TRAVAUX DE LA COMMISSION AUDITION POUR SUITE À DONNER

COMMISSION DES FINANCES

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Présidence de M. Jean Arthuis, président

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Mardi 12 octobre 2010

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Ordre du jour

• Audition pour suite à donner à l' enquête de la Cour des comptes , transmise en application de l'article 58-2° de la LOLF, sur l' Agence de l' environnement et de la maîtrise de l' énergie (ADEME) (ouverte aux membres de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire, ainsi qu'à la presse).

M. le président - La séance est ouverte.

Monsieur le Président, Mesdames et Messieurs, mes chers collègues, nous voici à nouveau réunis pour une audition de suivi d'enquêtes réalisées par la Cour des comptes en application de l'article 58-2° de la LOLF. Celle qui nous occupe aujourd'hui concerne l'Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie.

Nous devons cette enquête à la demande de notre collègue Fabienne Keller, rapporteur spécial de la mission « Ecologie, développement et aménagement durables ».

Celle-ci a en effet constaté, dans le cadre de l'examen des derniers projets de lois de finances, la montée en puissance de l'agence en tant qu'opérateur principal du Grenelle de l'environnement, bénéficiant à ce titre de ressources budgétaires et fiscales conséquentes. La demande d'enquête visait donc, en premier lieu, à vérifier que l'ADEME fait un bon usage de ces importantes ressources. De plus, la Cour s'est attachée dans son rapport à analyser la gestion des fonds confiés à l'Agence au titre des investissements d'avenir. A cet égard, l'enquête à révélé l'existence d'un dispositif critiquable, qui concerne d'ailleurs de nombreux opérateurs, au-delà de l'ADEME.

Nous avons invité à cette audition nos collègues de la commission de l'économie, du développement durable et de l'aménagement du territoire. Je rappelle également que notre réunion est ouverte à la presse.

Nous recevons, pour la Cour des comptes, Christian Descheemaeker, président de la septième chambre, Jean-Luc Lebuy, conseiller-maître, Olivier Ortiz, conseiller référendaire, ainsi que Sophie Planté, rapporteure.

L'ADEME est représentée par Xavier Lefort, directeur général délégué et le Commissariat général au développement durable par Michèle Rousseau, directrice, adjointe auprès de la Commissaire générale.

Pour le ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement (MEDDTL), nous entendrons Jean-François Monteils, secrétaire général et Alexis Vuillemin, conseiller au cabinet du ministre.

Enfin, pour le ministère du budget, des comptes publics et de la réforme de l'Etat, nous recevons Laurent Machureau, sous-directeur de la 4 ème sous-direction du budget, David Litvan, chef du service comptable de l'Etat et Yannick Girault, chef de la mission d'audit national au sein de la direction générale des finances publiques.

Afin de préserver une possibilité effective de dialogue et de débat, je demande que les présentations de la Cour des comptes et des administrations concernées se limitent aux observations principales.

Ensuite, chaque commissaire qui le souhaitera pourra librement poser ses questions.

Je rappelle aux membres de la commission des finances que nous aurons, ensuite, à prendre une décision sur la publication de l'enquête de la Cour des comptes au sein d'un rapport d'information.

Je propose que notre collègue Fabienne Keller, rapporteur spécial de la mission « Écologie, développement et aménagement durables », intervienne à titre liminaire, puis j'inviterai les représentants de la Cour des Comptes à prendre la parole.

Mme Fabienne Keller , rapporteur spécial des crédits de la mission « écologie, développement et aménagement durables » - Cette demande d'enquête adressée à la Cour des comptes s'inscrit dans la continuité des travaux engagés depuis plusieurs années par notre commission au sujet l'ADEME. Notre collègue Philippe Adnot, en 2001, avait déjà pointé un certain nombre de dysfonctionnements dans la gestion interne de l'établissement.

En 2006, la Cour des comptes avait déjà établi un rapport et y avait ajouté des éléments de valeur ajoutée en faveur de la gestion de l'ADEME. Elle avait mis en évidence un certain nombre de problèmes relatifs aux procédures de contrôle interne et souligné un éparpillement des services. Il était important d'assurer un suivi de ces conclusions.

Depuis, d'importants bouleversements sont intervenus dans le champ d'action de l'Agence, notamment parce qu'elle est très largement en charge de la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement et du grand emprunt national.

L'ADEME est ainsi un des principaux opérateurs de mise en oeuvre du Grenelle, en particulier sur les questions du traitement des déchets et des économies d'énergie. Elle bénéficie à ce titre de ressources fiscales très importantes. Dans le projet de loi de finances pour 2011, l'affectation de la TGAP représentera presque 500 millions d'euros, montant considérable.

La commission des finances a souvent constaté la débudgétisation des ressources destinées à mettre en oeuvre les politiques publiques. C'est un mouvement qu'il nous importe d'accompagner dans nos modes de travail et c'est le sens de cette mission, qui ne s'inscrit pas seulement dans l'analyse a posteriori mais aussi dans une volonté de contrôler la dynamique d'évolution de l'ADEME.

En effet, l'affectation directe de ressources à des opérateurs a pour conséquence de faire échapper à l'autorisation parlementaire et à la mesure de la performance l'emploi de ressources publiques significatives.

Les travaux de la Cour visaient à évaluer la gouvernance et la gestion courante de l'ADEME, afin de vérifier que ces objectifs sont biens assortis d'indicateur de performance, mais également à analyser sa politique d'intervention, notamment en matière de traitement des déchets et d'économie d'énergie, dans ses relations avec les collectivités territoriales.

Enfin, l'enquête avait pour objet de déterminer si les ressources fiscales affectées depuis 2009 ont été correctement utilisées, eu égard à la capacité de l'opérateur de s'acquitter rapidement et efficacement de ses nouvelles missions en détaillant l'emploi des fonds affectés à la mise en oeuvre du Grenelle de l'environnement.

Je remercie les magistrats de la Cour qui se sont rendus à trois reprises en province - même si je n'ai pas eu l'occasion des les accueillir à Strasbourg- pour leur implication dans ce dossier.

Je salue également les représentants des ministères. Nous sommes ici dans une volonté de contrôle mais aussi de construction commune des nouvelles missions confiées à l'ADEME.

M. le président - Monsieur le Président, vous avez la parole.

M. Christian Descheemaeker, président de la septième chambre de la Cour des comptes - Merci.

Les rapporteurs ne se sont en effet pas rendus à Strasbourg, Olivier Ortiz, ici présent, étant encore il y a quelques mois président de la Chambre Régionale des Comptes d'Alsace ; certains se seraient peut-être demandé à quel titre il venait et avec quelles fonctions.

La Cour des comptes a contrôlé l'ADEME à la demande de la commission des finances du Sénat en application de l'article 58-2° de la LOLF. L'ADEME ayant le statut d'un établissement public à caractère industriel et commercial, la procédure « entreprise publique » lui est applicable. Le contrôle de la Cour débouche de ce fait sur deux documents distincts au contenu très proche : la communication 58-2 et le rapport particulier sur l'organisme.

Le contrôle des comptes et de la gestion de l'ADEME conduit la Cour à une appréciation générale plutôt positive sur l'usage qu'elle fait de ses ressources.

Quelques remarques sur la place de l'Agence par rapport aux services de l'Etat.

Les missions de l'ADEME sont fixées par la loi et codifiées dans le code de l'environnement. Elles sont particulièrement larges au point que se pose d'emblée la question de l'articulation de l'Agence avec les services de l'Etat et d'autres opérateurs de l'Etat.

S'agissant de l'Etat, la question du positionnement de l'Agence se pose à l'égard de l'administration centrale mais aussi, en province, à l'égard de l'articulation des nouvelles directions régionales de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DREAL) avec les anciennes délégations régionales, aujourd'hui directions régionales de l'ADEME.

