N° 210

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2019-2020

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 décembre 2019

RAPPORT D'INFORMATION

FAIT

au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) par la mission d' information sur les nouveaux territoires de la culture ,

Par M. Antoine KARAM et Mme Sonia de la PROVÔTÉ,

Sénateurs

(1) Cette commission est composée de : Mme Catherine Morin-Desailly , présidente ; M. Max Brisson, Mme Catherine Dumas, MM. Jacques Grosperrin, Antoine Karam, Mme Françoise Laborde, MM. Jean-Pierre Leleux, Jacques-Bernard Magner, Mme Colette Mélot, M. Pierre Ouzoulias, Mme Sylvie Robert , vice-présidents ; MM. Alain Dufaut, Claude Kern, Mme Claudine Lepage, M. Michel Savin , secrétaires ; MM. Maurice Antiste, David Assouline, Mmes Annick Billon, Maryvonne Blondin, Céline Boulay-Espéronnier, Marie-Thérèse Bruguière, Céline Brulin, M. Joseph Castelli, Mmes Laure Darcos, Nicole Duranton, M. André Gattolin, Mme Samia Ghali, MM. Abdallah Hassani, Jean-Raymond Hugonet, Mmes Mireille Jouve, Claudine Kauffmann, MM. Guy-Dominique Kennel, Laurent Lafon, Michel Laugier, Mme Vivette Lopez, MM. Jean-Jacques Lozach, Claude Malhuret, Christian Manable, Jean-Marie Mizzon, Mme Marie-Pierre Monier, MM. Philippe Nachbar, Olivier Paccaud, Stéphane Piednoir, Mme Sonia de la Provôté, MM. Damien Regnard, Bruno Retailleau, Jean-Yves Roux, Alain Schmitz, Mme Dominique Vérien .

L'ESSENTIEL

« La réalité, c'est que les politiques culturelles se font partout en France, dans tous nos territoires », indiquait le ministre de la culture, Franck Riester le 31 janvier 2019 lors de ses voeux aux professionnels de la culture . Sous l'effet du mouvement de décentralisation, les collectivités territoriales ont acquis une véritable autonomie au cours des dernières décennies en matière de politique culturelle, au point d'être aujourd'hui devenues essentielles au développement de l'offre culturelle dans notre pays.

Les politiques culturelles sont une responsabilité partagée entre l'État, les collectivités territoriales et leurs groupements, les acteurs culturels et les partenaires publics, associatifs et privés. La loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « NOTRe », a en effet maintenu le principe de la compétence partagée des collectivités territoriales dans le domaine de la culture . La loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l'architecture et au patrimoine, dite « LCAP », a précisé les objectifs de l'intervention des collectivités publiques dans le domaine de la création artistique, qui ne faisait jusqu'ici l'objet d'aucune disposition législative.

Décidé pour tenir compte des contraintes pesant sur les budgets publics et éviter les effets dévastateurs que le désengagement d'une collectivité pourrait provoquer sur l'offre culturelle, le maintien de la compétence partagée n'en pose pas moins la question de l'effectivité de l'intervention des collectivités territoriales , compte tenu de l'absence de compétences obligatoires dans un grand nombre de secteurs de la culture. Il soulève également des inquiétudes sur la capacité de ces collectivités à articuler correctement leurs actions pour garantir un exercice harmonieux des compétences.

Ces inquiétudes sont d'autant plus fortes que l'acte III de la décentralisation est venu profondément bouleverser l'architecture territoriale de la République, avec un triple mouvement de renforcement de l'intercommunalité, de développement des métropoles et d'accroissement du rôle des régions susceptible d'éloigner l'offre culturelle des citoyens ou de conduire à une harmonisation des politiques régionales sur les moins-disantes.

Or, les lois NOTRe et LCAP précitées ont toutes deux également reconnu le développement des droits culturels des personnes comme l'horizon des politiques culturelles. Un nouvel acte de la décentralisation devrait être présenté au Parlement dans quelques mois, dont l'ambition est à la fois d'approfondir la décentralisation et la déconcentration, mais aussi de faciliter la différenciation, afin de mieux définir avec chaque territoire une réponse adaptée et sur-mesure.

