TRAVAUX DE LA COMMISSION - AUDITION POUR SUITE À DONNER À L'ENQUÊTE RÉALISÉE PAR LA COUR DES COMPTES, EN APPLICATION DE L'ARTICLE 58-2° DE LA LOLF, SUR LA GESTION DU PATRIMOINE IMMOBILIER DU MINISTÈRE DE L'ÉQUIPEMENT

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Présidence de M. Jean Arthuis, Président

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Séance du mercredi 17 mai 2006

Ordre du Jour

- Audition de M. Jacques Sallois, président de la 7e chambre de la Cour des comptes, de M. Patrick Gandil, secrétaire général du ministère des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, et de M. Dominique Figeat, délégué à l'action foncière, pour suite à donner à l'enquête de la Cour des comptes sur la gestion du patrimoine immobilier du ministère de l'équipement , en présence de M. Paul Lempereur , directeur adjoint du cabinet du ministre des transports, de l'équipement, du tourisme et de la mer, et de Mme Hélène Jacquot-Guimbal , directrice générale du personnel et de l'administration.

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La séance est ouverte à 9 heures 35.

M. le président - Mes chers collègues, nous voici à nouveau réunis pour une « audition de suivi » d'une enquête réalisée par la Cour des comptes, en application des dispositions de l'article 58-2 de la loi organique du 1er août 2001 relative aux lois de finances, qui prévoit la réalisation par la Cour des comptes « de toute enquête demandée par les commissions de l'Assemblée Nationale et du Sénat chargées des finances sur la gestion des services ou organismes qu'elles contrôlent ».

Il s'agit aujourd'hui d'une communication sur la gestion immobilière du ministère de l'équipement que la Cour des comptes a transmise à notre commission, en mars 2006.

C'est un sujet qui est loin d'être négligeable puisque, même si l'on ne retient que le parc immobilier bâti accueillant des activités d'administration ou d'exploitation des services, le patrimoine immobilier du ministère de l'équipement représente 5 millions de m 2 de surface hors oeuvre nette et plus de 10.000 implantations.

Il m'a semblé, conformément à la procédure déjà suivie, qu'était nécessaire une audition conjointe de M. Patrick Gandil, secrétaire général du ministère de l'équipement et de Mme Hélène Jacquot-Guimbal directrice générale du personnel et de l'administration, en présence de M. Jacques Sallois, président de la 7 ème chambre, de M. Alain Hespel, conseiller maître, et de Mme Monique Pinault, qui a participé à l'enquête.

Je tiens aussi à saluer la présence parmi nous de M. Dominique Figeat, délégué à l'action foncière, et de M. Paul Lempereur, directeur-adjoint du cabinet du ministre de l'équipement.

Cette audition est ouverte à la presse afin d'assurer un débat le plus ouvert et fructueux possible. Notons que, dans la même perspective, les membres de la commission des affaires économiques ont été invités à participer à cette discussion.

La communication de la Cour des comptes constate l'absence de politique à long terme de gestion patrimoniale du ministère, qu'elle impute à l'insuffisance des outils d'inventaire et de gestion et également, pour une large part, à la complexité de son organisation interne. Sans avoir pu tirer le bilan de la réorganisation du ministère intervenue très récemment, et qui devra faire la preuve de son efficacité, la Cour des comptes s'inquiète d'une atomisation de la fonction immobilière dont le pilotage n'est pas assuré.

Cette appréciation très critique donne la mesure des défis que doit relever ce ministère dans la perspective des réformes qui doivent être engagées notamment pour la mise en place des services routiers interégionaux.

La communication de la Cour des comptes aborde, enfin, le point particulier de l'éventuel regroupement des services centraux sur le site de la Défense et de l'évolution des implantations du ministère sur ce secteur.

Vous avez tous reçu, mes chers collègues, copie de l'enquête de la Cour des comptes. Dans cette perspective, je compte sur chaque interlocuteur pour présenter très brièvement ses principales conclusions et laisser toute sa place à un débat le plus interactif et constructif possible dans lequel je donnerai prioritairement la parole à notre rapporteur spécial Jean-Pierre Masseret.

Je rappelle aux membres de la commission des finances que nous aurons ensuite à prendre une décision sur la publication de l'enquête de la Cour des comptes au sein d'un rapport d'information.

Pour commencer, je donne la parole à M. Jacques Sallois, président de la 7ème chambre de la Cour des comptes pour présenter les principales conclusions de l'enquête réalisée par la Cour des comptes sur la gestion immobilière du ministère de l'équipement.

M. Jacques Sallois - Merci, monsieur le Président.

Monsieur, le Président, monsieur le Rapporteur général, mesdames et messieurs les sénateurs, je voudrais formuler trois remarques préliminaires sur la politique immobilière de l'Etat en général, sur la situation particulière du ministère de l'équipement plus spécialement et sur l'esprit dans lequel la Cour a conduit ses travaux.

Première remarque, le thème de la politique immobilière a fait l'objet, au cours des dernières années, de très importants travaux : des rapports de l'inspection générale des finances, un rapport fondateur d'Olivier Debains, un rapport, l'an passé, devant la mission d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée nationale du député Georges Tron, avec des auditions où la Cour était représentée.

La Cour a beaucoup travaillé sur le sujet au cours des dernières années, au point que chaque rapport annuel en porte la trace. Le dernier, en février de cette année, s'intéressait aux suites des travaux de la Cour sur le ministère de la culture et la gestion de son patrimoine immobilier en 2001 ; celui de 2004 s'intéressait aux affaires étrangères et n'est pas sans rapport avec les travaux que nous vous présentons. En 2003, il s'intéressait au patrimoine immobilier du ministère de la justice. C'est dire que c'est un sujet récurrent pour la Cour.

Le 31 janvier dernier, le Premier président s'est adressé par lettre au ministère des finances pour faire part des observations que la Cour avait formulées sur la gestion de son propre ministère. Ce travail aurait dû vous parvenir trois mois exactement après son envoi. Il a pris hélas quelque retard et, avec l'accord du Premier président, je vous le remets de la main à la main.

Les observations de la Cour rejoignent celles que nous formulons traditionnellement sur tous les autres ministères. Ses travaux ont accompagné et quelquefois suscité un grand nombre d'initiatives. Je ne vais pas les rappeler ici. Je rappellerai uniquement les sigles : CIPI, CITEP, MIVPIE, MIQCP, MRAI..., toutes institutions créées au cours des cinq dernières années pour définir et organiser la politique immobilière de l'Etat.

J'y ajoute, d'une part, la circulaire « Cresson » destinée à faciliter les cessions et, d'autre part, les exigences nouvelles de la LOLF en matière de patrimoine immobilier.

Toutes les discussions montrent l'extrême difficulté de l'entreprise. La Cour sait qu'il ne suffira pas de quelques mois pour aboutir à des résultats. C'est une raison supplémentaire pour faire preuve de ténacité.

Ma deuxième série de remarques porte sur le ministère de l'équipement et nos interlocuteurs ne m'en voudront pas de souligner trois caractéristiques qui le distinguent des autres ministères s'agissant de la politique immobilière.

Premièrement, son patrimoine est très spécifique. Il dispose d'un important patrimoine immobilier bâti à usage de bureau ou d'exploitation, le tiers, d'après les estimations, de celui de l'Etat, mais son patrimoine, à l'inverse des autres ministères, est beaucoup plus hétérogène, car il comporte également des surfaces affectées aux infrastructures de toutes natures -routières, portuaires, aéroportuaires- et également, pour une part importante, du foncier non-bâti correspondant à des projets d'infrastructures ou à des délaissés souvent anciens d'opérations achevées.

Ce patrimoine, enfin, est extrêmement dispersé sur la totalité du territoire et, depuis le transfert du patrimoine scolaire, c'est le plus diffusé, au point que toutes les collectivités y sont intéressées.

D'ailleurs, c'est la deuxième caractéristique, nous sommes devant un ministère qui, plus que d'autres, est engagé dans la décentralisation, d'abord parce qu'il entretient avec toutes les collectivités des rapports anciens, complexes et étroits, mais aussi parce qu'il est le principal chantier de la politique actuelle de décentralisation avec la décentralisation routière, qui va l'amener à revoir son réseau avec la création de directions interégionales des routes et la fusion de ces directions départementales avec celle de l'agriculture et des forêts, ce qui fait un paysage un peu spécifique par rapport à celui des autres ministères.

Troisième série de remarques, nous savons, Monsieur le Président, votre souci -qui est également le nôtre et plus encore peut-être celui de notre Premier président- d'aller vers des recommandations, vers des préconisations précises et concrètes.

De ce point de vue, nous sommes restés, dans ce domaine particulier, plutôt modestes pour deux séries de raisons.

Premièrement, les solutions dans ce domaine ne dépendent pas uniquement de nos interlocuteurs du ministère de l'équipement ; comme dans tous les autres ministères, la réponse dépend aussi, s'agissant du recensement, du ministère des finances et de son service des domaines, plus ou moins en transition entre deux directions aujourd'hui, et qui a la charge de la gestion du tableau général des propriétés de l'Etat.

