II. LES LEVIERS UTILISABLES POUR REDRESSER LA SITUATION

L'enquête de la Cour des comptes n'a pas conduit à la formulation de préconisations précises et hiérarchisées.

Néanmoins, votre rapporteur spécial s'est appuyé sur les précieuses analyses de la Cour pour envisager différentes pistes d'évolution .

A. LES EFFORTS DE L'ONF EN MATIÈRE D'ORGANISATION INTERNE DOIVENT ÊTRE POURSUIVIS

1. L'adoption d'une culture de la performance

L'enquête de la Cour démontre que l'ONF est entré depuis dix ans dans une mutation profonde .

En effet, une culture de la performance , axée sur les gains de productivité et la recherche de résultats, fait l'objet d'une adoption progressive dans une administration ancienne, marquée par le poids de ses traditions.

Ce processus a, par exemple, conduit à refondre l' organisation territoriale de l'Office , avec la suppression de deux niveaux hiérarchiques.

De même, alors que la paye empruntait trois circuits différents, la gestion centralisée des payes constitue un projet qui doit aboutir rapidement.

La réforme de l'ONF doit être poursuivie en veillant, comme la Cour des comptes l'a souligné, à expliciter ses objectifs sur le terrain et à prévoir des dispositifs d'évaluation ex ante et ex post .

2. La modernisation de la fonction ressources humaines

En outre, la recherche d'une gestion moins lourde et moins coûteuse nécessite une adaptation rapide de la fonction ressources humaines de l'Office .

Il semble, en effet, que celle-ci n'accompagne pas suffisamment la modernisation de l'ONF : la réduction des effectifs s'accompagne ainsi d'une augmentation forte de la masse salariale, sans que ne soit exigée, en contrepartie de ces mesures favorables, une évolution marquée des métiers et des compétences des agents.

Il peut également être observé que le dispositif de rémunération selon les performances , établi en 2005, reste insuffisamment mis en oeuvre .

B. LA MISE EN PLACE D'UNE VÉRITABLE POLITIQUE COMMERCIALE EST PLUS QUE JAMAIS NÉCESSAIRE

1. La construction préalable d'une expertise

La Cour des comptes relève que l' absence de politique commerciale structurée constitue un « défaut de pilotage majeur ». La définition d'une politique commerciale représente un préalable pour optimiser les résultats des prestations concurrentielles de l'ONF , et, de manière plus générale, consolider, son financement.

Le versement d'un dividende à l'Etat restera une ambition purement théorique tant que l'ONF ne disposera pas des moyens de rentabiliser ses activités. Il apparaît que l'Office doit commencer par développer sa propre expertise en matière commerciale , en s'appuyant sur des outils adaptés.

Sa connaissance du marché semble, en effet, demeurer aujourd'hui très lacunaire, qu'il s'agisse de données sur sa clientèle, du suivi des cours du bois 12 ( * ) ou de la prévision des récoltes . Sur ce dernier point, un projet, initié en 2005, devrait fournir des résultats au cours de l'année 2010, selon les informations transmises par l'Office à votre rapporteur spécial 13 ( * ) .

Enfin, l'ONF devra également être en mesure d' apprécier la rentabilité de ses différents services et interventions . Dans ce but, un suivi plus fin et rigoureux est requis. Votre rapporteur spécial souligne qu'un logiciel de contrôle de gestion dénommé « Séquoia » serait ainsi en cours de développement.

2. Une évolution des modes opératoires

La mise en oeuvre d'une véritable politique commerciale impose une modification des comportements et des modes opératoires . L'ONF, pour expliquer le déficit de ces activités concurrentielles, fait ainsi état d'une « sur-qualité » de ses services .

Le prix de ceux-ci étant calculé en fonction du temps prévisionnel nécessaire à la prestation, la Cour des Comptes fait valoir qu'il existe donc des gisements de productivité à exploiter.

C. LES RELATIONS ENTRE L'ONF, L'ETAT ET LES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES DOIVENT ÊTRE CLARIFIÉES

1. Réaffirmer le rôle de la tutelle

L'Etat doit prendre toute sa place dans le processus de mutation de l'Office . Son pilotage présente deux faiblesses : une implication insuffisante dans la définition des priorités stratégiques de l'ONF 14 ( * ) , d'une part, et un cadrage financier peu réaliste , d'autre part.

