B. LE RESPECT DES DROITS DES OPPOSANTS POLITIQUES

1. L'empoisonnement d'Alexeï Navalny

Mercredi 26 janvier, l'Assemblée parlementaire a adopté, sur le rapport de M. Jacques Maire (Hauts-de-Seine - La République en Marche) , présenté au nom de la commission des questions juridiques et des droits de l'Homme, une résolution sur l'empoisonnement de M. Alexeï Navalny, au cours d'un débat présidé par Mme Nicole Trisse (Moselle - La République en Marche) , en tant que Vice-présidente de l'APCE.

Le rapporteur a rappelé que, le 20 août 2020, M. Alexeï Navalny a fait un malaise à bord de l'avion qui le ramenait de Tomsk à Moscou. Son avion a effectué un atterrissage d'urgence à Omsk et M. Alexeï Navalny a été transporté à l'hôpital local. Deux jours plus tard, il a été évacué à Berlin, où il est resté en soins intensifs à l'hôpital de la Charité jusqu'au 23 septembre 2020.

M. Jacques Maire a énoncé les éléments corroborant le fait que M. Alexeï Navalny a bien été empoisonné au moyen d'un inhibiteur organophosphoré de la cholinestérase avant de tomber malade le 20 août 2020. Il a constaté que cinq analyses différentes ont confirmé un empoisonnement par une substance structurellement apparentée à un groupe de produits chimiques répertoriés dans l'Annexe sur les produits chimiques de la convention sur les armes chimiques, qui sont généralement désignées sous le nom de « Novitchok ». Il a pris également note des rapports d'enquête qui indiquent la possibilité d'une implication d'agents du Service fédéral de sécurité de la Fédération de Russie (FSB) dans l'empoisonnement de M. Alexeï Navalny, ainsi que le fait que les autorités russes ont admis que celui-ci était surveillé par le FSB.

M. Jacques Maire a donc proposé que l'Assemblée parlementaire appelle la Fédération de Russie à ouvrir une enquête indépendante et effective sur l'empoisonnement de M. Alexeï Navalny, conformément à ses obligations au titre de la convention européenne des droits de l'Homme, à enquêter sur les allégations d'élaboration, de production, de stockage et d'utilisation d'une arme chimique sur le territoire russe et, en apportant des réponses substantielles aux questions posées par les autres États parties, conformément à la convention sur les armes chimiques, à parvenir à un accord sur une visite d'assistance technique de l'Organisation pour l'interdiction des armes chimiques dans les meilleurs délais.

M. André Gattolin (Hauts-de-Seine - Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants) a commencé par saluer la tonalité critique du rapporteur. Il a vigoureusement contesté le fait que la Russie ait décidé d'inscrire M. Alexeï Navalny sur la liste des terroristes et des extrémistes alors que celui-ci est une victime. Il a ensuite appelé à se poser la question de la responsabilité de la société Yves Rocher dans le cadre de la condamnation à des peines disproportionnées de M. Alexeï Navalny et il a dénoncé les conditions inhumaines de sa détention. Dans cette affaire, aucune des règles régissant l'État de droit n'est respectée. Il a conclu en appelant à la libération immédiate et sans condition de M. Alexeï Navalny.

2. En finir avec les disparitions forcées sur le territoire du Conseil de l'Europe

Jeudi 27 janvier, l'Assemblée parlementaire a adopté, sur le rapport de M. André Gattolin (Hauts-de-Seine - Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants) , présenté au nom de la commission des questions juridiques et des droits de l'Homme, une résolution et une recommandation pour en finir avec les disparitions forcées sur le territoire du Conseil de l'Europe.

En ouverture de ce débat, le rapporteur a profondément regretté que les disparitions forcées restent encore aujourd'hui une pratique criminelle fréquente en Europe. Il a rappelé les précédentes résolutions de l'APCE sur les « personnes disparues en Biélorussie », sur les « conséquences humanitaires du conflit entre l'Arménie et l'Azerbaïdjan/le conflit du Haut-Karabakh » et sur les « enfants réfugiés et migrants disparus en Europe ». Les disparitions forcées violent des droits humains essentiels, notamment les articles 2 et 3 de la convention européenne des droits de l'Homme. Les États ont ainsi l'obligation inconditionnelle d'enquêter sur toutes les allégations sérieuses de telles violations et de les punir. Les disparitions forcées sont également interdites par le droit international des droits humains et le droit international humanitaire.

L'incertitude dans laquelle vivent les proches des personnes disparues a un impact psychologique, social, juridique et économique néfaste. Dans un contexte de guerre, les disparitions menacent également la stabilité et empêchent une réconciliation durable. L'augmentation des cas de disparitions dans les conflits armés est alarmante.

Enfin, le rapporteur a fermement soutenu la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées, qui codifie les principes fondamentaux de l'action contre les disparitions forcées et souligne l'importance du rôle de la société civile dans ce domaine. En conclusion, il a dressé des recommandations spécifiques à tous les États membres et observateurs visant à éradiquer les disparitions forcées.

S'exprimant au nom du groupe ADLE, Mme Nicole Trisse (Moselle - La République en Marche), présidente de la délégation française , a déploré que plusieurs dizaines de milliers de personnes aient disparu sans explication pour leurs proches en Europe, soit en raison de conflits ouverts ou latents, soit en raison de leur opposition au pouvoir en place. S'ajoutent, ces dernières années, les disparitions de migrants victimes de réseaux de traite d'êtres humains, d'exploitation sexuelle ou de trafics d'organes. Au nom de son groupe, elle a regretté que vingt-six États membres du Conseil de l'Europe n'aient toujours pas ratifié la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Elle a appelé à promouvoir la signature de cette convention, rappelant également le travail du Comité de prévention de la torture et des traitements inhumains et dégradants, ainsi que la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l'Homme.

M. François Calvet (Pyrénées-Orientales - Les Républicains) a également encouragé les États membres du Conseil de l'Europe à signer et à ratifier la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Pour lui, le Conseil de l'Europe peut jouer un rôle actif pour promouvoir ce traité. Il a également appelé le Comité des Ministres à veiller à la bonne application des arrêts de la Cour européenne des droits de l'Homme, rappelant que le premier arrêt concernant les disparitions forcées, qui concernait la Turquie, date de 1998. Aujourd'hui, la plupart des arrêts concernent la Fédération de Russie, et notamment le Caucase du Nord. Il a donc appelé la Fédération de Russie à honorer ses engagements et à mettre pleinement en oeuvre ces arrêts.

Présent lors du débat et n'ayant pas pu prendre la parole dans le temps fixé par le service de la séance, M. Bernard Fournier (Loire - Les Républicains), a fait annexer son intervention au compte-rendu dans les conditions fixées par le Règlement de l'APCE. Pour lui, les disparitions forcées correspondent à une pratique criminelle qui viole des droits humains les plus élémentaires. Cette pratique contraire aux droits de l'Homme est encore malheureusement trop répandue en Europe notamment dans les pays du Caucase du Sud, en Arménie, en Azerbaïdjan ou en Géorgie. Il a rappelé que derrière chaque personne disparue, il y a non seulement un individu qui est privé de liberté ou assassiné, mais aussi une famille qui n'a plus aucune nouvelle de l'un de ses membres. Puis, il a appelé les États membres du Conseil de l'Europe à se mobiliser contre les disparitions forcées en ratifiant la convention internationale pour la protection de toutes les personnes contre les disparitions forcées. Enfin il a invité le Comité des Ministres à créer un groupe de travail spécialisé sur les disparitions forcées.

Les thèmes associés à ce dossier

Page mise à jour le

Partager cette page