B. UNE AIDE PARFOIS DÉTERMINANTE POUR LES TERRITOIRES VULNÉRABLES ET LES ZONES DE MONTAGNE

1. Une répartition des crédits entre régions plus ou moins corrélée au niveau de richesse

Aux termes de la circulaire du 9 novembre 2000, la section locale du FNADT est répartie en fonction du contenu de chaque contrat de plan, en tenant compte de critères démographiques, économiques et sociaux.

La comparaison du FNADT versé par habitant en moyenne entre 2001 et 2013 et du PIB moyen de chaque région sur cette même période confirme qu'il n'y a pas de corrélation stricte entre le niveau de richesse et le FNADT reçu . Néanmoins, les principales régions bénéficiaires au cours des dernières années tendent à avoir un PIB par habitant inférieur à la moyenne nationale. Certaines d'entre elles présentent un caractère majoritairement rural, tel que le Limousin ou l'Auvergne, tandis que d'autres sont des régions confrontées à des enjeux de reconversion économique, comme la Lorraine ou le Nord Pas-de-Calais. L'Île-de-France est la région ayant reçu le plus faible montant de FNADT par habitant (environ 33 centimes en moyenne entre 2001 et 2013).

La répartition du FNADT s'explique également pour une large part par le niveau d'aide versé par les fonds antérieurs au FNADT - par exemple le Nord Pas-de-Calais se distingue de la Picardie en raison de la contribution antérieure du GIZORM à la restructuration du bassin minier - et par les opérations d'aménagement de grande envergure décidées au niveau national. La Basse-Normandie a ainsi bénéficié d'un niveau d'aide élevé en raison de l' opération de rétablissement du caractère maritime du Mont-Saint-Michel .

Les régions ultra-marines constituent un cas à part : même si elles perçoivent de faibles montants de FNADT, elles bénéficient également d'aides financières spécifiques de l'État.

Classement des régions en fonction du FNADT reçu par habitant et du PIB
par habitant entre 2001 et 2013

(euros)

Source : commission des finances du Sénat (à partir des données du CGET et de l'INSEE)

2. Le ciblage par certaines régions de territoires ruraux

L'analyse des crédits programmés dans le cadre des CPER indique que le FNADT finance à la fois des territoires urbains, péri-urbains et ruraux . Considérant que la notion de ruralité est complexe à définir et que l'approche démographique retenue par l'Insee - consistant à classer comme rurales les communes de moins de 2 000 habitants - est « très réductrice et peu adaptée aux enjeux d'aménagement du territoire » 35 ( * ) , le CGET ne fournit pas de statistiques par catégorie de territoire ; le système de suivi du FNADT ne le permet d'ailleurs pas.

Si le FNADT intervient avant tout en faveur de territoires « fragiles » ou « vulnérables » qu'ils soient urbains ou ruraux, certaines régions ont mis en place des actions de soutien spécifiques en faveur des territoires ruraux . À titre d'exemple, la région Pays de la Loire a sélectionné douze territoires à dominante rurale au titre du volet territorial du CPER 2015-2020, dont huit présentent des enjeux de revitalisation économique et quatre présentent des « singularités » 36 ( * ) . La région Bourgogne a quant à elle décidé de flécher 2 millions d'euros de FNADT sur des territoires « hyper-ruraux » 37 ( * ) cumulant faible densité démographique, vieillissement de la population et éloignement des pôles de centralité.

3. Des dispositifs nationaux tendant à privilégier les territoires en difficulté

Malgré les réticences du CGET à classifier les interventions du FNADT entre territoires urbains et ruraux, les comités interministériels de la ruralité tenus depuis mars 2015 38 ( * ) ont promu les actions de soutien du fonds destinées aux territoires ruraux . D'après la typologie transmise par le CGET, il est ainsi possible de classer dans cette catégorie les pôles d'excellence rurale, les actions de soutien aux maisons de services au public (MSAP), aux maisons de santé et les opérations de revitalisation des centres-bourgs, qui représentent un montant total de FNADT de 19,6 millions d'euros en AE et 30,2 millions d'euros en CP en 2016 .