Il dépend aussi de la volonté gouvernementale, car un ministère, souvent, est confronté à des concurrences de choix d'autres ministères et donc soumis aux arbitrages que doit rendre un Premier ministre. Nous sommes restés aussi prudents parce que, dans nombre de sujets, les chantiers sont en cours ; leur mise en oeuvre est d'autant moins aisée que ce ministère est celui qui conjugue le plus grand nombre de chantiers en cours : réorganisation de la centrale, décentralisation, réorganisation des services déconcentrés et mise en oeuvre de la LOLF. Il y a peu d'exemples, dans nos structures administratives, d'un ministère confronté à tant de chantiers à la fois.

Enfin, nous avons le sentiment d'être devant des interlocuteurs lucides, avec lesquels il est apparu possible, au terme d'une longue contradiction, de nous accorder sur le diagnostic et, nous l'espérons, aujourd'hui, devant vous, sur les perspectives et les solutions.

Après ces observations liminaires, je vous propose d'évoquer les principales conclusions de notre rapport, en distinguant ce qui est la loi du genre dans pratiquement tous les ministères et ce qui fait la spécificité du ministère de l'équipement.

La première partie de la communication pose le problème de la connaissance du patrimoine. C'est évidemment la condition première de toute politique immobilière.

Comme dans tous les ministères, notre communication s'adresse sur ce point autant au ministère des finances qu'au ministère de l'équipement.

Le ministère des finances, dans sa réponse, confirme les difficultés rencontrées, en dépit des progrès réalisés et reconnaît que la situation n'est pas encore satisfaisante comme le soulignent nos travaux récents dans le cadre des missions intermédiaires préparatoires à l'examen du bilan d'ouverture de l'Etat.

Il existe cependant une caractéristique spécifique au ministère de l'équipement, c'est que le TGPE y est encore moins significatif que dans les autres ministères. Seul l'immobilier de bureau y est recensé individuellement. En outre, le foncier non-bâti, très important dans ce ministère, est enregistré sous forme globalisée par commune et les infrastructures publiques et leurs annexes en sont exclues.

Enfin, non seulement il n'y a pas d'interface fortement articulée entre le TGPE et les applications informatiques de gestion du ministère, mais les divergences sont importantes chaque fois qu'on les rapproche.

Les travaux que nous avons conduits et singulièrement ceux qu'a menés Mme Pinault dans le cadre de la préparation du bilan d'ouverture confirment ces difficultés.

Le caractère peu opérationnel de l'inventaire physique ne facilite évidemment pas la mise en oeuvre de la politique immobilière et la professionnalisation de la fonction immobilière, mais le ministère nous précisera les engagements qu'il a pris, en réponse à nos questions, de se doter d'outils de connaissance et de suivi de son patrimoine.

La seconde partie de la communication est relative à l'organisation et aux moyens de la fonction immobilière au ministère de l'équipement.

Trois points sont abordés. Le premier évoque l'éclatement de la fonction immobilière. C'est hélas une situation que nous retrouvons dans un grand nombre de ministères, y compris au ministère des finances.

Les systèmes communs de recensement du ministère, y compris les systèmes de recensement des crédits des services centraux, laissent à l'écart de grandes directions, comme la direction des routes, de la sécurité routière, de la mer, de l'air et du tourisme, dans le domaine immobilier.

S'agissant des crédits des services centraux, deux chiffres sont à retenir : ils représentaient un peu plus de 45 millions d'euros en 2004 pour 4.000 agents, soit la moitié de ceux que consacre le ministère à ses services déconcentrés, pour 17 fois plus d'agents, ce qui veut dire que les services déconcentrés sont gérés très largement avec des concours des collectivités locales et d'un certain nombre de concours particuliers du ministère -je pense notamment à la direction des routes.

Enfin, la mise en oeuvre de la LOLF ne suffira pas à régler les problèmes du ministère, dans la mesure où les dépenses immobilières sont ou seront rattachées à chacun des programmes. Il faudra donc distinguer en termes d'analyse des coûts entre la gestion et le rattachement à chacun des programmes.

La réforme de l'administration centrale intervenue en 2005 avec la fusion de deux directions centrales pour créer une direction générale des personnels et de l'administration, sous la houlette de Mme Jacquot-Guimbal et d'un secrétariat général, laisse subsister un certain nombre de cloisonnements anciens, plusieurs secteurs échappant à cette réforme comme la mer, la DGAC et le tourisme.

Les travaux que nous menons sur une de ces directions montrent que, du point de vue immobilier, ils échappent largement aux efforts en cours.

La troisième partie de la communication traite de la politique et de la gestion immobilière ; la Cour relève trois dysfonctionnements concernant l'absence de documents d'orientation stratégique, les modes de gestion et les orientations à moyen terme. Je passerai sur les deux premiers points qui -hélas- rejoignent les critiques que nous formulons assez régulièrement dans les autres ministères, pour insister sur le troisième.

S'agissant de la stratégie, aucun des documents exigés par les textes généraux, au moment où nous avons mené l'enquête, n'est susceptible de fonder une stratégie cohérente du ministère.

Le plan pluriannuel d'implantation des emplois n'avait pas été adopté -mais son élaboration, dans cette période de décentralisation, n'est pas aisée. Le plan prévisionnel de cession n'est pas élaboré. Les plans prévisionnels d'investissement ont été abandonnés. Le plan de modernisation ministérielle ne comporte des orientations stratégiques très générales que pour le seul secteur équipement.

Je rappelle que M. Christian Serradji, ancien Directeur des affaires financières et de l'administration générale du ministère de l'Equipement, devant la mission d'évaluation et de contrôle de l'Assemblée, déclarait l'année dernière : « Il n'y a pas de véritable politique immobilière si l'on entend par là le répertoire quantitatif et qualitatif des besoins, des modalités de réponse, des instruments de comparaison et de paramétrage visant à déterminer si les besoins sont satisfaits au moindre coût et dans les meilleures conditions ».

Mais le conseil des ministres du 22 février dernier a annoncé la mise au point de schémas pluriannuels de stratégie immobilière comprenant des données de gestion et d'orientation de moyen terme qui devraient être finalisées au cours du printemps pour les administrations centrales, avant d'être étendues aux services déconcentrés. Je pense que les représentants du ministère ne manqueront pas de nous dire où ils en sont.

En matière de gestion, les observations de notre rapport -programmation des travaux défaillante, gestion des baux manquant de rigueur, commandes publiques peu professionnelles- se retrouvent hélas dans la plupart des ministères.

Mais c'est un peu plus grave au ministère de l'équipement que dans les autres ministères, dans la mesure où, ministère constructeur pour son compte et pour le compte des autres ministères, ministère compétent en matière d'ingénierie, doté des corps techniques les plus compétents de l'ensemble de l'administration française, on s'attendrait plutôt à y trouver des pratiques parfaitement exemplaires.

Troisième point : les objectifs à moyen terme posent des problèmes de mise en oeuvre, qu'il s'agisse des services déconcentrés ou de l'administration centrale.

S'agissant des services déconcentrés, trois observations : ils sont souvent logés dans des locaux dont la propriété est partagée entre l'Etat et les collectivités locales, dans des conditions souvent confuses ; en outre ces locaux sont souvent vétustes, inadaptés et très dispersés. La politique de cession -c'est un point très positif- a dégagé des moyens importants qui dépassent souvent les crédits budgétaires pour les services déconcentrés, mais elle est difficile à apprécier faute de plan d'objectif et pourrait sans doute être plus systématiquement étendue aux terrains non-bâtis.

La rationalisation -c'est surtout là le point central- est suspendue à l'issue des mouvements de décentralisation prévus et suscite deux questions : comment le ministère entend-il piloter les opérations de décentralisation dans la situation d'ignorance où il se trouve de l'état de son patrimoine ? Ne peut-on craindre par ailleurs que les opérations immobilières de regroupement des services routiers interrégionaux ne coûtent sensiblement plus cher que les économies qu'entraînera au niveau départemental, le transfert des compétences routières aux départements ?

En ce qui concerne l'administration centrale, les perspectives tracées sont relativement claires, mais se heurtent à des difficultés de mise en oeuvre.

S'agissant de la politique de cession, elle est demeurée limitée en administration centrale, comme le confirme la réponse de la direction générale des impôts, mais le regroupement des services, il faut en convenir, en réduit les perspectives.

S'agissant de ces perspectives de regroupement, elles s'articulent autour de l'hôtel de Rocquelaure et du boulevard Saint-Germain, mais semblent remises en cause par l'affectation à la maison de la francophonie de locaux promis au ministère des affaires étrangères en contrepartie de son dégagement du site.

Les représentants du ministère nous diront où ils en sont. Cette question pose le problème plus large de l'absence de vision stratégique et cohérente de l'implantation des administrations centrales dans Paris, avec les problèmes qui en résultent pour Rocquelaure et qui peuvent en résulter pour le logement des services de la mer, qui conditionnent toute mise en oeuvre d'une politique cohérente par chacun des ministères.

S'agissant du regroupement des services à La Défense, celui-ci s'inscrit dans le plan de relance de l'établissement public d'aménagement qui devait être fermé et qui a été finalement relancé, mais sa gestion pose un certain nombre de questions, dont le relogement du ministère n'est pas le moindre.

