B. GARANTIR LA LIBERTÉ DE CHOIX DES FAMILLES ET LUTTER CONTRE DES PRATIQUES ABUSIVES

1. Favoriser la protection des familles
a) Le choix de la thanatopraxie relève du libre choix des familles ou du défunt, dans le cadre réglementé des opérations consécutives au décès

Aucune disposition législative ou réglementaire n'impose le recours à la thanatopraxie 41 ( * ) . Elle relève du libre choix des familles ou du défunt s'il l'avait exprimé dans ses dernières volontés .

Cette liberté a d'ailleurs été renforcée récemment, les dispositions qui prévoyaient, au niveau réglementaire, plusieurs hypothèses obligatoires de recours à cette technique ayant été supprimées.

Quelques hypothèses dans lesquelles
les soins de thanatopraxie étaient antérieurement exigés

L'article R. 2213-25 du code général des collectivités territoriales permettait, jusqu'au 11 novembre 2018, de déroger aux normes exigées pour les cercueils, qui devaient mesurer 22 millimètres. Il autorisait l'utilisation d'un cercueil mesurant entre 18 et 22 millimètres pour une durée de transport entre deux et quatre heures 42 ( * ) si le défunt avait fait l'objet d'une thanatopraxie. Ces dispositions ont été abrogées par le décret n° 2018-966 du 8 novembre 2018 relatif aux cercueils qui harmonise leurs caractéristiques et ne distingue plus selon que le défunt a fait l'objet d'une thanatopraxie ou non.

Dans le même esprit, l'article R. 2213-11 du même code permettait de transporter un corps avant mise en bière jusqu'à quarante-huit heures après le décès s'il avait fait l'objet d'une thanatopraxie, contre vingt-quatre heures pour le droit commun. Cette distinction a été abandonnée par le décret n° 2011-121 du 28 janvier 2011 relatif aux opérations funéraires qui fixe le délai maximum de transport de corps avant mise en bière à quarante-huit heures après le décès.

Des dispositions encore plus anciennes du code des communes imposaient une thanatopraxie si le corps était transporté sur une distance supérieure à six cents kilomètres, ou en cas de dépôt de corps pendant une durée excédant quarante-huit heures à la résidence du défunt, de sa famille, dans une morgue ou un caveau provisoire. Ces dispositions prévues à l'article R. 363-27 du code des communes ne sont plus en vigueur depuis le décret n° 87-28 du 14 janvier 1987 43 ( * ) .

Source : commission des lois du Sénat.

L'article R. 2223-29 du code général des collectivités territoriales, qui détermine les prestations funéraires obligatoires 44 ( * ) , ménage toutefois encore une exception de portée générale à ce principe , « en fonction des circonstances ou des causes du décès, du mode de transport et des modalités de l'inhumation ou de la crémation ».

La thanatopraxie peut en effet être exigée en cas de transport international du corps du défunt, selon la législation du pays d'accueil 45 ( * ) ou les prescriptions d'hygiène et de sécurité de certaines compagnies aériennes 46 ( * ) . Par ailleurs, le transport de corps à l'international étant subordonné à la délivrance d'une autorisation par le préfet du département où a eu lieu la fermeture du cercueil 47 ( * ) , celui-ci peut dès lors exiger la réalisation préalable d'une thanatopraxie.

Aucun délai spécifique n'est fixé par les textes pour la réalisation de la thanatopraxie . Toutefois, compte tenu des délais légaux de transport de corps avant mise en bière et d'inhumation ou de crémation, elle doit intervenir dans des délais nécessairement contraints.

Les principaux délais légaux ayant des conséquences
sur la réalisation de la thanatopraxie

La déclaration de décès doit intervenir dans les vingt-quatre heures de celui-ci auprès de l'officier de l'état civil de la commune où le décès a eu lieu (décret du 15 avril 1919 relatif aux mesures de salubrité publique). Le non-respect de ce délai est sanctionné par les peines de police prévues aux articles 131-13 et R. 610-5 du code pénal. Elle est faite par « un parent du défunt ou par une personne possédant sur son état civil les renseignements les plus exacts et les plus complets qu'il sera possible » (article 78 du code civil) 48 ( * ) .

Il ne peut ensuite être procédé aux différentes opérations funéraires que si le médecin a établi un certificat de décès attestant l'absence de problème médico-légal. Il doit l'établir « dans les meilleurs délais » (article L. 2223-42 du code général des collectivités territoriales). Il peut, en outre, s'opposer au transport du corps avant mise en bière s'il estime que l'état du corps ne le permet pas (article R. 2213-9 du même code).

Si le médecin ne s'y est pas opposé, le transport du corps avant mise en bière doit se faire dans les quarante-huit heures maximum à compter du décès (R. 2213-11 du code général des collectivités territoriales). En cas de suspicion de maladie de Creutzfeld-Jacob, ce délai est porté à soixante-douze heures pour permettre la recherche de la cause du décès 49 ( * ) (R. 2213-14 du même code). Après ces délais, le corps ne peut être transporté qu'après mise en bière. Il ne peut également être transporté qu'après mise en bière dans le cas où le défunt était atteint d'une infection transmissible dont la liste est fixée par arrêté.

Le transport de corps avant mise en bière est effectué au moyen de véhicules spécialement aménagés et soumis à déclaration écrite préalable auprès du maire du lieu de dépôt du corps (article R. 2213-7 dudit code).

Avant son inhumation ou sa crémation, le corps d'une personne décédée est mis en bière, c'est-à-dire qu'il est placé dans un cercueil. Cette opération funéraire est immédiatement suivie de la fermeture du cercueil. L'autorisation de fermeture du cercueil est délivrée par l'officier de l'état civil (article R. 2213-17 du code général des collectivités territoriales), sur présentation du certificat, établi par un médecin, établissant le décès (article L. 2223-42 du même code). Dans certaines situations, le maire peut décider la mise en bière immédiate et la fermeture du cercueil (article R. 2213-18 du code général des collectivités territoriales).

L'inhumation ou la crémation interviennent dans un délai de vingt-quatre heures au moins et de six jours au plus après le décès (articles R. 2213-33 et R. 2213-35 du code général des collectivités territoriales). Des dérogations aux délais prévus peuvent être accordées par le préfet de département du lieu de l'inhumation ou de crémation en raison de circonstances particulières.

Source : commission des lois du Sénat.

Les soins de thanatopraxie ne peuvent donc être effectués qu'à compter de l'établissement par un médecin d'un certificat médical attestant que le décès ne pose pas de problème médico-légal , ce certificat devant être établi dans « les meilleurs délais ».

Le délai maximum de réalisation d'une thanatopraxie diffère selon le lieu et les circonstances . Il est :

- de trente-six heures après le décès, si elle est effectuée à domicile 50 ( * ) ;

- de quarante-huit après le décès, si la thanatopraxie n'est pas effectuée sur le lieu du décès et nécessite un transport avant mise en bière 51 ( * ) ;

- de soixante-douze heures après le décès, si une autopsie médicale 52 ( * ) a été effectuée en raison d'une suspicion de maladie de Creutzfeld-Jacob 53 ( * ) , mais qu'elle s'est révélée négative 54 ( * ) ;

- sans limite particulière, outre celle de permettre l'inhumation ou la crémation dans les six jours à compter du décès, si elle est effectuée au sein même de la chambre mortuaire de l'établissement du lieu de décès, et si le corps y est mis en bière sur place.

La thanatopraxie ne compte pas parmi les opérations funéraires faisant l'objet d'une surveillance de l'autorité publique 55 ( * ) , leur nombre ayant été fortement réduit - de dix opérations surveillées à deux - en 2008 56 ( * ) puis 2015 57 ( * ) , le législateur ayant pris en compte les remarques à cet égard des élus, des représentants des familles et des professionnels concernés. Depuis lors, seules deux opérations funéraires s'effectuent en présence d'un fonctionnaire de police dans les communes dotées d'une police d'État, ou sous la responsabilité du maire en présence du garde-champêtre ou d'un agent de police municipale délégué par le maire dans les autres communes (article L. 2213-14 du code général des collectivités territoriales) :

- les opérations de fermeture et de scellement du cercueil lorsqu'il y a crémation ;

- lorsque le corps est transporté hors de la commune du décès ou du dépôt, et qu'aucun membre de la famille n'est présent pour assister aux opérations.

Les fonctionnaires chargés de cette surveillance peuvent toutefois assister, « en tant que de besoin », à toute autre opération consécutive au décès, parmi lesquelles les thanatopraxies (articles L. 2213-14 et R. 2213-44 du code général des collectivités territoriales).

La thanatopraxie est désormais soumise à un simple régime déclaratif 58 ( * ) . Il ne peut y être procédé sans qu'une déclaration écrite 59 ( * ) ait été effectuée auprès du maire de la commune où sont pratiqués les soins de conservation (article R. 2213-2-2 du code général des collectivités territoriales). Le maire 60 ( * ) reçoit en effet ces déclarations dans le cadre de son pouvoir de police spéciale des funérailles (article L. 2213-8 du code général des collectivités territoriales).

