Mercredi 28 avril 2010 M. Gérard Andreck, Président du groupement des entreprises mutuelles d'assurances (GEMA) Mme Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA

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Présidence de M. Bruno Retailleau, président

La mission a tout d'abord procédé à l'audition de M. Gérard Andreck et Mme Catherine Traca, président et secrétaire générale adjointe du groupement des entreprises mutuelles d'assurances (GEMA).

M. Bruno Retailleau, président, s'est interrogé sur l'existence de nouvelles données relatives au nombre de sinistres résultant de la tempête Xynthia ainsi qu'à leur coût, suite aux annonces faites le 8 avril dernier par M. Bernard Spitz, président de la fédération française des sociétés d'assurances (FFSA), lors de son audition par la mission. Ce coût était ainsi évalué à 1,5 milliard d'euros.

M. Gérard Andreck, président du GEMA, a confirmé cette estimation. Il a toutefois précisé que le nombre total de déclarations de sinistres provoqués par la tempête Xynthia serait plutôt de l'ordre de 400 000 et non de 500 000 comme annoncé précédemment.

En réponse à une question de M. Bruno Retailleau, président, il a indiqué que le délai pour la transmission de dossiers de sinistrés, exceptionnellement rallongé du 5 au 31 mars 2010, fait l'objet d'une interprétation très souple puisque les sociétés d'assurance continuent d'accepter de nouvelles demandes d'indemnisation.

Mme Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA, a confirmé l'inapplication de coefficients de vétusté dans le cas des biens immobiliers situés dans les zones noires. S'agissant des biens mobiliers, ce seront les clauses des contrats qui permettront de déterminer les règles d'indemnisation. Elle a toutefois précisé qu'une part croissante des contrats prévoit un remboursement égal à la valeur de remplacement à neuf des biens.

En réponse à M. Bruno Retailleau, président, Mme Catherine Traca a ensuite fait état de difficultés à établir la valeur moyenne du coût des sinistres provoqués par la tempête Xynthia. Elle a cependant indiqué la référence d'une indemnisation moyenne de 1 000 euros par assuré s'agissant des dommages faisant suite à une tempête. Ce précédent n'apparaît pas suffisant pour déterminer l'indemnisation moyenne des victimes de Xynthia.

M. Bruno Retailleau, président, a souhaité connaître les délais d'indemnisation envisagés par les sociétés d'assurance.

M. Gérard Andreck, président du GEMA, a souligné l'existence de deux cas de figure distincts :

- pour les sinistres d'une valeur inférieure à 2 000 euros, le délai de moins de trois mois sera de rigueur, dans la mesure où les expertises ne posent pas de difficultés ;

- les sinistres d'un montant plus important nécessiteront des expertises plus longues, qui auront des conséquences certaines sur les délais d'indemnisation.

M. Bruno Retailleau, président, a fait part des interrogations des sinistrés sur le nombre d'expertises nécessaires ainsi que sur la demande de production de factures dans certains cas. Ces deux éléments pourraient être de nature à ralentir les procédures d'indemnisation.

M. Gérard Andreck, a observé que les premières visites d'experts étaient justifiées pour distinguer rapidement les sinistres d'une valeur inférieure à 2 000 euros des autres dossiers : il s'agissait surtout d'effectuer un premier tri dans les dossiers. De plus, de nouvelles visites sont nécessaires puisque l'indemnisation des biens immobiliers doit s'accompagner d'une expertise spécifique, en recourant le cas échéant à des architectes.

Mme Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA, est convenue que des factures et des devis, y compris dans les zones noires, avaient été demandés dans les jours qui ont suivi la tempête. Les zones noires n'ayant pas encore été annoncées, les sociétés d'assurance ont en effet appliqué les règles en vigueur. La production de tels documents n'apparaît plus nécessaire, ce qui devrait accélérer les procédures d'indemnisation.

Le calendrier devrait être le suivant : avant la fin du mois de mai 2010, l'ensemble des habitations classées en zones noires utilisées en tant que résidence principale doit avoir été expertisé. Les autres habitations, y compris les résidences secondaires, et l'ensemble des biens mobiliers seront, pour leur part, expertisés d'ici à la fin du mois d'août 2010.