L'Etablissement public d'aménagement de La Défense est un problème en soi et Mme Pinault, pour la Cour, est en train d'examiner sa gestion.

Quatre remarques toutefois peuvent être faites à ce stade.

- la fin de la mise à disposition gratuite de l'Arche par l'EPAD, dénoncée par la Cour en son temps, a fait l'objet d'une opération complexe que nous exposons dans le rapport, qui combine un crédit-bail et une opération de prêt certes coûteuse, mais dont il faut convenir que le coût reste bien inférieur à l'avantage consenti par la mise à disposition gratuite pendant un grand nombre d'années ;

- les perspectives d'évolution des loyers et des charges locatives, les consommations de fluides et les travaux ne sont guère favorables ;

- les contentieux relatifs aux désordres techniques -parois de marbre qui s'effondrent et corrosion des encadrements de fenêtres- sont lourds ;

- enfin, le problème posé par la gestion du toit de la Grande Arche n'était pas réglé au moment du rapport.

La Cour insiste d'autant plus sur la nécessité d'une étude technique soigneuse des perspectives dans ce domaine que le choix nous semble se rouvrir entre la construction d'une tour, qui serait un grand geste architectural à La Défense, et le réinvestissement de l'Arche alors que, l'an passé, devant la mission d'évaluation et de contrôle, M. Serradji expliquait qu'il était urgent de quitter l'Arche.

Voilà l'essentiel de nos observations. Nous y avons ajouté une annexe sur les logements de fonctions. Sans vouloir mettre ces observations au même niveau que les autres, c'est un exercice que la Cour s'impose dans chacun de ses travaux. Elle examine depuis des décennies le problème de la gestion les logements de fonctions. La Cour avait été particulièrement sévère dans son rapport 2001 sur le ministère de la culture et en avait saisi le Premier ministre qui, à l'époque, avait mis en place un groupe de travail animé par Mme Véronique Hespel, inspecteur général des finances, dont le rapport, hélas peu diffusé, a été à l'origine d'un certain nombre d'inflexions dans la gestion.

Dans cette perspective, nous n'envisagions pas de vous remettre un rapport sans évoquer au passage les problèmes de gestion des logements de fonctions. Le ministère de l'équipement n'est évidemment pas comparable au ministère de la culture, non plus qu'au ministère de l'intérieur et encore moins au ministère des affaires étrangères.

En effet, dans les administrations centrales, les problèmes sont fort limités, puisqu'ils ne concernent qu'une douzaine de logements de personnel rattaché au cabinet, de logements créés dans le plot n° 1 de La Défense et qui justifieraient des arrêtés de concession en forme.

Ils concernent aussi le cas d'un logement ministériel brièvement occupé par le seul ministre qui ait tenu un certain temps dans ces locaux, et dont la destination, aujourd'hui, mériterait d'être précisée.

La question est d'une autre ampleur dans les services déconcentrés, puisqu'elle concerne 4.200 logements d'après la réponse du ministère au groupe de travail présidé par Mme Hespel en 2003. Le ministère reconnaissait alors qu'il n'y a pas de politique immobilière pour les logements de fonctions gérés de manière très déconcentrée par les services départementaux, sans prescription ministérielle particulière.

Nos investigations sur le terrain font apparaître plusieurs constatations : non recours aux prises à bail, faiblesse de l'entretien, procédures d'attribution peu transparentes, respect inégal des dispositions fiscales.

Cette situation ne nous étonne guère. Elle rejoint celle que l'on constate dans le cadre de nombreuses enquêtes, et notamment dans celle que nous menons sur l'une des directions, qui échappe encore au rôle bénéfique dans ce domaine de la DGPA au sein du ministère de l'équipement.

Voilà, monsieur le Président, les principales constatations de la Cour en réponse à la question que vous lui avez posée. J'aurais aimé conclure en vous proposant comme d'habitude une liste de recommandations hiérarchisées, mais les circonstances, je l'ai dit, nous ont conduits à attendre que le ministère, dans le cadre des chantiers qu'il a ouvert, précise sa démarche. Je ne doute pas qu'il le fera aujourd'hui. Dès maintenant, la Cour à pris acte dans sa communication des engagements de l'équipement de se doter d'outils de connaissance et de suivi de son patrimoine exhaustifs et fiables, d'une structure de pilotage de la fonction immobilière cohérente en s'appuyant sur la réorganisation administrative de mai 2005. Dans ce domaine, seul un bilan de la réalité opérationnelle dans le cadre des suites données aux observations de la Cour nous permettra d'apprécier ultérieurement l'efficacité de ces mesures.

La Cour se pose, en conclusion, trois questions.

En premier lieu, comment le ministère situe-t-il sa politique immobilière dans la perspective majeure de la décentralisation ? Dès lors qu'il subordonne la remise en ordre aux transferts en cours aux collectivités locales, comment entend-il piloter cet aspect de la politique de décentralisation ?

Deuxièmement, quelle est la perspective d'ensemble du ministère en ce qui concerne, au delà des transferts, la politique de cessions dans les différentes catégories, qu'il s'agisse des bureaux, des aménagements liés aux infrastructures ou du non-bâti ?

Troisièmement, le ministère a-t-il une idée du coût global des mouvements envisagés en termes de réorganisation du réseau de ses services, avec les cessions et les transferts en direction des collectivités locales et la création de nouvelles directions interrégionales qui vont coûter cher en termes immobiliers et comment entend-il gérer les problèmes immobiliers que pose la fusion avec les DDAF ?

M. le président - Ce qui est rassurant, c'est que l'immobilier, par nature, ne risque pas de disparaître, mais c'est un vrai challenge pour le secrétaire général du ministère.

Le rapport n'est pas accablant, mais il n'y a pas de politique immobilière, ce qui est très encourageant pour le secrétaire général qui vient de prendre ses fonctions.

La parole est à M. Gandil.

M. Patrick Gandil - Nous prenons acte sans aucune contestation de l'analyse de la Cour et de ce que vient de présenter le président Sallois à l'instant. La situation n'est pas noire, mais elle est gris foncé. Il y a donc un vrai enjeu d'amélioration.

Le ministère se trouve effectivement dans une situation extrêmement difficile, qui ne se traduit pas dans le climat social, parce que nous n'avons pas de remous ou de difficultés majeures, même si nos personnels sont aujourd'hui inquiets et déstabilisés pour nombre d'entre eux.

La raison en est bien la conjonction de la décentralisation et de la réorganisation des services routiers, qui sont liées. Pour fixer les idées, nous sommes en train de repositionner les personnels des DDE. Cela représente 75.000 agents sur les 95.000 du ministère. Ils vont devoir se répartir entre 30.000 qui iront dans les conseils généraux, 30.000 qui resteront dans les nouvelles DDE, 9.000 qui iront dans les directions interdépartementales des routes et 6.000 qui sont dans les parcs et dont l'avenir doit être fixé dans un second temps. Nous devons en effet un rapport au Parlement. Nous allons essayer de produire rapidement. Nous avions trois ans après la loi de décentralisation pour le faire.

Aux enjeux de la réforme de l'administration départementale et régionale s'ajoute la réorganisation de l'administration centrale. La réorganisation de la centrale qui est globale doit aboutir à une meilleure visibilité et à une meilleure compacité. Il apparaît, dans ce contexte, que la mise en oeuvre de la LOLF est un enjeu majeur, certes positif, mais complexe dans les phases transitoires.

Ce sont là nos grands objectifs. Dans le domaine immobilier, on a fixé un certain nombre d'axes stratégiques depuis le rapport de la Cour. Une nouvelle organisation des fonctions immobilières a été mise en place. Un effort. de réorganisation de nos équipes a été fait et même si la réorganisation dans ce domaine n'est pas terminée, elle commence à se dessiner assez précisément.

Pour procéder à cette réorganisation, la réflexion a été menée selon les trois grandes fonctions de l'activité immobilière : la fonction de pilotage de la stratégie immobilière et de la politique patrimoniale, la fonction de gestion immobilière et la fonction de prestataire de services immobiliers. Ce sont vraiment trois échelons qu'il faut distinguer face à un patrimoine aussi important que le nôtre ; on ne peut avoir une vision totalement intégrée qui serait rapidement génératrice d'énormes inefficacités sur un patrimoine aussi important et territorialisé.

Une caractéristique de ce ministère réside dans le fait que la fonction immobilière a un double objet, l'objet propre de la fonction immobilière du ministère, mais aussi un objet très important vis-à-vis de l'immobilier acheté par le ministère pour des objectifs d'urbanisme ou d'infrastructures. Nous avons de nombreux terrains qui sont des réserves foncières faites dans ce but. L'immobilier de nos établissements publics, notamment ferroviaire, est également un enjeu lourd.

Or, on a une autre politique à mener dans le contexte de la politique générale du logement, en liaison étroite avec le ministère chargé du logement. Il s'agit de générer un certain nombre de terrains à bâtir pour pouvoir produire du logement social.

Ce sont en partie les mêmes terrains et on ne peut, dans la politique patrimoniale, distinguer complètement ces deux natures de terrains.

