CHAPITRE 2
LES CRÉDITS CONSACRÉS AU COMMERCE
ET À L'ARTISANAT
(RAPPORTEUR POUR AVIS : M. SERGE BABARY)

Alors qu'au sortir de la crise économique, dans laquelle ils ont été durement éprouvés, le commerce et l'artisanat requièrent plus que jamais une politique de long terme et une stratégie cohérente de la part du Gouvernement, la mission « Économie » du PLF 2022 ne contient quasiment plus aucun crédit qui leur soit spécifiquement dédié.

Force est de constater, dès lors, que ces secteurs ne bénéficient que d'un saupoudrage regrettable de crédits épars, sans cohérence ni vision stratégique.

Dans le détail, cette mission ne retrace plus, à destination des commerçants et artisans, que les crédits alloués à l'initiative France Num et ceux bénéficiant aux métiers d'art.

Concernant France Num, la plateforme continue de pâtir d'un manque certain de notoriété et d'une insuffisante fiabilisation des professionnels qui y proposent leurs prestations. En outre, les actions entreprises pour favoriser la transition numérique des PME restent largement en deçà des besoins exprimés par les entrepreneurs, et les formations à la numérisation restent concentrées dans certains territoires uniquement.

Les métiers d'art, quant à eux, gagneraient à bénéficier d'une promotion plus large, ce qui requiert un renforcement du soutien budgétaire apporté à l'Institut national des métiers d'art (INMA), dont les ressources propres ressortent fragilisées de la crise.

I. AU SEIN DE LA MISSION « ÉCONOMIE » : QUASIMENT PLUS AUCUN CRÉDIT CONSACRÉ À CES SECTEURS, HORMIS CEUX DE FRANCE NUM ET CEUX DÉDIÉS AUX MÉTIERS D'ART

Alors qu'une action dédiée aux « Commerce, artisanat et services » existait au sein de la mission « Économie » jusqu'à la LFI pour 2019, elle a été fusionnée, à compter de cette date, au sein de l'action n° 23 intitulée « Industrie et services ». Sans surprise, les quelques crédits qui étaient alloués au commerce et à l'artisanat ont été rapidement asséchés, notamment en raison de la disparition du fonds d'intervention pour la sauvegarde de l'artisanat et du commerce (Fisac). Désormais, seuls l'initiative France Num et l'Institut national des métiers d'art (INMA) bénéficient encore, au titre du commerce et de l'artisanat, de crédits en provenance de cette mission.

Cet état de fait rappelle, s'il en était besoin, l'absence de politique nationale en faveur du commerce et de l'artisanat, déplorée avec constance par la commission des affaires économiques du Sénat.

A. FRANCE NUM : UN CENTRE DOCUMENTAIRE BIENVENU, MAIS UN TROP FAIBLE ENGAGEMENT DANS L'ACCOMPAGNEMENT DE LA TRANSITION NUMÉRIQUE DES ENTREPRISES

1. Une initiative hybride, à la fois simple distributeur de crédits à divers opérateurs, centre documentaire et plateforme de mise en relation entre « activateurs » et entrepreneurs

L'initiative France Num, créée le 15 octobre 2018 et animée par la Direction générale des entreprises, entend démontrer les apports concrets du numérique pour une petite entreprise et faciliter la réalisation concrète de cette transformation grâce à des ressources pratiques, des aides et un réseau de conseillers (appelés « activateurs »). Son public cible potentiel est constitué d'environ 1,7 million de TPE et PME.

Pour ce faire, France Num déploie une palette d'outils et d'actions variés, recensés plus en détail par le rapporteur dans son avis budgétaire de l'an dernier sur cette mission, et qui vont des campagnes de communication à la télévision ou sur internet à la mise en relation des entrepreneurs désireux d'engager ou approfondir leur transition numérique et de professionnels dont c'est le métier (développeurs web, etc., surnommés les « activateurs »), en passant par la mise à disposition de ressources documentaires sur les bienfaits de la numérisation.