La réalisation des soins de thanatopraxie est subordonnée à la détention de plusieurs documents , sous peine de sanction administrative ou pénale 61 ( * ) pour l'opérateur funéraire qui manquerait à cette obligation :

- l' expression écrite des dernières volontés de la personne décédée sollicitant une thanatopraxie ou une demande de la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles ;

- le certificat de décès attestant que le décès ne pose pas de problème médico-légal et que le défunt n'est pas atteint par une infection transmissible prohibant la thanatopraxie et dont la liste est fixée par voie d'arrêté 62 ( * ) .

S'ajoutent à ces deux exceptions les cas de décès à l'étranger avec rapatriement du corps en France . Dans cette hypothèse, les accords internationaux auxquels est partie la France imposent le transport de corps dans un cercueil hermétiquement clos comportant un caisson en zinc. La fermeture du cercueil étant définitive (article R. 2213-20 du code général des collectivités territoriales), il n'est donc pas possible de procéder à des soins de thanatopraxie une fois le corps rapatrié.

b) Rappeler l'impossibilité de recourir à la thanatopraxie en cas d'obstacle médico-légal

La restriction apportée au recours à la thanatopraxie se justifie, dans l'hypothèse d'un obstacle médico-légal, selon votre rapporteur, par l'objectif constitutionnel de recherche des auteurs d'infractions.

L'Ordre des médecins, tout comme le professeur Malicier, responsable du diplôme universitaire de thanatopracteur de l'Université de Lyon, ont confirmé l'importance que le thanatopracteur s'assure que tout doute médico-légal est levé, non seulement en prenant en considération le certificat de décès, mais aussi leur propre examen du corps du défunt, lorsque le certificat de décès n'en fait pas mention : dès lors que le thanatopracteur détecte un élément suspect, il ne doit pas procéder à la thanatopraxie et en aviser le procureur de la République. En effet, toute recherche des causes de la mort après une thanatopraxie serait vaine.

Le transport de corps après une autopsie judiciaire, une autopsie médicale

ou un prélèvement à des fins thérapeutiques

La thanatopraxie (article R. 2213-2-2 du code général des collectivités territoriales), les opérations de transport de corps avant mise en bière (articles R. 2213-8 et R. 2213-8-1 du code général des collectivités territoriales), de même que les opérations d'inhumation ou de crémation ne peuvent être effectués si le certificat de décès fait état d'un obstacle médico-légal.

En cas d'obstacle médico-légal constaté par le médecin 63 ( * ) , toutes les opérations funéraires, dont la thanatopraxie, sont en effet suspendues : le corps de la personne décédée est placé sous main de justice jusqu'à ce que l'autorité judiciaire compétente décide de sa remise à la famille. L'article 74 du code de procédure pénale prescrit que l'officier de police judiciaire avisé d'une mort violente, inconnue ou suspecte informe le procureur de la République, qui peut ouvrir une enquête pour recherche des causes de la mort. Une autopsie judiciaire peut alors être ordonnée à cette fin, conformément à l'article 230-28 du même code.

Dans cette hypothèse, le délai de six jours précité court à compter de l'autorisation d'inhumation ou de crémation délivrée par le procureur de la République 64 ( * ) . En effet, l'article 230-29 du code de procédure pénale dispose que « lorsqu'une autopsie judiciaire a été réalisée dans le cadre d'une enquête ou d'une information judiciaire et que la conservation du corps du défunt n'est plus nécessaire à la manifestation de la vérité, l'autorité judiciaire compétente délivre dans les meilleurs délais l'autorisation de remise du corps et le permis d'inhumer. Le praticien ayant procédé à une autopsie judiciaire est tenu de s'assurer de la meilleure restauration possible du corps avant sa remise aux proches du défunt. Il ne peut être refusé aux proches du défunt qui le souhaitent d'avoir accès au corps avant sa mise en bière, sauf pour des raisons de santé publique ».

Une fois le corps remis à la famille, peut-il alors être transporté avant mise en bière, le cas échéant après le délai de droit commun de quarante-huit heures fixé à l'article R. 2213-11 du code général des collectivités territoriales ? Interrogé sur le sujet en 2013 65 ( * ) , le ministère de l'intérieur a considéré que cette hypothèse échappait à l'application du droit commun dans la mesure où le sort du corps dépendait d'une décision de l'autorité judicaire .

De plus, d'après la lettre même des textes précités, les conditions de réalisation du transport de corps avant mise en bière ne peuvent être satisfaites lorsqu'une autopsie judiciaire a été effectuée, puisque le transport avant mise en bière est précisément prohibé en cas d'obstacle médico-légal . Or, une autopsie judiciaire constitue précisément un acte d'enquête sollicité par l'autorité judiciaire compétente dans l'hypothèse où le décès d'une personne pose un problème médico-légal. En conséquence, la mise en bière se fait nécessairement sur le lieu de l'autopsie judiciaire (institut médico-légal) pour un transport de corps après mise en bière.

L'article R. 2213-12 du même code dispose d'ailleurs que lorsque les conditions requises ne sont pas remplies, le corps ne peut être transporté qu'après mise en bière.

Seule exception à cette règle, le cas où le procureur de la République donne un ordre de réquisition pour ramener le corps sans cercueil vers une chambre funéraire à proximité du lieu de décès. Il n'y est toutefois pas tenu et peut très bien refuser cette opération.

Le transport de corps après une autopsie judiciaire est à distinguer du transport de corps après prélèvements à des fins thérapeutiques ou autopsie médicale 66 ( * ) .

Ces deux hypothèses sont soumises à déclaration préalable auprès du maire, sur demande du directeur de l'établissement de santé du lieu de décès dans le premier cas, ou de toute personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles dans le second cas (article R. 2213-14 du code général des collectivités territoriales). La déclaration est subordonnée dans les deux cas au certificat de décès attestant que le décès ne pose pas de problème médico-légal.

Seules les autopsies médicales réalisées en vue de diagnostiquer la présence de la maladie de Creutzfeld-Jacob 67 ( * ) permettent de déroger au délai maximum de quarante-huit heures pendant lequel le transport de corps avant mise en bière est prévu ; il est alors porté à soixante-douze heures. Les autopsies médicales réalisées dans un autre but ne permettent pas de déroger au délai de droit commun.

Enfin, le corps ayant fait l'objet d'un prélèvement à des fins thérapeutiques peut donner lieu, à la demande de toute personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles et avec l'accord du directeur de l'établissement de santé, à un « nouveau transport de corps avant mise en bière ».

Source : commission des lois du Sénat
et réponse du ministre de l'intérieur à une question écrite.

Se pose néanmoins la question d'une éventuelle thanatopraxie pratiquée après l'autopsie judiciaire ou autopsie médico-légale, une fois le corps rendu à la famille .

D'après les témoignages recueillis par votre rapporteur, notamment auprès des professionnels des pompes funèbres, des chambres mortuaires ou des auteurs d'un rapport de l'Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail (ANSES) 68 ( * ) , des thanatopraxies seraient pratiquées non seulement après des autopsies médicales ou des prélèvements à des fins thérapeutiques, mais aussi après des autopsies judiciaires.

Pourtant, selon votre rapporteur, le droit en vigueur ne permet pas d'effectuer de thanatopraxie sur un défunt ayant subi une autopsie judiciaire . En effet, la thanatopraxie étant subordonnée à la détention d'un certificat de décès attestant que celui-ci ne pose pas de problème médico-légal, cela exclut formellement toute thanatopraxie dans cette hypothèse. Une autopsie judiciaire constitue précisément un acte d'enquête sollicité par l'autorité judiciaire compétente dans l'hypothèse où le décès d'une personne pose un problème médico-légal. Le raisonnement est identique au cas du transport de corps avant mise en bière. Une thanatopraxie pourrait cependant être éventuellement réalisée sur réquisition du procureur de la République, ce qui, en pratique, semble toutefois très rare.

Votre rapporteur rappelle, en outre, qu'en vertu des dispositions de l'article 230-29 du code de procédure pénale, introduites à l'initiative du Sénat dans la loi n° 2011-525 du 17 mai 2011 de simplification et d'amélioration de la qualité du droit : « Le praticien ayant procédé à une autopsie judiciaire est tenu de s'assurer de la meilleure restauration possible du corps avant sa remise aux proches du défunt. »

En conséquence, un défunt ayant subi une autopsie médico-légale doit être mis en bière sur le lieu de l'autopsie, puisqu'il ne peut faire l'objet ni d'une thanatopraxie, ni d'un nouveau transport de corps avant mise en bière, sauf exception requise par l'autorité judiciaire .

Proposition n° 3 :  Réaffirmer par voie de circulaire l'impossibilité de recourir à la thanatopraxie en cas d'obstacle médico-légal, y compris après autopsie judiciaire.

c) S'interroger sur l'utilité de la thanatopraxie, lorsqu'elle ne peut pas avoir l'effet conservateur recherché

Contrairement à l'autopsie judiciaire, la thanatopraxie est autorisée après des prélèvements à des fins thérapeutiques ou une autopsie médicale 69 ( * ) .

