B. LES TRAVAUX DE LA COUR DES COMPTES CONFIRMENT L'ANALYSE DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES

Les travaux de la Cour des comptes prolongent très largement le constat dressé par votre commission des finances .

1. Le référé de la Cour des comptes fait ressortir les faiblesses du pilotage central

Le référé de la Cour des comptes sur l'interopérabilité des systèmes d'information en santé (6 ème chambre, référé n° 46485 délibéré le 15 septembre 2006), qui avait pour objet d'apprécier si des progrès en matière d'interopérabilité des systèmes d'information en santé avaient été accomplis aux cours des dernières années, notamment en vue de favoriser la mise en oeuvre du dossier médical personnel (DMP), aboutit aux constats suivants :

- les conditions nécessaires à l'amélioration de l'interopérabilité des systèmes d'information ne sont pas encore réunies , cette situation étant largement imputable à un défaut de pilotage central ;

- l'interopérabilité requiert des choix techniques qui font défaut : l'absence d'identifiant unique du patient constitue un obstacle majeur à la mise en place du DMP ;

- cette situation résulte, en partie, d'un manque de volonté de partager l'information , ceci n'étant pas suffisamment admis par les acteurs du système de santé, ni dans son principe, ni s'agissant des données à échanger ;

- dans ce cadre, l'Etat n'a pas su organiser un pilotage efficace : d'une part, les responsabilités sont éclatées entre de multiples directions ou structures périphériques au ministère de la santé 6 ( * ) et, d'autre part, les maîtrises d'ouvrage de projets comme le DMP ou la tarification à l'activité (T2A) dans les établissements de santé ne sont pas coordonnées.

La Cour des comptes recommande donc de renforcer le rôle et les moyens de la mission pour l'informatisation du système de santé (MISS) créée au sein du ministère de la santé et des solidarités. Elle souhaite également une redéfinition des rôles des nombreuses structures existantes , en vue d'une stricte complémentarité avec les moyens d'une MISS renforcée.

2. L'actualisation réalisée en septembre 2007 souligne à nouveau l'ampleur des problèmes à traiter

La Cour des comptes a procédé à une actualisation des données du référé transmis à votre commission des finances dans le cadre de son rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale paru en septembre 2007. Les faits suivants doivent notamment être relevés :

- l'article 25 de la loi du 30 janvier 2007 7 ( * ) a prévu l'utilisation d'un identifiant unique pour tous les systèmes d'information de santé, mais le choix du système d'identification n'a pas encore été concrétisé ;

- la fiabilité de l'identification des professionnels de santé, condition nécessaire à l'échange d'informations, fait encore défaut . En effet, la carte professionnel de santé (CPS), qui remplit cette fonction, est bien diffusée parmi les professionnels de santé libéraux (environ 78 % en moyenne) mais très faiblement dans le secteur hospitalier (4 % toutes catégories confondues et 8 % pour les médecins hospitaliers) . La Cour des comptes relève que ceci résulte de l'absence fréquente de véritable politique de sécurité au sein des établissements de santé et du caractère mal adapté à certains modes de fonctionnement propres à l'hôpital de la carte actuelle. Le décret du 15 mai 2007 relatif à la confidentialité des informations médicales impose toutefois, désormais, l'utilisation de la CPS pour tout accès aux informations médicales à caractère personnel conservées sur support informatique et pour leur transmission par voie électronique ;

- les travaux de normalisation des échanges de données n'ont pas encore abouti ;

- l' atomisation du parc de logiciels des professionnels de santé constitue un frein au développement de l'interopérabilité des systèmes d'information ;

- le respect du secret médical ne constitue pas une contrainte pour les systèmes d'information médicaux au sein de l'hôpital mais en est une pour la médecine de ville, dans la mesure où les échanges d'information ne peuvent y être opérés qu'avec l'autorisation du patient ou son information ;

- les crédits alloués par l'assurance maladie par le biais du fonds d'aide à la qualité des soins de ville (FAQSV) et de la dotation nationale de développement des réseaux (DNDR) n'ont « pas fait progresser de façon significative l'interopérabilité des systèmes d'information des professionnels de santé participant aux réseaux » ;

- le trop grand nombre de structures concernées nuit à l'efficacité du système et fait ressortir une coordination insuffisante au niveau du ministère de la santé. La Cour des comptes critique également le rattachement administratif et budgétaire de la Mission nationale d'appui à l'investissement hospitalier (MAINH) à l'agence régionale de l'hospitalisation de l'Ile-de-France, ainsi que son positionnement auprès du ministre, et non de la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS).

Les convergences entre l'analyse de votre commission des finances et celle de la Cour des comptes sont donc nombreuses. Votre rapporteur spécial observe, au demeurant, que ce constat est également partagé par la Chambre des communes britannique qui, à l'occasion d'une revue de l'état d'avancement de l'équivalent anglais du DMP, relève qu'un long chemin reste à parcourir en France pour assurer l'interopérabilité des systèmes d'information de santé et la mise en place effective de ce dossier médical personnel 8 ( * ) .

* 6 Outre la direction de l'hospitalisation et de l'organisation des soins (DHOS) du ministère de la santé, interviennent sur ces domaines ou projets : la mission pour l'informatisation du système de santé (MISS), la mission nationale d'appui à l'investissement hospitalier (MAINH), l'agence technique de l'information sur l'hospitalisation (ATIH), le groupement d'intérêt public carte professionnel de santé (GIP CPS), le groupement d'intérêt économique (GIE) Sesam-Vitale, le groupement pour la modernisation du système d'information hospitalier (GMSIH), le GIP DMP...

* 7 Loi n° 2007-127 du 30 janvier 2007 ratifiant l'ordonnance n° 2005-1040 du 26 août 2005 relative à l'organisation de certaines professions de santé et à la répression de l'usurpation de titres et de l'exercice illégal de ces professions et modifiant le code de la santé publique.

* 8 « Ensuring interoperability and consistent clinical information standards are important goals. (...) In France, the success of the DMP depends on organisations having local systems, such as that at Amiens, which can interact with the national system. There is a long way to go with this: for example, only one third of French hospitals have digital imaging systems ». House of commons, Health Committee, The Electronic Patient Record, Sixth Report of Session 2006-2007, Volume I, ordered to be printed 25 July 2007, p. 21.

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