Typologie des dispositifs nationaux financés par le FNADT

(montants en millions d'euros)

Dispositif

Territoires ruraux

Autres territoires

Montant prévu en 2016

Pôles d'excellence rurale

x

16,6 (CP)

Sites de défense (CRSD / PLR)

x

10,4 (AE)

15,5 (CP)

Maisons de services au public (MSAP)

x

7,2 (AE)

7,6 (CP)

Maisons de santé pluridisciplinaires

x

2,0 (CP)

Revitalisation des centres-bourgs

x

6,0 (CP)

Source : CGET

a) Les pôles d'excellence rurale (PER)

En décembre 2005 , un premier appel à projets baptisé « pôles d'excellence rurale » (PER) fut lancé par la DATAR, en vue de soutenir des projets innovants et créateurs d'emplois en milieu rural. Il s'agissait du premier appel à projets sélectif visant spécifiquement les territoires ruraux en France. Était éligible à ce dispositif toute structure porteuse de projet, localisée en dehors d'une aire urbaine de plus de 30 000 habitants , mettant en place une démarche partenariale entre le secteur public et le secteur privé et nécessitant une subvention de l'État d'un montant minimal de 300 000 euros . Le taux maximal de la subvention était fixé à 33 % mais pouvait être porté à 50 % en zone de revitalisation rurale et à 75 % dans les départements d'outre-mer. Le projet devait également s'inscrire dans l'une des quatre thématiques prédéfinies : la promotion des richesses naturelles, culturelles et touristiques, les bioressources, l'offre de services et l'accueil aux nouvelles populations ainsi que les enjeux technologiques des productions industrielles, artisanales et de services.

Selon une évaluation conduite en 2011 39 ( * ) , les 379 PER labellisés par l'État ont produit un effet de levier économique significatif , en permettant de créer ou de maintenir 3 500 emplois au total . En outre, l'appel à projets a été « effectivement déclencheur de projets », tandis que « l'apprentissage de la coopération public-privé [a] constitu [é] une valeur ajoutée pour presque tous les territoires participants » 40 ( * ) .

Au regard de ces résultats positifs, un deuxième appel à projets fut lancé fin 2009 au titre duquel 263 nouveaux projets furent sélectionnés entre 2010 et 2011. Ces projets sont aujourd'hui, pour la plupart, achevés. Il n'existe toutefois pas d'évaluation concernant cette deuxième génération de PER.

b) Les maisons de services au public

En 2013, le programme national de maisons de services au public (MSAP) s'est substitué à l'initiative « Relais services publics », initiée en 2006, et de l'expérimentation « + de services au public » lancée en 2010 pour une durée de trois ans. Ces deux précédentes initiatives avaient permis de donner un élan aux initiatives de mutualisation des services au public, sous forme de guichet unique. En 2014, on comptait en effet 363 Relais services publics , répartis dans 19 régions et 65 départements.

Les maisons de services au public sont des lieux d'accueil disposant d'un ou plusieurs agents chargés d'informer les usagers et de les accompagner dans leurs démarches, par exemple en matière de prestations sociales et d'aide à l'emploi. À ce titre, elles « peuvent rassembler des services publics relevant de l'État, des collectivités territoriales ou de leurs groupements, d'organismes nationaux ou locaux chargés d'une mission de service public ainsi que les services nécessaires à la satisfaction des besoins de la population » 41 ( * ) et font l'objet d'une convention-cadre conclue par les participants.

Afin de répondre au déficit de services de proximité dans les zones rurales, le Gouvernement a fixé l'objectif d'atteindre 1 000 maisons de services au public d'ici la fin de l'année 2016 42 ( * ) . Jusqu'en 2015, le FNADT subventionnait 25 % du budget de fonctionnement des maisons labellisées, avec un plancher de subvention à 10 000 euros et un plafond à 17 500 euros, le reste du financement étant porté par les porteurs de projet.

