EXAMEN DES ARTICLES

Article premier -

Objectifs de la politique agricole

Par les principes qu'il énonce, l'article premier constitue en quelque sorte " le préambule " de la loi d'orientation.

1. Le dispositif proposé


Par delà les réformes qu'elle introduit dans les instruments économiques, financiers et sociaux de mise en oeuvre de la politique agricole, la loi d'orientation a vocation à constituer la charte de développement de l'agriculture française pour les vingt prochaines années.

L'article premier du projet de loi est composé de deux paragraphes :

Le I de l'article premier du projet de loi exprime, en complément de l'exposé des motifs, les nouvelles orientations de la politique agricole, comme l'avaient fait les précédentes lois " d'orientation " ou de modernisation.

Il convient de s'interroger sur la portée juridique de telles dispositions. En fait, il s'agit d'une affirmation sans réelle portée normative, dépourvue de toute sanction administrative. Or, l'ambition assignée à une loi est d'être appliquée longtemps : il convient qu'elle ne soit ni abrogée ni vidée de son contenu dans les années qui suivent sa publication. La rédaction d'un texte législatif doit s'efforcer d'éviter bon nombre d'obstacles, afin de répondre à cette ambition.

Les deux caractéristiques essentielles de la loi prise dans son sens générique sont, selon la doctrine, la généralité et la force obligatoire.

Formulée à l'aube du XIXe siècle, l'adage du grand Portalis " les lois sont des volontés " conserve son actualité et doit guider le législateur. Il faut se garder de céder à la tentation des formules incantatoires ou déclaratives qui, trop souvent, s'insèrent au début d'un texte de loi, alors même qu'elles devraient figurer dans son préambule, voire dans son exposé des motifs. Tel est le reproche que votre commission peut formuler à l'encontre de l'article premier du projet de loi.

Par ailleurs cet article reformule des objectifs généraux, qui ont fait l'objet d'une définition très complète il y a à peine deux ans dans la loi du 1er février 1995 sur la modernisation de l'agriculture.


Malgré ce constat, votre rapporteur remarque que, si l'article 1er de la loi de 1995, en se contentant d'actualiser les dispositions de l'article 1er de la loi d'orientation agricole de 1980, avait permis d'éviter d'ajouter encore à la sédimentation existante, l'article 1er du présent projet, dans le dernier alinéa de cet article, abroge l'article 1er (objectifs de la politique agricole) de la loi de 1960 et celui de la loi de 1980 dont les dispositions sont encore en vigueur.

En outre, votre rapporteur est conscient qu'une telle loi a nécessairement un certain caractère prospectif, au contenu normatif inégal. L'objet de cet article est donc, en réalité, d'introduire le projet de loi. Il s'agit là d'une tradition bien établie en matière de législation agricole de faire précéder les dispositions du projet de loi d'un article déclaratif. Ce fut le cas à la fois pour les lois d'orientation 1960, 1980 et pour celle de modernisation de l'agriculture de 1995.

Dans le premier alinéa de cet article, le texte souligne d'une part la trifonctionnalité (économique, environnementale et sociale) de l'agriculture et, d'autre part, sa participation " à l'aménagement du territoire, en vue d'un développement durable ".

Cette reconnaissance de la fonction non seulement économique, mais aussi sociale et environnementale, figurait notamment dans l'article 1er et 3 du projet de loi d'orientation pour l'agriculture, l'alimentation et la forêt présenté par M. Philippe Vasseur 20( * ) .

Cette notion de trifonctionnalité que l'on retrouve dans le titre Ier relatif aux contrats territoriaux d'exploitation (CTE) et à l'article 45 sur la mise en valeur de l'espace agricole et forestier figure, comme le fait remarquer à juste titre M. François Patriat dans son rapport 21( * ) , dans de nombreux texte issus de la Conférence de Rio de 1992 sur le développement ainsi qu'à l'article L.101 du code forestier.

La consécration d'une agriculture aux activités multifonctionnelles est révélatrice d'une évolution importante dans la conception de la fonction agricole, notamment dans l'esprit du citoyen.

Il est sans doute nécessaire d'affirmer, à côté de la vocation économique traditionnelle de l'agriculture -production de biens et de services- de nouvelles fonctions telles que la création d'emplois, la préservation des milieux, ... Néanmoins, votre rapporteur souhaite rappeler que le plus grand nombre des agriculteurs n'a pas attendu le projet de loi d'orientation ou les récentes recommandations des pouvoirs publics pour entretenir l'espace, animer le milieu rural et créer des emplois. L'honnêteté exige, lorsque l'on parle de pollution des eaux par certaines pratiques agricoles -phénomène que votre rapporteur ne conteste en aucune façon- de comparer ces nuisances réelles et qu'il faut circonscrire -ce que la profession agricole a déjà commencé à faire- à l'ensemble des nuisances propres aux zones urbaines et périurbaines et dont le coût effectif reste à définir.

La Commission de la production et des échanges a complété cet alinéa en indiquant que la politique agricole " participe à l'aménagement du territoire, en vue d'un développement durable ".

Votre rapporteur rappelle que le Sénat a, depuis plus d'une quinzaine d'années, souligné le rôle majeur de l'agriculture dans la politique d'aménagement du territoire : ainsi, on peut lire à la page 326 du rapport du Sénat relatif aux propositions de la mission d'information sur l'aménagement du territoire présidée par M. Jean François-Poncet 22( * ) que " Agriculture et sylviculture sont les seules activités capables d'entretenir et de gérer physiquement 85 % de notre territoire, soit 45 millions d'hectares ". Votre rapporteur approuve sans réserve cette reconnaissance de la fonction agricole dans la politique d'aménagement rural. Il s'interroge néanmoins sur l'éventuelle contradiction entre une telle affirmation et la priorité évidente accordée par Mme Dominique Voynet, Ministre de l'environnement et de l'aménagement du territoire, au développement des villes et qui apparaît dans le projet de loi d'orientation pour l'aménagement et le développement durable du territoire et portant modification de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 déposée sur le Bureau de l'Assemblée nationale le 29 juillet dernier.

Rappelons que la notion de développement durable -ou soutenable- est apparue au moins en 1972, à travers le rapport publié par le Club de Rome sur les limites de la croissance. On la retrouve ensuite, clairement exprimée dans le rapport Bruntland " Notre avenir à tous ", publié en 1987 et dans le point 4 de la Déclaration de Rio, qui proclame que " ...pour parvenir à un développement durable, la protection de l'environnement doit faire partie intégrante du processus de développement et ne peut être considérée isolément " 23( * ) .

Reflétant ses préoccupations, le dernier programme (Ve programme d'action sur l'environnement 1992-2000) finalement adopté par la Commission de la CEE le 18 mars 1992, tient compte à la fois des engagements et discussions de Rio et des perspectives positives et négatives de l'achèvement du Marché intérieur. Il est axé sur cinq secteurs (industrie, énergie, transport, agriculture et tourisme) et semble vouloir développer davantage les outils financiers, fiscaux et contractuels que les normes " législatives ". Ce programme constitue la première transcription dans un programme politique et juridique du parti pris de rechercher un développement durable.

Un tel développement implique la mise en place d'une nouvelle croissance sur le plan national : à cet égard, l'intégration par les acteurs industriels des préoccupations environnementales constitue le soubassement nécessaire d'un travail politique et juridique à l'échelle internationale. Cette intégration doit se traduire tant par la mise en place et le perfectionnement des mesures très traditionnelles d'encadrement que par l'introduction de nouvelles techniques aptes à favoriser un couplage, au sein de l'économie d'un pays -en l'occurrence la France- entre économie et environnement.

L'alinéa premier de cet article 1er, avant d'énumérer les différents objectifs de la politique agricole, souligne le lien nécessaire entre la politique agricole française et la politique agricole commune (PAC) autour de la notion de préférence communautaire. Votre rapporteur s'étonne, à cette occasion, de l'absence d'adéquation entre ce projet de loi d'orientation et les propositions de réforme de la PAC. En premier lieu, alors que le projet " Agenda 2000 " promeut la recherche de la compétitivité des produits agricoles sur les marchés mondiaux en instaurant une forte baisse des prix, le projet de loi d'orientation considère la vocation exportatrice française dans le domaine agro-alimentaire comme secondaire et donne la priorité à la vente de produits à haute valeur ajoutée. En second lieu, alors que le projet de loi de finances pour 1999 prévoit un financement du CTE pour le budget communautaire, les discussions en cours sur la réforme de la PAC s'orientent davantage vers une renationalisation des aides plutôt qu'en direction d'une décentralisation.

Votre rapporteur a donc l'impression que le texte qui vous est soumis -contrairement à ce qui est affirmé dans l'alinéa premier de l'article premier- n'a pas été élaboré en liaison avec la PAC et son évolution.

On peut regretter, d'une part, que les différents objectifs énumérés à cet article 1er apparaissent parfois davantage comme des moyens mis à la disposition de la politique agricole et que, d'autre part, la multiplication des ajouts lors de la discussion du projet de loi en séance publique à l'Assemblée nationale ait conduit à l'élaboration d'un texte quelque peu confus.

Les objectifs mentionnés sont les suivants :

1. L'installation en agriculture et particulièrement des jeunes -c'est-à-dire moins de 35 ans-, la pérennité des exploitations agricoles, la transmission de celles-ci et le développement de l'emploi dans l'agriculture pour l'ensemble des régions françaises, en tenant compte des spécificités de ces dernières ; un amendement adopté par l'Assemblée nationale, sur proposition de M. Félix Leyzon, a précisé l'importance du caractère familial de notre agriculture ;

2. L'amélioration des conditions de production, du niveau de vie et du revenu des agriculteurs, ainsi que la parité avec les autres catégories sociales, dès lors que les contributions sont équivalentes ; il est, en outre, fait mention du nécessaire renforcement de la protection sociale ;

3. La revalorisation progressive des retraites des agriculteurs et la garantie de retraites minima en fonction de la durée d'activité des exploitants ;

4. La production de biens agricoles alimentaires et non alimentaires répondant à plusieurs besoins : ceux des marchés, national, européen et mondial, ceux des industries agro-alimentaires, ceux des consommateurs particulièrement soucieux aujourd'hui de sécurité sanitaire ; cet alinéa mentionne expressément la notion de " sécurité alimentaire mondiale " ;

5. Le développement de l'aide alimentaire et la lutte contre la faim dans le monde, dans le respect de l'économie de chaque pays en développement ;

6. Le renforcement de la capacité exportatrice agricole et agro-alimentaire de la France vers l'Europe et les marchés solvables ;

7. Le renforcement de l'organisation économique des marchés, des producteurs et des filières, afin de respecter un équilibre entre agriculteurs, transformateurs et entreprises de commercialisation ;

8. La mise en valeur des productions agricoles à des fins non alimentaires, notamment énergétiques ;

9. La valorisation des terroirs au moyen de systèmes de production adaptés à leurs potentialités ;

10. La préservation des ressources naturelles et de la biodiversité et de l'entretien des paysages ;

11. La poursuite d'actions d'intérêt général bénéficiant à tous les usagers de l'espace rural ;

12. La promotion et le renforcement d'une politique de la qualité et de l'identification des produits agricoles et alimentaires, notamment ceux à haute valeur ajoutée, sur les marchés ;

13. Le développement de la formation et de la recherche agricoles ;

14. L'organisation d'une coexistence équilibrée entre l'agriculture et les diverses activités (commerçants, artisans, etc.) qui animent le monde rural.

L'antépénultième alinéa précise que l'agriculture prend en compte les situations spécifiques de chaque région pour déterminer l'importance des moyens à mettre en oeuvre afin de parvenir à ces objectifs. Il est fait notamment référence aux zones de montagne, aux départements d'outre-mer et aux zones humides précisément délimitées.

L'avant-dernier alinéa rappelle le rôle joué par les collectivités locales et les organisations professionnelles représentatives dans la mise en oeuvre de la politique agricole.

Enfin, le dernier alinéa prévoit un débat annuel au Parlement sur la politique agricole et la PAC. Votre rapporteur observe que ce débat a déjà lieu depuis trois ans dans le cadre des débats d'orientation prébudgétaire...

Le II du texte proposé par cet article premier tire la conséquence de ce nouvel article d'orientation, en abrogeant l'article 1er des lois n° 60-808 et n° 80-502.

2. L'analyse de votre commission

Votre rapporteur souhaite s'abstenir de tout amendement sur cet article premier
. Constatant que l'Assemblée nationale a consacré plusieurs heures de débat à cet article, il regrette cette dérive qui consiste à faire porter ses efforts sur l'accessoire et négliger le principal. Le Parlement doit se consacrer à édicter des normes et à veiller à leur bonne application.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 1er bis-

Représentation des syndicats agricoles dans différents organismes

Cet article a pour objet de préciser les conditions dans lesquelles s'effectue la représentation des exploitants agricoles dans les différentes enceintes où sont traitées les questions les concernant.

1. Le dispositif proposé par le projet de loi


L'article  1 bis a été adopté par l'Assemblée nationale sur proposition de MM. Parrenin, Patriat, Bataille et les membres du groupe socialiste.

Il est composé de deux paragraphes. Le I prévoit la représentation de l'ensemble des organisations syndicales d'exploitants agricoles qui remplissent des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat au sein :

- des commissions où siègent des représentants des exploitants agricoles,

- dans les organes délibérants des comités professionnels, interprofessionnels ou organismes agricoles investis d'une mission de service public;

Le II prévoit la mise en application de cette disposition à partir du 1er janvier 2000.

2. Le principe de la représentativité syndicale

La législation française repose sur le double principe de la liberté syndicale et du pluralisme ; il en résulte qu'aucun syndicat, par rapport à d'autres, ne peut bénéficier d'un monopole dans l'exercice de ses droits ou prérogatives. Tous les syndicats régulièrement constitués ont la personnalité juridique et peuvent en conséquence mettre en oeuvre les attributions qui en découlent.

Toutefois, pour ce qui a trait à leur rôle dans l'organisation de la vie professionnelle et des relations de travail, le législateur a progressivement exigé des syndicats une condition de " représentativité ". Cela signifie que la régularité juridique de formation et de fonctionnement, pour l'exercice de certaines activités, n'est qu'un élément nécessaire et non suffisant ; il faut y ajouter la preuve que le syndicat n'est pas un organisme purement formel, mais qu'il a une activité indiscutable au profit d'un nombre suffisant d'adhérents, voire de salariés ou professionnels. Il s'agit là d'une exigence " d'authenticité " syndicale qui est juridiquement traduite par la " représentativité "; Dès lors les syndicats représentatifs bénéficieront d'attributions spécifiques qui s'ajoutent à celles qui peuvent être mises en oeuvre par toute organisation professionnelle.

L'exigence, pour certaines attributions, de la représentativité, n'est apparue que postérieurement à la loi du 21 mars 1884. C'est d'ailleurs un instrument international qui le premier y fait référence : le Traité de Versailles, instituant l'Organisation Internationale du Travail, prévoyait que les délégués non gouvernementaux à la Conférence internationale du travail devaient être désignés, dans chaque Etat-membre, par les gouvernements en accord avec les organisations professionnelles les plus représentatives. En droit interne, le concept est introduit par un décret de 1921 qui, pour l'élection au Conseil supérieur du travail, prend en compte le nombre des adhérents ; la loi du 24 juin 1936 fait référence à la représentativité syndicale pour déterminer les conditions d'extension des conventions collectives. Après la Seconde guerre mondiale, des textes de plus en plus nombreux ont lié les prérogatives syndicales à la représentativité (à titre d'exemples, citons : l'article 10 de l'ordonnance n° 45-280 du 22 février 1945 relatif à l'élection des membres du comité d'entreprise ; l'article 9 de la loi du 16 avril 1946 relatif à l'élection des délégués du personnel ; la loi du 13 juillet 1971 relative à la conclusion des conventions collectives ; la loi du 27 décembre 1968 relative à la création des sections syndicales d'entreprise). De nombreux textes exigent la représentativité des syndicats qui participent à des organismes officiels consultatifs ou gestionnaires, tels le Conseil économique et social, la Commission nationale de la négociation collective, la Commission supérieure des allocations familiales, le Conseil supérieur de la fonction publique...

Le droit français concilie donc l'exigence de la représentativité syndicale avec le pluralisme, corollaire de la liberté syndicale. La représentativité syndicale n'est pas déterminée par la majorité des adhérents par rapport aux effectifs ; il en résulte que plusieurs syndicats peuvent être reconnus représentatifs et exercer conjointement les prérogatives qui résultent de cette qualité. C'est ainsi qu'aucun syndicat n'a, à lui seul, le monopole de la présentation des candidats au premier tour des élections, n'a le pouvoir de signer seul une convention collective ; dans les organismes officiels, la puissance publique réserve plusieurs sièges aux syndicats pour permettre à tous ceux qui sont représentatifs de désigner des représentants. Les textes législatifs visent " les syndicats les plus représentatifs ", ou plus simplement " les syndicats représentatifs ". La notion de représentativité syndicale en droit français est donc étrangère à l'exigence de majorité qui caractérise le syndicalisme Nord-Américain et qui aboutit à conférer, dans une entreprise, le monopole de négociation au syndicat " accrédité " du fait, essentiellement, de son importance numérique.

C'est la loi du 11 février 1950, à propos de l'extension des conventions collectives, qui a énuméré les critères de représentativité des syndicats. Ce texte s'inspire de sources juridiques ou de pratiques antérieures (arrêt de la Cour de La Haye du 31 juillet 1922, décisions de la Cour supérieur d'arbitrage, circulaires ministérielles).

Ces critères sont les suivants : les effectifs, l'indépendance, les cotisations, l'ancienneté et l'expérience, l'attitude patriotique pendant l'occupation ; ce dernier critère n'ayant qu'une valeur historique, seuls les quatre premiers retiendront l'attention.

Malgré le champ formellement limité de l'article L. 133-2 du Code du travail, les critères énumérés par cette disposition sont applicables dans tous les domaines du droit social du secteur privé où la notion d'organisations les plus représentatives est inscrite dans un texte. Le syndicat qui ne pourrait pas faire état des éléments permettant de satisfaire aux exigences de la loi, faute de remplir les critères d'effectifs, de cotisations, d'activité et d'ancienneté, n'est pas représentatif.

Toutefois, pour qu'un syndicat soit représentatif, il n'est pas nécessaire qu'il satisfasse aux exigences de chacun des critères ; ces derniers ne sont pas cumulatifs, et l'insuffisance relative à l'un d'eux peut être compensée par les caractères reconnus aux autres s'il en résulte que de ce fait le syndicat a une emprise et une expérience suffisantes 24( * ) .

3. La spécificité des syndicats agricoles

Rappelons que la présence de tous les syndicats représentatifs nationalement dans les offices agricoles a été prévue par le décret n° 90-187 du 28 février 1990 relatif à la représentation des organisations syndicales d'exploitants agricoles au sein de certains organismes ou commissions. Ce texte définit les critères de représentativité du syndicalisme agricole au vu des principes qui fixent la représentativité syndicale en droit français. Il comporte un ensemble de critères objectifs à remplir par les organisations syndicales d'exploitants agricoles pour être admises à siéger aux différents niveaux (départemental, régional et national) au sein des commissions consultatives existantes, limitativement énumérées dans les annexes du décret. Les critères retenus s'appuient essentiellement sur l'audience des organisations syndicales d'exploitants agricoles, appréciés sur la base des résultats obtenus aux élections aux chambres d'agriculture dans le collège des chefs d'exploitations et assimilés.

Le décret de 1990 présente trois critères de représentativité : l'un au niveau départemental, l'autre au niveau régional et le dernier au niveau national. Au plan départemental, sont reconnues représentatives les organisations ayant obtenu, lors des dernières élections aux chambres d'agriculture, plus de 15 % des suffrages exprimés ainsi que les syndicats ayant constitué des listes d'union totalisant plus de 30 % des suffrages. Au plan régional, sont reconnues les organisations qui répondent aux critères départementaux dans la moitié des départements de la région. Elles peuvent ainsi siéger dans les commissions ou organismes à caractère régional. Enfin, au niveau national, seuls les syndicats répondant, dans 25 départements au moins, aux critères départementaux peuvent siéger dans les commissions ou organismes à caractère national.

Ce décret a permis, au plan national, de reconnaître, en plus de la FNSEA et du CNJA, la Confédération paysanne, compte tenu des résultats de 1989.

Ce décret ne concerne pas néanmoins l'ANDA (Association Nationale de Développement Agricole), le FAFSEA (Fonds d'Assurance Formation des Salariés des Exploitations et Entreprises Agricoles) ni les conseils de direction des offices.

4. La position de votre commission

Votre rapporteur approuve la reconnaissance du pluralisme syndical agricole, mais considère que la rédaction de cet article soulève deux difficultés :

- En premier lieu, il appartient au législateur et à lui seul de définir les différents critères de représentativité et non au juge administratif. Si ce dernier a, dans le décret de 1990, précisé les critères de représentativité, on cherche en vain dans les visas de ce texte une référence à la loi : tout au plus figure un rappel du code rural. Il serait donc nécessaire de compléter cet article 1er bis par un renvoi à la loi ;

- En second lieu, votre rapporteur s'interroge sur les conséquences de la multiplicité syndicale au sein de certains organismes. S'il est tout à fait normal que la diversité syndicale soit prise en compte au sein d'organismes comme l'ANDA, ce n'est pas le cas notamment pour d'autres.

En effet, cette généralisation des règles contenues dans le décret de 1990 soulève tout d'abord des problèmes vis-à-vis des syndicats professionnels. Constitués sur le fondement de la liberté d'adhésion, basés sur l'autonomie, les syndicats professionnels sont avant tout l'expression d'une sensibilité et d'une philosophie. L'ouverture obligatoire de leurs organes délibérants à des membres qui ont adhéré à des structures concurrentes ne se justifie pas. Au contraire, elle jettera la suspicion et paralysera la prise de décision.

L'application de cet article pose ensuite des difficultés aux filières spécialisées dont la réussite même repose sur le principe de l'autogestion. Si les syndicats d'exploitants agricoles n'ont pas de représentativité réelle dans ces filières, on ne voit pas à quel titre il pourrait être prévu qu'ils auront néanmoins des représentants dans les organes délibérants des filières concernées.

Sauf à courir le risque de paralyser le travail des professionnels et de les priver de leurs moyens d'action et de décision, il est impératif de modifier la rédaction de cet article en insérant dans la loi les principes du décret de 1990.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 1er ter -

Rapport sur la revalorisation des retraites agricoles

Cet article prévoit le dépôt d'un rapport avant le 31 mars 1999 sur les modalités de la revalorisation des retraites agricoles.

Ce rapport doit décrire, catégorie par catégorie, l'évolution que le Gouvernement entend donner aux retraites agricoles au cours de la période du 30 juin 1997 au 30 juin 2002. Il est spécifié qu'un développement particulier sera consacré aux mesures envisagées au cours de ces cinq années pour revaloriser les plus faibles pensions.

En outre, le texte adopté par l'Assemblée nationale précise qu'un effort significatif sera fait les premières années afin de répondre à l'attente des agriculteurs.

Rappelons que, de 1993 à 1997, 5 milliards de francs ont été consacrés à la revalorisation des petites pensions agricoles 25( * ) . Le Gouvernement continue à peu près au même rythme. En effet, la loi de finances initiale pour 1998 a consacré 1 milliard de francs à l'amélioration de 274.000 retraites. Le projet de loi de finances pour 1999 prévoit de revaloriser la situation des personnes seules à faibles ressources : aides familiaux pour lesquels il n'y aura pas de retraites au-dessous de 2 500 francs par mois et veuves, dont les retraites seront au moins égales à 2 800 francs par mois. Le coût de cette dernière étape s'élève à environ 1,6 milliard de francs en année pleine et concernera 607.000 retraites.

Votre rapporteur souhaite néanmoins rappeler les difficultés soulevées par M. Charles de Courson quant au financement de cette revalorisation. En effet, pour 1999, cette mesure est financée par un prélèvement exceptionnel sur les excédents de la Contribution Sociale de Solidarité, à hauteur d'un milliard. Or, à partir de l'an 2000, le BAPSA sera définitivement écarté du produit de cette contribution par la loi de financement de la sécurité sociale. Est-il cohérent de financer une mesure dont le coût est par définition pérenne par une recette exceptionnelle non reconductible ? Comment le Gouvernement entend-il financer, pour l'an 2000, ce milliard de perte de recettes, plus environ 1,2 milliard supplémentaire pour poursuivre la revalorisation des petites pensions ? Il faudra donc trouver deux milliards supplémentaires, la subvention du budget de l'agriculture pour le BAPSA ayant été réduite cette année de plus de deux milliards. Le Ministère de l'agriculture ne risque-t-il pas de devoir financer cette revalorisation par un effort de " redéploiement " sur les crédits du budget du ministère ?

Sous réserve des inquiétudes qu'elle exprime à ces propos, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

TITRE Ier -

LES CONTRATS TERRITORIAUX D'EXPLOITATION

La création de contrats territoriaux d'exploitation (CTE) a été présentée par le Ministre de l'Agriculture et de la Pêche comme la pierre angulaire de ce projet de loi d'orientation. Elle est un des axes majeurs de la nouvelle politique agricole que le Gouvernement entend promouvoir.

Le CTE sera signé entre le représentant de l'Etat dans le département et l'agriculteur, quelles que soient la localisation et la production de ce dernier. En échange du respect d'un cahier des charges relatif à tous les aspects de la vie de l'exploitation -qu'il s'agisse de la production agricole ou des services non marchands qui lui sont liés, parmi lesquels la protection de l'environnement, l'occupation du territoire- l'agriculteur percevra des aides publiques.