Suite au déclenchement de la crise sanitaire et économique, à l'occasion de laquelle le manque de numérisation des petits commerçants français est apparu préoccupant, France Num a également piloté la mise en place de 30 000 diagnostics numériques.

a) En matière de diagnostics numériques, France Num se contente d'un rôle de distributeur de crédits au réseau consulaire, sans apporter de réelle plus-value

Afin d'encourager et de faciliter la transition numérique des TPE et PME dont la crise a montré le faible degré de numérisation et l'absence de réel soutien public en la matière, l'initiative France Num s'est vue doter de fonds supplémentaires par la loi de finances rectificative n° 3 pour 2020. Ainsi, si la LFI pour 2020 prévoyait seulement 700 000 euros en AE et CP, l'initiative disposait in fine de 11,7 millions d'euros d'AE et de 12 millions d'euros de CP à partir de juillet 2020, pour :

• réaliser 30 000 diagnostics de TPE entre 2020 et 2021 afin de définir avec elles leurs besoins ainsi qu'un plan d'action pour engager leur numérisation ;

• financer des « formations-actions » réalisées par une trentaine d'opérateurs sélectionnés sur appel d'offres par Bpifrance.

Par ailleurs, pour poursuivre ces deux objectifs, la LFI pour 2021 a ouvert de nouveaux crédits pour France Num, à hauteur de 36,1 millions d'euros en AE et de 22 millions d'euros en CP.

Un accord officiel a ainsi été signé le 12 octobre 2020 entre CCI France et le ministre chargé de l'économie, des finances et de la relance, aux termes duquel l'État s'engage à stabiliser le niveau de ressources affectées aux CCI en 2021, en échange notamment d'un renforcement de la mobilisation du réseau consulaire dans la mise en oeuvre du plan de relance, ce qui passait notamment par la réalisation d'une partie desdits diagnostics.

Menée du 20 novembre 2020 au 20 mars 2021 à partir de leur plateforme Digipilote, l'opération des CCI a concerné 5 000 entreprises, prioritairement dans le secteur du commerce de détail et de l'hôtellerie-restauration. Mêlant diagnostics online et entretiens personnalisés, elle a notamment permis de mettre en évidence que les TPE-PME concernées avaient un niveau de maturité numérique « moyen-bas » 5 ( * ) , et que la cohorte suivie était massivement en « fragilité numérique », voire en « retard numérique ». Par ailleurs, sur les 5 000 ressortissants diagnostiqués, 64 % ne réalisent pas de vente en ligne.

Suite au diagnostic, un plan d'action individualisé a été proposé aux entreprises. Dans les trois mois qui ont suivi le diagnostic, 3 005 entreprises (60 %) avaient concrétisé au moins une action numérique, majoritairement en matière de présence et de visibilité en ligne. Environ 40 % des entreprises ayant entrepris une action numérique l'ont fait en étant accompagnées par le réseau des CCI.

De son côté, le réseau des chambres des métiers et de l'artisanat a également conclu une convention avec l'État portant sur 5 000 diagnostics numériques ; par ailleurs, l'engagement d'en réaliser 10 000 supplémentaires d'ici le 31 décembre 2021, financés par France Num, a également été pris. En octobre 2021, environ 9 500 diagnostics avaient été soit finalisés, soit étaient en cours. 73 % des entreprises avaient réalisé ou engagé une ou plusieurs actions.

Au total, le rôle de France Num s'est limité à accorder une subvention de 300 € par diagnostic au réseau consulaire (soit, par exemple, 1,5 million d'euros aux CCI). Autrement dit, France Num n'a servi que de financeur, sans aucune mise en oeuvre opérationnelle du côté de la DGE. Que le Gouvernement confie la réalisation de telles démarches aux acteurs compétents et reconnus est sain, mais le rapporteur s'étonne de la concomitance de ces financements d'actions consulaires par le budget général alors que, dans le même temps, le Gouvernement a choisi, depuis 2019, de réduire drastiquement la fiscalité affectée au réseau. Un schéma impliquant une révision de la trajectoire baissière du financement du réseau par la taxe affectée, afin de pérenniser ce type d'actions sans passer par le budget général, lui paraîtrait de nature à mieux clarifier la répartition des compétences entre l'État et le réseau consulaire.

