LES RECOMMANDATIONS DU RAPPORTEUR SPÉCIAL

1. Mieux structurer la coopération entre la délégation générale à l'emploi et à la formation professionnelle, l'Agence de services et de paiement et l'Union nationale des entreprises adaptées pour assurer le pilotage du système de paiement et d'information utilisé pour les déclarations de postes (DGEFP, ASP, UNEA).

2. Évaluer, lorsque le recul sera suffisant, l'impact de la réforme des modalités d'agrément des entreprises adaptées et du versement des aides au poste sur la proportion de travailleurs handicapés qu'elles emploient et sur le financement des structures (DGEFP).

3. Prolonger d'un an la mise en oeuvre des expérimentations du CDD Tremplin et des entreprises adaptées de travail temporaire, et attendre les conclusions de leur évaluation pour décider de l'opportunité de relancer le projet d'expérimentation d'entreprises adaptées pro-inclusives (DGEFP).

4. Relancer un dispositif de soutien à la formation dans les entreprises adaptées, tirant les leçons des limites rencontrées par le PIC-EA et adossé à un suivi plus fin de leurs actions de formation professionnelle (DGEFP, Agefiph).

5. Renforcer les coopérations et le partage de données entre le service public de l'emploi et les entreprises adaptées dans l'objectif de dynamiser leurs processus de recrutement (Pôle emploi, Cap emploi, Union nationale des missions locales, UNEA).

6. Assurer une publication régulière des données relatives à la politique de soutien aux entreprises adaptées, comprenant a minima les stocks et les flux de recrutement de salariés éligibles aux aides au poste et éventuellement les postes financés dans le cadre des expérimentations (Dares).

I. LES ENTREPRISES ADAPTÉES : UN INSTRUMENT IMPORTANT DE LA POLITIQUE DE L'EMPLOI DES TRAVAILLEURS HANDICAPÉS

A. LES PERSONNES EN SITUATION DE HANDICAP RENCONTRENT DES DIFFICULTÉS SPÉCIFIQUES D'INSERTION SUR LE MARCHÉ DU TRAVAIL

1. L'accès à l'emploi des travailleurs handicapés : quelques chiffres

Les personnes en situation de handicap constituent l'un des publics prioritaires de la politique de l'emploi au regard de leurs difficultés particulières d'insertion sur le marché du travail.

En 2020, 2,7 millions de personnes bénéficient d'une reconnaissance administrative d'un handicap . Elles représentent 6,5 % de l'ensemble des personnes en âge de travailler (de 15 à 64 ans), 4,1 % des actifs et 3,6 % des personnes en emploi (950 000 travailleurs handicapés sont en emploi dont 650 000 dans le secteur privé) 1 ( * ) .

Les principaux indicateurs de la politique de l'emploi attestent d'une insertion très dégradée des travailleurs handicapés sur le marché du travail par rapport à l'ensemble des actifs, qu'il s'agisse du taux d'emploi (inférieur de 29 points pour les travailleurs handicapés en 2020), du taux de chômage (supérieur de 6 points en 2020) ou encore de la part des demandeurs d'emploi encore inscrits sur les listes de Pôle emploi 12 mois après leur inscription (supérieur de 11 points en 2019).

Situation des travailleurs handicapés face à l'emploi

(en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Il convient de relever que le taux de chômage des travailleurs handicapés a connu une relative baisse sur les dernières années , de telle sorte que l'écart avec celui de l'ensemble des actifs est passé de 8 à 6 points entre 2015 et 2020.

Évolution du taux de chômage

(en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

Dans le même temps, suivant la même tendance que pour l'ensemble des actifs, l'ancienneté moyenne d'inscription sur les listes de Pôle emploi des demandeurs d'emploi à fin décembre de chaque année a connu une augmentation sensible. Cette évolution, si elle est cohérente avec la baisse du taux de chômage qui profite spontanément aux publics les moins éloignés de l'emploi, n'en demeure pas moins un sujet de préoccupation majeure, alors que l'ancienneté moyenne des demandeurs d'emploi en situation de handicap atteint presque deux ans et demi en 2020 .

