II. UN CAP CLAIR ET UN PILOTAGE FORT SONT PLUS QUE JAMAIS NÉCESSAIRES

A. UNE RÉORIENTATION PROFONDE EST INDISPENSABLE POUR MENER À BIEN DES CHANTIERS ESSENTIELS POUR L'AVENIR DE NOTRE SYSTÈME DE SANTÉ

1. Une audition qui s'inscrivait dans le cadre de la préparation de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale

Compte tenu de la sévérité des observations formulées par la Cour des comptes, qui rejoignent le constat antérieur de votre rapporteur spécial, votre commission des finances a décidé d'organiser une audition publique des responsables concernés du ministère de la santé, de la jeunesse et des sports.

Eu égard à son objet même, cette audition, qui s'est tenue le mardi 16 octobre 2007 , a été ouverte aux membres de la commission des affaires sociales, compétente au fond sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale, ainsi qu'à la presse.

Cette audition publique de suivi a permis de faire le point sur l'interopérabilité des systèmes d'information à l'approche de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, qui comportait des mesures relatives à deux « projets fédérateurs » pour les systèmes d'information de santé, pour reprendre une expression employée par la Cour des comptes :

- d'une part, l'institution d'un « service unique d'accueil dématérialisé, dénommé portail du dossier médical personnel » ;

- d'autre part, l'accélération de la mise en place de la tarification à l'activité (T2A) dans les hôpitaux. Le financement des activités de médecine, chirurgie et obstétrique (MCO) des hôpitaux publics et des établissements privés à but non lucratif doit ainsi être aligné dès 2008 sur celui des activités comparables dans les cliniques privées, c'est-à-dire un financement intégral à l'activité, même si un dispositif de transition est mis en place jusqu'en 2012 9 ( * ) .

2. Un accord sur la nécessité de mener à bien des réformes d'envergure

Cette audition, de même que l'examen du projet de loi précité de financement de la sécurité sociale, ont permis de faire partager le constat de la nécessité de mener à bien des réformes d'envergure afin de rendre les systèmes d'information de santé enfin interopérables.

La ministre de la santé, de la jeunesse et des sports, Mme Roselyne Bachelot-Narquin, a clairement exprimé, lors de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008, sa volonté, d'une part de « reprendre en main » le chantier du DMP, notamment au regard du constat posé par la mission commune d'audit confiée à l'inspection générale des finances, à l'inspection générale des affaires sociales et au conseil général des technologies de l'information, et d'autre part de mieux piloter les systèmes d'information de santé.

La position prise au Sénat par la ministre de la santé, de la jeunesse et des sports lors de l'examen de l'article 36 du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008

« Ma position est claire, je crois que vous l'avez comprise, mesdames, messieurs les sénateurs : je veux relancer le DMP en évitant toute précipitation. Il est essentiel, en effet, de nous donner le temps nécessaire pour réussir, et ma priorité sera de mettre en place les conditions du succès du projet.

« Tous les pays qui ont créé un dossier médical personnel ont suivi un processus qui a duré plus d'une dizaine d'années.

« Je me suis rendue à Washington voilà quelques jours afin d'étudier la structure qui gère les dossiers médicaux des vétérans américains, l'Electronic Health Record, au sein de ce qui est peu ou prou l'équivalent de notre ministère des anciens combattants, et j'ai pu constater qu'il avait fallu presque trente ans aux Américains pour bâtir leur dossier électronique. Il ne faut donc pas rêver d'un DMP qui serait mis au point en quelques années seulement !

« Je propose donc, tout d'abord, de ne pas donner suite à l'appel d'offres de l'hébergeur de référence, dont il faut reconnaître qu'il n'était pas mûr techniquement.

« Ensuite, je veux recentrer le DMP sur son contenu, en replaçant au coeur du projet les professionnels de santé et les patients : le chantier doit être mené avec ces derniers, en prenant en compte leurs besoins et l'usage qu'ils feront du dossier médical personnel.

« L'une des raisons de l'échec du DMP, c'est l'insuffisante implication des professionnels de santé. Bien sûr, ce seront les médecins qui utiliseront et alimenteront le DMP. Si nous ne les associons pas dès le départ, nous courons à la catastrophe !

« Je vais lancer une nouvelle phase de concertation sur les objectifs et la feuille de route du projet DMP, en cherchant à rendre ce dernier le plus utile possible pour les professionnels de santé et pour les patients, qui joueront un rôle clef. Cette phase s'achèvera au printemps 2008 par un séminaire de deux jours consacré au DMP, qui permettra de relancer le projet sur des bases clarifiées et consolidées.

« Cette feuille de route devra être mise en oeuvre de façon ambitieuse et pragmatique. Il s'agira, par exemple, d'élaborer, en association étroite avec les professionnels et les patients, un prototype complet du DMP, qui ira de l'alimentation des données à la consultation du dossier médical personnel par les professionnels et par les patients, et qui jouera, en quelque sorte, le rôle de démonstrateur.

« Ce prototype sera expérimenté sur le terrain, afin de le tester en grandeur nature et de l'adapter aux besoins réels des utilisateurs, y compris dans ses détails pratiques et ergonomiques.

« Le déploiement du système se fera ensuite progressivement, sur plusieurs années, en accordant la priorité aux professionnels et aux patients qui ont le plus besoin du DMP. On peut penser, par exemple, aux ALD, mais nous sommes encore en phase expérimentale.

« Par ailleurs, je confierai à une équipe resserrée la mission de me transmettre des propositions, d'ici au début de l'année prochaine, afin de consolider l'organisation du projet DMP, qui doit être améliorée, et de permettre à l'Etat de piloter de façon plus efficace et mieux coordonnée les différents projets des systèmes d'information de santé ».

Source : extrait du compte rendu intégral des débats, examen de l'article 36 du projet de loi de financement de financement de la sécurité sociale pour 2008, séance du 15 novembre 2007

Son directeur de cabinet, M. Georges-François Leclerc, a par ailleurs indiqué, lors de l'audition du 16 octobre 2007 dont le procès-verbal est joint en annexe, que des réformes de structures seraient menées en 2008, à l'issue de la révision générale des politiques publiques, en évoquant « un souhait très fort de regrouper les opérateurs dès lors que les métiers sont cohérents ». Il a également fait part de la volonté du ministère de ne plus rattacher budgétairement certaines agences, en particulier la mission d'appui à l'investissement hospitalier (MAINH) et la mission d'expertise et d'audit hospitalier MEAH), à l'agence régionale de l'hospitalisation (ARH) d'Ile-de-France.

Votre rapporteur spécial estime, suivant les recommandations formulées par le Comité interministériel d'audit des programmes (CIAP) 10 ( * ) , que le financement de ces missions devrait relever de l'Etat, auquel incombe la responsabilité du pilotage stratégique des systèmes d'information de santé. Il considère, par ailleurs, qu' une clarification plus générale des rôles respectifs de l'Etat et de l'assurance maladie, ainsi que des financements qu'ils supportent, est nécessaire.

* 9 Se reporter sur ce point au rapport pour avis n° 73 (2007-2008) de votre rapporteur spécial sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.

* 10 Avis du 18 septembre 2007 sur le programme « Offre de soins et qualité du système de soins » de la mission « Santé ». Se reporter sur ce point au rapport pour avis précité n° 73 (2007-2008) de votre rapporteur spécial sur le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2008.

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