Ce schéma paraîtrait d'autant plus logique que les CCI, outre ces 5 000 diagnostics, en ont réalisé 7 500 en leur nom en 2021, c'est-à-dire sans financement de France Num.

Cet état de fait soulève en outre d'autres préoccupations : 30 000 diagnostics étant prévus dans la LFI 2021, 5 000 ayant été réalisés par les CCI et 15 000 par les CMA, quand seront réalisés les 10 000 diagnostics restants ?

b) L'intervention de France Num s'apparente souvent à un saupoudrage de crédits dont le suivi et la mesure de l'efficacité sont inexistants
(1) Les « formations-actions » : un dispositif à l'efficacité quasi inexistante un an après son lancement

Au-delà du financement de diagnostics numériques externalisés, France Num finance également des « formations-actions » et des « accompagnements-actions », à hauteur de 300 € par prestation, réalisées par des opérateurs sélectionnés à l'issue d'un appel d'offres organisé par Bpifrance 6 ( * ) .

Deux vagues ont déjà eu lieu et 30 opérateurs ont été choisis, avec l'ambition de toucher plus de 70 000 entreprises. Leur mission est de recruter des TPE et PME éloignées du numérique pour les former à des outils et les sensibiliser à la transformation digitale.

Or, force est de constater que ce dispositif est encore très loin d'être efficace. Outre son caractère confidentiel ( cf. infra ), le petit nombre d'opérateurs se traduit par un très faible nombre de formations/accompagnements disponibles et une couverture très inégale du territoire.

Par exemple, lorsqu'il est demandé un accompagnement pour « développer mes ventes, mon activité » (vraisemblablement un des souhaits les plus exprimés par les TPE-PME), sous forme de « sensibilisation » et en « présentiel », France Num ne donne accès qu'à 5 formations... toutes situées en Provence-Alpes-Côte d'Azur. En outre, aucun des 5 liens prévus pour s'inscrire à ces 5 formations ne fonctionne.

De même, si l'entrepreneur souhaite « communiquer avec mes clients, trouver de nouveaux clients », sous forme de « sensibilisation » et « en ligne », il obtient 10 possibilités : 9 en Auvergne-Rhône-Alpes, 1 en Provence-Alpes-Côte d'Azur. S'il souhaite que la formation ait lieu en présentiel, il n'obtient plus que 2 propositions, les 2 en région PACA !

Si une TPE souhaite être formée au « travail à distance », sous forme de « sensibilisation » et en « présentiel », elle n'obtient qu'un choix : une formation en PACA. Si elle accepte de suivre la formation « en ligne » , 14 propositions lui sont faites : 3 en Île-de-France, 4 en Auvergne-Rhône-Alpes, 2 en PACA, 1 dans le Grand Est, 1 dans les Hauts-de-France, 1 en Nouvelle-Aquitaine, 1 dans les Pays de la Loire et 1 à La Réunion.

Le rapporteur s'alarme donc de la situation d'un dispositif pouvant mobiliser jusqu'à une vingtaine de millions d'euros de crédits budgétaires et dont l'utilité est, à date, quasi-nulle. Il est urgent que France Num soit en mesure de proposer un ensemble de formations certifiées, contrôlées, couvrant l'ensemble du territoire et pouvant se tenir en présentiel 7 ( * ) . En l'état, la prestation offerte par les pouvoirs publics ne semble pas sérieuse, alors même que France Num est devenu la clef de voûte de la politique du Gouvernement de numérisation des entreprises.