S'agissant des autres opérateurs de l'Etat, comme l'Agence nationale de la recherche, la réponse a pu sembler résider dans une spécialisation de l'ADEME - dans certains domaines des déchets par exemple - mais l'Agence revendique d'exercer pleinement l'ensemble des missions qui lui sont dévolues et d'être ainsi l'interlocuteur naturel et le partenaire de référence du grand public, des entreprises, des collectivités territoriales et de l'Etat sur les politiques environnementales, ce qui fait beaucoup.

L'ADEME s'est organisée autour de quatre métiers : connaître, convaincre et mobiliser, conseiller et aider à réaliser.

Quelques mots sur les finances de l'ADEME.

Le mode de financement de l'ADEME a souvent changé, combinant de manière fluctuante des dotations budgétaires de l'Etat et des taxes affectées. Jusqu'en 1998, les deux sources ont coexisté ; vient ensuite, de 1999 à 2005, une période durant laquelle le financement a été assuré par le seul budget de l'Etat. En 2006, une part du produit de deux taxes, dont la taxe intérieure sur la consommation de gaz naturel, a été affectée à l'Agence ; en 2007, l'apport des recettes fiscales a été accru. En 2008, nouveau changement dans l'alimentation par des recettes fiscales. En 2009, nouvel appoint de taxes affectées.

A ces ressources budgétaires et fiscales s'ajoutent des recettes affectées par des organismes publics comme l'Agence nationale de la recherche ou le fonds démonstrateur de recherche.

Ce mode de financement basé sur des ressources affectées explique que, dans ses premières années d'existence, l'ADEME avait accumulé des excédents de crédits importants. En 1998, le passage à un financement sur dotations budgétaires de l'Etat a été l'occasion de résorber ces excédents mais le coup de frein a été si brutal que l'Agence s'est trouvée à court de crédits de paiement durant plusieurs années. Cette crise financière à laissé quelques souvenirs, la situation n'étant réellement rétablie que depuis 2007.

Le Grenelle de l'environnement a augmenté très sensiblement les moyens de l'Agence en prévoyant un programme d'intervention de 1,7 milliard d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 862 millions d'euros en crédits de paiement (CP) pour la période 2009-2011. Des discussions se sont poursuivies pour rendre cette prévision cohérente avec le budget triennal de l'Etat pour 2011-2013 et faire en sorte qu'il en aille de même pour le contrat d'objectifs.

L'ADEME compte 1 032 agents au 31 décembre 2009, soit une augmentation de 12 % au cours des deux dernières années, qui ont vu les interventions de l'ADEME augmenter fortement. Une réelle tension existe sur ses effectifs et le recours à la sous-traitance et à l'intérim, quoique limité, s'accroît. Il convient de noter que l'Agence n'est pas soumise à la règle du non-remplacement d'un départ à la retraite sur deux, règle que l'Etat a étendue à la plupart de ses opérateurs.

On peut regretter que l'ADEME, qui dispose du statut d'établissement public industriel et commercial (EPIC) de manière à dire vrai assez artificielle, étant donné la nature de ses ressources, n'en profite pas pour user de la souplesse que confère ce statut dans la gestion de son personnel. Au fond, l'ADEME est un EPIC géré comme une administration. C'est un constat.

A ces questions s'ajoutent quelques remarques sur la gestion immobilière de l'ADEME qui, pour des raisons historiques, a trois sites centraux : Angers, Paris et Valbonne. Un progrès a été constaté sur la période contrôlée dans la mesure où les différentes implantations qui existaient à Angers ont été regroupées dans un même immeuble. Il n'en reste pas moins regrettable que l'ADEME n'ait pas réussi à avoir un site central ; c'est peut-être une vision technocratique mais il n'est pas toujours facile de fonctionner entre Paris, Angers et Valbonne, même en recourant très largement à la téléconférence.

Autre remarque : une petite moitié des effectifs de l'Agence est implantée en province. Malgré la très grande étendue de ses compétences, qui impose la spécialisation de ses agents, l'ADEME a choisi de conserver une équipe, souvent petite, dans chaque région. On peut s'interroger sur l'aptitude d'une équipe de quelques personnes implantée dans un chef-lieu de région à répondre à toutes les questions qui peuvent lui être posées.

J'en viens aux modes d'intervention.

L'ADEME contribue à l'orientation et à l'animation de la recherche, mais n'en fait pas elle-même. Elle intervient dans le financement de recherches. L'ADEME aide à la réalisation, accorde des subventions - parfois des garanties.

S'agissant de l'aide à la réalisation, l'ADEME participe au financement de quelques grands équipements, comme des unités d'incinération d'ordures ménagères ou des réseaux de chaleur. Elle finance aussi une multitude de petits projets à propos de sujets extrêmement variés correspondant à l'ampleur de ses missions. La Cour pense que l'Agence ne pourra durablement financer autant de petits projets si le financement par l'ADEME n'est pas exemplaire. Financer l'achat de trois voitures électriques par une petite commune relève-t-il des tâches de l'ADEME ? Cela changera-t-il la façon de fonctionner des collectivités territoriales ? Je rappelle que l'ADEME a pour ambition de transformer le mode de vie de nos concitoyens, leur façon de se loger et de se déplacer.

Un premier bilan de l'utilisation des fonds Grenelle fait apparaître que l'ADEME a su s'adapter, dans un délai rapide, à une montée en puissance des politiques publiques dont elle est le principal opérateur. La réponse ne vaut évidemment pas pour l'avenir mais c'est un bon point donné à l'ADEME. Au cours des dernières années, les dépenses d'intervention ont augmenté et les services de l'ADEME ont pu suivre.

La communication pour « convaincre et mobiliser » occupe une place importante dans les dépenses de l'ADEME. L'effectif consacré à cette fonction est 250 ETP, soit 20 % de l'effectif total de l'ADEME. Cela signifie que les dépenses de communication sont forcément assez élevées. En 2010, 72,7 millions d'euros d'interventions et 195 millions d'euros de fonctionnement leur sont dédiés.

La fonction de conseil pèse autant dans les effectifs de l'ADEME que la communication, soit 209 ETP. Le conseil peut être donné directement au décideur ou indirectement par des relais, notamment les professionnels. Or, chacun sait combien les procédés les plus innovants ne valent que par la manière dont ils sont installés. Je pense aux installations de chauffage : si les professionnels ne savent pas installer convenablement les appareils les plus modernes, le gain annoncé ne sera pas atteint.

J'en viens enfin à la gestion des investissements d'avenir, au grand emprunt et à son utilisation.

Le grand emprunt concerne l'ADEME à hauteur de 2,85 milliards d'euros pour la gestion de quatre actions. L'Agence est ainsi un des principaux opérateurs pour ces investissements d'avenir.

Le mode opératoire mis en place est tout à fait dérogatoire, qu'il s'agisse de la décision d'investissement, des règles budgétaires applicables ou de la comptabilisation des mouvements de fonds. Ce cadre a été voulu par le législateur.

Sur le plan budgétaire, l'intégralité des crédits ouverts au titre de l'emprunt national sera versée au cours de l'année 2010 et supposée consommée, alors même que les projets vont s'étaler sur de nombreuses années, les programmes correspondants, au sens de la LOLF, disparaissant le 31 décembre 2010.

Les crédits versés à l'ADEME ne relèvent pas réellement de la responsabilité de l'ordonnateur de l'Agence, non plus que des décisions de son conseil d'administration. Un large pouvoir de décision, ou au moins de proposition est reconnu au Commissaire général à l'investissement.

La comptabilisation des opérations effectuées par l'ADEME à partir des fonds du grand emprunt soulève des questions. En effet, les opérations seront enregistrées en compte de tiers et ainsi ne ressortiront pas des comptes de résultat de l'ADEME dans les années à venir. La direction générale des finances publiques (DGFIP) est en train d'élaborer des instructions comptables ad hoc.

La question des investissements d'avenir demeure, le MEDDTL et la DGFIP ayant continué à travaillé sur la meilleure manière de transcrire ces opérations après que la Cour a achevé son contrôle, afin que la comptabilisation des opérations, à défaut d'être conforme aux habitudes, apparaisse de manière transparente.