Mme Catherine Traca a souligné la rapidité avec laquelle les sociétés d'assurance indemnisent dès lors que les sinistrés sont favorables aux propositions faites par celles-ci. Ainsi, dans un délai de quinze jours après la transmission des informations par les experts, les assureurs sont en mesure de formuler leurs offres. Si ces dernières font l'objet d'un accord, le paiement peut être effectué sans délai.

M. Gérard Andreck, président du GEMA, a précisé qu'à côté des zones noires les autres dossiers feront également l'objet d'un traitement accéléré. Il a observé qu'au 16 avril 2010, 40 000 habitations ont déjà été expertisées, sur un total de 58 000.

M. Michel Doublet s'est interrogé sur la présence dans les zones noires de maisons n'ayant pas enregistré de dégâts.

Mme Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA, a reconnu l'existence de telles situations et précisé que, pour ces cas précis, les sociétés d'assurance n'ont pas vocation à intervenir. Ces habitations seront en revanche l'objet de visites par les Domaines.

M. Bruno Retailleau, président, a souhaité connaître le régime fiscal des indemnités versées par les assurances.

Mme Catherine Traca a observé que ces sommes échappent à la fiscalité.

M. Daniel Laurent a souhaité connaître l'état des indemnisations concernant les exploitations agricoles, ostréicoles et conchylicoles.

Mme Catherine Traca a indiqué que les sociétés adhérentes du GEMA sont principalement liées aux sinistrés par des contrats d'habitation : elles ne traitent donc que très marginalement des professionnels.

M. Bruno Retailleau, président, s'est interrogé sur les zones noires, l'évolution de leur dénomination et leur cadre juridique.

M. Gérard Andreck, président du GEMA, est convenu de l'absence de base juridique claire pour ce zonage. Il a déploré que les variations dans les déclarations successives des membres du Gouvernement aient pu susciter de plus grandes interrogations chez les sinistrés, voire accroître leurs inquiétudes.

M. Bruno Retailleau, président, a observé que l'indemnisation des habitations classées en zone noire conduirait à un versement par les assurances privées, d'une part, et par l'Etat via le fonds de prévention des risques naturels majeurs (FPRNM), ou fonds « Barnier », d'autre part. Il a souhaité savoir si l'évaluation par les Domaines serait postérieure à la fixation des indemnités par les sociétés d'assurance.

Mme Catherine Traca a confirmé le recours à ces deux instruments d'indemnisation. Elle a ensuite précisé que le travail des assureurs est conduit indépendamment de l'évaluation objective par les Domaines.

En réponse à M. Bruno Retailleau, président, qui a souhaité connaître la part prise en charge par les assureurs au sein d'une indemnisation moyenne estimée à 250.000 euros, Mme Catherine Traca a indiqué que le montant moyen pour une remise en état ou une reconstruction suite à une inondation s'élève à 20.000 euros. Elle a observé que l'indemnisation par l'Etat sera bien plus élevée puisqu'elle portera sur l'intégralité de la valeur vénale du bien immobilier, y compris son terrain.

M. Gérard Andreck, président du GEMA, s'est félicité de l'existence du régime « catastrophes naturelles » (catnat), dispositif efficace qui permet d'associer les assurances privées à un mécanisme de réassurance publique avec la garantie de l'Etat. Il a estimé peu utile le débat sur l'estimation des indemnisations par habitation dans les zones noires dans la mesure où cette indemnisation couvrira la valeur totale du bien.

M. Bruno Retailleau, président, s'est interrogé sur le degré de sollicitation du fonds Barnier, qui traduit le recours à la solidarité nationale.

Mme Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA, a observé que les assureurs conduisent ce travail en relation avec les préfectures de Vendée et de Charente Maritime, mais que le montant des indemnisations par les assureurs ne serait connu qu'à la fin du mois de mai pour les résidences principales et à la fin du mois d'août pour les résidences secondaires.

M. Jean-Claude Merceron s'est interrogé sur l'existence de freins aux procédures d'indemnisation.

Mme Catherine Traca n'a pas relevé de blocage en cette matière. A l'inverse, les factures et devis ne sont pas exigés, de manière à accélérer les délais d'indemnisation. En outre, elle a précisé que les sinistrés conserveront la possibilité de contester les propositions faites par les sociétés d'assurance.

En réponse à M. Bruno Retailleau, président, elle a relevé le caractère provisoire des arrêtés de péril. Ceux-ci présentent l'intérêt d'empêcher à ce stade le retour des sinistrés dans les habitations classées en zone noire, mais il convient d'observer que ces mesures ne conduisent pas à interrompre les procédures d'indemnisation.