Évolution de l'ancienneté moyenne d'inscription sur les listes de Pôle emploi
des demandeurs d'emploi à fin décembre de chaque année 2 ( * )

(en jours)

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire du rapporteur spécial

2. L'obligation d'emploi des travailleurs handicapés n'est toujours pas pleinement respectée

Depuis la loi n° 87-517 du 10 juillet 1987 en faveur de l'emploi des travailleurs handicapés, une obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH) s'impose aux employeurs publics et privés de plus de 20 salariés en application des articles L. 5211 à L. 5215-1 du code du travail. L'article L. 5212-2 du même code pose ainsi la règle selon laquelle les employeurs doivent employer une proportion minimale de 6 % de bénéficiaires de l'OETH (voir encadré infra ).

Les bénéficiaires de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés

Les différentes catégories de bénéficiaires de l'obligation d'emploi des travailleurs handicapés (OETH) sont listées à l'article L. 5212-13 du code du travail. Concernant le secteur privé, les catégories concernées sont :

- les travailleurs ayant la reconnaissance de la qualité de travailleurs handicapés (RQTH) attribuée par la Commission des droits et de l'autonomie des personnes handicapées ;

- les victimes d'accident du travail ou de maladie professionnelle ayant entraîné une incapacité permanente au moins égale à 10 % et titulaires d'une rente ;

- les titulaires d'une pension d'invalidité à condition que l'invalidité réduise au moins des deux tiers leur capacité de travail ;

- les titulaires d'une allocation ou d'une rente d'invalidité dans les conditions définies par la loi n° 91-1389 du 31décembre 1991 ;

- les titulaires de la carte « mobilité inclusion » portant la mention « invalidité » (article L. 241-3 du code de l'action sociale et des familles) ;

- les titulaires de l'allocation aux adultes handicapés.

Dans le secteur public, il existe des catégories supplémentaires :

- les bénéficiaires mentionnés à l'article L.241-2 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

- les bénéficiaires mentionnés aux articles L.241-3 et L.241-4 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de la guerre ;

- les bénéficiaires mentionnés aux articles L.241-5 et L.241-6 du code des pensions militaires d'invalidité et des victimes de guerre ;

- les agents publics reclassés (3 ème alinéa de l'article L.323-5 du code du travail) ;

- les agents publics bénéficiaires d'une allocation temporaire d'invalidité (4 ème alinéa de l'article L. 323-5 du code du travail).

Alternativement, cette obligation peut être mise en oeuvre par le versement d'une contribution annuelle à l'Association de gestion du fonds pour l'insertion professionnelle des personnes handicapées (Agefiph) pour les employeurs privés et au Fonds pour l'insertion des personnes handicapées dans la fonction publique (Fiphfp) pour les employeurs publics. Peuvent toutefois être déduites du montant de cette contribution, au titre de « l'emploi indirect » , les dépenses supportées directement par l'entreprise afférentes à des contrats de fourniture, de sous-traitance ou de prestations de services qu'elle passe notamment avec les entreprises adaptées (EA), les entreprises et services d'aide par le travail (ESAT) ainsi que les travailleurs indépendants handicapés ou encore les salariés portés bénéficiaires de l'OETH.

La cible de l'OETH n'était toujours pas atteinte en 2019, date des dernières données disponibles. Après une certaine progression lors de la première moitié des années 2010, la part des travailleurs handicapés dans l'effectif total des établissements assujettis est stabilisée à 3,5 % depuis 2016 3 ( * ) .

Part des travailleurs handicapés dans les effectifs des établissements
assujettis à l'OETH

(en pourcentage)

Source : Dares

Les données publiées par la direction de l'animation de la recherche et des études statistiques (Dares) du ministère du travail permettent en outre de mettre en évidence certaines caractéristiques des bénéficiaires de l'OETH, qui corroborent le constat de publics fragiles face au marché du travail. Ceux-ci sont davantage employés à temps partiel que l'ensemble des salariés, sont moins qualifiés, et constituent une population plus âgée et plus féminisée.

Caractéristiques des bénéficiaires de l'OETH

(en pourcentage)

Source : Dares


* 1 Source : direction de l'animation de la recherche et des études statistiques (Dares).

* 2 Catégories A, B et C.

* 3 Il convient de nuancer ce constat en relevant que les modalités d'application de l'OETH (exonérations des intérimaires et de certains métiers, survalorisation des séniors...) conduisaient en pratique à faire porter celle-ci sur 4,6 % et non 6 % des salariés des établissements assujettis (Dares analyses n°23, mai 2022).

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