Face à la nécessité de développer une culture de proximité pour briser les fractures culturelles, comment faire en sorte que la construction des politiques culturelles dans les territoires se fasse davantage à la fois avec et pour les territoires ? Lors de ses voeux aux professionnels de la culture il y a un an, le ministre de la culture indiquait son souhait qu'elles puissent « partir des territoires, et non être appliquées aux territoires ».

Dans cette perspective, la mission d'information sur les nouveaux territoires de la culture s'est attachée à mesurer l'impact qu'ont eu les réformes territoriales menées au cours des dernières années sur les politiques culturelles, tout en s'interrogeant sur les moyens de réduire les inégalités territoriales en matière d'accès à la culture .

Elle a fait le choix de formuler des propositions qui concernent tous les territoires et ont vocation à être adaptées en fonction des particularités locales , y compris dans les départements et régions d'outre-mer, pour lesquels des efforts restent à fournir pour les aider à combler leur retard en matière d'équipement culturel.

Les travaux de la mission d'information ont permis de confirmer l'importance de l'implication des collectivités territoriales dans le financement des politiques culturelles qui est deux fois supérieure aux crédits qu'y consacre l'État (8,7 milliards d'euros en 2017 contre 3,6 milliards d'euros). Plus de la moitié de ces dépenses est consacrée au soutien à l'expression artistique et aux activités culturelles tandis qu'un gros tiers porte sur le soutien de la conservation et à la diffusion du patrimoine.

Comme pour le sport, qui constitue également une compétence partagée, les collectivités territoriales poursuivent au travers de leur intervention culturelle des objectifs de développement local, d'attractivité des territoires et de cohésion sociale qui les incitent à financer des actions qui ne relèvent pas de leurs obligations légales.

La mission d'information a élaboré quinze propositions visant à préserver cette dynamique en essayant de mieux coordonner les initiatives et destinées à renforcer la lutte contre les inégalités territoriales dans l'accès à la culture.

• Orientation n° 1 : maintenir la compétence culturelle partagée reconnue par la loi NOTRe du 7 août 2015.

Il serait contre-productif de faire de la culture une compétence obligatoire compte tenu du rôle joué par la volonté politique des élus dans le développement de ces politiques locales.

• Orientation n° 2 : ne pas prévoir au niveau national de répartition de la compétence culturelle entre les différents échelons territoriaux.

Les spécificités locales sont nombreuses et toute répartition serait nécessairement arbitraire et pourrait déstabiliser l'action culturelle dans certains territoires.

• Orientation n° 3 : élaborer au niveau des intercommunalités et des métropoles de vrais projets de territoire, formalisés dans le cadre de contrats de territoire, qui ne se limitent pas exclusivement à la gestion de grands équipements.

Les communes restent encore aujourd'hui les principaux financeurs de la culture. Une mutualisation permettrait de développer et de consolider les actions menées, dès lors qu'il s'agit de vraies politiques de territoire, qui ne laissent pas de côté les zones rurales et périurbaines.

• Orientation n° 4 : mettre en place des mécanismes financiers favorisant les coopérations et l'engagement de certains niveaux de collectivités.

La contractualisation est un élément important pour inscrire des engagements dans la durée et offrir aux acteurs culturels des assurances budgétaires sur plusieurs années.

Le fonds incitatif et partenarial pour la restauration des monuments historiques des petites communes à faibles ressources pourrait constituer un modèle pour permettre à différents échelons de collectivités de concourir davantage à des projets communs.

• Orientation n° 5 : mieux coordonner les interventions des collectivités publiques pour permettre à l'État et aux collectivités territoriales de mieux exercer leur responsabilité conjointe en matière culturelle.

Les doublons, les incohérences et les carences restent nombreux, ce qui implique de réaffirmer la nécessité de mieux coordonner les actions des différents acteurs, en tenant compte de leurs intérêts propres, conformément au principe de libre administration des collectivités territoriales.

• Orientation n° 6 : décliner au niveau régional le Conseil des territoires pour la culture (CTC) pour faire émerger un organe politique de coordination plus opérationnel.

Le bilan des commissions culture des CTAP apparaît décevant et en tout état de cause peu opérationnel. La déclinaison territoriale du CTC permettrait d'instituer un outil permettant de définir les grandes orientations stratégiques au niveau régional en lien avec l'État.

• Orientation n° 7 : développer dans les territoires des instances de dialogue avec les acteurs culturels, à la bonne échelle en fonction des sujets traités, en favorisant, dans la mesure du possible, l'échelon départemental.