Rappelons que la signature de ce contrat est un acte volontaire, de sorte que certains estiment que le CTE n'aura pas l'avenir escompté. La réforme de la PAC de 1992 comprenait des mesures agri-environnementales comme les plans de développement durable. Les sommes versées aux agriculteurs étaient comparables à celles prévues pour les CTE. Or, sur l'ensemble des plans qui ont été souscrits, 90 % étaient localisés dans les secteurs où les conditions d'exploitation étaient difficiles : zones trop humides, trop en altitude, trop de pente...les CTE ne se limiteront-ils pas à ces seuls agriculteurs ? De plus, comme les CTE sont souscrits sur la base du volontariat, leur non signature par un nombre significatif d'agriculteurs dans un bassin rendrait les CTE inopérants sur le plan environnemental.

Néanmoins, comme une partie des subventions actuelles à la production, appelées à compenser l'insuffisance des prix, ne serait délivrée que sous condition de CTE, on peut supposer que les 680.000 entreprises agricoles françaises ne tarderont pas à pratiquer toutes " cette agriculture multifonctionnelle ".

La mise en place du CTE, comme l'a indiqué le Ministre de l'Agriculture à de multiples reprises, vise à répartir différemment les aides publiques à l'agriculture. M. François Patriat, Rapporteur de ce texte à l'Assemblée nationale a d'ailleurs évoqué longuement dans son rapport les données du réseau d'information comptable agricole (RICA) pour 1995, qui illustrent bien l'inégalité du système actuel d'aides publiques à l'agriculture. Votre rapporteur souscrit totalement à cette analyse. Il considère que le système actuel de répartition d'aides n'est pas équilibré. Néanmoins, s'il y a accord sur le constat, il n'en est pas de même sur les solutions à mettre en oeuvre. En effet, sans entrer ici dans le détail de l'examen des articles du projet de loi, rappelons que le projet de loi d'orientation devrait consister en la présentation et la définition d'un nouveau cap : " déshabiller Pierre pour habiller Paul" est un principe parfois utile au nom de l'équité et de la solidarité, mais il ne constitue pas une véritable ambition pour l'agriculture française. En effet, le CTE consiste tout simplement à enlever des aides à une partie des agriculteurs les plus subventionnés pour les attribuer à une autre partie, la plus nombreuse et la moins subventionnée. La méthode ainsi utilisée aura inévitablement deux effets pervers :

- en premier lieu, une telle présentation vise à réduire les difficultés rencontrées par notre agriculture à un problème de mode de répartition des aides, ce qui est totalement faux ;

- en second lieu, un tel dispositif créera inévitablement une bureaucratie extraordinaire.

En effet, un grand nombre d'agriculteurs devraient souscrire aux CTE, sous peine de voir disparaître une partie de leurs aides. Le CTE, malgré l'existence d'un contrat type départemental, devrait être personnalisé pour être efficace et prendre en compte chaque situation individuelle au regard des productions et des services collectifs apportés. Combien faudra-t-il de fonctionnaires pour définir et rédiger ces CTE ? Combien de fonctionnaires supplémentaires pour contrôler le respect des engagements pris ?

Si votre rapporteur ne souscrit en aucune façon aux thèses néo-libérales en matière agricole, dont la mise en oeuvre impliquerait à terme la disparition de notre agriculture et l'abandon d'une partie de notre territoire, il considère que la mise en place du CTE, comme elle est prévue au titre Ier du projet de loi, conduira à terme à un système sur-administré.

Par ailleurs, le CTE, apparaît comme un objet mal identifié et, surtout, non financé. La plupart des crédits affectés au CTE pour 1999 vont prioritairement aux zones les plus défavorisées : FGER, OGAF, fonds d'installation, crédits sont consacrés à des mesures agri-environnementales ou à des opérations locales environnementales, qui sont certes peu importantes en volume, mais qui existent ont des destinations précises et fonctionnent. S'il s'agit de les remettre " dans le pot commun " en fonction d'un contrat dont les contours sont mal précisés, l'opération n'apparaît guère satisfaisante. En outre, ces CTE étant personnalisés, leur coût pourrait s'élever, au minimum, de 10.000 à 15.000 francs par an. Pour plus de 650.000 contrats, les pouvoirs publics sont-ils prêts à dégager environ 6 milliards de francs par an ? Le ministre de l'agriculture a estimé qu'un tiers de ces crédits proviendrait de fonds communautaires ? Ces derniers seront-ils prélevés sur les fonds consacrés aux OCM communautaires ? Cette décentralisation dans la répartition des crédits communautaires a-t-elle déjà fait l'objet d'une négociation avec les services de la Commission ? Les récents projets de Bruxelles sur le cofinancement des aides agricoles ne vont-ils pas totalement à l'encontre de cette supposée contribution communautaire au financement des CTE ? On voit bien que le CTE ne s'inscrit ni dans une réflexion stratégique et cohérente de l'Europe telle qu'elle est, ni dans une perspective financière crédible.

De telles réserves inciteraient votre rapporteur à modifier de manière importante le CTE, qui pourrait s'avèrer être un mirage d'autant plus dangereux que nos agriculteurs seraient contraints, en fait, de le signer.

Or, le Gouvernement a souhaité s'engager dans une phase d'expérimentation du CTE. Près de 80 départements se sont portés volontaires, de peur -soyons francs- de voir leurs agriculteurs privés d'une partie de leurs aides.

Votre rapporteur regrette une telle méthode. Le Gouvernement considère, en effet, dès septembre 1998 comme acquise la mise en place du CTE. Celui-ci, s'il a fait l'objet de négociations avec les professionnels, n'est cependant pas, à notre connaissance, adopté par le Sénat.

Or, soit le Gouvernement considère qu'il s'agit d'une simple mesure d'ordre administratif -comme cela semble être le cas puisque les expériences de CTE concernent actuellement 75 % des départements et trois régions- et la légalisation d'un tel dispositif ne nous paraît guère utile. Soit il s'agit d'un dispositif d'ordre législatif qui nécessite un débat et une adoption par le Parlement.

Dans ce cas, c'est faire fi de la représentation nationale que de proposer de redéployer 300 millions de francs dès le mois de septembre 1998, six mois avant l'adoption définitive du texte d'orientation.

En dépit de ces difficultés, votre rapporteur vous propose de maintenir le titre relatif au CTE. En effet, ce dispositif permet, pour la première fois, de rétribuer l'agriculture française pour ses externalités positives : observons qu'avant la réforme de la PAC de 1992, il appartenait au seul consommateur de participer au financement de l'agriculture ; on pouvait dès lors penser qu'une partie du prix du produit rémunérait l'ensemble des activités de l'agriculteur et non pas seulement la fonction de production. Avec la mise en place d'un système d'aides publiques directes, financées par le contribuable, proportionnelles au volume produit par l'agriculteur, les externalités de l'agriculture (occupation de l'espace, entretien des paysages) sont dès lors devenues " gratuites " -sans pour autant que le prix des produits agricoles ne baisse, la valeur ajoutée ayant été " accaparée " par les circuits de commercialisation et de distribution- . Compte tenu de l'importance de ces fonctions dans notre pays et de l'attente de l'opinion publique, il est tout à fait légitime que l'agriculteur soit rémunéré pour l'ensemble des services d'utilité générale qu'il rend, et qu'on a aujourd'hui tendance à ne mentionner que rarement.

En outre, l'évolution de la PAC, même si cette dernière reconnaît d'une certaine façon la multifonctionnalité de l'agriculture, contraint l'agriculture à entrer de plein pied dans la sphère de l'économie compétitive. Le CTE peut ainsi apparaître, dans certaines zones et pour certaines activités, comme un moyen de maintenir une occupation du territoire -et ce même si d'autres outils (plans de développement rural...) contractuels auraient pu remplir cette fonction-.

Le titre I relatif au CTE regroupe quatre articles (articles 2 à 5 inclus).

Article 2 -
(Article L.331-3 du Code rural) -

Création du contrat territorial d'exploitation

Cet article propose la création du contrat territorial d'exploitation et insère ce dispositif dans le chapitre premier du titre premier du livre III (nouveau) du code rural un article L.331-3.

1. Le dispositif proposé


Le texte proposé pour l'article L.331-3 par l'article 2 est composé de cinq alinéas.

Le premier alinéa indique qu'un contrat territorial d'exploitation peut être signé entre l'autorité administrative et toute personne physique ou morale qui exerce une activité agricole.

Rappelons que la définition de l'activité agricole figure dans l'article L.311-1 du Code rural, qui est modifié par l'article 6 du présent projet de loi et qui fera l'objet d'un examen ultérieur.

La souscription d'un tel contrat est volontaire. Votre rapporteur souhaite néanmoins attirer l'attention sur le caractère très artificiel d'une telle disposition. En effet, soit ces CTE resteront confidentiels et ne seront réservés qu'à des agriculteurs occasionnels et leur signature sera sans effet sur le territoire, soit, s'ils deviennent le passage obligé pour les aides européennes et nationales -DJA, PAM, droits à produire- ils seront en fait imposés à la majorité des agriculteurs.

Par ailleurs, il est important de souligner que le contrat pourra être souscrit pour tous les types d'exploitations agricoles, que celles-ci soient individuelles ou de forme sociétaire.

Les dispositions du CTE peuvent porter sur :

- les orientations de la production de l'exploitation. Ceci implique qu'il ne s'agit pas des conditions de production mais seulement des grandes orientations comme cela a été précisé en seconde délibération ;

- la préservation des ressources naturelles ;

- l'occupation de l'espace ;

- la réalisation d'actions d'intérêt général. Soulignons que ce terme d'" actions d'intérêt collectif " a été remplacé lors de la discussion à l'Assemblée nationale par celui d'" actions d'intérêt général ", comme par exemple le déneigement des routes -dès lors qu'il n'existe pas d'entreprise en mesure de l'effectuer- , le fait de faire paître des animaux dans certaines zones pour réduire les risques d'incendies... Ainsi, on évite de confondre politique agricole et politique rurale en distinguant multifonctionnalité et pluriactivité. Il ne s'agit donc pas de donner aux agriculteurs des missions qui relèveraient d'autres catégories socio-professionnelles (artisans, commerçants...) ;

- le développement de projets collectifs de production agricole (ainsi le projet individuel de l'exploitant doit s'inscrire dans une démarche économique plus globale).

Le deuxième alinéa de l'article 2 du projet de loi prévoit que les exploitations agricoles doivent, à travers le CTE, définir un projet économique global prenant en compte les fonctions productive, sociale et environnementale de l'agriculture, conformément à l'article premier.

Le troisième alinéa précise que le CTE " concerne l'ensemble de l'activité de l'exploitation agricole ". Sont néanmoins exclues les activités soumises à une organisation commune de marché, c'est-à-dire à une réglementation communautaire spécifique à certaines productions : il s'agit par exemple de celles relatives aux céréales, aux oléagineux, au lait, aux protéagineux, à la viande bovine, au tabac... En outre, cet alinéa souligne que le CTE " définit la nature et les modalités des prestations de l'Etat qui constituent la contrepartie des engagements de l'exploitant. "

Le ministre de l'agriculture a rappelé, à ce propos, que les aides spécifiques (ICHN...) n'avaient pas vocation à être intégrées dans les CTE.

Précisons que la mention relative aux propriétaires a été supprimée en seconde délibération. Seule a été maintenue la prise en compte des droits des tiers lors de la conclusion du CTE. Cette question a fait l'objet d'intenses débats à l'Assemblée nationale. Certains députés ont estimé nécessaire de mentionner le propriétaire comme acteur du CTE lorsque ce dernier est conclu entre un fermier et l'autorité administrative. Plusieurs hypothèses ont été proposées : l'accord du propriétaire du fonds qui fait l'objet d'un CTE, la simple information du propriétaire à la suite de la signature du CTE, qui peut provoquer un changement de nature de biens -dans l'affectation des bâtiments par exemple-. M. François Patriat, rapporteur de ce projet de loi à l'Assemblée nationale, a considéré, à l'instar du ministre, que le CTE constitue un projet global qui vise à valoriser le potentiel économique, agronomique, différencié de l'exploitation et ne risque donc pas de détruire le bien en question. Ainsi, le CTE reste un contrat qui lie exclusivement l'exploitant et l'autorité administrative. La seule condition mentionnée est la garantie du respect du droit des biens. Cela signifie que les relations entre bailleur et preneur ne sont pas affectées par la signature du CTE. Il n'y a aucun engagement à souscrire pour le bailleur et, par la suite, aucune contrepartie à prévoir pour celui-ci.

Votre rapporteur comprend cette logique du CTE, considéré comme un acte de gestion courante de l'entreprise, mais il n'est pas normal que les propriétaires soient systématiquement absents de ce texte, alors qu'ils sont au coeur même de l'activité agricole.

Le quatrième alinéa du texte proposé pour l'article L.311-3 du Code rural a trait à la procédure applicable. Il appartient au Préfet d'élaborer un ou plusieurs contrats types, dont l'objectif essentiel est de promouvoir un système d'exploitation " assurant un développement durable de l'agriculture. " Il a été précisé par le ministère de l'agriculture devant l'Assemblée nationale qu'il serait tenu compte, lors de l'élaboration de ces contrats-types, des systèmes d'exploitation et éventuellement des petites régions agricoles. En outre, si la commission départementale d'orientation de l'agriculture, ainsi que les Conseils régionaux et généraux, seront probablement consultés lors de l'élaboration du CTE, le Gouvernement a souhaité ne pas inscrire formellement l'association de ces différentes institutions à la préparation des CTE types, afin de ne pas accentuer le formalisme d'une procédure de consultation jugée déjà très lourde.

Soulignons que les partenaires 26( * ) de la campagne " pour une agriculture qui respecte l'environnement, la santé et les emplois " ont revendiqué, dans un communiqué du 9 novembre, le droit de participer à l'élaboration des contrats territoriaux d'exploitation (CTE).

" Agir pour l'environnement " et ses partenaires ont écrit à l'ensemble des préfets pour leur demander que l'instance départementale chargée d'élaborer les CTE " intègre les associations de consommateurs, de producteurs biologiques, de citoyens et de protection de l'environnement ". Ils souhaitent également que " la concertation se poursuive lors de la mise en oeuvre et l'attribution des CTE ".

Ces contrats types doivent respecter les orientations définies par le ministère de l'agriculture après avis du Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire.

Dans le quatrième alinéa, il est indiqué que si le ou les contrat(s) servent de " modèle " lors de la conclusion de CTE, ce dernier demeure un outil qui peut être adapté à chaque exploitant, notamment lorsque celui-ci formule des propositions en ce sens. Rappelons que le ministre a indiqué que ces contrats pourraient avoir une durée de quatre ou cinq ans.

Le cinquième alinéa du texte proposé pour l'article L.311-3 du code rural reprend pour le CTE le dispositif à l'alinéa précédent pour le contrat type d'exploitation. Ainsi, le CTE devra :

- d'une part, prendre en compte les orientations définies par le Ministre de l'agriculture, après avis du CSO ;

- d'autre part, respecter des cahiers des charges définis au plan local. En outre, il est précisé que le CTE doit être cohérent avec la politique d'aménagement du territoire qui se mettra en place et, notamment, avec les projets de pays.

Votre rapporteur, tout en comprenant la distinction entre politique agricole et politique forestière, souhaite que, si le CTE vient à couvrir des espaces forestiers -ce qui arrivera sûrement- les règles figurant dans ce contrat ne soient pas en contradiction avec ce qui existe, notamment dans les centres régionaux de la propriété forestière pour la gestion de la forêt privée.

Le dernier alinéa prévoit, enfin, l'intervention d'un décret en Conseil d'Etat pour définir les conditions de mise en oeuvre de l'article 2 et, notamment, les objectifs de contrats, les modalités concrètes de leur financement, la procédure d'instruction et de contrôle applicables.

2. La position de votre commission

Votre rapporteur vous propose, un amendement modifiant la rédaction d'ensemble de cet article, afin d'en rendre la lecture plus cohérente en distinguant l'objectif du CTE, son champ d'action, l'articulation entre contrats type, cahier des charges et CTE.


Cette nouvelle rédaction supprime, en outre, la référence aux projets à caractère particulier présentés par les agriculteurs au sein du CTE type, afin d'assurer une certaine homogénéité dans la mise en oeuvre du nouveau dispositif. Par ailleurs, il vous est proposé de supprimer le lien entre les CTE et la politique d'aménagement du territoire et notamment avec les projets de pays. Le CTE est un moyen de la politique agricole qui n'est pas à mettre sur le même plan que les projets de pays, contrairement aux projets agricoles départementaux. Enfin, votre rapporteur souhaite que les propriétaires soient informés des CTE.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié

Article 3 -
(article L.311-4 du code rural) -

Création d'un fonds de financement des contrats territoriaux d'exploitation

Cet article vise à insérer dans le Code rural un article L.311-4 relatif au financement des contrats territoriaux d'exploitation.

Le texte proposé par l'article 3 pour ce nouvel article L.311-4 est composé de deux alinéas.

Le premier alinéa institue un fonds de financement des contrats territoriaux d'exploitation, regroupant deux catégories de crédits :

- ceux destinés aux CTE ;

- ceux destinés à la gestion territoriale de l'espace agricole et forestier.

Le deuxième alinéa prévoit que les opérations de ce nouveau fonds sont inscrites au budget du Ministère de l'agriculture.

Soulignons que le Gouvernement a créé une ligne nouvelle du budget de l'Etat -chapitre 44-84-10 du nouveau budget de l'agriculture- et non un compte d'affectation spéciale. Ainsi, les CTE seront financés non par des ressources spéciales affectées, mais par l'ensemble des ressources de l'Etat.

Ce fonds regroupe donc deux types de dépenses destinées à la gestion territoriale de l'espace agricole.

La première catégorie concerne :

- les crédits existants précédemment pour des opérations liées à la gestion territoriale de l'espace agricole et forestier : il s'agit essentiellement du fonds de gestion de l'espace rural et des opérations regroupées d'aménagement foncier ;

- les crédits destinés directement aux agriculteurs et ayant vocation, par leur nature, à entrer dans le CTE, comme par exemple le fonds d'installation des jeunes.

Ces crédits constituent les deux tiers du chapitre 44-84-10 du budget du ministère de l'agriculture pour 1999 :


- FGER, chapitre 44-83-10

140 millions de francs

 
 

- OGAF, chapitre 44-41-60,

45 millions de francs

 

Chapitre 44-84-10

Fonds de financement des CTE

200 millions de francs

- FIA, chapitre 44-41-27

15 millions de francs

 
 

La seconde catégorie relève plus spécifiquement de l'innovation introduite par les CTE. Il s'agit :

- des crédits destinés aux offices à hauteur de 100 millions de francs pour le troisième tiers (44-53-10). Le ministre de l'agriculture a présenté cette mesure comme découlant naturellement du rééquilibrage de la politique agricole en faveur des politiques " horizontales " et non plus seulement du renforcement des organisations communes de marché.

- outre ces 300 millions de francs, le ministre de l'agriculture a prévu un complément financier non budgétaire de 150 millions de francs au titre des mesures agri-environnementales, cofinancées aujourd'hui à 50 % par la Communauté européenne.

Votre rapporteur s'étonne de ce que les priorités dégagées à la fin de 1997 par le nouveau Gouvernement -il s'agissait en particulier de l'installation des jeunes avec la suppression du Fonds pour l'installation et et le développement des initiatives locales (FIDIL) et la création du Fonds pour l'installation en agriculture (FIA)- soient, moins d'un an plus tard, remises en cause par un tel redéploiement, notamment en ce qui concerne le FIA. Par ailleurs, est-il de bonne politique d'opérer des prélèvements sur des fonds destinés principalement aux régions les plus déshéritées ?

La fin du premier alinéa de l'article 3 précise que les concours éventuels des régions et des départements ne sont pas inclus dans le fonds relatif aux CTE. Votre rapporteur a parfaitement compris que les CTE sont financés sur des crédits nationaux, donc des dotations budgétaires de l'Etat, et non par des subventions provenant des collectivités territoriales. Néanmoins, il s'interroge sur cette affirmation. En effet, en 1999 seront préparés les contrats de plan Etat-régions. Or, comme le ministre de l'agriculture l'a confirmé, les CTE pourraient être les noyaux durs de ces contrats de plan en ce qui concerne l'agriculture. Cela signifierait que les régions seraient automatiquement appelées à prélever dans leurs budgets les sommes nécessaires pour compléter les crédits de l'Etat. Ainsi, au risque de co-financement de la PAC qui existe aujourd'hui, en raison de l'évolution des négociations sur l'Agenda 2 000, s'ajouterait celui d'une régionalisation des aides agricoles. En outre, la contribution des régions ne pourrait s'effectuer que par un redéploiement d'actions très ciblées au détriment d'autres actions en matière agricole (dotations allouées aux plans de modernisation des bâtiments d'élevage, de lutte contre la pollution, d'aménagement pour la fertilisation des sols). Par ailleurs, comme l'a signalé M. Christian Jacob à l'Assemblée nationale, nous ne serions plus, dès lors, dans un système contractuel puisqu'en fait les contrats de plan relatifs aux CTE devraient être conformes à des cahiers des charges définis au niveau national..

Enfin, le recours partiel à des financements communautaires pose un autre grave problème : outre le caractère " franco-français " du nouveau dispositif, qui renforcera inévitablement l'argumentation d'un certain nombre d'Etats européens qui s'estiment être déjà de trop importants contributeurs nets, la spécificité de ces crédits en font des dépenses non obligatoires dont le financement pourra être remis en cause chaque année.

C'est pourquoi votre rapporteur vous propose un amendement tendant à exclure ces aides du financement du CTE.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 4 -
(Article L.341-1 du Code rural) -

Articulation des aides publiques avec les contrats territoriaux d'exploitation

Cet article a pour objet de modifier l'article L.341-1 du Code rural relatif aux conditions de financement des exploitations agricoles, afin de l'adapter à la conception multifonctionnelle de l'agriculture et à la création des CTE.

1. L'article L.341-1 du code précité, issu de la loi n° 93-934 du 22 juillet 1993, permet aux exploitants agricoles de bénéficier du concours financier de l'Etat sous forme de subventions et de prêts à taux bonifié.


En contrepartie de l'aide reçue, les attributaires (exploitants agricoles, sociétés de culture...) sont tenus de respecter diverses prescriptions destinées à assurer la conformité de leur entreprise à l'intérêt général. Ces aides peuvent aussi leur permettre de s'installer, de s'agrandir ou de s'installer dans une autre région. Le dernier alinéa de cet article indique que les comptes de l'aide financière ainsi consentie sont présentés chaque année au Parlement.

2. La nouvelle version proposée par cet article 4 est composée de trois paragraphes .

Le paragraphe I reprend tout d'abord les termes du premier alinéa de l'actuel article L.341-1 en précisant que l'aide financière de l'Etat aux exploitants prend la forme de subventions, de prêts ou de bonifications d'intérêts, de remises partielles ou totales d'impôts ou de taxes.

L'Assemblée nationale a souhaité précisé que ces aides " sont modulées et plafonnées sur la base de critères économiques de l'exploitation, de facteurs environnementaux, d'aménagement du territoire et du nombre d'actifs ". Si votre rapporteur est favorable à la notion de " modulation " -qui existe déjà dans la mise en oeuvre de la politique agricole- , il s'interroge sur l'intérêt d'introduire un plafonnement. En effet, au niveau national, les aides aux exploitants agricoles sont, déjà, toutes plafonnées. Et dans le domaine communautaire, les financements sont de la responsabilité du budget de l'Union européenne et sont donc liés à la contribution des quinze Etats-membres. Il appartient seulement au Conseil des Ministres de décider d'un plafonnement.

C'est pourquoi votre rapporteur vous proposera de ne pas cumuler ces deux notions (modulation et plafonnement), les modalités d'attribution des aides nationales étant soit modulées soit plafonnées. En outre, il ne souhaite pas que le cumul des différents critères mentionnés à cet alinéa conduise à exclure des agriculteurs, à tord, du bénéfice de certains types d'aides.

Les deuxième, troisième et quatrième alinéas du I de ce nouvel article L.341-1 traitent des objectifs prioritaires de l'aide financière. Il s'agit :

- de l'installation des jeunes agriculteurs dans le cadre de la politique d'installation agriculture définie à l'article L.330-1 du Code rural ;

- de l'adaptation du système d'exploitation aux exigences d'une agriculture multifonctionnelle, notamment dans le cadre des CTE.

Cette nouvelle rédaction place donc la trifonctionnalité de l'agriculture au rang des objectifs prioritaires de la politique agricole, le CTE étant un outil au service de cet objectif.

Une autre innovation de l'article 4 du projet de loi consiste dans le fait que l'aide accordée peut être interrompue, voire faire l'objet d'un remboursement.

- Sauf lorsqu'elle revêt la forme de prêts, l'aide peut être interrompue si l'entreprise ne satisfait plus aux conditions de mise en valeur de l'espace agricole ou forestier mentionnées, soit au schéma directeur, soit au projet agricole départemental défini à l'article L.313-1.

Aux termes de l'article L.312-1 du code rural, le schéma directeur départemental des structures agricoles, préparé et arrêté par le préfet, détermine les priorités de la politique d'aménagement des structures d'exploitation. Le projet départemental d'orientation de l'agriculture, quant à lui, est défini à l'article L.313-1 et soumis à la consultation de la commission départementale d'orientation de l'agriculture est élaboré par le représentant de l'Etat. Ce projet détermine les priorités de la politique d'orientation des productions et d'aménagement des structures d'exploitation. Ainsi, lorsque ces documents évoluent, ils peuvent entraîner l'interruption du versement d'aides aux exploitants agricoles.

