles de culture et d'éducation majeurs, et au maillage des infrastructures de réseaux, en particulier en matière de transports.

À titre d'exemple, les déplacements pendulaires au sein du futur périmètre métropolitain étaient marqués tant par des mouvements de personnes franchissant les limites communales en son sein que par une très forte fréquentation de l'axe Marseille - Aix-en-Provence. Ainsi, d'après une analyse de l'INSEE 12 ( * ) , en 2012, le nombre de déplacements domicile-travail au sein du futur périmètre métropolitain avait progressé de 12 % par rapport à 1999 et il était constaté que 2 69 300 actifs résidant sur le périmètre se déplaçaient quotidiennement en changeant de commune au sein de ce territoire.

Déplacements domicile-travail au sein
de la métropole Aix Marseille Provence en 2012

Source : INSEE analyses d'après le recensement de la population 2012

La fréquentation des axes au sein de ce territoire était particulièrement éclairante quant à l'existence de fortes interconnexions entre les territoires composant le périmètre métropolitain. Selon l'INSEE, en 2012, les trois axes les plus fréquentés sur ce périmètre étaient les suivants :

Axe

Fréquentation en nombre de navettes quotidiennes

Marseille - Aix-en-Provence

13 000

Marseille - Aubagne

11 300

Marseille - Vitrolles

6 900

Source : commission des lois d'après des données de l'INSEE

Autre exemple de la préexistence de dynamiques métropolitaines, la fusion de trois universités de l'académie Aix-Marseille , comme le prévoyait l'article 2 des statuts d'Aix-Marseille Université 13 ( * ) , a permis l'émergence d'un pôle universitaire à l'échelle de la métropole.

Cette coopération des acteurs locaux en matière d'enseignement supérieur était envisagée comme devant permettre au réseau universitaire bucco-rhodanien tant de demeurer attractif face aux concurrences nationales et internationales que de bénéficier des synergies universitaires sur son territoire 14 ( * ) . Mené à son terme, ce projet de coopération à l'échelle du futur périmètre de la métropole a permis, à sa création, la réunion au sein d'un même établissement de l'université Aix-Marseille-I, l'université Aix-Marseille-II et l'université Aix-Marseille-III.

De surcroit, préexistait à la création métropolitaine une coopération intercommunale sur certains projets et compétences , permettant par l'action volontaire des collectivités d'initier une dynamique territoriale et de donner corps à un espace de solidarité intercommunal dans certaines matières.

Ainsi, un syndicat mixte des transports du département a été créé le 1 er juin 2009 afin d'organiser au sein du périmètre départemental une politique concertée et harmonieuse des transports, dont les logiques outrepassaient les périmètres administratifs intercommunaux pour s'établir sur celles des bassins de vie. À l'époque, les dispositions de l'article 111 de la loi n ° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains, dite « SRU », ouvraient aux seules collectivités volontaires et détentrices de la qualité d'autorités organisatrices des transports la faculté de créer un syndicat mixte des transports, sur un périmètre qu'elles définissent , « afin de coordonner les services qu'elles organisent, mettre en place un système d'information à l'intention des usagers et rechercher la création d'une tarification coordonnée et des titres de transport uniques ou unifiés ».

Le syndicat mixte des transports des Bouches-du-Rhône, réunissant le département des Bouches-du-Rhône, les communautés urbaines de Marseille-Provence-Métropole, du Pays d'Aubagne et de l'Etoile, les communautés d'agglomération du Pays de Martigues, Salon-Étang de Berre-Durance, et d'Arles-Crau-Camargue-Montagnette, et le syndicat d'agglomération nouvelle Ouest Provence, créé en application de ces dispositions, a eu pour missions :

- la coordination des services de transports ;

- la mise en place d'un système d'information- voyageurs ;

- et la recherche d'une tarification coordonnée des titres de transports unifiés et d'un système billettique commun à ses membres 15 ( * ) .

Ces caractéristiques et l'existence de projets intercommunaux justifiaient donc la création d'une nouvelle métropole , dont les ferments étaient prometteurs, dans le contexte particulier de l'affirmation de métropoles françaises au sein d'un espace européen et mondialisé favorable à leur développement.

b) Une aire urbaine polycentrique et contrastée rendant l'émergence du fait métropolitain particulièrement complexe

Si l'aire urbaine d'Aix-Marseille remplissait les critères objectifs pour prétendre devenir une métropole, il était constaté dès sa création d' importants déséquilibres sur son périmètre rendant l'émergence du fait métropolitain plus complexe qu'ailleurs.

Comme le précisait l'étude d'impact du projet de loi ayant porté la création de la métropole d'Aix-Marseille-Provence, la comparaison avec la situation d'autres aires urbaines était déjà éclairante quant aux difficultés marseillaises. Ainsi, « l'unité urbaine [marseillaise] souffr[ait] encore de la comparaison avec les unités lyonnaise et toulousaine en ce qui concerne notamment le niveau de formation, les revenus et le chômage » 16 ( * ) .

En effet, l'aire urbaine se caractérise à titre principal par un polycentrisme particulièrement affirmé tant dans sa réalité économique que politique, sociale et culturelle. Au surplus, ce polycentrisme n'a fait que s'approfondir du fait des évolutions contrastées des différents pôles de cette agglomération.

(1) Une géographie atypique

La géographie est un facteur explicatif majeur dans la difficile évolution de la métropole. Particulièrement vaste, le territoire métropolitain se caractérise par :

- l'existence de plusieurs centres : Marseille, Aix-en-Provence et, dans une moindre mesure, Martigues ;

- la grande discontinuité qui caractérise le tissu urbain entre ces pôles ;

- l'étendue du territoire de la ville de Marseille comme de la métropole.

L'aire urbaine actuellement couverte par la métropole d'Aix-Marseille-Provence s'étend sur 3 150 km², ce qui représente six fois le territoire de Grand Lyon et quatre fois celui de Grand Paris.

Comme le montre le comparatif ci-dessous, à l'inverse des territoires parisien et lyonnais, la métropole d'Aix-Marseille-Provence présente, du fait de son territoire, une densité de population inférieure et un tissu urbain moins serré.

Source : institut Paris région

Au surplus, le zonage en aires urbaines de la métropole d'Aix-Marseille-Provence est particulièrement fragmenté et discontinu, en raison principalement du nombre élevé d'espaces naturels, agricoles et forestiers existants.

La combinaison de ces deux facteurs rend très difficile l'identification d'une métropole au territoire et au périmètre cohérents. Les métropoles sont généralement centrées autour d'un centre attractif concentrant les activités économiques et une périphérie, composée d'espaces moins denses , organisée autour de cette centralité selon une dynamique centripète.

L'organisation métropolitaine des territoires qui en découle montre une organisation « en système, structurées par des pôles (espaces urbains centraux, villes moyennes, etc..) et des liens fonctionnels efficaces » représentant aujourd'hui « les lieux essentiels de la croissance française » 17 ( * ) . Le législateur a donc, par plusieurs lois successives, cherché à construire un cadre intercommunal « adapté à la montée en puissance du fait urbain » sur l'ensemble du territoire national ; caractéristiques que ne semble qu'imparfaitement remplir aujourd'hui la métropole Aix-Marseille-Provence.

Zonage en aires urbaines de la métropole d'Aix-Marseille-Provence

Source : étude d'impact du projet de loi dit « MAPTAM »

S'inscrivant à rebours de ce modèle, comme l'a rappelé le département des Bouches-du-Rhône à l'appui de son projet de schéma départemental des transports, l'aire urbaine de Marseille et Aix-en-Provence semble au contraire « un territoire multipolaire structuré par des corridors de déplacements » 18 ( * ) .

(2) Des dynamiques économiques, sociales et démographiques divergentes rendant difficile l'émergence de projets partagés

Les travaux menés par les rapporteurs ont permis de dresser le constat que des divergences dans les dynamiques économiques, démographiques et sociales sur le périmètre de la future métropole d'Aix-Marseille-Provence précédaient la création métropolitaine.

Ainsi, dès l'étude d'impact du projet de loi dit « MAPTAM », il était fait le constat que la ville-centre, Marseille, a été appauvrie par d'importants mouvements de désindustrialisation qui se sont opérés au profit de l'émergence de nouveaux territoires industriels autour de la ville d'Aix-en-Provence. Le département des Bouches-du-Rhône dans son projet de schéma de mobilités durables, estimait ainsi que « le rayonnement d'Aix et de Marseille [s'organise autour] de bassins relativement autonomes » 19 ( * ) . En effet, les pôles d'emploi et d'activités générateurs de déplacements semblent multiples et ne pas se concentrer sur la seule ville-centre de Marseille.

En premier lieu, il est possible de distinguer au moins deux autres centres d'activités métropolitaines en dehors du coeur de l'aire urbaine : le croissant ouest réunissant les zones industrielles de Fos et de Berre l'Étang et le corridor est réunissant la Vallée de l'Huveaune et les zones d'activités d'Aubagne et de Gémenos.

Répartition des principaux centres d'activités métropolitains
sur le périmètre du département des Bouches-du-Rhône en 2015

Source : département des Bouches-du-Rhône

En second lieu, les principaux sites économiques, militaires et universitaires, éléments structurants des territoires généralement concentrés au sein des villes-centre des métropoles, ne sont pas réunis au sein de la ville de Marseille. Ils sont au contraire disséminés sur l'ensemble du territoire métropolitain voire bucco-rhodanien, comme l'illustre la représentation cartographique de la répartition des sites générateurs d'activités. Cette même représentation met également en lumière le défaut de sites économiques importants construits au sein de la ville-centre qui ne bénéficie que de deux sites en périphérie : Euromed et La Valentine.

Répartition des principaux pôles d'activités
sur le périmètre du département des Bouches-du-Rhône en 2015

Source : département des Bouches-du-Rhône

Au surplus , la dynamique démographique de l'aire urbaine n'est pas uniforme et connait des réalités très différentes de celles observées dans les autres espaces métropolitains. Ainsi que l'avait relevé le rapport du préfet Pierre Dartout, d'une part, « la Métropole attire moins de jeunes que les autres grandes métropoles, comme notamment celles de Toulouse ou de Lyon », et d'autre part, « le vieillissement de la population s'observe plus que dans les autres grandes métropoles françaises, avec un taux égal à celui du territoire national (24,2 % de plus de 60 ans) mais supérieur à celui de toutes les autres métropoles françaises » 20 ( * ) .

L'on observe en particulier, de façon singulière, un ralentissement démographique au sein d'une métropole qui semble témoigner d'un défaut d'attractivité aux yeux des populations jeunes et des actifs. Cette dynamique semble ancienne puisque si la population sur le périmètre de la métropole d'Aix-Marseille-Provence a augmenté entre 1962 et 2012 de 60 %, cette progression a été moins importante que celle constatée tant à l'échelle de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur (augmentation de 75 %) qu'à l'échelle nationale (66 % de progression) sur la même période.

Par ailleurs, comme le montre le taux d'évolution annuelle moyen de la population des communes de la métropole d'Aix-Marseille-Provence entre 2007 et 2012, ce chiffre masque la très grande disparité, au sein du périmètre métropolitain, d'évolution de la population. Ainsi, selon les données de l'INSEE, la population de la communauté urbaine Marseille Provence Métropole a connu une augmentation de seulement 23 % entre 2007 et 2012, marquant donc une progression à un rythme largement inférieur à celui des autres intercommunalités ayant par la suite été fusionnées dans la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

Taux d'évolution annuel moyen de la population des communes
de la métropole d'Aix-Marseille-Provence entre 2007 et 2012

Source : Insee 2017

L'accroissement annuel de la population à l'échelle de la métropole a connu une inversion de sa dynamique depuis 2007, marquant la perte d'attractivité du périmètre métropolitain, à l'aube de sa création, dont la très faible croissance démographique ne reposait plus, depuis cette date, que sur le solde naturel, seule composante positive de la démographie.

Source : commission des lois d'après les données de l'INSEE,
recensements de la population 2007-2012

Enfin, le périmètre métropolitain est fracturé par de fortes inégalités sociales qui mettent en péril l'unité territoriale de la métropole mais également au sein des principales communes situées sur son périmètre.

Dès la phase de préfiguration de la métropole d'Aix-Marseille-Provence, un rapport de l'OCDE soulignant que le développement du projet métropolitain « est menacé par des inégalités sociales très marquées sur son territoire. Aix-Marseille doit surmonter ses fragmentations en trouvant des modes de coordination des politiques publiques pour apporter des réponses aux problèmes de disparités internes qui la minent et améliorer sa compétitivité » 21 ( * ) . Ces inégalités sont de deux principaux ordres selon le rapport Dartout de 2019.

En premier lieu, « les écarts de richesses entre les plus riches et les plus pauvres » sont significatifs sur le périmètre métropolitain, comme en témoigne le fait que « le revenu moyen des 10 % les plus riches y est 8,4 fois plus élevé que celui des 10 % les plus pauvres » contre 7,3 pour Paris et 5,4 pour la métropole de Lyon.

En second lieu, « les inégalités territoriales des niveaux de richesses » divisent le territoire métropolitain. Comme le notait l'étude d'impact du projet de loi dit « MAPTAM », le taux de chômage des jeunes des quartiers nord dépassait, en 2013, 40 % alors qu'il était inférieur à 15 % à Aix-en-Provence 22 ( * ) . Au surplus, si le taux de pauvreté à Marseille s'établit à 26 % de la population contre 14,3 % à Aix-en-Provence, 51,3 % de la population du 3 ème arrondissement de Marseille vit sous le seuil de pauvreté.

En conséquence, les rapporteurs n'ont pu que constater que la répartition du revenu disponible médian par mois et par unité de consommation sur le périmètre de la métropole d'Aix-Marseille-Provence était non seulement très différente d'une commune à l'autre mais également très disparate au sein même de la ville de Marseille. Les inégalités territoriales qui en résultent font de la ville-centre celle qui concentre les difficultés économiques, cas unique en France .

Revenu disponible médian par mois et par unité de consommation
sur le périmètre de la métropole d'Aix-Marseille-Provence en 2012

Source : Rapport de l'INSEE

Comme l'ont mis en exergue les auditions, ces inégalités ont des conséquences directes sur les politiques publiques conduites à l'échelle du territoire, telles que la politique du logement et de l'habitat mais également des transports ou encore la politique scolaire . Ainsi, à l'échelle de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, la métropole d'Aix-Marseille-Provence concentre le nombre le plus élevé d'habitants résidant dans les quartiers politique de la ville. De la même manière, comme le rappelait le rapport du préfet Pierre Dartout, « à elle seule, la ville de Marseille compte 35 QPV [sur les 66 du département] et concentre la moitié de la population des QPV de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, soit 236 000 habitants, [représentants] 27 % de la population de la ville » 23 ( * ) .

Cartographie du nombre d'habitants et du taux de pauvreté
dans les quartiers politique de la ville par unité urbaine
dans la région Provence-Alpes-Côte-d'Azur en 2012

Source : Rapport INSEE, 2019

De façon analogue, la politique du logement social est révélatrice des inégalités au sein du territoire métropolitain. Ainsi, si les six principales villes du territoire « concentrent à elles seules 75 % de l'offre du logement locatif social », leur répartition est très disparate au sein de la ville de Marseille puisqu'ils sont inférieurs à 10 % pour les 4 ème à 8 ème arrondissements alors qu'ils dépassent les 35 % dans les 13 ème à 15 ème arrondissements 24 ( * ) .

Au niveau territorial, ces inégalités trouvent également une traduction concrète dans la disparité importante des potentiels fiscaux des communes et des anciens EPCI de l'aire urbaine qui varient du simple au quintuple, comme le montre le comparatif ci-après, posant la question du rééquilibrage et des solidarités devant se développer entre territoires.

Comparaison des potentiels fiscaux des anciens EPCI
formant l'aire métropolitaine

Source : Simon Ronai, « La création de la métropole marseillaise :
un combat géopolitique entre l'État et les collectivités locales »,
Hérodote, vol. 154, 2014, pp. 177-190.

L'ensemble de ces éléments conduit donc à constater la forte divergence des dynamiques économiques, démographiques et sociales sur le périmètre de la future métropole d'Aix-Marseille-Provence. Précédant la création de la métropole, cette divergence rendait inévitable le développement d'une organisation territoriale adaptée à ce polycentrisme, et donc éloignée d'un modèle métropolitain dit « classique » organisé autour d'une ville-centre concentrant les facteurs d'attractivité.

(3) Une organisation territoriale rendant l'émergence du fait métropolitain plus complexe qu'ailleurs

Souvent qualifié de « polycentrique », ce territoire était, en effet, organisé jusqu'au 1 er janvier 2016 autour de six EPCI à fiscalité propre :

- la communauté urbaine Marseille-Provence-Méditerranée (CUMPM) ;

- la communauté d'agglomération du Pays d'Aix (CPA) ;

- la communauté d'agglomération Agglopole Provence (CAP) ;

- la communauté d'agglomération du Pays d'Aubagne et de l'Étoile (CAPAE) ;

- le syndicat d'agglomération nouvelle Ouest Provence (SANOP) ;

- et la communauté d'agglomération du pays de Martigues (CAPM).

Ce faisant, l'organisation institutionnelle tendait à épouser les caractéristiques du territoire, éclaté en plusieurs centres distincts.

Carte des anciens EPCI à fiscalité propre et de leurs communes

Source : site institutionnel métropole AMP

Ce relatif éclatement intercommunal a néanmoins conduit à la multiplication, pour l'exercice de certaines compétences, en particulier de réseaux, au développement d'infrastructures et d'équipements obéissant à des logiques propres à chaque territoire , sans logique d'interconnexions.

La conduite des politiques de transports est particulièrement éclairante sur ce point puisqu'ont coexisté jusqu'à la création de la métropole pas moins de huit autorités organisatrices des transports urbains et deux autorités organisatrices des transports qu'étaient le département des Bouches-du-Rhône et la région Provence-Alpes-Côte d'Azur.

Carte des autorités organisatrices des transports urbains antérieures à la création de la métropole d'Aix-Marseille-Provence sur son périmètre

Source : Agence d'urbanisme de l'agglomération marseillaise

Ces AOTU et AOT ont développé, au total, six réseaux différents de transports (Libébus, Ulysse, Bus de l'Etang, Transmétropole regroupant Ciotatbus et RTM, Lignes de l'Agglo, Aix en Bus, Paix d'Aix mobilité), chacun centré sur un bassin de mobilité.

Force est de constater que la création de la métropole et l'unification de la gouvernance de la politique des transports qui s'en est suivie n'a pas mis fin à ce relatif éclatement territorial. En l'occurrence, si la métropole a par la suite récupéré la compétence d'autorité organisatrice des mobilités sur l'ensemble de ces réseaux, elle n'en a pas moins conservé six bassins de mobilité dans son dernier plan de déplacements urbains, adopté le 16 décembre 2021, dont les limites territoriales reprennent - ou peu s'en faut - celles des anciens réseaux de transports.

Carte des six bassins de mobilité institués par la métropole d'Aix-Marseille-Provence pour l'exercice de la compétence « transport » à partir de 2020

Source : PDU de la métropole d'AMP

Dès lors, à l'inverse d'autres métropoles à statut particulier comme Lyon ou de droit commun comme Nantes et Toulouse, où le cadre juridique métropolitain est venu consacrer dans le droit l'existence d'un fait métropolitain déjà ancré dans le territoire, la métropole d'Aix-Marseille - Provence a entendu construire par une construction institutionnelle un fait métropolitain qui ne lui préexistait pas, ce qui n'a pas facilité sa construction.

2. Une construction particulièrement malaisée

a) Un projet visant à dépasser les concurrences internes et à mettre en cohérence l'action publique au service de la qualité de vie des citoyens qui n'a pas su emporter l'adhésion localement

Il a été prévu dès la genèse de la métropole qu'il serait nécessaire de dépasser l'absence d'un consensus local pour bâtir une structure innovante à même « de dépasser les concurrences internes » 25 ( * ) au profit d'un projet à destination des citoyens.

En effet, comme l'avait exposé Eugène Caselli, alors président de la communauté urbaine Marseille Provence, à la commission des lois du Sénat lors des travaux préparatoires au projet de loi dit « MAPTAM » : « notre territoire possède un fort potentiel, malheureusement balkanisé entre les intercommunalités » 26 ( * ) .

De l'avis partagé - par le Gouvernement comme les deux assemblées lors de l'examen dudit projet de loi -, les six intercommunalités qui entouraient l'aire urbaine marseillaise n'avaient pas trouvé les voies et les moyens de coordonner leurs services publics, d'instituer un espace de solidarité territoriale ou de mener des politiques communes afin de valoriser les atouts du territoire. Dès lors, ainsi que l'avait souligné la commission des lois du Sénat, « la mise en place d'un établissement intégré doté d'une fiscalité propre demeur[ait] la solution la plus appropriée pour harmoniser les inégalités de développement de ce territoire et valoriser ses atouts pour le bénéfice de tous » 27 ( * ) .

Ces concurrences internes n'ont toutefois pas trouvé de résolution dans la création de la métropole : à la différence de la construction de la plupart des métropoles, à commencer par Lyon, il n'a pas existé de consensus local pour celle-ci. Comme l'avait relevé le rapporteur René Vandierendonck, « une opposition résolue de la très grande majorité des élus concernés, notamment celle, proclamée, de 109 des 119 maires » avait été affirmée lors de l'examen du projet de loi portant création de la métropole d'Aix-Marseille-Provence 28 ( * ) . De la même manière, cinq des six présidents d'intercommunalités, à l'exception de celle incluant la ville de Marseille dans son périmètre, avaient manifesté leur désaccord quant à une telle réforme métropolitaine. Ce projet recueillait ainsi une opposition affirmée des élus du bloc local, en particulier non-marseillais, qui avaient l'impression tant d'être privés de leur outil intercommunal de proximité que d'être contraints de lier leur avenir à Marseille, dont le poids des difficultés financières leur serait imputé. À défaut d'être la résultante d'une volonté locale, la construction métropolitaine a ainsi été pensée comme un instrument destiné à mettre en cohérence l'action publique au service de la qualité de vie des citoyens.

Au surplus, ce projet est apparu aux élus locaux comme étant largement imposé depuis Paris , ce qui n'a pas facilité l'acceptabilité locale - déjà fragile - du projet. La commission des lois du Sénat avait alors reconnu se trouver confrontée à « un dilemme » entre la nécessaire conciliation des particularismes locaux et le souci de l'émergence rapide d'un projet métropolitain pour les citoyens et le territoire 29 ( * ) .

Enfin, s'inscrivant dans une tradition de relative faiblesse de la coopération intercommunale entre l'ensemble des acteurs, le projet métropolitain ne pouvait s'ancrer dans un socle solide et préexistant de réalités et projets de coopération intercommunale à l'échelle du futur périmètre métropolitain rendant difficile la réunion de l'ensemble des conditions nécessaires à sa mise en oeuvre.

En l'occurrence, si la création d'un syndicat mixte des transports en 2009 ne pouvait qu'être saluée, sa création tardive et la faiblesse de l'intégration institutionnelle de ce dernier, en raison principalement de l'absence de transfert de la qualité d'autorité organisatrice de la mobilité et de l'instauration d'une obligation de vote à l'unanimité pour la prise des décisions relatives aux compétences du syndicat, ont considérablement amoindri sa portée 30 ( * ) . Dès lors, à l'inverse du SYTRAL lyonnais qui a préexisté puis survécu à la création de la métropole, le syndicat mixte des transports des Bouches-du-Rhône a disparu avec la création métropolitaine, comme l'avait annoncé la Cour des comptes dès 2014 : « l a création méritoire de ce syndicat est intervenue beaucoup trop tard » et « le bilan des actions du syndicat mixte depuis juin 2009 reste faible et l'avenir de la structure [est], sous sa forme actuelle, largement compromis compte tenu de la création prochaine de la future métropole Aix-Marseille-Proven ce » 31 ( * ) . Ce constat était partagé par le rapporteur de la commission des lois de l'Assemblée nationale, Olivier Dussopt, précisant que s'il « n'ignor[ait] pas les diverses initiatives qui ont été prises par les élus locaux afin de mieux coordonner l'action publique au sein de l'unité urbaine Marseille Aix-en-Provence », « on [devait] constater qu'aujourd'hui, ces initiatives n'ont pas abouti » 32 ( * ) .

Dès lors, pâtissant de difficultés originelles dans sa création, le parcours législatif du projet métropolitain aixo-marseillais n'a pu qu'être heurté.

b) Un parcours législatif heurté aboutissant à la création d'un objet métropolitain non identifié

(1) Un parcours législatif heurté dont la réussite a reposé sur quatre compromis majeurs

Révélateur de dissensions locales, le parcours législatif de la métropole d'Aix-Marseille-Provence a été heurté et a, par conséquent, accouché d'un objet métropolitain non identifié, fruit de nombreux compromis, afin d'atténuer les irritants pour chacun des acteurs locaux sans pour autant changer la substance du projet métropolitain. Ces compromis ont principalement porté sur trois paramètres de la future collectivité métropolitaine.

Premièrement, la date d'entrée en vigueur d'une telle réforme a été repoussée d'un an au cours des débats parlementaires .

Constatant que les nombreuses oppositions locales ne permettaient pas « la réunion des conditions de la mise en oeuvre d'une telle réforme » 33 ( * ) , le Sénat a reporté d'un an l'entrée en vigueur de la création de la métropole - soit au 1 er janvier 2016 - lors de l'examen du projet de loi dit « MAPTAM ». Ce délai supplémentaire qui avait pour vocation « d'approfondir avec les élus des collectivités concernées par ce projet les voies d'une meilleure articulation entre les compétences de celles-ci et les interventions de la métropole » a été favorablement accueilli par l'Assemblée nationale et le Gouvernement, chacun réalisant la nécessité de cette souplesse.

Deuxièmement, actant la persistance de la forte résistance des élus locaux à cette création, l'échelon déconcentré de la métropole, les conseils de territoires, s'est vu déléguer automatiquement l'exercice de compétences métropolitaines pour une période transitoire.

En réponse aux demandes locales pour assouplir à nouveau les délais pour « que les compétences passent d'une structure [intercommunale] à l'autre [métropolitaine] », il a été procédé, à l'initiative du Gouvernement dans le cadre de l'examen du projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République dit « NOTRe » en 2015, à un renversement de la philosophie ayant présidé à la création de la métropole d'Aix-Marseille-Provence en consacrant les conseils de territoire comme échelon déconcentré de la métropole chargé de la mise en oeuvre de nombreuses compétences métropolitaines.

En effet, les conseils de territoire, qui avaient initialement vocation à être des structures déconcentrées sur le périmètre de chacune des six anciennes intercommunalités consultatives susceptibles de se voir déléguer certaines compétences métropolitaines 34 ( * ) , ont vu leur rôle profondément renforcé par une « délégation automatique des compétences de la métropole d'Aix-Marseille-Provence » durant une phrase transitoire s'étendant jusqu'au 31 décembre 2019, aube du renouvellement municipal de 2020.

Bien qu'encadré et transitoire 35 ( * ) , ce nouveau rôle est particulièrement dérogatoire au régime de droit commun applicable à ces instances normalement consultatives 36 ( * ) et illustre l'immaturité du projet métropolitain à sa création.

Corollaire de la détention automatique et transitoire par les conseils de territoire de larges pans des compétences métropolitaines, il a donc été choisi de recentrer l'action de la métropole, au cours de cette période transitoire de quatre ans, sur « l'exercice des seules compétences pour lesquelles sa valeur ajoutée, en raison du changement d'échelle, sera la plus forte à court terme » 37 ( * ) . Ces compétences étaient notamment l'élaboration du projet métropolitain ou la définition du schéma d'ensemble relatif à la politique économique.

Un troisième compromis a consisté en la garantie d'une représentation de l'ensemble des communes du périmètre au sein du conseil métropolitain . La volonté de concilier la représentation de chacune des collectivités du périmètre de la métropole et la garantie d'une répartition des sièges conforme au poids démographique de chacun a été source de débats, visant à éviter tout écueil conduisant soit à induire une représentation « hégémonique de la ville de Marseille », soit à « provoquer une sous-représentation des grandes villes au sein du conseil de la métropole » 38 ( * ) .

Une première solution de compromis et d'apaisement avait été trouvée au Sénat, à l'initiative de Jean-Claude Gaudin, prévoyant un conseil métropolitain de 238 membres composé à partir de deux règles : d'une part, « un siège minimum par commune » et, d'autre part, « une représentation en sièges la plus proche possible du poids démographique réel » 39 ( * ) .

Une seconde solution de compromis a par la suite été entérinée afin de rapprocher les dispositions régissant le conseil de la métropole d'Aix-Marseille-Provence du droit commun. Plus précisément, en application de l'article 50 de la loi dite « NOTRe », le conseil métropolitain de la métropole d'Aix-Marseille-Provence est régi par les dispositions de droit commun applicables en cas de fusion d'établissements publics de coopération intercommunale prévues à l'article L. 5211-6-2 du code général des collectivités territoriales.

Composition du conseil communautaire en cas de fusion d'établissements publics
de coopération intercommunale (EPCI)

L'article L. 5211-6-2 du code général des collectivités territoriales (CGCT) applicable fixe les modalités de composition et de répartition des sièges au sein du conseil communautaire dans les cas de fusion d'EPCI.

Pour ce faire, il prévoit, notamment, pour définir le nombre de conseillers communautaires, que :

- « chaque commune dispose d'au moins un siège au sein du conseil métropolitain » ;

- lorsque « le nombre de sièges attribués à la commune est supérieur ou égal au nombre de conseillers communautaires élus à l'occasion du précédent renouvellement général du conseil municipal, les conseillers communautaires précédemment élus font partie du nouvel organe délibérant » ;

- si les communes qui ont plus de 1000 habitants, sont aujourd'hui représentées au conseil communautaire de leur EPCI à fiscalité propre par un ou plusieurs élus, ces derniers seront d'office membre du conseil communautaire.

En application de ces mêmes dispositions, les préfets des Bouches-du-Rhône, du Var et du Vaucluse ont, par arrêté du 1 er septembre 2015 40 ( * ) , fixé à 240 le nombre de sièges au conseil métropolitain de la métropole d'Aix-Marseille-Provence et les ont répartis comme suit :

Source : Rapport du préfet Pierre Dartout, p.6

Enfin, un quatrième compromis a été opéré sur les compétences de la métropole d'Aix-Marseille-Provence . Alors même que les dispositions de la loi dite « MAPTAM » portant création de la métropole d'Aix-Marseille-Provence n'étaient pas entrées en vigueur et étaient alignées sur le droit commun des métropoles, le législateur a admis, à l'initiative de Jean-Claude Gaudin complétée par un amendement du Gouvernement lors de l'examen du projet de loi dit « NOTRe », que les compétences communales non transférées aux intercommunalités fusionnées au sein de la métropole à sa création continueraient d'être exercées par les communes membres de la métropole jusqu'au 1 er janvier 2018, en dépit du caractère obligatoire de leur transfert en droit commun.