Ces assises culturelles permettraient de traiter des thématiques particulières comme les musiques actuelles, le livre et la lecture publique, les arts visuels, les enseignements artistiques spécialisés, le théâtre...

• Orientation n° 8 : encourager les régions, les départements et les collectivités à statut particulier, selon l'organisation locale et les thématiques traitées, à jouer un rôle de coordinateur des politiques territoriales, sans pour autant désigner une collectivité chef de file en matière culturelle, et développer les mécanismes de contractualisation dans le domaine de la culture.

Les régions, les départements et les collectivités à statut particulier pourraient mettre à la disposition du bloc communal leur expertise afin de faciliter la construction de politiques publiques culturelles coordonnées au niveau territorial par le biais de schémas. Le développement d'outils de contractualisation et de planification pourrait renforcer la cohérence de l'action des collectivités territoriales sur le territoire et améliorer la lisibilité budgétaire de leurs engagements.

La désignation d'un chef de file pourrait réduire l'implication des autres niveaux de collectivités. Le choix de la région apparaît par ailleurs peu adapté pour exercer un tel chef de filât compte tenu de la taille des nouvelles régions.

• Orientation n° 9 : conforter l'État dans son rôle de garant de l'égalité territoriale et recentrer les missions de l'administration centrale du ministère de la culture autour de l'évaluation des politiques publiques et de l'élaboration des grandes lignes directrices.

La montée en puissance des différents échelons de collectivités dans les politiques culturelles territoriales ne doit pas conduire l'État à se désengager. Il reste très attendu pour définir les grandes lignes directrices, jouer un rôle d'impulsion et agir en faveur des territoires carencés et en soutien des politiques et des équipements nationaux.

• Orientation n° 10 : raffermir la capacité d'observation du ministère de la culture en assurant le recueil de données récentes, complètes et également qualitatives et développer une plateforme recensant les bonnes pratiques observées sur le territoire en lien avec les collectivités territoriales.

L'existence de données récentes, complètes et qualitatives fait aujourd'hui défaut pour apprécier la réalité des initiatives culturelles conduites dans les territoires et adapter correctement les politiques publiques. Seule une observation centralisée au niveau national peut permettre de juger en toute objectivité le niveau des inégalités territoriales, ce qui plaide pour un renforcement des moyens du ministère de la culture dans ce domaine.

• Orientation n° 11 : veiller à une répartition plus équilibrée des crédits de l'État sur le territoire, avec une attention accrue à porter à la situation particulière des départements, régions et collectivités d'outre-mer.

Compte tenu de la concentration des opérateurs nationaux dans la région Ile-de-France, les dépenses culturelles de l'État sont dix fois supérieures dans cette région par rapport à la moyenne nationale. L'existence de ces déséquilibres n'a pas, à ce stade, pu être compensée par la mise en place des régions élargies. La situation des départements et collectivités d'outre-mer mérite une attention particulière, à la fois en termes d'équipements et de budget.

• Orientation n° 12 : ne pas renoncer au socle traditionnel des politiques en matière de démocratisation culturelle qui touchent le plus grand nombre dans les territoires.

Le Pass culture et les Micro-Folies, nouvelles politiques de démocratisation culturelles mises en place par le Gouvernement, constituent des réponses respectivement ponctuelle et partielle à l'enjeu d'accès à la culture. L'éducation artistique et culturelle constitue le ciment de l'égalité d'accès à la culture et doit, à ce titre, être amplifiée, ce qui suppose une action coordonnée avec le ministère de l'éducation nationale.

• Orientation n° 13 : développer les instruments permettant de faire venir la culture dans les territoires les plus enclavés.

L'une des orientations à privilégier pour lutter contre l'enclavement culturel des territoires serait de faire venir les oeuvres et les artistes dans les territoires, sans se limiter à ce qui est présenté dans les grands établissements nationaux. Les résidences d'artistes doivent être développées et les initiatives itinérantes davantage soutenues, y compris au niveau national, car elles sont complémentaires des actions « hors les murs » menées par les structures labellisées, en ce qu'elles font la part belle aux projets construits avec les territoires et leurs habitants.

• Orientation n° 14 : poursuivre le mouvement de déconcentration à condition de donner aux DRAC les moyens de mener à bien leurs missions dans les territoires.