M. le président - Merci.

Vous portez une appréciation globalement positive sur l'organisation et la gestion de l'ADEME.

Parmi vos observations, je note qu'il existe parfois une difficulté à tracer la frontière entre ce qui relève de l'administration centrale ou des DREAL, et ce qui est imputable à l'Agence. Faut-il parler d'une « cannibalisation » de l'administration par l'ADEME ? L'administration centrale affiche-t-elle le respect d'une discipline forte en matière de réduction des effectifs au prix d'une montée importante de ceux de l'ADEME ?

Pourquoi maintient-on trois sites aux allures de siège central ? Qu'est-il envisagé pour les réunir éventuellement ?

S'agissant des modes d'intervention et des formes de subventionnement, peut-être pourrez-vous nous éclairer sur les règles qui ont été suivies.

Mais, il y a un point sur lequel on consacrera un peu de temps, à savoir les investissements d'avenir. A cet égard, je me réjouis qu'aient répondu à note invitation les représentants du service comptable de l'Etat, de la DGFIP et du budget. Nous avons besoin de visualiser ce qui va se passer et de savoir quel va en être le mode de traitement. Si nous avons bien compris, l'Etat a mis à disposition de l'ADEME des fonds qui lui ont été immédiatement restitués. Les projets seront validés par le commissaire général aux investissements d'avenir qui vous demandera ensuite d'engager les appels à projet pour leur répartition. Nous serions intéressés pour que vous nous éclairiez sur le mode opératoire. Quel sera t-il ? Comment traiterez-vous ces opérations aux plans comptable et budgétaire ? Quelle religion prévaut actuellement - si elle a pris corps ?

M. Xavier Lefort, directeur général délégué de l'ADEME - Je vous prie tout d'abord de bien vouloir excuser Philippe Van de Maele, président de l'ADEME, qui est retenu à l'étranger par un voyage programmé de longue date.

Je souhaiterais apporter l'éclairage de l'ADEME sur le contrôle réalisé par la Cour.

L'ADEME partage les grandes lignes du rapport de la Cour des comptes. Au cours de la phase contradictoire, l'Agence s'est évidemment attachée à apporter des réponses précises aux remarques formulées par la Haute juridiction.

La Cour souligne le rôle majeur de l'ADEME dans la préparation et dans la conduite du Grenelle de l'environnement et note qu'un certain nombre de progrès, depuis son précédent contrôle, ont été réalisés par l'établissement, tant dans son pilotage que dans sa gestion. L'ADEME s'est effectivement attachée, depuis le précédent contrôle de la Cour, à réaliser un suivi effectif et précis de ses recommandations. Elle fera bien entendu de même pour le contrôle dont les conclusions vous sont remises aujourd'hui.

Ce rapport s'inscrit dans un contexte très particulier de la vie de l'Agence et dans le cadre d'une modification assez profonde de son environnement et de son cadre d'action. Il faut souligner la mobilisation de plus en plus forte de l'ensemble des acteurs sur les thématiques traditionnellement portées par l'Agence.

L'ADEME se trouve aujourd'hui confrontée à une forte demande de conseils de la part de l'ensemble des acteurs. Cette demande est à la fois plus qualifiée et plus exigeante. Elle se trouve également interpellée sur son expertise par des partenaires publics et privés de plus en plus impliqués et compétents.

Cette prise de conscience s'est naturellement accrue avec le Grenelle de l'environnement et l'Agence a fortement été impliquée dans sa préparation. Nous avons participé à vingt-cinq comités opérationnels. Nous avons été chefs de projet, pour cinq d'entre eux.

L'ADEME est en outre devenue l'opérateur principal d'un certain nombre de fonds et de dispositifs qui lui ont été confiés.

Parallèlement, l'action de l'Agence s'inscrit dans un paysage institutionnel profondément modifié ces derniers mois, d'abord par la création d'un grand ministère de l'écologie. L'ADEME avait auparavant trois tutelles ; elle n'en a plus que deux - celles du ministère de l'écologie et du ministère de la recherche.

Des relations nouvelles se sont instaurées avec les préfets de région à la suite de la modification statutaire du décret de l'Agence en mai 2009.

Enfin, nos actions se sont élargies à la lutte contre le changement climatique.

De plus, l'année 2010 a été marquée par la décision du Gouvernement de confier à l'ADEME quatre des programmes relevant des investissements d'avenir au titre des énergies décarbonées, du véhicule du futur, des déchets, et de l'économie circulaire et de l'économie numérique.

Face à ces évolutions, l'Agence ne pouvait faire l'économie d'une démarche d'adaptation de ses priorités et de son organisation. Cette démarche est en cours depuis le début de l'année 2009, et la Cour a pu suivre en temps réel le déroulement de ce chantier, qui s'est caractérisé par la réécriture du contrat d'objectifs pour la période 2009-2012, par l'élaboration d'une convention entre l'ADEME et le ministère de l'écologie, qui précise les modalités de collaboration entre l'Agence et sa tutelle

Un autre chantier important conduit l'année dernière est la réorganisation, engagée à l'automne 2009, et effective depuis le 1er janvier 2010.

Nous avons également dû adapter nos processus de gestion à des moyens budgétaires et financiers en croissance quasi exponentielle et clarifier nos orientations grâce à une meilleure identification de nos priorités.

La Cour des comptes s'est interrogée sur l'adaptation de l'Agence à ses nouvelles missions et sur sa capacité à mettre en oeuvre les moyens qui lui sont confiés. Compte tenu de ses observations, je voudrais développer quatre points relatifs à son organisation et à son pilotage, à ses moyens et à ses modes d'intervention et, enfin, à la mise en oeuvre du Grenelle et des programmes liés aux investissements d'avenir.

S'agissant des missions et du positionnement de l'Agence, la Cour a souligné le caractère polymorphe de l'Agence et les éventuels risques de redondance avec d'autres acteurs de la sphère de l'Etat. Je voudrais faire mieux comprendre l'intérêt du modèle que constitue l'ADEME, qui n'a sans doute pas d'autre exemple en France et qui se rapproche d'un modèle anglo-saxon ou hollandais.

Trois éléments font la spécificité de l'Agence.

Le premier est le fait de couvrir l'ensemble des sujets environnementaux, à l'exception de la biodiversité et de l'eau, et de pouvoir ainsi traiter de façon intégrée les problématiques du développement durable et du changement climatique.

La taille relativement modeste de l'établissement - un peu plus de 1 000 personnes - et son organisation lui permettent à notre sens d'assurer cette vision d'ensemble pour traiter des sujets, tant dans le domaine des déchets que de l'énergie, qui sont de plus en plus interdépendants.

Seconde spécificité de l'Agence : son expertise repose sur une variété d'activités, qui va de l'élaboration prospective, comme l'écriture des feuilles de route dans le cadre des investissements d'avenir - jusqu'à la mise en oeuvre concrète sur le terrain, en passant par des activités de recherche, d'appui et d'observation.

La troisième spécificité de l'Agence est sa capacité, en matière d'ingénierie, à concevoir, à tester et à expérimenter des outils techniques ou organisationnels qui permettent de répondre aux enjeux qu'on nous demande de relever.

Ainsi, l'Agence a été à l'origine d'un certain nombre d'outils comme le bilan carbone, les plans de déplacement d'entreprises, les certificats d'économie d'énergie. Elle a également monté et structuré le réseau des espaces « info-énergie ».

Les missions de l'Agence peuvent vous apparaître multiples. Ce serait oublier que l'ADEME n'est pas un opérateur en charge d'une mission spécifique - distribuer des aides, contrôler - mais bien un opérateur en charge d'une politique publique dans sa globalité et donc de l'ensemble des actions qui y concourent.