Tout cela nous a amenés à instituer une délégation à l'action foncière dirigée par M. Dominique Figeat. Elle assure la fonction de politique patrimoniale, avec le double objectif d'une part de générer du terrain à bâtir dans le domaine de la politique de logement ou de remettre en service des terrains parfois stérilisés par l'histoire et mal utilisés et, d'autre part, de nous apporter sa compétence et son expérience immobilière qui vient de la Caisse des Dépôts.

Cette structure rapporte à un comité de politique immobilière, que je préside, pour l'ensemble du ministère. Il a un rôle horizontal entre les directions et les patrimoines.

C'est ce qui nous apporte une politique immobilière et on commence à avoir des connaissances plus précises, des objectifs de coût unitaire par m 2 ou de nombre de m² par agent, qui permettent d'analyser facilement une opération par rapport à un certain nombre d'objectifs politiques.

La deuxième observation concerne la fonction de gestion.

Dans la structure actuelle du ministère, les différentes directions ne sont pas dans une situation équivalente par rapport à la LOLF. Trois directions ont un rôle important à jouer dans le domaine patrimonial : la direction générale du personnel et de l'administration, la direction générale des routes et la direction générale de l'aviation civile.

Aujourd'hui, ces trois directions gèrent une partie importante du patrimoine. La DGPA doit gérer 48 % du patrimoine, la DGAC environ 13 % et la direction générale des routes environ 30 %. Ce qui reste ne représente que 5 %.

Je crois qu'il est logique que chacune de ces trois directions soit gestionnaire de patrimoine. Au fond, la DGPA gère le patrimoine de bureau de l'ensemble du ministère tel qu'on le connaît. La direction des routes, au contraire, gère le patrimoine technique -centres d'exploitation et d'intervention, extrêmement liés à l'exploitation de la route. Ces accessoires de la route sont d'ailleurs construits en même temps que la route.

La direction générale des routes est la mieux placée pour gérer ces centres et avoir une politique en la matière, à l'exclusion des locaux administratifs. Par exemple, les sièges des futures directions interdépartementales des routes sont l'apanage de la DGPA. Les locaux techniques routiers -garages, centres de rassemblement, locaux permettant la circulation de l'information routière et d'exploitation de la route- nous paraissent relever du champ routier.

Enfin, la DGAC bénéficie d'un budget annexe, a un patrimoine propre très lié à ces enjeux et, pour une très grosse partie, un patrimoine extrêmement technique. Il s'agit de tout le patrimoine de la navigation aérienne. Pour les mêmes raisons que dans le domaine routier, il nous semble souhaitable que cette direction conserve son rôle de gestionnaire immobilier.

En revanche, trois situations devront se simplifier dans un futur proche : il s'agit du domaine des affaires maritimes, même s'il faut regarder le cas des centres de sécurité des navires, ou celui des CROSS, qui sont des objets techniques spéciaux ; malgré tout, un problème de masse critique se pose.

La direction de la sécurité et de la circulation routière gère essentiellement les centres d'examen du permis de conduire ; il n'est pas certain que ce soit fondé à long terme. La direction du tourisme gère aussi un certain nombre de locaux, mais cela représente une proportion très faible du patrimoine du ministère.

On peut conserver, pour ces trois situations, une imputation budgétaire sur le programme concerné, mais il serait probablement souhaitable que les moyens immobiliers correspondants passent sous l'égide de la DGPA.

Enfin, la troisième fonction, ce sont les prestations de services immobiliers. Le plus logique est qu'elles soient suivies à l'échelle sinon du bâtiment, du moins d'un ensemble de bâtiments, sous l'autorité d'un même service.

Il existe un gros ensemble, celui de l'administration centrale, qui est sous l'autorité de la DGPA. Pour le reste, ce sont les DDE, sous l'égide des DRE. On a confié une fonction de pilotage régional aux DRE, les mieux placées pour gérer un patrimoine qu'il faut appréhender de façon déconcentrée.

C'est là aussi que l'on peut le mieux, en fonction des contextes locaux, examiner les possibilités d'externalisation d'un certain nombre d'activités. En administration centrale, 75 % des prestations de services sont actuellement externalisés. C'est un mouvement qui va plutôt croissant.

J'en viens maintenant à la partie décentralisation et création des directions interdépartementales des routes.

En matière de décentralisation, je n'ai pas aujourd'hui de remontées de fortes difficultés sur la question des locaux qui se règle essentiellement par des discussions locales dans chaque département, sous l'égide des préfets. L'essentiel des constatations ou des résultats de discussion se traduisent par des systèmes conventionnels, avec des formules d'appel et de discussion et généralement, la discussion locale permet d'arriver à un accord.

Il faut noter en revanche une particularité importante car de nombreux locaux que nous utilisons ne sont pas des locaux en pleine propriété de l'Etat, mais appartiennent le plus souvent aux départements. Dans certains cas, les locaux appartiennent aux communes et sont, occupés sous le régime de la quasi-propriété, définie par les premières lois de décentralisation. Ce système fonctionne bien tant que l'on ne touche à rien mais, dès que l'on opère des changements, on se trouve en situation de libérer des locaux qu'on ne peut évidemment pas vendre puisqu'ils ne nous appartiennent pas. Cela ne représente pas une ressource financière pour d'éventuelles nouvelles opérations ; en revanche, si l'on a besoin de procéder à des réinstallations, il faut bien trouver les ressources correspondantes.

La situation n'est donc pas simple, le paradoxe étant que l'on a un resserrement de structures significatif mais aussi, de fait, des coûts immobiliers.

Les directions interdépartementales des routes sont un cas particulier. On procède en effet à un changement d'organisation majeur. L'exploitation des grands axes, aujourd'hui organisée département par département, sera structurée demain autour de onze directions.

Nous aurons donc au total 70 implantations pour l'ensemble de la fonction d'ingénierie des 11 directions interdépartementales des routes et des services d'ingénierie routière, qui ne sont pas forcément au siège de la direction départementale des routes. Cela tient compte des perspectives de chantiers importants et des implantations actuelles des services d'ingénierie.

Pour ces 70 sites, nous devons réaliser 15 opérations nouvelles, les 55 autres étant du réemploi.

Par ailleurs, il existe 2.500 centres d'exploitation en France, dont la majorité est uniquement chargée des routes départementales, qui constituent le plus gros du réseau de voirie. 100 concernent les routes nationales et 400 sont mixtes, les autres étant départementaux.

Demain, pour la gestion du réseau national, nous aurons besoin de 250 centres dont chacun gèrera une cinquantaine de kilomètres, plus pour les sections en rase campagne, moins pour les sections périurbaines et encore moins pour les sections urbaines, du fait de la complexité du trafic.

Ces 250 centres seront d'abord les 100 centres spécialisés sur le réseau routier national et 75 centres parmi les 400 centres mixtes qu'il sera possible, dans la réorganisation, d'affecter à l'Etat. Les 75 autres seront des centres nouveaux.

D'une certaine façon, on peut dire que le coût de la réorganisation de l'ensemble de l'organisation routière, qui est un enjeu majeur, représente 75 nouveaux centres d'exploitation et 15 nouveaux bâtiments administratifs-techniques. Il s'agit des bâtiments d'ingénierie ou les sièges des directions inter régionales ce qui, en proportion, représente un pourcentage extrêmement faible, mais un coût significatif qu'il faudra néanmoins payer.

Si l'on cherche à faire un bilan de l'ensemble de ces éléments, avec les incertitudes qu'a indiquées le président Sallois, les estimations sont de l'ordre de 200 millions d'euros de dépenses nouvelles et 100 millions de recettes. En fait, il nous manquerait 100 millions pour arriver à terminer l'ensemble de cette opération.

La question des logements de fonction est en grande partie liée à cette opération ; aujourd'hui, la majeure partie de nos logements de fonction est constituée par les 2.500 maisons éclusières. La décentralisation est quelque peu compliquée dans ce domaine ; elle est en partie à option et il restera des besoins importants sur le réseau principal qui concerne l'Etat. C'est une gestion qui relève assez largement de VNF. J'avoue ne pas l'avoir étudiée en détail.

1.700 logements sont gérés par les DDE et correspondent à des personnels de gardiennage ou à des personnels fréquemment en astreinte autour des parcs et d'un certain nombre d'implantations territoriales ; plus marginalement, il peut s'agir de quelques cadres subdivisionnaires ou de contrôleurs chefs de centres d'exploitation -mais ce n'est pas la majorité. En général, il s'agit d'agents d'exploitation liés à la route.

La majorité de ces locaux va se trouver remis aux conseils généraux, dont c'était très souvent la propriété, les agents correspondants étant souvent liés à la gestion des routes départementales et soumis aux contraintes du service hivernal.

Les paramètres seront différents lorsque la décentralisation sera achevée.

S'agissant de la décentralisation, on a aujourd'hui une connaissance faible du patrimoine que nous occupons, dont nous ne sommes propriétaires qu'à hauteur de 40 % environ.