En effet, aligné sur les règles d'attribution des compétences aux métropoles de droit commun, le régime antérieur applicable à la métropole d'Aix-Marseille-Provence prévoyait que la métropole exerçait :

- d'une part, l'ensemble des compétences obligatoires transférées des communes membres à la métropole en application de l'article L. 5217-2 du code général des collectivités territoriales ;

- d'autre part, en vertu de l'article L. 5218-2, les compétences précédemment transférées par les communes membres aux établissements publics de coopération intercommunale fusionnés au sein de la métropole.

Ce compromis a donc constitué une dérogation importante au droit commun du régime de transfert obligatoire des compétences des communes aux métropoles et a été justifié par la nécessité de « permettre une montée en puissance progressive des compétences métropolitaines » 41 ( * ) .

(2) Un objet métropolitain novateur

À l'issue de ce parcours législatif heurté, une construction institutionnelle complexe et dont le sous-jacent politique - généralement fondé sur un projet métropolitain identifié, un sentiment d'appartenance des citoyens concernés, ou la relative entente des élus sur la forme prise par la métropole - peinait à émerger s'est inscrite dans le paysage institutionnel et métropolitain français : la métropole d'Aix-Marseille-Provence. Novateur, cet objet métropolitain non identifié comportait plusieurs spécificités.

En premier lieu, l'existence d'une architecture institutionnelle complexe consacrant trois niveaux d'exercice des compétences sur le périmètre métropolitain, ne fait pas partie du régime métropolitain de droit commun.

En deuxième lieu, le conseil de métropole a fait l'objet de dispositions spécifiques, tendant à le rendre pléthorique . La métropole d'Aix-Marseille-Provence est, depuis sa création, régie par le conseil métropolitain doté du plus grand nombre de sièges sur le territoire national, ce choix s'expliquant par la volonté d'opérer la délicate conciliation entre représentation de l'ensemble des territoires et répartition en fonction du poids démographique de chacun.

En troisième lieu, la métropole dispose d'un périmètre de compétences spécifique . Elle s'est ainsi vue attribuer, dès sa création, des compétences stratégiques mais également des compétences de proximité. En l'occurrence, en application des articles L. 5217-2 à L. 5217-5 et L. 5218-1 à L. 5218-11 du code général des collectivités territoriales dans leur rédaction issue des lois dites « MAPTAM » et « NOTRe », la métropole d'Aix-Marseille-Provence s'est vue confier :

- les seules compétences, obligatoires comme facultatives, qui avaient été précédemment à sa création, transférées par les communes membres aux établissements publics de coopération intercommunale fusionnés avant sa création ;

- les compétences communales soumises à l'intérêt métropolitain ;

- des compétences départementales en matière sociale et sportive, à savoir l'attribution des aides financières au titre du fonds de solidarité pour le logement, l'aide individuelle aux jeunes en difficulté et le centre départemental sportif de Fontainieu, ainsi que les compétences de voirie départementale sur son territoire ;

- des compétences contractualisées avec l'État en matière d'aide à la pierre notamment.

La métropole s'est ainsi retrouvée, sur l'ensemble de son périmètre particulièrement étendu, en charge de champs de compétences extrêmement vastes mêlant compétences stratégiques - telles que la création et l'aménagement des zones d'activités industrielles et commerciales ou l'organisation de la mobilité - et des compétences de proximité comme la gestion des déchets ou la voirie et les aires de stationnement de proximité.

En dernier lieu, les débats financiers ont été renvoyés à la définition d'un pacte de gouvernance financier et fiscal, et en particulier à l'application du mécanisme, de droit commun, des attributions de compensation, qui ont acté un certain nombre de principes de répartition qui n'obéissaient pas aux principes usuels et traditionnels de répartition des sommes. En effet, comme l'a indiqué le préfet Christophe Mirmand lors de son audition par les membres de la mission, « le décalage du 1 er janvier 2015 au 1 er janvier 2016 de la date de création de la métropole a favorisé les pratiques « d'optimisation » des attributions de compensation qui ont été fixées sans prendre en compte les transferts de compétences ».

Fruit d'un compromis local fragile, la construction législative de la métropole d'Aix-Marseille-Provence s'en est trouvée d'autant heurtée et a, in fine , grevé dès le début la réussite de cette construction métropolitaine.

B. UNE MÉTROPOLE QUI NE REMPLIT QU'IMPARFAITEMENT SES OBJECTIFS

Prenant acte de la volonté du législateur de rassembler, dans le cadre de la loi « MAPTAM », ces six EPCI à fiscalité propre au sein d'une même métropole, la métropole d'Aix-Marseille-Provence a vu le jour au 1 er janvier 2016.

Toutefois, moins de trois années après sa mise en oeuvre, la chambre régionale des comptes a formulé trois recommandations principales à l'égard de la métropole d'Aix-Marseille-Provence visant à :

- « revoir tout ou partie des modalités d'exercice des compétences » de la métropole ;

- « redéfinir les contours d'un schéma de coopération métropolitain renouvelé et de réviser à leur juste niveau les moyens alloués aux territoires » ;

- et procéder à « la révision à leur juste valeur du montant des attributions de compensation versées à ses communes membres » 42 ( * ) .

Les travaux menés par les membres de la mission les ont conduits à constater la validité de ces recommandations et à faire leurs les constats ainsi posés.

1. Les compétences : une répartition entre communes et métropole qui n'est pas à même de garantir la qualité et l'efficacité du service public et la création de dynamiques territoriales fortes

Comme l'a résumé le rapport du préfet Pierre Dartout, la principale critique faite à la métropole, quant à l'exercice de ses compétences, est double : celle d'« un défaut de proximité » couplé à un manque « d'efficacité dans l'exercice des compétences » . Ce constat a été largement corroboré par les auditions conduites par les rapporteurs. À titre d'exemple, lors de son audition par la mission, le président de l'association des maires des Bouches-du-Rhône, Georges Cristiani a indiqué que non seulement les communes s'étaient vues privées de l'exercice de compétences de proximité mais surtout se trouvaient dans l'incapacité de mener des projets du quotidien pour leurs administrés.

Dans ces conditions, la pertinence du périmètre des compétences détenues par la métropole a été remise en question. Le rapport précité du préfet Pierre Dartout notait ainsi que « de nombreux maires estiment que la métropole doit se recentrer sur des compétences stratégiques et restituer aux communes certaines compétences de proximité, éventuellement dans le cadre d'un dispositif à géométrie variable » 43 ( * ) . Le même rapport faisait donc état d'une liste de onze compétences faisant l'objet de demandes récurrentes de restitution de la part des maires des communes membres de la métropole :

- les cimetières ;

- les bornes à incendie ;

- les massifs et chemins défense des forêts contre l'incendie (DFCI) ;

- l'éclairage public ;

- les bornes de rechargement des véhicules électriques ;

- la voirie de proximité ;

- la signalisation et les abris de voyageurs attenants à la voirie d'intérêt local ;

- les aires de stationnement de proximité ;

- le tourisme ;

- les zones d'activités ;

- l'eau, l'assainissement et la gestion des eaux pluviales urbaines.

En conséquence, la métropole et ses communes membres ont fait un usage particulièrement extensif des possibilités ouvertes pour le législateur pour territorialiser l'exercice des compétences détenues par la métropole.

En premier lieu, la métropole a exercé sa faculté de restitution de compétences facultatives au profit de certaines communes membres. Elle a, par exemple, restitué, au 1 er janvier 2018, des compétences facultatives aux communes intéressées notamment la compétence « loisirs, enfance et jeunesse » aux seules communes d'Alleins, Charleval, Lamanon, Mallemort et Vernègues 44 ( * ) .

En second lieu, et plus fondamentalement, la métropole ne s'est pas pleinement approprié ses compétences obligatoires . L'appropriation et l'exercice effectif de l'ensemble des compétences que la métropole s'était vu attribuer par la loi se sont effectivement révélés impossibles dans les faits. Cette situation a conduit à une carence de la métropole dans l'exercice de certaines compétences mais également à la conclusion de conventions de délégation de très nombreuses compétences, en contradiction avec l'esprit de la loi, aux communes qui étaient seules en capacité de les exercer effectivement. Comme l'avaient constaté Mathieu Darnaud et Françoise Gatel, rapporteurs pour la commission des lois du Sénat lors du projet de loi dit « 3DS », « faute de disposer de moyens humains et financiers suffisants, la métropole tend à déléguer l'exercice de ces compétences aux communes membres dans le cadre de conventions de délégation » 45 ( * ) .

Sur ce point, la chambre régionale des comptes avait pourtant, dès 2020, alerté sur l'existence en 2018 de « 386 conventions de gestion représentant 13,8 millions d'euros, ramené en 2019 à 310 conventions représentant 10,1 millions d'euros » 46 ( * ) . Les travaux des rapporteurs ont néanmoins permis de constater une certaine amélioration en la matière. En effet, d'après les informations transmises aux membres de la mission, 211 conventions de délégations entre la métropole et ses communes membres étaient en vigueur début 2022.

Si le nombre total de conventions de gestion a opportunément diminué entre 2018 et 2022, les rapporteurs notent qu'elles conduisent à une répartition variable et très hétérogène sur tout le territoire métropolitain des compétences entre la métropole et les communes membres.

Ainsi, si la compétence de gestion des eaux pluviales urbaines était déléguée à 79 communes par la métropole, certaines compétences telles que la gestion des espaces verts ou la construction et l'entretien d'abris de voyageurs n'étaient délégués qu'à 4 communes sur tout le périmètre métropolitain.

Recensement des conventions de gestion de compétences métropolitaines
conclues en 2022 entre la métropole d'AMP et ses communes membres

Compétences

Nombre de conventions de gestion entre la métropole et des communes membres

Création, aménagement et gestion des zones d'activité industrielle, commerciale, tertiaire, artisanale, touristique, portuaire ou aéroportuaire

37

Construction, aménagement, entretien et fonctionnement d'équipements culturels, socioculturels, socio-éducatifs et sportifs d'intérêt métropolitain

1

Promotion du tourisme

43

Abris de voyageurs

4

Éclairage public

19

Parcs et aires de stationnement

24

Gestion des espaces verts

4

Gestion des eaux pluviales urbaines

79

Gestion des milieux aquatiques et prévention des inondations

1

Total

211

Source : commission des lois d'après les documents transmis
par les services préfectoraux

Si l'usage de telles conventions par la métropole et les communes membres ne pose pas de difficulté dans son principe, force est de constater que son caractère particulièrement extensif a conduit à un dévoiement de l'intention du législateur , la métropole ne tendant à exercer en propre qu'un nombre très faible de compétences. Par ailleurs, la multiplication des conventions de délégation a conduit à une répartition très évolutive et hétérogène sur le territoire métropolitain de l'exercice effectif des compétences. Les rapporteurs estiment en conséquence que le recours démultiplié aux conventions de délégation des compétences de la métropole à ses communes membres a, non seulement pour effet de priver la métropole de l'exercice effectif des compétences qui lui sont attribuées mais surtout de les rendre illisible en introduisant un décalage substantiel entre l'organisation institutionnelle théorique de la métropole et son fonctionnement effectif.

Il se traduit également, pour les citoyens par une absence d'intelligibilité de la répartition réelle des compétences , et, par l'absence de dynamiques territoriales fortes au service du développement économique, social et culturel de l'espace métropolitain, faute d'une stabilisation de la répartition des compétences rendant plus sécurisé l'engagement de tout investissement ou projet pluriannuel.

C'est pourquoi une telle situation a conduit, le préfet des Bouches-du-Rhône, Christophe Mirmand, comme il l'a lui-même indiqué lors de son audition, à adresser en 2021 plusieurs lettres d'observations au titre du contrôle de légalité, enjoignant la métropole à rationaliser les 208 conventions de délégation de gestion qui régissaient alors ses relations avec ses communes membres. Force était donc de constater que la répartition des compétences au sein de la nouvelle organisation territoriale, entre la métropole et ses communes membres, n'était ni efficace, ni efficiente et ce, pour l'ensemble des parties.

2. L'organisation interne : une structure atypique in fine préjudiciable à la concrétisation de la métropole

Au-delà de ses relations avec ses communes membres, l'organisation institutionnelle atypique de la métropole a constitué un obstacle à l'exercice effectif de ses compétences par celle-ci. En effet, la permanence de conseils de territoire a rendu difficile l'émergence de la métropole comme entité territoriale à part entière.

Carte des conseils de territoires
de la métropole d'Aix-Marseille-Provence

Source : sites institutionnels de la métropole d'AMP

En premier lieu, comme évoqué supra , si ces conseils étaient envisagés comme « les garants des spécificités et d'une gestion de proximité » 47 ( * ) des compétences de la métropole, ils ont bénéficié, à la création de celle-ci d'une délégation automatique, limitant de facto le champ de compétences dévolu à la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

Comme l'avait souligné l'étude d'impact du projet de loi dit « 3DS » précitée, « dans les faits, les territoires bénéficient de délégations de compétence très étendues (...) ils exercent des compétences très substantielles, comme la création, l'aménagement et la gestion de zones d'activité industrielles, commerciales, tertiaires, artisanales et touristiques. Ils gèrent aussi à leur niveau la construction, l'aménagement, l'entretien et le fonctionnement d'équipements culturels, socioculturels, socio-éducatifs et sportifs d'intérêt métropolitain » 48 ( * ) .

Politiques publiques dont les compétences sont déléguées automatiquement
par la métropole aux conseils de territoires

Développement et d'aménagement économique, social et culturel

Aménagement de l'espace métropolitain

Politique locale de l'habitat

Politique de la ville

Gestion des services d'intérêt collectif

Protection et de mise en valeur de l'environnement et de politique du cadre de vie

Source : commission des lois d'après le rapport
de la chambre régionale des comptes de PACA

Par ailleurs, s'il était initialement prévu que la métropole établisse, eu égard à la nature stratégique de ce document, un plan local d'urbanisme intercommunal (PLUi) unique, il a pourtant été fait localement le choix, par une délibération du conseil métropolitain, d'un PLUi par territoire, celui-ci étant élaboré en concertation avec les communes.

Pourtant redevenues une simple faculté depuis le 1 er janvier 2020, les délégations de gestion aux conseils de territoire ont été maintenues. Envisagées par le législateur comme provisoires, elles se sont donc révélé être, à moyen terme, un obstacle dans la construction d'un espace métropolitain intégré, puisqu'elles privent la métropole de sa valeur ajoutée. Dès lors, comme le relevait l'étude d'impact précitée, la persistance de cette situation présenterait le risque de limiter « la valeur ajoutée de la métropole », en faisant perdurer « une situation relativement comparable à ce qu'elle était avant sa création ».

En second lieu, le maintien d'un échelon intermédiaire a pu constituer, dans la gouvernance de la métropole d'Aix-Marseille-Provence, une structure écran et a contribué à un alourdissement notable du fonctionnement métropolitain .

En l'occurrence, chacun des 240 conseillers métropolitains siège à la fois au sein d'un conseil de territoire et au conseil métropolitain. Toutefois, la métropole ayant été créée au cours du mandat des anciens conseillers communautaires des établissements publics de coopération intercommunale fusionnés, la loi dite « NOTRe » du 7 août 2015 a permis à ces derniers de siéger également dans les conseils de territoire, indépendamment de leur qualité de membres du conseil métropolitain nouvellement élu.

Ainsi, 450 conseillers siégeaient dans les conseils de territoire jusqu'au renouvellement municipal de 2020 49 ( * ) . Cette situation transitoire a pris fin à l'issue des élections municipales de 2020.

Il convient également de noter que, dans cette même rédaction, cet article ouvrait la possibilité aux conseils de territoire de désigner, en leur sein, un président ainsi qu'un ou plusieurs vice-présidents disposant d'un régime indemnitaire propre . Si seuls les présidents de conseil de territoires étaient vice-présidents de droit du conseil de la métropole, présidents comme vice-présidents bénéficiaient d'indemnités de fonctions, plafonnées à 33 % du montant des indemnités allouées au titre de l'exercice de fonctions municipales dans une commune de 100 000 habitants et plus.

Au surplus, les prérogatives confiées aux conseils de territoire et à leurs membres ont contribué à l'alourdissement du fonctionnement métropolitain . En effet, en application de l'article L. 5218-7 du code général des collectivités territoriales dans sa rédaction issue de loi dite « NOTRe », chaque conseil de territoire pouvait demander par délibération l'inscription à l'ordre du jour du conseil métropolitain de « toute affaire intéressant le territoire ou émettre des voeux sur tous les sujets intéressant le territoire », et « émettre des voeux sur tous les objets intéressant le territoire ».

En dernier lieu, le maintien des conseils de territoire, chacun doté d'un budget propre mais abondé à titre principal par la métropole, a eu pour corollaire le maintien « d'une culture budgétaire spécifique » 50 ( * ) à chacun d'entre eux, rendant difficilement lisible et pilotable le budget de la métropole. Les risques en la matière tenaient tant à la qualité de la gestion budgétaire et comptable de la métropole qu'à la capacité de cette dernière à effectuer un contrôle réel sur l'emploi par les conseils de territoire des fonds qu'elle leur transférait .

Comme le relevait la chambre régionale des comptes dans son rapport de 2020 sur la métropole, « des pratiques budgétaires et comptables parfois hétérogènes entre les différents territoires et le service financier central, ainsi que la coexistence d'un budget principal, de six états spéciaux de territoires (EST), véritables « sous-budgets » destinés aux anciens EPCI, sont autant de facteurs de risques en termes de qualité comptable ». La métropole n'exerçait au demeurant qu'un contrôle lâche sur les EST. La chambre régionale des comptes soulignait à cet égard que le contrôle du conseil métropolitain sur les EST « se limite à la vérification qu'ils sont bien adoptés en équilibre réel et que toutes les dépenses obligatoires y ont bien été inscrites », les conseils de territoire disposant donc « pour l'exercice de leurs attributions d'une large autonomie . »

L'organisation budgétaire retenue par la métropole favorisait donc « l'agglomération de stratégies locales en termes de gestion et d'investissement, au lieu de privilégier une véritable stratégie métropolitaine 51 ( * ) . »

Une telle organisation a donc conduit à un renforcement considérable du poids des conseils de territoires dans l'initiative et la réalisation des investissements financés par le budget métropolitain , grevant d'autant les capacités financières d'investissement lui étant effectivement dévolues. Ainsi que le relevait la chambre régionale des comptes analysant la situation de la métropole d'Aix-Marseille-Provence de 2016 à 2020, « la part des investissements, réalisée à l'initiative des conseils de territoires, représente la quasi-totalité des opérations restant à financer et des crédits de paiement ouverts » 52 ( * ) sur le budget métropolitain. Elle chiffrait, pour l'année 2019, entre 66 % et 83 %, en fonction des postes de dépenses, la part des dépenses prévisionnelles d'investissement relevant d'opérations initiées par les conseils de territoires.

Dès lors, force est de constater que la stratégie d'investissement métropolitain est, structurellement, dépendante des choix d'investissements réalisés par les conseils de territoires en raison de cette organisation interne atypique.

3. Les finances : une situation financière dégradée et ne permettant pas de doter le territoire d'une capacité financière à la hauteur de ses besoins

a) Une situation financière fragile

Dans une contribution écrite transmise aux rapports, le préfet Christophe Mirmand indique qu'« alors qu'elle dispose facialement d'un budget de près de 5 milliards d'euros (budget principal et budgets annexes), la métropole le répartit pour 3,3 milliards d'euros en fonctionnement et 1,6 milliard d'euros en investissement. Son épargne brute (avant remboursement de la dette) ne s'élève qu'à 253 millions d'euros au compte administratif 2019, mais n'est plus que de 119 millions d'euros après remboursement des annuités d'emprunts ».

Ainsi que l'a relevé le récent rapport de la chambre régionale des comptes, la situation financière de la métropole d'Aix-Marseille-Provence est donc problématique et ce, en raison d'un double constat :

- une « épargne brute dynamique grevée par les reversements aux communes ». Ainsi, la capacité d'autofinancement brute de la métropole d'Aix-Marseille-Provence paraît particulièrement faible en comparaison de celle des autres métropoles, « 189 € par habitant, contre 330 € en moyenne », avec pour nécessaire corollaire un niveau de dépenses d'équipement par habitant plus faible « chiffré à 321 € contre 523 € en moyenne » ;

- « un endettement en hausse pour un niveau d'investissement faible » 53 ( * ) . La capacité de désendettement de la métropole apparaît dès lors très en deçà de celle des métropoles comparables, estimée à « 8 ans fin 2018, alors que qu'elle est seulement de 2 ans à Bordeaux, 3 à Nantes, 4 à Lyon et Lille » 54 ( * ) , alors même que d'importants investissements seront à réaliser dans un futur proche.

b) Une métropole redistribuant une large part de ses ressources au détriment des projets métropolitains

Il ressort des travaux menés par les membres de la mission que, comme l'a résumé le préfet Christophe Mirmand, la métropole d'Aix-Marseille-Provence « redistribue l'essentiel de la fiscalité levée sur son territoire de manière hétérogène, au détriment du financement de ses projets de développement et de mise en valeur du territoire ». Deux phénomènes semblent être à l'origine de cette forte redistribution.

En premier lieu, les dépenses d'investissement de la métropole restent, du fait d'une augmentation des investissements pluriannuels intercommunaux contractés avant sa création, largement contraintes par les décisions passées des anciens établissements publics de coopération intercommunale fusionnés en son sein.

Chiffrée par la chambre régionale des comptes en 2020 à « plus de 72 % des dépenses prévisionnelles [de la métropole] au titre de l'année 2019 » 55 ( * ) , cette dépendance au sentier réduit considérablement les marges de manoeuvre financières de la métropole, contrainte de composer avec des stratégies anciennes et d'assurer le transfert de ses charges.

En second lieu, les attributions de compensation reversées par la métropole d'Aix-Marseille-Provence aux communes sont particulièrement élevées par comparaison avec les autres métropoles. Ainsi, les attributions de compensation s'élèvent en 2022 à plus de 640 millions d'euros, soit 44 % des dépenses réelles de fonctionnement inscrites au budget principal 2022 56 ( * ) alors que la moyenne nationale du reversement des communes pour les métropoles a été estimé, par la DGCL, à 28 % de ces dépenses 57 ( * ) .

Montant des attributions de compensation et des dotations de solidarité
reversées par les métropoles à leurs communes membres
(moyenne par habitant de 2017 à 2020 en euros)

Source : CRC d'après les données DGFiP et comptes de gestion

À l'issue de leurs travaux, les membres de la mission n'ont pu que constater que la situation financière de la métropole ne permet pas au territoire de bénéficier d'une capacité d'investissement à la hauteur de ses besoins. Cette situation, qui résulte de choix discutables détaillés infra , pose une contrainte financière majeure pour le développement futur de la métropole.

II. UNE MÉTROPOLE À LA CROISÉE DES CHEMINS

A. À L'AUBE DES ANNÉES 2020, UNE MÉTROPOLE CONFRONTÉE À D'IMPORTANTS DÉFIS

1. Une ville centre concentrant des difficultés lourdes et protéiformes

Dix ans après, loin de s'être résorbées, les inégalités territoriales et les difficultés spécifiques à la ville-centre se sont accentuées et placent désormais la ville de Marseille dans un contexte financier, démographique, social et économique particulièrement défavorable . Ainsi, deux exemples très médiatisés sont révélateurs à eux seuls de la situation particulièrement dégradée de la ville de Marseille : les écoles maternelles et primaires ainsi que le logement.

S'agissant des écoles, le patrimoine scolaire est particulièrement dégradé puisque, comme le révélait la chambre régionale des comptes dans un rapport sur la ville de Marseille, « les données recueillies auprès de l'Éducation nationale montrent que l'état du patrimoine scolaire est très dégradé » et que « l'état de dégradation des écoles frappe très majoritairement les établissements des 3 ème , 13 ème , 14 ème et 15 ème arrondissements », soit les plus pauvres de la ville 58 ( * ) .

Extraits du rapport de la chambre régionale des comptes de PACA
relatifs à la ville de Marseille : la situation des écoles marseillaises

- « les services de l'Éducation nationale ont effectué des signalements sur ce sujet à propos de 54 écoles concernant l'état du bâti » ;

- « 53 écoles ont fait l'objet de signalements concernent l'état d'entretien général » ;

- « 45 écoles ont fait l'objet de signalements au titre de la suspicion de présence d'amiante » ;

- « dans 48 écoles a été signalée la présence de nuisibles » ;

- « 67 écoles ont fait l'objet de signalements à propos de problèmes de chauffage » ;

- « 52 écoles ont connu des signalements relatifs à des fuites et infiltrations importantes d'eau à la suite des intempéries survenues à l'automne 2018 ».

Source : rapport de la chambre régionale des comptes de PACA pp. 67-71

Sans qu'il soit besoin de multiplier les exemples, les difficultés rencontrées par les personnels enseignants et les enfants sont bien documentées : il a par exemple été fait état d'une invasion de rats dans l'école de Montolivet » 59 ( * ) dans le 12 ème arrondissement de Marseille en novembre 2022.

Concernant le logement, l'effondrement, largement médiatisé, de deux immeubles au 63 et 65 rue d'Aubagne au coeur du centre-ville marseillais, est un révélateur de la situation dégradée et particulièrement préoccupante de la ville en matière de logement et d'habitat indigne 60 ( * ) .

En effet, d'après une étude du CEREMA de 2015, l'habitat indigne représentait à l'échelle métropolitaine 60 000 logements dont 12 000 relevant d'un traitement prioritaire, parmi lesquels deux tiers sont situés sur la commune de Marseille 61 ( * ) . La même année, un rapport dit « Nicol » proposait une estimation similaire, chiffrée à « 40 000 le nombre de logements indignes à Marseille » et alertait sur « la faiblesse de la réponse publique », qu'il jugeait « très préoccupante » 62 ( * ) .

Pourtant, en 2019, la fondation Abbé Pierre dressait un constat encore plus alarmiste sur la situation constatant que si « la ville de Marseille enregistre à elle seule près de la moitié des demandes de logement social dans le département des Bouches-du-Rhône » qu'« à peine 20 % des objectifs régionaux de rénovation de logements indignes ou très dégradés occupés par des propriétaires occupants ont pu être maintenus ». Elle constatait au demeurant que « dans les quartiers Nord de Marseille, près de 25 % des logements sont surpeuplés » 63 ( * ) .

En 2020, la chambre régionale des comptes de PACA a partagé ce constat en relevant, dans son rapport précité sur la ville de Marseille, que « le nombre de logements indignes est 5 à 10 fois plus important dans AMP que dans les autres métropoles, celle-ci étant dans le même temps, compte tenu de ses indicateurs de précarité, très insuffisamment dotée en logements sociaux : on compte ainsi en moyenne sur huit demandes de logement social, sept demandes non satisfaites (contre 3,3 en France, et deux fois plus qu'à Lille, Lyon, Bordeaux, Toulouse ou Nantes ) » 64 ( * ) .

Sans avoir pu mener une étude approfondie sur l'ensemble des indicateurs socio-économiques de la ville de Marseille - qui n'est pas l'objet du présent rapport-, la mission considère que ces deux exemples accréditent l'hypothèse que les difficultés concentrées par la ville-centre n'ont pas tendu, depuis 2016, à se résorber .

2. Les défis que rencontre la métropole pour porter une dynamique de développement social et économique pour l'ensemble de l'aire métropolitaine

Parallèlement, la métropole d'Aix-Marseille-Provence fait face à d'importants défis qu'il lui incombera de relever à court et moyen terme et qu'elle a, d'ores et déjà, recensé dans son document stratégique et transversal intitulé « CAP 2030, la fabrique de l'ambition » adopté en 2022. Ce document constitue le produit d'une des trois commissions thématiques, regroupant des conseillers métropolitains, lancées au printemps par la présidente Martine Vassal, dans le cadre de la conduite par la métropole de la réforme de la loi dite « 3DS ». La commission « Ambition » avait ainsi pour objet de définir la stratégie de développement de la métropole à l'horizon de 2030.

« CAP 2030 » : la stratégie d'une métropole à la croisée des chemins

Réalisé en collaboration avec l'agence d'urbanisme de l'agglomération marseillaise (AGAM) 65 ( * ) , le document d'orientations stratégiques « CAP 2030 » présente les défis qui se posent à la métropole aujourd'hui.

Ces défis sont multiples et nécessitent, selon la présidente de la métropole, « d'adapter le socle stratégique et financier de [cette] institution » 66 ( * ) afin d'être relevés. Outre, les grandes crises mondiales qui ont résulté de la pandémie de la covid-19 et de la guerre en Ukraine et les enjeux climatiques, la métropole a ainsi identifié, au moins, onze autres défis qu'elle anticipe devoir relever d'ici à 2030.

Ces « nouvelles incertitudes à gérer », cartographiées ci-après, peuvent ainsi être répertoriés en quatre thématiques de politiques publiques : les enjeux climatiques, énergétiques et environnementaux ; l'industrialisation ; le pouvoir d'achat ; la transition numérique et les questions institutionnelles.

Infographie représentant les défis recensés par la métropole d'Aix-Marseille-Provence

Source : « CAP 2030 », document transmis par la métropole

Pour y faire face, la métropole a identifié quatre « scénarios d'ambition à horizon 2030 », structurés autour des quatre compétences métropolitaines que sont les mobilités, le développement économique, l'environnement et l'aménagement du territoire. Parmi ces quatre scénarios, deux sont qualifiés de transversaux et deux priorisent l'exercice d'une seule de ses compétences.

Source : commission des lois d'après « CAP 2030 - La fabrique de l'ambition »

La métropole relève dans ce document que l'exercice de ces compétences nécessitera d'importants financements et une complémentarité entre les communes et la métropole pour leur réalisation, susceptible, selon la métropole, d'être atteinte par une meilleure déconcentration des actions métropolitaines. Ainsi, les moyens de financement identifiés par la métropole sont la contractualisation avec les « grands partenaires » et le « renforcement de la capacité à capter des financements européens ».

Les rapporteurs relèvent que cette stratégie présente sans détour les importants défis auxquels la métropole devra faire face à moyen terme . Ceux-ci concerneront en particulier l'organisation des mobilités, un enjeu identifié comme déterminant par les acteurs économiques auditionnés par les membres de la mission 67 ( * ) .

Aux termes de leurs travaux, les membres de la mission, conscients de l'ampleur de ces défis, considèrent que seule une structure institutionnelle et financière viable et fonctionnelle donnerait les moyens nécessaires pour les relever, au bénéfice de ses citoyens.

B. UNE MÉTROPOLE À L'ORGANISATION RÉCEMMENT RÉFORMÉE POUR MIEUX RÉPONDRE À CES DÉFIS

1. Un récent renforcement de l'investissement de l'État dans le territoire conditionné, en particulier, à des évolutions de la gouvernance de la métropole

a) Un plan ambitieux restaurant la métropole dans son rôle

Face à ces difficultés et conscients de l'ampleur des défis à relever, les acteurs locaux se sont mobilisés, fortement accompagnés par l'État et le législateur, pour prendre leurs responsabilités et trouver des solutions pour sauver la métropole et améliorer la situation spécifique de la ville de Marseille.