Je ne crois pas que l'ADEME soit en concurrence avec l'administration centrale, qui exerce une fonction de pilotage et de réglementation, ni avec les services déconcentrés qui sont chargés du déploiement de politiques standardisées et généralisées, de leur application et du respect de leur mis en oeuvre.

M. le président - Peut-on dire que l'administration a une tâche de régulation et de réglementation et que les services déconcentrés sont en charge de la « police » ?

M. Xavier Lefort - Je pense que l'administration centrale a une fonction de pilotage stratégique et de définition du cadre réglementaire de l'action de l'Etat.

A mon sens, ce n'est pas un métier dans lequel s'inscrivent les services centraux de l'Agence. Il s'agit avant tout d'un métier d'expertise, d'animation de la recherche, de montage ou d'élaboration d'outils d'incitation nationale et locale. L'ADEME conseille bien évidemment sa tutelle quand elle est sollicitée, et la coordination avec les directions d'administration centrale du ministère est assurée par un certain nombre de dispositifs qui prennent la forme de comités de pilotage semestriels avec les grandes directions du ministère, de façon à se coordonner, à définir les priorités et fixer à l'opérateur ses missions et son cadre d'action.

M. le président - Monsieur Monteils pourrait-il nous dire comment il perçoit les relations de l'administration centrale et des DREAL avec l'ADEME ?

M. Jean-François Monteils, secrétaire général du ministère de l'écologie, du développement durable, des transports et du logement - Pour recourir à une métaphore, l'administration centrale représente la tête, les services déconcentrés les bras, et l'ADEME est un outil. Il est cependant indispensable que les uns et les autres se concertent.

L'important est de parvenir à un bon mode de concertation entre ces différents organes au service d'une même politique. L'administration centrale du MEDDTL a la charge de la mise en cohérence des politiques environnementales, mais elle a également d'autres fonctions, comme celles de régulation ou de contrôle.

Ainsi, comme vous l'avez souligné, il incombe à l'administration centrale et aux services déconcentrés des tâches de régulation et de contrôle qui ne peuvent en aucun cas être celles d'un établissement autonome.

M. Xavier Lefort - Je voulais évoquer devant vous l'organisation et le pilotage de l'Agence.

L'Agence s'est complètement restructurée début 2010 autour de quatre directions exécutives, cette organisation étant plus en phase avec les nouvelles priorités de l'Agence.

Il importe de souligner que nous avons ajouté des instances de synthèse sur certaines thématiques touchant à l'ensemble des actions de l'Agence, comme la création d'un service climat, d'un service agriculture ou d'un service urbanisme.

Par ailleurs, le renforcement de l'expertise doit être vécu et mis en oeuvre de façon sans doute plus collective et plus transversale, à travers des problématiques comme celle de la ville durable ou de la consommation durable.

Pour ce qui est de l'accompagnement des acteurs locaux et des politiques territoriales, l'ADEME s'est restructurée grâce à la création de trois directions interrégionales et d'un service qui fait le lien pour améliorer la capacité d'échange entre le pôle territoires de l'Agence et les services centraux.

Enfin, à l'occasion des programmes d'investissements d'avenir confiés à l'Agence, la direction de la recherche a été restructurée afin de consolider son rôle de précurseur et de mieux assurer la coordination des activités de recherche.

M. le président - Pourquoi maintenir vos services centraux sur trois sites et une équipe dans chaque région ?

M. Xavier Lefort - L'Agence est l'héritière des trois sites des agences qui l'ont précédée : l'un à Paris, ancien site de l'Agence française de la maîtrise de l'énergie ; l'autre à Angers, site de l'Agence nationale de récupération et d'élimination des déchets ; enfin, le troisième à Valbonne-Sophia-Antipolis, où était implanté il y a fort longtemps le Commissariat à l'énergie solaire.

La décision de délocalisation à Angers ne prévoyait pas la réimplantation de la totalité des services mais de vider une grande partie du site parisien pour permettre au site d'Angers de monter en puissance. Ce programme a été respecté. On est passé de plus de 90 agents à Angers à 350 personnes, les deux autres sites en comptant chacun une centaine.

Il s'agit d'une complexité de fonctionnement que nous essayons de surmonter. Si l'Agence a une grande pratique, l'utilisation de la visioconférence est un exercice qui s'apprend. En termes d'expertise, les services sont bien individualisés sur chaque site.

Les surcoûts de fonctionnement sont à peu près maîtrisés. L'option d'un site central doit être examinée mais il ne s'agit pas d'une directive des tutelles ou du Gouvernement. On pourrait éventuellement envisager la fermeture de Sophia-Antipolis, qui constitue le plus petit des sites, mais cela poserait de réels problèmes d'expertise, le site de Valbonne regroupant l'ensemble des compétences énergétiques -bâtiment, transport, énergies renouvelables etc. Les équipes sont constituées de longue date. Si l'on devait fermer brutalement ce site, on se retrouverait confrontés à de réelles pertes d'expertise. On s'accommode donc de cette situation et on essaye de la maîtriser afin qu'elle ne devienne pas inflationniste en coût de gestion.

Concernant l'existence des directions régionales dans chaque région, cette structuration est prévue par un décret statutaire. Leur taille est variable mais l'ADEME requiert une taille minimale. Il existe trois structures types correspondant à des petites, des moyennes et des grosses directions régionales. Les petites comptent environ 10 à 12 personnes - Outre-mer, Réunion, Martinique, Guadeloupe ou régions métropolitaines comme le Limousin. On s'efforce de regrouper, autour d'une douzaine de personnes, l'essentiel des compétences thématiques et d'intervention de l'Agence.

M. le président - Pouvez-vous nous parler de la gestion des investissements d'avenir ?

M. Xavier Lefort - L'Agence a quatre programmes pour un peu moins de 3 milliards d'euros. Le travail sur les investissements d'avenir consiste d'abord à établir des feuilles de route stratégiques avec des visions à vingt, trente ou cinquante ans. Cet exercice avait été en partie réalisé, l'Agence s'étant vue confier dans le cadre du Grenelle un fonds démonstrateur de recherche, dont le fonctionnement était similaire à celui que nous allons connaître dans le cadre des investissements d'avenir, sous forme notamment d'appels à projets.

L'Agence s'est donc attachée dans un premier temps à compléter les feuilles de route existantes.

Le second exercice consiste à lancer un certain nombre d'appels à manifestation d'intérêt. Trois devraient être lancés avant la fin de l'année sur le bâtiment, le solaire photovoltaïque et le solaire thermodynamique. Un certain nombre d'autres sont d'ores et déjà programmés pour 2011.

En ce qui concerne la gestion, compte tenu des dispositions de la loi de finances rectificative de mars 2010, nous nous sommes posé un certain nombre de questions sur le suivi budgétaire et comptable. Nous en avons fait part à la tutelle budgétaire avec essentiellement trois questions, l'une autour de la traduction budgétaire des investissements d'avenir, l'autre autour de la traduction comptable dans les comptes de l'Agence, et la troisième autour de la responsabilité même de l'établissement dans la mise en oeuvre de ces programmes.

La problématique est assez simple : l'ADEME met les programmes en oeuvre mais ne décide pas, les décisions étant prises par le commissariat général à l'investissement. Le président de l'ADEME, qui va formellement ordonnancer les dépenses, se retrouve dans une situation ambiguë. Il n'agit pas comme ordonnateur secondaire de l'Etat et il n'agit plus comme ordonnateur principal de son établissement, le conseil d'administration n'autorisant plus les dépenses et ne délibérant plus sur le budget lié aux investissements d'avenir.

Il y a donc là une question directement liée à la responsabilité du président d'un opérateur public dans ce type de mise en oeuvre.

Nous avons alerté nos tutelles sur le sujet. Nous avons reçu un certain nombre de réponses techniques de la direction générale des finances publiques sur les schémas d'écriture comptable. Il fallait pouvoir en effet se mettre très vite en ordre de marche et mettre en oeuvre certains outils informatiques afin de pouvoir suivre les opérations. Sur quatre conventions, deux ont été signées et les fonds ont été versés pour deux d'entre elles, l'une relative aux énergies décarbonées et l'autre au titre de l'économie circulaire, pour un montant total de 1,6 milliard d'euros.