Un an et demi après la crise, la transition numérique des entreprises, a fortiori des commerçants, ne semble toujours pas bénéficier d'une attention suffisante, ce qui se traduit notamment dans les chiffres d'accompagnements-actions : seules 500 TPE-PME y ont eu recours, à fin septembre.

« Tout laisse penser que, jusqu'à présent, le Gouvernement
a concentré sa politique sur la communication tous azimuts
de chiffres impressionnants (dizaines de millions d'euros pour France Num,
chèque de 500 € pour la numérisation de 120 000 entreprises, 30 000 diagnostics réalisés), sans égard pour la qualité des services proposés aux entreprises souhaitant s'engager
dans cette transition numérique. »

(2) Les chèques numériques de 500 € semblent avoir trouvé leur public, mais il n'y a pas de suivi de leur usage

L'un des axes majeurs de la communication du Gouvernement sur son soutien à la numérisation des commerçants a résidé, fin 2020, dans l'octroi d'un chèque de 500 € aux TPE souhaitant couvrir leurs dépenses numériques 8 ( * ) (solution pour lancer une activité en ligne, création d'un site internet, adhésion à une plateforme en ligne, logiciel, diagnostic, etc.), dans la limite de 120 000 entreprises.

En octobre 2021, 112 180 chèques avaient été distribués 9 ( * ) . La simplicité et le succès de la mesure rendent légitimes la poursuite et l'amplification de la démarche ; or, ainsi que l'a confirmé la DGE au rapporteur, l'opération ne sera pas renouvelée, ce qui est regrettable.

« Le soutien à la numérisation des entreprises doit s'inscrire dans la durée,
être continu, au plus près des besoins des TPE-PME. Le chèque numérique devrait être renouvelé, car il est l'une des rares mesures du Gouvernement
qui ait les faveurs des entrepreneurs »

(3) Aucun contrôle de la qualité des « activateurs » présents sur la plateforme n'est aujourd'hui mis en place

Environ 3 500 « activateurs », c'est-à-dire des professionnels de la numérisation, sont inscrits sur la plateforme France Num, afin d'apporter leurs services aux entrepreneurs souhaitant engager ou approfondir leur transition numérique. Ils représentent donc le pilier opérationnel sur lequel peuvent s'appuyer les TPE-PME qui souhaitent « se lancer » dans la démarche, généralement peu familières de ce domaine.

Or au-delà de contrôles formels comme la présence de mentions légales ou le bon enregistrement de l'entreprise, France Num ne réalise aucun contrôle de la qualité des prestations proposées ni de la fiabilité des activateurs. Alors que le rapporteur soulignait déjà ce manque majeur dans l'avis budgétaire de l'an dernier, aucune évolution n'a eu lieu en 2021, alors que le nombre d'activateurs a doublé.

Si la DGE a indiqué au rapporteur souhaiter renforcer la qualité des données descriptives des activateurs et de leurs prestations, cette démarche ne suffit pas, car elle ne permet pas de juger de la qualité effective desdites prestations. Le constat effectué l'an passé par le rapporteur s'applique donc toujours : « les petites entreprises non numérisées sont loin de maîtriser, dans leur ensemble, les concepts et le vocabulaire d'un secteur d'activité particulièrement technique et disposant d'un « jargon » propre. Ce faisant, une asymétrie peut se créer entre la TPE et l'activateur, renforcée par le fait que l'utilisateur considère que ce dernier est « validé » par l'État du fait de sa présence sur un site de l'administration 10 ( * ) » .

À la question du rapporteur de savoir si la DGE prévoyait de se doter d'un dispositif de suivi des actions engagées suite à la mise en relation TPE/activateur (type d'action, pourcentage d'actions menées à leur terme, etc.), il a été répondu qu'un dispositif aussi fin n'était pas prévu, mais qu'un court questionnaire de satisfaction devrait être bientôt prévu à destination des entrepreneurs, ainsi qu'une révision de la charte d'engagement des activateurs.