- Dans tous les cas, et même si l'aide revêt la forme d'un prêt, un remboursement peut être exigé lorsque l'entreprise cesse de respecter plus les prescriptions d'intérêt général pour des raisons imputables non pas à un changement dans le schéma directeur ou dans le projet départemental, mais au seul exploitant.

Si votre rapporteur approuve ce dispositif dans son principe, il regrette l'imprécision des termes employés. En matière d'aide financière, s'il est entendu que seule celle de l'Etat est concernée, on peut s'interroger sur la nature de ces aides : ainsi l'allégement des cotisations sociales, pendant les trois premières années suivant l'installation, entre-t-il dans le champ d'application de ces dispositions ?

Par ailleurs, la notion de " conditions de mise en valeur " est assez floue. Or, un changement dans " ces conditions " peut entraîner une interruption des aides.

Le II de l'article 4 du projet de loi est composé de deux alinéas relatifs au devenir d'une exploitation en cas de transmission d'exploitation et lors d'un changement d'exploitant.

Lors de la transmission d'une " part significative " de l'exploitation à une autre personne, le premier alinéa considère que le CTE est résilié.

Lors d'un changement d'exploitant pour tout ou partie d'une exploitation pour laquelle un CTE a été conclu, le bénéfice des aides au titre du CTE est maintenu en faveur du contractant initial, si ce dernier est en mesure d'assurer les engagements qu'il a souscrits. Ce changement d'exploitant peut provenir de la mise en oeuvre d'un des modes d'aménagement foncier (remembrement rural, réorganisation foncière, échange amiable...) défini au titre II relatif à l'aménagement foncier rural du livre premier (nouveau) du code rural qui a trait à l'aménagement et à l'équipement de l'espace rural. Le maintien du CTE est ainsi possible :

- soit lorsque les engagements souscrits initialement sont indépendants des surfaces concernées par le changement d'exploitant ;

- soit lorsque ces mêmes engagements peuvent être transférés sur les surfaces attribuées ou conservées sans préjudice des objectifs du contrat.

Bien entendu, le non-respect de l'intégralité des engagements mentionnés au CTE peut entraîner soit la résiliation, soit la conclusion d'un avenant au CTE.

Si votre rapporteur comprend la logique d'un tel dispositif, il ne peut que s'étonner du choix du terme " part significative " qui, juridiquement, n'a aucun sens et ouvre donc des risques contentieux importants. C'est pourquoi il vous proposera un amendement tendant à clarifier cette rédaction.

Le paragraphe III de l'article 4 du projet de loi précise que la juridiction compétente en cas de litige entre l'autorité administrative et le cocontractant est le juge administratif.

On peut ainsi considérer le CTE comme un contrat de droit public. Par ailleurs, il est prévu un décret en Conseil d'Etat afin de définir les modalités d'application de cet article 4.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 5 -
(Article L.313-1 du code rural) -

Reconnaissance d'un pouvoir d'avis aux commissions départementales d'orientation de l'agriculture

Cet article, modifiant l'article L.313-1 du code rural, vise à confier aux commissions départementales d'orientation de l'agriculture (CDOA) le pouvoir de donner un avis sur les projets de CTE types.

L'article 5 du projet de loi ajoute à l'article L.313-1 du code rural issu de la loi n° 95-95 du 1er février 1995 sur la modernisation de l'agriculture, un alinéa tendant à permettre aux CDOA de donner un avis sur les projets de contrat-type qui sont proposés aux exploitants agricoles.

La CDOA, qui remplace depuis 1995 la commission départementale des structures est consultée pour l'élaboration du schéma directeur et informée de l'utilisation dans le département des crédits communautaires, de l'Etat et des collectivités locales en matière agricole et forestière. Elle donne un avis sur les demandes relatives au contrôle des structures, les aides à l'installation des jeunes agriculteurs et à la modernisation, la préretraite, les aides au boisement, les aides agri-environnementales et aux exploitations en difficulté.

La commission départementale d'orientation de l'agriculture est placée sous la présidence du préfet ou de son représentant et comprend :

- le président du Conseil général ou son représentant ;

- le directeur départemental de l'agriculture et de la forêt ou son représentant ;

- le trésorier-payeur général ou son représentant ;

- le président de la chambre d'agriculture ou son représentant ;

- le président de la caisse de mutualité sociale agricole ou son représentant ou, dans les départements d'outre-mer, le président de la caisse générale de sécurité sociale ou son représentant ;

- six représentants des organisations syndicales d'exploitants agricoles à vocation générale habilitées en application de l'article 1er du décret n° 91-187 du 28 février 1990, dont au moins un représentant de chacune d'elles ;

- un représentant des salariés agricoles présenté par l'organisation syndicale des salariés des exploitations agricoles la plus représentative au niveau départemental ;

- deux représentants des activités de transformation des produits de l'agriculture dont un au titre des sociétés coopératives agricoles et un au titre des entreprises agro-alimentaires non coopératives ;

- un représentant de la distribution des produits agro-alimentaires ;

- un représentant du financement de l'agriculture ;

- un représentant des propriétaires agricoles ;

- un représentant de la propriété forestière ;

- deux personnes qualifiées en matière économique.

Dans les départements d'outre-mer, le président du conseil régional ou son représentant est également membre de la commission.

Alors que la CDOA donne son avis sur chaque contrat individuel en faveur de l'environnement régi par le règlement communautaire n° 2078 du 30 juin 1992 (mesures agri-environnementales), le pouvoir consultatif donné à la CDOA par le présent projet de loi concerne uniquement les contrats types et non chaque CTE. En outre, le ministre a précisé, lors de la discussion en séance publique, que la composition des CDOA devrait être modifiée dans un délai d'un an par décret ; ces commission pourraient inclure dans l'avenir des représentants des consommateurs et des associations de protection de l'environnement.

Votre rapporteur approuve cette consultation de la CDOA. En ce qui concerne la composition de la CDOA, tout en prenant acte de son caractère réglementaire, il s'étonne de l'ouverture à des non professionnels du monde rural. Par exemple, la présence de consommateurs, absolument nécessaire au sein des grandes instances qui participent à la définition de la politique agricole, l'est-elle véritablement au sein des CDOA qui traitent surtout des questions d'installation d'aménagement foncier ? Un tel constat est d'autant plus justifié que le Président du Conseil d'administration de l'INC, M. Jean-Pierre Peinoit, s'est récemment étonné de la multiplication des instances dans lesquelles les consommateurs devaient être présents au moment même où les crédit attribués aux associations de consommateurs étaient en baisse.

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

TITRE II -

EXPLOITATIONS ET PERSONNES

Ce titre regroupe les dispositions relatives à l'exploitation agricole (chapitre Ier), à l'orientation des structures des exploitations agricoles (chapitre II), au statut des conjoints travaillant dans les exploitations ou les entreprises agricoles (chapitre III) et à l'emploi salarié (chapitre IV).

Il est composé de 39 articles.

Votre rapporteur vous propose un amendement tendant à substituer à la notion d'exploitation celle d'entreprise. Il s'agit de promouvoir la création et le développement d'entreprises agricoles qui contribuent au développement local. L'exploitation familiale à responsabilité personnelle avait constitué le fil conducteur de la loi d'orientation de 1960. Votre rapporteur souhaite que l' entreprise agricole soit celui du texte qui vous est proposé.

Rappelons que la notion d'entreprise vient du mot latin " Prehendere " qui signifie " prendre en main ".

L'expression traduit une certaine vision de l'agriculture. La substitution de la notion d'entreprise à celle d'exploitation traduit la volonté d'adapter le droit de l'exploitation agricole aux réalités économiques.

La législation est encore largement imprégnée d'une vision patrimoniale et " agrarienne " de l'agriculture qui ne permet plus de répondre aux exigences qu'imposent les règles économiques. Un chef d'entreprise doit pouvoir développer ses activités en fonction de l'évolution de la demande, sans subir les contraintes de réglementations qui relèvent d'un autre temps où la valeur d'une exploitation reposait principalement sur le foncier. Néanmoins, votre rapporteur souhaite que cette entreprise agricole demeure à responsabilité personnelle et à taille humaine. Derrière cette référence, s'exprime le souhait de prendre en compte les réalités sociales. Votre rapporteur estime que, pour encourager l'installation, il faut valoriser les statuts des hommes et des femmes qui choisissent d'exercer les métiers de l'agriculture.

Une agriculture dirigée par des sociétés de capitaux dans lesquelles les exploitants ne seraient plus maîtres de leur outil de travail ne permettrait pas d'atteindre cet objectif.

Si le statut des baux ruraux datant de 1945-1946 prend en compte certains impératifs qui sont aujourd'hui ceux d'un droit de l'entreprise agricole, c'est au cours de la décennie des années 1980 qu'a pris corps la nécessité d'une évolution du droit rural vers la prise en compte de l'entreprise agricole. Le rapport Gouzes a été le révélateur de cette nouvelle prise de conscience. Quatre innovations méritent, sous cet aspect, d'être notées : l'avènement d'un statut des conjoints d'exploitants agricoles (1980), la définition de l'activité agricole consacrée en 1988, l'extension des procédures commerciales de règlement judiciaire aux agriculteurs en difficulté (1984) et l'institution des formules d'EARL.

La loi complémentaire agricole de 1990 met l'accent sur la nécessité de " doter l'exploitation agricole d'un cadre juridique, fiscal et social tenant compte des caractéristiques spécifiques de l'activité agricole et de la diversité des exploitations et adapter une économie d'entreprise " (déclaration de principe d'ailleurs reprise dans la loi de modernisation de 1995).

On constate donc une promotion croissante du concept d'entreprise agricole.

Le projet de loi soumis à votre examen ne poursuit malheureusement pas cette tendance, alors que la consécration de la notion d'entreprise agricole devrait permettre de faire face au défi de renouvellement des générations et au risque de concentrations excessives ou à l'intégration par des entreprises d'amont et d'aval.

La principale caractéristique de l'exploitation agricole a toujours été le lien entre la famille et l'entreprise. L'exploitation agricole familiale a été, en effet, jusqu'à maintenant au coeur du modèle français. Les liens entre l'exploitation agricole et la famille ont d'ailleurs imprégné profondément la vie sociale rurale.

Pour autant, l'exploitation agricole est avant toute autre chose une entité économique. Entité qui n'est pas définie par le droit, qu'il soit français ou européen.

Ainsi, la Cour de justice des Communautés européennes a dû constater qu'il était impossible de dégager des dispositions du traité ou des règles du droit communautaire dérivé une notion uniforme d'exploitation.

En droit interne, le mot " exploitation " est utilisé à double sens.

Le législateur emploie le terme exploitation pour désigner une activité humaine. C'est le cas de l'article L.412-5 du code rural qui permet au preneur ayant préempté " de faire assurer l'exploitation du fonds " par un membre de sa famille ou de l'article 23 de la loi du 4 juillet 1980 qui édicte des règles particulières en cas " d'exploitation " par chacun des époux d'un fonds agricole séparé.

Mais le même législateur emploie aussi ce même terme pour désigner l'ensemble des biens affectés à l'exercice de l'activité agricole. C'est ainsi qu'il faut comprendre les dispositions organisant l'attribution préférentielle des exploitations agricoles ou celles instituant un contrôle de la structure de celles-ci.

Quel que soit le sens dans lequel il a été utilisé, le terme " exploitation " est repris par toutes les branches du droit rural. Pourtant, depuis les années 1960, un autre terme est apparu, celui d'entreprise agricole sans recevoir véritablement de consécration légale. Cette évolution du langage est le reflet d'une évolution économique et sociale.

Sans pour autant bannir de notre droit rural le terme " exploitation ", votre rapporteur souhaite ouvrir la voie à une reconnaissance de la notion d'entreprise agricole.


CHAPITRE Ier -

L'exploitation agricole

Ce chapitre regroupe 13 articles (6 à 12ter).

Il concerne la définition des activités agricoles, le registre de l'agriculture, la définition de l'exploitant et quelques dispositions relatives au bail rural.

Votre commission vous propose d'adopter un amendement tendant à substituer le terme d'entreprise à celui d'exploitation.

Article 6 -
(Article L.311-1 du code rural) -

Définition des activités agricoles

Cet article vise à adapter la définition des activités agricoles à la reconnaissance de la multifonctionnalité de l'agriculture.

1. L'état du droit


L'article L.311-1 du code rural donne des activités agricoles une définition issue de la loi du 30 décembre 1988 et caractérisée par un élargissement des activités entrant dans son champ. Il s'agissait, à l'époque, de mettre un terme aux difficultés soulevées tant par l'évolution des techniques de culture et d'élevage que par le développement de certaines formes de tourisme rural. En effet, la qualification commerciale parfois attribuée par la jurisprudence aux activités ainsi exercées était source d'insécurité. Cette insécurité était d'autant plus redoutable que les critères de qualification retenus par le Conseil d'Etat et par la Cour de cassation différaient. Par ailleurs, les conséquences attachées à la commercialité étaient inégalement ressenties. Certaines étaient jugées bénéfiques : il en allait ainsi de l'application du droit des procédures collectives. Pour la plupart, cependant, ces conséquences présentaient des inconvénients. Tel était généralement le cas en matière fiscale et en matière de bail. Tel pouvait encore être le cas en matière de société lorsque la structure retenue était de type civil.

A défaut d'une définition juridique précise et communément acceptable de l'activité agricole, des textes, en particulier de droit fiscal et social, ont parfois donné leur propre définition de l'activité agricole. Tantôt, ces textes portent à considérer comme commerciales des activités que l'article L.311-1 du Code rural répute agricoles. Tantôt, au contraire, ils qualifient agricoles des activités que cet article ne tient pas pour telles.

La question se pose donc de l'incidence de la définition donnée par l'article L.311-1 sur ces textes spéciaux.

Pour l'un d'entre eux, la réponse ne souffre aucun doute. L'article 1144 du Code rural étend l'affiliation au régime d'assurance obligatoire des salariés agricoles à des personnes qui, même au regard de l'article L.311-1 du Code rural, n'exercent pas une activité agricole. Cette affiliation n'est pas remise en cause. Les activités énumérées à l'article 1144 sont expressément considérées comme agricoles pour ce qui intéresse l'assujettissement au régime obligatoire des salariés agricoles.

Bien qu'elle ne soit pas formellement énoncée pour les autres textes, la solution ne paraît pas devoir être différente. Dans le silence de la loi, il est difficile de les tenir pour implicitement abrogés. D'une part, la thèse de l'autonomie de droit fiscal pourrait être invoquée en faveur de la survie des dispositions relevant de cette discipline. D'autre part, de façon à la fois plus sûre et plus générale, il peut être rappelé qu'en principe, une disposition générale nouvelle (l'article L.311-1 du Code rural) n'abroge pas une disposition spéciale plus ancienne.

On peut, en fait, distinguer trois types d'activités agricoles.

Activités agricoles par nature

La loi répute agricoles toutes les activités correspondant à la maîtrise et à l'exploitation d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal (C. rur., art. L. 311-1). Cette formulation fait de la notion de cycle biologique un élément central de définition. Elle rompt le lien traditionnel entre l'agriculture et la terre. Celle-ci n'est plus indispensable à l'exercice de l'activité agricole. La relation, à cet égard, est d'autant plus faible que la référence au caractère naturel du cycle a été volontairement et rapidement abandonnée au cours des débats de la loi de 1988.

Dans l'ordre juridique, les véritables supports de l'activité agricole sont dans les végétaux et les animaux, de sorte que l'élevage industriel, la pisciculture, la culture sans sol relèvent certainement du secteur agricole. Il en va encore plus sûrement ainsi pour les cultures marines dont la loi a récemment affirmé le caractère agricole.

L'élargissement du domaine de l'activité agricole comporte cependant une double limite.

La première limite résulte de la lettre de l'article L.311-1. Pour être qualifiée agricole, l'activité doit constituer une ou plusieurs étapes nécessaires au déroulement du cycle biologique. Deux conséquences semblent en découler :

En premier lieu, il ne suffit pas qu'une entreprise apporte sa contribution au déroulement du cycle biologique. Encore faut-il que cette contribution constitue un point de passage obligé. Ainsi, l'horticulteur qui repique des boutures d'oeillets qu'il a achetées en herbe en vue de les faire raciner exerce une activité agricole par nature car le repiquage constitue une étape nécessaire au développement des plants. En revanche, la mise en terre de plants déjà racinés dans le dessein de les revendre ne correspond pas à une étape nécessaire et caractéristique du cycle biologique. Cette activité ne répond pas à la définition légale de l'activité agricole ;

En second lieu, l'activité doit, pour être agricole, affecter directement le cycle biologique. Elle ne semble donc pas pouvoir être qualifiée comme telle si elle consiste en opérations de transformation, distinctes de l'encadrement de la seule croissance (ainsi, par exemple, des opérations de dressage d'animaux ou d'affinage).

Une deuxième limite, d'origine jurisprudentielle, semble résider dans la nature de la maîtrise exercée sur le cycle biologique. Bien qu'aucune directive tirée de la loi ou des travaux préparatoires ne le suggère, une maîtrise simplement effective est insuffisante. Tel paraît, en tout cas, être le sens d'un arrêt de la Cour de cassation. Constatant qu'un entraîneur de chevaux de course recevait en pension " des chevaux appartenant à autrui sans que soit déterminé à l'avance s'il (aurait) la charge de leur entraînement pour tout ou seulement partie de leur vie de chevaux de course ", la Cour en conclut que, faute d'être investi de la maîtrise nécessaire, l'intéressé n'exerçait pas une activité agricole.

Activités agricoles par relation

L'article L.311-1 du Code rural retient à ce titre deux types d'activités.

Ce sont d'abord celles " qui ont pour support l'exploitation ". En première analyse, ont ce caractère, les activités diverses exercées sur les lieux mêmes de l'exploitation : fermes auberges, campings, gîtes ruraux, activités cynégétiques, équestres, etc. La solution n'est pourtant pas si certaine. Sans doute les travaux préparatoires sont-ils en ce sens. La lettre du texte suggère néanmoins une interprétation différente. En effet, le " support " dont il est question est " l'exploitation " et non le sol sur lequel elle est implantée. Toute activité exercée en dehors du périmètre de l'exploitation, mais grâce aux moyens réunis pour celle-ci, serait alors susceptible d'être considérée comme agricole. Tel serait, par exemple, le cas pour certaines formes d'entreprises de travaux agricoles. Inversement, certaines activités exercées sur le site, mais selon des moyens étrangers à l'exploitation échapperaient à la qualification agricole : ainsi de certains gîtes ruraux dans lesquels les produits employés ou consommés ne sont pas tirés de l'exploitation.

Le second type d'activité envisagé par l'article L.311-1 du code rural concerne celles qui " prolongent l'acte de production ". Cette expression permet certainement de considérer comme agricole la transformation de produits élevés ou cultivés au sein de l'exploitation et la vente de ces produits (vente directe ou à la grande distribution). En revanche, quand la transformation porte sur des produits achetés, la qualification agricole doit être écartée : la transformation de produits achetés ne constitue pas un prolongement de l'acte de production.

Pour revêtir un caractère agricole, les activités ci-dessus doivent être exercées par un exploitant agricole. L'exigence est compréhensible. Considérer, par exemple, systématiquement comme agricole toute activité de transformation de produits agricoles eût été inutile, artificiel et éventuellement coûteux. Il demeure que la loi actuelle ne définit pas l'exploitant agricole. L'expression ne figure même pas dans les dispositions relatives à l'inscription au Registre de l'agriculture . Il faut considérer comme tel celui qui exerce habituellement, à titre professionnel, une activité agricole par nature -l'article 7 du projet de loi tend d'ailleurs à combler cette lacune-.

En revanche, la question se pose de savoir s'il est indispensable que l'activité agricole par nature soit exercée à titre principal. La jurisprudence paraît plutôt consacrer l'affirmative. En termes d'opportunité, cette solution est souvent critiquée. Sur le terrain strictement juridique, indépendamment d'une mise en oeuvre souvent délicate, elle est également contestable. D'une part, la lettre du texte de 1988 ne suggère aucune distinction entre une activité principale et une activité accessoire. D'autre part, cette distinction était initialement faite dans le projet de loi de 1988 et a été abandonnée au cours des débats. En d'autres termes, si l'on s'en tient à la loi et aux travaux préparatoires, il n'existerait aucun seuil légal au-delà duquel une activité agricole par relation (ou de prolongement) deviendrait susceptible d'une requalification.

Activités mixtes

En dépit de son élargissement, la définition des activités agricoles n'englobe pas toutes celles susceptibles d'être exercées par un exploitant. Celui-ci peut avoir, en parallèle, une activité totalement différente, de nature salariale ou commerciale par exemple. Il peut aussi exercer une activité qui, sans être elle-même agricole -fût-ce par relation- se rattache à l'activité agricole qu'il exerce par ailleurs. Ainsi de l'exploitant qui, outre la transformation de sa propre production, transforme ou commercialise des produits achetés auprès d'un tiers. Alors que la première activité est agricole, la seconde est commerciale.

En droit fiscal, les problèmes posés par la pluri-activité sont multiples. Ils se présentent différemment en droit privé, mais ils sont tout aussi redoutables. Le fait qu'une personne exerce habituellement une activité commerciale lui confère, en principe, la qualité de commerçant. Peu importe que cette activité ne soit pas la seule. Peu importe même, dans une certaine mesure, qu'elle ne soit pas la plus importante. Si les deux activités sont étrangères l'une à l'autre, l'exploitant est considéré comme ayant la double qualité d'agriculteur et de commerçant avec toutes les conséquences qui en découlent, y compris sous l'angle des incompatibilités éventuelles.

En revanche, quand les deux activités sont économiquement liées de telle sorte que l'une peut être regardée comme l'accessoire de l'autre, il est généralement admis que l'activité accessoire perd son caractère propre pour emprunter celui de l'activité principale. Le fait que, dans le contexte de son activité agricole, un exploitant pratique habituellement mais accessoirement, une activité de nature commerciale n'entraîne donc aucune conséquence dans l'ordre de la commercialité.

Au demeurant, les situations de ce genre peuvent se révéler inconfortables. D'une part, le rôle joué par la règle de l'accessoire est majoritairement, mais non unanimement admise. D'autre part, il peut arriver qu'en pratique, la distinction du principal et de l'accessoire soit délicate. Enfin, les situations sont évolutives : telle activité initialement accessoire peut devenir principale et inversement. Or, les enjeux sont considérables. Ainsi, il y a bail commercial et non bail rural lorsque la destination principale des lieux loués est commerciale. De même, quand l'exploitant est une société civile, celle-ci ne peut avoir qu'un objet civil. La sanction applicable en cas d'objet commercial n'est pas clairement définie : nullité de la société civile pour les uns, dégénérescence en société commerciale de fait pour les autres ; elle est, dans tous les cas, particulièrement grave.

2. Le dispositif proposé

Alors que l'article L.311-1 est composé uniquement de deux alinéas -le premier définissant globalement les activités agricoles, le second précisant que l'ensemble de ces activités a un caractère civil- la multiplication des activités de diversification et l'interprétation restrictive, par la jurisprudence, de la définition de l'article L.311-1, ont conduit le Gouvernement a souhaiter modifier cette définition.

L'article 6 du projet de loi, tout en conservant la définition globale des activités réputées agricoles et l'affirmation de leur caractère civil, complète l'actuel article L.311-1 en considérant comme agricoles au regard des seuls livres III (l'exploitation agricole) et IV (baux ruraux) (nouveaux) du Code rural :

- " Les activités de l'exploitant qui sont dans le prolongement de l'acte de production ou les activités auxquelles il se livre pour valoriser le cheptel et les productions de l'exploitation " ; soulignons que les activités de l'exploitant qui sont dans le prolongement de l'acte de production sont déjà réputées agricoles, notamment la transformation de produits élevés ou cultivés au sein de l'exploitation et la vente de ces produits.

L'intérêt du caractère agricole reconnu à ces activités de valorisation s'avère relativement limité puisque tel était déjà le cas. Mais on comprend mieux l'alinéa lorsqu'on lit la version proposée initialement par la commission de la production et des échanges, qui souhaitait insérer une condition de localisation : auraient été ainsi considérées comme agricoles les activités de valorisation à la condition qu'elles soient exercées sur l'exploitation. Au contraire, on peut donc considérer que les activités de valorisation du cheptel et des productions sont agricoles même si elles ne se situent pas sur l'exploitation même. C'est notamment le cas en matière de boucherie. Comment peut-on valoriser la viande sans la faire abattre et traiter dans un abattoir ? Comment ne pas admettre aussi qu'un agriculteur vende une partie de sa production au bord de la route ou dans un point de vente situé sur une exploitation voisine ?

- " les travaux que l'exploitant réalise avec le matériel nécessaire à son exploitation et qui présentent un caractère accessoire au sens de l'article 75 du Code général des Impôts " ; ainsi ont un caractère civil les activités de prestation de services fournies par les exploitants à des tiers, qu'il s'agisse de personnes privées ou de collectivités locales. Les activités d'entretien de l'espace rural ou de préservation de l'environnement, comme les opération de débroussaillement, de déneigement ou d'entretien des talus et des haies pourraient entrer dans cette catégorie.

En ne définissant pas de seuil pour déterminer le caractère accessoire des activités considérées comme telles, l'article 6 confie au juge le soin de décider au cas par cas. Néanmoins, l'article 75 du Code général des Impôts donne une définition de la notion " d'accessoire " : le revenu " tiré d'activités accessoires relevant de la catégorie des bénéfices industriels et commerciaux et de celle des bénéfices non commerciaux réalisé par un exploitant agricole soumis à un régime réel ou au régime transitoire d'imposition peut être pris en compte pour la détermination du bénéfice agricole lorsqu'il n'excède ni 30 % du chiffre d'affaires tiré de l'activité agricole, ni 200.000 francs au titre d'un exercice ".