M. le président - Vous avez déjà reçu les 2,85 milliards d'euros.

M. Xavier Lefort - Non, nous avons reçu 1,6 milliard. Les 2,85 milliards se décomposent en 1,325 milliard au titre de l'énergie, 250 millions au titre des déchets de l'économie circulaire, un milliard au titre des véhicules et 250 millions au titre de l'économie numérique. A ce jour, on a reçu les deux premiers.

M. le président - J'avais compris que, dans un premier temps, pour des raisons budgétaires, les 2,85 milliards étaient mis à disposition de l'ADEME, qui rendait l'argent au Trésor public.

M. Xavier Lefort - Les 2,85 milliards d'euros ne sont pas encore mis à disposition, puisque trois conventions sur quatre seulement sont signées. Les fonds des deux dernières conventions n'ont donc pas encore été versés. En termes de comptabilisation, l'ADEME dispose aujourd'hui d'un compte ouvert auprès du trésorier payeur général (TPG) du Maine-et-Loire. Les fonds ont été versés sur ce compte. Sur le plan strictement comptable, les fonds apparaissent dans les comptes de trésorerie et les comptes de tiers de l'établissement.

M. le président - Les 2,85 milliards doivent logiquement être mis à disposition de l'ADEME avant le 31 décembre mais l'opérateur rend l'argent à l'Etat. C'est ce que l'on avait cru comprendre...

M. Laurent Machureau, sous-directeur de la quatrième sous-direction du Budget - Tous les crédits vont effectivement être consommés sur le budget de l'Etat en 2010 ; les fonds doivent être déposés auprès du comptable du Trésor. Tant que les fonds ne seront pas utilisés par l'opérateur, ils ne viendront pas augmenter le besoin de financement de l'Etat.

M. le président - On aura donc 35 milliards de dépenses dans le budget de l'Etat ?

M. Laurent Machureau - En effet.

M. le président - En comptabilité maastrichtienne, on n'aura donc pas dépensé cet argent.

M. Laurent Machureau - Non.

M. le président - Il faudra attendre que les projets soient engagés. Le déficit 2010 va donc être affecté par 35 milliards de dépenses et lorsque celles-ci seront effectives en 2011, 2012, 2013, cela n'apparaîtra donc pas sur le budget.

Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial - Cependant, il est prévu de maintenir artificiellement un jaune pendant dix ans.

M. Laurent Machureau - Une annexe générale sera effectivement produite jusqu'en 2020, afin de permettre l'information des parlementaires.

M. le président - Il existe aussi une commission de surveillance où siège Mme Keller.

M. Laurent Machureau - En effet.

M. le président - Cela sera-t-il comptabilisé dans les comptes de l'Agence comme une opération pour compte de tiers ?

M. Xavier Lefort - Dans la comptabilité de l'établissement, selon le schéma que nous avons proposé à notre conseil d'administration en juin dernier, l'ensemble des opérations est retracé dans les comptes de l'Agence afin de produire formellement un compte financier séparé - une balance - ainsi qu'une programmation budgétaire des investissements d'avenir. Le conseil d'administration aura en amont une information sur la programmation budgétaire de ce que l'on entend faire et approuvera donc un compte financier dont il n'aura pas autorisé la grande masse des dépenses. On va donc extraire une partie de notre compte financier pour individualiser l'ensemble des opérations pour compte de tiers, comme la loi de finances rectificative pour 2010 l'impose.

M. le président - Madame Rousseau, avez-vous des observations à formuler ?

Mme Michèle Rousseau, directrice, adjointe à la Commissaire générale au développement durable - Nous avons de bonnes relations avec l'ADEME. Je voudrais revenir sur la distinction entre l'administration centrale et l'ADEME en l'illustrant par deux sujets.

En premier lieu, le Commissariat général au développement durable (CGDD) coordonne les observations et les statistiques et essaye d'optimiser la coordination entre les acteurs dans chaque domaine. L'ADEME fournit ainsi les données relatives aux ordures ménagères par exemple. Les données relatives aux déchets dangereux des industriels remontent par la direction générale de la prévention des risques et par les déclarations au titre des installations classées. Les informations concernant les déchets du commerce, elles, transitent par l'INSEE. Le CGDD coordonne le tout pour répondre aux demandes des organismes européens ou internationaux.

Dans le domaine de l'énergie, le CGDD produit les données relatives à la capacité physique de production des énergies renouvelables. L'ADEME se penche quant à elle sur la rentabilité de ces filières.

Dans le domaine de l'affichage environnemental sur les produits prévu par le Grenelle II, le Commissariat général est en train de mettre au point le cahier des charges de l'expérimentation inscrite dans la loi et l'ADEME travaille sur la mise à disposition d'une base de données à destination du public.

M. le président - Quels sont les moyens du CGDD ?

Mme Michèle Rousseau - Un peu moins de 500 personnes.

M. le président - Monsieur Monteils, avez-vous quelque chose à ajouter ?

M. Jean-François Monteils - Vous m'avez interrogé sur les aspects de cohérence et de pilotage entre administration centrale et service déconcentrés. C'est principalement sur ce sujet que je peux avoir des compléments à vous apporter.

M. le président - La parole est au service comptable de l'Etat.

M. David Litvan, chef du service comptable de l'Etat - Je voudrais évoquer les conclusions de l'audit diligenté par la direction générale des finances publiques et par le contrôle général économique et financier.

Je tiens à souligner les travaux réalisés en matière de qualité comptable - et je salue à cet égard le dynamisme de la direction de l'ADEME.

L'ADEME a un total de bilan de plus de 700 millions d'euros, et une valorisation dans les comptes de l'Etat de 177 millions d'euros. Une des caractéristiques de l'ADEME est le niveau élevé de ses capitaux, qui représentent environ 25 % du total du bilan, ainsi qu'une situation de trésorerie confortable.

L'ADEME, depuis 2000, dispose par ailleurs d'équipes dédiées au contrôle interne comptable et a très activement participé à la démarche de renforcement du contrôle interne copilotée par la direction général des finances publiques et par le MEDDTL.

Pour formaliser cet engagement, l'ADEME et son agent comptable ont signé en juin 2007 un protocole de modernisation financière et comptable ; elle fait ainsi partie des 35 établissements disposant de ce type de protocole dont l'objectif est l'amélioration de la qualité comptable en maîtrisant les risques, et la modernisation des processus de gestion.

Pour mémoire, le protocole comporte 21 actions, 14 dédiées à la qualité comptable et 7 relatives à la modernisation des procédures de gestions. Trois ans après la signature, sur les 21 actions prévues, 13 actions ont été totalement réalisées et trois le seront en 2011. Fin 2011, plus des trois-quarts des actions envisagées auront été réalisées. On peut également indiquer que cette démarche semble avoir porté ses fruits.

J'en viens aux principales conclusions de l'audit de la mission nationale en matière de qualité comptable. Ce rapport est globalement positif. Plusieurs points forts sont particulièrement mis en avant, comme l'organisation des dispositifs de contrôle interne fondé sur une cartographie des risques et des processus, l'organisation d'une fonction d'audit interne fondée sur la mise en place d'une inspection générale et d'un comité d'audit interne, l'instauration d'un contrôle de conformité et de régularité des dossiers d'aide gérés par l'ADEME, et les progrès issus du protocole que j'ai évoqué.

De plus, un certain nombre de points d'amélioration ont été identifiés et font l'objet d'engagement de la part de la direction de l'ADEME.

Les perspectives auxquelles est confrontée l'ADEME sont au nombre de trois.

La première réside dans l'élaboration d'un nouveau protocole de modernisation comptable et financière. Le diagnostic réalisé tant par la Cour que par la mission nationale d'audit permettra de disposer de pistes pour améliorer la qualité comptable dans la durée.