M. Michel Doublet a souligné la difficulté à solliciter le fonds Barnier à hauteur de 300 millions d'euros au minimum, alors que les réserves disponibles ne sont pas de cet ordre de grandeur.

M. Gérard Andreck, président du GEMA, a rappelé le mode de financement du fonds, qui conduit à dégager un produit d'environ 150 millions d'euros par an. Une telle somme peut donc être utilisée pour les indemnisations à la condition qu'elle soit étalée sur plusieurs années. Il a déploré que l'usage du fonds se destine parfois à des fins plus contestables, telles que des études. Il a plaidé pour un accroissement des mises en réserve vouées à l'indemnisation.

M. Bruno Retailleau, président, a fait état d'une réserve de trésorerie du fonds estimée à 80 millions d'euros environ. Il a indiqué que l'examen du projet de loi portant engagement national pour l'environnement, dit « Grenelle II », est l'occasion d'une adaptation du cadre législatif du fonds Barnier. Il doit ainsi s'agir de prévoir son intervention pour les cas de submersion marine et de relever son plafond en matière d'indemnisation.

Mme Catherine Traca a rappelé que le fonds Barnier a été mis en place pour l'indemnisation de personnes soumises à des risques naturels graves, tels que le risque d'éboulement du massif de la Séchilienne. Différents aménagements législatifs ont ensuite conduit à élargir progressivement les missions de ce fonds.

M. Bruno Retailleau, président, s'est interrogé sur l'opportunité de prévoir la constitution de réserves obligatoires pour le fonds Barnier, selon un ratio à déterminer. Il a ensuite abordé la question du régime « catnat », en faisant part de l'existence de différentes propositions de réforme.

M. Gérard Andreck, président du GEMA, s'est félicité du modèle français d'assurance des catastrophes naturelles. Ce dernier représente l'un des systèmes les plus performants au monde. Il bénéficie en effet d'une large mutualisation, d'une présence dans la plupart des contrats d'assurance et de la garantie de l'Etat via la Caisse centrale de réassurance (CCR). Ce modèle pourrait toutefois être amélioré sur deux points : l'indemnisation des victimes de sécheresse et les procédures de zonage, notamment les zones d'expansion des crues. Les plans de prévention des risques constituent en revanche la principale faiblesse du régime actuel sur laquelle les pouvoirs publics doivent agir prioritairement.

M. Bruno Retailleau, président, s'est interrogé sur les intentions des assureurs quant à leur participation au débat public sur l'amélioration des régimes d'assurance.

M. Gérard Andreck, président du GEMA, a fait part de la volonté affirmée des sociétés d'assurance de contribuer à l'ensemble des réflexions en cours, y compris s'agissant des franchises.

Mme Catherine Traca, secrétaire générale adjointe du GEMA, a pour sa part exprimé son désaccord pour ce qui concerne la modulation des primes d'assurance en fonction du niveau de risque de la zone considérée. Elle a plaidé pour une conservation d'un mécanisme de solidarité et relevé le caractère modeste de la surprime induite par la tempête Xynthia, de l'ordre de deux à trois euros par contrat d'habitation. Le dispositif existant n'empêche pas la responsabilisation des assurés. Il appelle surtout un renforcement des politiques de prévention.

M. Bruno Retailleau, président, a observé le montant relativement conséquent des franchises : 380 euros pour les habitations, les véhicules à moteur et les autres biens à usage privé, d'une part, et 10 % du montant des dommages avec un minimum de 1.140 euros pour les biens à usage professionnel, sachant que les contrats peuvent prévoir une franchise supérieure. En outre, il s'est interrogé sur les limites de la culture du risque en France et sur les perspectives envisageables en matière de prévention.

En conclusion, M. Gérard Andreck, président du GEMA, a rappelé qu'environ 90 % des sinistrés seraient indemnisés dans le cadre de leur contrat d'assurance de droit commun. En effet, seuls 10 % des dossiers devraient relever du régime « catnat ». Il a souligné que l'aggravation prévisible des catastrophes naturelles, tant dans leur ampleur que dans leur fréquence, plaide pour des réponses adaptées, à l'instar de politiques de prévention plus ambitieuses.

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