C'est donc au regard de cette définition qu'il appartiendra de caractériser ou non d'agricole telle ou telle activité :

- les activités de restauration réalisées par un exploitant à condition :

qu'elles se situent sur le site de l'exploitation ;

qu'elles présentent un caractère accessoire ;

qu'elles soient assurées principalement au moyen des produits de l'exploitation ;

qu'elles respectent les règlements et normes en vigueur, en particulier en matière d'hygiène et de sécurité, comme le font les artisans et commerçants.

- les activités d'hébergement à usage touristique ou de loisirs, à condition :

qu'elles soient réalisées par l'exploitant ;

qu'elles se situent sur le site de l'exploitation ;

qu'elles présentent un caractère accessoire au sens de l'article 75 du Code général des Impôts.

Rappelons que ces activités peuvent prendre la forme de location de logements, de gîtes ruraux, de chambres d'hôtes, de caravanes fixes ou de location de terrains de campement.

Votre rapporteur tient à souligner que pour les activités de valorisation (transformation et commercialisation) et de restauration, le renvoi à l'article 75 du Code général des Impôts est absent.

Par ailleurs, la portée de ces dispositions est relativement limitée puisqu'elle ne concerne que les livres III et IV (nouveaux) du Code rural. Ces mesures n'auront donc aucune incidence sur le statut fiscal et social des exploitants.

L'avant-dernier alinéa de l'article 6 du projet de loi reprend une disposition insérée à l'article 40 de la loi d'orientation sur la pêche maritime pour intégrer les activités de cultures marines dans le champ des activités agricoles. Cette reprise était nécessaire pour assurer l'égalité de traitement des exploitants, qu'ils relèvent de la mutualité sociale agricole ou du régime de protection sociale des marins, c'est-à-dire de l'ENIM (établissement national des invalides de la marine) auquel sont affiliés les trois quarts des exploitants d'entreprise conchylicoles. L'assimilation des cultures marines aux activités agricoles ouvre aux aquaculteurs marins le droit de bénéficier notamment des aides à l'installation ou des procédures applicables aux exploitations en difficulté.

Le dernier alinéa de cet article vise -opportunément- à indexer le seuil de 200.000 francs figurant à l'article 75 du Code général des Impôts sur l'évolution des prix à la consommation.

3. L'examen de ce dispositif par votre commission

a) L'analyse du dispositif

Par sa référence au caractère accessoire que doivent avoir les activités de restauration, d'hébergement et de loisirs, par le fait que le caractère agricole de ces activités serait reconnu au regard d'une partie seulement de la législation, la nouvelle définition s'avère particulièrement défavorable aux agriculteurs.

Une telle définition va à l'encontre de la notion de principe de multifonctionnalité de l'agriculture reconnue à l'article 1er. Elle constitue une limitation dommageable des activités concernées et une source d'accroissement des contentieux.

Votre rapporteur déplore la restriction ainsi apportée par l'article 6. Alors que le contrat territorial d'exploitation, considéré comme la pierre angulaire du présent projet de loi, consacre la multifonctionnalité de l'agriculture et a justement pour objectif d'inciter les exploitations agricoles à développer un projet économique global qui intègre les fonctions économique, environnementale et sociale de l'agriculture, cet article interdit toute possibilité de diversification viable dans un cadre agricole.

Par ailleurs, le projet de définition de l'activité agricole marque une régression sensible par rapport à la définition juridique en vigueur, sur la base de critères qui apparaissent peu pertinents. Il introduit en effet la notion d'accessoire pour la quasi-totalité des activités de diversification (restauration, hébergement, loisirs). La mise en oeuvre de ce critère a pour effet d'exclure des activités agricoles les activités de diversification qui dépassent la notion d'accessoire quand bien même celles-ci seraient intimement liées à l'activité de production animale et végétale.

Rappelons que la règle de l'accessoire, définie en la matière, est particulièrement stricte puisqu'elle fait référence aux seuils fiscaux de 200.000 francs et de 30 % des recettes agricoles. Par exemple, les exploitants agricoles dont le montant annuel des recettes agricoles est de 400.000 francs ne pourront exercer des activités de diversification de nature agricole que dans la limite de 120.000 francs (400.000 x 30 % = 120.000).

Dans ces conditions, la quasi-totalité des exploitations qui se sont spécialisée dans l'agritourisme en mettant en place un dispositif économiquement viable, tel que les fermes auberges seraient exclues du secteur agricole.

De plus, le projet de loi limite la portée du caractère agricole donné aux activités de diversification aux seuls livres III et IV du code rural, quand bien même ces activités respecteraient la condition de l'accessoire. La nouvelle définition juridique de l'activité agricole est donc doublement restrictive par rapport à la situation actuelle.

Ajoutons que le projet de loi ne fait référence aux seuils fiscaux de l'article 75 du CGI, pour définir la notion d'accessoire, que pour les activités de travaux et d'hébergement, et n'applique pas expressément ce seuil pour l'activité de restauration.

Faut-il en conclure qu'il y aurait deux types d'" accessoire " selon la nature des activités ?

Soulignons en outre que les activités de diversification cessant d'être plus considérées comme agricoles sur le plan juridique, seraient considérées comme commerciales ou artisanales, ce qui aurait pour conséquences :

- l'immatriculation aux répertoires professionnels non-agricoles.

Les intéressés devraient se faire immatriculer, soit au registre du commerce en tant que commerçants, soit au répertoire des métiers en tant qu'artisans, soit à l'un et à l'autre si les activités désormais considérées comme non-agricoles ont une double nature.

- une incompatibilité avec le statut du fermage.

L'exercice d'activités non-agricoles pose un problème de compatibilité avec le statut du fermage, notamment lorsque ce type d'activités est exercé dans le cadre de biens loués soumis au statut des baux ruraux. Selon la jurisprudence la plus récente, l'exercice d'activités commerciales dans le cadre de biens loués soumis au statut du fermage constitue une cause de résiliation du bail et peut ainsi entraîner la suppression de tout ou partie de l'outil de travail.

Il faudrait, pour parer à ce risque, scinder le bail rural initial en deux nouveaux baux, un bail rural pour l'activité agricole restante et un bail soumis au statut des baux commerciaux pour l'activité commerciale ou artisanale.

Cette solution n'est toutefois que théorique, car dans la pratique il n'est pas certain que les bailleurs l'acceptent. De plus, dans l'hypothèse où cette solution serait retenue par les parties, la partie des biens loués au titre du statut des baux commerciaux ferait sans aucun doute l'objet d'une majoration sensible du loyer puisque le prix des loyers des baux commerciaux est libre, à la différence du loyer des baux ruraux.

- la remise en cause du développement des activités de diversification dans les zones agricoles.

La qualification non agricole des activités de diversification remet totalement en cause la possibilité d'obtenir des permis de construire dans les zones non constructibles affectées à un usage agricole dans les communes dotées d'un plan d'occupation des sols. Elle aurait donc pour effet d'interdire toute implantation ou extension nouvelle puisque les zones NC sont justement réservées à un usage agricole. Le Conseil d'Etat est intransigeant sur ce principe.

De même, la règle de constructibilité limitée concernant les communes non dotées de plans d'occupation des sols serait, dans ces conditions, appliquée avec une sévérité accrue remettant en cause toute possibilité de développement, voire d'implantation des activités de diversification, même au sein des exploitations.

Enfin, l'article 6 soulève de multiples problèmes dont les effets peuvent largement dépasser la seule sphère de l'activité agricole.

- une incertitude sur le plan social

Les conséquences d'une définition juridique restrictive de l'activité agricole sont difficiles à apprécier sur le plan social. La définition sociale est, en effet, régie par l'article 1114 du code rural alors que la définition juridique en cours de remaniement est celle de l'article L.311-1 du code rural.

La nouvelle définition risque néanmoins de semer le trouble et de susciter un certain nombre de contentieux à l'initiative des régimes sociaux compétents pour les professions non salariées non agricoles.

Par ailleurs, il ne serait pas surprenant, à terme, que la définition sociale soit peu à peu harmonisée avec la nouvelle définition juridique pour assurer une certaine cohérence entre les deux définition comme la loi du 23 décembre 1990, loi complémentaire à la loi d'adaptation agricole du 30 décembre 1988. A défaut de mise en cohérence, il sera pour le moins paradoxal que les professionnels concernés soient considérés comme commerçants sur le plan juridique et agriculteurs sur le plan social.

Au-delà de cette incohérence, il y a un réel risque pour que les activités de diversification, désormais considérées comme non-agricoles sur les plan juridique, peu à peu ne puissent plus relever du régime social agricole quand bien même la définition sociale ne serait pas expressément harmonisée avec la nouvelle définition juridique.

En effet, la rédaction actuelle de la définition sociale de l'activité agricole est relativement floue et repose sur une jurisprudence fragile de la Cour de cassation. Il est fort possible que la Cour de cassation soit influencée par une nouvelle définition juridique restrictive et plus précise et fasse application de la notion de l'accessoire à la définition sociale de l'activité agricole.

Une telle situation générera des contentieux d'affiliation dont les exploitants concernés feront les frais, tenaillés entre les deux régimes sociaux, qui vont à nouveau s'affronter devant les juridictions compétentes, alors que leurs champs de compétence respectifs étaient à peu près stabilisés depuis quelques années.

Dans l'hypothèse où les activités " litigieuses " ne pourraient plus relever du régime social agricole, les exploitants retomberaient en situation de pluriactivité pure et simple avec les inconvénients que cela comporte : formalisme administratif supplémentaire en raison de l'affiliation obligatoire à deux régimes sociaux différents, risques de cotisations sociales plus élevées, risques de prestations moindres.

De même, il est à craindre que la jurisprudence de la Cour de cassation, qui avait rétabli une égalité de traitement justifiée entre les loueurs de gîtes ruraux agriculteurs et non-agriculteurs, soit remise en cause au détriment des seuls agriculteurs.

- le risque d'une remise en cause de certaines réglementations économiques agricoles

La nouvelle définition de l'activité agricole pourra avoir une incidence sur la réglementation économique agricole qui a justement été harmonisée avec la définition juridique actuelle.

En effet, la réglementation concernant les aides à l'installation et les plans de modernisation régie par la partie réglementaire du livre III du code rural devra-t-elle être mise en conformité avec la nouvelle définition de l'activité agricole pour permettre la prise en compte des activités de diversification selon les nouvelles limites ?

Ou cette réglementation sera-t-elle maintenue en l'état pour aboutir au financement de projets qui, en fin de compte, ne seront pas considérés comme agricoles mais comme commerciaux ?

- La remise en cause de l'emploi des termes " ferme " et " fermier "

Les prestations agritouristiques proposées par les agriculteurs utilisent très souvent des dénominations qui comprennent les termes " ferme " ou " fermier ". Ces dénominations peuvent éventuellement avoir fait l'objet d'un dépôt de marque auprès de l'INPI. L'emploi de ces mentions valorisantes est strictement encadré afin d'éviter un usage abusif de nature à tromper les consommateurs. Il en est ainsi des dénominations telles que ferme-auberge, ferme de séjour ou ferme-équestre.

Sur ce sujet, un consensus s'est établi pour considérer que si toutes les productions fermières sont des productions agricoles, toutes les productions agricoles ne sont pas nécessairement des productions fermières. En toute hypothèse, le postulat de base est que les productions fermières doivent être des productions agricoles.

Dans le cas où la définition juridique de l'activité agricole exclurait un certain nombre d'activités de diversification du giron agricole en considérant qu'il s'agit d'activités commerciales, qu'en sera-t-il dans ces conditions de l'usage des termes précités ?

Faudra-t-il considérer que les fermes-auberges, fermes de séjour et fermes équestres, dont les conditions économiques de fonctionnement n'auront aucunement été modifiées, ne pourront plus faire emploi des appellations valorisantes qui caractérisent leur identité et déterminent leur viabilité économique ?

Ou pourra-t-on considérer que les activités fermières pourront éventuellement être des activités commerciales ?

- L'exercice d'activités non-agricoles dans le cadre des sociétés civiles agricoles et le risque de retrait d'agrément des GAEC

Dans le cas où les activités de diversification sont juridiquement qualifiées de commerciales, il apparaît évident que celles-ci ne peuvent plus être maintenues au sein de sociétés civiles dont l'objet est agricole, notamment si ces activités revêtent une certaine importance. D'ailleurs, le maintien de ces activités au sein des sociétés civiles agricoles pose très souvent un problème fiscal en raison du passage obligatoire à l'impôt sur les sociétés.

Au-delà de ce problème général concernant l'ensemble des sociétés agricoles, la qualification non-agricole des activités de diversification pose un problème particulier pour les GAEC, qui relèvent d'une réglementation particulière. Les GAEC font l'objet d'un agrément administratif qui leur permet de bénéficier du principe de la transparence, principe qui caractérise ce type de société. Ce principe n'est acquis que dans la mesure où les différents associés respectent un certain nombre de règles. Ainsi, les associés doivent notamment être agriculteurs à titre principal. De façon plus précise, le ministère de l'agriculture indique par une note de service récente (note de service DEPSE/SDSEA/N98-7035du 30 septembre 1998) que d'une manière générale, il est nécessaire de ne pas admettre qu'un associé de GAEC conserve une activité rémunérée à l'extérieur du GAEC sauf dans les zones de montagne ou défavorisées.

Dans ces conditions, la requalification de certaines des activités des agriculteurs en activités commerciales risque de remettre en cause l'agrément des GAEC qui ont mis en place ce type d'activités.

Il faut rappeler que le retrait d'agrément a pour conséquence immédiate de mettre fin au principe de la transparence, notamment sur le plan fiscal et économique, et remet en cause la viabilité de ces sociétés.

b) La proposition de la Commission

Face à un tel constat, votre rapporteur a souhaité que les différentes parties prenantes négocient afin de parvenir à un texte de compromis.

Ce texte de conciliation n'étant pas encore élaboré, votre rapporteur vous propose de supprimer cet article et d'en revenir, pour l'instant, au droit en vigueur
.

Votre commission vous propose de supprimer cet article.

Article 7 -
(Article L.311-2 du Code rural) -

Registre de l'agriculture

Cet article donne une nouvelle rédaction à l'article L.311-2 du code rural relatif au registre de l'agriculture.

1. Le droit en vigueur


L'article L.311-2, dans sa rédaction actuelle, indique que toute personne physique ou morale qui exerce des activités agricoles doit être immatriculée sur un registre de l'agriculture, cette formalité ne dispensant pas d'une éventuelle immatriculation au registre du commerce et des sociétés.

Cette disposition, adoptée par analogie avec le répertoire des métiers du secteur artisanal, est issue de l'article 3 de la loi n° 88-1202 du 30 décembre 1988 relative à l'adaptation de l'exploitation agricole à son environnement économique et social.

Cet article, repris du projet de loi de modernisation, dispose que toutes les personnes physiques ou morales qui produisent et effectuent des livraisons ou des ventes de produits agricoles doivent être inscrites à un registre de l'agriculture. Il s'inspire des conclusions du rapport Gouzes, qui reprennent elles-mêmes une ancienne revendication des organisations professionnelles agricoles.

Il vise à mieux définir la profession d'agriculteur au plan tant fiscal que social ou juridique. Toute personne inscrite au registre de l'agriculture serait présumée, sauf preuve contraire, avoir la qualité d'agriculteur exploitant et serait soumise à toutes les conséquences attachées à cette qualité.

Pour présenter un réel intérêt, le registre aurait dû être conçu de manière assez ambitieuse afin de permettre une meilleure connaissance des entreprises agricoles et de la situation des secteurs de production rendant possible le contrôle du respect des obligations sanitaires, sociales et fiscales et afin d'éviter des distorsions de concurrence au détriment des agriculteurs. En distinguant éventuellement les personnes qui exercent l'activité agricole à titre principal et auxquelles la loi reconnaît le statut d'agriculteur, le registre aurait pu être une source privilégiée d'information sur la situation juridique des personnes. Par ailleurs, ce registre aurait pu être un excellent outil pour des études économiques et pour la mise en oeuvre d'une certaine forme de publicité à l'égard des tiers.

L'application de cet article est restée lettre morte et ce pour plusieurs raisons :

- l'absence de volonté de la part de l'administration ;

- l'absence de désignation de l'organisme à même de tenir ce registre ;

- l'absence de sanctions applicables.

2. Le dispositif proposé

Le texte proposé pour l'article L.311-2 est composé de quatre alinéas.

Il est précisé, dans le premier alinéa que cette immatriculation de toute personne physique ou morale exerçant des activités agricoles ne concerne pas les activités forestières, ainsi que les cultures marines. L'exclusion des cultures marines -qui font l'objet de dispositions particulières conformément au troisième alinéa- apparaît logique puisque, bien qu'étant des activités agricoles, ces exploitants sont souvent inscrits au cadastre conchyclicole tenu par les directions départementales des affaires maritimes et au registre des concessions attribuées, géré par le centre administratif des affaires maritimes : en effet, l'exercice d'une activité de cultures marines s'exerce le plus souvent sur le domaine public maritime ou nécessite une prise d'eau, ce qui impose l'obtention d'une concession.

Cette immatriculation, mise en place par la chambre d'agriculture, est effectuée sur la base de la déclaration de l'exploitant qui mentionne la " forme juridique et la consistance de la ou des exploitations sur lesquelles " l'exploitant travaille.

En outre, cette inscription et le registre de l'agriculture sont accessibles au public.

Le deuxième alinéa du nouveau texte proposé pour l'article L.311-2 reprend le texte en vigueur en précisant que l'inscription à ce registre ne dispense pas, le cas échéant, de l'immatriculation au registre du commerce et des sociétés.

Le dernier alinéa prévoit un décret en Conseil d'Etat.

Ce registre pourrait être un outil de transparence et de connaissance de la profession agricole.

Certains souhaiteraient d'ailleurs associer à ce registre une carte professionnelle qui permettrait, notamment dans certains secteurs d'activité bien spécifiques comme l'horticulture et les pépinières, d'identifier clairement les professionnels en règle avec l'administration et les services fiscaux.

Votre rapporteur reconnaît qu'en effet, la délivrance d'une carte professionnelle a été demandée à plusieurs reprises par les professionnels de l'horticulture. Le groupe de travail " fruits et légumes " du Sénat, présidé par notre collègue Jean Huchon, a d'ailleurs recommandé la mise en place de ce dispositif.

Votre rapporteur approuve la notion de carte professionnelle. Il considère, néanmoins, que face à l'échec depuis dix ans du registre agricole, il ne serait pas raisonnable aujourd'hui d'instaurer à la fois le registre et la carte professionnelle : avant d'imposer par la loi un mécanisme nouveau, autant s'assurer tout d'abord que le registre fonctionnera cette fois-ci réellement. Votre rapporteur souhaite donc que le décret en Conseil d'Etat prévu au dernier alinéa soit le plus précis possible afin de rendre opérationnel cet outil.

Par ailleurs, sans aller jusqu'à proposer un amendement relatif aux sanctions en cas de défaut d'immatriculation au registre de l'agriculture -alors que tels est le cas pour le registre des sociétés- votre rapporteur vous proposera à l'article suivant de lier l'inscription sur les listes électorales pour les chambres d'agriculture à l'immatriculation au registre de l'agriculture.

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 7 -
(Article L.511-8-1 du code rural)

Cet article vise à lier l'inscription sur la liste élctorale pour les chambres d'agriculture à celle du registre de l'agriculture.

Dix années n'ont pas permis au registre de l'agriculture de s'imposer dans le monde agricole.

En liant l'inscription sur la liste électorale pour les chambres d'agriculture à celle du registre de l'agriculture, votre rapporteur considère qu'une telle disposition incitera fortement les agriculteurs à s'acquitter de cette formalité.

C'est pourquoi votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

Article 7 bis -
(Article L.311-5 du Code rural) -

Définition de l'exploitant agricole

Cet article vise à donner une définition de l'exploitant agricole en insérant un article L.311-5 dans le Code rural.

Selon les termes de ce nouvel article L.311-5, est définie comme exploitant agricole toute personne physique qui, soit individuellement, soit au sein d'une société, remplit les conditions cumulatives suivantes :

- exerce une activité au sens de l'article L.311-1 à titre professionnel ;

- assure la surveillance et la direction de l'exploitation ;

- participe de façon effective aux actes nécessaires à l'exploitation. Cette condition devrait permettre d'éviter la prise de contrôle des exploitations par des apporteurs de capitaux et la mise sous tutelle des agriculteurs par le biais de processus poussés d'intégration ;

- bénéficie des résultats de l'exploitation ou en supporte les pertes.

Signalons que cette définition de l'exploitant agricole est sans effet sur les textes communautaires. Par ailleurs, placée en tête du livre III du Code rural, cette définition peut devenir la référence chaque fois que dans ce livre est évoquée la notion d'exploitant.

Votre rapporteur vous propose un amendement visant à compléter la liste des conditions que doit remplir tout professionnel pour être considéré comme exploitant agricole. Ce dernier doit être immatriculé au registre de l'agriculture et ne doit pas être titulaire d'un contrat de travail.

A défaut d'adopter une telle mesure, les salariés détenant quelques parts dans une SCEA et exerçant des fonctions de direction (chef de culture par exemple) pourraient être considérés comme des exploitants agricoles. Les possibilités de détournement de la réglementation seraient alors aisées.

Cependant, la référence au contrat de travail et non à la position de salarié que peuvent détenir les mandataires sociaux peut conduire à considérer comme exploitants les PDG de sociétés anonymes et autres associés exploitant de SARL, qui sont considérés comme salariés mais ne sont pas réellement subordonnés.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 8 -
(Article L.411-1 du Code rural) -

Champ d'application du statut du fermage

Cet article vise à modifier le premier alinéa de l'article L.411-1 du Code rural en prévoyant que toutes les activités agricoles, telles qu'elles sont définies à l'article L.311-1, peuvent être exercées dans le cadre du statut du fermage.

1. Le droit en vigueur


L'article L.411-1 du Code rural a été introduit dans le Code rural par les lois des 4 juillet 1980 et 1er août 1984. Il a pour objectif essentiel de préciser le domaine d'application du statut du fermage, afin d'enrayer la multiplication des " contrats de façade " ; il tend également à faciliter la résolution de quelques difficultés, comme la preuve du bail par exemple.

Selon les termes du premier alinéa de l'article L.411-1 du code précité, est considéré comme bail agricole :

- la mise à disposition : ces termes expriment de façon concrète la délivrance du bien loué impliquée par tout contrat de louage. Le bailleur doit procurer au preneur la jouissance d'un fonds agricole. Cette obligation suppose nécessairement une " mise à disposition " du fonds ;

- à titre onéreux : le prix est un élément nécessaire pour caractériser le contrat de louage. La mise à disposition d'un bien à titre gratuit est constitutive d'un prêt à usage (ou commodat) et non d'un bail. L'appréciation du caractère gratuit de la convention peut susciter des difficultés. Ce caractère disparaît dès que des services ou des prestations en nature sont fournis. Ainsi, lorsque le propriétaire laisse la jouissance d'une terre moyennant l'obligation de cultiver des biens lui appartenant ou de pourvoir à tous ses besoins, la convention, quelle que soit sa dénomination, est constitutive d'un bail. L'occupant d'une parcelle qui, en contrepartie de la jouissance du fonds, livre à une coopérative une quantité de céréales pour le compte du propriétaire, est également fondé à se prétendre titulaire d'un bail rural ;

- d'un immeuble à usage agricole : par hypothèse, la mise à disposition doit avoir pour objet un immeuble agricole. Cette exigence s'apprécie en fonction des caractéristiques du bien. Ainsi, une cave vinicole, de par sa nature même, est un immeuble à usage agricole. Les bâtiments destinés à un élevage hors sol répondent aussi à cette définition. En revanche, n'entre pas dans le champ d'application du statut le contrat qui porte sur des terrains forestiers ou sur des landes et maquis non susceptibles de culture et qui ne peuvent être considérés comme des terres à pâturages ;

- en vue de l'exploiter : le caractère agricole de l'immeuble mis à disposition ne suffit pas à entraîner l'application du statut du fermage. Il faut, en outre, que la convention ait été conclue en vue de l'exploitation agricole, c'est-à-dire d'une activité se caractérisant par la maîtrise d'un cycle biologique de caractère végétal ou animal.

2. Le dispositif proposé

L'article 8 du projet de loi d'orientation agricole vise à insérer après le terme " exploiter " l'expression " pour y exercer une activité agricole définie à l'article L.311-1 ". Cet ajout permet de prendre en compte la multifonctionnalité de l'agriculture consacrée à l'article L.311-1 du code précité et permet aux preneurs de sécuriser leurs engagements dans de nouvelles activités agricoles situées dans le prolongement de l'acte de production ou ayant pour support l'exploitation agricole.

En effet, traditionnellement il y a bail agricole, dès lors que le fonds est loué en vue d'exploiter l'immeuble à usage agricole, c'est-à-dire de mettre en culture. A partir du moment où l'agriculteur, notamment dans son CTE, oriente et diversifie son activité vers la restauration, l'accueil à la ferme..., il est logique qu'il puisse conserver la location de son fonds puisque son activité reste agricole, même si elle est différente d'une activité centrée exclusivement sur la production.

Votre rapporteur approuve cette harmonisation du champ d'application du statut du fermage avec la définition de l'activité agricole.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 9 -
(Article L.411-27 du code rural) -

Protection du preneur appliquant des méthodes culturales favorables à l'environnement

Cet article vise à compléter l'article L.411-27 du Code rural afin de protéger le preneur qui applique des méthodes culturales favorables à l'environnement.