Toutefois le recours à des soins de thanatopraxie dans un tel cas pose plus largement la question de son utilité lorsque ces derniers n'ont pas d'effet notable sur la conservation du corps. Les avis sur cette question sont partagés. Les personnels des chambres mortuaires entendus par votre rapporteur estiment que la thanatopraxie ne présente d'intérêt que lorsque le corps doit être conservé pour une longue durée hors d'une chambre froide (corps à domicile ou transport de corps).

Votre rapporteur estime que le choix de recourir à la thanatopraxie doit continuer à relever de l'appréciation de chacun. Il ne nie pas que celle-ci peut avoir un intérêt pour la présentation du défunt à la famille, notamment lorsque celui-ci a subi des traitements lourds ou connu des pathologies violentes, ni qu'elle peut, selon les circonstances, mieux conserver le corps que d'autres techniques.

Proposition n° 4 : Maintenir le principe du libre choix des familles ou du défunt de recourir ou non à la thanatopraxie, sauf exceptions légalement prévues.

Votre rapporteur juge toutefois qu'il conviendrait d'éviter le recours à la thanatopraxie lorsque celle-ci ne peut pas avoir d'effet conservateur, ce qui est avéré, en particulier, dans trois hypothèses : après une autopsie médicale, un prélèvement multi-organes et lorsque la crémation du défunt est prévue dans un délai inférieur à vingt-quatre heures.

Comme l'autopsie judiciaire, l'autopsie médicale est un acte chirurgical élargi 70 ( * ) au terme duquel le corps ne présente plus les possibilités requises pour l'injection du fluide de conservation 71 ( * ) . De même, le soin de conservation est impossible lorsque le défunt a subi des prélèvements multi-organes.

Enfin, une thanatopraxie réalisée la veille d'une crémation voire même le jour des obsèques ne semble pas non plus avoir beaucoup plus d'intérêt. À ces moments précis, la thanatopraxie est inutile car il n'est plus nécessaire de retarder le processus de décomposition du corps.

Il n'apparaît pas opportun à votre rapporteur d'envisager une interdiction légale de recourir à la thanatopraxie pour ces motifs qui lui semblent ne relever ni de la santé publique, ni de l'ordre public ni de la recherche d'auteurs d'infractions.

Pour autant, votre rapporteur suggère qu'une réflexion soit menée au sein du Conseil national des opérations funéraires (CNOF) sur ce sujet. Elle pourrait conduire à ce que les opérateurs s'abstiennent de proposer aux familles des soins relevant de la thanatopraxie dans les trois cas susvisés.

Proposition n° 5 :  Mener une réflexion dans le cadre du Conseil national des opérations funéraires sur l'utilité de la thanatopraxie lorsqu'elle n'a pas d'effet conservateur.

d) Assurer la bonne application des textes permettant l'égal accès à la thanatopraxie pour les défunts porteurs de certaines infections transmissibles

L'article R. 2213-2-1 du code général des collectivités territoriales encadre les opérations consécutives au décès lorsque le défunt est porteur d' infections transmissibles : certaines d'entre elles ne permettent pas de recourir à la thanatopraxie .

Depuis le 1 er janvier 2018, l' état septique grave est la seule infection transmissible qui interdit les soins de thanatopraxie alors qu'elle n'exige pas de mise en bière immédiate suivie de la fermeture du cercueil . Un arrêté du 12 juillet 2017 fixant les listes des infections transmissibles prescrivant ou portant interdiction de certaines opérations funéraires mentionnées à l'article R. 2213-2-1 du code général des collectivités territoriales a ainsi mis fin à l'interdiction de la thanatopraxie pour les défunts atteints d'une hépatite virale 72 ( * ) ou d'une infection à VIH, interdiction en vigueur depuis plus de trente ans 73 ( * ) .

À l'état septique grave s'ajoutent la maladie de Creutzfeld-Jacob . S'ajoutent également d'autres infections transmissibles pour lesquelles il est exigé une mise en bière immédiate dans un cercueil hermétique (orthopoxviroses, choléra, peste, charbon, fièvres hémorragiques et contagieuses), ou simple (rage, tuberculose active et toute maladie émergente infectieuse transmissible) et sa fermeture.

Certaines personnes entendues par votre rapporteur ont indiqué que des opérateurs funéraires considéraient que la mise en bière immédiate devait se faire après une thanatopraxie ou une toilette. Sans préjuger de la réalité de ces pratiques, votre rapporteur souhaite rappeler que dans les cas où la réglementation impose une mise en bière immédiate et la fermeture du cercueil, les soins de thanatopraxie comme les toilettes funéraires ou mortuaires et les soins de présentation sont également proscrits pour les mêmes raisons évidentes de santé et de sécurité publiques . Seul le premier cas (soins de conservation ou thanatopraxie) est expressément prévu.

Les associations de lutte contre le sida et les hépatites entendues par votre rapporteur ont insisté sur le fait que l'interdiction de thanatopraxie pour les défunts porteurs du VIH ou d'une hépatite était ressentie par les personnes atteintes de telles infections et leurs familles, qui étaient ainsi privées de la liberté de choix de leurs rites funéraires, comme une stigmatisation sociale .

Le Défenseur des droits, dans la contribution qu'il a adressée à votre rapporteur, comme le Conseil national du sida et les associations précitées, ont, en outre, rapporté des pratiques abusives de mise en bière immédiate avec fermeture du cercueil de défunts atteints de VIH, voire dont l'infection donnait lieu à des soupçons sans être attestée formellement, par des opérateurs de pompes funèbres ou sur demande des médecins, alors que seuls les soins de conservation étaient prohibés et la mise en bière immédiate du corps n'était nullement imposée. Les familles concernées ne pouvaient, en conséquence, pas se recueillir sur la dépouille de leur proche.

Le Conseil national du sida avait, dès 2009 74 ( * ) , recommandé de lever cette interdiction .

Compétent pour émettre un avis - consultatif - préalablement à la modification de certaines dispositions relatives à la santé publique, le Haut Conseil de la santé publique (HCSP) s'est prononcé à plusieurs reprises sur la levée de l'interdiction de la thanatopraxie pour les défunts atteints de certaines infections transmissibles à la demande du ministre chargé de la santé qui envisageait de lever cette interdiction. Alors qu'il recommandait dans un avis de 2009 75 ( * ) son maintien, relevant notamment un respect insuffisant et inégal des règles d'hygiène et de sécurité, il s'est prononcé pour la levée de cette interdiction dans un nouvel avis de 2012 « sous réserve que les thanatopracteurs soient correctement formés à l'hygiène et la sécurité, qu'ils respectent les précautions standard et que tous les soins de thanatopraxie, indépendamment du statut sérologique du défunt, soient réalisés exclusivement dans des locaux spécifiques et adaptés » 76 ( * ) .

Votre rapporteur relève que l'ordre des médecins, entendu lors des auditions de la mission, avait donné un avis favorable lors de sa consultation par le ministère de la santé, et constate que plusieurs autres rapports ont émis des recommandations dans le même sens :

- le rapport sur la prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH, publié en 2018 77 ( * ) ;

- le rapport de l'inspection générale des affaires sociales (IGAS) et de l'inspection générale de l'administration (IGA), précité 78 ( * ) ;

- le rapport du Défenseur des droits relatif à la législation funéraire de 2012 79 ( * ) .

Dans son étude publiée en 2017 sur la pratique de la thanatopraxie à l'international déjà citée, le HCSP 80 ( * ) relevait que les États-Unis, le Royaume-Uni et l'Irlande autorisaient les soins de conservation sur les défunts atteints de VIH et d'hépatites virales sans aucune préconisation particulière dès lors que chaque thanatopraxie devait en tout état de cause faire l'objet d'une protection maximale.

Pour autant, certains thanatopracteurs et opérateurs de pompes funèbres continuent d'émettre des craintes sur ce nouveau cadre légal .

La profession des thanatopracteurs est partagée. Le syndicat professionnel des thanatopracteurs indépendants et salariés (SPTIS), notamment, y est opposé, en raison des risques sanitaires qu'il considère encourus par les thanatopracteurs. C'est aussi l'avis de certains opérateurs de pompes funèbres qui ont évoqué un soin purement cosmétique ne justifiant pas de mettre en jeu la santé ou la sécurité des thanatopracteurs.

Votre rapporteur considère que cet argument n'apparaît pas pertinent dans la mesure où, en application des précautions universelles standard 81 ( * ) , tout corps traité doit être considéré comme susceptible d'être atteint d'une affection potentiellement dangereuse et extrêmement grave . Le thanatopracteur ne peut en effet jamais connaître le statut sérologique du défunt ou savoir avec certitude si le corps qu'il traite est exempt de toute infection.