En effet, dans un discours prononcé le 2 septembre 2021 depuis le Pharo, le président Emmanuel Macron a annoncé le plan « Marseille en Grand » découpé en cinq axes et financé par l'État à hauteur de 1,5 milliard d'euros, dont 1 milliard d'euros fléchés directement sur les transports comprenant 250 millions d'euros de subventions, le reste étant constitué de prêts garantis par l'État.

La philosophie ayant présidé à cette annonce, longuement détaillée par le président de la République dans le discours précité peut ainsi être résumée : « le devoir de la Nation est d'être aux côtés des Marseillaises et des Marseillais, parce que décider que ce serait une ville comme les autres, ce serait acter qu'elle va continuer à vivre au milieu de ces difficultés, les subir, et ne pas réussir pour elle-même, pour tout le territoire et pour tout le pays » 68 ( * ) .

Plan « Marseille en Grand » présenté le 2 septembre 2021
par Emmanuel Macron

Axe 1 : Répondre à l'urgence

Sur le sécuritaire, le président de la République a pris l'engagement de renforcer la lutte contre les trafics en renforçant les effectifs sur le terrain via la pérennisation des deux compagnies de CRS supplémentaires crées en mars 2021, la création de trois nouveaux groupes enquêteurs de la police judiciaire et l'accélération des nouvelles arrivées (200 policiers supplémentaires dès 2022).

Sur le social, il a réaffirmé l'objectif de réhabilitation de 10000 logements dans les quinze prochaines années.

Sur le sanitaire, il a annoncé le soutien du plan d'investissement de l'AP-HM à hauteur de plus de 200 millions d'euros pour sa réhabilitation, la création d'une maison des femmes et du pôle mère-enfant).

Axe 2 : l'éducation

Le président de République a annoncé la création d'une société sous pilotage de l'État avec pour objectif la réhabilitation et la reconstruction des 154 écoles identifiées avec la ville comme étant les plus délabrées couplée à une subvention de 254 millions d'euros pour l'aménagement de locaux modulables destinés à l'enseignement sportif et artistique. Cette société prendra la forme d'une société publique locale d'aménagement d'intérêt national (SPLA-IN).

Également, seront étendus, le dispositif « micro-lycées » dans le secondaire qui permet la création de classes intégrées aux lycées existants et réunissant les élèves en grande difficulté scolaire et les dispositifs pédagogiques innovants (rythmes scolaires, projets d'apprentissage).

Axe 3 : l'emploi

Pour ce faire, le président de la République a appelé dans son discours toutes les entreprises à embaucher des jeunes des quartiers défavorisés et souhaite encourager l'entreprenariat dans ces mêmes quartiers.

Axe 4 : la culture

Le président de la République a annoncé : la création de nouveaux studios de tournage, de post production, d'innovation numérique à l'échelle de la région, l'installation d'une école CinéFabrique pour les 18-25 ans et l'installation d'une antenne marseillaise de la cinémathèque française pour transmettre la mémoire et le plaisir du cinéma.

Axe 5 : les mobilités

Afin de répondre aux défis de la mobilité, le président a annoncé une enveloppe totale d'un milliard d'euros dont 256 millions d'euros de subventions pour la modernisation et l'évolution des transports destinées à financer quatre projets prioritaires : l'accessibilité et l'automatisation du métro, la création de quatre lignes de tramway, la création de cinq lignes de bus et l'accélération de la mise en place d'un RER à la marseillaise. Le reste constituera des avances remboursables.

Le président de la République a également souhaité ouvrir le chantier de la modernisation du port de Marseille.

Source : documents officiels du plan « Marseille en Grand »

Traduits par quatre amendements présentés par le Gouvernement dans le cadre du projet de loi de finances pour 2022, les crédits nécessaires au financement du plan « Marseille en Grand » se répartissent comme suit :

- un premier amendement de crédit de 254 millions d'euros en autorisations d'engagement et 6 millions d'euros en crédits de paiement pour la rénovation de 174 écoles de la ville de Marseille.

Comme le précisait l'objet de l'amendement, « le montant en autorisations d'engagement correspond à la subvention de l'État au profit de la société chargée du pilotage et de la réalisation des opérations » 69 ( * ) ;

- un deuxième amendement visant à permettre à la société publique locale d'aménagement d'intérêt national spécialement créée pour réaliser les opérations de construction et de réhabilitation d'écoles primaires à Marseille de bénéficier d'une garantie d'emprunt de l'État à hauteur de 650 millions d'euros 70 ( * ) ;

- enfin, deux amendements destinés à financer le volet « transports » avec d'une part, un amendement portant création d'avances remboursables destinées au financement des infrastructures de transports collectifs du quotidien de la métropole d'Aix-Marseille Provence à hauteur de 744 millions d'euros 71 ( * ) et d'autre part, un amendement instituant une subvention de l'État de 256 millions d'euros destinée à soutenir ces mêmes projets 72 ( * ) .

Par la suite, le premier ministre Jean Castex s'est rendu, accompagné par la ministre Jacqueline Gourault, à Marseille le 14 décembre 2021 pour signer une convention entre l'État et la métropole d'Aix-Marseille Provence sur le volet « transports » de ce plan et en détailler les mesures destinées à le concrétiser. Ainsi, après avoir rappelé les raisons de l'engagement particulier et significatif de l'État pour la ville de Marseille comme la métropole d'Aix-Marseille-Provence 73 ( * ) , le Premier ministre a acté « la création d'une structure ad hoc (...), un groupement d'intérêt public » qui bénéficiera du soutien financier de l'État.

Par ailleurs, tout en réaffirmant qu'« il n'y a pas de doute sur la légitimité, et la légalité, de la métropole en matière de gestion des mobilités », le Premier ministre a souhaité insister sur l'impérieuse nécessité que « la métropole dispose des moyens pour exercer sa compétence ». Ce soutien renforcé de l'État est, dès lors, pensé comme une solution à ce constat.

b) Une condition posée par l'État : améliorer la gouvernance de la métropole

Toutefois, comme l'a annoncé le président de la République à la création de ce plan, l'État « financer[a] à la condition qu'on règle les problèmes d'organisation et de gouvernance » de la ville de Marseille et de la métropole .

Déclinées sur l'ensemble des volets du plan, les mesures conditionnant le soutien de l'État dans le cadre du plan « Marseille en Grand » sont de trois ordres :

- premièrement, « un contrat d'ambition » qui comprend, à titre principal, une « réforme des mode de fonctionnement de la métropole d'Aix-Marseille-Provence ». Plus précisément, par le voix du Président de la république, l'État a souhaité conditionner une part importante de son soutien financier à l'« affirm[ation] comme l'opérateur des politiques de transports dans un cadre institutionnel révisé » de la métropole d'Aix-Marseille-Provence ;

- deuxièmement, la prise d'engagements de nature contractuelle dans le déploiement par les acteurs locaux de chaque volet du plan. Ainsi, s'agissant du seul volet transports, le Premier ministre a, par exemple, « demandé d'accorder une attention particulière à la desserte des quartiers nord de la ville de Marseille (..), [puisque] c'est effectivement ce à quoi vous vous engagez dans le document contractuel » ;

- enfin, l'État a défini les structures organisationnelles sur certains volets spécifiques du plan qui devaient encadrer la mise en oeuvre du plan . En effet, le Président de la république suivi par le Premier ministre ont, notamment, annoncé la création d'un groupement d'intérêt public mobilités pour piloter les chantiers relatifs aux transports et l'institution d'une société publique locale d'aménagement d'intérêt national pour le volet « écoles » du plan.

2. Le corollaire : la refonte de l'organisation de la métropole par le législateur en 2022

Pour donner corps à la réforme de la gouvernance de la métropole d'Aix-Marseille Provence posée par l'État comme condition du financement du plan « Marseille en Grand », le Premier ministre avait annoncé trois nécessaires évolutions institutionnelles :

- « la simplification de la gouvernance métropolitaine » ;

- « la clarification de la répartition des compétences entre la métropole et les communes membres » ; et

- « la révision des (...) relations financières » entre les communes membres et la métropole d'Aix-Marseille Provence.

En conséquence, lors de l'examen du projet de loi dit « 3DS » la ministre Jacqueline Gourault a proposé, dans le texte initial 74 ( * ) puis par amendement à l'Assemblée nationale 75 ( * ) , une nouvelle architecture institutionnelle pour la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

Adoptée en commission mixte paritaire par les deux assemblées, cette réforme s'est inscrite dans les objectifs posés par le Premier ministre Jean Castex et s'articule autour de trois volets :

- le premier est relatif à la simplification de la gouvernance de la métropole . Ainsi, la loi « 3DS » a supprimé les conseils de territoire , le conseil de la métropole devant délibérer pour arrêter l'organisation déconcentrée des services au plus tard le 1 er juillet 2022. Les présidents et vice-présidents de conseils de territoire continueront d'exercer les fonctions de vice-président de la métropole jusqu'au prochain renouvellement général. La disposition procède par ailleurs à un léger renforcement de la conférence métropolitaine des maires , dorénavant susceptible d'être réunie à la demande d'un tiers des maires, dans la limite de quatre réunions annuelles ;

- le deuxième porte sur la répartition des compétences entre la métropole et ses communes membres afin de gagner en efficacité et de conforter la métropole dans ses compétences stratégiques.

La loi dite « 3DS » a ainsi procédé à la « redescente » de plusieurs compétences dites « de proximité » aux communes membres . Certaines seront exercées en intégralité par les seules communes 76 ( * ) , tandis que d'autres ne seront exercées par la métropole que dans le cadre de la reconnaissance d'un intérêt métropolitain 77 ( * ) . Ce dernier doit être défini dans des conditions de majorité exorbitantes du droit commun, garantissant en particulier l'assentiment de la commune de Marseille .

En contrepartie, il échoit à la métropole la définition de schémas destinés à incarner l'exercice de parties de compétences dites « stratégiques » 78 ( * ) . La métropole aura enfin la possibilité de déléguer certaines de ses compétences à ses communes membres, notamment en matière de gestion des eaux pluviales urbaines et de voirie d'intérêt métropolitain ;

- enfin, le dernier a trait au « rééquilibrage » des relations financières entre a métropole et les communes membres 79 ( * ) .

Le texte adopté a prévu la remise avant le 1 er septembre 2022 d'un avis de la chambre régionale des comptes de PACA sur les relations entre la métropole et ses communes membres, notamment sur le sujet des attributions de compensation, suivi d'un débat organisé par le président de la métropole sur l'avis ainsi rendu et les suites à lui donner 80 ( * ) . La chambre régionale des comptes s'est vu reconnaître la responsabilité d'établir un avis préalable à l'évaluation par la CLECT des charges transférées liées aux transferts de compétences prévus par le texte. Initialement envisagée selon un format inédit (attribuant au président de la chambre régionale la présidence de la CLECT), la réunion de cet organe s'effectuera finalement selon les modalités de droit commun.

Au surplus, la ministre Jacqueline Gourault a renvoyé lors de l'examen de ces dispositions en séance publique à l'Assemblée nationale à une « conférence budgétaire » censée purger d'éventuels conflits dans le courant de l'année 2022. De surcroît, issu d'une initiative parlementaire jugée bienvenue par les rapporteurs de la commission des lois du Sénat - Françoise Gatel et Mathieu Darnaud -, un volet évaluatif a été ajouté à cette réforme . Il consiste en la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport dressant un bilan de l'application de la loi et formulant des propositions « permettant d'améliorer le fonctionnement de la métropole notamment en ce qui concerne son organisation, sa gouvernance, son périmètre et son mode d'élection ».

DEUXIÈME PARTIE
REDONNER DE L'ÉLAN À LA MÉTROPOLE
D'AIX MARSEILLE PROVENCE

La métropole d'Aix-Marseille-Provence concentre donc des difficultés nombreuses et diverses, qui s'illustrent notamment par les défaillances structurelles de la métropole et le décrochage socio-économique de sa ville-centre , et qui la menacent d'éclatement . Toutefois, si la structure métropolitaine n'a pas permis à elle seule un rééquilibrage, un échec de la métropole ne serait souhaitable pour personne .

La situation actuelle appelle donc de nécessaires réformes.

Pour autant, la plupart des acteurs ne semblent pas souhaiter, à court terme, une réforme institutionnelle majeure . Ajouter une réforme systémique, dans l'immédiat, aux défis que doit surmonter la métropole, apparait en effet, de l'avis quasi-unanime des personnes auditionnés par la mission d'information, manifestement prématuré.

Il apparait dès lors primordial, dans un premier temps, de s'attacher à garantir le bon fonctionnement de la métropole .

Pour autant, l'ensemble des acteurs locaux s'accordent sur le fait que la situation actuelle ne peut durer davantage et qu'une réforme paramétrique n'est pas suffisante pour compenser à elle seule l'ampleur des défis que rencontre la ville de Marseille, qu'aucune construction institutionnelle ne suffirait seule à relever.

Une fois le bon fonctionnement de la métropole consolidé, une réforme institutionnelle d'ampleur pourra donc être envisagée . Les paramètres en sont connus. Dès lors, le présent rapport vise moins à formuler de nouveaux scenarii qu'à proposer un calendrier et une méthode de conduite d'une telle réforme .

I. EVITER L'ÉCLATEMENT MÉTROPOLITAIN EN COMBINANT MESURES ORGANISATIONNELLES ET RÉÉQUILIBRAGE

Tirant les leçons des erreurs du passé, les rapporteurs estiment que des mesures visant à réformer la structure métropolitaine ne sauraient suffire à redonner une force à la cohésion métropolitaine d'Aix-Marseille-Provence tant la situation de la ville de Marseille est spécifique. En conséquence, deux axes prioritaires de réforme doivent, dans l'immédiat, être ouverts et menés parallèlement :

- d'une part, le cadre posé par le législateur doit désormais être appliqué et les acteurs locaux doivent pleinement se l'approprier . Ces derniers doivent désormais continuer d'avancer ensemble dans le développement de projets métropolitains concrets, seuls susceptibles de d'enraciner et de consolider le fait métropolitain sur le périmètre de la métropole ;

- d'autre part, la ville-centre qu'est Marseille doit faire l'objet de mesures de rééquilibrage significatives afin d'enrayer la dynamique de décrochage concurrentiel de la principale centralité de la métropole . Dès lors, une telle éventualité permettra de décharger, au moins en partie, la métropole d'Aix-Marseille-Provence de la responsabilité du rattrapage de la ville-centre avec les autres communes situées sur son périmètre. Aux yeux des rapporteurs, ceci n'apparait réalisable qu'à la condition d'un soutien renforcé et régulier de l'État en faveur de la ville de Marseille .

A. PARACHEVER LA RÉCENTE RÉFORME DE LA MÉTROPOLE : PREMIER JALON DU RENFORCEMENT DE LA COHÉSION MÉTROPOLITAINE

La récente réforme prévue par la loi dite « 3DS » a révélé que, contrairement aux objectifs qui lui avaient été fixés par le législateur, la structure métropolitaine n'a pas permis à elle seule un rééquilibrage et continue d'être, pour certains pans de son fonctionnement, dysfonctionnelle. Dès lors, l'immobilisme est proscrit et les changements nécessaires doivent être apportés.

Pour autant, ce changement ne semble pas devoir aboutir dans l'immédiat à une solution institutionnelle définitive, qui conduirait par exemple à la suppression de la métropole ou à une révision institutionnelle d'ampleur . En effet, la métropole ne suscite plus autant que par le passé l'opposition franche des élus locaux : les rapporteurs ont ainsi relevé que les élus locaux qu'ils ont auditionnés sont peu enclins à la suppression de la métropole et souhaitent, en général, son succès. En effet, comme l'avait noté dès 2019 le préfet Pierre Dartout, un échec de la métropole n'est aujourd'hui souhaitable pour personne tant le fait métropolitain s'est imposé : « de façon quasi-unanime, les acteurs de ce territoire considèrent que la conjoncture politique, les réalités socio-économiques et la situation institutionnelle sont propices à une évolution à relativement court terme et que cette opportunité doit être saisie : l'échec de la métropole - qui pourrait résulter d'un fonctionnement institutionnel déficient ou d'une mise en oeuvre insuffisante de ses projets stratégiques - aurait des conséquences politiques graves » 81 ( * ) .

Dès lors, si tant l'immobilisme qu'une révision institutionnelle semblent proscrits, la traduction en actes des modifications apportées par la loi dite « 3DS », plus petit dénominateur commun d'une réforme métropolitaine urgente, doit donc être rapidement menée, conformément à l'intention du législateur et aux principes directeurs de la réforme qu'il a posé. Ces principes étaient au nombre de deux : d'une part, la nécessaire responsabilisation des acteurs locaux pour faire émerger un consensus et d'autre part, l'encadrement temporel des décisions pour accompagner les processus de réforme afin d'éviter tout immobilisme, continuent de guider les actions de chacun jusqu'à l'aboutissement de cette réforme.

1. Le nécessaire réaménagement des compétences doit être mené à bien conformément à l'intention du législateur
a) Le nouveau partage des compétences entre la métropole et ses communes membres apporte une clarification bienvenue : des communes en quête de compétences de proximité

Répondant à une demande ancienne et récurrente des acteurs locaux, la loi dite « 3DS » a, comme évoqué précédemment, procédé à un nouveau partage des compétences entre la métropole et ses communes membres . En l'occurrence, les auditions menées par les membres de la mission ont permis de constater que la plupart des acteurs locaux ont accueilli favorablement la clarification des compétences à laquelle le législateur a ainsi procédé, et ce pour deux types de raisons.

Premièrement, cette réforme a consisté en une simplification bienvenue du fonctionnement administratif de la métropole, d'une part, en ce qu'elle a permis aux citoyens comme aux élus locaux de disposer d'une meilleure lisibilité dans la répartition des compétences et, d'autre part, en ce qu'elle a procédé à un repartage des compétences adapté aux enjeux financiers et stratégiques que leur exercice exige. Les rapporteurs rappellent à ce titre que la répartition des compétences entre la métropole d'Aix-Marseille-Provence et les communes membres doit obéir aux principes d'efficacité comme de lisibilité de l'action publique, qui doivent seuls guider, en l'occurrence, les choix du législateur et les demandes des acteurs locaux.

Deuxièmement, les travaux des rapporteurs ont montré que cette nouvelle répartition a permis de dégager d'importants gains d'efficacité conformément au principe de subsidiarité destiné à assurer que les compétences sont exercées par l'échelon le mieux à même de les exercer, appelé régulièrement de ses voeux par le Sénat. Les membres de la mission estiment ainsi que les communes demeurent les mieux à même d'exercer efficacement les compétences de proximité que peuvent être la gestion des cimetières et sites cinéraires ou des réseaux urbains de chaleur.

Ainsi, la mission n'a pu que constater que l'application effective du principe de subsidiarité, appelée de ses voeux par le Sénat, est une condition indispensable de la réussite de toute construction métropolitaine tant du point de vue du citoyen - qui y gagne une action publique locale efficace et lisible -, que du point de vue des élus locaux - mieux à même d'exercer leurs compétences.

b) L'attribution de certaines compétences par le législateur pose encore question pour les élus de terrain

La nouvelle attribution de certaines compétences à la métropole ou aux communes membres, résultant de la loi dite « 3DS », semble toutefois toujours poser, à la marge, des difficultés à certains acteurs que les membres de la mission d'information ont souhaité relayer.

De fait, la définition du périmètre des compétences dites « de proximité » n'a pas été sans difficulté pour le législateur.

En premier lieu, l'antériorité de l'exercice effectif de certaines compétences soit par l'échelon intercommunal « intermédiaire » qu'ont été les structures intercommunales fusionnées dans la métropole ou les conseils de territoires, soit par les communes en raison des délégations opérées par la métropole, rend difficile, voire contestée, leur nouvelle attribution. Comme l'a fait valoir M. Giorgi, maire de Carnoux-en-Provence et vice-président de la métropole, lors de son audition, « il y a des compétences de proximité qui sont exercées depuis vingt ans par les conseils de territoire, cela n'aurait pas de sens de les rendre aux communes ; et vice versa, des compétences de proximité exercées par les communes depuis vingt ans ne doivent pas être remontées à la métropole ».

Ainsi, les rapporteurs ont observé, d'une part, que certaines compétences n'avaient in fine plus été exercées - depuis la création entre 1992 et 2007 des précédents établissements publics de coopération intercommunale à fiscalité propre - ni par la métropole ni par les communes membres mais bien toujours par un échelon intermédiaire - lesdits EPCI, puis les conseils de territoire - désormais supprimé. En conséquence, le partage d'une compétence entre deux strates n'ayant pas exercé récemment ladite compétence pourrait s'avérer théoriquement malaisé. Cela a notamment, conduit le législateur à rejeter, dans le cadre de l'examen de la loi dite « 3DS », par deux sous-amendements, la réattribution aux communes des compétences - pourtant susceptibles d'être qualifiées de compétences de proximité - « valorisation du patrimoine naturel et paysager » et « bornes de recharge électrique de véhicules », la métropole ne devant initialement conserver qu'une compétence de planification de celles-ci.

D'autre part, du fait de leur exercice de longue date par les communes, certaines compétences pourraient difficilement, selon les élus communaux les ayant exercées pour le compte de la métropole pendant plusieurs années, être repartagées par le biais de la définition de l'intérêt métropolitain. M. Giorgi, au cours de la même audition, souhaitait que l'éclairage public, dont la métropole a délégué l'exercice par convention de gestion à dix-neuf communes, demeure communal , ce qui n'a pas été prévu par le législateur qui n'a restitué aux communes que les seules compétences « voirie », « signalisation », « parcs et aires de stationnement » sur les axes non reconnus d'intérêt métropolitain.

En second lieu, la nouvelle attribution de certaines compétences à la métropole ou à ses communes membres pose, dans certains cas, une difficulté de fond .

Les auditions conduites par les rapporteurs ont ainsi montré que les compétences « propreté » et « collecte des ordures ménagères », attribuées à la métropole, apparaissent, au maire de Marseille, Benoit Payan, poser des difficultés d'exercice dans le cadre de la commune de Marseille. La présidente de la métropole, Martine Vassal, a quant à elle exprimé le souhait que les compétences « propreté » et « collecte des ordures ménagères » constituent un « paquet de compétences liées, exercées sur chaque commune soit au niveau communal soit au niveau métropolitain », ce que le législateur n'a pas autorisé dans la récente réforme.

c) Stabiliser les outils législatifs afin de permettre aux élus de s'approprier pleinement leurs compétences
(1) Favoriser l'appropriation par les communes et la métropole de leurs nouvelles compétences

S'il pourrait être envisagé de procéder, avec prudence, à quelques aménagements de la répartition des compétences entre la métropole et ses communes membres, il n'est pas apparu souhaitable, aux membres de la mission, à l'issue de leurs travaux, de procéder à ceux-ci prochainement .

Au contraire, il est primordial de stabiliser les compétences respectives des communes et de la métropole afin de permettre leur pleine appropriation et, par corollaire, d'écarter, à court terme, tout rémanéagement de ces compétences.

Proposition n° 1 : stabiliser les compétences respectives des communes et de la métropole afin de permettre leur pleine appropriation

Dès lors, le législateur doit s'engager, autant que possible, à ne pas modifier un cadre de répartition de compétences qu'il vient de modifier . La stabilité de ce dernier est une condition préalable à l'appropriation pleine et effective par les acteurs locaux de leurs compétences. Il en va également de la lisibilité de la norme : les citoyens de la métropole doivent être mis en mesure d'évaluer effectivement l'action conduite par les élus locaux en disposant d'un cadre de répartition des compétences suffisamment stable pour en permettre la compréhension.

Sous-proposition n° 1 : favoriser l'appropriation par les communes et la métropole de leurs nouvelles compétences

De surcroît, une telle position implique de la part de l'État un renforcement de son accompagnement aux communes comme à la métropole dans le déploiement de cette nouvelle répartition. En effet, les rapporteurs observent que ces attentes pesant sur l'État ne sont pas nouvelles et s'appuient sur le fait que par le passé, l'État a su trouver les voies et moyens d'un accompagnement de ces collectivités territoriales conciliant pragmatisme et respect des dispositions légales applicables. L'État doit donc renforcer son accompagnement, afin que les communes, notamment de petite taille, soient en mesure de s'approprier rapidement des compétences qu'elles n'exercent plus, pour certaines, de longue date.

Sous-proposition n° 2 : renforcer l'accompagnement de l'Etat dans le déploiement de cette nouvelle répartition

(2) Faire usage des souplesses ouvertes par le législateur

En revanche, l'ensemble des membres de la mission s'accorde à constater que la clarté de la nouvelle répartition des compétences n'exclut pas la souplesse . Ainsi, si des difficultés d'exercice devaient se révéler à l'usage, les rapporteurs appellent à faire plein usage des facultés de délégation ouvertes par le législateur aux communes comme à la métropole.

D'une part, certaines dispositions de droit commun s'appliquent à la métropole d'Aix-Marseille-Provence. Ainsi, les communes membres disposent, en application de l'article L. 1111-8 du code général des collectivités territoriales, de la faculté de « déléguer à une collectivité territoriale relevant d'une autre catégorie ou à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre tout ou partie d'une compétence dont elle est attributaire, y compris pour la réalisation ou la gestion de projets structurants pour son territoire 82 ( * ) . »

De telles dispositions sont naturellement applicables aux communes membres de la métropole, qui pourraient dès lors déléguer - y compris partiellement - l'exercice de l'une de leurs compétences à la métropole, notamment pour des projets nécessitant une ingénierie particulière.

D'autre part, le législateur a prévu des possibilités spécifiques de délégation de la métropole vers les communes membres dans certains domaines de compétences identifiés :

- la gestion des eaux pluviales urbaines (GEPU) ;

- l'entretien de la voirie reconnue d'intérêt métropolitain ;

- l'entretien des espaces publics d'intérêt métropolitain dédiés à tout mode de déplacement urbain ainsi que de leurs ouvrages accessoires d'intérêt métropolitain.

En la matière, le législateur a prévu une modalité particulière de délégation, puisque lorsqu'une commune demande à bénéficier d'une telle délégation, « le conseil de la métropole d'Aix-Marseille-Provence statue sur cette demande dans un délai de trois mois et motive tout refus éventuel 83 ( * ) . »

Les rapporteurs appellent l'ensemble des élus concernés à se saisir de ces modalités de délégation . S'agissant de la voirie, domaine de compétences souvent disputé entre les métropoles et leurs communes membres, le législateur a ainsi permis aux communes de se voir déléguer une partie non négligeable de la compétence, l'entretien, sur des voies pourtant définies comme d'intérêt métropolitain.

Les rapporteurs souhaitent réaffirmer que si l'ensemble des outils législatifs existent, il revient désormais à la métropole et à ses communes d'en faire usage et aux services de l'État d'accompagner ces collectivités dans leurs démarches . Les services de l'État pourraient, par exemple, utilement renforcer l'information des élus locaux sur l'existence de ces facultés en cas de frictions émergeant ponctuellement et localement s'agissant de la répartition des compétences entre les deux échelons réunis sur le périmètre métropolitain.

Sous-proposition n° 3 : inciter la métropole et ses communes membres à faire pleinement usage des facultés de délégation prévues par le législateur

(3) Mettre en oeuvre rapidement un accord sur l'intérêt métropolitain

Les membres de la mission observent que la définition de l'intérêt métropolitain a été identifiée comme un point de difficulté par plusieurs acteurs auditionnés. Si le Sénat, chambre des territoires, est traditionnellement favorable à ce type de dispositifs , qui s'en remet à la responsabilité et à l'esprit de compromis des élus en proximité, force est de reconnaître que, dans le cas d'espèce, la définition d'un intérêt métropolitain risque de s'avérer difficile , pour au moins trois raisons identifiées par les rapporteurs au cours de leurs travaux :

- premièrement, des difficultés politiques peuvent exister aujourd'hui entre les acteurs locaux chargés de cette définition, notamment entre le maire de Marseille et la présidente de la métropole ;

- deuxièmement, la mise en oeuvre concrète de cet intérêt une fois défini semble particulièrement complexe, eu égard à l'étendue du périmètre métropolitain et aux difficultés traditionnellement rencontrées lors du partage de compétences liées à l'entretien de réseaux tels que la voirie ;

- enfin, le législateur a introduit une procédure qui tend à garantir la capacité de la ville de Marseille, en lien avec son poids démographique, à représenter une majorité relative des voix des communes lors de la définition dudit intérêt, ce qui peut avoir deux conséquences négatives tenant, d'une part, au potentiel rejet par les élus marseillais de tout intérêt métropolitain, porteur d'un fort risque d'immobilisme pour la métropole, et, d'autre part, à la situation délicate dans laquelle se trouve cette collectivité ainsi dotée seule d'un pouvoir de blocage d'une telle définition.

Dès lors, si ce dispositif a fait ses preuves ailleurs sur le territoire national, les rapporteurs ne peuvent que constater qu'un risque d'échec dans sa mise en oeuvre sur le territoire métropolitain d'Aix-Marseille-Provence existe. Les membres de la mission, d'un constat partagé avec le directeur général des collectivités locales lors de son audition, rappellent qu'il n'appartient pas au législateur mais bien à la métropole de définir l'intérêt métropolitain . En conséquence, tout doit être mis en oeuvre, sur ce sujet, pour qu'une définition consensuelle de l'intérêt métropolitain soit rapidement établie par les acteurs locaux et ce, avant l'échéance du 31 décembre 2022 : une fois passée, si les acteurs n'ont pas trouvé d'accord, l'intérêt métropolitain ne trouvera pas à s'appliquer. Les rapporteurs appellent ainsi les acteurs locaux à faire preuve du même esprit de compromis et de responsabilité que celui ayant présidé à la définition de la réforme dans la loi dite « 3DS ».

D'après les informations recueillies par les rapporteurs, il semblerait que la conclusion d'un accord se dessine pour la mi-décembre 2022 , ce dont les rapporteurs se félicitent, le législateur n'ayant pas souhaité 84 ( * ) rendre possible un report de l'échéance du 31 décembre 2022 qu'il a fixée. Une fois l'accord obtenu, il conviendra de procéder à sa mise en oeuvre rapide , afin de favoriser sa pleine appropriation par la métropole et les communes membres. Il est en effet crucial que la répartition des compétences qui en résulte n'obère pas leur exercice effectif , pour que soit rapidement constatée, en premier lieu par les citoyens, l'amélioration de l'efficacité de l'action publique locale escomptée . Déjà à l'oeuvre, l'action de l'État doit donc aider la métropole et les communes à rapidement se saisir de leurs compétences en la matière.