La deuxième proposition est soumise à discussion ; il s'agit de l'examen de la perspective d'une certification des comptes de l'ADEME eu égard aux enjeux comptables croissants que représente cet organisme, le calendrier et les modalités devant en être précisés si le conseil d'administration souhaitait s'engager dans cette voie.

M. le président - Les comptes sont-ils actuellement certifiés?

M. David Litvan - Ils ne le sont pas.

M. Xavier Lefort - Nous sommes soumis au juge des comptes. L'exercice de certification est un exercice auquel nous ne sommes pas astreints qui me semble doublonner avec la compétence du juge des comptes. Nous nous mettons néanmoins en état de certifier les comptes dans le cadre du précédent protocole de modernisation comptable mais nous ne sommes jamais allés formellement jusqu'à une certification par un commissaire aux comptes.

M. le président - La Cour certifie les comptes de l'Etat et les comptes de l'Etat consolident les comptes de l'ADEME. Si les comptes de l'ADEME ne sont pas certifiés, cela peut donc constituer une importante réserve de la Cour.

M. David Litvan - Cette réserve existe d'ores et déjà puisque c'est la troisième de l'acte de certification - qui en comporte 9 - qui porte sur la qualité des comptes des opérateurs. La DGFIP accompagne le renforcement de la qualité des opérateurs et incite, pour ceux qui le souhaitent, à engager des démarches de certification qui ne valent que dès lors qu'on les fait gérer par des opérateurs avec des enjeux financiers importants ou une certaine complexité.

S'agissant des dépenses d'avenir, la DGFIP a proposé un ensemble de schémas comptables qui traduisent le dispositif mis en oeuvre par la loi de finances rectificative pour 2010, ainsi que les dispositions contenues dans les conventions publiées à compter d'août 2010 au journal officiel.

En termes de méthode, ces schémas comptables ont été présentés aux différents acteurs et ont fait l'objet d'une concertation. Des échanges ont eu lieu avec la Cour et nous avons pris en compte les premiers retours concernant leur traduction dans les comptes de l'Etat. Nous en attendons les retours pour stabiliser définitivement les schémas comptables.

Sur le plan des principes, selon notre analyse de la loi de finances rectificative pour 2010 et des conventions, le contrôle des opérations reste celui de l'Etat, l'opérateur agissant comme un intermédiaire.

Par exemple, en ce qui concerne les subventions versées, les opérations seront comptabilisées au bilan en compte de tiers et de trésorerie, comme prévu, avec un placement auprès de la trésorerie de l'Etat.

Quel que soit le schéma comptable qui sera définitivement retenu sur la base des propositions qui viennent d'être faites et qui restent à valider, un point évoqué par la Cour des comptes est la question du suivi et de la transparence de ces montants.

Je voudrais insister sur la comptabilité générale de ces opérations. Il me semble important de considérer ces opérations comme un tout, à la fois pour la comptabilité de l'Etat et pour celle des opérateurs. Ainsi, nous devrons mettre en place un suivi spécifique de réconciliation des dettes et créances réciproques entre l'Etat et ses opérateurs, ce qui permettra de suivre dans la comptabilité générale de l'Etat les engagements pris vis-à-vis des bénéficiaires finaux.

Cela conduirait par exemple à comptabiliser des provisions dans les comptes de l'Etat pour les montants engagés et non versés aux bénéficiaires finaux.

En termes de transparence, il me semble également important que l'annexe des comptes 2010 de l'Etat comporte une explicitation des montants et des mécanismes de ce dispositif.

De même, si le conseil d'administration de l'ADEME en était d'accord, une information particulière en annexe des comptes de l'ADEME pourrait garantir la transparence des états financiers.

Voilà le dispositif que nous envisageons de mettre en place au plan comptable pour allier à la fois l'objectif de mise à disposition rapide des fonds, de sécurité et de suivi, avec une préoccupation forte de transparence en matière de montants alloués.

M. le président - Merci. On voit bien le décalage qu'il y aura entre le budget et la comptabilité de l'Etat. Il faudra peut-être un jour que l'on se serve davantage de la comptabilité de l'Etat que du budget. C'est un sujet délicat.

M. Yannick Girault, chef de la mission nationale d'audit au sein de la direction générale des finances publiques - Nous sommes intervenus d'un commun accord et dans le cadre d'un programme annuel de travail avec le contrôle général économique et financier.

Il va sans dire que la DGFIP a une responsabilité particulière dans la qualité comptable de l'Etat, dans ses bonnes pratiques et, au-delà, par rapport à l'exigence que nous portons vis-à-vis des opérateurs, notamment les établissements publics nationaux.

A ce titre, nous avons souhaité que l'ordonnateur et le comptable conduisent ensemble des audits comptables et financiers.

Ainsi, pour ce qui est du programme national d'audits développé au sein de la DGFIP au titre de 2010 et arrêté par notre directeur général, nous avons 34 audits comptables et financiers intéressant des établissements publics nationaux et opérateurs de l'Etat. Un certain nombre sont conduits en liaison directe et dans le cadre du protocole défini en avril 2008 avec le CGEFI de façon à pouvoir disposer du regard croisé que j'évoquais.

C'est pourquoi cet audit intéressant l'ADEME s'inscrit dans le cadre des travaux de fin 2009-début 2010.

M. le président - Merci. La parole est aux commissaires, Mme le rapporteur spécial laissant la priorité à ses collègues.

M. Daniel Dubois - La Cour des comptes regrette l'aide apportée à de multiples petits projets. Je précise qu'il existe de multiples intervenants sur le territoire national et donc de petits opérateurs. J'aurais aimé connaître l'avis de l'ADEME sur ce sujet, les collectivités et les petits syndicats ayant également des projets dans ce domaine.

En second lieu, il existe un débat au soutien d'Eco-Emballage. Dans le domaine de l'expertise, l'Agence a mené une mission d'évaluation du coût net d'un service optimisé de gestion et de ramassage des ordures ménagères. Il existe un écart de 600 millions d'euros avec celui évalué par les collectivités. Comment l'ADEME a-t-elle fait pour arriver au chiffre qu'elle a obtenu ?

M. Denis Badré - Je voudrais m'intéresser au positionnement scientifique de l'ADEME à travers deux questions :

- premièrement, quel est l'apport thématique de l'ADEME en tant que commanditaire ou financeur de recherches par rapport aux autres grands opérateurs que sont OSEO ou l'ANR ? L'ADEME a-t-elle sa place dans ce domaine ? Qu'apporte-t-elle comme valeur ajoutée ?

- deuxièmement, peut-on dire qu'on a satisfait la nécessité de l'expertise scientifique propre de l'ADEME ?

M. Michel Teston - Je souhaiterais évoquer les points noirs du bruit.

Dans le cadre du Grenelle de l'environnement, l'ADEME a été chargée de mettre en place un plan de résorption du bruit généré par les infrastructures de transport routières et ferroviaires. Il s'agit d'opérations de traitement à la source des infrastructures concernées, mais il peut s'agir également de traitement acoustique des façades des bâtiments exposés.

L'intérêt de la convention passée par l'ADEME avec Réseau ferré de France est évident dans le cadre de l'engagement national pour le fret ferroviaire. Cette contractualisation a permis d'atteindre un taux de 100 % pour l'isolation des façades des bâtiments édifiés avant 1978. En revanche, s'agissant des écrans anti-bruits, très importants le long des voies ferrées, 25 % des dépenses correspondantes restent à la charge des collectivités territoriales. Pourquoi cette différence de traitement ?

M. Pierre Jarlier - On a évoqué les délégations régionales de l'ADEME sur le terrain. Je veux témoigner que celles-ci ont aujourd'hui une importance capitale. L'ADEME décline les grandes stratégies nationales du Grenelle de l'environnement sur le terrain et on a vu dans tous les débats du Grenelle que cette action territoriale était indispensable, en relais avec les collectivités, pour aller jusqu'aux actions concrètes.