Le SPTIS a indiqué à votre rapporteur avoir formé un recours en annulation de l'arrêté du 12 juillet 2017 levant l'interdiction des soins de conservation pour les défunts atteints de VIH et d'hépatites devant le Conseil d'État, ce qu'a confirmé le ministère de la santé 82 ( * ) . Saisi par des opérateurs de pompes funèbres de l'arrêté du 20 juillet 1998 fixant la liste des maladies contagieuses portant interdiction de certaines opérations funéraires, le Conseil d'État avait jugé en 1999 que le ministère de la santé était habilité à dresser la liste des maladies contagieuses mais n'était pas habilité à interdire de manière absolue la possibilité de pratique des soins de conservation ou à imposer une mise en bière immédiate, le pouvoir de police relevant du maire en vertu du régime d'autorisation préalable dont il était en charge 83 ( * ) . L'appréciation du juge administratif ne sera sans doute pas la même dans le cadre d'un régime déclaratif.

Toujours d'après le SPTIS, certains thanatopracteurs souhaiteraient faire valoir leur droit de retrait pour ne pas procéder à des soins de conservation sur des corps infectés par le VIH ou l'hépatite B.

Tout thanatopracteur salarié peut exercer son droit de retrait dès lors que les conditions en sont réunies, conformément à la loi . Ce droit de retrait est encadré par les articles L. 4131-1 et suivants du code du travail 84 ( * ) . Dans un tel cadre, seul un professionnel salarié pourrait invoquer son droit de retrait - ce qui exclut les thanatopracteurs indépendants - en cas de « danger grave et imminent pour sa vie ou sa santé ainsi que de toute défectuosité qu'il constate dans les systèmes de protection ». À cet égard, comme l'a indiqué le ministère de la santé à votre rapporteur, le « danger » ne saurait être confondu avec la notion de risque. Ainsi, toute situation de travail qui expose à des risques ne présente pas un danger « grave et imminent », dès lors que le risque est connu et maitrisé.

La question se pose certes de manière différente selon le lieu où la thanatopraxie est effectuée et notamment lorsqu'elle est pratiquée à domicile 85 ( * ) . Toutefois, l'obligation de vaccination contre l'hépatite B désormais imposée aux thanatopracteurs de même que les nouvelles conditions d'encadrement de leur activité peuvent constituer des éléments allant dans le sens d'une meilleure maîtrise des risques 86 ( * ) .

Dans la contribution remise à votre rapporteur, le Défenseur des droits indique que si des refus de soins de conservation devaient résulter du seul motif que le défunt était atteint du VIH ou de l'hépatite B, sans que les conditions du droit de retrait soient réunies, il pourrait, au titre de sa mission de lutte contre les discriminations, instruire ces dossiers.

Votre rapporteur considère que cette approche pose des problèmes juridiques. En effet, la personne défunte perdant, au moment même de son décès, les droits attachés à sa personne, il n'est pas possible que l'infraction de discrimination à l'encontre du défunt puisse être constituée. Et une action offerte aux héritiers ne pourrait, de prime abord, se justifier que par l'existence d'un trouble qui les atteindrait personnellement 87 ( * ) .

Le signalement de tels refus au préfet de département ou au procureur de la République semble toutefois pertinent à votre rapporteur, puisque le non-respect des obligations fixées aux opérateurs funéraires est passible de sanctions administratives et pénales.

D'après les informations portées à la connaissance des associations entendues par votre rapporteur, aucune famille ne se serait néanmoins plainte à ce jour d'un refus de thanatopraxie pour un tel motif depuis la levée de l'interdiction entrée en vigueur le 1 er janvier 2018 .

Votre rapporteur jugerait en outre utile et opportun que des réunions d'information avec des médecins puissent être organisées à l'intention des thanatopracteurs à l'initiative du ministère en charge du secteur funéraire, avec le concours des ministères de la santé et du travail, pour apporter toutes les informations utiles sur la prévention du risque infectieux lors de la pratique de la thanatopraxie.

Votre rapporteur s'interroge toutefois sur un point du dispositif levant l'interdiction des soins de conservation pour les personnes atteintes du VIH ou d'une hépatite B ou C au moment de leur décès.

Il a en effet relevé une erreur matérielle dans le modèle de certificat de décès annexé à l'arrêté du 17 juillet 2017 relatif aux deux modèles de certificat de décès . Celui-ci impose désormais au médecin de mentionner un obstacle aux soins de conservation distinctement d'un obstacle au don de corps. Des instructions sont à respecter par le médecin lorsqu'il complète le certificat de décès, parmi lesquelles un tableau récapitulant les opérations funéraires imposées ou interdites en cas d'infection, destiné à guider le médecin qui constate le décès. Ce tableau indique que les soins de conservation sont autorisés mais que le don de corps est interdit pour les personnes atteintes de VIH ou d'hépatite B ou C au moment de leur décès.

Sans se prononcer sur le don de corps qui n'est pas le sujet de ce rapport, votre rapporteur observe que l'interdiction de don de corps à la science pour les défunts porteurs du VIH ou d'une hépatite B ou C a mécaniquement été levée par la modification de la réglementation relative aux soins de conservation . En effet, l'article R. 2213-13 du code général des collectivités territoriales qui régit le don de corps l'interdit si le défunt est porteur d'une infection transmissible figurant sur l'une des listes mentionnées par l'article R. 2213-2-1 du même code. Or l'arrêté du 12 juillet 2017 qui détermine ces listes a bien supprimé l'infection à VIH et les hépatites virales de toute liste.

Il conviendrait donc de corriger, le cas échéant, le modèle de certificat de décès pour assurer sa mise en conformité avec le droit en vigueur depuis le 1 er janvier 2018 sur le don de corps et ne pas induire le médecin en erreur .

Proposition n° 6 : Garantir le libre accès à la thanatopraxie pour tous les défunts :

- en corrigeant le modèle du certificat de décès pour assurer sa mise en conformité avec les règles en vigueur sur le don de corps ;

- en organisant des réunions d'information avec des médecins à l'attention des thanatopracteurs sur la prévention du risque infectieux ;

- en rappelant aux opérateurs de pompes funèbres et aux thanatopracteurs que la mise en bière immédiate ne permet ni thanatopraxie, ni toilette funéraire ou mortuaire, ni soins de présentation préalables.

2. Garantir le consentement libre et éclairé des familles à la thanatopraxie
a) Le coût de la thanatopraxie est non négligeable par rapport au coût global des obsèques

Une étude du Centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie (CREDOC), diligentée par la chambre syndicale nationale de l'art funéraire (CSNAF) et menée en 2012 88 ( * ) , concluait que le prix moyen de vente d'un soin de thanatopraxie s'élevait à 291 euros. Cette étude mettait toutefois en évidence des différences notables en fonction de la taille de l'entreprise, de son appartenance ou non à un groupe, du chiffre d'affaires et de la région d'installation, avec un écart de 36 % entre le prix le plus bas et le plus élevé (249 à 352 euros). Les soins les plus chers étaient ceux vendus par des établissements membres d'un groupe ou ceux générant le plus de chiffres d'affaires - ce qui va souvent de pair.

D'après les éléments empiriques recueillis par votre rapporteur lors des auditions, le coût de la thanatopraxie varie selon l'opérateur funéraire, la région de vente et l'offre de thanatopracteurs sur le marché .

D'après la direction de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), une thanatopraxie coûte en moyenne 170 euros hors taxes, facturée entre 300 et 500 euros hors taxes à la famille .

Ces informations corroborent le témoignage des opérateurs de pompes funèbres du secteur privé entendus par votre rapporteur qui faisaient état d'un coût d'une thanatopraxie chez leurs adhérents du même ordre, celui-ci pouvant toutefois être majoré durant le week-end. Selon ces mêmes professionnels, la thanatopraxie a progressivement remplacé l'application de carboglace et revient deux à trois fois moins cher que celle-ci, ce qu'ils jugent positif pour les familles. À titre de comparaison, la toilette funéraire et les soins de présentation (ces prestations comprenant la désinfection, le lavage, l'habillage et les soins cosmétiques) sont vendus entre 80 et 250 euros aux familles.

Les opérateurs de pompes funèbres du secteur public ont indiqué à votre rapporteur vendre une thanatopraxie entre 280 et 370 euros aux familles, contre 120 euros en moyenne pour des soins de présentation. À titre d'exemple, les services funéraires de la Ville de Paris facturent une thanatopraxie autour de 400 euros, et des soins de présentation autour de 200 euros.

La thanatopraxie représente donc, selon son coût, entre 6 et 10 % en moyenne du coût des obsèques , soit une somme non négligeable par rapport au coût global des obsèques pour les familles . D'après l'étude du CREDOC de 2012 précitée, l'activité des soins de thanatopraxie représenterait environ 5,1 % du chiffre d'affaires de l'activité funéraire , estimée à 1,63 milliard d'euros, soit 83,23 millions d'euros.

b) Assurer la bonne information des familles et lutter contre des pratiques abusives

Dans les faits, le thanatopracteur intervient le plus souvent à la demande de l'opérateur de pompes funèbres chargé d'organiser les obsèques, qui pourvoit aux différentes démarches requises auprès du maire . De moins en moins de déclarations sont faites en mairie par les familles. Et très peu de familles ont un contact direct avec le thanatopracteur, hormis lorsqu'il intervient au domicile du défunt.