Sous-proposition n° 4 : mettre en oeuvre rapidement l'accord sur l'intérêt métropolitain

2. Trouver les voies et moyens d'un retour à la normale au niveau financier

Comme évoqué précédemment, l'un des volets de la réforme de la métropole d'Aix-Marseille-Provence entériné par la loi dite « 3DS » est relatif aux relations financières entre la métropole et les communes membres . Si le législateur a fait preuve d'initiative et d'adaptation afin de mettre en mesure les acteurs locaux de procéder à une révision des relations financières entre la métropole et les communes membres, il reviendra aux acteurs locaux de se donner les moyens de réussir les prochains débats budgétaires, sans les éviter ou les dénaturer, pour aplanir ces relations financières.

a) Se donner les moyens de réussir la prochaine CLECT

Au cours des auditions menées par la mission, les acteurs locaux, de toute nature et indépendamment de leurs orientations politiques, ont rappelé l'importance des défis financiers auxquels devront répondre la métropole d'Aix-Marseille-Provence comme ses communes membres. Les personnes auditionnées ont, à leur quasi-unanimité, relevé que la prochaine réunion de la commission locale d'évaluation des charges transférées (CLECT) s'annonçait complexe.

Pourtant, ce mécanisme est un outil traditionnel de l'intercommunalité qui a démontré par le passé toute sa pertinence, y compris pour traiter de situations locales particulières, comme lors de la création de la métropole de Lyon pour procéder à la répartition des charges entre la métropole nouvellement créée et le Nouveau Rhône.

Les rapporteurs rappellent que, sur le volet financier, le législateur a proposé une solution adaptée mettant les élus locaux en situation de décider sur des fondements objectifs, en prévoyant la remise par la chambre régionale des comptes d'un avis sur le coût des charges inhérentes aux transferts de compétences prévus au 1 er janvier 2023. Comme l'a souligné le préfet Christophe Mirmand, « la loi 3DS permet une analyse objective des attributions de compensation en vue d'une plus grande équité. La loi n'impose pas de révision des attributions de compensation (hors transferts de compétences) à la métropole mais lui offre la possibilité de s'engager dans cette démarche indispensable pour ses investissements futurs, avec, toutefois, l'accord nécessaire de chaque commune ».

Si les élus conserveront la marge d'appréciation qui leur revient dans la CLECT - la suppression de l'attribution, un temps envisagée, de la présidence de la CLECT au président de la CRC étant à cet égard une bonne chose - il est impératif de ne pas répéter les erreurs du passé et de procéder aux transferts adéquats, en lien avec le coût réel d'exercice des compétences .

b) Ne pas oblitérer le débat de fond sur les finances de la métropole
(1) Rejeter le palliatif de la constitution de ressources nouvelles

Comme démontré précédemment, le niveau des ressources de la métropole ne lui permet pas en l'état de disposer d'une capacité de financement suffisante. En conséquence, des initiatives pourraient être prises localement afin de régler les difficultés posées par le niveau - en augmentant le montant des ressources - ou la répartition en diminuant les reversements aux communes - par des supplétifs permettant ainsi d'éviter les sujets financiers plus complexes et lourds à trancher.

À titre d'exemple, la métropole a exprimé le souhait que soit rehaussé le plafond du taux du versement mobilités qu'elle pourrait imposer sur son territoire , actuellement fixé à 2 %, pour l'aligner sur le modèle d'Ile-de-France Mobilités dont le taux maximal est dérogatoire et fixé à 2,95 % 85 ( * ) .

Les rapporteurs souhaitent rappeler que si la nécessité de ressources supplémentaires pour le financement des infrastructures de transport est réelle, ces ressources existent, au moins pour partie, théoriquement et doivent être dégagées par une amélioration de la gestion de la métropole avant d'envisager tout accroissement de la fiscalité . Ainsi, sans écarter par principe et définitivement les débats relatifs à l'augmentation du taux du versement mobilité, les membres de la mission proposent aux acteurs locaux de concentrer prioritairement leurs négociations et travaux sur les relations financières entre la métropole et ses communes membres, et non entre la métropole et les entreprises du territoire, seules acquittables du versement mobilité .

Au surplus, précédemment à toute évolution en la matière, les rapporteurs soulignent que l'ampleur des infrastructures de transport marseillaises est sans commune mesure avec le réseau francilien , dont les coûts de gestion sont nettement plus élevés et justifient un prélèvement plus important, a fortiori sur les employeurs compte tenu de la nature des infrastructures et des caractéristiques des trajets.

Enfin, une hausse de la fiscalité pèserait indûment sur le contribuable économique local, et ferait peser sur lui les difficultés de gestion imputables au fonctionnement de la métropole et aux choix réalisés par celle-ci ainsi que ses communes membres.

En tout état de cause, il leur est apparu primordial que dans les domaines des transports - comme dans d'autres - la formulation d'un projet métropolitain clair précède l'attribution de nouvelles ressources éventuelles .

(2) Envisager la clarification des relations financières métropole-communes indépendamment des finances du département

Par ailleurs, les rapporteurs estiment essentiel que la redéfinition des relations financières entre la métropole et les communes ne s'opère pas au détriment des finances du département. En effet, le conseil départemental dispose d'une compétence de solidarité territoriale et à ce titre soutient les projets des communes. Or, le cumul des fonctions de président de la métropole et du conseil départemental, pourrait conduire à envisager le règlement de certaines des difficultés posées par les relations financières entre la métropole et ses communes membres par l'attribution, en compensation, de fonds départementaux .

À titre d'exemple, lors de la séance du conseil municipal de Marseille du 30 septembre 2022, Yves Moraine, conseiller municipal, conseiller métropolitain et vice-président du conseil départemental des Bouches-du-Rhône, a souhaité répondre aux inquiétudes formulées par Benoît Payan, maire de Marseille, quant à la difficulté de la renégociation des relations financières entre la métropole et les communes membres. Pour ce faire, il a indiqué être, en tant que vice-président du conseil départemental des Bouches-du-Rhône chargé du budget, « extrêmement ouvert à la situation de la ville de Marseille » et à même d'envisager « la conclusion d'un nouveau contrat financier avec la municipalité » 86 ( * ) .

Il est compréhensible que la redéfinition des relations entre la métropole et les communes ne soit pas envisagée in abstracto par les élus concernés et soit conçue dans un tout qui englobe la situation financière du département . Néanmoins, les rapporteurs relèvent qu'une telle déclaration témoigne d'une confusion critiquable, tant il apparait nécessaire de ne plus oblitérer les débats financiers entre la métropole et ses communes membres par de telles propositions . Les ressources du département ont vocation à permettre à celui-ci d'exercer ses compétences, parmi lesquelles celles relatives à la solidarité territoriale et au soutien à l'ingénierie des communes ; elles ne sauraient constituer un palliatif exonérant la métropole et ses communes membres du nécessaire aplanissement de leurs relations financières.

c) Aplanir les relations financières métropole-communes

Convaincus que la procédure prévue par le législateur à l'article 181 de la loi dite « 3DS » doit être l'occasion de remettre à plat les relations financières entre la métropole et ses communes membres , les rapporteurs réaffirment que cette difficile question doit être résolue frontalement, avec sérénité et objectivité, afin d'assainir, pour l'avenir, la situation financière de cette construction métropolitaine. Le règlement de cette question passera avant tout par une renégociation des attributions de compensation (AC) structurant les relations financières entre la métropole et les communes membres.

Les attributions de compensation sont un mécanisme usuel en cas de transfert de compétence entre des communes et un établissement public de coopération intercommunal à fiscalité propre.

Mécanisme des attributions de compensation
d'un établissement public de coopération intercommunal
à fiscalité professionnelle unique à ses communes membres

Aux termes de l'article 1609 nonies C du code général des impôts, les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI) soumis au régime fiscal de la taxe professionnelle unique versent à leurs communes membres une attribution de compensation. Celle-ci a pour objet d'assurer la neutralité budgétaire pour les communes membres la première année d'application de ce régime fiscal afin qu'elles puissent continuer à assumer la charge des compétences qu'elles conservent.

Le montant des attributions est en principe égal à la somme des impositions professionnelles dévolues à l'EPCI, corrigée, le cas échéant, du coût des transferts de charges. Lorsque le montant des charges transférées excède le produit de fiscalité professionnelle dont la perception revient à l'EPCI, l'attribution de compensation est négative. Dans cette hypothèse, l'EPCI peut décider de demander ou non à la commune membre d'effectuer un versement à due concurrence.

Ces montants sont calculés par une commission locale chargée d'évaluer les transferts de charges entre ledit EPCI et ses communes membres, la CLECT. Ces reversements ont le caractère de dépenses obligatoires au sens de l'article L. 2321-1 du code général des collectivités territoriales qu'ils proviennent de l'EPCI ou, le cas échéant des communes membres. Les attributions de compensation peuvent être révisées selon quatre modalités :

- la révision dite « libre », qui requiert la réunion de trois conditions cumulatives : une délibération à la majorité des deux tiers du conseil communautaire sur le montant révisé, des délibérations concordantes de l'ensemble des conseils municipaux, à la majorité simple, sur le même montant révisé et le visa par ces délibérations du dernier rapport élaboré par la CLECT ;

- la révision en cas de transfert de charges, lorsqu'une révision libre a échoué notamment : le montant révisé de l'AC est alors révisé, par simple délibération du conseil communautaire, en fonction du rapport de la CLECT, sans qu'une délibération des communes membres soit nécessaire ;

- la révision dite « unilatérale », décidée par le conseil communautaire seul, sans accord des communes membres, qui ne peut être enclenchée que dans deux cas : lors d'une « diminution des bases imposables de fiscalité professionnelle de l'EPCI » ou lors d'une fusion ou en cas de modification du périmètre 87 ( * ) ;

- la révision dite « individualisée », qui consiste en la diminution des AC d'une partie des communes membres, lorsque les communes concernées disposent d'un potentiel financier par habitant supérieur de plus de 20 % au potentiel financier par habitant moyen de l'ensemble des communes membres. Dans ce cas, les délibérations concordantes doivent être adoptées par une majorité qualifiée des conseils municipaux par deux tiers au moins des conseils municipaux des communes intéressées représentant plus de la moitié de la population totale de celles-ci, ou par la moitié au moins des conseils municipaux des communes représentant les deux tiers de la population totale de l'EPCI. Une révision à la baisse du montant de l'AC ne peut néanmoins excéder 5 % de son montant initial.

Source : code général des impôts et direction générale des collectivités locales

La mise en oeuvre des mécanismes d'attributions de compensation vise à assurer la neutralité financière de transferts de charges. En effet, comme le rappelle la chambre régionale des comptes dans son avis d'octobre 2022 transmis aux rapporteurs, « le mécanisme de l'attribution de compensation a pour fonction intrinsèque d'assurer la neutralité financière des transferts de compétences entre les communes et leur EPCI de rattachement ». Elle précise ainsi que « s'ils peuvent s'éloigner du strict calcul légal à la faveur de la procédure dite de fixation libre, les déterminants de l'attribution de compensation ne peuvent pas être dépourvus de tout lien avec les logiques de transferts de charges et ressources 88 ( * ) . »

Or, s'agissant des relations financières entre la métropole d'Aix-Marseille-Provence et ses communes, force a été de constater, comme l'a relevé le rapport Dartout en 2019, que « le contexte politique local tendu qui a prévalu avant la création de la métropole a conduit à dénaturer le mécanisme des attributions de compensation » 89 ( * ) . Selon la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur, cette dénaturation résulte de deux facteurs.

En premier lieu, la chambre régionale des comptes a constaté « une valorisation des attributions de compensation au-delà du périmètre visant à garantir la neutralité des transferts de compétences ». Elle a notamment relevé l'irrégularité de l'intégration , au sein des flux d'attributions de compensation de montants de dotation de solidarité communautaire (DSC) : si la procédure de révision dite « libre » des attributions de compensation confère une « liberté méthodologique » aux EPCI et communes concernés dans l'établissement de l'AC, elle ne peut pas avoir pour effet « d'autoriser une fixation des attributions de compensation dont certains déterminants seraient dépourvus de tout lien avec les charges et ressources transférés », ce qui est manifestement le cas de l'intégration des montants de DSC.

Au surplus, une telle intégration a eu pour conséquence de figer le montant de la DSC attribuée - via les AC - à chaque commune et à leur conférer le caractère de dépenses obligatoire, ce qui ne correspond pas au cadre juridique de la DSC. La chambre régionale des comptes a également souligné les difficultés posées par l'intégration de produits de fiscalité au sein des AC : l'augmentation par certains EPCI, préalablement à la fusion de la métropole, de leurs taux de fiscalité pour les faire converger ceux de la future métropole a généré la constitution « d'un produit fiscal supplémentaire, qui a fait l'objet d'une restitution aux communes via les attributions de compensation et les dotations de coopération ».

En second lieu, la chambre régionale des comptes a fait état « de méthodes d'évaluation de certains transferts de compétences qui privilégient les communes » 90 ( * ) . Au-delà de biais méthodologiques, la chambre régionale des comptes a relevé qu'il n'a été procédé à aucune révision du montant des attributions de compensation depuis la création de la métropole malgré des évolutions dans la répartition des compétences entre la métropole et ses communes du fait de restitutions ou de nouveaux transferts de compétences.

L'ensemble de ces facteurs ont conduit à deux évolutions des attributions de compensation discutables :

- l'augmentation entre 2013 et 2015 des attributions de compensation à hauteur de 35 %, soit 180 millions d'euros dont 80 % soit 147 millions d'euros « ne s'expliquent ni par des transferts de charges (...) ni par une augmentation des recettes fiscales professionnelles » 91 ( * ) ; et

- les forts contrastes dans leur répartition pour des communes aux caractéristiques pourtant similaires.

Cartographie du montant de la surévaluation des attributions
de compensation par communes par rapport à la valeur de référence en 2021
(en millions d'euros)

Source : chambre régionale des comptes de PACA

À titre d'exemple, en 2018, Aubagne, Istres et Martigues dont la population est comprise entre 43 000 et 49 000 habitants bénéficient respectivement de 12 millions d'euros, 60 millions d'euros et 95 millions d'euros d'attributions de compensation. Il convient de noter qu'en raison de leur mode de décision à la main des collectivités territoriales, la répartition des attributions de compensation, bien que discutable, « respectait la réglementation et sans qu'on puisse les contester par le contrôle de légalité » 92 ( * ) .

Au regard du panorama des relations financières entre la métropole et les communes dressé ci-dessus, il est primordial que soit résolue la question des relations financières entre métropole et communes membres. La difficulté posée est la très grande dépendance des communes concernées à ces ressources.

Dès lors, toute révision unilatérale, par le législateur, des relations financières entre la métropole et les communes courrait le risque de placer certaines communes dans une situation financière difficilement tenable. Il convient donc de conclure un nouveau pacte financier, sous l'égide de l'État, entre la métropole et ses communes membres , s'adossant sur un nouveau projet de territoire. En effet, conscients de l'importance d'assainir définitivement la situation financière de la métropole, il apparait indispensable aux membres de la mission que le prochain pacte financier régissant les relations entre la métropole et ses communes membres constitue la traduction financière d'un nouveau projet de territoire défini par les élus locaux. Il pourrait, dès lors, participer au renforcement de la cohésion métropolitaine et contribuer à sa concrétisation par des projets partagés et financés en commun et au service des citoyens.

Proposition n° 2 : proposer la conclusion d'un nouveau pacte financier, sous l'égide de l'État, entre la métropole et ses communes membres, s'adossant sur un nouveau projet de territoire

3. La suppression des conseils de territoire a montré la capacité des acteurs à se réformer et doit être poursuivie
a) Une suppression qui ne recueillait initialement pas l'unanimité

Lors de l'examen par le Sénat de l'article 56 du projet de loi dit « 3DS », la suppression des conseils de territoires paraissait initialement difficile à atteindre.

Bien que déplorant le recours excessif de la métropole aux délégations de compétences aux conseils de territoire, la commission des lois a, à l'initiative de Stéphane le Rudulier, « supprimé la mention de la possibilité pour le conseil de la métropole de mettre fin unilatéralement aux conventions de délégation conclues avec les conseils de territoire, qui pourraient ainsi prendre fin dans les conditions de droit commun » 93 ( * ) . Il était alors difficilement concevable de limiter les compétences déléguées aux conseils de territoires ; leur suppression pure et simple paraissait dès lors illusoire.

Pourtant, à la faveur de la combinaison d'efforts de consultation portés par la ministre Jacqueline Gourault et d'un esprit de responsabilité des élus locaux , la suppression de cet échelon a été rendue possible par l'adoption d'un amendement du Gouvernement en séance publique à l'Assemblée nationale.

Comme évoqué supra , la permanence des conseils de territoire, anachronique, traduisait l'incapacité des communes concernées à faire émerger un réel projet métropolitain .

Lors de leurs travaux, les membres de la mission ont toutefois constaté qu'aujourd'hui encore, cette suppression ne recueille pas l'unanimité , en particulier pour le maire d'Aix-en-Provence, Sophie Joissains. Toutefois, in fine , les membres de la mission partagent le constat du préfet Christophe Mirmand, qui a estimé lors de son audition que « la suppression des conseils de territoire par la loi 3DS a été, dans l'ensemble, approuvée par les élus métropolitains, ce qui prouve la montée progressive du sentiment métropolitain ». Cette suppression constitue donc un témoignage précieux de la capacité des élus métropolitains de réformer, dans un cadre consensuel, la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

b) Une réforme menée avec célérité et une relative efficacité

Les rapporteurs notent que le délai fixé par le législateur pour la suppression des conseils de territoire, fixé au 1 er juillet 2022, a été tenu. Le conseil de la métropole a ainsi délibéré le 30 juin 2022 sur son organisation déconcentrée. Les délais étant particulièrement courts, les membres de la mission se félicitent que le délai ait été tenu et que la métropole ait délibéré en temps et en heure sur la suppression des conseils de territoire et la définition de son organisation déconcentrée. Ils estiment néanmoins que les efforts en la matière doivent être poursuivis.

Proposition n° 3 : prendre pleinement acte de la suppression des conseils de territoire

En premier lieu, le conseil de la métropole a tiré les conséquences budgétaires de la suppression des conseils de territoire, en supprimant les états spéciaux de territoire 94 ( * ) . Les EST sont ainsi devenus, pour la période du 1 er juillet 2022 au 31 décembre 2022, des « budgets de liquidation transitoire », sur lesquels il était impossible d'inscrire de nouvelles opérations budgétaires.

En second lieu, s'agissant de son organisation déconcentrée, la métropole a procédé à un louable effort de définition de celle-ci à la date du 30 juin 2022, qu'il conviendra sûrement d'affiner. Les rapporteurs souscrivent aux objectifs de renforcement de « la cohérence opérationnelle, de la transversalité et de la lisibilité ». L'organisation de la métropole a ensuite été divisée en cinq branches « métiers », à laquelle s'adjoint une branche « qualité ».

Organisation des services de la métropole adoptée le 30 juin 2022

Source : conseil de la métropole

Si un réel effort de définition du niveau territorial pertinent d'action a été défini pour chaque branche, ce qui représente une indéniable avancée, la structuration des services paraît pour l'heure encore sommaire. Selon les rapporteurs, le contenu de la délibération du 30 juin 2022 demeure général et programmatique : il ne résout pas dans l'immédiat les questions posées par la définition de l'organisation déconcentrée de la métropole à savoir, notamment, l'éventuel octroi au maire d'une autorité fonctionnelle sur les services déconcentrés. Dans ces conditions, les membres de la mission appellent la métropole à préciser au plus vite, ainsi que souhaité par le législateur, une organisation déconcentrée de la métropole claire et lisible pour les élus comme pour les citoyens.

Sous-proposition n° 1 : Définir au plus vite une organisation déconcentrée de la métropole claire et lisible pour les élus comme pour les citoyens

Par ailleurs, eu égard au calendrier ambitieux proposé par le législateur pour procéder à la suppression des conseils de territoires, les membres de la mission soulignent l'importance d'un accompagnement de l'Etat pour mener à bien cette transition. En matière budgétaire, les services de l'Etat semblent avoir répondu présents, comme l'expliquait le préfet Christophe Mirmand lors de son audition : « la date de dissolution de ces conseils au 1 er juillet 2022, soit en milieu d'année budgétaire, oblige à des ajustements comptables et budgétaires jusqu'à la fin de l'exercice budgétaire 2022 », ce qui a nécessité « un accompagnement important des services de l'État », prenant la forme « de rencontres régulières sur ces différents sujets sont organisées entre la Métropole, la préfecture et la DRFIP ».

Un tel positionnement s'est avéré indéniablement vertueux. Il convient désormais de le dupliquer pour que la transition organisationnelle soit aussi fluide que la transition budgétaire. En conséquence, les membres de la mission font le constat que le renforcement du rôle de l'État tant pour accompagner les communes et la métropole à tirer les conclusions de la disparition des conseils de territoires que dans la construction d'une nouvelle organisation déconcentrée de la métropole - à sa demande -, doit être réaffirmé car il est une condition nécessaire à la réussite de cette réforme.

Sous-proposition n° 2 : garantir l'accompagnement de l'État pour la transition de cette organisation et la suppression des conseils de territoire

En conclusion, pour imparfaite que soit sa conduite, les membres de la mission considèrent que cette première réforme de l'organisation de la métropole a donc été menée avec une relative efficacité et a le mérite de permettre à la métropole de conduire les autres chantiers ainsi ouverts. Ils appellent ainsi les parties à faire preuve, à l'avenir du même esprit de compromis et d'ouverture que celui ayant présidé à la suppression des conseils de territoires.

B. PARALLÈLEMENT, RÉÉQUILIBRER LES TERRITOIRES POUR ÉCARTER DÉFINITIVEMENT TOUT RISQUE DE SCISSION

Si le projet métropolitain aixo-marseillais avait comme objectif assigné par le législateur de « favoriser l'accroissement et le rééquilibrage de la solidarité financière de territoires aux richesses disparates » 95 ( * ) , les travaux de la mission ont souligné que cette construction institutionnelle n'a permis, à elle seule, ni d'épuiser les risques d'éclatement ni de rééquilibrer les territoires en son sein.

D'une part, les rapporteurs estiment que, telle que construite par le législateur, la structure spécifique de la métropole d'Aix-Marseille-Provence n'a pas permis à celle-ci de contribuer au rééquilibrage du territoire. D'autre part, indépendamment même de la spécificité de la métropole d'Aix-Marseille-Provence, l'objectif d'un rééquilibrage du territoire par les structures institutionnelles était rendu largement illusoire en raison des difficultés rencontrées par la ville de Marseille.

En conséquence, seules des mesures de rééquilibrage ciblées sur la ville de Marseille permettront de garantir, à court comme à long terme, la viabilité de la métropole .

1. Le projet métropolitain n'épuise pas les risques d'éclatement : les difficultés de Marseille affectent le fonctionnement de la métropole

Malgré l'objectif de rééquilibrage recherché par sa création, force est de constater que la métropole n'est pas parvenue à organiser une solidarité financière bénéficiant à la ville-centre .

Les difficultés que rencontre la ville de Marseille tiennent naturellement à sa situation socio-économique défavorable, déjà décrite supra . Elles tiennent également à l'organisation territoriale de la métropole : en sa qualité de ville-centre, la ville de Marseille assume des charges de centralité qui ne sont pas nécessairement compensées . Lors de son audition par les membres de la mission, le préfet Christophe Mirmand a ainsi estimé qu'aujourd'hui, la ville pâtit « d'une mauvaise image, qui l'amène à supporter la plupart des charges de centralité ». L'on peut penser par exemple à des équipements sportifs ou culturels dont la ville de Marseille assure la charge financière mais qui sont fréquentés par un public dépassant les seuls habitants de la commune.

Un exemple de charge de centralité : l'Opéra municipal

Qualifié « d'équipement emblématique de la ville », l'Opéra municipal est financé à 89 % sur le budget de la ville de Marseille 96 ( * ) .

Néanmoins, l'usage de cet équipement municipal n'est pas limité au seul public marseillais. La ville de Marseille estime ainsi qu'il est « fréquenté par un public bien plus large à l'échelle métropolitaine voire régionale puisque son audience dépasse largement le cadre de la cité avec un public non marseillais qui atteint régulièrement une proportion de 35 à 40 % des spectateurs . »

Si l'Opéra municipal constitue donc un facteur de rayonnement de la ville de Marseille, il représente, du point de vue de la gestion locale, une charge de centralité.

Or, la structuration progressive de la métropole d'Aix-Marseille-Provence n'a pas permis d'organiser à son échelle une péréquation efficace au bénéfice du territoire marseillais . En effet, le montant des attributions de compensation perçues par la commune de Marseille, en application des mécanismes d'attribution de compensation déjà décrits, a diminué depuis 2018. Ainsi, le montant des attributions de compensation versées à la commune par habitant a diminué de 11,28 % de 2018 à 2021, pour atteindre 136 euros par habitant environ.

Tableau recensant les évolutions d'attributions de compensation par habitant pour la ville de Marseille entre 2018 et 2021

Source : commission des lois, à partir de données de la DRFiP

Dans ces conditions, les rapporteurs estiment que les difficultés socio-économiques rencontrées et le statut de ville-centre supporté par Marseille, qui se traduisent naturellement au niveau territorial par des dépenses plus élevées et des recettes plus faibles, n'ont manifestement pas été compensés par la création de la métropole d'Aix-Marseille- Provence .

Tant qu'une telle compensation ne sera pas opérée, la métropole ne jouera pas le rôle de solidarité qui lui avait en particulier été attribué par le législateur lors de sa création.

Certes, le rôle assigné à la métropole de contribuer au rééquilibrage de son territoire était en pratique difficile à accomplir dans le contexte marseillais . En effet, le statut de la ville de Marseille, ville-centre qui a longtemps pâti d'une image faiblement attractive, génère des forces centrifuges à l'échelle de la métropole, les communes environnantes étant globalement rétives à une renforcer leur cohésion territoriale avec la commune de Marseille.

Dans ces conditions, il apparaît particulièrement difficile à la métropole de réaliser tout projet intercommunal d'ampleur à une échelle métropolitaine ; il paraît à plus forte raison illusoire qu'elle contribue en l'état au rééquilibrage de son territoire. À cet égard, la réussite du plan « Marseille en Grand » constitue une condition majeure du renforcement de la cohésion métropolitaine.

2. Dès lors, seules des mesures de rééquilibrage ciblées sur la ville de Marseille permettront de garantir la viabilité de la métropole

Si les rapporteurs ne peuvent que se féliciter que Marseille recueille une attention renforcée de l'État, ils déplorent néanmoins que celle-ci ne s'inscrive pas dans un cadre mieux défini et associant davantage les élus locaux .

En effet, si l'objet du présent rapport n'est pas de formuler des conclusions ou des recommandations sur les politiques sectorielles (santé, éducation, mobilités) menées dans ce cadre, les rapporteurs, nourris des échanges conduits avec les acteurs locaux, peuvent néanmoins formuler des recommandations de méthode pour donner au plan « Marseille en Grand » toute l'efficience dont la ville de Marseille a besoin.

En premier lieu, la désignation bienvenue d'un interlocuteur unique , du côté de l'État, pour les acteurs locaux doit être saluée. En effet, le préfet Laurent Carrié, délégué pour l'égalité des chances auprès du préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, et préfet des Bouches-du-Rhône, a été chargé par un décret du président de la République du 7 octobre 2021 du plan « Marseille en Grand » 97 ( * ) . La garantie pour les élus locaux de bénéficier d'un point d'entrée unique pour s'adresser à l'État sur ce dossier doit être préservée ; les membres de la mission y seront vigilants.

En deuxième lieu, il apparaît surprenant et préjudiciable qu' aucun processus d'évaluation n'ait été annoncé par l'État à la création du plan . Compte tenu de l'ampleur des enjeux financiers et des nombreux outils contractuels associant l'État et les acteurs locaux, les membres de la mission considèrent qu' une évaluation qualitative comme quantitative, à échéances régulières, établie à l'aide des services de l'État et en collaboration avec l'ensemble des parties locales, est indispensable pour garantir l'efficience et la transparence du déroulement du plan « Marseille en Grand ».

En outre, celle-ci permettra de s'assurer de la tenue des engagements, financiers et humains, pris par l'État dans ce cadre.

Proposition n° 4 : évaluer régulièrement les mesures du plan « Marseille en Grand » pour s'assurer de leur efficacité

Au surplus, si cette démarche évaluative est nécessaire, les membres de la mission considèrent que le déploiement concret des mesures prévues dans le plan « Marseille en Grand » doit pouvoir être suivie par un comité dédié associant, sous l'égide du préfet chargé du plan, les élus locaux et l'Etat.

A cet égard, on ne peut que s'étonner de l'absence d'une procédure de suivi de l'éxécution du plan pluraliste et associant l'ensemble des acteurs concernés, alors même que les premières mesures et financements prévus dans ce cadre ont été déployées. En effet, si les rapporteurs ne sauraient en aucun cas remettre en cause la désignation d'un interlocuteur unique au sein de l'Etat, modèle qui a par le passé fait ses preuves, le déploiement du plan « Marseille en Grand » gagnerait à renforcer le suivi de son exécution et à associer davantage les élus locaux et les acteurs des politiques sectorielles du plan afin d'en garantir l'efficacité . Les membres de la mission estiment que l'information des élus locaux et leur association au déploiement comme au suivi des mesures du plan étaient susceptibles de maintenir le niveau de mobilisation de l'ensemble des acteurs en faveur de la réussite du plan.

Les membres de la mission préconisent donc la création d'un comité de suivi , associant les élus locaux et l'ensemble des parties prenantes concernées. Il apparait, en particulier, souhaitable que des représentants locaux d'arrondissements soient conviés aux réunions du comité de suivi tant ils peuvent constituer des relais des difficultés rencontrées au plus près du terrain ou être des forces de propositions pragmatiques et concrètes quant à l'application territorialisée du plan.

Sans préconiser pour autant la convocation systématique d'une instance pléthorique, il est donc proposé d'instituer, rapidement, un comité de suivi réunissant élus locaux et l'État dont le format pourra, si nécessaire, être souple et s'adapter en fonction des thématiques du plan « Marseille en Grand ».

Proposition n° 5 : instituer rapidement un comité de suivi, associant les élus locaux et l'État, du plan « Marseille en Grand »

En outre, les rapporteurs considèrent que les acteurs doivent inscrire leur action dans une nécessaire pluriannualité.

L'État doit à cet égard envisager d'inscrire le plan « Marseille en Grand », ou du moins une partie de ses mesures, dans la durée et examiner les possibilités de son renforcement à mesure que les premiers objectifs de politique publique qui lui avaient été assignés seront atteints .

Proposition n°6 : inscrire le plan dans la durée et envisager son renforcement à mesure que les objectifs de politique publique
seront atteints

Enfin, dans son avis d'octobre 2022 relatif aux relations financières entre la métropole et ses commnes membres, la chambre régionale des comptes a relevé le montant particulièrement faible d'attributions de compensation touché par la ville de Marseille et souligné les difficultés juridiques posées par l'intégration de la dotation de solidarité communautaire (DSC) dans ces dernières 98 ( * ) . Dans ces conditions, la métropole a été incapable d'exercer un rôle de péréquation sur son territoire.