Comment peuvent évoluer ces délégations régionales pour assurer cette présence sur le terrain, en lien avec les collectivités, au regard des grands enjeux du Grenelle, dont on vient de terminer les débats ?

Mme Fabienne Keller, rapporteur spécial - Je souscris aux différentes questions qui ont été posées et je n'en poserai qu'une seule.

Elle concerne le pilotage et la gouvernance. L'ADEME gère l'écologie de demain ; l'administration, l'écologie d'aujourd'hui, qui est plus statique. On peut donc se poser la question de la gestion partagée des responsabilités. Plus globalement, quelle gouvernance publique pour les sujets que sont l'énergie et les déchets ? Beaucoup d'acteurs interviennent dans ce domaine : départements, communautés de communes, SICTOM, SIVOM, etc. Il existe également des acteurs privés qui sont parfois indispensables, car on ne construit pas de filière sans création d'unité de traitement. Comment tout cela est-il gouverné ? A-t-on des lieux de partage dans le respect des missions de chacun ?

Quelle évolution de la gouvernance ? Ne doit-elle pas être plus structurelle à l'avenir ? Si ce sont vraiment des enjeux d'avenir, ne faut-il pas que l'Etat s'organise autrement ?

M. le président - Qui pilote, de l'administration centrale, du Commissariat au développement durable ou de l'Agence - et comment ? Selon quelle articulation ?

M. Jean-François Monteils - C'est l'une des raisons de la création d'un grand ministère de l'écologie. L'objectif de toutes ces politiques publiques est un objectif complet et ambitieux. Il se traduit notamment par la volonté - je cite le président Descheemaeker - « de transformer les modes de vie ».

Pour arriver à remplir un tel objectif politique, il apparaît normal qu'il existe une multitude d'acteurs afin d'agir sur plusieurs leviers, avec plusieurs modes différents, mais il est également indispensable que cette multitude d'acteurs soit coordonnée et pilotée.

La première réponse est celle du MEDDTL, qui prend en compte l'ensemble de ces problématiques environnementales mais également d'autres. Deux grandes directions générales et deux structures transversales ont aussi pour objet d'assurer cette coordination : le Commissariat général et le Secrétariat général du MEDDTL qui a la charge du pilotage des tutelles et qui s'est organisé en conséquence.

Au-delà de cette organisation, le pilotage s'exerce également en région. L'administration territoriale de l'Etat a fait l'objet, au cours des trois dernières années, de mutations profondes. La création des DREAL correspond à cette volonté de rassembler en une même main, sous l'autorité du préfet, l'ensemble des compétences et des missions qui relèvent de cette grande politique.

M. le président - Le préfet est le patron et a donc autorité sur la représentation de l'Agence et sur les services déconcentrés ?

M. Jean-François Monteils - Le préfet est le délégué régional de l'ADEME. Il coexiste avec le directeur régional qui préside notamment la commission régionale d'attribution des aides. Le DREAL intervient évidemment dans ce processus, qui est au service du préfet pour assurer cette cohérence.

M. le président - Mais le budget ne vient pas de l'Etat. Les fonds viendront de l'Agence...

M. Jean-François Monteils - Certes mais un des rôles de la commission régionale d'attribution des aides est d'assurer la cohérence des financements. Elle se prononce notamment sur tous les financements contractualisés. Même lorsque ceux-ci ne le sont pas, ils passent en commission régionale pour assurer cette cohérence. Certes, il s'agit de flux financiers qui ne proviennent pas de l'Etat mais il existe une volonté très forte de ne rien faire de contradictoire et même d'être non-complémentaire.

M. le président - Disposez-vous de moyens statistiques pour appréhender les investissements conduits par d'autres opérateurs publics tels que les SICTOM et les communautés de communes ? Comment appréhende-t-on l'ensemble des moyens publics mobilisés, l'Etat étant l'un des acteurs mais pas le seul.

M. Jean-François Monteils - Les commissions régionales essayent de rassembler les divers flux financiers, quelle que soit leur origine. Lorsqu'il s'agit de financements contractualisés, c'est par définition l'objectif que de tenter de mesurer ce qui se fait de part et d'autre. Ce n'est pas toujours facile mais il appartient aux services préfectoraux d'assurer cette information.

M. Xavier Lefort - La réforme statutaire de 2009 est bien vécue et a été une bonne chose. Les lieux de synthèse qui n'existaient pas formellement se sont constitués sous l'autorité du préfet de région.

Une des lieux de coordination important est la commission régionale des aides (CRA) ; elle rassemble un certain nombre d'acteurs qui sont les mêmes que ceux du Comité de gestion du contrat de projet Etat-régions, et permet d'avoir une vue d'ensemble de ces dispositifs.

L'autre institution qui fonctionne bien - sur 26 régions, elle est active dans 22 - est le comité régional d'orientation. Plus large que la CRA, il associe les représentants des collectivités territoriales. On a donc un lieu de débat élargi. Dans certaines régions, les préfets ont utilisé ces comités régionaux comme comités de territorialisation du Grenelle.

M. le président - On sent quand même les préfets un peu stressés, lorsqu'on évoque le Grenelle, devant le catalogue de ce qu'ils doivent faire. Sur certains points, c'est à la limite de ce qui est réalisable, voire raisonnable !

M. Xavier Lefort - Le catalogue des actions est important mais les préfets sont conseillés et secondés par les directeurs régionaux de l'ADEME, qui voient leur préfet au moins une fois par mois.

Mme Michèle Rousseau - Le Grenelle de l'environnement a beaucoup insisté sur la gouvernance à cinq. Le Grenelle se voit comme un projet de la société civile qu'il va falloir continuer à mettre en oeuvre avec l'ensemble de la société civile. Il faut que les cinq parties -Etat, collectivités locales, entreprises, syndicats de salariés et associations de protection de l'environnement- essayent conjointement de préparer les évolutions. Il convient que l'Etat consulte bien ces cinq parties pour tous les textes réglementaires qui vont être mis en place.

Cette notion de gouvernance collective au coeur du Grenelle est un sujet sur lequel le Gouvernement souhaite insister. Jean-Louis Borloo a donc demandé aux préfets d'essayer de créer dans chaque région un comité de suivi du Grenelle adapté à chaque région.

Cette gouvernance collégiale est donc une inflexion forte.

M. Jean-François Monteils - La gouvernance à cinq revient, très en amont, à chercher de nouveaux moyens d'associer les diverses parties prenantes à l'élaboration des politiques.

Le second niveau est celui de la « comitologie », dont j'ai cru sentir, Monsieur le Président, qu'elle vous inquiétait quelque peu. Elle consiste à réunir les financeurs pour essayer de faire en sorte que leurs financements soient cohérents. Il arrive que ces différents comités soient réunis en un seul. Un après-midi par mois ou par bimestre, le préfet et le président du conseil régional, par exemple, réunissent l'ensemble des acteurs des programmes contractualisés et autres pour évoquer les financements qui méritent d'être mis en cohérence.

J'insiste sur le fait que certains flux financiers échappent à cette « comitologie », même si elle est simple. Il n'est pas anormal que, sur certains pans de leurs compétences, l'Etat ou les collectivités agissent seuls. C'est rare mais cela arrive.

Le dernier point est celui de la concertation sur la planification qui relève notamment de l'élaboration des plans contractualisés, qu'il s'agisse des contrats de projets ou des documents européens. C'est le travail quotidien du préfet et des services qui permet d'y arriver.

M. le président - Daniel Dubois s'est étonné de certains écarts significatifs...

M. Xavier Lefort - Je crains de ne pas avoir les éléments pour vous répondre en séance.

M. le président - Peut-être pourrez-vous nous les faire parvenir.

M. Xavier Lefort - En effet.

Quant au financement des petits projets, la Cour a relevé le risque d'en financer une multitude sans que « l'ADEME se montre suffisamment proactive », pour reprendre la formule de la Cour. C'est effectivement un risque et nous remercions la Cour de l'avoir souligné. Il s'agit cependant d'un risque limité. Entre 2008 et 2009, le montant moyen d'un contrat de l'Agence est passé de 27 à 68 kilo-euros. L'augmentation du budget n'a donc pas mené à une dispersion des aides. Les projets aidés dans le cadre des fonds Grenelle sont en général de gros projets - fonds chaleur ou fonds dédiés à la résorption des points noirs du bruit.