1. Le droit en vigueur


Si le preneur dirige librement son exploitation, outre le paiement du loyer ou du fermage, il est soumis à certaines obligations issues non seulement du droit commun du bail (telle que l'obligation d'user de la chose en bon père de famille), mais aussi au caractère particulier du bail à ferme.

L'article L.411-25 du code rural précise l'obligation d'engranger dans les lieux destinés à cet effet ; l'article L.411-26 définit l'obligation du preneur d'informer le bailleur des usurpations connues au détriment du fonds ; l'article L.411-28 sanctionne la suppression d'obstacles à la réunion de parcelles (talus, haies, rigoles...) ; l'article L.411-29 prévoit l'accord du bailleur lorsque le preneur souhaite retourner les terres ou effectuer un changement des modes de cultures.

C'est dans ce cadre juridique que l'article L411-27 impose plusieurs obligations aux preneurs :

- garnir le fonds rural des bestiaux et des ustensiles nécessaires à son exploitation ;

- ne pas changer de destination le bien loué en abandonnant la culture ;

- exploiter en bon professionnel ;

- ne pas employer la chose louée à un autre usage que celui auquel elle a été destinée ;

- exécuter les clauses du bail afin d'éviter un dommage pour le bailleur.

Le bailleur peut, suivant les circonstances, faire résilier le bail et obtenir des dommages et intérêts.

Néanmoins, en vertu de l'article L.411-31 renvoyant à l'article L.411-53-2°, la résiliation ne peut être prononcée que dans la mesure où la réorientation de la production ou le changement d'activités est de nature à compromettre " la bonne exploitation du fonds ".

Rappelons que les manquements qui causent un préjudice à l'exploitation du fonds ou, qui affectent la valeur des biens loués sont appréciés souverainement par les juges du fonds.

Lorsqu'un preneur met en oeuvre des méthodes culturales favorables à la protection de l'environnement, une baisse de productivité peut survenir. Les articles L.411-27 et 411-31 pourraient ainsi conduire le bailleur à demander la résiliation du bail conformément au droit en vigueur.

2. Le dispositif proposé

Afin d'éviter une telle difficulté, l'article 9 du projet de loi précise que si le preneur applique des méthodes culturales ayant pour objet de protéger :

- l'environnement,

- la qualité de l'eau et des produits,

- la biodiversité,

Le bailleur ne peut pas demander la résiliation du bail, pour le seul motif d'une " la mauvaise exploitation du fonds ".

Votre rapporteur approuve cette mesure de précaution qui vise à assurer la sécurité juridique des relations entre les deux parties.

Il vous propose néanmoins un amendement relatif à l'épandage des boues. En effet, actuellement, certains propriétaires demandent la résiliation du bail dès lors que des boues urbaines ont été épandues, alors même qu'elles étaient conformes aux prescriptions réglementaires, techniques et sanitaires en vigueur.

Il est nécessaire aujourd'hui, à la fois, de donner une sécurité juridique au preneur qui accepte l'épandage, mais aussi de tenir compte de l'intérêt du bailleur puisque ce dernier doit avoir l'assurance du respect de toutes les normes en vigueur.

Ce problème étant délicat, la commission a adopté cet amendement sous réserve que le rapporteur puisse le retirer en séance publique en fonction des explications du ministre.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 10
(Article L.411-33 du code rural)

Résiliation du bail et contrôle des structures

Cet article tend à compléter l'article L.411-33 du code rural compte tenu des nouvelles dispositions relatives au contrôle des structures des exploitations agricoles inscrites à l'article 16 du projet de loi.

1. Le droit en vigueur


L'article L.411-33 prévoit trois cas dans lesquels le preneur peut demander la résiliation du bail pour impossibilité de poursuivre le travail :

- lorsque l'un des membres de sa famille, indispensable au travail de la ferme, ou lui-même est frappé d'incapacité grave et permanente ;

- lorsque la famille est amputée d'un ou de plusieurs de ses membres indispensables au travail de la ferme, par suite de décès ;

- lorsque le preneur a acquis une autre ferme qu'il doit exploiter lui-même

Dans tous ces cas, la résiliation prend effet dans les conditions fixées à l'article L.411-34, dernier alinéa, du code rural.

Rappelons que cette liste n'est pas limitative. D'une part, le droit commun permet au fermier de faire résilier son bail en cas de manquement du bailleur à ses obligations. D'autre part, plusieurs textes spéciaux du code rural ou du code de l'urbanisme lui reconnaissent également la faculté d'exiger qu'il soit mis fin au contrat.

2. Le dispositif proposé

L'article 10 du projet de loi prévoit une nouvelle hypothèse dans laquelle le preneur peut demander la résiliation du bail : il s'agit de l'absence d'autorisation administrative de poursuivre l'exploitation, comme cela est prévu à l'article 16 du projet de loi qui modifie l'article L.331-2 du code rural.

L'article 16 du projet de loi énonce en effet, pour le quatrième alinéa de l'article L.331-2, que " toute diminution du nombre total des associés exploitants au sein d'une exploitation est assimilée à un agrandissement au bénéfice des autres associés et entraîne pour ceux-ci l'obligation de solliciter une autorisation préalable pour continuer l'exploitation dès lors que l'exploitation en cause a une superficie supérieure au seuil... " fixé par le schéma directeur départemental des structures.

Les exploitants qui restent dans la structure sociétaire ont donc le choix entre deux possibilités :

- soit ils trouvent un nouvel associé pour remplacer le partant,

- soit ils ramènent la taille de l'exploitation à une superficie conforme aux normes du schéma départemental.

Afin de permettre la mise en oeuvre de la seconde option, donc la réduction de la surface d'exploitation, pour les associés soumis au statut du fermage, l'article 10 prévoit que le preneur peut demander la résiliation du bail s'il n'a pas obtenu l'autorisation de poursuivre l'exploitation.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 10 bis -
(Article L.411-37 du code rural) -

Mise à disposition de biens loués au profit d'une société

Cet article modifie la rédaction de l'article L.411-37 du code rural en précisant les conditions dans lesquelles un preneur associé d'une société principalement agricole peut mettre à disposition de celle ci tout ou partie des biens dont il est locataire pour la durée du bail restant à courir.

1. Le principe de l'interdiction de la sous-location


En matière de transmission entre vifs du bail rural, l'article L.411-35, alinéa 3 du code rural interdit au preneur de sous -louer. Il existe néanmoins des exceptions à l'interdiction de sous-louer ou de céder : il s'agit :

- de sous-location et d'échanges permis dans des cas spécifiques (échange en jouissance, sous-location de parcelles, hébergement des parents) ;

- de cession au profit du conjoint ou de descendants ;

- d'adhésion à une société, deux hypothèses étant visées : d'une part lorsque le preneur apporte son droit au bail à une société civile d'exploitation (article L.411-38 du code rural) ; d'autre part en cas de mise à la disposition d'une société des biens loués. Cette dernière possibilité est prévue par l'article L.411-37 du code rural. Elle ne concerne pas les GAEC. Cette opération n'est pas juridiquement un apport. Elle s'analyse comme une sous-location ou un prêt à usage si elle a un caractère gratuit. La tendance de la doctrine est de conclure néanmoins, dans ce cas, à un contrat innommé, engendrant une " coexploitation ".

2. L'article L.411-37 du code rural

L'article L.411-37 du code rural est issu des lois n° 79-1115 du 22 décembre 1979 et n° 88-1202 du 30 décembre 1988.

Les conditions de mise à disposition

Conditions relatives à la société bénéficiaire :

- la mise à disposition peut être faite soit à une société dotée de la personnalité morale, soit à une société en participation. Dans cette seconde hypothèse, la société doit être régie par des statuts établis par un écrit ayant acquis date certaine. La loi autorise donc l'opération aussi bien avec une société civile (et particulièrement une EARL) qu'avec une société à forme commerciale ou une coopérative 27( * ) . L'objet social doit être principalement agricole. Enfin, seules des personnes physiques peuvent être membres de la société (associés).

Conditions relatives au preneur à ferme

Le fermier a l'obligation d'aviser préalablement le bailleur par lettre recommandée avec accusé de réception. L'avis doit, à peine de nullité, indiquer les noms et prénoms des associés, les parcelles mises à la disposition de la société (l'opération peut porter sur tout ou partie des biens loués), la durée de celle-ci, sa forme et son objet. Le bailleur ne peut pas s'opposer à la mise à disposition.

Cette obligation d'information est une formalité primordiale. Son omission est rigoureusement sanctionnée. En l'absence d'information préalable du bailleur, le transfert de jouissance opéré au profit de la société s'analyse, en effet, comme une cession prohibée par l'article L.411-35 du code rural et la résiliation du bail est encourue.

Au cours de la vie sociale, le fermier doit avertir le bailleur de tout changement intervenu dans les éléments énumérés ci-dessus, ainsi que du fait qu'il cesse de faire partie de la société ou de mettre le bien loué à la disposition de celle-ci. L'avis doit être adressé dans les deux mois par lettre recommandée avec accusé de réception. L'inobservation de cette formalité entraîne la résiliation du bail. La sanction du défaut d'information ne sera pas, cependant, toujours appliquée car le juge dispose d'un libre pouvoir d'appréciation pour la prononcer. La loi prévoit, en effet, que la nullité ou la résiliation ne sont pas encourues si les omissions ou les irrégularités constatées n'ont pas été de nature à induire le bailleur en erreur.

En cas de métayage, la mise à disposition du bail est subordonnée à l'agrément personnel du bailleur. Le métayer doit convenir préalablement avec lui et avec la société, de la manière dont il sera fait application au bien loué des dispositions spéciales du statut de métayage (C. Rur., art. L.411-10) Cette obligation exclut tout accord tacite du bailleur. Le métayer qui la méconnaît encourt la résiliation du bail.

Les conséquences de la mise à disposition

Effets à l'égard du preneur. A la différence de l'apport en propriété, la mise à disposition ne transfère pas à la société le droit au bail. Le preneur reste seul titulaire du bail. La durée de la mise à disposition est, de ce fait, liée à celle du bail : elle ne peut excéder la durée pendant laquelle le preneur en reste titulaire.

La mise à disposition ne dispense pas le preneur d'exploiter. La loi précise, en effet, qu'il doit participer sur les lieux, de manière effective et permanente, à la mise en valeur du bien loué. Cette obligation est imposée à peine de résiliation.

L'opération ne donne pas lieu à l'attribution de parts. En revanche, la cession des améliorations que le preneur justifie avoir faites sur le fonds autorise l'attribution de parts.

Effets à l'égard des autres associés. Tous les membres de la société ont la stricte obligation de participer à la mise en valeur des biens qu'elle exploite, dans les mêmes conditions que le preneur. Si l'un ou plusieurs des associés cessent de remplir la condition d'exploitation, le preneur peur, nonobstant toute stipulation contraire, mettre fin à tout moment à la mise à disposition. Si cette situation a persisté plus d'un an après que le bailleur ait mis le preneur en demeure de la régulariser, le bail peut être résilié. Ce délai est porté à deux ans en cas de décès de l'un des associés. Il peut en outre être prolongé par le tribunal paritaire en cas de force majeure.

Effets à l'égard de la société. Si la société bénéficiaire jouit de la personnalité morale, elle est tenue indéfiniment et solidairement avec le preneur de l'exécution des clauses du bail.

Effets à l'égard du bailleur. Les droits du bailleur ne sont pas modifiés : c'est toujours le même bail avec le même preneur qui s'exécute. Ses garanties, en revanche, sont renforcées.

3. Le dispositif proposé par l'article 10 bis du projet de loi

Les modifications proposées par l'article 10 bis du projet de loi sont nombreuses :

- au premier alinéa de l'article L.411-37, l'information préalable du bailleur est remplacée par une information après la mise à disposition, au plus tard dans les deux mois qui suivent la mise à disposition ;

- le dernier alinéa est remplacé par deux nouveaux alinéas : cette rédaction simplifie, tout d'abord, les mentions qui doivent figurer dans l'avis. En outre, l'absence de certaines mentions dans l'avis adressé au bailleur n'entraîne pas la nullité de l'acte.

De plus, la résiliation du bail ne peut intervenir que si les informations que doit contenir l'avis n'ont pas été transmises dans un délai d'un an après mise en demeure par le bailleur par lettre recommandée avec demande d'avis de réception.

La formule de mise a disposition étant de plus en plus utilisée, le formalisme de l'article L.411-37 paraît excessif, surtout dans l'hypothèse où le preneur a contracté avec plusieurs propriétaires. De même, les sanctions lourdes prévues en cas de non respect des prescriptions de ce même article s'avèrent disproportionnés. Il ne s'agit en effet que d'une mise à disposition, le preneur reste titulaire du bail et les garanties du bailleurs sont renforcées. D'ailleurs la jurisprudence a interprété très restrictivement le texte de l'article L.411-37 en sanctionnant par la résiliation du bail des omissions pourtant mineures dans la procédure.

Ainsi l'article 10 bis du projet de loi propose d'alléger les procédures actuelles tout en maintenant une information suffisante du bailleur.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 10 ter (nouveau) -
(Article L.411-57 du code rural) -

Reprise d'une parcelle par le bailleur pour la construction d'une maison d'habitation.

Cet article propose une nouvelle rédaction de l'article L.411-57 du code rural en vue de permettre au bailleur de reprendre une parcelle pour y construire une maison d'habitation.

1. Le droit en vigueur


Tout preneur a droit en principe au renouvellement de son bail, nonobstant toutes clauses, stipulations ou arrangements contraires (art L.411-46 du code rural). Le renouvellement intervient automatiquement par le seul effet de la loi. Les causes de non-renouvellement peuvent tenir soit au preneur, soit au bailleur. Le refus de renouvellement par le bailleur, c'est-à-dire la délivrance du congé au preneur, peut avoir plusieurs origines : agissements fautifs du preneur, départ d'un copreneur...Lorsque le bailleur souhaite construire une maison d'habitation pour son usage ou celui de sa famille, il peut, au moment du renouvellement du bail, reprendre le terrain nécessaire. Le tribunal paritaire ne peut pas lui refuser cette faculté. Cette reprise justifie une réduction du prix du fermage.

Rappelons que ce texte, qui limite le droit au renouvellement, doit être interprété strictement. Il exclut la possibilité d'exercer la reprise pour loger toute autre personne et notamment un préposé salarié.

2. Le dispositif envisagé par le projet de loi

L'article 10 ter du projet de loi vise à étendre la possibilité pour le bailleur de reprendre une parcelle pour y construire une maison d'habitation. Le texte proposé pour ce nouvel article L.411-57 est composé de neuf alinéas :

- le premier alinéa autorise la reprise pour lui-même ou l'un des membres de sa famille, jusqu'au troisième degré inclus, par le bailleur d'une surface déterminée par arrêté du préfet, sur proposition de la commission consultative paritaire des baux ruraux ;

- les deuxième et troisième alinéas précisent les formalités que le bailleur doit respecter lors de cette reprise : délivrance du congé signifié au preneur dix-huit mois au moins avant la date d'effet de la reprise et détention d'un permis de construire. En outre cette faculté ne peut s'exercer qu'une seule fois au cours du bail initial ou de ses renouvellements successifs.

- Le quatrième alinéa prévoit une conséquence logique de cette reprise, c'est-à-dire la diminution du prix du fermage en fonction de la valeur de la surface reprise ;

- le cinquième alinéa précise que la construction de la maison d'habitation doit respecter les règles environnementales et de distance par rapport au siège de l'exploitation et aux bâtiments d'exploitation afin de prévenir tout différend ;

- le sixième alinéa exige que cette reprise s'exerce sans préjudice de l'application des articles L.411-69 à 411-78 du code rural relatifs à l'indemnité du preneur sortant.

- le septième alinéa précise que ce droit de reprise par le bailleur s'exerce dans des conditions identiques pour des " aisances ", c'est-à-dire quelques milliers de mètres carrés de terrain situés immédiatement autour ou à proximité immédiate de la maison d'habitation. Il paraît en effet logique de permettre à un bailleur qui veut construire d'avoir autour de la maison un minimum de terrain. Le huitième alinéa prévoit en outre qu'en cas de vente d'une maison d'habitation, le bailleur peut exercer son droit de reprise.

Pour l'application de ces deux alinéas, le neuvième alinéa précise que " les conditions d'octroi de permis de construire et de respect des règles de distance par rapport au siège de l'exploitation et aux bâtiments d'exploitation sont inopérantes ".

3. L'analyse de votre commission

Votre rapporteur est globalement tout à fait favorable à ce dispositif.

Il vous propose néanmoins quelques aménagements :

- s'il apparaît justifié de prévoir une dérogation à l'article L.411-32 du code rural en vue de permettre au bailleur de construire une maison d'habitation, il est logique d'imposer un délai de construction de deux années à compter de l'obtention du permis de construire afin d'éviter tout abus ;

- une nouvelle rédaction s'impose pour le septième alinéa du texte proposé pour cet article L.411-57 en raison du flou que revêt la notion de " proximité ";

- la suppression du huitième alinéa en raison de sa formulation très confuse.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 11 -

Travaux de mise aux normes des exploitations en fermage

Cet article modifie les articles L.411-69, L.411-71 et L.411-73 du code rural afin de faciliter la réalisation de travaux sur les exploitations agricoles placées sous le régime des baux ruraux.

1. Les modifications apportées à l'article L.411-69


L'article L.411-69, issu de la loi n° 67-560 du 12 juillet 1967, a trait à l'indemnisation au profit du preneur des améliorations apportées au fonds à l'expiration du bail, et ce, quelle que soit la cause de cette expiration.

Les lois du 12 juillet 1967, 15 juillet 1975, 1er août 1984 et 30 décembre 1988 assurent la sécurité des investissements effectués par les preneurs en perfectionnant les modalités de calcul du montant de l'indemnité, tout en assouplissant les formalités d'autorisation préalables à l'exécution des travaux.

Le dernier alinéa de l'article L.411-69, dans sa version actuelle, précise que le preneur qui effectue des réparations nécessaires à la conservation d'un bâtiment indispensable pour assurer l'exploitation du bien loué ou son habitation, bénéficie d'une indemnité. Toutefois, pour ouvrir droit à indemnité, ces réparations doivent remplir deux conditions :

- il faut qu'elles aient été effectuées avec l'accord préalable du bailleur ;

-- il faut qu'elles excèdent les obligations légales du preneur - c'est-à-dire les réparations locatives ou de menu entretien qui ne sont pas dues à la vétusté, à la force majeure ou au vice de construction de la matière.

Le paragraphe I de l'article 11 du projet de loi complète cet alinéa en assimilant à des améliorations les " travaux ayant pour objet de permettre d'exploiter le bien loué en conformité avec la législation ou la réglementation ". Il s'agit en fait de travaux de mise aux normes imposés par différentes réglementations d'origine européenne et nationale qui concernent principalement les activités d'élevage en application de la loi n° 76-663 du 19 juillet 1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement, du règlement sanitaire départemental et des directives communautaires concernant le bien-être des animaux.

Ces travaux souvent lourds constituent une obligation législative ou réglementaire. Il est donc tout à fait légitime que ceux-ci soient considérés comme ouvrant droit à une indemnité au preneur sortant.

2. Les modifications apportées à l'article L.411-71

L'article L.411-71 fixe les modalités de l'indemnité du preneur sortant

En ce qui concerne les bâtiments et ouvrages incorporés au sol, l'indemnité due au preneur sortant est égale au coût des travaux évalué à la date d'expiration du bail, réduit de  6 % par année écoulée depuis leur exécution. L'amortissement a donc, en principe, une durée de 16 ans et 8 mois (article L.411-71, 1°). En d'autres termes, pour calculer l'indemnité, il faut déduire du montant actualisé des travaux, l'amortissement et, le cas échéant, les frais de remise en état nécessités par l'absence d'entretien normal. Le coût de la main-d'oeuvre fournie par le preneur doit être pris en compte dans le montant des travaux, sauf dérogation expresse. L'amortissement des travaux peut être, toutefois, calculé sur une base différente pour les bâtiments d'exploitation, les bâtiments d'habitation et les ouvrages incorporés au sol. Dans chaque département, le préfet, après avis de la commission consultative des baux ruraux, peut en effet déroger au taux d'amortissement forfaitaire de 6 % par an, en arrêtant des tables d'amortissement. Celles-ci sont établies dans les limites déterminées par un barème national (articles L.411-71, 1° et article R.411-19).

En tout état de cause, l'indemnité n'est due que dans la mesure où les aménagements effectués conservent une valeur effective d'utilisation (article L.411-71, 1°). Cette formule signifie que la mesure de l'indemnité due par le bailleur est constituée par la valeur d'utilisation effective des ouvrages. Ainsi, un coefficient de réfaction peut être appliqué sur l'indemnité calculée si la valeur d'usage des ouvrages apparaît objectivement limitée ou diminuée. L'indemnisation peut être refusée lorsque les installations sont devenues inutiles ou les bâtiments obsolètes.

Pour les plantations, l'indemnité est égale à l'ensemble des dépenses qui auront été engagées par le preneur avant l'entrée en production des plantations. Dans cet ensemble de dépenses, on doit tenir compte de la valeur de la main-d'oeuvre. L'évaluation des dépenses est faite à la date d'expiration du bail.

De l'ensemble des dépenses servant de base de calcul à l`indemnité, on doit déduire un amortissement calculé à partir de la date d'entrée en production des plantations. De plus, l'indemnité pour plantations ne peut excéder le montant de la plus-value apportée au fonds par ces plantations (article L.411-71, 2°).

En cas de transformations et améliorations du sol, les travaux de transformation du sol en vue de sa mise en culture ou d'un changement de culture entraînant une augmentation du potentiel de production du terrain de plus de  20 %, les améliorations culturales et les améliorations foncières visées à l'article L. 411-28 du code rural ouvrent droit à indemnité dans la mesure où l'effet de ces travaux est susceptible de se prolonger après le départ du preneur.

L'indemnité est égale à la somme que coûterait l'exécution de ces travaux à l'expiration du bail déduction faite d'un amortissement dont la durée ne peut excéder 18 ans (code rural, art. L.411-71, 3°).

Le 4° de l'article L.411-71 du code rural ajoute, lorsque le bailleur met fin au bail en exerçant la reprise (pour lui-même ou au profit du conjoint ou d'un descendant, en application des articles L.411-6, L.411-58 et L.411-60), une règle particulière d'évaluation. L'indemnité est égale à la valeur, au jour de l'expiration du bail, des améliorations apportées compte tenu de leurs conditions techniques et économiques d'utilisation.

Ce mode de calcul concerne les travaux régulièrement exécutés en application des 1 et 3 de l'article L.411-73 (travaux nécessitant l'information du bailleur et travaux soumis à la procédure devant le comité technique départemental). Il ne s'applique pas, en revanche, aux plantations et aux constructions de maisons d'habitation ou de bâtiments de productions hors-sol.

L'article 11 du projet de loi complète l'article L.411-71 par un 5° prévoyant que le montant de l'indemnité du preneur sortant est identique à celui en vigueur pour les bâtiments et ouvrages incorporés au sol lorsqu'il s'agit de travaux imposés par l'autorité administrative, notamment les travaux de mise aux normes sus-mentionnés.

3. Les modifications apportées à l'article L.141-73

Dans sa rédaction due aux lois n° 84-741 du 1er août 1984 et 88-1202 du 30 décembre 1988, l'article L.411-73 énumère les différentes procédures que le preneur doit observer pour réaliser les améliorations qui n'ont pas été prévues par une clause du bail.

Votre rapporteur observe, qu'au fil des réformes, cet article a atteint un réel degré de complication.

Le paragraphe III complète l'article L.411-73 du code rural et l'article L.461-16 concernant les départements d'outre-mer. Il concerne les travaux imposés par l'autorité administrative, donc en l'absence d'accord du bailleur. La procédure proposée par le III de l'article 11 du projet de loi est la suivante :

Le preneur notifie au bailleur la proposition de réaliser les travaux.


le bailleur prend en charge les travaux dans un délai fixé en accord avec le preneur

 

-le bailleur refuse

ou

-le bailleur ne répond pas dans un délai de deux mois

ou

-le bailleur ne s'exécute pas dans le délai convenu avec le preneur

 

le preneur peut exécuter les travaux

Votre rapporteur approuve ce dispositif qui, sans modifier la charge des travaux concernés, allège la procédure permettant au preneur de réaliser ces travaux en lieu et place du bailleur défendant.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 11 bis -

Application des articles 8 à 11 aux baux en cours

Cet article vise à appliquer aux baux ruraux en cours les dispositions des articles 8 à 11 du projet de loi.

Il est, en effet, tout à fait logique que ces dispositions qui sauvegardent l'équilibre entre bailleurs et preneurs s'appliquent aux baux en cours afin d'éviter toute difficulté.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 12 -

Rapport sur l'assurance récolte

Cet article précise que le Gouvernement déposera devant le Parlement " un rapport sur les conditions de mise en oeuvre d'un mécanisme d'assurance-récolte et son articulation avec le régime des calamités agricoles ", dans un délai de six mois à compter de la promulgation de la loi d'orientation agricole.

Tous les secteurs économiques sont confrontés à des risques. La particularité de l'agriculture est d'avoir à faire face à des risques climatiques.

Afin dy faire face, la France a développé trois systèmes :

- les contrats d'assurances : ils permettent une garantie contre les dommages causés par la grêle aux récoltes sur pied. Rappelons que le dispositif l'assurance " grêle " est souscrit par environ deux tiers des agriculteurs ;

- l'assurance " catastrophes naturelles " : elle couvre les matériels et bâtiments agricoles, les récoltes engrangées et le bétail se trouvant à l'intérieur des bâtiments. Les biens non assurables comme les sols, les plantations, les installations piscicoles et aquacoles, les récoltes sur pied ou non engrangées et les cultures pérennes, sont exclus de ce mécanisme ;

- le système d'indemnisation des calamités agricoles, mis en place par la loi n° 64-706 du 10 juillet 1964, qui s'applique aux récoltes, aux animaux et aux pertes de fonds.