L'application de tels mécanismes de péréquation est pourtant une obligation pour les métropoles 99 ( * ) . En l'espèce, sa mise en oeuvre à l'échelle de la métropole, que celle-ci pourra le cas échéant préciser, est de nature à contribuer au rééquilibrage au profit de la ville de Marseille que les rapporteurs appellent de leurs voeux. Il importe donc de garantir la pleine application des mécanismes de péréquation prévus par la loi .

Proposition n° 7 : garantir l'application de mécanismes de péréquation à l'échelle de la métropole

II. ENGAGER UNE RÉFLEXION POUR UNE ORGANISATION INSTITUTIONNELLE DE LA MÉTROPOLE CHOISIE PAR LES ACTEURS LOCAUX

Si les acteurs locaux s'accordent sur le besoin de poursuivre l'élan réformateur, aucun consensus ne semble se dégager pour l'heure sur le contenu et le calendrier d'une réforme institutionnelle de la métropole .

Alors que les options sont connues et qu'elles doivent être tranchées par les acteurs locaux, il importe d'accorder ces derniers sur un calendrier et une méthode de conduite d'une telle réforme.

A. REGARDER L'AVENIR EN FACE : LES SCÉNARIOS DISPONIBLES

1. Des acteurs divisés sur la réforme dont a besoin la métropole

Un an à peine après le relatif consensus ayant entouré la négociation et la consultation, sous l'impulsion de Jacqueline Gourault, l'esprit de concorde entre élus locaux ayant présidé à la récente réforme semble aujourd'hui faire défaut à la réforme institutionnelle dont la métropole d'Aix-Marseille-Provence aurait besoin.

Souhaitant inscrire leur réflexion sur la mise en oeuvre du dispositif de l'article 181 de la loi dite « 3DS » dans la réflexion menée de longue date sur l'avenir institutionnel de la métropole d'Aix-Marseille-Provence, les rapporteurs ont interrogé l'ensemble des acteurs rencontrés sur la pertinence d'une évolution institutionnelle. En la matière, ceux-ci demeurent divisés, sur trois paramètres majeurs pour le cadre institutionnel de la métropole : l'existence même de la métropole, son périmètre, et son statut .

Certains acteurs se sont en effet prononcés en faveur de la suppression de la métropole .

Comme évoqué supra , Sophie Joissains, maire d'Aix-en-Provence, s'est dite favorable à la substitution par un pôle métropolitain réunissant les six EPCI à fiscalité propre préexistants. Dans ces conditions, la métropole serait supprimée, au profit d'un retour à la carte intercommunale antérieure à sa création. De façon analogue, lors de son audition par les membres de la mission, Benoît Payan, maire de Marseille, avait évoqué le scénario d'un retrait de la ville de Marseille de la métropole, afin de reconstituer un EPCI à fiscalité propre réunissant, autour de la ville-centre, les 17 autres communes formant précédemment le conseil de territoire. Cet avis n'est néanmoins pas partagé par l'ensemble des interlocuteurs rencontrés par la mission. Georges Cristiani, président de l'association départementale des maires des Bouches-du-Rhône s'est ainsi opposé à ce qu'il a qualifié de « retour en arrière » . Il a ainsi jugé qu'un retour au périmètre intercommunal précédent serait « impossible ».

Les rapporteurs relèvent qu'une remise en cause aussi frontale de l'existence même d'une métropole est pratiquement inédite et paraît obérer, en l'état, toute évolution institutionnelle significative de la métropole.

S'agissant du périmètre, , les membres de la mission ont pu constater le maintien de la division historique entre, d'une part, des élus - notamment issus de l'agglomération aixoise - rétifs à la création d'une métropole sur un périmètre englobant notamment Aix-en-Provence et Marseille, et, d'autre part, des élus estimant ce périmètre pertinent . Lors de son audition par les membres de la mission, le maire d'Aix-en-Provence, Sophie Joissains, s'est prononcée, à défaut de la substitution - évoquée supra - à la métropole d'un pôle métropolitain, en faveur de la création « de deux, voire trois ou quatre » EPCI à fiscalité propre, « respectant les seuils d'efficacité des intercommunalités tant en terme de périmètre qu'en terme d'intérêt commun » 100 ( * ) . Elle a également évoqué la création d'une métropole « de la terre » centrée autour d'Aix-en-Provence et d'une métropole « de la mer » centrée autour de Marseille, sans que les caractéristiques découlant d'une telle dénomination n'apparaissent clairement.

Enfin, s'agissant du statut de la métropole , les avis divergent sur le terrain entre ceux qui sont favorables à terme à la fusion de la métropole et du conseil départemental - sur le périmètre actuel du département ou sur un autre périmètre à définir . Lors de son audition, Renaud Muselier, président du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur s'est ainsi déclaré favorable à une telle fusion, qu'il considère comme une simplification nécessaire. À l'inverse, auditionnés sur ces évolutions, les acteurs économiques (TOP 20 et UPE) et les chambres consulaires considèrent qu'un tel périmètre administratif n'aurait pas nécessairement de cohérence sur le plan économique, Arles étant davantage tournée vers Avignon que vers Marseille ou Aix-en-Provence à cet égard. Enfin, certains acteurs, à l'image de Georges Cristiani, maire deMimet et président de l'association des maires des Bouches-du-Rhône, ont indiqué ne pas estimer possible, au moins dans l'immédiat, la conduite d'une telle réforme . Le préfet Christophe Mirmand a jugé, de façon analogue, que la fusion entre le conseil départemental et la métropole ne saurait constituer une « ligne de fuite ».

Dans ces conditions, les rapporteurs souhaitent rappeler que, à l'instar des compromis consensuels ayant émergé lors de l'examen de la loi dite « 3DS », seule une solution choisie par les acteurs locaux permettrait de construire un avenir durable et viable à la construction métropolitaine .

Il apparaît en particulier qu'il serait incompréhensible d'intégrer le pays d'Arles dans la métropole alors que cela ne correspond aucunement aujourd'hui à la position des élus de ce territoire.

En l'état, les travaux menés par les rapporteurs confirment cependant la persistance de profondes divisions sur les principaux paramètres d'une réforme structurelle de l'organisation de la métropole. Pour les dépasser, un premier jalon consisterait à circonscrire les débats aux deux principaux paramètres de toute réforme institutionnelle d'envergure : le périmètre et le statut de la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

2. Circonscrire les débats aux deux principaux paramètres de la réforme institutionnelle métropolitaine : périmètre et statut
a) Le périmètre : une question qui ne se pose pas dans l'immédiat

La question du périmètre de la métropole demeure un sujet de débats . En son état actuel, il semble poser difficulté étant paradoxalement trop petit par les uns et trop large par les autres.

Trop petit, en ce que ce périmètre n'inclut pas le pays d'Arles . Un tel périmètre, qui reviendrait à reconstituer le périmètre du département des Bouches-du-Rhône, présenterait néanmoins plusieurs avantages.

En premier lieu, il semblerait permettre une meilleure efficacité de l'action publique sur certains domaines de compétences, notamment de réseaux pour lesquels l'échelle de la circonscription départementale des Bouches-du-Rhône constitue un seuil critique d'efficacité. À cet égard, l'exercice par la métropole de ses prérogatives en tant qu'autorité organisatrice des mobilités serait sûrement facilité et rendue plus efficient s'il s'opérait au niveau départemental.

Les mobilités, un exemple de compétence
à exercer au niveau du périmètre départemental

Comme le rappelle la chambre régionale des comptes de PACA dans un rapport d'octobre 2022 101 ( * ) , lorsque les compétences de mobilités ont été transférées aux autorités organisatrices des mobilités que sont les régions et les EPCI à fiscalité propre, dont les métropoles, la région et la métropole auraient pu décider de dissoudre la régie des transports métropolitains et la régie départementale des transports (RDT 13), en exerçant leurs compétences en régie ou par le biais d'un autre prestataire. Le « choix a cependant été fait de transférer la RDT 13, dans son intégralité, à la métropole . » En l'état, et outre les complexités organisationnelles et irrégularités conventionnelles qui en ont résulté, coexistent à l'échelle du département deux structures en charge des transports : la régie des transports métropolitains (RTM) et la RDT 13. Souhaitant maintenir « l'unité organique et fonctionnelle de l'EPIC RDT 13 », cette dernière est devenue « opérateur interne de la métropole, tout en conservant l'intégralité de ses activités, y compris celles réalisées au-delà du périmètre métropolitain . »

La métropole est donc « dotée de deux régies de transport, la RTD 13 et la RTM, la première intervenant principalement dans le domaine interurbain, la seconde dans le domaine urbain, sans que leur contrat d'obligation de service public respectif ne trace explicitement une ligne de partage. » Par ailleurs, la métropole se trouve en situation de gestionnaire d'une régie qui dépasse largement son périmètre, assurant « l'exploitation de plus de vingt lignes scolaires pour le compte de la métropole, de la région, de la communauté d'agglomération Terre de Provence et du département des Bouches-du-Rhône » ou, en matière ferroviaire, la ligne d'Arles à Fontvieille. Dans ces conditions, il apparaît clair que l'exercice par la métropole de ces compétences en matière de transports serait clarifié si son périmètre était mis en cohérence avec celui du département , sur lequel la RDT 13 déploie ses services.

Source : rapport de la chambre régionale des comptes, pp. 13-14.

En deuxième lieu, le périmètre du département pourrait présenter le mérite de renvoyer à une réalité politique ancienne et identifiée des citoyens . Un tel avantage est d'autant moins négligeable pour la métropole que la superposition de nombreux échelons territoriaux sur son territoire rend leur appréhension plus complexe qu'ailleurs. À l'inverse, l'identification, aux côtés des communes, d'un échelon départemental-métropolitain clair serait ainsi nettement plus lisible et renverrait à une réalité politique connue des citoyens bucco-rhodaniens.

En dernier lieu, le périmètre de la métropole pourrait sembler manquer de cohérence au regard du territoire qu'elle recouvre déjà. Comme le rappelait le préfet Pierre Dartout dans son rapport de 2019, la partie du département des Bouches-du-Rhône intégrée à la métropole « représente 62,4 % de la superficie et surtout 91,5 % de la population du département des Bouches-du-Rhône tout en comprenant une commune du Var (Saint-Zacharie) et de Vaucluse (Pertuis) . » Dès lors, l'adjonction de la portion du territoire du département des Bouches-du-Rhône qui ne lui est pas étendue, le pays d'Arles, pourrait être perçue, au bénéfice d'une lecture rapide de la situation, comme une mesure de mise en cohérence du territoire .

Pourtant, dans le même temps, le périmètre de la métropole peut également être considéré comme trop large . Très importante, la superficie de la métropole est de 3 148 km 2 , soit le quadruple du périmètre de la métropole du Grand Paris et le sextuple de la métropole de Lyon 102 ( * ) . Ce périmètre souffre en conséquence du polycentrisme de la métropole et l'inclusion de territoires ne partageant pas, par principe, un projet métropolitain commun . À ce titre, certaines voix s'élèvent donc pour réduire le périmètre de la métropole, par exemple, à l'agglomération marseillaise, scindant ainsi en particulier les destins d'Aix-en-Provence et de Marseille.

Susceptible de deux configurations distinctes, la définition du périmètre de la métropole n'emporte donc pas d'adhésion, comme cela peut être le cas pour d'autres métropoles , comme Lyon notamment. Il pourrait donc être amené à évoluer à terme.

b) Le statut : un corollaire de la question du périmètre

La question du périmètre de la métropole d'Aix-Marseille-Provence emporte des conséquences quant à son statut. Intriqués, ces deux paramètres doivent, dès lors, être examinés ensemble dans le cadre de scenarii intégrant les conséquences induites par chacun.

U ne fusion avec le conseil départemental a ainsi été étudiée . Une telle option a souvent été présentée comme l'horizon de la construction métropolitaine aixo-marseillaise, en particulier dans le cas où le périmètre de la métropole aurait vocation à être étendu à celui de la circonscription départementale bucco-rhodanienne. Ce scénario a constitué le point de départ et le principal sujet du rapport du préfet Pierre Dartout précité.

Ce dernier a d'ailleurs envisagé la possibilité d'une telle fusion essentiellement sur le périmètre du département ; il n'a pas jugé utile d'analyser en profondeur l'hypothèse d'une fusion sur le périmètre de la seule métropole en ce que cela reviendrait soit à rattacher le pays d'Arles à un autre département, soit à le constituer en département de plein exercice, le cas échéant en le constituant comme collectivité territoriale à statut particulier fusionnant la collectivité départementale et les trois intercommunalités situées sur son territoire. Sous réserve de travaux plus approfondis, aucune de ces options ne semble ni souhaitée par les élus locaux, ni souhaitable, notamment en matière financière : faiblement peuplée, une telle structure n'apparaîtrait pas viable. Dès lors, le scénario central de fusion a été celui d'une fusion de la métropole et du conseil départemental à l'échelle de ce dernier.

Les bénéfices escomptés d'une telle fusion seraient de deux ordres :

- la mutualisation des moyens financiers du conseil départemental - dont les finances sont généralement considérées comme historiquement saines 103 ( * ) - et de la métropole ;

- les synergies entre compétences sociales et économiques - à l'exemple de ce qui a été opéré à Lyon.

Néanmoins, à l'heure où les métropoles sont contestées dans leur capacité à entraîner leur hinterland et où le « modèle lyonnais » montre certaines de ses faiblesses, la création d'une nouvelle collectivité métropolitaine à statut particulier sur le périmètre du département doit être, aux yeux des membres de la mission, envisagée sans dogmatisme . Un tel projet devrait alors faire la preuve des bénéfices qu'il aurait à apporter aux élus et citoyens des collectivités concernées.

3. Les options sur la table doivent être tranchées par les acteurs locaux

Au terme de leurs travaux, les membres de la mission d'information ont pu identifier, sans prétendre à l'exhaustivité, cinq options de réforme qui leur ont été présentées semblent susceptibles de nourrir la réflexion des acteurs locaux quant à l'évolution institutionnelle de la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

Comme résumées ci-après, ces différentes options mêlent des modifications, à des degrés divers, des deux principaux paramètres évoqués supra .

Options

Paramètres affectés

Périmètre

Statut

1

Sans modification

Sans modification

2

Scission en plusieurs intercommunalités

Transformation en un pôle métropolitain

3

Sans modification

Fusion métropole-département

4

Élargissement au Pays d'Arles

Sans modification

5

Élargissement au Pays d'Arles

Fusion métropole- département

La première option consisterait, au moins à court terme, en la conservation du tant du périmètre que du statut d'EPCI actuels de la métropole .

Ainsi, le préfet Christophe Mirmand a jugé préférable, lors de son audition, un certain statu quo sur ces deux paramètres structurants à court terme, estimant, compte tendu de l'ampleur des réformes, et choix afférents, à opérer par les acteurs locaux dans les prochains mois, qu'une réforme institutionnelle paraîtrait précipitée. Lors de son audition, le président de l'association des maires des Bouches-du-Rhône, Georges Cristiani, a également plaidé pour ce statu quo à l'heure actuelle.

S'il n'appartient pas aux membres de la mission de se prononcer sur le bienfondé de cette option, ils souhaitent toutefois rappeler que ce statu quo permettrait à la métropole de mieux s'approprier la réforme votée par le législateur dans le cadre de l'article 181 de la loi dite « 3DS ». Au surplus, si le périmètre et le statut actuels de la métropole présentent des défauts, ils ont le double mérite d'organiser, à tout le moins sur un plan juridique, une forme de solidarité entre les différentes parties de ce territoire et de constituer l'échelle pertinente de certaines compétences de réseau .

Une deuxième option, présentée aux membres de la mission par le maire d'Aix-en-Provence, Sophie Joissains, viserait à transformer la métropole d'Aix-Marseille-Provence, sur son périmètre, en un pôle métropolitain chargé d'assurer la collaboration entre au moins deux intercommunalités distinctes.

Avec les mêmes précautions que dans la formulation de leurs analyses sur la première option, les membres de la mission attirent l'attention des élus locaux sur le fait qu'à court terme, une telle solution parait inenvisageable en ce qu'elle ferait directement obstacle à la réalisation des investissements que la métropole doit consentir - certains étant déjà initiés - dans les prochaines années. Par ailleurs, ils alertent sur le fait qu'à plus long terme, la pertinence d'une telle mesure pourrait échouer à emporter l'accord des acteurs locaux au-delà de la ville d'Aix-en-Provence puisqu'elle entérine, en particulier, la fin d'une forme de solidarité à l'échelle du territoire.

La troisième option présentée devant les rapporteurs consisterait à fusionner département et métropole sur le périmètre actuel de la métropole . Cette option aurait le mérite, incidemment et au moins aux yeux des citoyens, de clarifier la situation actuelle et permettrait surtout de créer une structure mieux financée et bénéficiant des mêmes atouts dans la conduite de ses politiques que la métropole de Lyon. Néanmoins, elle en subirait logiquement les mêmes difficultés, en particulier en matière d'association des maires à sa gouvernance et de coexistence, à l'échelon local, de deux légitimités distinctes.

En tout état de cause, une telle option semble aujourd'hui excessivement ambitieuse pour être conduite dans l'immédiat : les contours précis d'une telle réforme gagneraient à être précisés, mais les membres de la mission soulignent qu'une modification aussi substantielle du statut de deux entités territoriales doit être envisagée avec prudence et que la mesure de ses effets, y compris de bord, doit être quantitativement et qualitativement évaluée au préalable .

À cet égard, cette option ne peut être envisagée sans tenir compte des collectivités territoriales environnantes, et singulièrement du pays d'Arles , qui se retrouverait ainsi privé d'un département avec lequel il semble aujourd'hui entretenir, comme l'ont confirmé les trois présidents d'intercommunalités rencontrés par la mission, des relations partenariales et satisfaisantes . Au surplus, une telle option ne pourrait être menée à bien qu'à la condition qu'à l'image du Nouveau Rhône, puisse être constitué un département de plein exercice distinct de la métropole-département tant viable financièrement qu'efficace dans l'exercice de compétences de solidarités qui trouvent difficilement à s'appliquer sur des territoires trop restreints.

Une quatrième hypothèse consisterait en un élargissement du périmètre de la métropole au Pays d'Arles, sans pour autant procéder à une fusion entre la métropole et le département des Bouches-du-Rhône . Cette hypothèse n'est toutefois pas apparue, au cours des travaux menés par la mission, comme une attente des acteurs du territoire. Par ailleurs, sans fusion avec le conseil départemental, il n'apparait pas certain que la métropole dispose de moyens financiers suffisants pour absorber le choc d'un tel élargissement , qui plus est vers un territoire dont les ressources par habitants sont, aujourd'hui, inférieures à la moyenne métropolitaine 104 ( * ) .

Enfin, une dernière option, particulièrement ambitieuse, a été mentionnée à plusieurs reprises lors des travaux de la mission : procéder à une fusion du département et de la métropole sur le périmètre du département. Les membres de la mission ont ainsi pu constater qu'une telle hypothèse, régulièrement avancée, n'était pas d'actualité.

De fait, il ne peut être nié qu'une telle collectivité territoriale pourrait trouver un fonctionnement plus efficace que la métropole actuelle , sans toutefois méconnaitre les risques qu'une telle solution contient. En effet, en matière d'association des communes aux politiques métropolitaines, il semble que les difficultés actuellement rencontrées par la métropole de Lyon trouveraient à s'appliquer, de la même manière que pour la troisième option . Au demeurant, les membres de la mission partagent les interrogations du rapport du préfet Pierre Dartout sur « la capacité qu'aurait cette collectivité à statut particulier à se substituer au département des Bouches-du-Rhône pour financer une partie des dépenses consacrées à de grands ouvrages routiers » 105 ( * ) .

Au surplus, cette option concentre, pour l'heure, de nombreux risques politiques tant les élus du Pays d'Arles, auditionnés par la mission, s'y opposent. Ils ont, à cette occasion, unanimement réaffirmé avec force et conviction que leurs territoires ne souhaitaient pas qu'une évolution de la métropole en ce sens aient, pour l'instant, lieu. Les rapporteurs estiment qu'au regard de cette opposition catégorique à un tel projet d'évolution, il serait difficile de conduire une telle réforme tant qu'elle n'emportera pas un consensus auprès des élus du pays d'Arles.

Cette piste n'apparait, toutefois, pas définitivement écartée puisque les élus rencontrés ont évoqué la possibilité que leurs intercommunalités rejoignent la métropole, à condition que l'organisation, la gouvernance et la situation financière de la métropole soient profondément améliorés .

Les paramètres d'une réforme sont donc connus et l'ensemble des options évoquées pourrait en soi constituer une amélioration du fonctionnement de la métropole, dès lors que les élus auront un tel projet en partage.

B. ACCORDER LES ACTEURS SUR LES MODALITÉS DE CONDUITE D'UNE TELLE RÉFORME

Dès lors, les membres de la mission jugent prioritaire d'inscrire la nécessaire réflexion sur l'organisation institutionnelle dans le long terme , afin qu'elle soit pleinement choisie par les acteurs locaux . Il convient de se prémunir de la méthode de réforme employée jusqu'à présent.

Ils formulent, pour ce faire, des recommandations de méthode pour que la réflexion souhaitée par les acteurs locaux s'inscrive dans un climat serein et fructueux et permette, si besoin était, au législateur de construire une réforme adossée à un projet de territoire consensuel.

1. Une nécessité : réunir les moyens d'un consensus local autour d'un projet pour le territoire

C hacune des modifications législatives apportées à l'édifice métropolitain n'a fait que fragiliser ce dernier , pour trois motifs distincts ; le législateur doit en tirer les leçons.

En premier lieu, la loi dite « 3DS » a été adoptée sans qu'il soit procédé à une évaluation rigoureuse de ses impacts , l'article 56 du projet de loi initial - sur lequel a été réalisée l'étude d'impact -entretenant un lien ténu avec les dispositions finalement adoptées par le législateur, d'ampleur nettement supérieure. Une telle méthode est particulièrement regrettable et ne saurait être à nouveau employée.

En deuxième lieu, la loi dite « NOTRe » a procédé à des ajustements transitoires , dont l'horizon temporel n'allait pas plus loin que le renouvellement des conseils municipaux de 2020, sans ancrer la métropole dans un projet définitif. Les rapporteurs estiment donc qu'il importe de doter la métropole d'un horizon d'évolution clair, adossé à un projet de territoire mieux défini.

Enfin, la principale erreur de méthode a été commise par le législateur lors de l'examen de la loi dite « MAPTAM » , adoptée largement contre l'avis d'une part importante des élus locaux , à commencer par les maires, dont une écrasante majorité était opposée au projet. Son entrée en vigueur a été reportée d'un an et, surtout, des stratégies d'optimisation du montant des attributions de compensation ont été employées, nuisant à la capacité de la métropole à fonctionner effectivement.

À l'inverse, les dispositions de la loi « 3DS », qui ont recueilli l'assentiment d'un nombre significatif d'élus locaux, connaissent pour l'heure une mise en oeuvre nettement plus fluide . La première échéance posée par le législateur, relative à la définition au 1 er juillet 2022 par la métropole de son organisation déconcentrée, a été respectée 106 ( * ) . Si la bonne poursuite du processus devra faire l'objet d'une attention vigilante, les rapporteurs constatent que, pour l'heure, les acteurs locaux s'en sont emparés.

Ce contraste doit être porteur d'enseignements pour le législateur . S'il ne peut conditionner toute modification législative à un accord unanime des acteurs concernés, le législateur peut difficilement se satisfaire de voir les dispositions qu'il adopte vidées de leur contenu ou détournées de leur intention en raison des réticences locales qu'elles génèrent . De la même manière, légiférer par à-coups, sans laisser le temps aux dispositions applicables de produire leurs effets, ne semble pas de nature à faciliter l'appropriation par les acteurs des réformes ni à permettre un pilotage efficace de leur mise en oeuvre. Il lui appartient donc de procéder, en amont de toute modification législative, à un nécessaire effort de concertation , permettant de se prémunir des effets d'une loi que d'aucuns jugeraient imposée depuis le pouvoir central.

Proposition n° 8 : adosser toute évolution législative future à l'émergence d'un consensus local

Sur chacun de ces points, les rapporteurs appellent donc à ne pas répéter les erreurs du passé : la réforme institutionnelle de la métropole devra donc associer consensus, anticipation et évaluation . Afin de faire cheminer l'ensemble des acteurs vers ce processus, une méthode claire doit donc être dégagée.

2. Le calendrier : un horizon à moyen terme
a) La réforme de l'organisation institutionnelle n'est pas prioritaire

Les rapporteurs partagent le constat formulé par l'ensemble des acteurs locaux, élus ou représentants des services de l'État, auditionnés qui estiment, au-delà de leurs divergences d'appréciation quant à la réforme institutionnelle devant éventuellement être déployée, qu'une telle réforme n'est pas à conduire dans l'immédiat .

Ainsi, le préfet Christophe Mirmand, dans une contribution écrite transmise aux membres de la mission, rappelle qu'« avant de reprendre [cette hypothèse], il convient sans doute de laisser la Métropole mettre en oeuvre pleinement toutes les dispositions de la loi 3DS ».

De façon analogue, Martine Vassal, présidente de la métropole et du conseil départemental des Bouches-du-Rhône, a indiqué souhaiter « une pause » dans les évolutions en cours de la métropole, accordant à celle-ci le temps de mettre en oeuvre correctement les dispositions de la loi dite « 3DS ».

De fait, si la révision de son fonctionnement prévue par l'article 181 de la loi dite « 3DS » est menée efficacement et conformément à l'intention du législateur, la métropole devrait être en mesure d'assurer l'exercice normal de ses compétences . En l'occurrence, comme le rappelait le rapport de Pierre Dartout, à l'occasion de projets locaux relatifs à la modification du périmètre comme du statut de la métropole, « certains acteurs pointent les risques d'un processus mené dans la précipitation alors que la situation de la Métropole n'est pas stabilisée ». Ce constat apparait aux membres de la mission comme applicable pour la conduite de toute réforme institutionnelle aujourd'hui , quelles qu'en soient l'ampleur et la philosophie.

Dès lors, à l'issue de leurs travaux, les membres de la mission considèrent qu'il importe avant tout de consolider la métropole dans son fonctionnement tel qu'il devrait résulter de l'application des dispositions introduites par la loi dite « 3DS ». Dans un second temps, une réforme institutionnelle pourrait être menée, en suivant un calendrier et une méthode clairement définis.

b) Faire émerger un calendrier de réforme consensuel parmi les acteurs du dossier, préalable nécessaire à toute évolution
(1) Un calendrier consensuel

En premier lieu, le constat précédemment dressé par le préfet Pierre Dartout selon lequel « les perspectives de réussite d'une telle fusion sont largement tributaires de la question du calendrier », ne peut qu'être partagé et étendu à toute hypothèse de réforme institutionnelle de la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

Convaincus qu'aucune évolution durable de la métropole d'Aix-Marseille-Provence ne pourra être construite en l'absence de consensus et de clarté sur un calendrier de réforme, les membres de la mission alertent les acteurs locaux sur la nécessité de faire émerger un tel calendrier de réforme avant d'enclencher les réflexions de fond et les concertations en la matière. Pour ce faire, ils formulent deux pistes méthodologiques afin d'en favoriser l'émergence.

Proposition n° 9 : faire émerger un calendrier de réforme consensuel parmi les acteurs du dossier, préalable nécessaire à toute évolution, si possible avant 2026

(2) Un calendrier progressif

Conscient de l'importance du calendrier dans la conduite d'une telle réforme, le préfet Pierre Dartout avait dégagé dans son rapport deux scénarios distincts :

- celui d'un « processus simultané », dans lequel une fusion-extension serait conduite consécutivement aux élections métropolitaines ;

- celui d'un « processus progressif par étapes », déclinant une phase d'approfondissement du fonctionnement de la métropole, avant la conduite du chantier institutionnel.

Il avait alors été fait le choix de privilégier le processus dit « simultané », sans que ce calendrier prévisionnel n'ait pu être tenu, en raison de la crise de la covid-19. S'il est donc impossible d'en évaluer a posteriori la pertinence, les rapporteurs estiment que tout processus dit « simultané » serait aujourd'hui voué à un probable échec . L'approfondissement préalable de l'organisation métropolitaine constitue, comme ils l'ont déjà souligné, une condition sine qua non de la réussite de la conduite d'une telle modification.

C'est pourquoi, les membres de la mission proposent que deux échéances rythmant le processus de décision d'une réforme institutionnelle pour la métropole d'Aix-Marseille-Provence soient fixées :

- la première sur la définition d'un calendrier de réforme, si possible avant 2026. L'année 2023 serait dès lors consacrée à la mise en oeuvre de la réforme prévue par l'article 181 de la loi dite « 3DS » et les années 2024 et 2025 pourraient être mises à profit pour définir un calendrier consensuel ;

- la seconde sur l'achèvement d'une éventuelle réforme institutionnelle.

Sous-proposition n° 1 : prévoir deux échéances enserrant le processus de décision : la première sur la fixation d'un calendrier, si possible avant 2026 ; la seconde sur l'achèvement d'une éventuelle réforme institutionnelle

(3) Un calendrier délié des échéances électorales

Le calendrier posé par le préfet Pierre Dartout n'a pas été respecté en raison de la crise sanitaire, laissant encore entière la question du calendrier adéquat pour mener une éventuelle réforme institutionnelle.

En la matière, les rapporteurs estiment que, contrairement au postulat du rapport précité du préfet Pierre Dartout, il n'est pas souhaitable de lier systématiquement le calendrier de réforme aux échéances électorales .

Celui-ci prévoyait effectivement un calendrier qui s'adaptait aux élections afin de permettre une élection des conseillers de la nouvelle métropole-département au même moment que les élections départementales nationales. Cela aurait eu pour effet, d'une part de limiter à neuf mois la période transitoire d'administration de la métropole en attendant la consécration de sa nouvelle organisation politique, et d'autre part, d'éviter l'organisation d'un scrutin délié de toute échéance nationale pour la seule métropole-département d'Aix-Marseille-Provence.

Sans exclure par principe un tel lien, les membres de la mission considèrent néanmoins qu'aujourd'hui un calendrier de réforme entièrement lié aux échéances électorales emporterait davantage de risques politiques et institutionnels que d'avancées concrètes en la matière.

En l'occurrence, lier les deux calendriers comporte inévitablement des risques de polarisation des campagnes électorales municipales et métropolitaines sur ces sujets qui ne doivent pas conduire à oblitérer des sujets de plus court terme pour les citoyens comme les territoires. À l'inverse, une telle réforme institutionnelle est trop structurante pour la métropole pour être prise dans une campagne électorale, génératrice par nature de dissensus.

Au demeurant, la construction métropolitaine a démontré par le passé que ses difficultés ne tenaient pas à son calendrier de mise en oeuvre. En effet, les travaux législatifs relatifs à la création de la métropole d'Aix-Marseille-Provence se sont principalement tenus après le renouvellement municipal de 2014, pour une date de création effective de la métropole au 1 er janvier 2016, intervenant aux deux cinquième du mandat municipal en cours. De la même manière, les concertations et travaux législatifs menés dans le cadre de la récente réforme de la métropole d'Aix-Marseille-Provence se sont déroulés plus d'un an après le dernier renouvellement municipal et métropolitain, permettant ainsi l'accouchement d'une réforme assez largement consensuelle malgré une recomposition politique au sein du conseil de la métropole.