Les opérateurs funéraires sont tenus à plusieurs obligations assurant la transparence des prix . Les modalités d'information des familles sont détaillées dans le règlement national des pompes funèbres (articles R. 2223-23-5 et suivants du code général des collectivités territoriales) 89 ( * ) .

Votre rapporteur rappelle à cet égard que l'information sur la transparence des prix indiqués et la nature des prestations fournies revêtent une importance particulière pour les familles lorsqu'elles sont confrontées à un deuil et doivent organiser les funérailles dans des délais très brefs , tout en respectant les dernières volontés du défunt .

Ainsi, les soins de conservation doivent figurer parmi les « prestations complémentaires optionnelles » dans la documentation générale des opérateurs mise à disposition du public de manière permanente (article R. 2223-24 du code général des collectivités territoriales).

Si la fixation du prix d'un soin de thanatopraxie est libre , conformément au principe de liberté des prix, les prix des soins de conservation n'en doivent pas moins figurer dans la documentation générale de chaque opérateur funéraire 90 ( * ) , conformément aux dispositions générales du code de la consommation qui imposent au vendeur d'un produit ou d'une prestation de services d'informer le consommateur de son prix 91 ( * ) . Elle doit ainsi faire apparaître, élément par élément, les prix et conditions de vente des prestations et fournitures .

Ces éléments doivent aussi figurer dans les devis gratuits qu'ils doivent impérativement présenter au client, dont le modèle est fixé par voie d'arrêté (article L. 2223-21-1 du code général des collectivités territoriales) 92 ( * ) .

Le devis modèle

Ce modèle prévoit une terminologie commune obligatoire de nature à faciliter les comparaisons par les familles des tarifs pratiqués par les opérateurs de pompes funèbres.

Les opérateurs doivent déposer des devis types chiffrés présentant les prestations qu'ils fournissent auprès des communes de plus de 5 000 habitants du département où ils ont leur siège social 93 ( * ) .

Il appartient ensuite à chaque commune de définir les modalités de consultation de ces devis types.

L' opérateur de pompes funèbres chargé d'organiser les obsèques a, en outre, à sa charge, depuis le 1 er janvier 2018 94 ( * ) , l' obligation de s'assurer de la bonne information de la famille sur l'objet et la nature de la thanatopraxie , son caractère facultatif et payant ainsi que ses alternatives, afin qu'elle puisse faire son choix de manière libre et éclairée en toute connaissance de cause (article R. 2213-2-2 du code général des collectivités territoriales 95 ( * ) ). Il doit à cet effet mettre à la disposition de la famille un document écrit officiel, établi conjointement par les ministères de l'intérieur et de la santé en concertation avec les membres du conseil national des opérations funéraires 96 ( * ) .

Le non-respect de ces règles est passible des sanctions administratives et pénales 97 ( * ) .

D'après François Michaud-Nérard, ancien directeur des services funéraires de la Ville de Paris, ces informations se justifient par le besoin du consentement éclairé des familles à la thanatopraxie, compte tenu de son caractère invasif , tout en estimant l'exercice délicat car cela impose une description clinique des soins de conservation à un moment où la famille et les proches sont particulièrement vulnérables.

Il est patent qu'il y a de graves confusions et ambiguïtés . Les familles endeuillées ignorent très souvent la distinction entre la toilette, les soins de présentation et la thanatopraxie, si bien qu'elles ne savent pas précisément ce que ces prestations entraînent, ni ce qui leur est réellement proposé, ni ce qui leur est vendu. Il s'ensuit un flou inacceptable dans la détermination des prix qui peuvent être très différents pour les mêmes prestations et peuvent recouvrir des actes et des pratiques très diverses . Il est essentiel de réformer cet état de causes .

Votre rapporteur estime qu'il est impératif de revoir la rédaction de l'arrêté du 23 avril 2010 portant définition du modèle de devis applicable aux prestations fournies par les opérateurs funéraires afin de distinguer clairement la toilette, les soins de présentation et la thanatopraxie. Pour chacun de ces trois actes, les opérateurs funéraires habilités doivent être tenus de mentionner chaque année un prix qu'ils s'engagent à respecter durant toute l'année en question. Cela doit aller de pair avec une définition des modalités de chaque prestation (toilette funéraire, soins de présentation, thanatopraxie) qui sont, par ailleurs, obligatoirement présentées aux familles.

Il juge également que le document d'information mis à disposition des familles est un progrès louable mais qu'il conviendrait de préciser les définitions (notamment celles de la toilette et des soins de présentation particulièrement elliptiques 98 ( * ) ) et de le mettre régulièrement à jour pour prendre en compte l'évolution de la réglementation . Ainsi, le document en vigueur évoque toujours la possibilité de déroger aux caractéristiques d'un cercueil après des soins de conservation, alors que cette norme n'est plus en vigueur depuis le 11 novembre 2018 99 ( * ) .

Pour assurer sa consultation par les familles, votre rapporteur suggère que ce document d'information soit obligatoirement transmis avec le devis fourni par les opérateurs (articles R. 2223-25 et suivants du code général des collectivités territoriales). La famille pourra ainsi se prononcer en toute connaissance de cause sur le devis fourni et le faire rectifier le cas échéant . Il faut aussi prévoir que ledit document soit annexé aux devis modèles obligatoirement déposés chaque année par les opérateurs funéraires dans les communes de plus de 5 000 habitants du département où ils ont leur siège social.

Il suggère aussi que ce document administratif puisse être affiché dans les chambres mortuaires, les chambres funéraires, et les crématoriums, tout comme la liste des opérateurs de pompes funèbres habilités (article R. 2223-71 du code général des collectivités territoriales).

Proposition n° 7 : Renforcer la portée du document d'information sur la thanatopraxie mis à disposition des familles et :

- rendre obligatoire sa transmission avec le devis remis à la famille ;

- l'annexer aux devis modèles déposés dans certaines communes ;

- étendre sa mise à disposition aux chambres mortuaires par voie d'affichage ;

- modifier son contenu en précisant les définitions respectives de la toilette funéraire ou mortuaire, des soins de présentation et des soins de conservation ou thanatopraxie, en le mettant à jour régulièrement en fonction de l'évolution de la réglementation en vigueur.

Proposition n° 8 :  Inscrire précisément les trois rubriques (toilette funéraire, soins de présentation et soins de conservation ou thanatopraxie) dans les devis modèles que les opérateurs funéraires doivent déposer auprès des communes. Leur demander de donner chaque année un prix pour chaque prestation, prix qui les engagera pour toute l'année en question.

Dans le même esprit, votre rapporteur juge que le recours à la thanatopraxie doit faire l'objet d'un consentement explicite dans les contrats prévoyant des prestations d'obsèques à l'avance . D'après les opérateurs de pompes funèbres du secteur privé entendus par votre rapporteur, environ 90 % des personnes souscrivant ce type de contrat régi par l'article L. 2223-34-1 du code général des collectivités territoriales choisissent de prévoir des soins de thanatopraxie. Là encore, il est important d'informer en amont les souscripteurs sur ce que recouvrent les soins de conservation.

La disposition légale selon laquelle « toute clause d'un contrat prévoyant des prestations d'obsèques à l'avance sans que le contenu détaillé et personnalisé de ces prestations soit défini est réputée non écrite » doit en l'espèce pleinement s'appliquer. Toute disposition contractuelle présentant la prestation de « thanatopraxie » comme différente de celle de « soins de conservation », alors qu'elles sont strictement équivalentes de par la loi (article L. 2223-19-1 du code général des collectivités territoriales) devrait donc être considérée comme nulle et non avenue !

Les contrats conclus en prévision d'obsèques, au sein desquels les prestations de thanatopraxie sont proposées sans être obligatoires pour autant, doivent être présentés de manière conforme au devis modèle établi par les pouvoirs publics. Dans le cadre de ces contrats souscrits chez les opérateurs du funéraire, les personnes qui souhaitent opter pour un soin de conservation devraient pouvoir l'indiquer clairement sur le document et formaliser leur consentement à cet acte invasif.

Le rapport sur la thanatopraxie des inspections générales des affaires sociales et de l'administration de 2013 déjà cité le préconisait déjà. Pourtant, d'après deux auteurs du rapport entendus par votre rapporteur, elle n'est pas mise en oeuvre . Votre rapporteur souhaite donc que les ministères de l'intérieur et de l'économie puissent travailler conjointement afin de mettre en oeuvre cette préconisation au plus vite . Il propose également d'y ajouter le consentement explicite aux soins de présentation , en en détaillant leur nature afin d'éviter les confusions déjà évoquées 100 ( * ) .

Proposition n° 9 : Formaliser le consentement à la thanatopraxie ou aux soins de présentation dans les contrats prévoyant des prestations d'obsèques à l'avance.

Votre rapporteur regrette en outre certaines pratiques abusives envers les familles qui lui ont été rapportées lors des auditions .

La direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes (DGCCRF), entendue par votre rapporteur, a relevé un taux de 66,9 % d'infractions sur les devis modèles lors d'une campagne de contrôle conduite en 2018 101 ( * ) . La DGCCRF va initier à cet égard un groupe de travail sur les devis modèles dans le cadre du Conseil national de la consommation.

