C. LE PASSIF DES LÉGISLATURES ANTÉRIEURES : UN STOCK VOUÉ À PÉREMPTION ?

Depuis plusieurs années, le bilan d'application des lois fait le constat que les décrets parus pour la période de référence ne concernent jamais -ou seulement à de rares exceptions près- des lois promulguées lors des législatures antérieures à la période 2007-2012.

La base APLEG recense ainsi un certain nombre de lois anciennes promulguées entre juin 1981 et juin 2007 qui n'ont pas du tout été mises en application (9 lois) ou seulement de manière partielle (163 lois), mais dont tout laisse à penser que beaucoup de décrets d'application seraient aujourd'hui sans objet, quand ce ne serait pas ces lois elles-mêmes qui le seraient devenues.

Dans leurs observations annuelles, plusieurs commissions permanentes évoquent cette question. La commission des Affaires économiques souligne ainsi que la loi du 13 juillet 2005 fixant les orientations de la politique énergétique n'est toujours pas totalement applicable (contrairement à la loi pourtant beaucoup plus récente du 13 juillet 2011 visant à interdire la technique de fracturation) et que dans ce secteur de l'énergie, « les travaux relatifs à ces mesures réglementaires prévues depuis près de huit ans doivent être repris par le Gouvernement pour mettre un terme à ce délai d'attente d'ores et déjà excessif ».

Mais dans l'ensemble, les commissions permanentes ne semblent pas attacher à la résorption du stock très ancien la même importance immédiate qu'à celle des lois plus récentes, et dont comme telles la mise en application leur paraît prioritaire.

De fait, comme le relève très lucidement la commission de la Culture, « n'est-il pas un peu illusoire de continuer à comptabiliser les textes réglementaires d'application de lois dont la plus ancienne remonte à 1995 » (et même bien
au-delà, pour d'autres commissions) ? Ne faut-il pas admettre qu'au fil des législatures et d'alternance en alternance, ces textes ne correspondent plus nécessairement aux priorités politiques du moment, et que leur mise en application tant d'années après pourrait ne plus être pertinente compte tenu de différentes évolutions survenues entretemps (avancées technologiques, médicales, sociologiques, etc...) ?

Sur le strict plan juridique, cette question se révèle très controversée, car elle pourrait introduire l'idée qu'avec le temps, certaines dispositions législatives restées en souffrance faute de décrets d'application finiraient par devenir obsolètes avant même d'avoir trouvé à s'appliquer.

La commission sénatoriale pour le contrôle de l'application des lois se gardera bien d'accréditer cette notion contraire au caractère intangible de la loi tant qu'elle n'a pas été dûment abrogée... Mais avec les précautions d'usage, les commissions permanentes trouveraient peut-être opportun de ne plus prendre en compte dans leurs statistiques ces textes anciens, car ils tirent artificiellement vers le bas le pourcentage de mise en application du stock législatif dont elles assurent le suivi.

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