Il convient dès lors de tirer les leçons de cet exercice et d'ainsi reproduire ce calendrier qui a facilité la création de la métropole.

Sous-proposition n° 2 : délier le calendrier de réforme des échéances électorales locales

3. La méthode : responsabiliser les acteurs locaux dans la recherche d'un consensus tout en encadrant les processus de décision

Les membres de la mission estiment nécessaire que la réflexion sur l'évolution institutionnelle de la métropole soit menée, en toute liberté mais en responsabilité, par les élus locaux .

Sans pour autant ignorer la nécessité d'un encadrement des processus de décision afin d'éviter tout immobilisme , ils pensent qu'une telle philosophie doit ainsi être poursuivie dans deux directions complémentaires :

- d'une part en responsabilisant les acteurs locaux dans l'émergence d'un projet métropolitain adossé à la réalisation de projets communs ;

- d'autre part en réunissant toutes les conditions nécessaires à ce qu'ils choisissent, de façon consensuelle, l'avenir institutionnel de la métropole.

a) Faire émerger un projet métropolitain par l'exercice effectif de compétences

Afin que l'émergence d'un projet métropolitain par l'exercice effectif de compétences devienne une réalité, les rapporteurs estiment nécessaire que la métropole donne davantage corps au fait métropolitain avant un éventuel changement de périmètre ou d'organisation institutionnelle.

À titre d'exemple, les compétences de réseau telles que les transports peuvent être un moyen, à l'instar des autres réalisations métropolitaines, de créer une « envie de métropole » tant pour les élus métropolitains encore dubitatifs quant à la pertinence de cette construction métropolitaine que de la part des élus du pays d'Arles, qui pourraient alors avoir des raisons objectives et concrètes d'intégrer cette dernière.

À cet égard, la délégation aux collectivités territoriales et à la décentralisation du Sénat, dans un rapport de Françoise Gatel, Dominique Estrosi-Sassone, Michelle Gréaume et Sylvie Robert, estimait qu'afin de « caractériser la plus-value apportée par la métropole dans l'exercice de ses compétences », il convenait non seulement de « définir clairement les critères de l'intérêt métropolitain » mais aussi « de [ les ] port[er] à la connaissance des habitants de la métropole afin que ces derniers perçoivent clairement la 'plus-value métropolitaine' [ car ] il s'agit là d'un enjeu démocratique majeur qui conditionne, dans une large mesure, le sentiment d'appartenance à la métropole » 107 ( * ) .

Les membres de la mission estiment donc que la première piste concrète du renforcement de l'enracinement du fait métropolitain sur le territoire d'Aix-Marseille-Provence réside, en réalité, dans l'émergence attendue de projets métropolitains utiles aux citoyens comme aux territoires.

b) Mettre les élus locaux en mesure de trancher parmi les options existantes quant à l'avenir institutionnel de la métropole

Sur le modèle des concertations menées par la ministre Jacqueline Gourault, dont les grands principes méthodologiques ont trouvé une traduction législative relativement consensuelle dans la loi dite « 3DS », les rapporteurs estiment nécessaire de s'inscrire dans le prolongement de cette méthode qui a fait ses preuves.

Comme évoqué précédemment, celle-ci était structurée autour de deux principes, irriguant chaque étape de la réforme :

- d'une part, la responsabilisation des acteurs locaux dans la recherche d'un consensus local, seule voie de réforme durable et sereine d'une telle structure métropolitaine ;

- d'autre part, l'encadrement des processus de décision locale .

Les membres de la mission ont ainsi travaillé à l'établissement d'une méthode consensuelle de réflexion sur l'avenir institutionnel de la métropole d'Aix-Marseille-Provence, susceptible d'aboutir à une réforme choisie par les acteurs locaux , préalable nécessaire au bon déroulement de toute réforme.

C'est pourquoi, il convient, selon eux, de réunir sans plus tarder l'ensemble des éléments nécessaires pour mettre les élus locaux en mesure de trancher parmi les options existantes quant à l'avenir institutionnel de la métropole.

Proposition n° 10 : mettre les élus locaux en mesure de trancher parmi les options existantes quant à l'avenir institutionnel de la métropole

À l'issue des travaux de la mission, ses membres proposent donc quatre points de méthode pour que les réflexions, nécessaires, sur l'avenir institutionnel de la métropole d'Aix-Marseille-Provence soient initiées et permettent aux élus locaux, dans un climat serein et fructueux, de choisir l'avenir institutionnel de leur métropole.

(1) Affirmer la nécessité d'une large et régulière concertation

Les membres de la mission ne peuvent que réaffirmer la nécessité d'une large et régulière concertation des élus locaux de l'aire départementale pour conduire la réflexion nécessaire sur l'avenir institutionnelle de la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

Afin d'en garantir l'efficacité, une telle concertation doit obéir à une méthode, établie par les acteurs locaux, éventuellement avec le concours de l'Etat.

S'il n'appartient pas aux membres de la mission d'en figer les termes, ils souhaitent toutefois proposer deux pistes qui leurs semblent susceptibles de recueillir l'assentiment de l'ensemble des acteurs locaux et de pouvoir guider utilement l'établissement d'une telle méthode.

En premier lieu, cette consultation ne saurait faire l'économie d'une association large des élus locaux de l'aire départementale bucco-rhodanienne . A ce titre, les membres de la mission souhaitent rappeler que la métropole s'inscrit dans un territoire qu'il lui revient d'entraîner dans son développement. En effet, il revient à la métropole d'Aix-Marseille-Provence de « concourir à un développement durable et solidaire du territoire régional » et dans cette perspective de valoriser ses « fonctions économiques métropolitaines, ses réseaux de transport et ses ressources universitaires, de recherche et d'innovation dans un esprit de coopération régionale et interrégionale et avec le souci d'un développement territorial équilibré . » 108 ( * ) Dans ces conditions, les élus métropolitains ne sauraient décider seuls de l'avenir d'une métropole dont les politiques publiques ont vocation à influer sur un territoire nettement plus large. Une telle consultation devrait donc nécessairement se tenir au minimum à l'échelle de l'aire départementale .

En second lieu, l'ampleur de la réflexion à mener et l'exigence d'aboutir à une solution consensuelle exigent des acteurs locaux de s'engager dans un processus régulier d'échanges et de négociations , sans lequel il semble difficile d'aboutir à une nouvelle réforme institutionnelle partagée. Conscients de l'importance des divergences entre les acteurs locaux quant à la réforme à mener, les membres de la mission rappellent la responsabilité des élus locaux en la matière , qui seuls peuvent oeuvrer, collectivement et sans dogmatisme, à faire avancer ladite réflexion institutionnelle.

Dès lors, les membres de la mission constatent que seul l'établissement d'une méthode de concertation des élus locaux de l'aire départementale prévoyant des points d'étape réguliers permettra à une réflexion institutionnelle consensuelle et choisie par les élus locaux d'émerger.

Sous-proposition n° 1 : établir une méthode de concertation des élus locaux de l'aire départementale prévoyant des points d'étape réguliers

(2) Réaffirmer le rôle d'accompagnateur de l'Etat local

Le rapport de Pierre Dartout a été un révélateur du rôle volontariste mais impartial que l'État pouvait endosser afin d'accompagner les acteurs locaux dans le choix des réformes institutionnelles à mener pour leur métropole. Ce rapport a constitué un enrichissement particulièrement bienvenu et utile aux élus locaux pour leurs discussions sur ces sujets, tant par les conclusions du rapport que la méthode de concertation déployée ; les membres de la mission notent ainsi que l'établissement du rapport du préfet Pierre Dartout s'était fondé sur une consultation des acteurs locaux, signe que l'État est parfaitement en mesure d'engager une démarche de concertation fructueuse avec les élus locaux.

L'État a donc su, par le passé, trouver les voies et les moyens d'un accompagnement volontariste mais neutre des élus locaux dans leurs réflexions institutionnelles. Forts de ce constat, les membres de la mission proposent d'octroyer aux services locaux de l'État un rôle d'accompagnateur et de garant de la tenue du calendrier décidé par les acteurs locaux. Ce rôle prendrait concrètement la forme de convocations régulières des acteurs concernés , la tenue du secrétariat de la réunion et la mise à disposition de locaux considérés comme neutres par l'ensemble des acteurs. Les membres de la mission en sont convaincus, un tel accompagnement de la part de l'État est nécessaire à la bonne tenue de cette réflexion.

Sous-proposition n° 2 : octroyer à l'État local un rôle d'accompagnateur et de garant de la tenue du calendrier décidé par les acteurs locaux

(3) Adosser la réflexion à une évaluation objective des pistes de réforme

Ce même rapport de Pierre Dartout a également démontré la nécessité d'une évaluation objective des pistes de réformes parmi lesquelles les élus locaux avaient à trancher. Ainsi, bien que n'épuisant pas les pistes de réforme envisageables, il a, en effet, permis d'établir une base de discussion pour les acteurs locaux , désormais mieux à même de mesurer les conséquences multiformes de telles décisions - y compris pour leur environnement proche voire immédiat.

Il ressort ainsi des auditions menées par la mission qu'une analyse objective, tant quantitative que qualitative, établie à l'aide des services de l'État et en collaboration avec d'autres acteurs institutionnels tels que la chambre régionale des comptes , est indispensable pour construire une base saine de discussions et ainsi réfléchir à une nouvelle organisation institutionnelle pour la métropole d'Aix-Marseille-Provence. Les membres de la mission estiment ainsi que le rôle de la chambre régionale des comptes dans le cadre de la réforme prévue par la loi dite « 3DS » a été particulièrement précieux pour objectiver les termes du débat et mettre les élus en situation de décider, en responsabilité .

Ils proposent de nourrir la concertation d'une évaluation objective et actualisée des options de réforme , s'inspirant ainsi du rôle qu'ont exercé l'Etat et d'autres organes publics et indépendants de contrôle, par le passé et qui avait permis à des discussions constructives et sereines sur l'avenir de la métropole de se nouer.

Sous-proposition n° 3 : nourrir la concertation d'une évaluation objective et actualisée des options de réforme

(4) Élargir le champ des discussions aux acteurs de la société civile pour favoriser l'acceptabilité des réformes

Les auditions des acteurs économiques et des chambres consulaires menées par la mission ont montré toute la pertinence des initiatives destinées à mieux les associer aux réflexions institutionnelles applicables à la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

À titre d'exemple, leur appréciation sur les extensions du périmètre et les besoins de compétences en réseau revêtent une plus-value indéniable pour construire une solution adaptée aux enjeux des habitants et des acteurs économiques . Ils ont notamment fait valoir que, selon eux, l'évolution du périmètre administratif de la métropole d'Aix-Marseille-Provence à Arles n'aurait pas nécessairement de cohérence sur le plan économique, tant de leur expérience, Arles leur apparaissait davantage tournée vers Avignon que vers les centralités métropolitaines .

Sans pour autant remettre en cause la place des élus locaux, seuls détenteurs d'une légitimité démocratiquement acquise pour procéder aux décisions relatives à leur territoire, les membres de la mission estiment que cette nouvelle réflexion quant à l'avenir institutionnel de la métropole d'Aix-Marseille-Provence gagnerait à mieux associer les acteurs de la société civile , en particulier économiques.

Enfin, convaincus qu'une telle démarche favoriserait l'information comme la compréhension de la société civile des évolutions envisagées et futures de la métropole d'Aix-Marseille-Provence, les membres de la mission rappellent que l'élargissement des discussions à ces acteurs faciliterait la lisibilité et de l'acceptabilité d'une telle réforme , conditions essentielles à sa réussite.

Sous-proposition n° 4 : associer aux discussions les acteurs de la société civile, notamment en matière économique, pour que le projet institutionnel soit partagé et cohérent avec le projet du territoire

EXAMEN EN COMMISSION

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MERCREDI 7 DÉCEMBRE 2022

M. François-Noël Buffet , président . - Nous allons à présent entendre le rapport de Françoise Gatel et Mathieu Darnaud, rapporteurs de la mission d'information relative à la mise en oeuvre des dispositifs créant les métropoles de Lyon et d'Aix-Marseille-Provence. Je souhaiterais rappeler que la mission était composée, outre des deux rapporteurs, de Jean-Pierre Sueur, de Guy Benarroche, d'Agnès Canayer, de Cécile Cukierman, d'Alain Marc, de Jean-Yves Roux et de Dominique Théophile.

Mme Françoise Gatel , rapporteur . - Nous sommes réunis ce matin pour un exercice intéressant puisqu'il s'agit d'évaluer l'impact et l'application de dispositifs que nous avons votés, ce que nous n'avons pas toujours le temps de faire. Nous nous consacrons ici aux métropoles de Lyon et d'Aix-Marseille-Provence, qui appelaient toutes les deux, pour des raisons différentes, à ce qu'un bilan soit dressé.

S'agissant de Lyon, la métropole atteint enfin, plus de sept ans après sa création, son fonctionnement institutionnel de croisière. En effet, en 2020, les élections des conseillers métropolitains au suffrage universel direct se sont tenues pour la première fois. Elles ont eu lieu en même temps que les élections municipales. Je rappelle que cette métropole, ayant la particularité d'exercer à la fois les compétences d'un département et d'une métropole, est une collectivité territoriale à part entière.

En ce qui concerne la métropole d'Aix-Marseille-Provence, son origine et son processus d'élaboration sont un peu différents. Elle a notamment été profondément modifiée par les dispositions de la loi relative à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, dite « 3DS » de février 2022, à l'issue d'une concertation des élus locaux conduite par le Gouvernement, sans qu'une étude d'impact solide n'ait pu être conduite.

Les membres de la mission, dont je tiens à saluer le travail tout au long de ces mois passés entre Paris, Lyon, Aix et Marseille, se sont attachés à formuler des propositions visant à améliorer le fonctionnement concret de ces deux métropoles particulières, tout en dégageant une possible trajectoire d'évolution institutionnelle. Nous allons vous présenter les résultats de nos travaux, en commençant par la métropole de Lyon.

La métropole de Lyon a été construite dans un moment de notre histoire politico-administrative particulièrement favorable à la création de métropoles très intégrées. Je vous renvoie à ce titre au rapport du comité dit « Balladur », qui était très positif en matière de reconnaissance du fait urbain et envisageait la création de ces métropoles pour permettre à de grands territoires d'affronter la compétition européenne et mondiale à armes égales avec leurs homologues européens et mondiaux. L'air du temps a sans doute un peu changé depuis lors, mais le choix avait été fait de donner à la métropole de Lyon un statut particulier, de la doter de compétences élargies, ainsi que de moyens juridiques et financiers étendus.

Chacun reconnait que la transition entre la communauté urbaine de Lyon (COURLY) et la métropole a été bien menée. Aujourd'hui, cette collectivité dispose d'un important pouvoir d'agir, ce dont le Sénat, défenseur de la capacité d'action des collectivités territoriales, ne peut que se féliciter.

Quels sont les éléments majeurs ayant conduit à ce résultat positif ? D'abord, il existe dans ce territoire une culture très forte de coopération, qui a favorisé une sorte de mutation naturelle vers le statut de collectivité. Ensuite, sa capacité d'action financière et juridique est assez remarquable.

Malgré ces atouts favorables, les inquiétudes formulées depuis deux ans, par les maires des communes situées sur les territoires de la métropole au sujet d'une gouvernance excessivement centralisée et verticale, paraissent fondées.

Un malentendu est né dans la période de transition, entre la création de la métropole et les élections de 2020, qui n'a pas permis de clarifier le modèle métropolitain. On observe aujourd'hui, d'une part, une majorité métropolitaine souhaitant mener à bien ses projets et, d'autre part, les maires des communes qui aspirent légitimement à une meilleure association aux décisions prises par la métropole sur leur territoire. À cet égard, nous comprenons l'émoi, voire la colère, des maires qui, tenus à l'écart des projets de la métropole affectant directement leur commune, s'en voient informés par voie de presse.

Faut-il pour autant prôner le retour à un établissement public de coopération intercommunale (EPCI) à fiscalité propre ? Nous en avons beaucoup débattu et, au moment de conclure nos travaux, nous avons répondu par la négative de manière collégiale. Une marche arrière ne semble ni possible ni souhaitable, y compris pour les communes. En effet, la métropole représente aujourd'hui un instrument efficace de l'action publique. Cependant, il nous faut présenter des propositions concrètes afin de mieux associer les communes et de rendre la gouvernance plus collaborative.

Cherchant à inscrire nos propositions dans cet équilibre, nous les avons organisées autour de trois axes. Je présenterai les deux premiers et Mathieu Darnaud évoquera le dernier.

En premier lieu, il convient de prendre acte du caractère spécifique de la collectivité territoriale que constitue la métropole de Lyon, qui cumule compétences départementales et intercommunales.

À cet égard, il parait essentiel de clarifier le régime électoral de la métropole. Pour ce faire, il semble d'abord nécessaire de dissocier les élections municipales des élections métropolitaines, qui doivent se tenir au terme d'une campagne spécialement dédiée aux projets métropolitains.

Ensuite, des ajustements paraissent pouvoir être apportés au mode d'élection des conseillers et nous avons exploré deux options polaires. Dans un premier cas de figure, ces élections seraient alignées sur un scrutin départemental, qui aurait le mérite de rendre identifiable ce caractère départemental de la collectivité, aujourd'hui trop peu perçu. Néanmoins, cette option n'a pas été souvent évoquée par les personnes que nous avons auditionnées.

Dès lors, il faut considérer l'autre option, qui consiste à rapprocher le mode de scrutin de celui qui est en vigueur pour les conseillers régionaux. En effet, le mode de scrutin actuel est inspiré du mode communal, ce qui entraine la présence d'une majorité dont les effectifs peuvent sembler écrasants et qui éprouve des difficultés à associer. Un alignement sur la prime majoritaire en vigueur dans les régions - à 25 % au lieu des 50 % actuels - permettrait de favoriser un fonctionnement plus démocratique du conseil de la métropole. Cette prime pourrait notamment s'exercer au niveau d'une circonscription unique, ce qui rendrait plus claire la distinction entre les légitimités métropolitaine et municipale, et favoriserait une gouvernance plus collective, en tout cas moins dominante qu'aujourd'hui.

Par ailleurs, dans un but de clarification de la nature singulière de la collectivité, il apparaitrait opportun de supprimer la clause de compétence générale de la métropole. En effet, en droit commun, cette clause n'est détenue que par les communes.

Le défaut de structure intercommunale étant amené à perdurer pour les communes situées sur le territoire de la métropole, il est nécessaire qu'elles retrouvent des marges de manoeuvre plus amples en matière de gouvernance. Il faut trouver des pistes pour rééquilibrer le rapport de forces entre la métropole et les communes ; il s'agit d'une demande forte, pressante et largement unanime parmi les maires.

S'agissant de la gouvernance de la métropole, il semble nécessaire de renforcer les conférences territoriales des maires (CTM) et la conférence métropolitaine des maires (CMM). Lors des discussions sur la loi dite « 3DS », nous avions beaucoup insisté sur ce sujet : la métropole ne peut fonctionner avec efficacité que s'il y a affectio societatis et que les maires ont voix au chapitre. La CMM doit être un lieu d'échanges, de débats et d'information, mais il faut également renforcer les CTM.

De même, le pacte de cohérence métropolitain, outil concret de coopération entre la métropole et les communes membres, doit mieux associer les maires dans son élaboration.

En ce qui concerne les moyens juridiques d'action de la métropole, leur emploi doit se faire dans une plus grande concertation avec les maires. Si les élus en sont d'accord et quand cela est possible, il faudrait davantage faire usage des facultés de délégation de compétences ouvertes. Par ailleurs, le président de la métropole doit exercer ses pouvoirs de police de manière concertée avec les maires, qui exercent parfois aussi de tels pouvoirs.

Enfin, il convient de doter les maires des moyens de rééquilibrer leurs relations avec la métropole, en assouplissant notamment la possibilité pour les communes de sortir de la métropole par la création d'une procédure ad hoc , respectueuse des prérogatives du législateur. De façon analogue, la création de communes nouvelles au sein de la métropole pourrait donner plus de poids aux communes de petite taille qui le souhaiteraient.

M. Mathieu Darnaud , rapporteur . - Le troisième axe de nos propositions me tient particulièrement à coeur, tant le développement des métropoles me semble aujourd'hui poser question. Il concerne le fonctionnement même de ces métropoles, dotées de deux jambes : la première les positionnant comme acteurs en pointe du développement économique du territoire, la seconde leur donnant la responsabilité d'entrainer leur hinterland dans le cadre de ce développement. Or la métropole de Lyon me semble aujourd'hui marcher à cloche-pied.

À cet égard, nous formulons deux propositions. En premier lieu, il s'agira de développer les relations de la métropole avec le département du Rhône, dit « Nouveau Rhône », en poursuivant deux voies.

D'abord, l'achèvement de la séparation entre la métropole de Lyon et le Nouveau Rhône, doit permettre d'apporter une nécessaire clarification en ce qui concerne des compétences aujourd'hui insuffisamment exercées en commun. Je pense notamment à la scission de la maison départementale et métropolitaine des personnes handicapées (MDMPH).

Ensuite, il s'agit de constituer le Nouveau Rhône comme circonscription administrative de plein exercice, dotée d'une préfecture à Villefranche-sur-Saône, pleinement indépendante de la métropole et donc prête à engager avec celle-ci des relations renouvelées de coopération, d'égal à égal.

La seconde de nos propositions porte sur les relations qu'entretient la métropole avec l'ensemble des autres collectivités l'environnant, dans l'objectif de concourir à un développement équilibré du territoire régional, et pour qu'enfin la métropole joue collectif.

D'une part, des outils comme le pôle métropolitain n'auraient pas dû être purement et simplement supprimés. La suppression de cette instance souple semble témoigner d'un défaut de volonté de la part de la métropole de coopérer avec ses voisins.

D'autre part, et je souhaiterais insister sur ce point, des moyens organisationnels et financiers doivent être mis en oeuvre pour assurer le développement équilibré du territoire quant à la question des mobilités. À cet égard, la piste d'un reversement d'une partie du versement mobilité (VM) vers la région, que nous présentons dans le rapport, gagnerait à être davantage explorée.

M. François-Noël Buffet , président . - Nous en venons à présent au rapport portant sur la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

M. Mathieu Darnaud , rapporteur . - La métropole d'Aix-Marseille-Provence est confrontée à des défis spécifiques.

Si l'aire urbaine d'Aix et Marseille, forte de son tissu urbain et d'une importante concentration de fonctions économiques et culturelles, pouvait légitimement faire prétendre cet ensemble au statut de métropole, ce territoire nous a paru très particulier. Comme nous avons pu le constater au cours de nos déplacements, la métropole est marquée par un polycentrisme particulièrement affirmé, ainsi que par des dynamiques économiques, démographiques, sociales et culturelles divergentes.

Au terme d'une construction législative heurtée, marquée par une forte opposition des élus locaux, la métropole ne paraissait remplir ses objectifs qu'imparfaitement. Ainsi, elle ne s'était pas réellement approprié ses compétences, en déléguant souvent l'exercice à ses communes membres.

De plus, le maintien des conseils de territoire, structures intermédiaires héritées des anciens EPCI envisagées comme transitoires par le législateur, mais exerçant de très nombreuses compétences au nom de la métropole, a également empêché celle-ci de développer des projets métropolitains.

Enfin, la situation financière de la métropole, telle qu'elle résultait de cette répartition des compétences, obérait sa capacité d'investissement.

La réforme prévue par la loi dite « 3DS » a permis d'agir sur chacun de ces paramètres. Ainsi, les conseils de territoire ont été supprimés. De plus, les compétences ont été de nouveau réparties entre la métropole et les communes membres, selon un partage entre compétences de proximité et compétences stratégiques, afin de satisfaire le principe de subsidiarité. Par ailleurs, une procédure de redéfinition des relations financières entre la métropole et les communes membres a été prévue.

Nos travaux s'inscrivant dans ce contexte encore mouvant, ils n'ont pas vocation à tirer un bilan définitif de cette réforme, ni à tracer des pistes d'évolution institutionnelle à long terme, ce qui semblerait prématuré.

Soucieux de préserver cet équilibre, nous avons formulé des recommandations qui s'organisent autour de trois axes.

En premier lieu, il s'agit de parachever la récente réforme de la métropole Aix-Marseille-Provence, qui semble engager la métropole sur une voie meilleure. Les acteurs locaux doivent veiller à ce qu'elle produise tous ses effets.

À ce titre, en matière de compétences, nous excluons toute modification législative à court terme. La métropole et les communes membres doivent pleinement s'approprier les compétences qui leur seront transférées au 1 er janvier 2023. Dans ces conditions, l'État doit apporter son concours afin d'accompagner une transition qui pourrait s'avérer complexe. Par ailleurs, la clarté n'excluant pas la souplesse, en cas de frictions ponctuelles au sujet de la répartition des compétences, la métropole et ses communes membres devraient être incitées à faire usage des facultés de délégation prévues par la loi. Enfin, si une définition de l'intérêt métropolitain est actée avant le 31 décembre 2022, comme cela semble se profiler, il conviendra d'en assurer la mise en oeuvre rapide.

S'agissant de la difficile question des finances, la commission locale d'évaluation des charges transférées (CLECT) interviendra pour assurer la neutralité financière des transferts de compétences. Ce moment constituera une occasion unique, qu'il faudra saisir, de remettre à plat les relations financières entre la métropole et ses communes membres. Néanmoins, nous n'avons pas été sourds aux difficultés que pose une telle redéfinition. La nécessaire révision des attributions de compensation doit donc être envisagée dans le cadre global de la conclusion d'un nouveau pacte financier, sous l'égide de l'État, entre la métropole et ses communes membres, s'adossant sur un nouveau projet de territoire.

Enfin, en ce qui concerne le volet de l'organisation déconcentrée, la suppression des conseils de territoire a constitué une indéniable avancée, dont il convient désormais de prendre acte. À cette fin, la métropole doit arrêter au plus vite, comme souhaité par le législateur, les contours d'une organisation déconcentrée claire et lisible pour les élus comme pour les citoyens. L'accompagnement de l'État, dès lors qu'il est sollicité par la métropole pour la conduite d'une telle transition, doit être garanti.

Ces réformes de structure suffiront-elles ? Nous nous sommes permis d'en douter au regard de la situation de Marseille, ville-centre atypique qui concentre des difficultés majeures.

Ainsi, en deuxième lieu, des mesures de rééquilibrage ciblées sur la ville de Marseille devront garantir, à court comme à long terme, la viabilité de la métropole. Elles sont aujourd'hui réunies dans le cadre du plan « Marseille en Grand », pour lequel nous avons identifié trois pistes d'amélioration. D'abord, il s'agira d'évaluer régulièrement les mesures prévues pour s'assurer de leur efficacité. Ensuite, il faudra instituer rapidement un comité de suivi du plan, associant les élus locaux et l'État. Enfin, le plan devra s'inscrire dans la durée et son renforcement pourra être envisagé à mesure que les objectifs de politique publique seront atteints.

Mme Françoise Gatel , rapporteur . - J'en viens à notre troisième axe, qui porte sur la question institutionnelle. Nous avons auditionné les acteurs de la métropole, mais aussi les élus des EPCI voisins et il nous a semblé nécessaire de tirer les leçons de ce que trop souvent les élus subissent, quand un processus de décision est entamé sans être maitrisé et sans avoir été nourri par une étude d'impact, devenant souvent brutal et trop rapide.

En ce qui concerne la question institutionnelle et une éventuelle réforme, aucun consensus ne semble se dégager, ni sur le contenu ni sur le calendrier, ni chez les élus de la métropole ni chez ceux des EPCI voisins.

Les paramètres d'une réforme éventuelle sont toutefois connus et les options évoquées par les personnes entendues pourraient chacune constituer une amélioration du fonctionnement de la métropole, dès lors que les élus auraient un tel projet en partage. Ainsi, il nous parait exclu d'aller à l'encontre de la volonté du pays d'Arles, clairement exprimée par ses élus, de ne pas rejoindre la métropole tant qu'elle n'aura pas fait la preuve de son efficacité. La métropole doit d'abord s'organiser et se stabiliser pour, éventuellement, donner envie à d'autres de la rejoindre.

Une telle réforme ne doit donc pas être conduite dans l'immédiat, car il convient avant tout de mieux ancrer le projet métropolitain. Néanmoins, il semblerait problématique de n'avoir aucun horizon. Ce dossier doit pouvoir avancer et ne doit pas être tributaire des seules échéances électorales, comme celle de 2026, qui, bien souvent, provoquent des secousses. Il est aujourd'hui de notre responsabilité de demander qu'un calendrier soit établi.

Deux échéances rythmant le processus de décision d'une réforme institutionnelle pour la métropole d'Aix-Marseille-Provence pourraient donc être fixées : la première pour la définition d'un calendrier de réforme, si possible avant 2026, et la seconde pour l'achèvement d'une éventuelle réforme institutionnelle.

S'agissant de la méthode, la réflexion sur l'évolution institutionnelle de la métropole doit être menée en toute liberté et en responsabilité, par les élus locaux eux-mêmes. Néanmoins, afin qu'ils soient dans des dispositions adéquates pour trancher sur un sujet aussi structurant, la méthode de conduite de ce processus doit réunir quatre conditions.

D'abord, la concertation doit être élargie aux élus locaux de l'aire départementale et des points d'étape réguliers doivent être prévus.

Ensuite, l'État doit se voir octroyer un rôle d'accompagnateur et de garant de la tenue du calendrier, défini par les acteurs locaux. Il s'agit là de la conception à laquelle le Sénat est attaché quand il s'agit du rôle de l'État, qui ne doit imposer ni réforme institutionnelle ni calendrier. Cependant, il demeure coresponsable de la réussite de ce territoire.

De plus, une évaluation objective et actualisée des pistes de réforme doit être conduite. Les réformes portant sur la réorganisation territoriale ont été trop souvent menées à la hussarde, sans une solide étude d'impact préalable. Nous devons gérer aujourd'hui des tensions entre des élus qui ont parfois eu l'impression d'avoir subi des transferts de compétences et des mariages forcés. Les territoires gagnent en efficacité quand la volonté est partagée.

Enfin, les acteurs de la société civile doivent être associés aux discussions, notamment en matière économique.

À ces conditions, une réforme institutionnelle fructueuse et consensuelle nous semble pouvoir être conduite. La métropole d'Aix-Marseille-Provence, ses territoires et ses habitants méritent une organisation territoriale qui soit enfin à la hauteur de leur potentiel et de ce qu'ils peuvent apporter au pays. Je voudrais tout de même souligner que, depuis l'adoption de la loi dite « 3DS », qui a stimulé et vivifié la réflexion comme la concertation locale, des avancées significatives ont eu lieu.

Mme Catherine Di Folco . - Mes questions porteront sur la métropole de Lyon. D'abord, pourquoi envisager le passage à une circonscription unique ?

