B. LES PISTES D'ÉVOLUTION AFIN D'AMÉLIORER LA CONSOMMATION DES CRÉDITS

1. Une programmation intégrale des AE en début de gestion ou la mise en place d'une session de repêchage de dossiers non sélectionnés en début d'année

Pour améliorer la consommation des crédits du FEI, il apparait donc indispensable, pour les rapporteurs spéciaux, de programmer l'intégralité des AE ouvertes en LFI. Cette programmation totale permettrait également de réduire les risques d'utiliser le FEI pour financer les aléas de gestion.

À défaut d'une ouverture intégrale en début de gestion, il pourrait être envisagé, sur la base des projets déposés en fin d'année N-1 lors de l'appel à projets pour l'année N, de procéder à une session de rattrapage en cours d'année afin de sélectionner des projets rejetés en première intention.

En effet, en fonction du motif de rejet, les porteurs de projets pourraient compléter, au besoin, leur dossier avant ce rattrapage ce qui permettrait d'augmenter les taux d'AE programmées.

Cette pratique permettrait d'augmenter les taux d'engagement des AE mais également d'éviter les redéploiements vers d'autres programmes ou d'autres actions du programme 123.

Recommandation n° 11 : Programmer l'intégralité des autorisations d'engagements ouvertes en LFI au titre du FEI en début de gestion.

2. Un appui à l'ingénierie à renforcer

En premier lieu , il conviendrait de renforcer les moyens humains alloués aux structures d'ingénierie . À cet égard, il serait nécessaire de formaliser, dans un document, les missions de ces structures afin d'y lister l'accompagnement exact qui peut être apporté aux collectivités dans la réalisation de leurs projets.

En deuxième lieu, il faudrait développer la communication sur l'existence de ces structures, leurs moyens et leurs missions afin de sensibiliser le plus largement possible les collectivités susceptibles d'y recourir.

Enfin, une coordination entre ces structures devra être mise en place. Ainsi, une commission pour chacun des territoires d'outre-mer et réunissant tous les acteurs de l'ingénierie pourrait utilement être créée afin d'analyser les dossiers, les orienter aux mieux vers la structure adéquate au regard de la nature du projet et calibrer le soutien à mettre en oeuvre au regard des besoins.

Dans cette même logique de coordination, la création d'un guichet unique auprès duquel les collectivités pourraient se renseigner pour connaitre les aides en ingénierie dont elles peuvent bénéficier pourrait faciliter, en amont, le travail de coordination entre les différents acteurs.

Une recommandation dans ce sens avait d'ailleurs été faite dans le rapport relatif aux financements de l'État en outre-mer 46 ( * ) .

3. Des conventionnements qui pourraient être prolongés

Après signature de la convention, la collectivité maitre d'ouvrage dispose d'un délai maximal de 6 mois pour démarrer les travaux et de 4 ans pour achever totalement l'opération après le commencement des travaux.

À défaut de commencement de l'opération dans un délai d'un an ou si une année s'est écoulée entre deux situations de travaux consécutives, la subvention sera frappée de caducité conformément aux dispositions de l'article 3 du décret n° 2009-1776 du 30 décembre 2009. Dans cette hypothèse, les préfectures et hauts commissariats ont cependant la possibilité de reconduire exceptionnellement la validité de la décision pour une année supplémentaire.

À défaut, la subvention sera définitivement perdue avec un retrait des engagements et un remboursement des éventuelles avances versées.

À cet égard, certaines collectivités auditionnées ont fait part aux rapporteurs spéciaux de l'annulation de leur subvention faute de travaux commencés dans un contexte d'appels d'offres passés dans les délais mais revenus infructueux faute de candidatures.

Actuellement, les conditions pour pouvoir bénéficier d'une prorogation de la convention initiale sont définies au niveau local et l'administration centrale n'assure pas de suivi de ces prorogations (nombre et critères de décision).

Sur les 426 projets sélectionnés depuis 2016, 7 ont fait l'objet d'un avenant de prorogation. Dans ce contexte, il pourrait être envisagé de définir précisément les conditions permettant de pouvoir bénéficier de ce dispositif, de manière homogène dans tous les territoires, et d'informer les collectivités des conditions à remplir pour y prétendre.

4. La question des crédits non consommés : une réaffectation envisageable mais très limitée

Dans les cas de conventionnements non suivis d'engagement des travaux et de décaissement des premiers paiements, les conventions peuvent exceptionnellement être prorogées (cf. supra ). Dans le cas contraire, les crédits sont annulés.

Dans ce contexte, plusieurs collectivités ont fait part de leur souhait de réaffecter ces crédits annulés à des projets sur leur territoire.

Cette réaffectation pourrait prendre deux formes :

- une augmentation des taux de financement des projets déjà sélectionnés ;

- une réaffectation sur des projets déposés par la collectivité, éligibles mais non sélectionnés en début d'année. Cette réaffectation pourrait avoir lieu en cours d'année au cours d'une session de rattrapage à mettre en place (cf. supra).

Si cette démarche va partiellement à l'encontre du principe voulu par la DGOM de non territorialisation des crédits afin de garder une certaine souplesse de gestion, elle permettrait cependant d'augmenter les taux de consommation du FEI.

Cette réaffectation ne peut toutefois être que très limitée en raison du principe d'annualité budgétaire. En effet, des AE non suivies d'engagement juridique en année N ne peuvent être utilisées en année N+1. Il résulte de ce principe, que pour réaffecter des AE sur d'autres projets du même territoire (ou d'un autre territoire), il faudrait que le projet sélectionné en année N soit abandonné au cours de la même année. Cette situation, rare, est alors majoritairement la conséquence d'une décision de la collectivité porteuse de renoncer à un projet sélectionné.

5. La question de la territorialisation des crédits à étudier

Actuellement, le FEI est géré par les services du ministère des outre-mer et non par les préfectures afin de ne pas figer les enveloppes par territoire.

L'argument principal du ministère réside dans le fait qu'une répartition au prorata de la population défavoriserait les territoires les moins peuplés mais présentant des besoins importants d'investissement (ex : Mayotte).

Les collectivités auditionnées sont, toutefois, favorables à une territorialisation des crédits afin notamment d'avoir une plus grande visibilité au moment du dépôt des dossiers.

Si l'argument de la DGOM quant à l'iniquité démographique s'entend il pourrait être dépassé par un calcul pondéré qui prendrait en compte le nombre d'habitants de chaque territoire, la capacité d'autofinancement moyenne des collectivités de ce territoire et enfin les besoins d'investissement (notamment en fonction des ratios d'équipement).

La DGOM évoque cependant la complexité d'une clé de répartition pondérée mais reconnait que cette territorialisation, et subséquemment une gestion déconcentrée des crédits, permettrait une gestion facilitée à son niveau.

Cette solution nécessiterait, en contrepartie, des remontées régulières des préfectures et hauts commissariats vers les services de la DGOM afin de pouvoir assurer un suivi centralisé.

Si les rapporteurs spéciaux ne se positionnent pas sur un schéma au détriment d'un autre, ils estiment cependant qu'une réflexion doit être initiée sur la faisabilité et la pertinence d'une gestion déconcentrée des crédits ainsi que sur les modalités et critères qui pourraient sous tendre cette déconcentration.


* 46 Rapport d'information n°637 du 24 mai 2022 sur « les financements de l'

en outre-mer » des sénateurs Patient et Rohfritsch.

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