Il est urgent d'engager un processus de fiabilisation des activateurs présents sur France Num, qui pourrait passer par exemple par une labellisation de ces professionnels.

c) Une communication de France Num encore trop irrégulière et confidentielle et des supports informationnels encore trop peu connus

Afin de toucher un public de TPE et PME éloignées du numérique, et de se faire connaître, France Num multiplie les initiatives :

• depuis avril 2020, France Num propose une chronique webradio intitulée « Accélérer avec le numérique », diffusée dans la matinale de FrenchWeb.fr chaque mardi et vendredi ;

• France Num est également à l'origine de 3 épisodes de 26 minutes, diffusés entre février et avril 2021 sur BFMTV, RMC Story et RMC Découvertes, intitulés « Connecte ta boîte » et qui relatent l'histoire de 3 TPE accompagnées dans leur transformation numérique durant 2 mois par des experts. L'audience cumulée pour l'ensemble des diffusions s'est élevée à 15 millions de téléspectateurs. Les « replays » sur internet ont généré 20 000 vues, ce qui témoigne cependant d'un faible bouche-à-oreille. Une seconde saison sera diffusée dans les prochains mois avec 3 nouveaux épisodes ;

• France Num est à l'initiative d'un MOOC « Ma TPE a rendez-vous avec le numérique » qui vise à illustrer et mettre en exergue les bénéfices du numérique. La formation a été diffusée à 3 reprises en 2021 (et 1 en 2022) sur la plateforme publique FUN MOOC opérée par France Université Numérique.

Toutes ces initiatives sont utiles et doivent être saluées. Certaines ont permis effectivement d'accroître la notoriété de France Num, comme les épisodes télévisés qui se sont traduits par une augmentation de 20 % des pages vues sur le site de France Num pendant la période de diffusion, et un surcroît de 900 abonnés Twitter.

Pour autant, force est de constater que France Num continue de bénéficier d'une très faible notoriété, soit que certaines de ses initiatives soient en fait réalisées par d'autres acteurs plus familiers des entreprises (comme le réseau consulaire), soit que les moyens déployés pour se faire connaître restent insuffisants.

Le rapporteur note ainsi que plusieurs actions de communication de France Num présentent le défaut de se tenir sur des supports eux-mêmes peu consultés. Ainsi du MOOC, ou de la chronique dans la matinale Frenchweb.fr. Il considère donc que tant que la majeure partie de la communication « grand public » de France Num continuera de reposer sur des canaux aussi confidentiels, il est vain d'en atteindre une plus grande notoriété (qui plus est si les défaillances de qualité relevées supra persistent).

Dès lors, il est peu surprenant que la mise en relation entre TPE-PME et « activateurs » ne remporte qu'un succès très limité : le formulaire « contacter le conseiller » n'a ainsi reçu que 4 000 vues uniques entre le 1 er janvier et le 30 octobre 2021 (pour 3 500 activateurs)...

Il réitère donc sa proposition que France Num lance une vaste campagne de communication sur les principales chaînes de télévision et de radio ainsi que dans la presse quotidienne régionale, à des heures de grande écoute et sur plusieurs mois.

2. Les actions d'accompagnement des entreprises dans leur transition numérique, qui ont bénéficié d'une hausse importante de crédits en 2021, ne devraient toutefois plus être financées à compter de 2023

Les crédits demandés pour 2022 pour l'initiative France Num proviennent de deux missions budgétaires différentes :

• 14,1 millions de crédits de paiement sont prévus au titre de la mission « Plan de relance » ;

• 320 000 euros d'AE et 780 000 euros de CP sont prévus au titre de la mission « Économie » pour financer les dépenses de fonctionnement de ce dispositif, autres que celles de personnel.

