B. DES OPÉRATEURS DE SURVEILLANCE OU DE RECHERCHE DE PLUS EN PLUS MOBILISÉS SUR DES MISSIONS NOUVELLES DE VIGILANCE ET D'APPUI DIRECT À LA DÉCISION

Les collaborations entre les opérateurs doivent être renforcées : les cas constatés - organisé, comme SPICy, ou improvisé dans la gestion d'Irma - ont montré les apports opérationnels d'une approche consolidée par le travail en commun d'acteurs complémentaires.

1. L'expérience du projet SPICy à La Réunion

Le projet SPICy est un exemple probant de la pertinence et de l'efficacité d'une collaboration des opérateurs entre eux mais aussi des opérateurs avec les collectivités. L'objectif de SPICy est de développer un système de prévision expérimental des inondations marines et fluviales d'origine cyclonique pour les territoires ultramarins. Le projet, financé par l'Agence nationale de la recherche, est mené sur l'île de La Réunion ; le BRGM en est le coordonnateur, en partenariat avec Météo France notamment.

Il consiste à renforcer les outils de prévision, de prévoyance et d'alerte ainsi que les outils de gestion sur le terrain ; c'est un projet prospectif de recherche qui n'a pas encore de volet opérationnel. Le projet part du constat que, à l'heure actuelle, les autorités nationales et locales outre-mer ne disposent pas d'outils dédiés à la prévision des inondations liées aux cyclones tropicaux . Un tel outil pose la question des modèles adaptés à ces prévisions et à leurs incertitudes mais aussi celle des besoins des acteurs de la gestion de crise, du degré de précision à la rapidité de production de l'information et sa forme.

L'amélioration des prévisions au coeur du projet

Le premier objectif du projet était d'améliorer les prévisions météorologiques, de trajectoire du cyclone , pour définir les seuils de dépassement des vitesses de vent et des volumes de précipitations selon les secteurs de l'île ainsi que le moment du pic de crise.

Le BRGM a traduit ces données météorologiques en conditions marines pour prendre en compte les surcotes liées à la pression atmosphérique, la houle, la bathymétrie et les marées. Cela permet d'avoir une vision temporalisée du risque sur les différentes zones et constitue une aide précieuse à l'anticipation et à la mise en oeuvre graduée des interventions . Une base de données intégrant 500 cas cycloniques a été constituée pour nourrir un processus de modélisation permettant de définir les impacts sur les différents secteurs du territoire en fonction des caractéristiques d'un phénomène . Cela permet d' anticiper les actions de prévention à mener : évacuation de personnes, réquisition de gymnases , par exemple.

Les plans gradués comprennent quatre niveaux d'intervention pour lesquels chaque acteur sait ce qu'il a à faire de façon échelonnée en amont du phénomène. Les données scientifiques sont ainsi traduites en actions, en atlas à l'usage des collectivités.

Cependant, parfois, des phénomènes atypiques tiennent en échec le dispositif de modélisation ; l'acteur scientifique est alors obligé de travailler avec une vision approchée s'appuyant sur un méta-modèle. L'idéal serait, selon le BRGM, d'avoir un outil paramétrable en temps réel.

Source : BRGM

Pour tester ces outils, des exercices ont été réalisés en octobre 2017 sur deux communes, Sainte-Suzanne et Saint-Paul . L'outil s'est révélé trop sophistiqué pour Sainte-Suzanne, nécessitant une formation des personnels techniques, mais s'est avéré très pertinent pour Saint-Paul où la gestion de crise s'est déroulée de façon optimale, avec des initiatives qui n'auraient pas été prises sans cet outil : cela souligne également la nécessité de s'adapter aux capacités variables des collectivités locales.

Un exercice d'anticipation, sur les trois jours précédant le cyclone simulé, a été réalisé avec l'état-major de zone : le BRGM considère que le retour d'expérience a révélé le besoin, en matière d'anticipation, d'adopter une approche par enjeux sur un secteur déterminé et non par métier .

2. Une collaboration opérationnelle inédite BRGM-Météo France lors d'Irma

L'épisode cyclonique Irma à la fin de l'été 2017 a mobilisé l'ensemble des opérateurs scientifiques de l'État . La gestion de crise par le ministère de l'intérieur a pris appui sur les données et connaissances techniques qu'étaient capables de fournir Météo France et le BRGM notamment.

Si Météo France est organisé pour répondre à des situations d'urgence, avec des systèmes d'astreintes, le BRGM n'a pas été conçu a priori pour être mobilisé dans ce type de cas. La collaboration spontanée réalisée entre Météo France et le BRGM a été d'une aide importante pour les décideurs de crise.

Une telle collaboration ne peut cependant pas reposer sur le volontariat et l'engagement spontané des personnels dans l'hexagone comme dans les territoires : s'il est attendu du BRGM un appui immédiat possible en gestion de crise, son organisation devra être adaptée. Aussi, une meilleure coordination et connaissance des acteurs entre eux en amont permettraient une efficacité renforcée.

Recommandation n° 26 : Encourager la formalisation d'un partenariat entre le Bureau de recherches géologiques et minières (BRGM) et Météo France pour des actions conjointes en cas de crise.

3. Le cas des lahars à la Martinique

La surveillance des phénomènes de lahars à la Martinique est réalisée par l'observatoire volcanologique et sismologique de Martinique (OVSM) et la direction régionale du BRGM . La survenue de ces coulées de boues volcaniques est imprévisible et nécessite une alerte urgente des populations et des services de sécurité et de secours.

Au début de l'année 2018, les écoulements fréquents ont été particulièrement lourds à gérer pour l'ensemble des acteurs, notamment l'OVSM et le BRGM, aux moyens humains réduits.

Les mécanismes de surveillance sont ceux de l'observation de la Montagne Pelée et de la rivière Samperre , par l'OVSM. Pour autant, il n'est pas dans les missions initiales de l'observatoire de réaliser une vigilance sur ce type de phénomènes et d'assurer les alertes qui peuvent devoir être faites. La mobilisation des effectifs sur cette mission représente un coût non prévu, d'une part, mais vient, d'autre part, au détriment des autres missions, notamment de recherche.

Le système de détection des lahars au Prêcheur repose sur un dispositif d'écoute des bruits de la rivière par géophones , d'une part, et, d'autre part, sur un dispositif pendulaire de cinq capteurs positionnés à différentes hauteurs du lit de la rivière, ce second système étant peu précis, le creusement du lit de la rivière faussant par exemple les réglages préalables. Le système actuel est en cours de modernisation, avec de nouveaux réglages et des changements de certains outils électroniques.

Recommandation n° 27 : Garantir une disponibilité des personnels du BRGM et des observatoires sur l'ensemble des risques non prévisibles, et une capacité de mobilisation à l'approche de risques prévisibles.

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