En ce qui concerne ce dernier système, sa réforme est depuis longtemps souhaitée. Pour les uns, ce ne sont pas les principes sur lesquels repose la loi du 10 juillet 1964 qui sont en cause mais plutôt la mauvaise application qui en a été faite, dans un contexte de désengagement financier de l'Etat. Pour d'autres, le système de protection, dans son ensemble, ne répond plus aux besoins de l'agriculture.

Ainsi, au-delà de la protection face aux aléas, deux évolutions, en France, peuvent légitimer la demande d'une réforme du dispositif français de protection. La première tient à l'agriculture elle-même, qui en se modernisant, semble avoir besoin de dispositifs financiers et juridiques nouveaux. La seconde évolution concerne l'adaptation qui s'impose en période de restrictions budgétaires. C'est ainsi que le financement du Fonds des calamités se trouve placé sous le signe de la précarité, l'Etat accumulant un retard de plus de 850 millions de francs.

Le contexte international et, notamment, le mouvement de libéralisation des marchés, qui implique un plus grand découplage, nécessite la mise en place d'un véritable mécanisme de prévoyance pour les agriculteurs. Par ailleurs, la réforme de la PAC proposée par la Commission européenne renforce le besoin d'un dispositif nouveau (national et/ou communautaire) de protection contre, au minimum, les risques naturels. Dans cette optique, le recours à l'assurance se trouve incontestablement favorisé par le discours actuel, qui tend à responsabiliser davantage l'exploitant.

Les dispositions de l'article 92 du Traité de l'Union permettent aux Etats-membres de l'Union européenne de mettre en place des régimes publics favorisant la protection des exploitants contre une baisse des revenus provoquée par les dommages climatiques. Certains pays, l'Espagne bien sûr, mais aussi le Portugal, l'Autriche ou l'Italie, sont à la recherche de solutions. Ces dispositifs pourront certainement permettre aux exploitants de ces pays, pour peu qu'ils soient bien assurés, bien entendu, de mieux faire face à la baisse des soutiens européens.

Ce constat devrait convaincre les professionnels français de l'urgence qu'il y a à mettre au point un dispositif de protection adapté à cet environnement économique et politique nouveau.

Rappelons que certains pays étrangers ont retenu une approche différente de celle de la France en matière de protection de l'agriculture à l'égard des risques climatiques. Ces dispositifs sont relativement nombreux et concernent des pays aussi différents que le Mexique, le Japon ou l'Afrique du Sud. Trois pays (le Canada, les Etats-Unis et l'Espagne) semblent avoir pris en ce domaine une avance importante.

Deux concepts sont à distinguer : l'assurance " récolte " et l'assurance " revenu ".

L'assurance " récolte " couvre des événements de nature catastrophique dont ni la fréquence, ni l'importance ne sont connues. " Elle consiste en l'indemnisation des pertes de récoltes dues à des aléas naturels, c'est-à-dire climatiques ou épidémiques. Ces pertes sont le plus souvent quantitatives, mais elles peuvent être qualitatives pour certaines productions " 28( * ) . L'assurance " récolte " est donc une garantie de rendements pour un prix donné. Elle permet à l'exploitant d'être remboursé des frais de production engagés pour l'ensemble des récoltes garanties.

En matière d'assurance " revenu " peu importe la nature du risque. " L'exploitant s'assure contre une diminution de recette, qu'elle soit provoquée par un aléa naturel ou économique. Cette proposition offre donc une garantie de rendement pour une garantie de prix ". L'assurance " revenu " est en quelque sorte une assurance " récolte " à laquelle on aurait adjoint une assurance " prix ". Ce concept plus récent et plus ambitieux ne se trouve que de l'autre côté de l'Atlantique : aux Etats-Unis et au Canada.

Aux Etats-Unis, l'adoption du Fair Act en 1996 fait de la gestion du risque une des préoccupations majeures du Gouvernement fédéral et des agriculteurs. En 1978, seuls 7 % des exploitants étaient assurés. En 1990, 800.000 agriculteurs sont assurés, soit 30 %, qui recourent à l'assurance " récolte ". Concrètement, le niveau minimal de l'assurance " récolte " dit " catastrophic coverage " coûte à l'exploitant 50 dollars par culture assurée. La garantie accordée est limitée à 50 % du rendement moyen de l'exploitation, calculé à partir d'un historique de quatre ans et plus. L'indemnisation des pertes se situe à 60 % du prix de marché escompté. Cela signifie que pour chaque unité de production, on compare le rendement effectif et le rendement garanti. Si le premier est inférieur au second, une indemnité sera versée. Les dommages pris en compte sont la sécheresse, l'humidité excessive, la grêle, le vent, le feu, les insectes et les maladies. Des protections supplémentaires sont proposées par les compagnies d'assurances : la garantie maximale va de 75 % du rendement historique à 100 % du prix du marché.

LA PROTECTION CONTRE LES RISQUES AGRICOLES

Assurances " récoltes "

 

Assurances " revenu "

Population

concernée


Les exploitants volontaires


Les exploitants volontaires

Origine du risque

Origine naturelle

(aléas climatiques ou épidémiques)

Toute origine

(aléas climatiques ou épidémiques)

Principe de base

Garantie de rendement

pour un prix donné

Garantie de rendement

pour une garantie de prix (assurances-récoltes

+ assurance -prix)

L'expérimentation de l'assurance " revenu " se fait par l'intermédiaire de deux programmes : " income protection " et " crop revenu coverage ". Le premier programme est une initiative privée, approuvée par le FCIC (Federal Crop Insurance Corporation) et expérimenté en 1996 sur le maïs, le coton et le blé de printemps, étendu au blé d'hiver en 1997. La garantie de recette est égale au rendement historique multiplié par le taux de couverture choisi (de 50 à 75 % du rendement historique) et multiplié par le prix du marché projeté.

Le deuxième programme, " crop revenu coverage ", a été testé sur le maïs et le soja dans deux Etats en 1996 et dans six en 1997. La garantie de recette se calcule de la manière suivante : elle est égale au rendement " historique " multiplié par le taux de couverture choisi, multiplié par  95 % du plus haut des deux prix suivants : le prix du marché projeté avant les semis ou le prix de récolte à Chicago. Le montant de la prime est 60 % plus élevé que dans le programme " income protection ".

Au Canada, la mise en place d'un régime d'assurance " récolte ", dont l'objectif était de protéger les agriculteurs contre les aléas climatiques date de 1959. L'année 1991 marque le début de l'assurance " revenu ". En 1996, plusieurs adaptations successives ont été rendues nécessaires par le désengagement financier de l'Etat fédéral. Au final, le système de protection actuel comporte trois étages. Le programme de stabilisation du revenu net est désormais le pilier du dispositif. Le régime d'assurance " récolte " et des programmes complémentaires provinciaux s'y ajoutent. Les exploitants ont la liberté d'adhérer ou non à chacun des programmes. Ceux-ci sont gérés par les pouvoirs publics sans les compagnies d'assurance.

De manière plus générale, on constate que la qualification d'assurance pour l'assurance " récolte " ou " revenu " n'est pas réellement adaptée dans la mesure où l'effort personnel de l'exploitant se trouve fortement accompagné par les pouvoirs publics. Cet appel à la solidarité n'existe pratiquement pas en France à l'exception de l'assurance " grêle " par le biais de l'incitation octroyée par le fonds de lutte contre les calamités agricoles.

Comme l'indiquait la mission d'information du Sénat sur l'avenir de la PAC, les dispositifs français résultent d'initiatives dispersées ne constituant pas une politique. Par ailleurs, la multiplication du nombre des produits proposés risque d'entraîner une certaine confusion.

Votre rapporteur est favorable à la démarche de réflexion préalable que sous-tend l'article 12. Les pouvoirs publics doivent en effet éviter deux écueils : ignorer les expériences étrangères et les copier. Il souhaite néanmoins que ces dispositifs soient mis en oeuvre assez rapidement.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 12 bis -

Insaisissabilité partielle des revenus provenant de l'activité agricole

Cet article propose une insaisissabilité partielle des produits de l'activité agricole identique à celle existant sur les salaires.

L'alinéa premier de cet article précise que les revenus issus des produits de l'activité agricole sont cessibles et saisissables dans les mêmes conditions et limites que les salaires.

Le second alinéa renvoie à un décret en Conseil d'Etat.

L'article L.145-2 du code du travail précise que " sous réserve des dispositions relatives aux créances d'aliments, les sommes dues à titre de rémunération " à toutes les personnes salariées ou travaillant, à quelque titre en en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs " ne sont saisissables ou cessibles que dans des proportions et selon des seuils de rémunération affectés d'un correctif pour toute personne à charge, fixés par décret. Ces correctifs sont révisés en fonction de l'évolution des circonstances économiques.

Pour la détermination de la fraction saisissable, il est tenu compte du montant de la rémunération, de ses accessoires ainsi que, le cas échéant, de la valeur des avantages en nature, après déduction des cotisations obligatoires. Sont exceptées les indemnités insaisissables les sommes allouées à titre de remboursement de frais exposés par le travailleur et les allocations ou indemnités pour charges de famille
".

L'article 12 bis institue une quotité insaisissable sur les revenus provenant des produits de l'activité de l'exploitant à l'instar de la fraction du salaire insaisissable instituée pour les salariés par la loi du 29 juillet 1998 relative à la lutte contre les exclusions.

Votre rapporteur souhaite préciser deux points essentiels :

- En premier lieu, ce mécanisme crée au bénéfice des agriculteurs une situation tout à fait dérogatoire par rapport aux autres revenus professionnels non salariés, qu'il s'agisse des artisans, des commerçants ou de professions libérales. On peut ainsi s'interroger sur sa constitutionnalité.

- En second lieu, ce dispositif se révélera difficilement applicable car il est malaisé de connaître à l'avance le revenu mensuel d'un agriculteur (on ne le connaît qu'à l'issue d'un exercice comptable) ; en effet le régime de la saisie sur rémunération est spécifique en raison des caractères propres aux salaires. Il se traduit par des versements mensuels prélevés par l'employeur. Un tel système ne peut se concevoir qu'en présence de revenus à périodicité et à montants réguliers.

Votre commission vous propose de supprimer cet article.

Article 12 ter -

Insaisissabilité du logement d'un agriculteur

Cet article prévoit l'insaisissabilité du logement de l'agriculteur.

L'article 12 ter vise, en cas de liquidation judiciaire ou de redressement de l'exploitation agricole, prévues par la loi du 25 janvier 1985, à empêcher la saisie du lieu d'habitation principal de l'exploitation agricole (et non de l'exploitation agricole). Il appartient à un décret de définir le seuil en-deçà duquel cette saisie est inopérable.

Votre rapporteur comprend très bien les motivations qui ont présidé à l'élaboration de cet article.

Néanmoins, il s'interroge sur son bien fondé, et ce pour plusieurs raisons :

- en cas de liquidation judiciaire ou de redressement, le propriétaire ne pourra pas reprendre son bien. Cela peut être interprété comme une atteinte au droit de propriété ;

- par ailleurs, on peut se demander si une telle disposition ne crée pas une différence de traitement injustifiée entre les agriculteurs et d'autres catégories socio-professionnelles, portant atteinte au principe d'égalité entre les citoyens ;

- il peut entraîner le démantèlement de l'exploitation si les logements sont intégrés dans les bâtiments d'exploitation ;

- enfin, il ne paraît pas de surcroît opportun de prévoir une nouvelle exception en faveur des agriculteurs, qui bénéficient déjà d'un régime dérogatoire en cas de liquidation judiciaire dans la mesure où le tribunal peut, en considération de la situation personnelle et familiale de l'exploitant, lui accorder des délais de grâce pour quitter sa maison d'habitation principale (art. 154 al. 6 de la loi du 25 janvier 1985).

Votre rapporteur s'interroge par ailleurs sur la rédaction de cet article car il lui paraît difficile de définir les contours exacts du " lieu d'habitation principale de l'exploitation agricole ".

Votre commission vous propose donc de supprimer cet article.

CHAPITRE II -

L'orientation des structures des exploitations agricoles

Ce chapitre regroupe les articles 13 à 17 bis. L'article 13 crée une unité de référence pour le contrôle des structures qui se substitue à l'actuelle surface minimale d'installation. Les articles 14 et 15 visent à améliorer la connaissance des exploitations qui se libèrent afin de favoriser les installations.

Outre deux articles sur le schéma départemental des structures et sur le contrôle des regroupements de références laitières, le dispositif le plus important de ce chapitre est l'article 16, qui propose une refonte du contrôle des structures visant à accorder une priorité à l'installation, à assurer l'égalité de traitement entre les exploitations individuelles et les formules sociétaires, à unifier le contrôle, sous forme d'un seul régime d'autorisation préalable et à remplacer les sanctions pénales rarement mises en oeuvre par des sanctions administratives dissuasives.

Section 1 -

Les éléments de référence et la politique d'installation
Article 13 -

Création de l'unité de référence

Cet article propose une réorganisation des articles L.312-5 et L.312-6 du code rural en vue d'y insérer un nouveau mode de fixation du seuil de déclenchement du contrôle des structures.

Le paragraphe I de l'article 13 du projet de loi abroge l'article L.312-6 du code rural.

Cet article précise que le ministre de l'agriculture fait procéder aux études nécessaires à l'appréciation de la superficie que devrait avoir normalement une exploitation mise en valeur directement par deux unités de main d'oeuvre dans des conditions permettant une utilisation rationnelle des capitaux et des techniques, une rémunération du travail d'exécution, de direction et des capitaux fonciers et d'exploitation.

Cette surface moyenne n'a jamais été définie. Cet article, totalement obsolète, peut être abrogé.

Le paragraphe II de l'article 13 du projet de loi tire les conséquences du remplacement de la surface minimum d'installation par l'unité de référence dans les dispositions relatives au contrôle des structures .

En effet, les opérations soumises à autorisation préalable (articles L.331-2 et L.331-3) ou à déclaration préalable (article L.331-4) et la mise en place d'ateliers de production hors sol (article L.331-5) ne font plus référence à la SMI mais à l'unité de référence. Il est donc logique de " sortir " de l'article L.312-5, relatif à la surface minimum des renvois aux opérations susmentionnés.

Le paragraphe III renumérote l'article relatif à la surface minimum d'installation qui devient l'article L.312-6, l'article L.312-5 étant consacré à l'unité de référence.

Le paragraphe IV définit la section 4 relative à l'unité de référence du chapitre II (les éléments de référence) du Titre Ier (dispositions générales) du Livre III relatif à l'exploitation agricole.

L'" unité de référence " remplace la notion de SMI pour le contrôle des structures. Selon les termes de la rédaction proposée pour l'article L.312-5, l'unité de référence permet d'assurer la viabilité de l'exploitation par nature de culture et des ateliers de production hors-sol.

Il doit être en outre tenu compte des autres activités agricoles -et ce afin de tenir compte de la globalité- de l'exploitation.

Le second alinéa du texte proposé pour l'article L.312-5 du code rural indique qu'il appartient au Préfet de fixer cette unité de référence, pour chaque région naturelle, après avis de la CDOA. Le cadre de la fixation de cette surface est le département : elle est égale à la moyenne départementale des installations au cours des cinq dernières années.

Soulignons, en outre, que la révision de cette surface s'effectuera dans le respect des conditions mentionnées à cet alinéa.

Votre rapporteur approuve sans réserve la dimension économique de cette nouvelle unité de référence. En raison de l'importance que revêt cette unité pour toute la politique des structures et de l'échec dans la définition de " la surface moyenne de l'exploitation à deux unités de main-d'oeuvre ", il se félicite de la mise en place d'un tel dispositif.

Néanmoins, le mode de calcul de l'unité de référence s'effectuant par rapport à la moyenne départementale des installations encouragées, il est important de mentionner les difficultés soulevées par ce dispositif. Un tiers seulement des exploitations sont aidées. En outre, dans la très grande majorité des cas, les installations se font selon un système progressif, 97 % d'entre elles résultant d'une succession directe père-fils ou père-fille. On retrouve donc des formules de type société civile, EARL ou GAEC. Le faible nombre de parts des jeunes au moment de leur installation conduit inévitablement à abaisser le seuil de l'unité de référence. Ainsi, la moyenne des installations dans un département est inférieure à celle des exploitations d'un département.

Votre rapporteur est conscient de ces problèmes. Pourtant, l'intervention de la CDOA devrait permettre de considérer la moyenne départementale comme un élément essentiel d'appréciation pour fixer l'unité de référence, mais non un élément exclusif. Votre rapporteur souhaite en conséquence que cette unité de référence soit fixée en tenant compte des installations réelles.

Le paragraphe V renumérote la section relative à la surface minimum d'installation par coordination avec le paragraphe précédent. Cette nouvelle section 5 ayant trait à la surface minimum d'installation sera composée d'un seul article, l'article L.312-6.

Le paragraphe VI introduit l'unité de référence créée par l'article L.312-5 du code rural à l'article L.312-2 du même code qui précise les dispositions applicables dans les départements d'outre-mer.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 14 -
(Article L.330-1 du code rural) -

Dispositions relatives à la politique de l'installation

Cet article tend à compléter les deux premiers alinéas de l'article L.330-1 du code rural relatif à la politique d'installation en agriculture.

L'article L.330-1 du code précité est composé actuellement de deux alinéas.

Le premier indique que la politique d'installation favorise :

- la transmission des exploitations dans un cadre familial et hors cadre familial ;

- l'adaptation des exploitations au bénéfice des candidats à l'installation justifiant de leur capacité à réaliser un projet viable.

L'article 14 du projet de loi, dans son paragraphe I, propose d'insérer, après l'alinéa premier, un nouvel alinéa qui prévoit de mettre en place une installation progressive et de la faciliter dans les textes et dans les moyens mis en oeuvre. En effet, certains agriculteurs ne peuvent pas s'installer en une seule opération, pour des raisons financières et techniques. Cet alinéa devrait permettre de plus à ceux qui souhaitent devenir agriculteurs de réaliser leur projet et de disposer d'une unité viable.

Votre rapporteur vous propose un amendement tendant à modifier cet alinéa, afin d'en élargir la portée.

Le paragraphe II vise à remplacer le deuxième alinéa de l'article L.330-1 actuel par deux nouveaux alinéas.

Le deuxième alinéa de l'article L.330-1 du code rural, dont la modification est proposée par cet article, prévoit actuellement que les services et organismes chargés de gérer les retraites et les préretraites doivent informer chaque agriculteur, avant que celui-ci n'atteigne l'âge requis pour bénéficier de la retraite ou de la préretraite, de son obligation de faire connaître à l'autorité administrative son intention de cesser son activité six mois avant son départ (article L.330-2).

Ce paragraphe prévoit deux nouvelles mesures :

En premier lieu, la publication d'un rapport annuel sur l'installation dans chaque département. Ce rapport devra servir de base lors de la révision du schéma des structures, lorsque sera constaté un décalage entre les objectifs de ce schéma et les résultats en matière d'installations.

Votre rapporteur vous propose de maintenir ce rapport en raison du développement croissant des installations non aidées. Cependant, il souhaite préciser deux points importants :

- Le CNASEA publie déjà chaque année un rapport public sur l'installation : ce document peut être complété ;

- en outre, alors que le Gouvernement a refusé d'inscrire dans le projet de loi d'orientation agricole à l'Assemblée nationale le dépôt d'un rapport sur le CTE, mesure phare du projet de loi, il a accueilli avec enthousiasme ce " énième " rapport sur l'installation ; votre rapporteur s'interroge sur la cohérence d'une telle attitude.

En second lieu, le deuxième alinéa du paragraphe II de cet article 14 substitue à la mention " d'un an " présente dans l'actuel second alinéa de l'article L.330-1 celle de " trois ans ".

Cette modification a deux objectifs :

- tenir compte de l'extinction du système de préretraite agricole, échu le 15 octobre 1997 ;

- assurer très en amont l'information de chaque agriculteur sur l'obligation qui lui incombe en vertu de l'article L.330-2 du code rural, de faire savoir à l'administration s'il a l'intention de cesser son activité.

Cette procédure est importante car elle permet de connaître à l'avance les exploitations qui vont se libérer à moyen terme, notamment celles pour lesquelles il n'y a pas de successeur.

Les organismes concernés par cette obligation d'information aux agriculteurs sont les caisses de la mutualité sociale agricole sur le territoire métropolitain et les caisse de sécurité sociale dans les DOM.

Votre rapporteur vous propose, tout en augmentant le délai d'information des agriculteurs qui vont atteindre l'âge requis pour bénéficier de la retraite prévue à l'article L.330-1, de ne pas trop l'étendre afin de ne pas faire retomber la motivation du futur cédant à préparer sa propre succession.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 15 -
(Article L.330-2 du code rural) -

Notification préalable des départs à la retraite

Cet article propose une nouvelle rédaction pour le premier alinéa de l'article L.330-2 afin d'allonger le délai dont dispose l'exploitant pour faire connaître à l'autorité administrative son intention de cesser son activité.

Le texte proposé par l'article 15 du projet de loi pour l'article L.330-2 du code rural apporte dans son paragraphe I plusieurs modifications à la rédaction actuelle
:

- il supprime pour les candidats à la préretraite l'obligation d'informer l'autorité administrative de leur souhait de cesser leur activité. Cette disposition est une mesure de coordination par rapport à l'article 14 du projet de loi ;

- il prévoit que la déclaration à l'autorité administrative doit être effectuée deux ans, et non six mois comme c'est le cas actuellement, avant la cessation d'activité ;

- les informations fournies par les candidats au départs " seront publiques ". Ainsi, les candidats à l'installation pourront savoir quelles exploitations seront disponibles deux ans avant le départ à la retraite de l'exploitant.

Par ailleurs, l'article 15 du projet de loi reprend une disposition en vigueur actuellement dans l'article L.330-2 du code rural en la complétant. Cette mesure précise que, à défaut d'avoir fourni l'information préalable à l'autorité administrative dans le délai prévu, les intéressés ne pourront pas poursuivre " la mise en valeur de l'exploitation ou d'une partie de celle-ci après leur départ en retraite ". Deux cas sont visés :

- lorsque l'agriculteur est autorisé à poursuivre l'exploitation dans la limité d'une superficie fixée par le schéma directeur départemental des structures agricoles, dont le maximum est égal au cinquième de la surface minimum d'installation ; il s'agit de ce que l'on appelle communément les " parcelles de subsistance " définies à l'article L.353-1 du code rural ;

- quand l'agriculteur est autorisé à poursuivre la mise en valeur de l'exploitation pour une durée limitée, s'il apporte la preuve de l'impossibilité de céder son bien dans les conditions normales du marché, donc qu'il ne peut trouver de successeur, en application de l'article L.35382 du code rural.

Comme le précise le rapporteur de l'Assemblée nationale, M. François Patriat, la poursuite de l'exploitation ne fait pas obstacle au service des prestations d'assurance vieillesse liquidées par le régime obligatoire. Si le second cas de figure avait bien pris en considération en 1995, le premier avait été omis. L'article 15 du projet de loi comble cette lacune et renforce ainsi l'incitation à fournir dans le délai prescrit les informations préalables à la cessation d'activité.

Le paragraphe II de l'article 15 du projet de loi précise, en outre, que les nouvelles dispositions ne s'appliqueront que de façon différée, un an après la publication de la loi d'orientation agricole, pour permettre aux exploitants de s'y conformer progressivement.

Votre rapporteur vous propose un amendement
tendant à ramener à dix-huit mois avant la cessation d'activité la date de la déclaration à l'autorité administrative.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 15 -

Cessation d'activité - Prorogation de la préretraite
et aide à la transmission des exploitations

Cet article additionnel propose aux exploitants agricoles qui vont cesser leur activité une aide à la transmission de l'exploitation au-delà du 31 décembre 1999.

La loi de finances pour 1998 a prévu la mise en place d'une aide à la transmission des exploitations agricoles et d'une préretraite à caractère social. Ces deux mesures seront reconduites en 1999, mais aucune indication n'est donnée pour les années qui suivent.

L'efficacité d'une politique des structures dépend largement des mesures incitatives qu'elle contient. La préretraite applicable du 1er janvier 1995 au 15 octobre 1997 a facilité l'installation de jeunes agriculteurs. Ainsi, en 1997, 60 % du foncier libéré par les préretraites est allé à des jeunes agriculteurs et 30 % à l'agrandissement d'agriculteurs installés depuis moins de 10 ans.

Pour pouvoir orienter les 4,7 millions d'hectares que vont libérer 132.600 exploitants, il faut pouvoir proposer aux exploitants agricoles qui vont cesser leur activité une aide à la transmission de l'exploitation, au-delà du 31 décembre 1999. Le niveau variera en fonction de la qualité " restructurante " de la cession.

Parallèlement, et pour des cas limités, une préretraite à caractère social permettrait à des exploitants en difficulté financière ou qui rencontrent de graves problèmes de santé de quitter dignement leur métier.

En conséquence, votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Section 2 -

Le contrôle des structures des exploitations agricoles

Institué par la loi n° 62-933 du 8 août 1962, le contrôle des cumuls et réunions d'exploitations avait été conçu pour éviter la concentration des terres entre les mains des plus " puissants " 29( * ) .

