II. DES MÉTHODES À MODERNISER

A. UNE TRANSMISSION TARDIVE ET ARCHAÏQUE DES INFORMATIONS AU TRÉSOR PUBLIC

En 2007, votre commission des finances soulignait déjà qu' « entre ministère de la justice et Trésor public , comme entre police, gendarmerie et justice, les interfaces informatiques apparaissent déficientes ». Plus de dix ans après, c'est le même constat qui s'impose à votre rapporteur spécial .

En effet, les modalités de transmission des informations entre les juridictions et les directions départementales des finances publiques (DDFiP) sont archaïques , puisque les relevés de condamnation pénale (RCP) sont envoyés sous format « papier » par les greffes au Trésor public. Les annulations sont transmises suivant la même procédure.

Ainsi, en 2017, les tribunaux correctionnels, les cours d'appel et les cours d'assises ont transmis plus de 500 000 relevés de condamnation pénales au Trésor public, qui a dû effectuer une ressaisie manuelle des informations .

Le relevé de condamnation pénale transmis au Trésor public

« Lorsqu'il exécute les peines prononcées lors d'une audience pénale, le greffe du service de l'exécution des peines adresse aux Trésoreries publiques les relevés de condamnations pénales (RCP) et les relevés de sanctions pécuniaires (RSP) pour recouvrement . Ces derniers incluent outre les amendes pénales prononcées contre les condamnés, les droits fixes de procédure restant à leur charge.

Le RCP est établi en trois exemplaires (un pour le prévenu, un pour le Trésor public et un pour le dossier de procédure).

- En cas de décision contradictoire (prévenu présent à l'audience), l'exemplaire destiné au Trésor public est transmis au plus tard le 2 ème jour ouvrable suivant la condamnation (sous bordereau simplifié).

- En cas de décision contradictoire à signifier (prévenu absent à l'audience, mais ayant eu connaissance de la date) ou de défaut (prévenu absent à l'audience n'ayant pas eu connaissance de la date) : l'exemplaire destiné au Trésor public est transmis le même jour que la saisine de l'huissier aux fins de signification de la décision (sous bordereau simplifié)

- En cas d'ordonnance pénale , délictuelle ou contraventionnelle : l'exemplaire est transmis le même jour que l'envoi de la LRAR au condamné ou le même jour que la notification faite par le procureur de la République ou son délégué.

En cas d'exercice d'une voie de recours (opposition, appel ou pourvoi), un avis d'annulation du RCP doit être adressé au Trésor public par le greffe de l'exécution des peines, au plus tard le 2 ème jour ouvrable suivant la formation de la voie de recours. »

Source : direction des affaires criminelles et des grâces

Interrogés par votre rapporteur spécial, les ministères de la justice et des finances regrettent qu'aucune interface informatique n'ait pu être mise en place alors que le problème est identifié depuis plus de dix ans. Cette question n'étant pas considérée comme prioritaire, elle ne trouve pas de solution concrète .

Le délai moyen entre la date de jugement et celle de prise en charge à la direction départementale des finances publiques est de près de 5 mois (141 jours) pour les jugements des tribunaux correctionnels ou de 6 mois pour les arrêts des cours d'appel (181 jours).

Pour les tribunaux correctionnels comme pour les cours d'appel, les délais moyens se sont réduits, par rapport à 2007, d'environ un mois (respectivement - 35 et - 41 jours), tandis que s'agissant des cours d'assises, les délais ont beaucoup augmenté (+ 102 jours, soit désormais un délai moyen de 314 jours, c'est-à-dire dix mois).

D'importantes disparités géographiques existent : s'agissant des tribunaux correctionnels, le délai est de 25 jours en Charente contre plus de deux ans en Guyane ou 14 mois en Seine-Saint-Denis.

Compte tenu des délais de jugement, il peut s'être écoulé plusieurs années entre le fait générateur et la réception du relevé de condamnation pénale par le Trésor public. Selon la direction départementale des finances publiques de Seine-Saint-Denis, « la mise en oeuvre tardive des procédures (...) aboutit trop souvent au constat de la disparition du débiteur dans un département où la mobilité des populations nuit à l'efficience de notre action ».

Cette situation est donc préjudiciable à plusieurs titres : d'une part, plus la prise en charge est tardive, plus la probabilité de recouvrer est faible ; d'autre part, il arrive que des personnes condamnées se présentent volontairement au Trésor public ou au BEX pour payer une amende dont le Trésor public n'a pas encore eu connaissance. Cette situation conduit les agents à devoir vérifier, préalablement à l'enregistrement de toute amende pénale dans le logiciel de recouvrement des amendes, si elle n'a pas déjà été acquittée , afin de ne pas engager de poursuites à tort.

Enfin, selon le ministère de l'économie et des finances, « les comptables chargés du recouvrement de ces créances sont également confrontés à une difficulté tenant à la qualité des titres émis, l'identification des débiteurs d'amendes étant inégale ».

Recommandation : assurer une interface informatique entre le ministère de la justice et le ministère des finances, afin de permettre une transmission rapide et fiable des informations nécessaires au recouvrement des amendes pénales.

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