Selon certains professionnels entendus, il peut y avoir différentes anomalies dans les devis : évocation de la toilette, des soins de présentation et des soins de conservation parmi les prestations obligatoires ou confusion des deux types de soins par des dénominations trompeuses (par exemple : un même devis qui présente les deux prestations suivantes : soins de conservation et toilette de conservation...) ; une différence entre le devis et la facture présentée. La thanatopraxie est même - souvent - absente du devis modèle fourni par les opérateurs funéraires alors qu'elle est pourtant proposée.

Or, votre rapporteur estime que la profession du funéraire a tout intérêt à une transparence maximale pour assurer sa crédibilité auprès des familles .

Le Défenseur des droits indique pour sa part, dans sa contribution à la mission d'information, avoir eu connaissance de situations où des familles s'étaient vu imposer de coûteux soins de thanatopraxie , alors qu'il s'agit d'une prestation non obligatoire , ce qui rejoint le témoignage des associations de familles et de consommateurs entendues par votre rapporteur. Selon leurs expériences, les familles sont systématiquement orientées vers la thanatopraxie, sans vraiment savoir si cette opération funéraire est utile, ni si elle engage une dépense supplémentaire. Dans tous les cas, elles doivent prendre cette décision dans une situation de grande vulnérabilité.

Les personnels de chambres mortuaires entendus par votre rapporteur constatent également que les soins de conservation sont parfois vendus aux familles comme indispensables à une présentation respectueuse des défunts à leurs proches alors que ce n'est pas toujours le cas . Ils ont également indiqué à votre rapporteur que certains opérateurs de pompes funèbres facturaient une toilette (lavage et désinfection du défunt) et des soins de présentation, alors même qu'ils n'effectuent pas cette prestation lorsqu'elle a déjà été effectuée dans son intégralité par le personnel des chambres mortuaires ; ou encore facturaient des soins de conservation et des soins de présentation lorsqu'un thanatopracteur intervient alors qu'il effectue obligatoirement une toilette et des soins de présentation lors d'une thanatopraxie.

Votre rapporteur juge que ces pratiques, qui peuvent le cas échéant être considérées comme trompeuses , devraient être plus sévèrement sanctionnées et faire l'objet de contrôles plus fréquents de la DGCCRF , même si la baisse continue des effectifs de ce service de l'État dans les territoires ne facilite pas les choses. Ses agents sont en effet habilités à contrôler le respect des dispositions des arrêtés des 11 janvier 1999, relatif à l'information sur les prix des prestations funéraires, et du 23 août 2010 précité, portant définition du modèle de devis applicable aux prestations fournies par les opérateurs funéraires, entré en vigueur le 1 er janvier 2011, à verbaliser toute forme de tromperie et à veiller au respect des règles de concurrence fixées notamment par les dispositions des articles L. 420-1 et suivants du code de commerce.

Dans le même esprit, le syndicat professionnel des thanatopracteurs indépendants et salariés (SPTIS) a regretté l' écart entre le coût de la prestation d'un thanatopracteur pour les opérateurs de pompes funèbres et la revente de la thanatopraxie auprès du client final . Il a également relevé que la présence sur le marché d'entreprises ayant « industrialisé » la prestation de thanatopraxie et qui salarient leurs thanatopracteurs, tire les prix de la prestation vers le bas grâce aux économies d'échelle que cette situation leur procure.

Votre rapporteur rappelle que les pratiques précitées doivent être sanctionnées si elles sont considérées comme anti-concurrentielles .

La lutte contre les pratiques anticoncurrentielles

Le code de commerce sanctionne :

- « l'exploitation abusive par une entreprise ou un groupe d'entreprises d'une position dominante sur le marché intérieur ou une partie substantielle de celui-ci. », ces abus pouvant prendre la forme de rupture de relations commerciales établies, au seul motif que le partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées (article L. 420-2) ;

- « les offres de prix ou pratiques de prix de vente aux consommateurs abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation, dès lors que ces offres ou pratiques ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'éliminer d'un marché ou d'empêcher d'accéder à un marché une entreprise ou l'un de ses produits » (article L. 420-5).

L'Autorité de la concurrence peut ainsi ordonner aux intéressés de mettre fin à leurs pratiques et leur infliger une sanction pécuniaire (article L. 464-2), tout comme le ministre de l'économie si les faits affectent un marché de dimension locale (article L. 464-9).

Les auteurs de pratiques anticoncurrentielles peuvent aussi se voir infliger des sanctions pécuniaires par l'Autorité de la concurrence (sanction pécuniaire), voire des sanctions pénales pour les personnes physiques qui auraient frauduleusement pris une part personnelle et déterminante dans la conception, l'organisation ou la mise en oeuvre de certaines pratiques (article L. 420-6) 102 ( * ) . Sont ainsi visés les faits d'exploitation abusive d'une position dominante mais pas ceux de pratique de prix abusivement bas.

Source : commission des lois du Sénat.

Proposition n° 10 :  Renforcer les contrôles de la direction générale de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes et sanctionner davantage, sur le fondement des pratiques commerciales trompeuses, les opérateurs funéraires qui :

- imposent des soins de conservation alors qu'il s'agit d'une prestation optionnelle ;

- facturent une toilette funéraire et/ou des soins de présentation sans effectuer cette prestation car il y a déjà été procédé dans son intégralité par le personnel des chambres mortuaires ;

- facturent des soins sans que leur nature (toilette funéraire, soins de présentation, soins de conservation ou thanatopraxie) soit définie ;

- facturent des soins de conservation, une toilette funéraire et/ou des soins de présentation, lorsqu'un thanatopracteur intervient alors qu'il effectue obligatoirement l'ensemble de ces prestations lors d'une thanatopraxie.

3. Clarifier et rendre efficace la procédure d'explantation des prothèses fonctionnant au moyen d'une pile pour réduire le coût imputable aux familles

L'article R. 2213-15 du code général des collectivités territoriales prévoit le retrait des prothèses fonctionnant au moyen d'une pile pour éviter, d'une part, la pollution des sols par les composants de la prothèse en cas d'inhumation et, d'autre part, les dommages sur les appareils de crémation qui pourraient résulter d'une explosion de la pile. Lorsqu'elles ne sont pas retirées, ces prothèses peuvent en effet provoquer des dégâts dans les crématoriums.

Modifié par un décret du 3 novembre 2017 103 ( * ) , cet article prévoit, si la personne décédée est porteuse d'une prothèse fonctionnant au moyen d'une pile, qu'« un médecin ou un thanatopracteur procède à son explantation et atteste de la récupération de cette prothèse avant la mise en bière » .

Conformément au volet administratif du nouveau modèle de certificat de décès en vigueur depuis le 1 er janvier 2018 104 ( * ) , le médecin doit expressément mentionner la présence, identifiée au moment du décès, d'une prothèse fonctionnant au moyen d'une pile . Il y atteste, le cas échéant, du retrait de la prothèse à pile par ses soins. L'opérateur funéraire disposant d'un exemplaire du volet administratif du certificat de décès du défunt, en vertu de l'article R. 2213-1-2 du code général des collectivités territoriales, a connaissance du retrait ou non de la prothèse à pile par le médecin. En cas d'absence de retrait par le médecin, un thanatopracteur intervient pour retirer la prothèse à pile dans un second temps .

Seuls échappent à cette nouvelle obligation les dispositifs médicaux implantables actifs intracardiaques (DMIA) miniaturisés 105 ( * ) .

Les dispositifs médicaux implantables
actifs intracardiaques (DMIA) miniaturisés

Contrairement aux dispositifs médicaux actifs sous-cutanés, le retrait d'un tel DMIA nécessite un acte chirurgical invasif à coeur ouvert ne pouvant être réalisé par un médecin non spécialiste ou un thanatopracteur. Une telle explantation, qui suppose un coût très élevé, porte atteinte à l'intégrité physique des personnes décédées.

Après une expérimentation de dix mois 106 ( * ) , cette exception a été définie de manière générale dans la mesure où, selon le ministère en charge des collectivités territoriales, ces nouveaux dispositifs ne présentent aucun risque en cas de crémation. Elle ne concerne pour l'instant qu'un seul type de dispositif médical implantable, mais pourrait être étendue, le cas échéant, à d'autres dispositifs sur la base d'expertises.

Jusqu'alors 107 ( * ) , l'article R. 2213-15 du code général des collectivités territoriales disposait que le médecin ou le thanatopracteur devait seulement attester du retrait du pacemaker avant la mise en bière, sans préciser qui devait procéder au retrait .

Le Conseil national de l'ordre des médecins considère 108 ( * ) que le retrait des prothèses à pile constitue « un geste technique simple [faisant] partie des derniers services que le médecin peut rendre au défunt et à sa famille ».

Toutefois, dans la pratique, d'après les personnes entendues par votre rapporteur, ce retrait serait effectué le plus souvent par un agent infirmier de la chambre mortuaire , ce dont le médecin pouvait ensuite attester. Les thanatopracteurs le retireraient, le cas échéant, à l'occasion des soins de conservation qu'ils prodigueraient ou, plus rarement, comme une prestation à part entière.