Longue à recevoir une application effective, la réglementation apparut vite incomplète (les installations étaient totalement libres et les cumuls de professions contrôlés en de très rares occasions), injuste (l'imprécision des termes de la loi autorisait les instances chargées d'instruire le dossier à s'intéresser davantage à la personnalité du demandeur qu'à l'impact structurel de l'opération envisagée) et inefficace (le Préfet hésitait à poursuivre les contrevenants et les sanctions encourues étaient peu dissuasives).

Plutôt que de généraliser le contrôle total, adopté par 37 départements, mais de gestion difficile en raison de l'importance du nombre des transactions annuelles, les pouvoirs publics ont choisi de substituer le contrôle des structures à celui des cumuls et réunions d'exploitations.

Issu de la loi d'orientation agricole n° 80-502 du 4 juillet 1980, le contrôle des structures ne vit jamais le jour sous sa forme initiale puisqu'une réforme de la réforme fut consacrée par la loi n° 84-741 du 1er août 1984.

Ce n'est en réalité qu'à la fin de l'année 1985 , à la suite de la publication des premiers schémas directeurs départementaux des structures (SDDS), que les dispositions nouvelles commencèrent à entrer effectivement en vigueur. Conçu à une époque où la concurrence était vive entre les candidats à l'installation ou à l'agrandissement, le contrôle des structures a présenté un intérêt moindre à mesure que, dans la plupart des secteurs, la demande est devenue inférieure à l'offre et que le concept d'entreprise a pénétré la politique agricole.

Compte tenu de cette modification du contexte socio-économique, la loi n° 90-85 du 23 janvier 1990, complémentaire à la loi n° 88-1202 du 30 décembre 1988 relative à l'adaptation de l'exploitation agricole à son environnement économique et social, a restreint la liste des opérations soumises à autorisation.

Toutefois, si cette loi a assoupli les règles et allégé les procédures, la réforme de 1995 a cherché avant tout à coordonner et améliorer les instruments de la politique agricole (renforcement du conseil supérieur d'orientation et création d'une commission départementale d'orientation de l'agriculture) ainsi qu'à compléter le dispositif du contrôle, l'objectif final étant d'accroître le niveau de performance et de compétitivité de l'agriculture.

Malgré les diverses attaques qu'il a subi le contrôle des structures a survécu. Il en résulte qu'à l'occasion de tout changement de titulaire du droit d'exploiter, il faut s'interroger pour savoir si la transaction est libre ou si, au contraire, elle doit, préalablement à sa réalisation, être approuvée par l'autorité administrative.

Parallèlement à cette évolution du contrôle des structures, l'examen annuel des statistiques agricoles conduit à trois constats :

1. Le nombre d'exploitations est en baisse constante.

En 1997, le nombre d'exploitations agricoles a, de nouveau, baissé puisqu'il est passé de 700.500 fin 1996 à moins de 680.000, soit une baisse de 4 %.

EVOLUTION DU NOMBRE D'EXPLOITATIONS AGRICOLES



2. Une augmentation de la surface moyenne exploitée


La conséquence la plus visible de ce mouvement de concentration est la baisse du nombre de petites et moyennes exploitations. Parallèlement, les terres libérées par les cessations d'activité ont permis au tiers des exploitations en place de s'agrandir, chacune ayant accru sa surface de près de 20 % -les agrandissements se faisant surtout en fermage-.

Le mouvement de concentration des terres des unités de grande dimension s'est accéléré, le quart de la superficie agricole utilisée étant détenu par des exploitations de plus de 150 hectares. Ainsi, 10 % des exploitations cultivent 40 % de la SAU. Les plus grandes exploitations se situent dans les régions de grandes cultures, le Centre et le Nord.

Cette disparition des exploitations correspond pour l'essentiel aux départs en retraite et préretraite.

La taille moyenne des exploitations agricoles atteint environ 42 hectares aujourd'hui. Elle a doublé en vingt-cinq ans et a progressé de 9 % par rapport à 1995.

ÉVOLUTION DE LA SURFACE AGRICOLE MOYENNE D'UNE EXPLOITATION



3. L'importance du mouvement sociétaire


Les exploitations individuelles, bien que toujours largement majoritaires, perdent du terrain. Le nombre de sociétés, au contraire, s'est accru de 12.000 unités depuis 1995. Elles comptent désormais pour 16 % de l'ensemble des exploitations, contre 8 % en 1990.

Toutes les formes sociétaires ne progressent pas au même rythme. Ce sont les EARL, qui ont la croissance la plus spectaculaire : +19 % en deux ans. On en dénombre aujourd'hui 42.000. Le ministère de l'agriculture précise dans une étude récente que les GAEC père-fils, qui permettent une installation progressive des jeunes, sont transformés en EARL lorsque le père prend sa retraite. Il est important de souligner que l'essor des sociétés évite le démantèlement des exploitations. Les sociétés sont également plus grandes que les exploitations individuelles -environ trois fois plus-. En 1997, elles détenaient un plus de 10 millions d'hectares, soit plus du tiers de la SAU.

EXPLOITATIONS SELON LA TAILLE

680.000 Exploitations en 1997

EXPLOITATIONS SELON LA SURFACE AGRICOLE UTILISEE

28.331.000 hectares en 1997



Face à ces trois mouvements de fond, votre rapporteur approuve le principe d'une rénovation du contrôle des structures qui, n'ayant pas donné satisfaction :


- constitue un frein à la politique d'installation,

- crée de graves problèmes de transmission des exploitations qui ne trouvent guère de preneur en raison de leur taille,

- accentue parfois les risques sanitaires et de pollution notamment lorsqu'il s'agit d'élevage.

Les organisations professionnelles et les élus sont favorables au principe d'un contrôle des structures afin de faciliter une évolution harmonieuse des exploitations et, surtout, de permettre l'installation des jeunes dans les meilleures conditions.

Néanmoins, votre rapporteur estime que plusieurs dispositions du projet de loi relatives au contrôle des structures, par leur complexité et leur lourdeur, conduisent à une certaine bureaucratie.

Comme l'indiquait le Président de la République, le 3 octobre dernier lors d'un déplacement dans le Cantal, " trop souvent, les initiatives des exploitants sont bridées, étouffées par la complexité des procédures et l'omniprésence des administrations ".

Votre rapporteur constate que la légitimité restaurée du contrôle des structures sera de nouveau menacée si celui-ci fait appel à un droit byzantin, un droit de spécialistes.

Il sera donc amené à vous proposer plusieurs amendements à l'articles 16 (objectifs, contenu et régime des sanctions) du projet de loi.

Article 16 -

Réforme du contrôle des structures

Cet article vise à refondre l'ensemble des dispositions relatives au contrôle des structures. Il concerne donc l'article L.331-1 -portée et objectifs du contrôle-, l'article L.331-2 -champ d'application de l'autorisation préalable-, l'article L.331-3 -critères de décision- et les articles L.331-7 et L.331-8 -régime des sanctions-.

Signalons que l'article 16 du projet de loi ne contient plus de dispositions relatives à la procédure, le Conseil d'Etat ayant considéré qu'elles étaient de nature réglementaire. En outre, le texte reprend plusieurs dispositions du code actuel en les adaptant (articles L.331-4, L.331-5, L.331-6, L.331-9 et L.331-10).

Ce chapitre relatif au contrôle des structures se trouve dans le titre III (Politique d'installation et contrôle des structures et de la production) du livre III (l'exploitation agricole) du code rural.

Article L.331-1 du code rural -

Portée et objectifs du contrôle

1. Le droit en vigueur

L'article L.331-1 du code rural, dans sa rédaction actuelle, assigne un triple objectif au contrôle des structures :

- tout d'abord, favoriser l'installation d'agriculteurs remplissant les conditions de formation ou d'expérience professionnelles fixées par décret. Cet objectif apparaît comme l'objectif prioritaire, impliquant que l'installation doit être privilégiée par rapport à l'agrandissement des exploitations. Toutefois, les préoccupations locales peuvent conduire les schémas directeurs départementaux des structures à inverser à l'ordre des priorités ;

- contribuer à la constitution ou à la préservation d'exploitations familiales à responsabilité personnelle et favoriser l'agrandissement des exploitations de dimensions insuffisantes. Le système mis en place se propose ainsi de promouvoir un double équilibre : équilibre des exploitations qui doivent atteindre un seuil de rentabilité optimum selon la région naturelle où elles sont situées ; équilibre entre exploitations afin de constituer un réseau homogène d'unités économiques ;

- déterminer les conditions d'accès à la profession agricole des personnes physiques issues d'autres catégories sociales ou professionnelles, ainsi que les conditions d'exercice à temps partiel de la profession agricole par des actifs ruraux non agriculteurs, en fonction de l'intérêt économique, social et démographique qui s'attache à la pluriactivité dans chaque département.

Le contrôle concerne exclusivement l'exploitation des biens ruraux. Il en résulte que toutes les opérations qui n'ont aucune incidence sur les conditions de mise en valeur du fonds échappent au contrôle. Il s'agit, en effet, de régir l'usage des biens et non le droit de propriété.

En revanche, le contrôle est susceptible de s'appliquer à toute opération qui a pour conséquence de conférer un droit d'exploiter ou la jouissance effective d'un bien rural, quelle que soit la nature de l'acte en vertu duquel cette jouissance est assurée : titre de propriété, bail, convention d'occupation précaire, mise à disposition à titre gratuit.

2. Les modifications proposées par le projet de loi

L'article 16 propose de nombreuses modifications :

le premier alinéa indique que le contrôle des structures s'applique " à la mise en valeur des biens fonciers " et non plus seulement à l'exploitation des biens. De plus, ce contrôle concerne toute exploitation agricole " quels que soient sa forme ou son mode d'organisation juridique ". Ainsi, les sociétés agricoles sont directement concernées par le dispositif : il s'agit donc, avec cette rédaction " extrêmement large " que souligne M. François Patriat dans son rapport, d'appliquer le contrôle des structures non seulement aux exploitations individuelles mais aussi aux sociétés civiles, telles que les groupements fonciers agricoles, les groupements fonciers ruraux, les groupements agricoles d'exploitation en commun et les exploitations agricoles à responsabilité limitée, les sociétés commerciales, les sociétés coopératives et les groupements d'intérêt économique.

En outre, entrent dans le champ du contrôle les exploitations qui n'ont pas d'autonomie juridique et intégrées dans un ensemble plus vaste.

Rappelons que ce contrôle s'applique à toute opération qui a pour conséquence de conférer un droit d'exploiter ou la jouissance effective d'un bien rural, quelle que soit la nature de l'acte en vertu duquel cette jouissance est assurée : titre de propriété, bail, convention d'occupation précaire, mise à disposition à titre gratuit.

Le deuxième alinéa fait référence à la définition de l'exploitation agricole par renvoi à celle des activités agricoles présente à l'article L.311-1 du code rural.

Sont ensuite énumérés les différents objectifs :

- si l'installation reste l'objectif prioritaire, celle-ci ne peut plus être reléguée après d'autres objectifs comme cela est le cas actuellement.

En effet, le deuxième alinéa de l'article L.331-1 dans sa rédaction actuelle permet d'inverser les priorités du contrôle des structures si le schéma directeur départemental le prévoit compte tenu des préoccupations locales.

En outre, aux côtés de l'installation, figure comme priorité équivalente, l'installation progressive ;

- éviter le démembrement d'exploitations agricoles devient un objectif à part entière alors qu'il ne figurait pas dans le texte en vigueur. Il est en effet logique de ne pas mettre en danger une exploitation viable au profit de l'installation éventuelle d'un ou plusieurs jeunes agriculteurs ;

- l'objectif de l'" agrandissement " de l'article L.331-1 est présent dans la rédaction actuelle ; il est néanmoins subordonné à l'insuffisance de la dimension de l'exploitation.

Or l'article 16 considère que le contrôle des structures doit viser aussi à agrandir toute exploitation dont les références de production et les droits à aides sont trop faibles.

Signalons enfin que le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L.331-1 rappelle l'importance de l'installation ou du développement d'agriculteurs pluriactifs " partout où l'évolution démographique et les perspectives économiques le justifient ". Cette référence déjà présentée dans la rédaction actuelle de l'article L.331-1.

Par ailleurs, il n'est plus fait référence à des conditions de formation et d'expérience.

Votre rapporteur vous propose un amendement, insérant dans ces objectifs, une référence à des mesures incitatives encourageant les cédants et les bailleurs à transmettre leur exploitation ou à donner leur fonds à des jeunes.

Article L.331-2 du code rural -

Opérations soumises à autorisation préalable

1. Le droit en vigueur

Les opérations soumises à autorisation préalable sont énumérées par les articles L.331-2 et L.331-3 du code rural. Précisons que certaines de ces opérations sont susceptibles de faire l'objet d'une simple déclaration préalable si le schéma directeur départemental le prévoit.

Votre rapporteur souhaite, dans un souci de clarté, plutôt que de reprendre l'examen de ces différentes opérations en suivant le code rural, distinguer, d'une part, les opérations réalisées par les personnes physiques à titre individuel et, d'autre part, les opérations effectuées par les sociétés, les coexploitations et les indivisions.

a) Pour les opérations réalisées par des personnes physiques à titre individuel , il peut s'agir soit d'une installation, soit d'un agrandissement ou d'une réunion d'exploitations. Si un certain nombre de conditions sont communes à ces opérations, la condition essentielle relative à la superficie n'existe plus depuis la loi du 23 janvier 1990, excepté dans le cas d'agrandissement ou de réunion d'exploitations.

L'installation : selon l'article L.331-3 1°-a, sont soumises à autorisation préalable les installations réalisées à titre individuel par les exploitants qui ne remplissent pas les conditions de capacité ou d'expérience professionnelle fixées par décret.

Une autorisation préalable est nécessaire en cas d'installation réalisée à titre individuel par un exploitant qui a atteint l'âge auquel il peut prétendre à bénéficier d'un avantage de vieillesse agricole (article L.331-3-1°-b).

Outre ces conditions relatives aux personnes, existent des conditions portant sur les biens : en effet, si la superficie n'est plus prise en compte pour le contrôle de l'installation effectué à titre individuel par un exploitant, l'installation n'est pas pour autant libre. Une autorisation peut être nécessaire dès qu'une des autres conditions relatives aux personnes ou aux biens n'est pas remplie. De plus, depuis la loi de modernisation de l'agriculture de 1995, l'installation à titre individuel d'un agriculteur doit être regardée comme un agrandissement dès lors que cet agriculteur est déjà associé exploitant dans une société agricole préexistante.

Par ailleurs, la constitution d'un réseau homogène d'exploitations viables suppose que l'installation ne se fasse pas au détriment d'une autre exploitation. C'est pourquoi un candidat à l'installation, même s'il remplit par ailleurs les conditions requises, est assujetti à autorisation dans les trois hypothèses visées par l'article L.331-3-2 à savoir :

l'installation aurait pour effet de supprimer une exploitation agricole d'une superficie au moins égale à 2 SMI ou éventuellement à 1 SMI et demie ;

l'installation aurait pour effet de ramener la superficie d'une exploitation agricole en deçà de 2 SMI ou, éventuellement d'une SMI et demie (article L.331-3-2-a) ;

l'installation aurait pour effet de priver une exploitation agricole d'un bâtiment essentiel à son fonctionnement et qui ne sera ni reconstruit ni remplacé (article L.331-3-2-b).

Quand l'opération réalisée ne rentre pas dans l'une de ces trois hypothèses, une demande d'autorisation s'impose cependant dès lors que l'une des autres conditions n'est pas remplie (âge ou aptitude).

L'agrandissement et la réunion d'exploitations

Il y a agrandissement d'exploitation lorsqu'un agriculteur joint de nouvelles parcelles à celles qu'il exploite déjà en vue de constituer un seul domaine ou, depuis la modification de l'article L.331-1 du Code rural par la loi de modernisation de l'agriculture, lorsqu'un agriculteur déjà associé exploitant dans une société agricole préexistante met en valeur des terres à titre individuel.

En ce qui concerne les conditions relatives aux personnes , celui qui procède à un agrandissement ou à une réunion d'exploitations doit se soumettre au contrôle s'il n'est pas professionnellement apte ou (et) s'il atteint l'âge qui lui permet de prétendre à bénéficier d'un avantage de vieillesse agricole.

Si l'exploitant est professionnellement apte et n'est pas âgé, il est néanmoins tenu de demander une autorisation dès lors qu'il ne répond pas à l'une des conditions relatives aux biens.

Le respect d'un certain nombre de conditions portant sur les biens est en effet obligatoire. A la différence de ce qui existe en cas d'installation, le contrôle des agrandissements ou réunions d'exploitations est lié à une considération de superficie.

En effet, l'exploitant qui opère à titre individuel un agrandissement ou une réunion d'exploitations doit solliciter une autorisation préalable si la surface cumulée de l'ensemble excède le seuil fixé par le schéma directeur départemental des structures agricoles entre 2 et 4 SMI. Cette formulation est issue de la loi n° 95-95 sur la modernisation de l'agriculture.

De plus, le contrôle des structures s'applique dans certaines hypothèses aux agrandissements ou réunions d'exploitations, même si la superficie de l'exploitation, objet de l'agrandissement ou de la réunion, ne dépasse pas le seuil prévu par l'article L.331-2-1° du Code rural.

Ainsi sont soumises à autorisation les opérations suivantes :

Les agrandissements ou les réunions d'exploitations ayant pour conséquence de supprimer une exploitation agricole d'une superficie au moins égale à deux fois la SMI -ou éventuellement à une SMI et demie si le schéma directeur départemental a décidé de l'abaissement du seuil (art. L.331-3-2°a).

Les agrandissements ou les réunions d'exploitations ayant pour conséquence de ramener la superficie d'une exploitation agricole en deçà de 2 SMI (ou éventuellement d'une SMI et demie si le schéma directeur départemental a décidé de l'abaissement du seuil (art. L.331-3-2°a).

Les agrandissements ou les réunions d'exploitations ayant pour conséquence de priver une exploitation agricole d'un bâtiment qui est essentiel à son fonctionnement et qui ne sera ni reconstruit ni remplacé (art. L.331-3-2°b).

Même si la superficie définitivement constituée à la suite d'un agrandissement ou d'une réunion d'exploitations n'excède pas le seuil prévu par l'article L.331-2-1°, une autorisation préalable est nécessaire quand il y a adjonction de biens dont la distance par rapport au siège de l'exploitation du demandeur est supérieure à un maximum fixé par le schéma directeur départemental des structures agricoles. Depuis la loi n° 88-1202 du 30 décembre 1988, ce maximum ne saurait être inférieur à 5 km, (art. L.331-3-3°). La distance doit être calculée par les voies d'accès les plus directes ou les plus usuellement pratiquées. On veut éviter par là que ne développent des exploitations non structurées.

Création ou extension de capacité d'ateliers hors sol

Jusqu'au 30 juin 1998, étaient soumises à autorisation préalable les créations ou extensions de capacité des ateliers hors sol au delà d'un certain seuil de production et selon des modalités fixées par décret (Art. L.331-3-4°).

Ces mesures étaient destinées à apporter une solution transitoire au problème que pose le développement incontrôlé de certaines productions hors sol qui risquent de perturber gravement le marché européen.

b) Opérations d'installation, d'agrandissement ou de réunion d'exploitations réalisées par les sociétés, coexploitations, indivisions

Depuis la loi n° 90-85 du 23 janvier 1990, les sociétés et indivisions ne sont plus soumises à un contrôle aussi rigoureux qu'auparavant.

Depuis cette même loi, la coexploitation connaît un régime identique à celui des sociétés et indivisions. Par coexploitants, il faut entendre les personnes qui travaillent en commun et de façon effective à la mise en valeur d'un bien rural, tels des époux, tels encore un agriculteur et les membres de sa famille.

Qu'il s'agisse d'installation, d'agrandissement ou de réunion d'exploitations, les règles du contrôle sont les mêmes et il n'y a donc pas lieu de faire des distinctions entre ces diverses sortes d'opérations.

Toute société, coexploitation, indivision qui réalise une installation, un agrandissement ou une réunion d'exploitations relève de la procédure d'autorisation préalable lorsque la superficie totale mise en valeur divisée par le nombre d'associés, de coexploitants ou d'indivisaires participant effectivement à l'exploitation au sens de l'article L.411-59 du Code rural, répondant aux conditions de qualification professionnelle et n'ayant pas atteint l'âge de bénéficier d'un avantage de vieillesse agricole, excède le seuil fixé par le schéma directeur départemental et compris entre deux et quatre fois la SMI. Pour déterminer la superficie totale mise en valeur, il est tenu compte à la fois des superficies exploitées par la société, la coexploitation ou l'indivision, des superficies exploitées individuellement par chaque associé, coexploitant ou indivisaire et, depuis la loi n° 95-95 du 1er février 1995, des superficies exploitées par l'ensemble des sociétés où ces intéressés sont associés et participent à l'exploitation au sens de l'article L.411-59 du Code rural (article L.331-2-2°).

Cette innovation législative est destinée à éviter des abus et des distorsions dans la mise en oeuvre du contrôle des structures et permet de prendre en considération toutes les surfaces exploitées, que ce soit à titre individuel ou à titre sociétaire.

Si le quotient déterminé conformément à l'article L.331-2-2° du Code rural est égal ou inférieur au seuil fixé par le schéma, la société, la coexploitation ou l'indivision est tenue de faire une déclaration préalable (article L.331-4-3°).

Par ailleurs, l'article L.331-4-3° du Code rural, conduit à soumettre à autorisation préalable les opérations effectuées par les sociétés, coexploitations, indivisions et aboutissant soit à une suppression ou à une diminution d'une exploitation ou à la privation d'un bâtiment essentiel dans les conditions de l'article L.331-3-2°, soit à une adjonction de biens dont la distance par rapport au siège de l'exploitation est supérieure à un certain seuil (article L.331-3-3°).

Enfin, l'article L.331-3-4° énonce explicitement depuis la loi n° 95-95 du 1er février 1995 que la mesure temporaire prévue par l'article L.331-3-4° s'applique également aux sociétés, coexploitations et indivisions.

2. Les modifications proposées par l'article 16 du projet de loi d'orientation sont nombreuses

Outre une fusion
de l'ensemble des opérations soumises à autorisation préalable actuellement réparties aux articles L.331-2 et L.331-3 du Code rural, les innovations les plus importantes sont les suivantes :

le 1° de l'article L.331-2 assimile les exploitations individuelles et les sociétés en matière de contrôle des structures lors de l'installation, l'agrandissement ou d'une réunion d'entreprises agricoles. Cette égalité de traitement rompt avec le droit en vigueur ;

- les installations, que ce soit pour une personne physique ou morale, sont contrôlés au même titre que les agrandissements et les réunions d'exploitations : on sait que ce n'est pas le cas actuellement en ce qui concerne les opérations réalisées par des personnes physiques à titre individuel ;

- le seuil de déclenchement du contrôle fixé par le schéma directeur départemental des structures agricoles, fixé entre deux et quatre SMI, serait entre 0,5 et 1,5 fois unité de référence.

En outre, le troisième et dernier alinéa de ce 1° précise que toute diminution du nombre total des associés exploitants coexploitants, des codages indivisaires au sein d'une exploitation, est assimilée à un agrandissement. Celui ou ceux qui demeurent doivent donc déposer une autorisation pour poursuivre leur exploitation. Il est spécifié que cette autorisation peut leur être accordée à titre temporaire pendant deux ans pour qu'ils se mettent en conformité avec la réglementation. A l'issue de cette période, soit un nouvel exploitant entre dans la société et l'exploitation se poursuit sur la même superficie, soit celle-ci doit être réduite pour correspondre au seuil fixé par le schéma départemental.

Rappelons que l'article 10 prévoit une disposition permettant au preneur de demander la résiliation du bail à cette fin.

Votre rapporteur vous propose deux amendements. Le premier est relatif au seuil de déclenchement du contrôle des structures. Le second permet de prendre en compte les liens de parenté entre les associés (transmission père-fils ou père-fille par exemple) dans l'application du contrôle de structures.

le 2° de l'article L.331-2 proposé par l'article 16 prévoit qu'intervient un contrôle des démembrements :

- en cas de suppression d'une exploitation dont la superficie excède un seuil fixé par le schéma départemental des structures, compris entre le tiers et une fois l'unité de référence (au lieu de 2 fois la SMI),

- en cas d'opération ramenant la surface d'une exploitation en dessous du seuil de référence,

- en cas de suppression d'un bâtiment essentiel pour l'entreprise.

le 3° indique que sont aussi soumis à autorisation préalable les installations, agrandissements ou réunions d'exploitations lorsque l'un des exploitants :

- ne remplit pas les conditions de capacité ou d'expérience professionnelle, précisées à l'article R.331-1 du code rural,

- a atteint l'âge auquel il peut prétendre à bénéficier d'un avantage de vieillesse agricole, soit 60 ans.

Ces dispositions reprennent l'essentiel des dispositions du 1° de l'article L.331-3 du code actuel pour les personnes physiques et, partiellement, celles du 2° de l'article L.331-2 pour les sociétés, coexploitations et indivisions.

En outre, le dernier alinéa de ce 3° vise à empêcher certaines personnes, ayant la capacité professionnelle agricole, n'exerçant pas le métier d'agriculteur mais qui seraient des prête-noms pour permettre à d'autres de cultiver de plus grandes surfaces, d'occuper une " place virtuelle " au sein de l'exploitation.

Le 4° de l'article L.331-2 tend à contrôler davantage les mouvements au sein des sociétés et à lutter contre les phénomènes de concentration.

Devront faire l'objet d'une autorisation préalable :

- les participations d'exploitants à une nouvelle exploitation, et ce quelle que soit la qualité en vertu de laquelle l'exploitant intervient,

- les changements dans la répartition du capital qui ont pour effet de faire franchir à l'un des associés le seuil de 50 % du capital. Sont prises en compte non seulement les parts ou actions de l'associé mais aussi celles de son conjoint et de ses ayants-droit.