L'ADEME fonctionne de plus en plus dans une optique de sélectivité et recherche la meilleure performance, notamment à travers des appels à projets. Par opposition à un financement au fil de l'eau, nous fonctionnons de plus en plus, comme en matière de friches urbaines dans le cadre du plan de relance, sous forme d'appels à projets. Nous le faisons également dans le cadre des contrats d'objectifs territoriaux avec un certain nombre de collectivités.

La Cour invitait également l'ADEME, vu le nombre de projets qu'elle soutient, à ne pas se disperser et à capitaliser ces aides. C'est un point sur lequel nous sommes attentifs et où nous avons encore des progrès à faire.

L'Agence a vocation à capitaliser ce qui est fait, à pouvoir monter un certain nombre d'opérations exemplaires et à en tirer des enseignements pour diffuser les bonnes pratiques aux différents acteurs. Cette diffusion prend de multiples formes : colloques, guides techniques, fiches « exemples à suivre » que nous mettons en ligne sur notre site Internet.

Les tutelles de l'Agence lui ont demandé de mettre en oeuvre un centre de ressources sur les plans climat-énergie ; la compétence de l'Agence est de rassembler des expériences, de mettre à disposition des outils mais pas forcément de financer tout le monde. C'est une observation forte de la Cour ; il nous appartient de veiller à sa mise en oeuvre rapide. Nous y sommes extrêmement sensibles.

Pour ce qui est de la question de Monsieur Badré, le paysage de la recherche est compliqué mais l'ADEME a su trouver dans le financement ou l'animation de la recherche une place assez spécifique. L'ADEME n'est pas OSEO, dans la mesure où elle constitue une expérience technique interne forte - bâtiments, transports. L'ADEME n'est pas non plus l'ANR. Nous travaillons avec l'ANR en étroite collaboration et nous avons cherché à clarifier le positionnement des deux organismes. La grande différence entre l'ADEME et l'ANR est que l'ANR est dans une logique académique d'excellence scientifique. Elle lance des appels à projets et ce sont les meilleurs laboratoires qui vont répondre, sans forcément chercher à orienter la recherche dans tel ou tel domaine, alors que l'ADEME est à la fois dans une logique industrielle et dans une logique de court terme. C'est ce que nous faisons dans le cadre du fonds démonstrateur ou ce que l'on va faire dans le cadre des investissements d'avenir.

La mission de l'Agence, en fonction des perspectives qu'elle propose et des feuilles de route qu'elle établit, est de faire émerger des solutions technologiques à moyen terme, soit quatre à cinq ans. Il s'agit de financement industriel de court terme, avec un retour rapide, une valorisation et un soutien financier de l'Agence. L'ANR est dans une perspective beaucoup plus longue que celle demandée à l'Agence. C'est là la grande différence. Dans ce soutien à la recherche industrielle, l'ADEME a réussi à trouver, par rapport aux autres acteurs, une place aujourd'hui reconnue.

Mme Michèle Rousseau - De l'amont vers l'aval, on trouve l'ANR, puis l'ADEME, qui finance des démonstrateurs de recherche et enfin OSEO, qui finance des projets innovants de PME et autres entreprises plus importantes. On voit bien la chaîne.

M. le président - Qu'en est-il de la propre expertise de l'ADEME ?

Accessoirement, vous devez être parfois associés à des missions au plan international -je pense à la charte signée avec la Russie qui a pour objet d'associer les industriels français à des actions d'investissements en matière d'environnement dans la fédération de Russie. Est-ce l'ADEME qui est chargée de conduire l'opération ?

M. Xavier Lefort - Cette opération est en cours de montage ; les acteurs ne se sont pas encore complètement positionnés.

L'ADEME a un rôle d'accompagnement des entreprises françaises à l'étranger, notamment les éco-entreprises. Elle a fédéré un certain nombre d'entreprises autour d'un outil appelé le « club ADEME international », qui met à la disposition des entreprises un certain nombre d'éléments d'expertise, de connaissance des pays et des marchés.

M. le président - L'ADEME peut-elle avoir un rôle de stimulation de l'économie verte pour entraîner des entreprises dans le développement de l'environnement ?

M. Xavier Lefort - En effet. L'ADEME dispose d'une direction de l'action internationale qui compte une vingtaine de personnes. La première difficulté est de sérier les interventions de l'Agence, notamment sur le plan géographique. Il existe certains pays avec lesquels l'Agence travaille régulièrement -Maghreb et Chine.

L'ADEME est également sollicitée par les tutelles et le Gouvernement pour travailler avec des pays comme le Chili et la Russie.

En Russie, l'ADEME a financé une personne pour aider les entreprises françaises désirant s'implanter sur le marché russe. Le débat à propos d'une structure pérenne n'est pas tranché. Les arbitrages ne sont pas encore rendus.

S'agissant des points du bruit, l'ADEME s'est vu confier un « fonds bruit » dans le cadre du Grenelle. Ce fonds bruit concerne à la fois le réseau routier national, le réseau routier des collectivités, où l'on a une certaine difficulté à faire émerger des projets, et le réseau ferroviaire. Les investissements concernés sont soit des traitements acoustiques de façade, soit des traitements à la source sur les infrastructures elles-mêmes.

Une convention avec RFF a été signée avec deux objectifs : la construction de murs antibruit et le traitement de façade, en lien avec le traitement thermique, si possible couplé à un traitement acoustique. La partie infrastructures est relativement coûteuse. Le montage financier avec RFF prévoit une participation des collectivités territoriales à hauteur de 25 %.

Ce n'est pas le cas pour le traitement acoustique des façades où l'on s'adresse à des opérateurs privés ou à des individus. La multitude des investisseurs nous a conduit à privilégier un financement à 100 % concernant le traitement des façades alors que nous avons estimé nécessaire de demander une contribution de 25 % au titre des infrastructures afin d'avoir un effet de levier.

La difficulté a été surmontée dans la mesure où un certain nombre de projets se sont montés en vallée du Rhône, à Bordeaux ou dans le Nord-Pas-de-Calais.

Pour ce qui est des directions régionales, elles ont été mises au défi de réussir le déploiement du Grenelle en termes d'instructions techniques, de montage de dossier, de suivi des partenaires. Cela leur demande beaucoup de travail. Leur métier a donc changé mais on ne doit pas négliger pour autant les conseils en faveur des collectivités territoriales. Ce sont deux métiers qu'il faut pouvoir mettre en oeuvre. Les directions régionales ont bénéficié d'un certain nombre de renforts de personnel des services déconcentré mis à disposition par l'Etat, soit une quarantaine de personne.

La difficulté est de rester attentif, de pouvoir continuer à délivrer un conseil efficace et de qualité et de ne pas se noyer dans les tâches administratives inhérentes au suivi d'un projet.

Il convient de maintenir cette double compétence. Les choses fonctionnent bien de ce point de vue. C'est en administrant des projets que l'on va consolider notre expertise et préparer le Grenelle d'après-demain. Cette conjonction des deux métiers, qui n'a pas été simple pour les équipes, elle se met cependant en place de façon satisfaisante.

Si l'on nous a confié les fonds Grenelle, c'est parce qu'on nous reconnaissait une capacité d'expertise et cette expertise se nourrit et s'enrichit du contact avec les porteurs de projets.

M. le président - Il me reste à remercier chacun d'entre vous. Tout est en bon ordre. Nous voilà rassurés !

Les membres de la commission des finances sont-ils d'accord pour publier cette enquête et le débat qui vient d'avoir lieu ? La décision est prise à l'unanimité !

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