En outre, le précédent modèle de certificat de décès prévoyait seulement la mention de la présence d'une prothèse à pile au moment du décès, sans que le médecin ne mentionne expressément si la prothèse avait déjà été retirée.

À cet égard, la jurisprudence a déjà retenu la responsabilité d'un centre hospitalier en raison de l'absence d'extraction d'une prothèse fonctionnant au moyen d'une pile qui avait entraîné l'explosion d'un appareil de crémation 109 ( * ) . Dans la contribution écrite envoyée à votre rapporteur, l'Association des maires de France et des présidents d'intercommunalité (AMF) indique que les communes vérifient également si ces appareils ont bien été retirés pour des questions à la fois environnementales et de sécurité des équipements funéraires .

D'après les personnes entendues par votre rapporteur, notamment les personnels des chambres mortuaires de l'Assistance publique-Hôpitaux de Paris et le Conseil national de l'ordre des médecins, cette évolution juridique pose une difficulté . En effet, le médecin n'est pas obligé de procéder à l'explantation, puisqu'un thanatopracteur peut y procéder tout autant sans qu'il y ait de hiérarchie entre les deux interventions . Toutefois, s'il y procède, il est désormais légalement tenu de le faire lui-même .

Or, selon votre rapporteur, pour des raisons évidentes de temps et de priorisation de leurs missions de soins des malades, il est peu vraisemblable que les médecins procéderont eux-mêmes à l'avenir à cette extraction, qu'ils déléguaient auparavant à des infirmiers.

Dès lors, l'intervention d'un thanatopracteur deviendrait la norme, ce qui aura un coût induit pour les familles . Que le thanatopracteur procède à l'extraction à l'occasion d'une thanatopraxie ou dans le cadre d'une opération funéraire distincte, il en résulte, en tout état de cause, un surcoût pour la famille. Ces prothèses constituent en outre des déchets d'activités de soins à risques infectieux (DASRI) à éliminer conformément à la loi 110 ( * ) .

De surcroît, il semble à votre rapporteur que la responsabilité de l'opérateur de pompes funèbres n'ayant pas fait procéder à l'extraction d'une prothèse à pile par un thanatopracteur alors qu'il a connaissance, via le certificat de décès, de l'absence d'extraction par le médecin, pourrait voir sa responsabilité engagée en cas de dommage causé à un tiers.

En tout état de cause, l'infraction à cette obligation est passible de la contravention de 5 ème classe prévue à l'article R. 2223-66 du code général des collectivités territoriales et, pour l'opérateur funéraire, de la suspension ou du retrait d'habilitation prévus à l'article L. 2223-25 du code général des collectivités territoriales.

Dans ces conditions, votre rapporteur considère qu'il faudrait favoriser le retrait de ces prothèses par le personnel hospitalier, ce qui supposerait compte tenu de la charge de travail de ces personnels que les conséquences en soient tirées en concertation avec ses représentants, tant pour la question des conditions de travail que de rémunération.

Il considère donc opportun, plutôt que d'imposer aux médecins d'extraire eux-mêmes la prothèse, de formaliser la pratique antérieure en inscrivant parmi les compétences de la profession d'infirmier le retrait des prothèses à pile du corps du défunt . Le médecin continuerait d'attester du retrait, qu'il aurait délégué à un agent du service mortuaire, le thanatopracteur n'intervenant plus qu'en dernier recours ou lorsqu'il a vocation à faire une thanatopraxie.

Se pose également la question de la rétribution de ces actes. En effet, lorsqu'elle est effectuée par un praticien hospitalier, l'extraction est gratuite pour la famille. En revanche, le thanatopracteur intervient sous la forme d'une prestation commerciale prévue dans le cadre du service extérieur des pompes funèbres, dont le coût est mis à la charge de la famille. Il faudrait que, dans tous les cas, l'acte soit rémunéré.

Proposition n° 11 : Clarifier et rendre effective la procédure d'explantation de certains dispositifs médicaux en :

- définissant les responsabilités respectives des thanatopracteurs et des médecins ;

- permettant aux infirmiers d'effectuer cette opération, sur délégation des médecins et en en tirant les conséquences pour leurs rémunération et conditions de travail ;

- définissant une rétribution propre à cette opération pour les médecins et les infirmiers.


* 41 Aucune disposition textuelle n'impose non plus le recours à une toilette ou des soins de présentation.

* 42 Les soins de thanatopraxie n'étaient pas exigés dans la même situation pour les transports de corps d'une durée inférieure à deux heures.

* 43 Le décret n° 2000-318 du 7 avril 2000 relatif à la partie réglementaire du code général des collectivités territoriales a d'ailleurs définitivement abrogé l'article.

* 44 Elles comprennent, dans tous les cas : le cercueil, ses poignées, sa plaque d'identité et sa cuvette étanche, à l'exclusion de ses accessoires intérieurs et extérieurs, ainsi que soit les opérations d'inhumation, soit les opérations de crémation et l'urne cinéraire ou cendrier.

* 45 Ainsi, d'après Antoine Carle et Claude Ferradou, des pays comme l'Australie, le Brésil, la Colombie, les États-Unis d'Amérique, le Canada ou encore la Hongrie exigent que les corps des personnes décédées à l'étranger aient subi des soins de thanatopraxie.

* 46 D'après la même source, les compagnies Austria Airlines, Scandinavian Airlines et British Airways exigent par exemple des soins de thanatopraxie.

* 47 Article R. 2213-22 du code général des collectivités territoriales.

* 48 Un acte de décès est toujours dressé, même hors délai (article 87 du code civil).

* 49 Réalisation d'une autopsie médicale.

* 50 Voir infra partie II.

* 51 La thanatopraxie ne peut logiquement plus être effectuée dès lors que le corps est mis en bière.

* 52 Les autopsies médicales réalisées pour un autre motif ne permettent pas de déroger au délai de droit commun de transport de corps avant mise en bière.

* 53 Liste fixée au c de l'article R. 2213-2-1 du code général des collectivités territoriales.

* 54 L'inverse ne serait pas possible puisque les défunts atteints de cette infection transmissible ne peuvent pas faire l'objet de thanatopraxie (arrêté du 12 juillet 2017 fixant la liste des infections transmissibles prescrivant ou portant interdiction de certaines opérations funéraires mentionnées à l'article R. 2213-2-1 du code général des collectivités territoriales).

* 55 Et donnant lieu au paiement de vacations par les familles (articles L. 2213-15 et R. 2213-8 du code général des collectivités territoriales).

* 56 Loi n° 2008-1350 du 19 décembre 2008 relative à la législation funéraire.

* 57 Loi n° 2015-177 du 16 février 2015 relative à la modernisation et à la simplification du droit et des procédures dans les domaines de la justice et des affaires intérieures.

* 58 Il faut noter que, comme de nombreuses autres opérations funéraires, les soins de conservation relevaient jusqu'au décret n° 2011-121 du 28 janvier 2011 relatif aux opérations funéraires de l'autorisation expresse du maire (Régime d'autorisation fixé depuis 1977 aux articles R. 363-1 du code des communes puis R. 2213-2-1 du code général des collectivités territoriales).

* 59 Qui comprend : « (...) le lieu et l'heure des soins de conservation, le délai de leur réalisation après le décès lorsqu'ils ont lieu à domicile, le nom et l'adresse du thanatopracteur ou de l'entreprise, de la régie ou de l'association et des établissements habilités qui procédera à ceux-ci, le mode opératoire et le produit biocide qu'il est proposé d'employer ».

* 60 À Paris, le préfet de police (article R. 2512-35 du code général des collectivités territoriales).

* 61 Suspension ou retrait de l'habilitation préfectorale ou contravention de 5 ème classe, voir infra partie III. Théoriquement la contravention pourrait aussi s'appliquer à la personne qui a qualité pour pourvoir aux funérailles ayant fait procéder à une thanatopraxie sans la déclarer.

* 62 Voir infra .

* 63 L'article 81 du code civil dispose que : « Lorsqu'il y aura des signes ou indices de mort violente, ou d'autres circonstances qui donneront lieu de le soupçonner, on ne pourra faire l'inhumation qu'après qu'un officier de police, assisté d'un docteur en médecine ou en chirurgie, aura dressé procès-verbal de l'état du cadavre et des circonstances y relatives, ainsi que des renseignements qu'il aura pu recueillir sur les prénoms, nom, âge, profession, lieu de naissance et domicile de la personne décédée ».

* 64 Il en est de même si le décès a eu lieu dans les collectivités d'outre-mer, en Nouvelle-Calédonie ou à l'étranger, situation dans laquelle le délai de six jours court à partir de l'entrée du corps sur le territoire métropolitain.

* 65 Question écrite de Jean-Luc Moudenc, n° 15227, Journal officiel - Assemblée nationale du 2 juillet 2013.