Pour élaborer et mettre en oeuvre les politiques culturelles au plus près des territoires, les moyens financiers et humains des DRAC doivent être confortés, afin qu'elles puissent mieux appuyer les initiatives culturelles au niveau local et faciliter la coopération entre les collectivités territoriales sur le terrain en jouant un rôle de médiateur avec les élus locaux.

Une clarification des missions des DRAC se révèlerait également utile pour permettre qu'une complémentarité entre les actions de l'État et des collectivités territoriales dans les territoires puisse durablement s'instaurer.

• Orientation n° 15 : laisser les collectivités territoriales être de véritables acteurs des politiques culturelles afin de favoriser la mise en oeuvre des droits culturels.

Les collectivités territoriales devraient avoir plus de liberté dans la mobilisation des moyens, y compris d'une partie des crédits déconcentrés en DRAC, compte tenu du soutien qu'ils apportent aux structures culturelles « vernaculaires » (bibliothèques et médiathèques, écoles et conservatoires de musiques, musées municipaux...), qui forment l'essentiel du réseau culturel au niveau local. Pour ne pas entraver leur action, il conviendrait également d'exclure du calcul de la croissance de leurs dépenses de fonctionnement dans le cadre de la contractualisation financière entre l'État et les collectivités territoriales les dépenses de fonctionnement supplémentaires qu'elles engagent pour la mise en oeuvre des nouvelles politiques culturelles gouvernementales.

Une véritable co-construction des politiques culturelles est indispensable pour faire vivre progressivement les droits culturels, qui supposent des politiques construites au plus près des individus, et donc dans les territoires.

I. CONSTRUIRE LA CULTURE DANS LES TERRITOIRES : LA NÉCESSITÉ D'UN PARTENARIAT RENFORCÉ ENTRE LES COLLECTIVITÉS PUBLIQUES

A. LE RÔLE MAJEUR DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES EN MATIÈRE DE POLITIQUES CULTURELLES

1. Des collectivités territoriales devenues incontournables

L'action culturelle est un enjeu important pour les territoires. Les politiques menées par les collectivités territoriales dans le domaine de la culture constituent des leviers de l' attractivité et du rayonnement des territoires. Elles contribuent à leur développement économique et touristique, favorisent l'expression d'une identité locale et constituent des vecteurs de cohésion sociale .

C'est sans doute ce qui explique le rôle moteur joué par les collectivités territoriales dans le domaine de la culture . Celles-ci ont largement investi le champ culturel, qui représente aujourd'hui environ 4,4 % de leurs dépenses globales. Elles contribuent activement à l'organisation et au développement de l'offre culturelle sur les territoires et sont devenues essentielles en termes de financement. D'après les dernières statistiques publiées par le département des études, de la prospective et des statistiques (DEPS) du ministère de la culture en mai 2019, les dépenses culturelles des collectivités territoriales se sont élevées à 8,7 milliards d'euros en 2017, soit un montant plus de deux fois supérieur aux 3,6 milliards d'euros de budget du ministère de la culture, auquel peuvent être ajoutés 4,3 milliards d'euros de dépenses à caractère culturel des autres ministères.

Source : DEPS, Ministère de la culture, 2019

La dernière note de conjoncture de l'Observatoire des politiques culturelles consacrée aux dépenses culturelles des collectivités territoriales fait apparaître une légère relance des dépenses culturelles en 2018 par rapport aux précédents exercices, qui avaient été marqués par des baisses assez sensibles, particulièrement autour de 2015.

Évolution des dépenses publiques en matière culturelle, 2014-2019

Source : Ministère de l'action et des comptes publics / DEPS, Ministère de la culture, 2019

Plus de la moitié de leurs dépenses sont consacrées au soutien à l'expression artistique et aux activités culturelles , tandis qu'un gros tiers porte sur le soutien à la conservation et à la diffusion du patrimoine.

Répartition sectorielle des dépenses culturelles
des collectivités territoriales en 2017

Les initiatives des collectivités territoriales dépassent largement le cadre de leurs obligations légales , qui portent principalement sur les bibliothèques, le développement des enseignements artistiques, la conservation des objets mobiliers classés au titre des monuments historiques, les archives et les services archéologiques. En effet, il existe peu de secteurs culturels dans lesquels la loi oblige les collectivités territoriales à intervenir. C'est donc sur la base de la clause de compétence générale que les différents échelons territoriaux, en particulier les communes, ont pu prendre l'initiative d'actions culturelles non formellement attribuées par la loi.