Opérateur principal de l'Etat pour le programme budgétaire 149 Forêt , l'ONF n'est pas toujours rémunéré pour les services qu'il rend .

S'agissant, par exemple, des missions d'intérêt général, pour lesquelles le principe d'un financement intégral par l'État a été posé, la Cour relève des défaillances de la part de celui-ci, liées à l' imprécision des missions confiées à l'Office, au financement insuffisant ou, encore, à des retards de paiement 15 ( * ) .

Au cours des prochaines années, il faudra veiller à ce que les nouvelles contraintes qui résultent des orientations du Grenelle de l'environnement et des Assises de la Forêt soient prises en compte dans le calcul des compensations versées à l'Office 16 ( * ) .

2. Réexaminer le partage du coût du régime forestier ?

L'activité au titre du régime forestier sera de plus en plus déficitaire : en plus d'un plafonnement du versement compensateur de l'Etat par le contrat d'objectifs, la Cour indique qu'entre 1999 et 2007, la somme effectivement versée par l'Etat chaque année est inférieure d'environ 10 millions d'euros aux engagements contractuels .

Si, du côté des dépenses, l'ONF doit poursuivre ses efforts de productivité, il conviendrait également d'agir sur les recettes qu'il perçoit. Tout en faisant valoir que « le partage des charges du régime forestier entre l'État et les collectivités territoriales relève d'une décision politique », la Cour relève que le calcul des frais de garderie manque d'équité .

En effet, ce calcul ne prend en compte ni la capacité contributive des communes , ni les prestations de l'Office , et reste lié aux options d'exploitation retenues localement .

Un tel mode de calcul conduit à un résultat peu souhaitable : la charge pesant sur une commune est d'autant plus élevée qu'elle a une politique active d'exploitation commerciale de sa forêt 17 ( * ) .

A l'inverse, une commune qui négligerait une telle exploitation bénéficiera dans le même temps des prestations de l'Office au titre du régime forestier et, donc, profitera de la situation en étant relativement favorisée .

La Cour des Comptes souligne que cette logique ne va pas dans le sens de la mobilisation de la ressource forestière , telle que l'a notamment recommandée le Président de la République 18 ( * ) .

Ces observations plaident donc en faveur d'un nouveau mode de calcul des frais de garderie .

Néanmoins, votre rapporteur spécial appelle à traiter avec une certaine prudence la question du partage du coût du régime forestier . Il observe, d'ailleurs, que les tentatives de réforme de ce régime ont, jusqu'aujourd'hui, échoué 19 ( * ) .

* 12 Selon l'ONF, au niveau national, le temps consacré à la connaissance du marché est réparti entre trois ou quatre personnes et totalise moins d'un équivalent temps plein (ETP).

* 13 La Cour des Comptes avait, pour sa part, relevé que le projet devait aboutir avant la fin de l'année 2009 : le temps nécessaire à la mise en place de cet outil informatique de prévision des récoltes est donc plus important que prévu.

* 14 La Cour indique que l'initiative et la rédaction des contrats d'objectifs sont d'abord le fait de l'Office. Le dernier contrat (2007-2013) n'a ainsi été précédé d'aucune lettre de mission au directeur général ni d'une autre forme de cadrage préalable.

* 15 Par exemple, la mission de restauration de terrains en montagne n'a, dans un premier temps, été prise en charge par aucun ministère, et s'est soldée par une perte pour l'Office de près de 2 millions d'euros. De même, la moitié du montant des factures relatives à des travaux sur les dunes littorales en 2003 n'a pas été payée par le ministère de l'Agriculture en raison d'un gel de crédits (mise en paiement de 434.521 euros sur 901.600 euros facturés).

* 16 Alors que le contrat d'objectifs 2007-2011 prévoit que « l'ensemble des mesures environnementales demandées à l'ONF font l'objet d'une étude d'impact technique et financier - le cas échéant juridique - préalable », la Cour des Comptes n'a, par exemple, pas eu communication d'une étude sur le coût pour l'Office des îlots de vieux bois.

* 17 Dans ce cas, ses recettes sont également plus élevées.

* 18 Discours d'Urmatt, 10 mai 2009.

* 19 En effet, l'opposition ferme des communes forestières à la majoration de leurs contributions a conduit le Gouvernement à renoncer à son projet de réforme en 1979,1995, 2005 et 2008.

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