Je peux prendre l'engagement, d'ici la fin de l'année prochaine, une fois que l'on aura fini ces opérations et que l'on y verra clair, de remettre réellement à plat ce patrimoine. L'objectif est pour nous d'en avoir connaissance, mais aussi de rendre compte à votre assemblée de la situation dans laquelle nous nous trouvons en matière de quasi-propriété.

La première étape de la décentralisation, à l'équipement, était une étape transitoire. La formule dans laquelle tous les personnels de l'exploitation de la route se trouvaient sous statut d'Etat, mis à disposition du conseil général dans des conditions conventionnelles variées, a permis de franchir cette première étape sans difficultés majeures et sans drame social, mais elle a montré ses limites.

Aujourd'hui, on arrive à une répartition très logique de l'organisation du réseau routier. Le réseau routier de proximité est à la charge des communes, le réseau routier de desserte locale, départementale et régionale est à la charge des départements, le réseau routier de grand transit est à la charge de l'Etat. C'est logique et ceci a toutes les chances d'être durable, les personnels, les enjeux, les activités, les objectifs et le pilotage politique se trouvant à chaque fois rassemblés au même niveau de collectivité.

On peut imaginer qu'il serait bon de sortir du régime transitoire de quasi-propriété et de repartir sur des bases nouvelles.

Je pense être allé au bout et au-delà de ce que mes fonctions me permettaient de suggérer, mais l'on vous doit un rapport sur ce sujet et je pense qu'un an après la fin des opérations de décentralisation, on sera en mesure de le produire. On peut difficilement le promettre avant, car c'est une opération extrêmement vaste.

S'agissant de l'administration centrale enfin, notre objectif peut se décrire de façon assez claire : le choix de La Défense est maintenant, de notre point de vue, irréversible. L'essentiel des réorganisations de l'administration centrale se sont faites en fonction de ce choix, qui remonte à 1990 ou 1991. De nombreux personnels ont été amenés à déménager pour se réimplanter dans ces nouveaux locaux. On est actuellement dans une situation où, pour toute la maison, le ministère, c'est La Défense.

Cela dit, un certain nombre de locaux ne correspondent pas à cette idée. Tout d'abord, une autre partie du ministère, la DGAC, a une implantation à côté d'Issy-les-Moulineaux, qui a été réalisée dans de très bonnes conditions financières et qui a permis de quitter le centre de Paris. On est progressivement en train de vendre tous les locaux que l'on peut libérer sur Paris.

Un immeuble pose un problème particulier, celui de la place de Fontenoy. Ce n'est pas un immeuble domanial de l'Etat, mais de l'Etablissement national des invalides de la marine, l'ENIM, établissement public administratif. Cet immeuble est occupé en partie par les services centraux, en partie par deux directions chargées d'affaires maritimes, la direction des affaires maritimes du ministère des transports et la direction des pêches du ministère de l'agriculture, ainsi que par le cabinet et l'appartement de fonction du ministre délégué au tourisme.

Nous avons rassemblé toutes les autres directions du champ des transports à La Défense. Il est certain qu'à la première occasion, il serait souhaitable que la direction des affaires maritimes puisse aller à La Défense, au sein de la direction générale des transports. Ceci présente un inconvénient, la coupure par rapport à la direction des pêches mais, si l'on veut que les liens soient pertinents, il faut rassembler tout le monde dans une cité administrative autour de Paris. Il y a donc bien, à un moment, des césures à réaliser. Je pense que celle-ci est acceptable.

Se pose le problème de l'ENIM. On ne peut pas le replacer à La Défense, mais la question de déplacer l'établissement public se pose à coup sûr. Se pose également la question, pour le ministère de l'agriculture, de reloger sa direction et se pose aussi la question essentielle que nous retrouvions un hôtel ministériel pour le ministre délégué au tourisme.

Il est probablement possible de réaliser une opération immobilière sur l'ENIM, mais je dois citer une difficulté que je qualifierais presque d'affective, non pas tant vis-à-vis de nos personnels que de toute la profession maritime. Ce bâtiment est le bâtiment historique du ministère et du secrétariat d'Etat à la marine marchande ; il a été conçu pour cela. C'est un bâtiment classé, qui a des fresques particulières à la gloire de notre marine marchande. C'est une réalité qu'il ne faut pas que l'on sous-estime. Il y a une valeur patrimoniale et sentimentale qui se retrouve auprès de la totalité du corps social concerné. Cela ne veut pas dire que cela rend les choses impossibles.

La seconde question est celle des implantations du boulevard Saint-Germain. On a aujourd'hui deux hôtels ministériels avec, à Roquelaure, dans la même cour, une direction du ministère des affaires étrangères. On sent bien que ce bâtiment pourrait parfaitement constituer le troisième hôtel ministériel.

Pourquoi trois ? Notre périmètre est assez mouvant. On n'a aujourd'hui qu'un ministre et un ministre délégué, mais la situation la plus fréquente est d'avoir trois ministres -ministre, ministre délégué et secrétaire d'Etat. La situation à quatre n'est pas rare.

C'est pourquoi il nous paraît raisonnable d'avoir trois implantations ministérielles dans l'ensemble géré par le ministère de l'équipement. Mais si une solution peut se dessiner, le processus de décision appartient au Gouvernement.

L'implantation parisienne de Saint-Germain, de La Défense et de la DGAC, la maison du tourisme créée récemment vont constituer notre situation d'équilibre pour les services centraux. Cela nous conduira certainement -et on est en train d'y travailler- à ce que la météorologie quitte le Quai Branly.

Celle-ci est engagée dans une énorme opération de délocalisation à Toulouse, qui a marché de façon assez exemplaire. La prochaine étape, pour la direction des systèmes d'observation, sera le départ de Trappes. Il faut le faire progressivement car, même si les personnels y sont allés volontiers, il y a toujours des gens dont le conjoint peine à déménager. Cette opération doit donc se faire avec une certaine progressivité. Tout n'est pas immédiatement possible, mais notre objectif est que Météo France quitte le Quai Branly, probablement en installant une partie de la direction générale à La Défense.

De même, le siège de l'IGN, qui se trouve situé rue de Grenelle, doit pouvoir être vendu, l'IGN étant repositionné dans son implantation principale qui se trouve sur Saint-Mandé. Un certain nombre d'opérations sont donc possibles.

La grosse question est celle de La Défense. A La Défense, on a actuellement deux implantations essentielles : la moitié de l'Arche de La Défense -on a une paroi verticale et le toit- et deux tours à côté, l'une complètement louée, l'autre aux deux-tiers. Ce sont les deux ensembles de Pascal A et Pascal B. On a par ailleurs une petite implantation plus marginale.

L'Arche de La Défense connaît aujourd'hui quelques difficultés techniques avec des locaux qui n'ont pas bien vieilli et sur lesquels il y a des entretiens lourds à réaliser.

La tour Pascal est en meilleur état, mais devra faire l'objet, probablement dans moins de vingt ans, d'opérations d'entretien très lourdes. Ces tours sont de conception relativement ancienne et on ne sait pas procéder à l'entretien lorsque la tour est occupée. Il faut vider un grand nombre de plateaux pour faire des opérations d'entretien lourd.

En tout état de cause, on a donc un problème de déménagement au moins transitoire, même si l'on voulait s'y réinstaller. C'est ce qui nous a amenés à nous poser cette question, avec un élément complémentaire qui n'est pas négligeable, à savoir la situation immobilière sur La Défense.

A La Défense, nous avons une grosse opération routière en cours, celle du boulevard circulaire. Aujourd'hui, le boulevard est à moitié remis au niveau du sol et à moitié composé d'échangeurs dénivelés. Cela prend une surface au sol assez importante.

L'objectif est de remettre le boulevard circulaire au sol, tant pour des raisons urbanistiques que pour des raisons de technique d'exploitation, car on a aujourd'hui un énorme bouchon à la sortie du boulevard circulaire, qui met très longtemps à se résorber. Plutôt qu'un énorme bouchon, il vaut mieux en avoir de petits à chaque carrefour ; la situation est bien meilleure.

Cela nous a conduits à engager cette opération qui est très coûteuse et qui devrait dégager plusieurs emplacements de terrain à bâtir à La Défense. Ce terrain est un terrain qui appartient à l'Etat et il est donc possible de réaliser une opération de construction.

Nous avons deux possibilités. La première consiste à construire un nouveau ministère rationnel permettant de rassembler l'ensemble des directions ; c'est également a priori la formule la plus économique à long terme, le terrain étant déjà la propriété de l'Etat.

L'autre possibilité est de faire une opération de réaménagement de l'Arche de La Défense en obtenant la jouissance de la totalité de l'immeuble, en faisant d'abord la rénovation de la partie que nous n'occupons pas aujourd'hui, qui pourrait être assez facilement libérée, puis en déménageant dans cette partie et en faisant l'autre pied, avant de tout déménager dans l'Arche.

Les deux sont possibles. Il est probable qu'à court terme, la formule de réimplantation complète dans l'Arche est sans doute la moins chère ; à long terme, la formule d'un bâtiment neuf, dont la maintenance est plus aisée, est probablement la plus intéressante. Tout ceci est lié à l'opération immobilière du boulevard circulaire que j'ai exposée. On est dans un contexte complexe, sur lequel on essaye d'avancer. C'est une décision qui remonterait au plus haut niveau gouvernemental.