Depuis le 1 er janvier 2016, l'aide s'élève à 50 % du budget de fonctionnement, avec un plancher à 10 000 euros et un plafond à 35 000 euros , grâce au fonds national inter-opérateur 43 ( * ) , doté de 19 millions d'euros pour trois ans et rattaché par voie de fonds de concours au programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire ».

Par ailleurs, La Poste s'est engagée à accueillir 500 maisons de services au public dans ses bureaux situés en zone rurale, couvrant ainsi la moitié des frais de fonctionnement des maisons, et à déployer 1 000 facteurs-guichetiers afin de maintenir une présence postale dans les territoires à faible activité.

Au 18 mai 2016, on recensait 495 maisons de services au public , soit une progression de 36 % par rapport à août 2015. Si l'objectif d'atteindre 1 000 maisons permet, sans aucun doute, d'engager une dynamique en faveur de ce type de projet, l'intégration de ces nouvelles maisons dans la stratégie de développement du territoire et la capacité des collectivités à les animer et à les faire évoluer constituent un enjeu essentiel pour leur réussite et leur prospérité à moyen et long termes.

c) Les maisons de santé pluridisciplinaires

Dans les zones rurales, la section générale du FNADT est également intervenue en faveur du développement des maisons de santé pluridisciplinaires. Un plan de déploiement de 250 maisons en milieu rural 44 ( * ) a ainsi été défini en 2011, pour une durée de trois ans. La subvention s'élevait à 100 000 euros par maison 45 ( * ) , à condition que celle-ci soit située dans une zone fragile identifiée par le schéma régional d'organisation des soins, et destinée à couvrir des dépenses d'investissement.

Bien que le plan de 2011-2013 soit aujourd'hui achevé 46 ( * ) , les maisons de santé peuvent également être financées par du FNADT mais uniquement dans le cadre des CPER, selon les orientations retenues par les régions 47 ( * ) .

Le soutien financier du FNADT aux maisons de santé n'en demeure pas moins marginal, ces dernières étant principalement financées par les agences régionales de santé, à travers le Fonds d'intervention régionale (FIR), par les collectivités territoriales, la DETR, et, depuis 2016, le FSIL.

d) Les opérations de revitalisation des centres-bourgs

Le programme de revitalisation des centres-bourgs a été lancé en 2014, sur une base expérimentale, par un appel à manifestation d'intérêt (AMI) du CGET à destination des communes centres-bourgs, rurales ou périurbaines, de moins de 10 000 habitants . Environ 300 centres-bourgs éligibles ont été identifiés par les services déconcentrés de l'État, parmi lesquels seuls 54 ont été retenus. Au sein des 230 millions d'euros prévus pour ces lauréats, le FNADT finance environ 15 millions d'euros d'aide à l'ingénierie sur l'ensemble de la période. Les communes lauréates peuvent également être inscrites, au titre de cette expérimentation, au sein du volet territorial des CPER et ainsi bénéficier du soutien du conseil régional.

Sources de financement en faveur des centres-bourgs

(montants en millions d'euros)

Enveloppes définies dans le cadre de l'AMI « centres-bourgs » pour la période 2014-2020

FNADT (ingénierie)

15

Aides à la pierre

15

Aides de l'agence nationale de l'habitat (Anah)

200

Fonds de soutien à l'investissement public local (FSIL)

Enveloppe centres-bourgs et villes de moins de 50 000 habitants

300

Source : commission des finances du Sénat

Au regard de l'intérêt suscité par l'AMI centres-bourgs, une enveloppe de 300 millions d'euros a été identifiée au sein du FSIL afin de soutenir les opérations de revitalisation des centres-bourgs et des villes de moins de 50 000 habitants. Enfin, certains comités de massif, comme le massif central, ont lancé des appels à projets spécifiques en faveur de l'attractivité des centres-bourgs.

Ces initiatives sont, certes, positives mais devront, à l'avenir, être davantage coordonnées, afin d'éviter une trop grande complexification pour les porteurs de projet.