Par ailleurs, vous évoquez le parachèvement de la séparation entre la métropole de Lyon et le Nouveau Rhône, notamment la scission de la maison départementale-métropolitaine des personnes handicapées (MDMPH). Je tiens toutefois à rappeler que plusieurs services s'exercent en commun, comme le service départemental-métropolitain d'incendie de secours (SDMIS), celui des archives ou le centre de gestion de la fonction publique. Il faudrait donc veiller à ce que ce processus de séparation ne touche pas des institutions qui fonctionnent bien, ce qui entrainerait des frais supplémentaires pour rien.

Enfin, je n'ai pas bien compris l'idée d'un transfert de pouvoirs à la région en termes de mobilité, la région étant déjà compétente en la matière.

M. Jean-Pierre Sueur . - Je tiens à souligner le grand intérêt du travail mené. Nous avons rencontré de très nombreux élus des deux métropoles, dans un esprit d'ouverture, et nous sommes parvenus à faire un certain nombre de propositions, qui peuvent réunir les représentants de la mission et, je l'espère, ceux de notre commission.

En ce qui concerne Lyon, un dispositif particulier a été adopté, à la suite du travail réalisé par Gérard Collomb et Michel Mercier. Après avoir entendu les uns et les autres, y compris les maires, nous constatons qu'il existe un accord assez large pour ne pas revenir en arrière, notamment sur la question du suffrage universel pour l'élection des représentants de la métropole. Ce consensus me semble très positif.

Cependant, nous avons observé des difficultés de lisibilité en matière électorale. À ce titre, le vote dans le cadre d'une circonscription unique me parait offrir plus de lisibilité qu'une organisation qui s'appuierait sur des circonscriptions créées de façon artificielle. Cependant, il ne s'agit que de mon point de vue et le rapport reste ouvert à cet égard.

À ce sujet, il apparait aussi nécessaire de prendre en compte ce que disent les maires et j'avais imaginé des solutions de scrutin mixte, comprenant une partie majoritaire émanant du suffrage universel et une partie qui reprendrait une désignation par les communes. Néanmoins, ces solutions sont impraticables, soit parce qu'elles ne sont pas constitutionnelles, soit parce qu'elles aboutiraient à des assemblées pléthoriques. Cette possibilité a été explorée, mais il semble difficile d'y donner suite.

Par ailleurs, le rapport comprend une série de propositions concernant les CTM qui, si la circonscription unique devait être retenue, devraient être repensées selon les réalités du territoire.

De plus, donner plus de poids à la CMM apparait essentiel. Celle-ci doit pouvoir se réunir chaque fois que c'est nécessaire avant le conseil métropolitain, et ses avis devraient obligatoirement être transmis aux conseillers métropolitains, voire lus en séance.

J'en viens à la métropole d'Aix-Marseille-Provence. D'abord, il me semble important que le rapport soit positif à l'égard de la ville de Marseille, qui connait des difficultés, qu'il faut s'efforcer de surmonter plutôt que de les stigmatiser.

Par ailleurs, je partage ce qui a été dit sur le pays d'Arles : ce serait une erreur profonde de vouloir à tout prix l'intégrer dans la métropole. Un jour peut-être, la métropole présentera suffisamment d'avantages pour que les élus des EPCI concernées souhaitent y adhérer.

M. Éric Kerrouche . - Les mesures proposées semblent plus palliatives que curatives. Cette approche peut être utile, mais ne sera pas en mesure de résoudre le problème de fond.

D'abord, on a du mal à penser la spécificité de la métropole de Lyon, qui fusionne le bloc local avec le bloc départemental. Pourtant, des exemples identiques existent dans d'autres pays, notamment en Allemagne.

Nous avons choisi un mode électoral qui ne recoupe aucun des choix faits aux différents niveaux couverts par cette institution. Nous n'avons choisi ni le modèle communal ni le modèle départemental, et le mode de scrutin retenu cumule les désavantages de l'un et l'autre, sans présenter d'intérêt majeur. L'un de ses inconvénients forts est de tenir une partie des maires de la métropole à l'écart du processus de prise de décision. À ce titre, la proposition visant à donner un plus grand rôle à la CMM relève du palliatif et du rattrapage.

Par ailleurs, notre pays connait une évolution sur laquelle nous devons nous pencher. En effet, dans l'état actuel de notre gouvernance locale, les élections privilégient un mode majorité-opposition plutôt qu'un mode exécutif-législatif. On obtient donc un président et un exécutif qui ont une majorité dans l'assemblée. Ce modèle produit peu de compromis et beaucoup d'affrontements ; il n'est pas tenable. Une véritable évolution - mais il faudrait aller beaucoup plus loin que ce qui est proposé - consisterait à produire cette rupture entre exécutif et législatif dans les grandes institutions françaises. Le modèle serait alors celui qu'on connait dans la plupart des démocraties occidentales et européennes, en Italie, en Espagne ou en Allemagne. Il prévoirait une élection du législatif et une élection de l'exécutif. Sans une telle évolution, nous nous contenterons de tenter de corriger un système qui ne fonctionne pas structurellement, parce qu'il repose à l'origine sur un accord politique intuitu personae .

M. Dany Wattebled . - Ce projet m'inquiète, tant le pouvoir des maires me semble déjà dilué. Ainsi, je reste attaché au mode de représentation et il faut faire attention à cet égard à ne pas passer à un mode de scrutin qui exclurait tout à fait les maires des débats. Il faut maintenir une proportionnalité pour maintenir l'équilibre. En la matière, la CMM ne me parait pas être l'élément le plus important ; ce qui compte, c'est que l'élu soit présent au conseil de la métropole, pour défendre son territoire.

M. Guy Benarroche . - La commission a mené ses travaux dans d'excellentes conditions, depuis les auditions jusqu'à la rédaction du rapport.

En ce qui concerne Lyon, il faut d'abord rappeler la structure unique que constitue la métropole. De plus, la dernière réforme menée a permis de donner à celle-ci le budget et les pouvoirs nécessaires pour qu'elle puisse agir dans le choix des politiques publiques. Il s'agit là d'un point essentiel, qui constitue peut-être la différence majeure avec la métropole d'Aix-Marseille-Provence. La métropole est d'autant plus légitime à faire ces choix que son conseil est élu au suffrage universel direct. À cet égard, je ne vois pas comment nous pourrions nous passer de ce type de suffrage pour élire des représentants dont les votes engagent des budgets énormes. Les travaux de la mission proposent des pistes de réflexion utiles sur le régime électoral, mais, au sein de la métropole, personne n'a remis en cause le maintien du suffrage universel direct.

Les compétences de la métropole de Lyon sont nombreuses et il me semble que l'organisation territorialisée présentée fournit un bon exemple de la façon dont les choses doivent évoluer. Cependant, il faut que le lien avec les communes se noue aussi au niveau de la CMM et des CTM. En conclusion, le modèle lyonnais représente aujourd'hui un atout réel en matière de conduite de politiques publiques et il fonctionne globalement bien. Il demeure récent et des améliorations doivent être apportées. À ce titre, le rapport fournit des pistes intéressantes, qui ne heurteront pas les partenaires sur le territoire.

S'agissant de la métropole d'Aix-Marseille-Provence, le travail effectué depuis le vote de la loi dite « 3DS » a été réel, mais pas très rapide. L'article même que la loi consacrait à la métropole explique ce retard. En effet, il apparaissait clairement que l'on ne pouvait pas réformer la métropole avec un amendement. De plus, il semblait compliqué de se faire comprendre de tous les acteurs du territoire, parce qu'on ne touchait qu'à une partie de l'organisation et que personne ne voyait apparaitre de piste d'atterrissage pour cette loi. Je souhaitais alors que nous allions plus loin, ce qui n'a pas été possible.

Néanmoins, le travail a commencé en ce qui concerne la disparition des conseils de territoire, la répartition des compétences, la définition d'un intérêt métropolitain et l'étude de la réalité des flux financiers à l'intérieur de la métropole.

À ce titre, la chambre régionale des comptes a remis son premier rapport, qui a montré ce que tous les acteurs savaient : la métropole a été bâtie sur un socle mouvant, stable sur un point, la photo des flux financiers prise à l'époque, dans l'objectif d'assurer un certain équilibre grâce aux attributions de compensation (AC) et aux dotations de solidarité communautaire (DSC). Quand la photo a été prise pour savoir ce que chaque commune allait recevoir, chacune avait eu un an pour se préparer et la photo a été truquée.

En ce qui concerne le travail de répartition entre les AC et les DSC pour rééquilibrer la position de la ville de Marseille à l'intérieur de la métropole, il me semble qu'il existe deux options dont l'une prévoit de ne pas toucher aux AC et de créer des DSC qu'on ne sait pas comment financer. À cet égard, un amendement a été mis sur la table dans le cadre du projet de loi de finances pour 2023, qui envisage la création d'une DSC d'environ 15 millions d'euros pour la première année, qui serait financée par la métropole. Elle prévoit ensuite près de 100 millions d'euros pour les deux années suivantes, qui ne sont pas financés à ce stade. La proposition doit être signée par la métropole le 15 décembre, même si rien n'est encore joué.

Ensuite, je partage l'analyse qui a été faite au sujet de l'organisation future de la métropole. Nous pouvons fusionner ou ne pas fusionner la métropole et le département, ces deux possibilités devant être étudiées. Dans le cas d'une fusion, elle pourrait se faire sur le territoire actuel de la métropole, excluant le pays d'Arles et ses trois EPCI, ce qui m'apparaît comme la bonne solution.

Enfin, il faut rapidement se préoccuper de la question du scrutin, qu'il y ait fusion ou non. Les avis de tous les acteurs doivent être pris en compte dans un temps qui doit être marqué par un agenda clair et suivi. Un tel aiguillon semble nécessaire pour permettre à tous les acteurs de fonctionner malgré le passif existant dans ce territoire.

M. Stéphane Le Rudulier . - Mon propos portera uniquement sur la métropole d'Aix-Marseille-Provence. D'abord, je voudrais revenir sur les apports de la loi dite « 3DS ». S'agissant de la répartition des compétences et notamment de la « redescente » des compétences de proximité - je pense notamment à la voirie, à l'éclairage public ou aux bornes incendies -, elle a été grandement appréciée par les maires, notamment pour la souplesse qu'elle offrait. Des avancées ont eu lieu à cet égard.

Néanmoins, le point d'achoppement porte sur le volet financier et je suis en parfait désaccord avec Guy Benarroche sur ce sujet. En effet, les élus sont au travail depuis quelques mois, sur la prospective financière et sur la préparation d'un nouveau pacte fiscal et financier. Des réunions se tiennent toutes les semaines, trois groupes de travail réunissent les maires : le groupe établi autour du plan pluriannuel d'investissement « Ambition 2030 », le groupe relatif à la définition de l'intérêt métropolitain et un groupe purement financier, qui tente de trouver des marges de manoeuvre pour combler le déficit structurel, notamment en ce qui concerne le volet mobilité. Rappelons en effet que le déficit du budget annexe des transports s'élève à 120 millions d'euros par an et devrait atteindre 200 millions d'euros par an à l'horizon de 2030, avec la mise en oeuvre du plan « Marseille en Grand ». Suivre les recommandations du rapport de la chambre régionale des comptes, c'est-à-dire adopter la technique du rabot, reviendrait à mettre en péril plus de deux tiers des communes de la métropole.

Au sujet de la péréquation, sur les 92 communes de la métropole, 10 concentrent la richesse fiscale et financière. Il faudrait travailler exclusivement sur ces communes, qui représentent chacune des dizaines de millions d'euros d'AC quand elles comptent 30 000 ou 40 000 habitants. En effet, les AC par habitant sont de 180 euros à Marseille quand elles s'élèvent jusqu'à 3 800 euros dans certaines communes ! Cette péréquation doit se concentrer exclusivement sur ces communes pour lesquelles une baisse de quelques millions serait quasiment indolore.

En ce qui concerne la question fiscale, le déplafonnement du versement mobilité dans la métropole représente un recours au regard du volume d'investissement prévu. Il s'agit d'un impôt fléché vers le budget annexe des transports et d'un véritable outil, au-delà de ce qui avait été envisagé, comme l'augmentation de la taxe foncière métropolitaine.

Avant de se lancer dans une réforme du périmètre, il faut d'abord stabiliser les choses en matière de répartition des compétences et de ressources financières ; il nous faudra au minimum douze mois pour y parvenir. La question d'une réforme ne pourra se poser qu'après. Quant aux trois EPCI de l'ouest du département, elles pourraient considérer d'un oeil attentif le fait de rejoindre la métropole si elle devenait efficiente, notamment en matière de mobilité.

Enfin, au sujet de la déconcentration des services, les conseils de territoire ont été supprimés au 1 er juillet 2022, très rapidement après la promulgation de la loi dite « 3DS ». Cependant, pour l'heure, l'organisation déconcentrée des services métropolitains, qui rassemblent 7 000 agents, n'a pas encore pleinement abouti et leur fonctionnement n'est pas pleinement efficient.

M. Marc-Philippe Daubresse . - Je me permets d'intervenir modestement, car j'ai connu dans la métropole lilloise des problèmes similaires à ceux que rencontrent Lyon et Marseille. J'ai suivi tous les épisodes, depuis la loi dite « Chevènement » de 1999, qui relançait l'idée de l'élection au suffrage universel direct, jusqu'aux nouvelles créations institutionnelles. Tout le monde sait ici que l'histoire spécifique de la création de la métropole lyonnaise est due à Michel Mercier et Gérard Collomb. D'ailleurs, cette création semble déséquilibrée quand on l'observe de l'extérieur, entre une très grande métropole et un département atrophié.

Nous avons frôlé à Lille une crise totale du même type que celle qui est rencontrée aujourd'hui par Marseille et nous l'avons évitée grâce à deux éminents sénateurs, Pierre Mauroy et André Diligent. Ainsi, il y a vingt ans, s'opposaient à Lille « l'axe des émirats » et l'axe des villes en difficulté. On parlait de sécession, de réforme institutionnelle, de modification des AC et des DSC... Mais nous en sommes sortis et je donnerai ce conseil : chaque fois que l'on évoque une réforme institutionnelle révolutionnaire, on aboutit à un plus grand enlisement.

Aujourd'hui, c'est d'un pacte financier dont la métropole d'Aix-Marseille-Provence a besoin. Il faut d'abord éviter une catastrophe financière, comme l'a fait en son temps Pierre Mauroy. Ensuite, les questions institutionnelles cesseront de poser problème parce que les communes s'y retrouveront. Il ne faut surtout pas bouleverser les institutions et accentuer les contraintes pesant déjà sur les maires.

M. André Reichardt . - Ceux qui étaient déjà sénateurs et membres de la commission des lois lorsque ces métropoles ont été créées ne doivent pas s'étonner aujourd'hui des difficultés dont nous parlons. J'étais ici lorsque Gérard Collomb et Michel Mercier sont venus nous jouer leur pièce de théâtre, et je me souviendrai longtemps des cris d'alarme de Sophie Joissains en ce qui concerne la création de la métropole d'Aix-Marseille-Provence. Voilà ce qui se passe lorsqu'on ne fournit pas de travail préalable sérieux. Pensons-y à l'avenir !

Je me félicite néanmoins de l'évaluation de politique publique qu'a entrepris la mission et je souhaite que ce travail sérieux aboutisse.

Toutefois, comme l'a dit Éric Kerrouche, je pense que les mesures envisagées relèvent du palliatif. J'ai bien noté que des propositions étaient faites, particulièrement à Lyon, comme la clarification du mode de scrutin. Par ailleurs, je suis favorable à la circonscription unique ; il faut savoir ce qu'on veut. Malgré tout, je crains qu'il ne s'agisse que de corriger les choses et je ne crois pas que la CMM apportera la solution attendue. Je le dis en étant fort de mon expérience de maire d'une petite commune de la grande communauté urbaine de Strasbourg, devenue eurométropole.

Mme Valérie Boyer . - Ce rapport souligne bien la différence qui existe entre les métropoles de France, chacune ayant sa spécificité et son histoire. En ce qui concerne la métropole d'Aix-Marseille-Provence, nous avons beau déployer toute la souplesse possible, la métropole connait une pénurie budgétaire et de grandes inégalités sur son territoire, qui ne sont pas compensées. Ces difficultés ne seront pas réglées par des mesures qui semblent surtout incitatives.

Aujourd'hui, il s'agit d'une métropole de projets et, parmi eux, celui de la mobilité pourrait peut-être fédérer les communes des Bouches-du-Rhône. Cependant, les différences sont immenses entre les villes et entre les habitants. De plus, la ville de Marseille concentre toutes les centralités du territoire, et même de la région, ce qui rend la tâche difficile. Néanmoins, je retiens de ce travail la recherche d'une stabilité, qui pourrait offrir une solution - sans oublier toutefois qu'aux difficultés juridiques, financières et fiscales, s'ajoute un manque de conception politique. Espérons que la stabilité et la perspective d'un projet en matière de mobilité permettront de sortir cette métropole de l'ornière.

M. Mathieu Darnaud , rapporteur . - J'ai été rapporteur d'un texte sur le statut de Paris et l'aménagement métropolitain, à l'occasion duquel nous appelions à ne pas trop multiplier le nombre de métropoles. En effet, une métropole est définie par plusieurs critères, l'exercice est forcément complexe, pose des questions en matière de démocratie, d'économie, d'aménagement du territoire, et les décisions prises sont difficilement modélisables. À titre d'exemple, nous évoquons ce matin deux métropoles dont l'une a un territoire six fois plus grand que l'autre ; il est difficile de tirer des conclusions qui soient valables pour les deux.

Par ailleurs, je rappelle qu'il s'agit ici d'une évaluation et que nous devons plus et mieux évaluer nos métropoles.

Pour répondre à André Reichardt et Éric Kerrouche, il est peut-être prématuré de parler de soins palliatifs dans la mesure où nous avons presque affaire à un nouveau-né... Cependant, je les rejoins sur le fait qu'il est difficile à ce stade de trouver des solutions qui ne soient pas clivantes. En ce qui concerne le mode de scrutin par exemple, nous avons offert plusieurs hypothèses pour aider à définir le modèle. Si nous considérons qu'il s'agit avant tout d'un modèle départemental, il devient possible de calquer le mode de scrutin correspondant. Ainsi, nous avons proposé la création de 75 cantons. Dans le cadre d'une solution intermédiaire, nous avons proposé la création de 31 cantons. Enfin, nous avons évoqué la circonscription unique. N'oublions pas que nous sommes confrontés à un problème de proximité et de lisibilité de l'action publique par les habitants de ces métropoles, qui sont habitués au modèle communal et se retrouvent face à un modèle nouveau et hybride.

Marc-Philippe Daubresse a raison et il s'agit de l'une des conclusions majeures que nous tirons du rapport sur Aix-Marseille-Provence : il faut d'abord conclure un pacte financier, sous l'égide de l'État. Cela compte plus encore après le lancement du plan « Marseille en Grand ».

Concernant la MDMPH, nous avons à présent affaire à deux collectivités. Par ailleurs, les présidents du département du Nouveau Rhône et de la métropole souhaitent qu'il y ait deux entités. Cependant, cela n'empêche pas que les choses se fassent dans de bonnes conditions, la volonté étant de poursuivre l'excellence du travail mené. Le Nouveau Rhône est aujourd'hui un département à part entière et il faut le prendre en compte, raison pour laquelle nous pensons nécessaire de le doter d'une préfecture.

En ce qui concerne le versement mobilité, il ne s'agit pas de compétences, mais de moyens ; tous les élus l'ont souligné. Certes, le versement mobilité échoit à la métropole, mais n'oublions pas que cette collectivité a besoin pour fonctionner des personnes venant de son hinterland . Aujourd'hui, comme le signalent le président de la région Auvergne-Rhône-Alpes et celui de la communauté d'agglomération Porte de l'Isère, la métropole de Lyon est en train de s'isoler des territoires environnants en matière de mobilité. N'oublions pas non plus que la région gère les trains express régionaux (TER). De plus, en Auvergne-Rhône-Alpes, presque toutes les intercommunalités ont transféré leur compétence mobilité à la région. Il faut donc prendre en compte cette situation et donner une partie des moyens à la région, pour qu'elle puisse organiser, avec la métropole et d'autres autorités organisatrices, le fonctionnement des mobilités sur le territoire.

J'en viens à la question de la circonscription unique. Il ne s'agit pas d'opter pour un choix particulier, mais de faire état de trois possibilités, entre lesquelles il conviendra d'arbitrer dans un futur assez proche, pour permettre de répondre à la fois aux besoins de proximité des habitants et au mécontentement des maires, qui ont dénoncé que des projets métropolitains pouvaient voir le jour dans leur commune sans même qu'ils en soient informés. Ce sujet appellera des réflexions, mais il était prématuré pour nous d'aller plus loin.

Mme Françoise Gatel , rapporteur . - Vos questions et interventions mettent en évidence ce qui représente un enseignement qui n'est pas nouveau, mais que nous redécouvrons toujours : l'évolution de l'organisation institutionnelle ne peut être une cavalcade effrénée et sans fin. Il faut stabiliser les situations pour garantir une bonne appropriation par les élus locaux et une mise en oeuvre efficace pour nos concitoyens.

Dans le cas de ces deux métropoles, leur origine explique les constats que nous faisons. L'initiative de la métropole de Lyon a été portée ici par deux grands acteurs locaux. La proposition émanait d'une culture de coopération déjà existante et d'une vision qui offrait de propulser le territoire vers la réussite de son avenir. Elle reposait sur des atouts exemplaires, qui ont permis de créer une structure singulière, bien dans l'air du temps.

Mais il ne faut pas confondre mode et style. Suivre la mode en matière d'organisation institutionnelle n'est pas sans danger et peut conduire à commettre des erreurs. Le style serait de développer un projet adapté au territoire. À ce titre, une vraie question se pose au sujet de Marseille. En effet, après avoir analysé les atouts et difficultés du territoire, l'idée a germé de ce remède miracle - pour reprendre la métaphore médicale - : en utilisant l'outil métropolitain, on pourrait entrainer le territoire. Or l'outil ne fait pas la qualité du maçon. Cet ensemble, qui agrège des territoires aux cultures et aux dynamismes économiques très différents, n'a pas de tradition métropolitaine.

En revanche, Lyon est une création assez adaptée. Quant au mode de scrutin, il est éminemment démocratique car il s'effectue au suffrage universel direct. Cependant, il ne fonctionne pas bien et il faut donner de la visibilité à la métropole. La circonscription unique permettrait de développer et de mettre en oeuvre de véritables programmes et projets métropolitains. De plus, grâce à la prime de scrutin majoritaire à 25 %, la gouvernance serait plus accessible aux communes et plus consensuelle. Dans les métropoles et les intercommunalités, les oppositions ne sont pas toujours politiques et peuvent se créer en fonction d'intérêts divers. La métropole est le lieu d'élaboration d'un projet de territoire.

Concernant Marseille, il s'agit encore pour les élus d'apprivoiser le modèle. Ce territoire grandit lentement, mais forcer la croissance ne donne pas toujours de bons résultats. Il convient de saluer le travail accompli depuis la loi dite « 3DS », avec notamment - évolution extraordinaire - la suppression des conseils de territoire.

Le pacte financier est un défi important, qui ne pourra être relevé sans un projet de territoire. Situation atypique : Marseille, la ville qui devrait tirer la métropole vers le haut, se retrouve aujourd'hui dans une situation difficile. Se posera bientôt la question de l'accompagnement de l'État qui, aujourd'hui, octroie des subventions, mais surtout des avances.

Ces deux « créations » sont nouvelles. Il convient de ne pas jeter le bébé avec l'eau du bain - et donc, ne pas chercher à inventer autre chose au prétexte que cela ne fonctionne pas après quelques mois. Pour Lyon, des réglages sont nécessaires afin que les maires retrouvent leur place. Pour Marseille, la promesse du territoire est encore à construire, les élus avancent et les acteurs économiques poussent ; il est dans l'intérêt de tous que ce territoire prospère. Je ne suis pas pessimiste. Nos propositions n'ont pas pour objet de dire aux élus ce qu'ils doivent faire. Nous faisons des propositions à partir de constats, et les membres de la mission, dans leur grande diversité, sont unanimes pour saluer le travail accompli.

M. François-Noël Buffet , président . - La mission menée par nos deux rapporteurs intervient à un moment où les deux métropoles sont au début de leur vie, notamment celle de Lyon. Cette dernière n'a atteint sa plénitude que depuis l'élection au suffrage universel direct en 2020 ; elle est en place depuis 2015, mais, jusqu'en 2020, elle fonctionnait encore avec l'état d'esprit d'un EPCI. L'habitude du travail partagé entre les maires et la métropole a été prise depuis la création de la communauté urbaine en 1969, de surcroît sur un territoire urbain unique et avec une population importante. En 2020, l'élection au suffrage universel direct a entrainé un certain nombre de difficultés, notamment ce conflit de légitimités entre les maires et les élus de la métropole. Une évolution culturelle est à mener ; elle a encore besoin de temps.

Je rappelle que la mission est née d'une contestation d'un grand nombre de maires qui, sans en faire un sujet polémique, n'arrivaient pas à obtenir ce qu'ils souhaitaient. Les rapporteurs proposent des ajustements, nous sommes dans la gestion d'une croissance. Sur un territoire de 1,5 million d'habitants portant un budget de l'ordre de 4 milliards d'euros, on ne peut pas ne pas être dans un système démocratique, avec des élections au suffrage universel direct ; on lève des impôts, les enjeux sont importants.

Pour Marseille, la problématique est différente. Nous sommes dans le cadre d'un EPCI qui cherche encore à définir son projet métropolitain. L'histoire de ce territoire est riche et il ne faut pas non plus négliger le rôle de la deuxième ville de France. Il y a un besoin d'apaisement, tout en ayant conscience de l'enjeu financier. Un travail est engagé et, s'il n'est pas conduit, ce territoire continuera de souffrir.

Ce sont deux situations différentes, avec des cultures politiques différentes, notamment dans l'appréhension du phénomène intercommunal. Mais nous restons convaincus, comme l'avait imaginé à l'époque le gouvernement du général de Gaulle, qu'il s'agit de deux grandes métropoles d'équilibre sur le plan national. Elles ont un rôle à jouer, au-delà d'elles-mêmes. Les évolutions ne se feront, à Lyon comme à Marseille, que si les élus se prennent en main.

Il conviendrait de reprendre nos travaux avant l'issue du mandat en 2026, afin de voir les évolutions et, le cas échéant, faire les ajustements nécessaires. L'enjeu est important, sachant que, dans ces territoires, les puissances économiques sont organisées de manière différente.

Pour la métropole de Lyon, les rapporteurs proposent d'intituler le rapport d'information : « Métropole de Lyon - communes : le pari d'un destin commun. » Cela traduit le fait que, en dépit des difficultés actuelles, il s'agit bien pour tout le monde de vivre ensemble.

Les recommandations sont adoptées.

La mission d'information adopte, à l'unanimité, le rapport d'information et en autorise la publication.

M. François-Noël Buffet , président . - Pour la métropole d'Aix-Marseille-Provence, les rapporteurs proposent le titre suivant : « Métropole d'Aix-Marseille-Provence : une métropole à la croisée des chemins. ». Cela signifie que la métropole a des choix à effectuer dès maintenant.

Les recommandations sont adoptées.

La mission d'information adopte, à l'unanimité, le rapport d'information et en autorise la publication.

CONTRIBUTIONS ÉCRITES

I. CONTRIBUTION DE M. GUY BENARROCHE, MEMBRE DE LA MISSION D'INFORMATION, SÉNATEUR DES BOUCHES-DU-RHÔNE (GROUPE ÉCOLOGISTE - SOLIDARITÉ ET TERRITOIRES)

Comme l'indique très bien le rapport de la Mission d'Information du Sénat, après 10 années d'existence, la Métropole Aix-Marseille-Provence est encore inachevée avec des déséquilibres et des contrastes qui demeurent toujours existants.

Cela constitue sans aucun doute une raison importante pour contribuer à son achèvement et pour lui permettre de jouer son rôle de structuration et de planification

Avec un objectif, celui d'être opportuns et constructifs au bon moment pour les acteurs locaux qui souhaitent voir une Métropole efficace, active et attractive pour les communes qui en sont membres ou qui pourraient le devenir.

Il convient de créer les conditions de la réconciliation historique entre la ville-centre et la métropole en instaurant une gouvernance équitable, respectueuse des équilibres communaux, tant au sein de l'exécutif communautaire que de ses organismes satellites (comme par exemple la RTM, ou l'agence d'urbanisme)

Et aussi d'assurer une meilleure redistribution des richesses de la métropole sur l'intégralité de son périmètre, en instaurant une Dotation de solidarité communautaire se rapprochant au de la DSC moyenne nationale, répartie selon des critères objectifs et lissée dans le temps afin d'éviter une déstabilisation trop brutale des budgets communaux, et en s'assurant d'un effort de rééquilibrage des équipements et des infrastructures.

C'est bien ce que notre mission reprend dans sa proposition : « proposer la conclusion d'un nouveau pacte financier, sous l'égide de l'État, entre la métropole et ses communes membres, s'adossant sur un nouveau projet de territoire ».

Pacte qui ainsi permettrait consensuellement à la Métropole de mettre en oeuvre le sens de l'amendement défendu le 5 décembre 2022 par le sénateur Guy Benarroche sur la base d'un avis qui a été rendu, par la Chambre régionale des comptes, au représentant de l'État et aux élus le 29 août 2022, conformément au calendrier prévu par la loi.

La chambre régionale des comptes souligne la surévaluation manifeste des attributions de compensation qui nuit à l'équilibre budgétaire de la métropole, réduit ses capacités d'investissement, et se fait au détriment des territoires fragiles.

Ainsi la procédure visant à encadrer le retour à un niveau des attributions de compensation conforme à la réalité des charges transférées et à instituer une dotation de solidarité communautaire pour réduire les disparités de ressources et de charges entre les communes serait décidée par la Métropole, assortie d'un ensemble de garanties visant à respecter le principe de libre administration de chacune des communes membres.

Il est aussi essentiel que tout soit mis en place avant les échéances électorales dont, notamment, l'élection d'un conseil métropolitain sur la base d'un scrutin direct et proportionnel permettant ainsi l'existence d'une projet métropolitain légitime.

L'évolution de la Métropole ne doit pas occulter une reconnaissance et une implication des maires qui sont légitimes pour assurer les compétences communales et pour donner leur avis sur les compétences de la Métropole

Pour cela il est essentiel de concrétiser rapidement plus de proximité, de visibilité avec une organisation des services déconcentrés claire et lisible pour les citoyens et les élus.

Il faut également interroger et étudier la mise en oeuvre rapide d'un conseil consultatif des maires ainsi que la possibilité pour le Maire d'être l'autorité fonctionnelle des services métropolitains dans le cadre d'une mise en place de services communs entre la Métropole et les communes.