M. le président - Merci. Il n'y a pas de contestations sur l'état des lieux, ni sur les observations faites par la Cour. On est donc en totale convergence. Il n'y a pas de politique immobilière. Il n'y avait pas vraiment de pilotage. C'est le degré zéro de la gestion immobilière, mais on sait que les immeubles ne s'envolent pas et vous avez pris des engagements.

Sans doute y aura-t-il matière à vous entendre à nouveau.

Le délégué à l'action foncière a-t-il des observations à formuler ?

M. Dominique Figeat - Patrick Gandil a déjà indiqué que, depuis 18 mois, nous avons mis en place des dispositions nouvelles qui, pour certaines, anticipent sur les conclusions de la Cour. Depuis l'été 2004, nous sommes en effet chargés d'inventorier l'ensemble du foncier disponible propriété de l'Etat affecté au ministère de l'équipement et susceptible d'être rendu disponible.

Ce travail a été effectué de manière systématique sur l'Ile-de-France en 2004 et 2005 et a donné lieu à la mise en oeuvre de politiques volontaristes de cessions.

Nous avons élargi ce travail fin 2005 à la demande du Premier ministre qui a engagé, à partir de l'expérience du ministère de l'équipement, un programme national et interministériel de mobilisation des terrains publics qui peuvent être rendus disponibles et remis sur le marché pour la construction de logements.

Nous venons d'achever ce travail, qui a fait l'objet de décisions du Premier ministre sur une programmation précise individualisée d'opérations de cession. Pour le seul ministère de l'équipement et en incluant les terrains relevant des opérations publiques, l'ensemble de ces opérations de cessions programmées dans les trois ans qui viennent portent sur plus de 7 millions de m2 non bâtis, essentiellement en Ile-de-France et dans les grandes agglomérations urbaines.

Il existe une très grande diversité de situations. Lorsqu'il s'agit de propriétés de l'équipement, on relève deux grandes catégories. La première regroupe des délaissés d'emprises publiques prévues en général pour des infrastructures routières qui ne se réalisent pas.

La seconde catégorie concerne les terrains qui sont restés des réserves foncières, que l'Etat avait chargé le ministère de l'équipement d'acquérir dans les années 60-70, avant la décentralisation. En Ile-de-France, ils sont gérés par l'agence foncière de la région parisienne. Depuis 2004, nous avons une politique délibérée de libération de ces terrains chaque fois que les règlements d'urbanisme le permettent.

Il y a des terrains qui appartiennent aux établissements publics, notamment des établissements ferroviaires, pour lesquels la politique volontaire de rationalisation -qui est loin d'être achevée- doit conduire à mieux définir ce qui est strictement nécessaire à l'usage du service public, ferroviaire ou autres, comme les ports, et à remettre sur le marché les terrains qui ne sont pas utiles à l'exercice du service public.

Ce travail de rationalisation du patrimoine immobilier public doit se poursuivre sur les trois ans qui viennent.

M. le président - Quelles sont les moyens mis à votre disposition ?

M. Dominique Figeat - La délégation que je dirige est une petite équipe centrale constituée en service à compétence nationale ; elle est composée de cadres de haut niveau. Nous avons une fonction de pilotage, définissant une programmation, intervenant en direct sur les grands projets et mobilisant les moyens des services de l'équipement, tant départementaux que régionaux. Le Premier ministre, dans ses dernières instructions, a d'ailleurs demandé aux DDE de se mobiliser.

La délégation comprend une dizaine de cadres de haut niveau qui se consacrent exclusivement à cette tâche. Nous avons également une fonction de définition de la politique générale du ministère en matière immobilière et de la stratégie du ministère. Nous nous appuyons pour cela sur les outils de connaissance, dont on a rappelé l'insuffisance, notamment sur la période analysée par la Cour.

Depuis un an, nous avons fait un important travail d'investissement sur la connaissance et les outils de connaissance du patrimoine immobilier. Cette tâche est pratiquement achevée pour ce qui concerne l'administration centrale.

Nous venons de produire un document détaillé comportant des systèmes d'évaluation et des ratios qui permettent d'avoir une connaissance aussi complète que possible de la situation du patrimoine immobilier en centrale. Nous allons maintenant entreprendre le même travail, qui est beaucoup plus compliqué, pour l'ensemble des services déconcentrés, et ce dans les meilleurs délais.

En second lieu, nous venons d'achever dans les délais imposés le schéma prévisionnel de stratégie immobilière du ministre pour les services centraux qui sera soumis à une prochaine réunion du comité de politique immobilière du ministère.

Ce document correspond aux orientations que Patrick Gandil vient d'indiquer pour l'administration centrale. Nous allons entreprendre l'élaboration d'un même document pour les services déconcentrés.

Les fonctions de la délégation portent donc sur la mobilisation du foncier dans le cadre d'une politique de rationalisation du patrimoine foncier non-bâti et, d'autre part, sur l'élaboration et le suivi de la stratégie immobilière.

Enfin, dans ce cadre, on a également une fonction d'élaboration de règles, de normes et de méthodes, de professionnalisation, à travers un certain nombre d'actions, de mise au point d'outils et de formations, de telle manière que, progressivement, se constituent au sein du ministère des pôles interégionaux qui aient la capacité de relayer notre action de pilotage central du point de vue professionnel, avec des méthodes adéquates.

M. le président - La parole est au rapporteur spécial.

M. Jean-Pierre Masseret, rapporteur spécial - La quasi totalité des questions a déjà été posée mais je voudrais d'abord dire ma satisfaction quant à la qualité de l'échange que nous avons eu.

J'ai commencé ici il y a 23 ans en rapportant devant la commission des finances sur le rapport de la Cour des comptes. Cela fait longtemps. J'avais toujours considéré que la critique est relativement facile et que la Cour est plutôt dans un rôle assez tranquille vis-à-vis des administrations contrôlées. J'ai trouvé cette fois que vos diagnostics, vos analyses, sont extrêmement posés, pertinents. Vous avez mesuré la difficulté rencontrée par les services. Je veux dire ma satisfaction par rapport à la qualité de ce travail.

On a bien vu dans les réponses de M. Gandil cette volonté d'améliorer le pilotage. Il est certainement plus émietté que vous ne l'auriez peut-être souhaité. On l'a bien senti dans la disparité des situations. Cela correspond à la réalité du terrain.

Sur la politique de gestion, on voit bien que, dès lors qu'un Gouvernement fixe des objectifs, ceux-ci se mettent progressivement en place. Il faut fixer les objectifs, développer la détermination et avoir la patience nécessaire.

On a eu la réponse aux questions que l'on se posait à propos du gap financier entre les nouvelles installations qui devront être financées par la réorganisation liée à la décentralisation, et les cessions auxquelles on pouvait procéder. Je crois que vous avez fixé à 100 millions d'euros la différence entre ce que cela allait coûter et ce que vous aviez déjà fait.

Quant à la dernière question que vous aviez posée sur la situation des services centraux, on voit bien que la difficulté est liée à l'aménagement du boulevard circulaire de La Défense, à une multitude de décisions diverses et même à des aspects psychologiques, voire affectifs.

Je suis satisfait, Monsieur le Président, car on a un diagnostic sérieux et, face à nous, un service qui est conscient de la nécessité d'apporter des réponses.

Dans les 18 mois qui viennent, notre rôle sera de suivre l'exécution des engagements, de nous assurer auprès du ministère de l'équipement que tout cela se met en place et des conditions dans lesquelles cela se met en place.

Une seule question : quelle est votre liberté, votre marge de manoeuvre par rapport à Bercy dans toutes ces opérations ?

M. Philippe Marini, rapporteur général - J'espère qu'elle est nulle !

M. Patrick Gandil - Je ne dirais pas qu'elle est nulle. Je pense qu'elle est au fond ce qu'elle doit être. Bercy fixe des objectif assez sévères ; on a des discutions financières dans la préparation du budget qui sont difficiles mais, une fois les éléments fixés, on a ensuite une large liberté de gestion. Je ne vois pas comment il peut en être autrement avec un patrimoine aussi éclaté. Il faut en effet qu'il soit géré à proximité.

Par ailleurs, Bercy a mis en place deux outils importants. L'un d'eux est le CAS, qui devrait bien fonctionner. L'autre, ce sont les PPP. Nous sommes dans une situation où il y a deux grands types d'opérations. Le premier, ce sont les financements à partir des produits de cessions, avec de l'argent que l'on recycle immédiatement dans une opération. On n'a pas besoin d'outils très sophistiqués pour cela.

On a aussi des cas plus compliqués comme par exemple le regroupement à venir de tous les services qui contribuent à l'enseignement et à la recherche à l'école des ponts à Marne-la-Vallée, alors que beaucoup sont actuellement en première couronne ou dans Paris. Il s'agit du laboratoire central des ponts, d'une partie de l'institut de recherche des transports, du service technique des routes et autoroutes.

Une partie des ventes va générer un peu d'argent, mais ce sont forcément des opérations complexes dans lesquelles on a tout intérêt à avoir des opérations étalées dans le temps et à faire des montages immobiliers qui peuvent passer par des opérations de PPP.