Quelques compétences prévues par la loi

Les oeuvres d'art

Les communes, comme les départements et les régions, ont l'obligation de consacrer 1 % du montant de l'investissement à l'insertion d'oeuvres d'art dans toutes les constructions qui faisaient l'objet, en 1983, de la même obligation à la charge de l'État ( article L. 1616-1 du code général des collectivités territoriales ) .

Les enseignements artistiques

Les enseignements artistiques de la musique, de la danse et de l'art dramatique relèvent d'une organisation spécifique faisant intervenir les communes, les départements et les régions.

Pour les communes, il s'agit de l'exercice d'une compétence facultative. Celles-ci peuvent ainsi organiser un enseignement initial visant à assurer l'éveil, l'initiation puis l'acquisition des savoirs fondamentaux nécessaires à une pratique artistique amateur autonome.

L'organisation du réseau des enseignements artistiques est définie par les départements qui apportent leur participation financière aux communes à travers la mise en place de schémas départementaux de développement des enseignements artistiques.

La région organise, pour sa part, l'enseignement préparant à l'entrée dans les établissements d'enseignement supérieur de la création artistique dans le domaine du spectacle vivant et peut adopter un schéma régional de développement des enseignements artistiques dans les domaines de la musique, de la danse et de l'art dramatique.

Les archives

Les collectivités territoriales et leurs groupements sont propriétaires de leurs archives et en assurent la conservation, ainsi que la mise en valeur, sous le contrôle scientifique et technique de l'État (articles L. 212-6 et suivants du code du patrimoine). Elles continuent à bénéficier des concours financiers de l'État dans les conditions en vigueur au 1 er janvier 1986.

Les musées

Les collectivités territoriales peuvent, à leur initiative, créer des musées, dont l'organisation et le financement relèvent ensuite de leur compétence (article L. 410-2 du code du patrimoine). Elles continuent à bénéficier des concours financiers de l'État dans les conditions en vigueur au 1 er janvier 1986.

Les services archéologiques

Les collectivités territoriales peuvent organiser et financer leurs services archéologiques (article L. 522-7 et L. 522-8 du code du patrimoine). Ces derniers sont alors soumis au contrôle scientifique et technique de l'État. Ils doivent avoir été préalablement habilités par l'autorité administrative pour réaliser des diagnostics et des fouilles d'archéologie préventive.

Les bibliothèques

Les collectivités territoriales et leurs groupements peuvent organiser et financer des bibliothèques (articles L. 310-1 et suivants du code du patrimoine).

Source : Direction générale des collectivités locales

2. Une nouvelle donne territoriale qui n'a pas remis en cause la prépondérance des communes dans le financement de la culture dans les territoires

Les trois lois qui constituent l'acte III de la décentralisation - la loi n° 2014-58 du 27 janvier 2014 de modernisation de l'action publique territoriale et d'affirmation des métropoles, dite « MAPTAM », la loi n° 2015-29 du 16 janvier 2015 relative à la délimitation des régions, aux élections régionales et départementales et modifiant le calendrier électoral et la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République, dite « NOTRe » - ont mis en place une nouvelle donne territoriale destinée à lutter contre le « millefeuille administratif ». Ces lois ont poursuivi plusieurs objectifs :

- doter les régions d'une taille critique en en réduisant le nombre pour leur permettre d'être plus efficaces dans l'exercice des compétences stratégiques qui leur sont attribuées ;

- favoriser la coopération et le regroupement entre les communes en facilitant le développement des intercommunalités à fiscalité propre, en mettant en place les métropoles et en rendant possible la création de pôles d'équilibre territoriaux et ruraux hors métropoles.

Malgré ces évolutions, les communes restent aujourd'hui encore les principaux financeurs de la culture , loin devant les autres échelons. En 2016, elles ont assumé 58 % des dépenses des collectivités territoriales, suivies par les intercommunalités (20 %), les départements (14 %) et les régions (8 %).

Ces disparités d'engagement financier s'expliquent par la nature de leurs dépenses culturelles. L'essentiel des dépenses du bloc communal porte sur les équipements culturels de proximité (bibliothèques, médiathèques, conservatoires...), dont les coûts de fonctionnement sont importants. Les dépenses des régions, à l'inverse, prennent essentiellement la forme de subventions, tandis que les départements concentrent une majeure partie de leur action sur la conservation du patrimoine.