4. Le FNADT : principale source de financement de l'État en faveur de la politique des massifs

À la suite de l'intégration du FIAM au sein du FNADT, celui-ci participe au financement des conventions interrégionales de massif , à hauteur de 120 millions d'euros pour la période 2007-2014 et de 112 millions d'euros pour 2015-2020 , soit un montant annuel en légère hausse.

Le FNADT constitue ainsi le principal instrument financier de soutien de l'État en faveur de la politique de la montagne, définie par la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne 48 ( * ) . Sur la période 2015-2020, il représente en effet 73 % de l'aide de l'État et près de 34 % du total des financements au profit des conventions de massif 49 ( * ) . Parmi les cinq massifs, le massif central est le mieux doté par le FNADT (35 millions d'euros).

Maquette de financement des conventions de massif 2015-2020 *

(en millions d'euros)

État

Régions

Départements

Total

Massif des Alpes

50,8

46,1

96,9

Dont FNADT

27,0

Massif du Jura

13,5

15,5

29,0

Dont FNADT

13,0

Massif central

36,7

43,3

10,0

90,0

Dont FNADT

35,0

Massif des Pyrénées

38,5

38,5

77,0

Dont FNADT

22,0

Massif des Vosges

15,3

25,1

0,5

40,9

Dont FNADT

15,0

Total

154,89

168,5

10,5

333,9

* Hors FEDER.

Source : CGET

À l'instar des CPER, les conventions interrégionales de massif financent des actions très diverses, qui font l'objet de peu d'évaluations . Cette situation est regrettable, en particulier dans la perspective de l'examen du projet de loi de modernisation, de développement et de protection des territoires de montagne, présenté en Conseil des ministres le 14 septembre dernier. Elle contribue à l'affaiblissement de la politique dédiée à la montagne constaté par les députées Annie Genevard et Bernadette Laclais dans leur rapport sur l'acte II de la loi « montagne », remis au Premier ministre en juillet 2015 50 ( * ) .


* 35 Réponse du CGET au questionnaire de votre rapporteur spécial.

* 36 Risques majeurs, insularité, territoires concernés par le transfert de l'aéroport du Grand Ouest.

* 37 Pays du Nivernais Morvan et Pays du Châtillonais.

* 38 Comité interministériel aux ruralités du 13 mars 2015 à Laon, Comité interministériel aux ruralités du 14 septembre 2015 à Vesoul et comité interministériel aux ruralités du 20 mai 2016 à Privas.

* 39 Tercia consultants, Bilan-évaluation de l'appel à projets pôles d'excellence rurale première génération, septembre 2011.

* 40 Ibid.

* 41 Article 27 de la loi n° 2000-321 du 12 avril 2000 relative aux droits des citoyens dans leurs relations avec les administrations, tel que modifié par l'article 100 de la loi n° 2015-991 du 7 août 2015 portant nouvelle organisation territoriale de la République.

* 42 Cf. Priorité n° 1 du comité interministériel aux ruralités du 13 mars 2015.

* 43 Auquel contribuent les opérateurs nationaux participant aux MSAP, tels que Pôle emploi, La Poste ou la Caisse nationale d'allocations familiales.

* 44 Cet objectif fut ensuite relevé à 300 maisons de santé. Pour mémoire, le Gouvernement a fixé l'objectif de 1 400 maisons de santé en service d'ici 2018, sur l'ensemble du territoire.

* 45 Financés par la section générale.

* 46 Des crédits de paiement d'un faible montant sont toutefois encore inscrits en 2016 en vue de couvrir les engagements réalisés entre 2011 et 2013.

* 47 À titre d'exemple, la région Centre-Val de Loire a fléché une part importante de l'enveloppe de FNADT attribuée pour 2007-2013 sur le soutien aux maisons de santé.

* 48 Loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne.

* 49 Ces conventions couvrent environ 6 000 communes situées en zone de montagne, pour 6,1 millions d'habitants.

* 50 Annie Genevard et Bernadette Laclais, « Un acte II de la loi montagne : pour un pacte renouvelé de la nation avec les territoires de montagne », rapport au Premier ministre, juillet 2015.

Page mise à jour le

Partager cette page