Autre exemple pour lequel on réfléchit à un PPP : les 75 centres d'exploitation nouveaux du réseau routier national. L'enjeu financier est important mais il y a en même temps un certain enjeu de standardisation de ces bâtiments. Il ne faut pas arriver à une standardisation totale, parce qu'il est dommage de se priver des possibilités d'intervention des architectes ; toutefois, ce sont des locaux techniques qui ont un but bien particulier et sur lesquels on peut faire des économies importantes en profitant d'une réflexion sur un volume plus important pour aboutir à une standardisation. Le PPP est parfaitement adapté à une situation de ce type.

Bercy a créé les outils qu'il fallait ; la relation est parfois un peu tendue, mais c'est normal dans ce genre de situation.

M. le président - La parole est au rapporteur général.

M. Philippe Marini, rapporteur général - Je m'associe aux propos du rapporteur spécial et je persiste à penser que ces échanges croisés sont fructueux, plus spécialement sur un sujet comme celui-ci. Nous sommes bien à la rencontre de la réforme de l'Etat, des réformes structurelles d'organisation et des conséquences en termes de moyens quant à la valorisation la meilleure possible des actifs immobiliers de l'Etat.

La question que je voudrais poser à ce titre -sauf si le sujet a déjà été abordé dans les exposés- c'est celle des conséquences, en termes d'implantation de l'administration centrale, des réformes de structures déjà faites : réduction du nombre de direction d'administration centrale, recherche d'une réimplantation sur un site central à La Défense...

M. Jean-Pierre Masseret, rapporteur spécial - Cela a déjà été évoqué.

M. Philippe Marini, rapporteur général - S'agissant des services déconcentrés et en particulier des conséquences des transferts aux collectivités territoriales, vous évoquiez les centres d'exploitation ; sans doute y a-t-il lieu aussi de regarder ce qu'il en est des unités des directions, des directions départementales de l'équipement et des synergies possibles avec d'autres services de l'Etat.

Il y a des expériences de rapprochement physique entre DDE et DDA. Pourrez-vous nous en dire quelques mots en termes de gestion plus optimale du patrimoine immobilier de l'Etat ?

M. Patrick Gandil - Pour l'instant, pour ce qui est des DDE et des DDA, on est sur une expérimentation dans huit départements qui ont été choisis à partir du volontariat des préfets et des services. Il fallait en effet que l'on se trouve dans des conditions qui donnaient toutes les chances de succès, mais qui ont été aussi choisies pour la diversité des types de situation avec des départements ruraux comme l'Ariège ou le Lot, très urbains comme le Val d'Oise, les Yvelines ou le territoire de Belfort, ou des situations intermédiaires plus proches de la moyenne des départements comme le Cher, le Loir-et-Cher ou l'Aube.

Dans tous les cas, dès la première réflexion sur les objectifs du rapprochement et les conséquences en termes d'organigramme, à savoir les économies en moyens généraux, les efforts sur les politiques que l'on cherche à développer dans ce cadre, notamment les politiques de prévention des risques naturels, la question des locaux s'est posée. Pour faire un service unique, il y a un certain nombre de symboles ; une gestion du personnel et des moyens unifiée est un symbole ; les locaux en sont un autre.

Heureusement, un certain nombre de précautions avaient été prises et on avait souvent des projets immobiliers. J'étais hier à Blois. Le Préfet et deux directeurs nous ont fait visiter les différentes implantations actuelles. On a probablement une assez belle opération couplée avec un certain nombre d'objectifs propres au conseil général. On sentait que l'opération avait été parfaitement prévue. Il en a été de même à Bourges ; il en est de même, dans un contexte plus compliqué, à Cergy-Pontoise ou à Versailles.

Dans quatre opérations sur huit, la situation est déjà très analysée en matière immobilière.

Dans les autres cas, c'est parce qu'on est dans des locaux tellement proches que le fait d'être sur plusieurs bâtiments n'est pas gênant en soi, mais il y aura toujours des réorganisations, avec des déménagements au sein des bâtiments existants, de sorte que l'on puisse rassembler les services. Ce serait un échec si l'on restait avec un bâtiment agriculture, un bâtiment équipement -et cela n'aura pas lieu.

M. Eric Doligé - Cette audition était fort intéressante et je remercie le président Sallois de lui avoir donné une certaine hauteur. Dans nos collectivités locales, nous avons en effet une vision par le bas de la situation, surtout dans le cas de la décentralisation.

J'avais le sentiment, avant d'entendre ce qui a été dit, que j'étais le seul à avoir des problèmes à comprendre la gestion immobilière de l'Etat en matière d'équipement.

Localement -on ne parle que de l'immobilier, mais on pourrait parler du matériel ou des infrastructures- on est un peu dans la même situation.

Malheureusement, nous n'avons pas le pouvoir d'investigation de la Cour et on a en face de nous une certaine opacité, ainsi que des difficultés à avoir des informations. Il est extrêmement compliqué de connaître le patrimoine immobilier départemental de l'Etat. On aurait posé la question il y a trois ans, on nous aurait dit : « Tout va bien » ; aujourd'hui, on a énormément de mal à connaître la nature de ce patrimoine.

Il est vrai qu'une partie est propriété du département, qui occupe des locaux de l'Etat, l'Etat occupant des locaux du département ; certains sont en bon état, d'autres en mauvais état, mais vous imaginez la difficulté de répartition au plan local !

Vous disiez ne pas avoir écho de difficultés. Effectivement, il y a des moments où on baisse les bras !

On a le sentiment que la direction locale n'a pas envie de perdre un pouce de terrain. L'Etat cède donc ce qui est en mauvais état et garde ce qui est en bon état, ainsi que la partie centrale dans la ville siège, bien qu'un certain nombre de fonctionnaires s'en aillent.

C'est une question qui mériterait d'être étudiée, car c'est probablement le cas dans 102 départements.

Deux points sur les infrastructures. On a parlé à propos du foncier des accessoires de la route que vous gérez. L'Etat s'est mis en tête de vendre le maximum de ses terrains. C'est de la bonne gestion. Au moment de la décentralisation, comme par hasard, l'Etat se met à vendre des terrains qui, pour un certain nombre, devraient probablement être transmis aux collectivités. Or, nous n'avons pas eu -ou avec grande difficulté- la liste des accessoires des routes et au moment du transfert, on n'élargit, on ne fait plus, on ne met plus aux normes ! On voit des terrains vendus à telle ou telle autre collectivité, alors qu'ils devraient revenir au département.

Une circulaire a été envoyée par le ministère aux préfets en leur disant que si des projets avaient été préparés, ils devaient être transférés mais que s'il n'en existait pas, il fallait vendre les terrains.

Quand une route nationale va être, à terme, élargie, même s'il n'y a pas de plans, il s'agit d'une réalité.

Actuellement, vous revendez des terrains, ce qui signifie qu'on va être en difficulté lorsque que vous nous imposerez d'élargir. Je suis donc très inquiet de cette précipitation et du fait que l'on ne prévienne pas les départements.

Le département voisin du mien, lorsqu'il a demandé la nomenclature des terrains que possédait l'Etat, a reçu une liste de références -Z 334, B 22, etc. Bien évidemment, il a dû faire des recherches pour découvrir quels étaient les terrains que l'Etat possédait et qu'il devait ou non céder. Il y a là une vraie difficulté.

Enfin, dans mon département, le canal d'Orléans, dans un état lamentable, a été mis à disposition du département pour 60 ou 70 ans. Plus rien ne fonctionne. 40 écluses, 40 maisons éclusières. On a dépensé 100 millions d'euros pour le remettre en état et nous avons inscrit 80 millions d'euros de travaux pour les années à venir.

Malheureusement, il relève du domaine privé de l'Etat et n'entre donc pas dans le cadre de la loi de décentralisation qui permet la cession automatique à un euro symbolique. L'Etat est donc en train de valoriser le canal et veut nous le vendre au prix de la valorisation, alors que c'est nous qui avons fait les travaux !

M. le président - Est-ce dans les 7 millions de m 2 ?

M. Eric Doligé - Ce sont des mètres carrés en volume. C'est compliqué.

Nous demandons au moins une transparence totale. Les personnels sont déstabilisés...

M. le président - Les négociations dépendent-elles de vous ?

M. Dominique Figeat - Non, ce sont les services des domaines qui vendent. Nous définissons les opérations de vente, nous les négocions avec les collectivités locales, puis nous remettons le bien aux domaines, qui se chargent de la fixation des prix.

M. Eric Doligé - Voyez comme c'est simple pour nous !

Il y a des jours où je rêve d'être à la place de la Cour des comptes et d'avoir l'autorisation de recevoir les informations minimum qui nous sont dues. Nous sommes quand même les futurs propriétaires et gestionnaires !

Je pense qu'on n'a pas fait le calcul de tous les coûts induits qui vont s'additionner entre les collectivités et l'Etat pour réaliser cette scission qui, théoriquement, devrait plutôt amener des économies que des dépenses.

