II. L'URGENCE D'UN RECENTRAGE SUR LES BESOINS DES CLIENTS ET DES TERRITOIRES

La Poste a l'obligation légale, en vertu du code des postes et télécommunications, et en tant que prestataire du service universel postal, de desservir tous les foyers par une distribution du courrier 6 jours sur 7.

Alors que le réseau était conçu, au début du siècle, à l'heure des déplacements à pied, à cheval ou à bicyclette, pour permettre d'assurer cette distribution, il suffit aujourd'hui de quelques milliers de bureaux pour assurer les tournées de facteurs. Le réseau est pourtant resté intact, ou presque.

La distribution du courrier est désormais organisée à partir d'une poignée de milliers de bureaux de poste. Mais l'offre d'autres services comme l'envoi en recommandé ou l'expédition et la réception de colis postaux, ou encore les services financiers, reposent sur l'existence d'un réseau de points de contact avec le public.

Précisons donc d'emblée que les développements qui suivent relatifs à la configuration du réseau n'auront pas pour effet d'altérer les principes régissant actuellement la distribution du courrier en tous points du territoire, pour un prix d'acheminement égal, six jours sur sept.

Comme votre rapporteur l'a publiquement affirmé depuis 1997, adapter le réseau est un impératif, et le sera demain encore plus qu'aujourd'hui. Pour des raisons d'équation économique ? Pas seulement et, même, pas prioritairement.

Certes, le déséquilibre actuel du réseau a des conséquences financières insupportables pour une entreprise évoluant désormais dans un univers concurrentiel. Mais c'est avant tout parce que les Français attendent -légitimement !- du service public qu'il s'adapte à leurs besoins qu'il convient de recentrer le réseau sur leurs lieux de vie et de consommation : l'adaptabilité est d'ailleurs l'un des principes constitutifs des services publics à la française.

D'aucuns diront que La Poste étant un service public, elle doit continuer à remplir une mission d'animation territoriale dans les communes où elle est implantée, quelles que soient les conséquences financières du choix de l'entretien d'un réseau pour partie inactif. Cela est-il encore envisageable ?

Votre rapporteur, pour sa part, pense que l'immobilisme est impossible à l'heure où La Poste doit affronter la concurrence sur tous ses marchés. Bien entendu, le réseau reste et restera le point de rencontre indispensable entre La Poste et ses clients : il ne saurait s'agir de proposer une poste « virtuelle » qui ne dispose pas d'une solide implantation territoriale ! Il s'agit au contraire d'assurer dans la durée la pérennité de cette présence en la calquant sur les besoins réels des Français.

Mobiliser des financements pour assurer une véritable qualité de service et une accessibilité aisée : oui. Payer la facture exorbitante des pesanteurs et de l'inadaptation : non.

A. L'OBJECTIF : DÉFINIR ET RENFORCER L'ACCESSIBILITÉ AU SERVICE POSTAL

1. Dépasser le culte obsolète de la présence immobilière

Seule la qualité et l'accessibilité du service rendu au client compte : La Poste est un service public, c'est-à-dire un service rendu au public, et il faut l'envisager comme tel.

La vocation de La Poste est-elle de devenir un monument historique ou un « lieu de mémoire 85 ( * ) » ? L'entreprise peut-elle être délibérément vouée à entretenir une présence symbolique, surtout à l'aube de l'irruption d'une concurrence totale sur l'ensemble de ses métiers ? À l'évidence, non !

Il faut dépasser le culte obsolète de la présence immobilière postale. Qu'attend-t-on de La Poste ? Qu'elle entretienne, à prix d'or, un patrimoine immobilier parfois inadapté à ses missions, progressivement déserté car situé à l'écart des flux humains et commerciaux ou qu'elle rende un service au public, facilement accessible, d'aussi bonne qualité en ville qu'à la campagne ?

Votre rapporteur n'a pas d'hésitation devant un tel choix. Il faut assurer la viabilité à long terme de la présence de La Poste et sortir de l'impasse d'une reproduction des moyens d'hier pour répondre aux besoins d'aujourd'hui et de demain.

L'exceptionnelle couverture territoriale de La Poste, ce maillage fin du territoire, pourrait, s'il était réorienté, modernisé, constituer un atout commercial par sa proximité avec la clientèle. S'il était dynamisé, il serait une force de pénétration et de fidélisation tout à fait extraordinaire.

Or, actuellement, la conception statique, « immobilière » du réseau, et le coût qu'elle entraîne se révèlent pour La Poste un handicap difficile à justifier. D'autant qu'il n'est pas évident, au regard des indicateurs d'activité horaire journalière, que ce réseau qui a vocation à contribuer à la revitalisation des territoires fragiles remplisse aussi efficacement cette mission qu'on pourrait le souhaiter.

Lors des rencontres des présidents de commissions départementales de présence postale territoriale, le sociologue Jean-Marc Benoit avait d'ailleurs une analyse particulièrement intéressante de l'accessibilité. En comptant le strict nombre de points de contacts, il considérait que La Poste était troisième derrière les mairies (36.000) et les églises (30.000). Mais en considérant les plages d'ouverture, il affirmait que les hypermarchés ou les Macdonald étaient, au delà d'une certaine heure, bien plus accessibles que les services publics.

* 85 Comme le dit le document « Performance et convergence ».

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