Soit un total de près de 15 millions d'euros de CP pour 2022, contre près de 24 millions d'euros en 2021 (- 37,5 %), qui se répartissaient ainsi : 22 millions d'euros de CP en provenance de la mission « Plan de relance » et près de 2 millions d'euros versés depuis la mission « Économie ».

L'analyse des crédits conduite par le rapporteur met cependant en évidence une absence de projection, en termes budgétaires, au-delà de 2022. En effet, en loi de finances initiale pour 2021, la mission « Plan de relance » prévoyait 36,1 millions d'euros (en AE) et 22 millions d'euros (en CP) pour France Num. Or la mission ne prévoit pour 2022 que 14,1 millions d'euros de CP, ce qui correspond exactement à la part des AE qu'il reste à décaisser une fois décomptés les 22 millions d'euros payés en 2021, et aucun nouveau crédit d'AE.

Autrement dit, le Gouvernement ne prévoit pas à ce jour de nouveaux fonds pour que France Num continue ses démarches de sensibilisation et d'accompagnement collectif des TPE et PME engagés dans la transition numérique. Si ce constat n'empêche pas une éventuelle ouverture de crédits dans le PLF pour 2023, il peut être raisonnablement supposé que la tenue des élections présidentielles joue un rôle dans le choix de ne pas s'engager au-delà de 2022, à rebours des logiques de visibilité et de long terme nécessaires à la mise en place d'une telle politique publique.

Évolution des AE et CP alloués à France Num entre 2019 et 2022 ,
en millions

Source : Commission des affaires économiques du Sénat.

Par ailleurs, le rapporteur souligne qu'en loi de finances initiale pour 2021, la mission « Économie » avait abondé de 1,98 million d'euros (en AE et CP) l'initiative France Num, contre 780 000 € de CP pour 2022 - soit une diminution de 61 %, pour financer les dépenses de fonctionnement autres que celles de personnel. Pourtant, rien dans le projet annuel de performance pour 2022 transmis au Parlement n'indique les raisons de cette diminution ; plus encore, les éléments d'explication sont un simple copier-coller de ceux pour 2021, sans égard, donc, pour cette baisse de 1,2 million d'euros.

En dépit des lacunes et insuffisances recensées par le rapporteur dans le fonctionnement et le déploiement de France Num, un abandon des démarches d'accompagnement et de formation ne saurait être envisagé.

Face aux difficultés rencontrées, il faut faire plus et mieux, et non pas moins. Le rapporteur est en effet convaincu que les obstacles constatés sont surmontables et appelle à ne pas assécher les crédits d'une initiative bienvenue et qui pourrait jouer un réel rôle dans la numérisation nécessaire des TPE-PME, pour peu que le Gouvernement fasse preuve de volontarisme.


* 5 À partir d'un questionnaire de maturité reposant sur cinq thématiques principales : transformation de l'offre (présence en ligne, webmarketing, voix du client, expérience client), fonctionnement interne (équipements et usages, dématérialisation), ressources humaines (compétences et formations), data (sécurisation des données, sécurité et conformité), projets numériques (stratégie numérique).

* 6 Le troisième appel à projets s'est terminé le 29 octobre 2021.

* 7 À cet égard, la DGE a indiqué au rapporteur dans sa réponse au questionnaire que « la DGE, via l'opérateur Bpifrance, est attentive à ce point et à l'ancrage local et sectoriel des projets retenus ». Il semble qu'une marge de progression existe encore.

* 8 Les factures de dépenses de numérisation d'un montant minimum de 450 euros ont été demandées en pièces justificatives.

* 9 L'opération a eu lieu du 21 janvier au 31 juillet 2021, initialement à destination des commerces fermés administrativement puis, à partir du 6 mai, au bénéfice des TPE de moins de 11 salariés.

* 10 Avis n° 139 (2020-2021) de M. Serge Babary, Mme Anne-Catherine Loisier et M. Franck Montaugé, fait au nom de la commission des affaires économiques, déposé le 19 novembre 2020, sur la mission « Économie ».

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