Je serais curieux, dans un an ou deux, de connaître les dépenses supplémentaires induites par ces discussions. J'aimerais pouvoir refaire un tour de piste d'ici deux ans. Il serait d'ailleurs intéressant, comme l'a dit le rapporteur spécial, de faire le contrôle du contrôle.

M. le président - Toute réforme est un investissement.

M. Eric Doligé - Dans ce cas, ce sera une bonne réforme !

Cela étant, si je suis critique, mon appréciation est très positive quand même.

M. le président - Vous sentez-vous vraiment impliqué dans ce qui relève du ministère ou du secrétariat au tourisme ? Le ressentez-vous comme une partie intégrante et durable du ministère de l'équipement ?

M. Patrick Gandil - Je le sens clairement comme une partie intégrante du ministère de l'équipement ; durable, cela dépend de chaque remaniement ministériel. Il y a quand même des raisons fortes à cette proximité. Le tourisme est en effet extrêmement lié aux transports.

Dans les liens opérationnels et techniques, toutes les discussions sur les droits du passager aérien relèvent à la fois du tourisme et de l'aérien. Dans toutes les discussions sur la sécurité aérienne, il est intéressant de voir qu'en termes de droit, on était complètement tenus par les traités et par les règles de l'OACI. On n'a pu progresser de façon autonome dans le sujet que par la voie du tourisme et des règles de protection du consommateur. Ce lien est donc relativement fort.

A côté de cela, à l'intérieur du territoire national, dans un certain nombre d'opérations, on a actuellement un enjeu très important qui est celui des anneaux de port, où il existe un large déficit. La direction du tourisme est bien placée pour se rendre compte de l'importance que cela représente et, au niveau territorial, une DDE n'est pas si mal placée non plus pour entrer en discussion avec les acteurs locaux et faire avancer les choses.

La direction du tourisme est bien positionnée dans le ministère pour ses fonctions internationales et pour ses liens avec les grandes directions de transport. On essaye donc aujourd'hui de l'accrocher beaucoup plus sur la structure territoriale du ministère, notamment pour des opérations comme celles que je viens de signaler, mais aussi pour tout l'urbanisme touristique, qui est également important -problèmes d'unités touristiques en montagne, etc.

M. le président - Je suis impressionné par le nombre de bâtiments de la DGAC.

M. Patrick Gandil - La DGAC a un parc de logements de fonctions assez important, de grands locaux techniques -tours de contrôle, etc.- mais aussi de multiples locaux plus ou moins petits, qui vont jusqu'aux simples abris de protection d'équipements radioélectriques. La DGAC est caractérisée par un assez grand nombre de personnels sous astreinte, tout devant fonctionner 24 heures sur 24.

Il existe par exemple des ingénieurs électroniciens d'astreinte que l'on n'a pas dans la plupart des autres types d'activités. Il existe des locaux de sommeil dans toutes les tours de contrôle et tous les équipements techniques, ce qu'on n'a pas ailleurs. Je n'en connais pas tout le détail, mais on est tenu par l'obligation d'un fonctionnement 24 heures sur 24, en boucle.

M. Jacques Sallois - Je ne vais pas vous livrer le détail d'un contrôle que nous conduisons en ce moment sur le service des bases aériennes, mais je peux livrer au moins une précision : le service des bases aériennes possède 1.650 logements, ce qui est très important par rapport au chiffre que nous avons évoqué tout à l'heure. Nos constatations sur les modes de gestion de ces logements confirment celles que nous avons pu faire par ailleurs et, à certains égards, les dépassent.

M. Yves Fréville - Quelle est la proportion du patrimoine soumis à la taxe foncière sur les propriétés bâties ? Le service public bénéficie d'une exonération au titre des logements de fonctions. Cette exonération est-elle justifiée ? J'imagine que c'est le même problème pour les terrains non-bâtis.

Quel est le statut, au regard de ces taxes foncières, des propriétés de l'Etat dans les pays étrangers ?

M. le président - A-t-on la réponse à cette question ? Le président Sallois n'a pas la réponse...

M. Dominique Figeat - Je note la question. C'est une réponse que l'on essaiera de vous apporter, notamment la comparaison internationale.

M. le président - Voilà qui nous engage à d'autres rendez-vous.

M. Philippe Marini, rapporteur général - Je ne suis pas complètement certain que cette exonération soit générale et totale. J'ai souvenir que l'on nous a soumis en loi de finances des dispositions particulières sur l'assiette de taxe professionnelle, non seulement pour les locaux associatifs, mais aussi pour certains locaux dépendant de l'Etat.

Je ne suis pas absolument sûr que la situation soit partout et dans tous les cas l'exonération. Il doit exister des situations diverses.

M. Yves Fréville - Il y a taxe d'habitation, donc valeur locative. Est-ce qu'il y a exonération ?

M. Jacques Sallois - Ce statut fiscal est extrêmement varié. J'évoquais le contrôle que nous menons. Je peux vous dire que personne n'a d'idées très claires sur la manière dont le statut fiscal est respecté au niveau déconcentré.

M. Eric Doligé - Il sera peut-être intéressant de voir si, le statut fiscal changeant dans le cadre de la décentralisation, ce qui n'était plus soumis l'est à nouveau.

M. Philippe Marini, rapporteur général - Il y a là un gisement fiscal !

M. le président - ... Et matière à s'occuper !

J'espère que la Cour aura les moyens de certifier le bilan d'ouverture. Cela ne doit pas être un exercice commode.

M. Jacques Sallois - Vous aurez des éléments prévisionnels à cette question dans le rapport que la Cour va déposer sur l'exécution du budget 2005 et sur les comptes de l'Etat, dans la perspective de la certification après le bilan d'ouverture.

Pour répondre à la question de M. Doligé, les enquêtes que nous menons sur ce plan dans le cadre des missions intermédiaires de préparation au travail de certification dans les différents départements et que nous avons menées sur le ministère de l'équipement -c'est Mme Pinault qui a mené ce travail- confirment que l'évaluation précise de ce patrimoine est encore une rude tâche, même si des progrès ont été enregistrés. L'espoir que je peux partager avec M. le sénateur Doligé, c'est que les travaux menés dans ce cadre lui offriront, à terme, une plus grande transparence dans l'appréciation du patrimoine local de l'Etat.

M. le président - Il me reste à remercier la Cour pour le rapport transmis, qui répondait à notre demande et qui a permis de poser le problème.

Il n'y a pas eu de contestations de la part des représentants du ministère de l'équipement. C'est une situation de fait : le pilotage immobilier n'existait pas. C'est donc une fonction qu'il faut mettre en place. Ce qui sera particulièrement intéressant, c'est que l'on puisse se revoir d'ici un an pour que vous nous rendiez compte de ce qui a pu être accompli, de vos satisfactions, de vos déceptions parfois.

Pour ce qui est de La Défense, je ne suis pas sûr que l'issue soit immédiate ; la suppression de vos échangeurs pour récupérer de l'espace doit être assez compliquée et il va falloir quelque temps pour le concrétiser. Cela signifie que l'on va devoir attendre avant que la question ne soit résolue.

On n'a pas parlé du très bel appartement de fonction de La Défense, qui fait partie des constantes dans les rapports.

M. Patrick Gandil - Le terme de très bel appartement est franchement excessif. Il y a une très belle vue ; à part cela, il n'est ni très grand, ni extraordinairement agréable. Il est au sommet du bâtiment, presque au sein du bureau-cabinet. Le fait est que pratiquement aucun ministre ne l'a utilisé, un ministre devant être proche du Parlement. Se trouver à trois quarts d'heure du Parlement avec un aléa sur le temps de transport, ce n'est pas possible.

Symétriquement, pour les visiteurs, il n'est pas facile de trouver La Défense. Quand on connaît, c'est assez commode et efficace, mais la signalétique d'une dalle est extrêmement difficile et le nombre de visiteurs qui arrivent en retard ou qui se perdent pour trouver mon bureau est important.

Il faut que le ministre et son cabinet soient dans des locaux proches du Parlement. La formule consistant à placer les cabinets à Saint-Germain et, progressivement, le reste du ministère à La Défense, est une formule raisonnable.

En situation de crise, tous les points d'information névralgiques arrivent sur La Défense. On n'a jamais eu besoin de le faire, mais si quelque chose de grave arrivait, il serait assez raisonnable que le ministère ait un pied-à-terre là-bas.

On envisage de construire un jour une salle de crise à Saint-Germain, mais on n'a pas encore réussi à trouver la surface nécessaire.

M. le président - Je remercie la Cour et M. Gandil, en sa qualité de secrétaire général, pour sa volonté, son opiniâtreté, son courage. Je crois qu'il ne sous-estime pas l'ampleur de la tâche à accomplir. Je voudrais naturellement encourager Mme Jacquot-Guimbal et dire au délégué à l'action foncière combien nous sommes confiants dans l'aboutissement de ce qu'il a entrepris. C'est une fonction tout à fait nouvelle. Vous avez de la chance : vous allez pouvoir mesurer les progressions. Bon courage et bonne chance.

Avant de prendre congé, M. Masseret m'a indiqué pour sa part qu'il était disposé à ce que l'on publie ce rapport et l'échange auquel il a donné lieu. Est-ce bien l'avis de la commission ? Avis unanime.

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