Au sujet de notre réflexion pour une organisation institutionnelle de la Metropole choisie par les acteurs locaux, il me semble utile pour ma part de préciser que le calendrier de cette réforme doit être fixé avant l'échéance de 2026.

Plusieurs options sont évoquées dans le rapport.

L'option de la sagesse conserve le périmètre actuel de la Métropole permettant ainsi de préparer et de se donner les moyens d'aller plus loin avec l'évolution possible plus tard si les conditions sont réunies et tous les acteurs locaux d'accord de proposer une fusion de la Métropole avec le Département 13 en vue d'optimiser les moyens et d'augmenter l'efficacité en direction des communes et des habitants de ce territoire. A ce titre, l'exemple de la fusion de la Métropole de Lyon avec le département est riche d'enseignements positifs.

Une évolution qui ne pourrait qu'être l'aboutissement d'une coopération solide et active avec l'ensemble des collectivités, avec une forte implication citoyenne et serait mise en place seulement avec l'accord des communes concernées.

Ce travail de réflexion et de prospection sur le devenir de nos collectivités devra se faire avec la société civile et le monde économique.

II. CONTRIBUTION DE MME CÉCILE CUKIERMAN, MEMBRE DE LA MISSION D'INFORMATION, SÉNATRICE DE LA LOIRE (GROUPE COMMUNISTE RÉPUBLICAIN CITOYEN ECOLOGISTE)

La fracture créée entre la ville de Marseille et le Département des Bouches-du-Rhône (13) par la Métropole Aix Marseille Provence a des conséquences sur la gestion et le partage des compétences. L'hostilité des élus locaux à cette création continue de persister.

Le grand plan d'Emmanuel Macron pour Marseille, décrété il y'a un an, a été salué par les sénateurs, mais le chantier est dense et long pour apporter des réponses concrètes aux problématiques quotidiennes : l'école, la sécurité, le logement...

La loi dite « 3DS » entend permettre aux communes de récupérer des compétences de proximité, notamment celles qui concernent la voirie et l'espace public. La ville de Marseille doit délibérer avant le 31 décembre 2022. Les discussions sont en cours sur les moyens financiers de telles récupération.

I - Un pacte financier introuvable

Les discussions autour d'un accord pour acter la création d'une Dotation de Solidarité Communautaire entre la Métropole, la ville de Marseille et les maires ne semblent aboutir. En effet, les Métropoles sont obligées de se doter de cette dotation. La Métropole Aix Marseille Provence est dans l'incapacité actuellement de dégager cette enveloppe budgétaire.

La Métropole distribue 650 millions d'attributions de compensations aux villes de la Métropole, dont près de 200 millions seraient indues d'après la Chambre Régionale des Comptes. Par cet acte, la Métropole diminue la capacité d'investissement de l'EPCI et empêche ainsi la création d'une Dotation de Solidarité Communautaire.

Le compromis doit être trouvé sans impacter les finances locales des villes de la Métropole, puisqu'actionner le levier fiscal des communes serait un moyen pour la création de cette dotation. La dotation doit être à la hauteur des besoins des habitants.

II - Le retour des compétences de proximité

La Métropole a mis en place une Commission Locale d'Évaluation des Charges Transférées pour évaluer l'impact financier des compétences de proximité à la ville de Marseille, notamment celle de la voirie et de la propreté qui font l'actualité depuis un an.

Une redistribution équitable des moyens financiers est nécessaire pour que la reprise des compétences à l'échelle locale puisse être une réussite. Certaines compétences exigent des moyens humains à la hauteur pour que la mission de service public soit assurée.

L'actuelle proposition ne répond pas aux enjeux et aura un coût conséquent sur la commune de Marseille.

PROGRAMME DU DÉPLACEMENT
DANS LES BOUCHES-DU-RHÔNE

Jeudi 28 avril 2022

_________________________Marseille_________________________

Entretien avec M. Georges Cristiani , président de l'association des maires des Bouches-du-Rhône, vice-président de la métropole Aix-Marseille-Provence.

Déjeuner de travail avec M . Jean-Claude Gaudin , ancien maire de Marseille.

Entretien avec M. Jean-Philippe Quattrocchi , directeur général de l'UPE 13 et M. Bruno Cagnol , président du Club Top 20.

Réunion avec Mme Catherine Brigant , directrice de la direction régionale des finances publiques (DRFiP).

Entretien avec M. Christophe Mirmand , préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, M. Laurent Carrié , préfet délégué pour l'égalité des chances et M. Yvan Cordier , secrétaire général.

Dîner de travail avec Mme Martine Vassal , présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence et du conseil départemental des Bouches-du-Rhône.

Vendredi 29 avril 2022

_________________________Marseille_________________________

Entretien avec M. Nacer Meddah , président de la chambre régionale des comptes, accompagné de Sophie Leduc-Denizot , première conseillère .

Entretien avec les vice-présidents de la métropole :

- M. Pascal Montecot , président de la commission Ambition

- M. Didier Khelfa , président de la commission Finances

- M. Jean-Pierre Giorgi , président de la commission relative à la CLECT.

Table ronde avec les acteurs économiques :

- M. Jean-Luc Chauvin , président de la CCI métropolitaine Aix-Marseille-Provence

- M. Stéphane Paglia , président de la CCI du pays d'Arles

- M. Claude Rossignol , premier vice-président de la chambre d'agriculture

Déjeuner de travail avec M. Benoit Payan , maire de Marseille.

_________________________Aix-en-Provence_________________________

Entretien avec Mme Sophie Joissains , maire d'Aix-en-Provence, en présence de M. Gérard Bramoullé , premier adjoint et Stéphane Muscat , directeur de cabinet.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES
PAR LES RAPPORTEURS

Table ronde avec les Parlementaires des Bouches-du-Rhône

Mme Sabrina Agresti Roubache, députée

M. Romain Baubry, député

M. Guy Benarroche, sénateur

Mme Valérie Boyer, sénatrice

Mme Marie-Arlette Carlotti, sénatrice

Mme Brigitte Devésa, sénatrice

M. Stéphane Le Rudulier, sénateur

Mme Anne-Laurence Pétel, députée

M. Lionel Royer-Perreaut, député

M. Stéphane Ravier, sénateur

M. Jean-Marc Zulesi , député

Table ronde avec des groupes politiques de la métropole Aix-Marseille-Provence

Mme Sophie Joissains , présidente du groupe politique « Aix-Pays d'Aix »

Mme Sophie Camard, présidente du groupe politique « Pour une métropole du bien commun », accompagné de M. Hassan Guenfici, secrétaire général

M. Gaby Charroux, membre du groupe politique « Métropole à gauche », président du conseil de territoire du Pays de Martigues (jusqu'au 1 er juillet) et maire de la Ville de Martigues

Table ronde avec des groupes politiques de la métropole Aix-Marseille-Provence

Mme Amapola Ventron, présidente du groupe politique « Centriste, écologiste et métropolitain »

M. Jean-Baptiste Rivoallan, président du groupe politique « Une volonté pour la métropole »

Conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur

M. Renaud Muselier, président

Table ronde avec les élus du pays d'Arles

M. Patrick de Carolis , maire d'Arles, président de la communauté d'agglomération d'Arles-Crau-Camargue-Montagnette

Mme Corinne Chabaud, maire de Mollégès, président de la communauté d'agglomération Terre de Provence

M. Hervé Cherubini, maire de Saint-Rémy-de-Provence, président de la communauté de communes Vallée des Baux-Alpilles

Personnalités qualifiées

M. Pierre Dartout, ministre d'État de Monaco, ancien préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur et préfet des Bouches-du-Rhône

Direction générale des collectivités locales (DGCL)

M. Stanislas Bourron, directeur général

Mme Karine Delamarche, sous-directrice des compétences et des institutions locales

Mme Mathilde Cisowski, rédactrice au sein du bureau des structures territoriales


* 1 Le IX de l'article 181 de la loi précitée dite « 3DS » prévoit, en effet, que « le Gouvernement remet au Parlement, avant le 31 décembre 2023, un bilan de l'application du présent article. Ce bilan doit comporter des propositions permettant d'améliorer le fonctionnement de la métropole notamment en ce qui concerne son organisation, sa gouvernance, son périmètre et son mode d'élection ». Ledit IX dispose également que « ce bilan peut faire l'objet d'un débat dans les conditions prévues par les règlements des assemblées et du dépôt d'un projet de loi relatif à l'amélioration du fonctionnement de la métropole ».

* 2 Au début de la séance publique consacrée à l'article 56 du projet de loi dit « 3DS », la ministre Jacqueline Gourault détaillait ainsi ces objectifs en les déclinant autour de trois axes : « premièrement, simplifier la gouvernance pour redonner de l'efficacité à l'action publique par la suppression des conseils de territoire ; deuxièmement, restituer les compétences de proximité aux communes et conforter la métropole dans ses compétences stratégiques ; enfin, créer les conditions d'un rééquilibrage des relations financières entre la métropole et les communes en se donnant le temps d'un travail collégial, sur la base d'une compréhension objective de la situation ». Voir le compte rendu de la deuxième séance du 8 décembre 2021, consultable à l'adresse suivante : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/comptes-rendus/seance/session-ordinaire-de-2021-2022/deuxieme-seance-du-mercredi-08-decembre-2021#2715432 .

* 3 La mission d'information est composée de : François-Noël Buffet (Les Républicains - Rhône), président de la commission des lois, Mathieu Darnaud (Les Républicains - Ardèche) et Françoise Gatel (Union Centriste - Ille-et-Vilaine), rapporteurs, Guy Benarroche (Écologiste - Solidarité et Territoires - Bouches-du-Rhône), Agnès Canayer (Les Républicains - Seine-Maritime), Cécile Cukierman (Communiste républicain citoyen et écologiste - Loire), Alain Marc (Les Indépendants - République et Territoires - Aveyron), Jean-Yves Roux (Rassemblement Démocratique et Social Européen - Alpes de Haute-Provence), Jean-Pierre Sueur (Socialiste, Écologiste et Républicain - Loiret), et Dominique Théophile (Rassemblement des démocrates progressistes et indépendants - Guadeloupe), membres.

* 4 Étude d'impact du projet de loi « MAPTAM », p. 50.

* 5 Les axes sont les suivants : répondre à l'urgence, l'éducation, l'emploi, la culture et les mobilités.

* 6 Il s'agirait des compétences suivantes : promotion du tourisme (y compris la création d'offices de tourisme) pour les communes stations de tourisme ainsi que les communes touristiques (ajout des députés), cimetières et sites cinéraires, défense extérieure contre l'incendie (dont le pouvoir de police associé, sur ajout des députés), réseaux de chaleur ou de froid urbains, concessions de plages. Les compétences « valorisation du patrimoine naturel et paysager » et « bornes de recharge électrique de véhicules », initialement « redescendues » aux communes dans l'amendement du Gouvernement, resteraient dévolues à la métropole.

* 7 Il s'agirait des compétences suivantes : voirie, parcs et aires de stationnement, espaces publics de déplacement urbain, soutien aux activités commerciales et artisanales. En matière d'équipements culturels, socio-éducatifs et sportifs d'intérêt métropolitain, le conseil métropolitain aurait obligation de se prononcer sur la révision du champ de l'intérêt métropolitain.

* 8 Pour plus de précisions voir l'article 181 de la loi dite « 3DS ».

* 9 Étude d'impact précitée du projet de loi dit « MAPTAM », p. 50.

* 10 Étude d'impact relative au projet de loi dit « MAPTAM », p. 7. Elle est consultable à l'adresse suivante : https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/Files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/etudes-d-impact-des-lois/ei_art_39_2013/ei_action_publique_territoriale_metropole_cm_10.04.2013.pdf.pdf .

* 11 Étude d'impact relative au projet de loi dit « MAPTAM » précitée, p. 49.

* 12 INSEE analyses, « Métropole Aix-Marseille Provence - Un territoire hétérogène, une unité à bâtir », Samuel Ettouati, 29 septembre 2015, https://www.insee.fr/fr/statistiques/1379781 .

* 13 Statuts annexés au décret portant création de l'établissement public de coopération scientifique « Aix-Marseille Université ».

* 14 Décret n° 2007-380 du 21 mars 2007 portant création de l'établissement public de coopération scientifique « Aix-Marseille Université » https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000000466965 .

* 15 Rapport de la commission permanente du conseil départemental des Bouches-du-Rhône du 21 octobre 2016 ayant pour objet la dissolution du Syndicat mixte des transports des Bouches-du-Rhône. Il est consultable à l'adresse suivante :

https://www.departement13.fr/uploads/delibs/R0U0J.pdf .

* 16 Étude d'impact du projet de loi dit « MAPTAM », p. 49. Elle est consultable à l'adresse suivante : https://www.legifrance.gouv.fr/contenu/Media/Files/autour-de-la-loi/legislatif-et-reglementaire/etudes-d-impact-des-lois/ei_art_39_2013/ei_action_publique_territoriale_metropole_cm_10.04.2013.pdf.pdf .

* 17 DATAR, Une nouvelle ambition pour l'aménagement du territoire, Documentation française, 2009.

* 18 Schéma départemental de mobilité durable du département des Bouches-du-Rhône, rapporteur Bernard Pont, 2015, p. 3. Il est consultable à l'adresse suivante : https://www.departement13.fr/fileadmin/user_upload/ConseilGeneral/CDC/rapports/DEATRD030714.pdf .

* 19 Schéma précité, p. 5.

* 20 Rapport au Premier ministre sur le « Devenir de la Métropole Aix-Marseille-Provence et du Conseil départemental des Bouches-du-Rhône » du préfet Pierre Dartout, p. 8.

* 21 OCDE, « Vers une croissance plus inclusive de la métropole Aix-Marseille », consultable à l'adresse suivante : https://www.oecd.org/fr/regional/aix-marseille.htm/

* 22 Étude d'impact précitée du projet de loi dit « MAPTAM », p. 50.

* 23 Rapport Dartout précité, p. 9.

* 24 Rapport Dartout, précité,p. 9.

* 25 Étude d'impact du projet de loi « MAPTAM » précitée, p. 50.

* 26 Rapport, de René Vandierendonck précité, p.150.

* 27 Op. cit ,. p. 151.

* 28 Op. cit ., p. 149.

* 29 Op. cit ., p.150.

* 30 Chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur, Rapport d'observations définitives sur la gestion du syndicat mixte des transports des Bouches-du-Rhône (exercices 2009 et suivants), p. 14, consultable à l'adresse suivante : https://www.ccomptes.fr/fr/documents/29866 .

* 31 Ibidem , p. 16.

* 32 Rapport d'Olivier Dussopt fait au nom de la commission des lois de l'Assemblée nationale, sur le projet de loi dit « Maptram », consultable à l'adresse suivante, https://www.assemblee-nationale.fr/14/rapports/r1216.asp#P3800_806835 p. 156

* 33 Rapport de René Vandierendonck précité, p. 157.

* 34 L'article L. 5218-7 du code général des collectivités dans sa rédaction issue de la loi dite « MAPTAM » consacré à son I le rôle consultatif des conseils de territoires qui étaient « saisis pour avis des rapports de présentation et des projets de délibération satisfaisant aux deux conditions suivantes : leur exécution est spécifiquement prévue, en tout ou partie, dans les limites du territoire ; ils concernent les affaires portant sur le développement économique, social et culturel, l'aménagement de l'espace métropolitain et la politique locale de l'habitat ». Aussi, son II dans cette même rédaction disposait que « le conseil de la métropole d'Aix-Marseille-Provence peut déléguer à un conseil de territoire, avec l'accord de celui-ci, et dans le respect des objectifs et des règles qu'il fixe, tout ou partie de l'exercice des compétences qui lui ont été transférées par ses communes membres », à l'exception de quatorze domaines de compétences.

* 35 En vertu du II de l'article L. 5218-7 du code général des collectivités territoriales , la délégation automatique des compétences ne pouvait ni être réalisé sur quinze compétences dites stratégiques limitativement énumérées ni avoir lieu en cas d'opposition du conseil de la métropole exprimée par délibération adoptée à la majorité des deux tiers

* 36 Si le projet de loi initial dit « MAPTAM » avait prévu à son article 31 une faculté ouverte à l'ensemble des métropoles de droit commun d'instituer sur leur territoire des conseils de territoire, le Sénat lui a préféré une autre instance de coordination à l'échelle métropolitaine : la conférence métropolitaine réunissant annuellement l'ensemble des maires du périmètre et disposant d'une capacité d'avis. Toutefois, des conseils de territoires, instances à caractère initialement consultatif, ont été conservés dans l'architecture institutionnelle de la métropole du Grand Paris ainsi que celle d'Aix-Marseille-Provence compte tenu de leurs spécificités.

* 37 Étude d'impact sur le projet de loi dit « 3DS », précitée, p. 157.

* 38 Prises de parole de Jean-Claude Gaudin le 5 juin 2013 en séance publique lors de l'examen des amendements portant création d'articles additionnels avant l'article 30 du projet de loi dit « MAPTAM » en première lecture au Sénat.

Le compte-rendu intégral des débats est disponible à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/seances/s201306/s20130605/s20130605004.html#section635 .

* 39 Amendement présenté par MM. Jean-Claude Gaudin, Gilles, Bas et Hyest n°260 rect. bis, au projet de loi dit « MAPTAM » en première lecture au Sénat. Cet amendement est consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/amendements/2012-2013/581/Amdt_260.html .

* 40 Arrêté inter préfectoral des préfets des Bouches-du-Rhône, du Var et du Vaucluse du 1 er septembre 2015 constatant le nombre et la répartition des sièges du conseil de la métropole d'Aix-Marseille-Provence. Cet arrêté est consultable à l'adresse suivante : https://www.bouches-du-rhone.gouv.fr/content/download/15868/99919/file/Arr%C3%AAt%C3%A9%20CM%2010915.pdf .

* 41 Amendement du Gouvernement n° 1047 rect. déposé sur le projet de loi portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 42 Rapport d'observations définitives de la chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur sur la métropole d'AMP, publié le 15 octobre 2020, p. 4. Il est consultable à l'adresse suivante : https://www.ccomptes.fr/fr/publications/metropole-aix-marseille-provence-amp-marseille-bouches-du-rhone .

* 43 Rapport Dartout, précité, p. 26.

* 44 Délibération n° MET 17/4312/CM du conseil de la métropole Aix-Marseille-Provence du 13 juillet 2017, consultable à l'adresse suivante :

https://deliberations.ampmetropole.fr/documents/metropole/deliberations/2017/07/13/DELIBERATION/D03BS.pdf .

* 45 Rapport de Mathieu Darnaud et Françoise Gatel, fait au nom de la commission des lois du Sénat, le 30 juin 2021 sur le projet de loi dit « 3DS », p. 192.

* 46 Rapport précité, p. 31.

* 47 Pacte de gouvernance financier et fiscal de la métropole d'AMP, « Une Métropole Monde garante d'une métropole des proximités », 2016, p.7. Il est consultable à l'adresse suivante : https://deliberations.ampmetropole.fr/documents/metropole/deliberations/2016/06/30/RAPPORTDELACOMMISSION/C00P1.pdf .

* 48 Étude d'impact du projet de loi dit « 3DS », p. 492.

* 49 Rapport précité de la chambre régionale des comptes, 2020, p. 14.

* 50 Rapport précité de la chambre régionale des comptes, p. 60.

* 51 Rapport précité de la chambre régionale des comptes, p. 16.

* 52 Rapport précité de la chambre régionale des comptes, p. 17.

* 53 Rapport de la chambre régionale des comptes, octobre 2022, pp. 9 à 12.

* 54 Rapport précité de la chambre régionale des comptes de PACA, 2020, pp. 60 et 75.

* 55 Rapport précité de la chambre régionale des comptes de PACA, 2020, p. 15.

* 56 Rapport précité de la chambre régionale des comptes de PACA, 2022, p. 17.

* 57 Rapport précité du préfet Pierre Dartout, 2019, p. 31.

* 58 Rapport précité, p. 67.

* 59 France Bleu, « Marseille : invasion de rats dans l'école de Montolivet, une dératisation de grande ampleur est prévue », le 17 novembre 2022, https://france3-regions.francetvinfo.fr/provence-alpes-cote-d-azur/bouches-du-rhone/marseille/marseille-invasion-de-rats-dans-l-ecole-de-montolivet-une-deratisation-de-grande-ampleur-est-prevue-2657384.html .

* 60 Communiqué de presse du tribunal administratif de Marseille, e 5 décembre 2018, « A la suite de l'effondrement des immeubles de la rue d'Aubagne, le tribunal administratif apporte des précisions sur la mise en oeuvre de la procédure de péril imminent », consultable à l'adresse suivante :
http://marseille.tribunal-administratif.fr/content/download/149445/1513410/version/3/file/CP%20IMR.pdf .

* 61 Rapport du CEREMA, « Identification des territoires à enjeux d'habitat indigne et dégradé dans les Bouches-du-Rhône », juin 2015, p. 7, consultable à l'adresse suivante : https://www.cerema.fr/system/files/documents/2018/03/PDLHI_13_Octobre_2015.pdf .

* 62 Rapport relatif à la requalification du parc immobilier privé à Marseille, Christian Nicol et al ., mai 2015. Le rapport est consultable à l'adresse suivante : https://marsactu.fr/wp-content/uploads/2015/11/285389804-Marseille-Rapport-Nicol-27-Mai-2015.pdf .

* 63 Rapport annuel de la fondation Abbé Pierre de l'état du mal-logement, 2019, consultable à l'adresse suivante : https://www.fondation-abbe-pierre.fr/nos-publications/communiques-de-presse/letat-du-mal-logement-en-region-paca .

* 64 Rapport précité, p. 89.

* 65 Et sur la base de travaux animés par un cabinet de conseil dénommé Métanoïa.

* 66 Métropole d'Aix-Marseille-Provence, CAP 2030 - La fabrique de l'ambition, juin 2022.

* 67 Lors de son audition par les membres de la mission, le représentant de la chambre de commerce et d'industrie métropolitaine a ainsi souligné que les mobilités constituent « un enjeu majeur ».

* 68 Discours du président de la République, Emmanuel Macron, prononcé le 2 septembre 2021 dont le texte est consultable dans son intégralité à l'adresse suivante : https://www.elysee.fr/emmanuel-macron/2021/09/02/marseille-en-grand .

* 69 Amendement n° II-1278 du Gouvernement dépose sur le projet de loi de finances pour 2022, consultable à l'adresse suivante :

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/amendements/4482C/AN/1278

* 70 Amendement n° II-3288 du Gouvernement dépose sur le projet de loi de finances pour 2022, consultable à l'adresse suivante :

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/amendements/4482C/AN/3288 .

* 71 Amendement n° II-2731 du Gouvernement dépose sur le projet de loi de finances pour 2022, consultable à l'adresse suivante :

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/amendements/4482C/AN/2731

* 72 Amendement n° II-2383 du Gouvernement dépose sur le projet de loi de finances pour 2022, consultable à l'adresse suivante :

https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/amendements/4482C/AN/2383 .

* 73 Lors de son discours, le premier ministre Jean Castex a affirmé que « ce qui justifie en la matière une intervention spécifique, une intervention plus forte de l'État, parce qu'il y a un retard dans le développement de ces infrastructures indispensables (...) à la vie quotidienne de nos concitoyens, (...) à la transition écologique, (...) mais aussi à l'attractivité de la métropole et de ses quartiers ». Le discours est consultable dans son intégralité en ligne à l'adresse suivante : https://www.vie-publique.fr/discours/282953-jean-castex-14122021-plan-marseille-en-grand .

* 74 Voir l'article 56 du projet de loi initial dit « 3DS » déposé sur le bureau du Sénat le 12 mai 2021.

* 75 Amendement n° 3344 du Gouvernement déposé sur le projet de loi relatif à la différenciation, la décentralisation, la déconcentration et portant diverses mesures de simplification de l'action publique locale, consultable à l'adresse suivante : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/dossiers/DLR5L15N42412?etape=15-AN1 .

* 76 Il s'agirait des compétences suivantes : promotion du tourisme (y compris la création d'offices de tourisme) pour les communes stations de tourisme ainsi que les communes touristiques (ajout des députés), cimetières et sites cinéraires, défense extérieure contre l'incendie (dont le pouvoir de police associé, sur ajout des députés), réseaux de chaleur ou de froid urbains, concessions de plages. Les compétences "valorisation du patrimoine naturel et paysager" et "bornes de recharge électrique de véhicules", initialement "redescendues" aux communes dans l'amendement du Gouvernement, resteraient dévolues à la métropole à l'initiative des députés.

* 77 Il s'agirait des compétences suivantes : voirie, parcs et aires de stationnement, espaces publics de déplacement urbain, soutien aux activités commerciales et artisanales. En matière d'équipements culturels, socio-éducatifs et sportifs d'intérêt métropolitain, le conseil métropolitain aurait obligation de se prononcer sur la révision du champ de l'intérêt métropolitain.

* 78 Ces schémas seraient réalisés en matière de soutien aux activités commerciales et artisanales, de voirie, d'organisation du tourisme, de réseaux de chaleur ou de froid urbains, d'implantation de bornes de recharge électrique de véhicules.

* 79 Prise de parole de la ministre Jacqueline Gourault lors de l'examen par l'Assemblée nationale en première lecture de l'article 56 du projet de loi di « 3DS ». Le compte rendu intégral des débats du 2 décembre 2021 est disponible à l'adresse suivante : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/comptes-rendus/seance/session-ordinaire-de-2021-2022/deuxieme-seance-du-mercredi-08-decembre-2021 .

* 80 Cet avis a été rendu, puis publié après que le conseil de la métropole a formulé ses observations, à la fin du mois d'octobre 2022. Il est consultable à l'adresse suivante :

https://www.ccomptes.fr/fr/publications/metropole-aix-marseille-provence-et-ses-communes-membres .

* 81 Rapport précité du préfet Pierre Dartout, 2019, p. 4.

* 82 Cet ajout résulte de l'article 8 de la loi du 21 février 2022 dite « 3DS ». Une possibilité de délégation « ascendante », vers les départements et régions, a également été prévue pour les EPCI à fiscalité propre, sur leurs seules compétences facultatives. Une telle disposition est applicable à la métropole d'Aix-Marseille-Provence.

* 83 Voir le E du I de l'article L. 5218-2 du code général des collectivités territoriales.

* 84 L'ouverture d'une potentielle nouvelle période de délibération n'a pas paru souhaitable au législateur lors de l'examen du projet de loi dit « 3DS », en ce qu'elle était perçue comme réduisant les chances d'aboutir à un accord en temps utile pour permettre la mise en oeuvre rapide de la réforme votée.

* 85 À cet égard, en application de l'article L. 2333-64 du code général des collectivités territoriales qui dispose qu' « en dehors de la région d'Ile-de-France, les personnes physiques ou morales, publiques ou privées, à l'exception des fondations et associations reconnues d'utilité publique à but non lucratif dont l'activité est de caractère social, peuvent être assujetties à un versement destiné au financement des transports en commun lorsqu'elles emploient au moins onze salarié (...) dans le ressort d'une métropole » , la métropole d'Aix-Marseille-Provence peut instituer un versement transport sur son périmètre. Ainsi soumise au régime de droit commun du versement mobilité, la métropole d'Aix-Marseille-Provence peut, par délibération, fixer un taux de versement dans la limite de 2 % des salaires. Ile-de-France Mobilités peut, en vertu d'un statut dérogatoire prévu à l'article L. 2531-4 du même code, porter ce taux à 2,95 % dans certaines communes de son ressort territorial.

* 86 Séance du 30 septembre 2022 du conseil municipal de Marseille, consultable à l'adresse suivante : https://www.marseille.fr/mairie/conseil-municipal/le-conseil-municipal .

* 87 Voir le guide de la DGCL sur les attributions de compensation, 2019, p. 54.

* 88 Rapport de la chambre régionale des comptes, 2022, p. 19.

* 89 Ibidem . p. 31.

* 90 Ibidem , pp. 29 et 33.

* 91 Ibidem , p.31.

* 92 Contribution écrite du préfet Christophe Mirmand, transmise aux membres de la mission, p. 3.

* 93 Rapport de la commission des lois précité, p. 192.

* 94 Délibération FBPA-039-30/06/2022-CM du conseil de la métropole, du 30 juin 2022. Voir le compte rendu de la réunion, p. 637.

* 95 Étude d'impact précitée du projet de loi dit « MAPTAM », p. 50.

* 96 Source : débat d'orientations budgétaires 2022, ville de Marseille, p. 35.

* 97 Décret du 7 octobre 2021 portant nomination du préfet délégué pour l'égalité des chances auprès du préfet de la région Provence-Alpes-Côte d'Azur, préfet de la zone de défense et de sécurité Sud, préfet des Bouches-du-Rhône, chargé du plan Marseille en grand, consultable à l'adresse suivante : https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000044177522 .

* 98 Avis de la chambre régionale des comptes précité, octobre 2022, pp. 20-22.

* 99 Voir le I de l'article L. 5211-28-4 du code général des collectivités territoriales.

* 100 Courrier du 20 juillet 2022 de Sophie Joissains à Elisabeth Borne, Première ministre, transmis aux rapporteurs de la mission.

* 101 Chambre régionale des comptes de Provence-Alpes-Côte d'Azur, Rapport d'observations définitives relatif à la régie départementale des transports des Bouches-du-Rhône (RDT 13), p. 13, consultable à l'adresse suivante :

https://www.ccomptes.fr/fr/publications/regie-departementale-des-transports-des-bouches-du-rhone-rdt-13-aix-en-provence-0 .

* 102 Source : métropole d'Aix-Marseille-Provence, consultable à l'adresse suivante : https://ampmetropole.fr/metropole/le-territoire/ .

* 103 Dans son rapport de juin 2022, la chambre régionale des comptes nuance néanmoins ce constat, jugeant ainsi que « la situation financière de la collectivité reste saine, malgré une progression plus forte des charges (+ 1,7 % par an), principalement d'aides sociales, que des produits (+ 1 % par an) sur la période, entraînant une baisse de la capacité d'autofinancement nette de la collectivité (-113 M€). »

* 104 À cet égard, le rapport du préfet Pierre Dartout notait, en 2019, que « le potentiel fiscal par habitant de l'ensemble du pays d'Arles (456,26 €) est inférieur à celui de l'ensemble du territoire des Bouches-du-Rhône (553,16 €) », p. 14.

* 105 Ibid , p. 14.

* 106 Voir délibération du 30 juin 2022 précitée.

* 107 Rapport d'information de Françoise Gatel, Dominique Estrosi Sassone, Michelle Gréaume et Sylvie Robert, fait au nom de la délégation aux collectivités territoriales, « Métropoles : pour de nouvelles dynamiques territoriales », 11 juin 2011, p. 18. Il est consultable à l'adresse suivante : http://www.senat.fr/rap/r20-679/r20-6791.pdf .

* 108 En application de l'article 5217-1 du code général des collectivités territoriales, le législateur a fixé deux objectifs principaux aux métropoles de droit commun à savoir, « améliorer la cohésion et la compétitivité » de leur territoire et « concourir à un développement durable et solidaire du territoire régional ».

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