Dépenses culturelles des communes et groupements de communes
par secteur d'intervention en 2016

Les années récentes ont toutefois été marquées par une montée en puissance, quoiqu'encore modeste, des intercommunalités . Alors que les dépenses culturelles des régions, des départements et des communes se sont contractées entre 2014 et 2017, les intercommunalités ont vu leurs dépenses croître de 5 % sur cette période. Cette progression de leurs dépenses n'est toutefois pas suffisante pour compenser les baisses émanant des autres collectivités territoriales , puisque le niveau de la dépense culturelle par habitant, toutes collectivités confondues, est passé de 143 euros à 131 euros.

Ces baisses concernent principalement les dépenses d'investissement , ce qui peut se justifier au regard de la transformation progressive des politiques culturelles, qui visent de moins en moins à construire de nouveaux équipements, compte tenu du maillage déjà existant. De leur côté, les dépenses de fonctionnement sont en légère progression, grâce au rôle actif joué par le bloc communal. Elles pourraient encore croître dans les années à venir. La dernière note de conjoncture de l'Observatoire des politiques culturelles consacrée aux dépenses culturelles des collectivités territoriales fait apparaître une relance des dépenses de fonctionnement en 2018 par rapport aux précédents exercices.

-6,6 %

Évolution des dépenses culturelles
des collectivités territoriales entre 2014 et 2017

695

773

1 150

9 331

-10,1 %

-15,1 %

Régions

Départements

Bloc
communal

1 355

-4,6 %

Ensemble
Collectivités

6 874

7 203

8 719

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication,
à partir des données du DEPS, Ministère de la culture

Dans un contexte budgétaire contraint, le financement des projets constitue un enjeu majeur pour les acteurs culturels. La pérennité des engagements financiers des collectivités est une source de préoccupation. L'État avait proposé, en 2014, de conclure avec les communes et les intercommunalités volontaires des « pactes culturels » pour contrer leur tentation de baisser les moyens alloués à la culture. L'État garantissait le maintien de ses crédits entre 2015 et 2017 aux collectivités qui s'engageaient à préserver leur budget pour la culture sur la même période. Jugé trop contraignant, le dispositif a rencontré un succès mitigé, puisque seules 82 collectivités ont contractualisé avec l'État.

Alors qu'un nouveau cadre de contractualisation entre le ministère de la culture et les collectivités territoriales avait été annoncé en 2018, celui-ci n'a finalement jamais vu le jour. Les derniers chiffres publiés par le ministère de la culture montrent toutefois que le bloc communal est globalement parvenu à préserver le montant de ses dépenses culturelles de fonctionnement entre 2014 et 2017 et que les baisses sont restées limitées (- 4,6 %). C'est davantage au niveau des départements et des régions que la baisse des dépenses culturelles a été sensible et a également porté sur les dépenses de fonctionnement. Du côté des régions toutefois, il pourrait s'agir d'un mouvement conjoncturel lié à la réorganisation qui a été nécessaire à la suite des fusions décidées lors des dernières réformes territoriales.

La mise en place de mécanismes financiers favorisant les coopérations entre collectivités territoriales et l'engagement de certains niveaux de collectivités aujourd'hui moins investis serait souhaitable. Dans le domaine du patrimoine, le ministère de la culture a ainsi créé, depuis 2018, un fonds pour inciter les régions à soutenir la restauration des monuments historiques des petites communes à faibles ressources. Il porte le nom de Fonds incitatif et partenarial pour les petites communes (FIP). L'État bonifie son soutien par le biais de ce fonds aux opérations que la région s'engage à financer au minimum à hauteur de 15 %.

Cette formule pourrait tout à fait être transposée dans d'autres secteurs de la culture afin de mieux répartir le coût des dépenses culturelles aujourd'hui largement à la charge du bloc communal. Il conviendrait néanmoins que les initiatives soutenues par le biais de tels fonds soient sélectionnées par l'État et les collectivités territoriales qui participent à leur financement de manière collégiale, ce qui n'est pas le cas aujourd'hui en ce qui concerne le fléchage du FIP.

Préconisation : mettre en place des mécanismes financiers favorisant les coopérations et l'engagement de certains niveaux de collectivités.

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