* 66 En vertu de l'article L. 1211-2 du code de la santé publique, les « autopsies sont dites médicales lorsqu'elles sont pratiquées, en dehors du cadre de mesures d'enquête ou d'instruction diligentées lors d'une procédure judiciaire, dans le but d'obtenir un diagnostic sur les causes du décès ».

* 67 Liste fixée au c de l'article R. 2213-2-1 du code général des collectivités territoriales.

* 68 Agence nationale de sécurité sanitaire de l'alimentation, de l'environnement et du travail, Études des alternatives potentielles au formaldéhyde en thanatopraxie , saisine n° 2014-SA-0236 rapport d'expertise collective, Comité d'experts spécialisé « valeurs sanitaires de référence », groupe de travail « Formaldéhyde et substituts », document soumis à consultation en mars 2018. Ce pré-rapport est consultable à l'adresse suivante :

https://www.anses.fr/fr/system/files/2014-SA-0236_Rapport_expertise_collective_anapath_08-02-19.pdf

* 69 Également appelée autopsie médico-scientifique.

* 70 Tous les viscères sont enlevés et les vaisseaux sanguins au niveau du cou sont cautérisés.

* 71 Le thanatopracteur pourra seulement l'injecter dans la cavité abdominale.

* 72 Les hépatites virales sont des maladies du foie dues à une infection (virus) ou d'origine toxique. Elles sont classées de A à G en fonction de la famille du virus en cause. Les hépatites virales B et C représentent les enjeux les plus importants en matière de santé publique. Les thanatopracteurs doivent d'ailleurs être vaccinés contre l'hépatite B (article L. 3111-4-1 du code de la santé publique).

* 73 Introduite en droit français par l'arrêté du 17 novembre 1986 fixant la liste des maladies contagieuses portant interdiction de certaines opérations funéraires prévues par le décret n° 76-435 du 18 mai 1976 modifiant le décret du 31 décembre 1941 (sauf pour l'hépatite A confirmée), maintenue par l'arrêté du 20 juillet 1998 fixant la liste des maladies contagieuses portant interdiction de certaines opérations funéraires prévues par le décret n° 76-435 du 18 mai 1976 modifiant le décret du 31 décembre 1941.

* 74 Conseil national du Sida, note valant avis sur les opérations funéraires pour les personnes décédées infectées par la VIH, 12 mars 2009. Cette note est disponible à l'adresse suivante :

https://cns.sante.fr/rapports-et-avis/note-valant-avis-sur-les-operations-funeraires-pour-les-personnes-decedees-infectees-par-le-vih/

* 75 Haut Conseil de la santé publique, avis relatif à la révision de la liste des maladies contagieuses portant interdiction de certaines opérations funéraires, 27 novembre 2009. Cet avis est consultable à l'adresse suivante : https://www.hcsp.fr/explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=104

* 76 Haut Conseil de la santé publique, avis portant recommandations pour les conditions d'exercice de la thanatopraxie, 20 décembre 2012. Cet avis est consultable à l'adresse suivante :

https://www.hcsp.fr/Explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=303

* 77 Prise en charge médicale des personnes vivant avec le VIH , recommandations du groupe d'experts, sous la direction du Pr Philippe Morlat et sous l'égide du CNS et de l'ANRS, mai 2018. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : https://cns.sante.fr/actualites/prise-en-charge-du-vih-recommandations-du-groupe-dexperts/#Recommandations

* 78 Pistes d'évolution de la règlementation des soins de conservation , Inspection générale des affaires sociales, Inspection générale de l'administration, rapport établi par Jean-Paul Segade, Dominique Bellion et Jacques Fournier, juillet 2013. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : http://www.igas.gouv.fr/IMG/pdf/RM2013-130P_DEF.pdf

* 79 Rapport relatif à la législation funéraire , Défenseur des droits, 29 octobre 2012. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : https://www.defenseurdesdroits.fr/fr/outils/la-legislation-funeraire

* 80 Étude internationale de la législation et des pratiques des soins de conservation (thanatopraxie) dans trente pays d'Europe et d'Amérique du Nord , Haut Conseil de la santé publique, 31 janvier 2017 et consultable à l'adresse suivante :

https://www.hcsp.fr/Explore.cgi/avisrapportsdomaine?clefr=609

* 81 Voir infra partie II sur les précautions universelles standard.

* 82 L'audience n'est pas encore fixée.

* 83 Conseil d'État, première et quatrième sous-sections réunies, 29 novembre 1999, n° 200777.

* 84 Les articles L. 4131-1 à L. 4131-4 posent le principe du droit de retrait. Les articles L. 4132-1 à L. 4132-5 prévoient les conditions de ce droit.

* 85 Voir infra partie II.

* 86 Voir infra partie II.

* 87 Certains auteurs en doctrine plaident plus généralement pour la reconnaissance législative d'une « discrimination par ricochet », ce qui dépasse largement le cadre du rapport de la mission. Il serait ainsi spécifiquement prévu que l'acte discriminatoire reste punissable lorsque, subi par une personne, il est motivé par les caractéristiques d'un proche. Voir notamment La discrimination « par ricochet » : un aspect latent du délit de discrimination , étude par Stéphane Detraz, revue de droit pénal n° 6, juin 2008, étude 10.

* 88 Funescope 2012 : actualisation du portrait économique de la filière funéraire et résultats de l'enquête auprès des distributeurs de services funéraires - partie 3, 16 novembre 2012. Cette étude est accessible à l'adresse suivante :

https://csnaf.fr/sites/csnaf.fr/files/publications/funescope_2012-part3_1.pdf

* 89 L'article L. 2223-21 prévoit que le conseil municipal peut arrêter un règlement municipal des pompes funèbres dans le respect des dispositions du règlement national. Il s'agit d'une faculté. Seul le règlement national est obligatoire. Le règlement municipal est donc une transposition du règlement national et ne peut en aucun cas aller au-delà de ce qu'il prévoit.

* 90 Arrêté du 11 janvier 1999 relatif à l'information sur les prix des prestations funéraires.

* 91 Article L. 112-1 du code de la consommation.

* 92 Arrêté du 23 août 2010 portant définition du modèle de devis applicable aux prestations fournies par les opérateurs funéraires, entré en vigueur le 1 er janvier 2011.

* 93 Ils peuvent aussi les déposer auprès de toute autre commune.

* 94 Entrée en vigueur du décret n° 2017-983 du 10 mai 2017 relatif aux conditions d'intervention des thanatopracteurs et à l'information des familles concernant les soins de conservation qui a notamment créé cette nouvelle obligation.

* 95 La personne ayant qualité pour pourvoir aux funérailles doit être « dûment informée par l'entreprise, la régie ou l'association et ses établissements habilités, par mise à disposition d'un document écrit officiel, de l'objet et de la nature des soins de conservation et des alternatives à ces soins ».

* 96 Ce document est aussi accessible sur internet sur le site du ministère des solidarités et de la santé, à l'adresse suivante :

https://solidarites-sante.gouv.fr/IMG/pdf/information_aux_familles_sur_les_soins_de_conservation_040118.pdf

* 97 Voir infra partie III.

* 98 Voir supra partie I.

* 99 Voir supra .

* 100 Voir supra .

* 101 Ce contrôle concernait toutes les prestations funéraires et pas uniquement la thanatopraxie. Voir à ce sujet les questions écrites de votre rapporteur n° 08553 (réponse publiée le 25 avril 2019, n° 12256 du JO du Sénat) et n° 10407 (réponse publiée le 4 juillet 2019, n° 13523 du JO du Sénat).

* 102 Puni de quatre ans emprisonnement et de 75 000 euros d'amende.

* 103 Décret n° 2017-1534 du 3 novembre 2017 relatif aux conditions d'explantation des prothèses à pile sur les personnes décédées.

* 104 Articles R. 2213-1-1 et suivants du code général des collectivités et arrêté du 17 juillet 2017 relatif aux deux modèles du certificat de décès.

* 105 Arrêté du 19 décembre 2017 fixant la liste des prothèses à pile exonérées de l'obligation d'explantation avant mise en bière prévue à l'article R. 2213-15 du code général des collectivités territoriales.

* 106 Arrêté du 22 septembre 2017 modifiant l'arrêté du 20 mars 2017 portant dérogation à l'obligation de retrait d'une prothèse fonctionnant au moyen d'une pile avant la mise en bière fixée par l'article R. 2213-15 du code général des collectivités territoriales. Cet arrêté a été pris sur le fondement de l'article R. 2223-43 du code général des collectivités territoriales, permettant, dans des circonstances exceptionnelles et lorsque les dispositions relatives aux opérations funéraires se heurtent à des difficultés d'application, d'y pourvoir par des mesures temporaires.

* 107 Jusqu'en 1998, cette mission était d'ailleurs confiée aux seuls médecins.

* 108 Sur son site internet, accessible à l'adresse suivante :

https://www.conseil-national.medecin.fr/documents-types-demarches/documents-types-medecins/pratique/modeles-certificats-deces

* 109 Cour administrative d'appel de Versailles, première chambre, 22 mars 2007, n° 05VE00318.

* 110 Voir infra partie II.

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