Néanmoins, l'autorisation peut être accordée à titre provisoire dans le cas où le franchissement du seuil ne résulterait pas de la volonté de l'intéressé. Il peut s'agit, comme le souligne le rapport de M. François Patriat, du départ d'un autre associé ou d'une augmentation des parts sociales résultant d'un héritage. Dans ce cas, l'intéressé dispose d'un délai de deux ans maximum pour se mettre en conformité avec la loi.

Votre rapporteur souligne l'insécurité juridique et financière qui entraîne l'instauration d'une telle autorisation provisoire.

Il est précisé par ce texte que cette disposition ne vise pas la seule participation financière au capital d'une exploitation, afin de respecter une certaine cohérence avec la définition de l'exploitant donnée aux articles précédents.

Votre rapporteur s'interroge sur le sens de la notion de " participation " figurant au premier alinéa du 4°. En effet, cette expression n'a aucune signification juridique.

En outre, votre rapporteur s'interroge sur la compatibilité de ces dispositions avec le droit des sociétés. Enfin, il observe le rétablissement d'une situation conforme au schéma directeur départemental des structures peut faire l'objet de multiples interprétations.


le 5° reprend les dispositions actuelles de l'article L.331-3-3° du Code rural en maintenant la distance maximum fixée par le Schéma directeur. Depuis la loi n° 88-1202 du 30 décembre 1988, article 20-II, ce maximum ne saurait être inférieur à 5 kilomètres. Cette distance est calculée par les voies d'accès les plus directes ou les plus usuellement pratiquées afin d'éviter que ne se développent des exploitations non structurées ;

Votre rapporteur vous propose de porter cette distance de 5 km à 10 km. Il faut en effet éviter de porter un grave préjudice à certaines exploitations familiales.

le 6° est une reprise des dispositions figurant au 4° de l'article L.331-3 pour les créations ou extensions de capacité hors sol. Néanmoins, une différence peut être relevée puisque l'expression " susceptibles de remettre en cause l'équilibre des structures sociales qui caractérisent cette activité " a été supprimée en raison de son caractère trop flou.

Les cas d'autorisation préalable étant énumérées, le texte proposé pour l'article L.331-2 conclut par deux alinéas importants :

- l'avant dernier aliéna précise le mode de détermination de la superficie à prendre en compte pour l'application de la procédure susmentionnée. Il est prévu que le contrôle des structures s'exerce sur la superficie totale mise en valeur par l'exploitant :

sont inclus dans cette superficie les surfaces exploitées par le demandeur, ainsi que celles des ateliers de production hors-sol -auxquels sont appliqués des coefficients d'équivalence- ; soulignons qu'une telle disposition figure déjà dans le code rural, au premier alinéa de l'article L.331-5, pour les productions hors-sol ;

sont exclus de la superficie prise en compte les bois, landes, taillis, friches et étangs autres que ceux servant à l'élevage piscicole. Si cette exclusion figure déjà dans l'article L.331-5 actuel du Code rural, deux modifications sont proposées dans la nouvelle rédaction : en effet, il n'est pas précisé que cette dérogation est valable " même si ces surfaces sont ensuite transformées en terre de culture " comme c'est le cas actuellement. Votre rapporteur s'interroge sur ce point . Par ailleurs, l'article 16 du projet de loi précise que le contrôle des structures reste valable pour " les terres mises en valeur en application de l'article L.125-1 dans les départements d'outre-mer (DOM) " : cette disposition a trait à la mise en valeur des terres incultes ;

Soulignons que certains députés, de la majorité comme de l'opposition, ont souhaité élargir le contrôle des structures aux superficies exploitées non seulement en France, mais aussi dans un autre pays de l'Union européenne.

Votre rapporteur est conscient du problème posé par les parts de société. La terre peut être, en effet, en propriété directe ou faire l'objet d'une structure sociétaire. La difficulté provient du fait que les sociétés qui investissent dans le foncier se développent de plus en plus hors de nos frontières (Luxembourg, Belgique, Allemagne). En outre, l'échange des parts sociales s'effectue à l'étranger. Ainsi le contrôle des structures n'a plus d'objet.

La prise en compte des surfaces détenues à l'étranger pour appliquer le contrôle des structures en France étant soumise au principe de la territorialité de la loi, votre rapporteur souhaite que le Gouvernement français engage à Bruxelles une consultation en vue d'élaborer une construction européenne en matière de contrôle.

- le dernier alinéa de l'article L.332-1 a trait au régime des opérations réalisées par les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER).

Les SAFER sont actuellement soumises au régime de la déclaration préalable " sauf en cas de suppression d'une unité économique indépendante dont la superficie est égale ou supérieure au seuil ", prévu pour éviter le démembrement d'exploitations viables.

Le texte du projet de loi reprend cette formule en l'adaptant au nouveau dispositif de contrôle des structures.

Il précise, en premier lieu, que sont soumises à autorisation préalable les opérations ayant pour conséquence :

- la suppression d'une unité économique égale ou supérieure au seuil fixé par le schéma départemental des structures, qui doit être compris entre 0,5 et 1 fois l'unité de référence, par renvoi au a) du 2° du présent article ;

- l'agrandissement, par attribution d'un bien préempté, d'une exploitation dont la surface totale excède 2 fois l'unité de référence.

Il prévoit, en second lieu que les SAFER doivent informer le préfet des autres opérations qu'elles réalisent. Cette procédure d'information devrait permettre de connaître les interventions des SAFER sans pour autant les soumettre à contrôle.

Article L.331-3 du code rural -

Critères d'examen des demandes

Cet article, qui modifie le dispositif de l'article L.331-3 du code rural, régit les modalités d'examen, par l'autorité administrative, de la demande d'autorisation en matière de contrôle des structures.

Les dispositions de l'actuel article L.331-3 étant intégrées dans le nouvel article L.331-2, l'article 16 du projet de loi propose un article L.331-3 comprenant dix alinéas et reprenant pour partie l'article L.331-7 en vigueur .

Au premier alinéa du texte proposé par l'article 16 pour l'article L.331-3 du code précité, il est indiqué que " l'autorité administrative " se prononcera sur la demande d'autorisation en se conformant aux orientations définies par le schéma directeur départemental des structures agricoles applicable dans le département dans lequel se situe le fonds faisant l'objet de la demande. La seule différence notable par rapport à l'actuelle rédaction de l'article L.331-6 est constituée par le fait que le terme " autorité administrative " se substitue à celui de préfet.

Votre rapporteur, tout en souscrivant à la volonté du Gouvernement de simplifier les textes, s'interroge sur la clarté de la rédaction utilisée à cet article.

En effet, deux hypothèses sont envisageables :

- soit l'article 16 regroupe dans cette nouvelle rédaction de l'article L.331-3, sous l'expression " autorité administrative ", le Préfet et la CDOA : si tel est le cas, on ne sait plus très bien qui se prononce : est-ce le Préfet qui accorde l'autorisation en ayant consulté la CDOA comme aujourd'hui, ou les deux organes seraient-ils désormais à égalité ?

- soit l'article 16 considère que la notion d'autorité administrative recouvre exclusivement le représentant de l'Etat, qui se prononce sur la demande d'autorisation, auquel cas la CDOA est exclue du dispositif. Mais pourquoi ne plus consulter cette commission sur la demande d'autorisation en matière de contrôle des structures ?

Votre rapporteur, préférant s'en tenir au mécanisme actuel vous propose un amendement tendant à clarifier ce texte.

Aux alinéas 2 à 8 du texte proposé pour l'article L.331-3, sont énumérées les orientations à prendre en compte dans l'examen de la demande d'autorisation. Certaines orientations figurent actuellement dans l'article L.331-7 du code rural :

- le 1) indique qu'il faut observer l'ordre des priorités établi entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations, en tenant compte de l'intérêt économique et social du maintien de l'autonomie de l'exploitation faisant l'objet de la demande. Cette disposition figure au 1° de l'article L.331-7. Cependant, en cas de pluralité de demandes, il conviendra de faire prévaloir l'installation qui est l'obligation prioritaire selon l'article L.331-1.

- le 2) précise que l'autorité administrative doit " s'assurer, en cas d'agrandissement ou de réunion d'entreprises, que toutes les possibilités d'installation d'exploitations viables ont été considérées " ; le 2° de l'article L.331-7 actuel ne fait référence qu'à une prise en compte, en cas d'agrandissement ou de réunion d'exploitations des possibilités d'installations sur une exploitation viable. La priorité à l'installation est donc à nouveau affirmée.

- le 3) évoque la prise en compte des " références de production ou droits à aide dont disposent déjà le ou les demandeurs ainsi que ceux attachés aux biens objets de la demande en appréciant les conséquences économiques de la reprise envisagée " ; cette mention est absente actuellement. Il s'agit donc d'une innovation puisque le Préfet doit apprécier les conséquences économiques de l'opération envisagé avant de prendre sa décision et limiter la concentration des droits à aides au bénéfice d'un demandeur.

- le 4) souligne que la situation personnelle du ou des demandeurs, notamment en ce qui concerne l'âge et la situation familiale ou professionnelle et, le cas échéant, celle du preneur en place doivent être considérées. Le 3° de l'article L.331-7 évoque déjà cette orientation ;

- le 5) a trait à la participation directe du demandeur à l'exploitation des biens ; la mise en valeur par un exploitant agricole est donc privilégiée par rapport à d'autres modes d'exploitation, faisant uniquement appel à des salariés ou à des mandataires. Lorsque le demandeur est une personne morale, on prend en compte la participation des associés à l'exploitation directe.

Cette mesure constitue elle aussi une nouveauté.

- le 6) reprend la rédaction de la fin du 3° de l'article L.331-7 tout en la précisant : en effet la prise en compte du nombre d'emplois concerne à la fois les emplois salariés, permanents et saisonniers, et les effectifs non salariés ;

- le 7) reprend la rédaction du 4° de l'article L.331-7 du code rural : il est ainsi fait mention de la structure parcellaire des entreprises concernées, soit par rapport au siège de l'entreprise, soit pour éviter que des mutations en jouissance ne remettent en cause des aménagements obtenus à l'aide de fonds publics.

- le 8) a pour objet la prise en compte d'une activité agricole un peu spécifique qui est l'agriculture biologique. Cet alinéa a été introduit au motif que ce mode cultural a besoin de délais plus importants que les autres.

Le dernier alinéa du texte proposé pour l'article L.331-3 indique que l'autorisation accordée peut ne porter que sur une partie de la demande lorsque des parcelles font l'objet de demandes prioritaires. Ainsi, un candidat à l'installation pourra se voir accorder une partie de la surface, l'autre étant accordée à un agriculteur voisin de la parcelle en question qui souhaite s'agrandir. En outre, il est prévu que cette autorisation peut être conditionnelle ou temporaire.

Outre l'insertion de l'avis de la CDOA, votre rapporteur vous propose un amendement :

- visant à prendre en compte le respect des règles de protection de l'environnement établies au niveau national et local ;

- tendant, par coordination, à supprimer la référence à l'agriculture biologique. En effet, il n'est pas possible de tenir compte dans cet article de chaque production agricole spécifique.

Article L.331-4 du code rural -

Préemption de l'autorisation d'exploiter

Cet article modifie l'article L.331-4 du code rural et y intègre les dispositions de l'actuel article L.331-9 relatives à la péremption de la demande d'autorisation en cas de non mise en culture du fonds.

L'article L.331-4 du code rural traite, dans sa rédaction actuelle, des opérations soumises à déclaration préalable. Le projet de loi propose de les regrouper dans l'article L.331-3 relatif aux " opérations soumises à autorisation ".

Comme c'est le cas aujourd'hui, selon les termes de l'article L.331-9 du code précité, l'autorisation d'exploiter se trouve périmée si le fonds n'a pas été mis en culture avant l'expiration de l'année culturale qui suit la date de la notification de la décision. Si le bien est loué, l'année culturale à prendre en considération est celle qui suit le départ effectif du preneur, sauf si la situation personnelle du demandeur au regard du contrôle des structures est modifiée.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article L.331-5 du code rural -

Transmission des informations à l'autorité administrative

Cet article refond l'article L.331-5 du code rural en y intégrant les dispositions figurant actuellement à l'article L.331-10 du code précité et relatives à la transmission d'informations concernant les structures à l'autorité administrative.

Le texte proposé par l'article 16 pour l'article L.331-5 impose, lorsque le préfet du département le demande, la transmission à cette autorité administrative des informations concernant les structures des exploitations figurant dans les fichiers de la MSA, dans les centres de formalités des entreprises et dans les registres de l'agriculture tenus par les Chambres d'agriculture ou dans le système intégré de gestion et de contrôle mis en place pour l'application de la réglementation communautaire et nécessaires au contrôle des structures.

Cette information doit permettre à l'autorité administrative d'avoir connaissance des mutations d'exploitations.

Par rapport à la version de l'actuel article L.331-10, cet article apporte deux modifications :

- En premier lieu, l'origine de ces informations est plus large puisqu'elle ne se limite pas aux fichiers de la MSA ; votre rapporteur souligne à cette occasion que le décret prévu à l'article L.331-10 du code rural n'a jamais été pris ;

- En second lieu, l'annualité de la transmission de ces transmissions d'information a disparu du texte proposé pour l'article L.331-5.

Votre rapporteur approuve sans réserve cette nouvelle rédaction. Il se félicite par ailleurs de ce que le système intégré de gestion et de contrôle fonctionne et que les centres de formalités des entreprises agricole soit en train de se mettre en place au niveau des Chambres d'agriculture.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article L.331-6 du code rural -

Nullité du bail en cas d'exploitation irrégulière

L'article 16 du présent projet de loi modifie l'article L.331-6 pour y intégrer les dispositions de l'article L.331-11, qui lie le sort du bail à la situation du locataire au regard du contrôle des structures.

Tout preneur lors de la conclusion d'un bail doit faire connaître au bailleur la superficie et la nature des biens qu'il exploite ; mention expresse en est faite dans le bail. Cependant aucune sanction spécifique n'est prévue lorsque cette obligation d'information n'est pas respectée. En conséquence, l'omission dans le bail des indications relatives à la superficie et à la nature des biens que le preneur exploite ne saurait affecter, à elle seule, la validité de la convention.

Si le preneur est tenu d'obtenir l'autorisation d'exploiter ou de présenter une déclaration préalable en application de l'article L.331-2 du Code rural, le bail est conclu sous réserve de l'octroi de ladite autorisation. La validité du bail rural se trouve donc liée au respect de la réglementation du contrôle des structures.

Le fait de ne pas avoir présenté la demande d'autorisation et le refus définitif de l'autorisation emportent la nullité du bail que le préfet, le bailleur ou la SAFER, lorsqu'elle exerce son droit de préemption, peut faire prononcer par le tribunal paritaire des baux ruraux. Rappelons pour mémoire que la jurisprudence a estimé que si une première demande a donné lieu à une décision d'autorisation partielle d'exploiter et si une seconde demande présentée n'a été suivie d'aucune décision administrative, il n'y a pas de refus définitif d'exploiter, seul de nature à emporter la nullité du bail.

De plus, la nullité ne peut affecter les baux en cours avant l'entrée en vigueur de la réglementation du contrôle des structures.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article L.331-7 du code rural -

Sanction administrative en cas de non respect
de la réglementation du contrôle des structures

L'article 16 du présent projet de loi intègre dans l'article L.331-7 les dispositions de l'article L.331-12, relatif aux sanctions civiles applicables aux exploitants propriétaires n'ayant pas respecté la réglementation du contrôle des structures.

Le texte proposé pour l'article L.331-7 comporte six alinéas.


Le premier alinéa prévoit que lorsqu'un fonds est exploité irrégulièrement par son propriétaire, l'autorité administrative le met en demeure de régulariser sa situation dans un délai qui ne saurait être inférieur à un mois.

Le deuxième alinéa précise que la mise en demeure exige de l'intéressé, soit qu'il cesse l'exploitation des terres lorsqu'une décision de refus d'autorisation est intervenue, soit qu'il présente une demande d'autorisation.

Le troisième alinéa tire la conséquence du refus par l'intéressé mis en demeure de présenter une demande d'autorisation dans les délais impartis par l'administration -c'est-à-dire le délai mentionné au premier alinéa- : il est dès lors mis en demeure de cesser toute exploitation des terres concernées dans un délai de même durée.

Le quatrième alinéa ouvre à l'intéressé la possibilité de présenter ses observations écrites ou orales devant toute instance ayant à connaître de l'affaire pendant le délai imparti pour cesser l'exploitation et ce, après que la cessation de l'activité a été ordonnée.

Le cinquième alinéa innove en ouvrant la possibilité d'une sanction pécuniaire d'un montant compris entre 2.000 et 6.000 francs par hectare lorsqu'à l'expiration du délai imparti pour cesser l'exploitation, l'autorité administrative constate la poursuite de l'activité. Sont précisées, par ailleurs, les modalités de prise en compte de la surface qui servira de référence pour la fixation du montant de la sanction. En outre, le sixième alinéa indique que cette sanction pécuniaire est renouvelable d'année en année lorsque le contrevenant poursuit l'exploitation illicite.

Le dispositif actuel n'offre comme possibilité à l'autorité administrative que de transmettre le dossier au Procureur de la République. En outre, l'article L.331-13 du code rural prévoit comme unique sanction économique l'impossibilité de bénéficier des aides publiques à caractère économique : cette réglementation se révèle donc peu opérante.

Les nouvelles dispositions proposées permettent, tout en respectant les droits de la défense, une gradation des mises en demeure avant d'aboutir à la sanction pécuniaire.

Article 16 du projet de loi d'orientation agricole pour l'article L.331-7 du code rural

Constatation par l'autorité administrative de l'utilisation irrégulière du fonds agricole

Délai >1 mois

Décision de refus d'autorisation

Observations écrites ou orales

Poursuite de l'activité

Cessation d'activité

Non cessation d'activité

Mise en demeure de cesser l'activité

Mise en demeure de présenter une demande d'autorisation

Absence de demande d'autorisation

Demande d'autorisation

Accord

Décision de refus d'autorisation

Sanction pécuniaire

Délai > 1 mois

Votre rapporteur approuve la mise en place d'une mesure administrative permettant de sanctionner véritablement les éventuels contrevenants. Il souhaite néanmoins atténuer le plafond de la sanction pécuniaire en l'abaissant de 6.000 francs à 4.000 francs.

Article L.331-8 du code rural -

Contestation de la sanction

Cet article propose une refonte de l'article L.331-8 du code rural. Il permet et organise la contestation de la sanction pécuniaire proposée à l'article précédent.

Le texte proposé pour l'article L.331-8 du code précité est constitué de quatre alinéas.

Dans le premier alinéa, il est indiqué que la sanction pécuniaire doit faire l'objet d'une notification à l'intéressé, qui peut la contester dans le mois de sa réception devant une commission de recours dont la composition et les règles de fonctionnement sont définies par décret en Conseil d'Etat. Cette contestation s'effectue avant tout recours contentieux.

Le deuxième alinéa précise que le recours devant cette commission est suspensif et que l'instruction est contradictoire. Le caractère suspensif de ce recours signifie, d'une part que l'intéressé est dispensé du paiement de l'amende dans l'attente de cette commission et, d'autre part, qu'il peut poursuivre son activité.

Le troisième alinéa souligne que la commission de recours doit motiver sa décision. Elle a le choix entre :

- confirmer la sanction pécuniaire arrêtée par le préfet,

- diminuer son montant " en raison d'éléments tirés de la situation de la personne concernée, "

- refuser toute sanction " en raison de l'insuffisance des preuves ".

Dans le cas où la commission confirme le principe de la sanction pécuniaire, cette sanction est recouvrable immédiatement, nonobstant les recours éventuels devant le tribunal administratif (quatrième alinéa).

Ces recours peuvent prendre la forme soit d'un recours pour excès de pouvoir contre la décision du préfet, soit un recours de pleine juridiction contre la décision de la commission.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article L.331-9 du code rural -

Suppression des aides publiques à caractère économique

Cet article reprend les termes de l'article L.331-13 du code rural.

Il s'agit d'empêcher toute personne qui continue d'exploiter un fonds malgré un refus d'autorisation devenu définitif de percevoir les aides publiques à caractère économique accordées en matière agricole : on peut citer notamment l'accès à la Dotation pour les Jeunes Agriculteurs (DJA), au Plan d'Amélioration du Matériel (PAM), aux prêts bonifiés consentis par les établissements de crédit ainsi qu'aux diverses aides mises en place dans le cadre des OCM (prévue à la vache allaitante, prime à l'extensification)...

L'application de cette sanction autorisée aux aides communautaires s'avère délicate, compte tenu de la spécificité de ces subventions. En tout état de cause, le refus de l'octroi des aides compensatoires aux cultures arables est limité " à la seule superficie objet de l'infraction vis-à-vis du contrôle des structures ".

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article L.331-10 du code rural

Poursuite de la mise en valeur du fonds

Cet article reprend, sous réserve d'une adaptation rédactionnelle liée à la disparition de la procédure de déclaration préalable, les troisième et quatrième alinéas de l'article L.331-12 relatif à la mise en valeur du fonds après une mise en demeure de cesser l'exploitation.

Lorsqu'un fonds est exploité par son propriétaire irrégulièrement, le préfet met en demeure ce dernier d'en assurer la mise en valeur conformément aux dispositions législatives ou réglementaires en vigueur (code rural, article L.331-12). Afin que le propriétaire n'ayant plus le droit d'exploiter ne mette plus en valeur le fonds et si, à l'expiration de l'année culturale au cours de laquelle intervient la mise en demeure, un nouveau titulaire du droit d'exploiter n'a pas été désigné, toute personne physique ou toute société immatriculée à objet agricole, intéressée par la mise en valeur du fonds, peut demander au tribunal paritaire des baux ruraux que lui soit accordé le droit d'exploiter ledit fonds.

En cas de pluralité de candidatures, le tribunal paritaire des baux ruraux statue en fonction de l'intérêt, au regard des priorités définies dans le schéma directeur départemental des structures, de chacune des opérations envisagées.

Lorsque le tribunal paritaire des baux ruraux accorde l'autorisation d'exploiter le fonds, il fixe les conditions de jouissance et le montant du fermage conformément aux dispositions du titre 1er du livre IV du code rural.

Rappelons que l'autorisation d'exploiter donnée par le tribunal s'analyse en un bail forcé soumis au statut du fermage.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article L.331-11 du code rural -

Décret en Conseil d'Etat

Cet article précise qu'un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions d'application des dispositions relatives au contrôle des structures. Ce décret devrait notamment prévoir toutes les règles relatives à la procédure d'autorisation préalable et à sa publicité, qui ne figurent plus dans la partie législative du code rural. Le tableau ci-après résume la procédure actuelle.

Demande adressée
au préfet

Information du propriétaire (dans la majorité des cas)

dans les 2 mois

Le préfet statue dans les quinze jours à l'expiration du délai de deux mois

Avis motivé de la CDOA

Absence de notification.

Dans les deux mois et 15 jours à compter de la date de la demande, l'autorisation est réputée acquise

Décision d'accord notifiée au demandeur (affichage en mairie)

Refus de l'autorisation notifié (affichage en mairie)

- au demandeur

- au propriétaire

- au fermier

Les articles 18 et 19 de l'avant projet de loi d'orientation agricole concernaient les modalités procédurales relatives au contrôle des structures. Le Conseil d'Etat a jugé que ces mesures ne révélaient pas un caractère législatif. Si votre rapporteur considère que certaines de ces dispositions ont bien un caractère législatif -notamment celle sur l'information des propriétaires, sur l'autorité compétente à même de décider...-, il ne souhaite pas pour autant surcharger ce chapitre déjà fort complexe. Il se contentera donc de mentionner dans la loi quelques éléments de ce processus.

- lorsque la demande d'autorisation dépasse une certaine superficie, la vacance des biens doit faire l'objet d'une publicité préalable, par annonce dans un journal local ;

- la CDOA doit disposer d'un délai de 3 mois pour adresser son avis au préfet ;

- le préfet doit pouvoir différer sa décision dans un délai de 6 mois lorsque le fonds peut permettre une installation définie à l'article L.330-1.

Votre rapporteur vous propose d'adopter le texte proposé pour cet article sans modification.

Votre commission vous propose d'adopter l'ensemble de cet article ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 16 -

Rapport sur l'encouragement à l'investissement dans le foncier agricole

Cet article additionnel prévoit une étude des moyens à mettre en oeuvre pour encourager l'investissement dans le foncier agricole, dans le cadre de la politique d'installation.

L'installation hors cadre familial est nécessaire pour maintenir une population agricole suffisante. Elle ne réussira que dans la mesure où du foncier peut être mis à la disposition de ces jeunes par bail à ferme. Le poids actuel des capitaux d'exploitation indispensables à l'installation rend, en effet, quasiment impossible l'acquisition des terres et des bâtiments nécessaires.

Les statistiques révèlent que les jeunes agriculteurs actuellement bénéficiaires des aides à l'installation mettent en valeur des exploitations dont la SAU est à plus de 90% en fermage.

Un rapport présenté par le Gouvernement doit pouvoir explorer les moyens à mettre en oeuvre pour encourager l'investissement dans le foncier agricole en favorisant le portage sociétaire, en encourageant les investisseurs et en facilitant l'acquisition grâce à des financements adaptés.

En conséquence, votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Article 17 -

Révision du schéma directeur départemental des structures

Cet article prévoit la révision du schéma directeur départemental des structures.

L'article 17 prévoit :

- la révision du schéma directeur départemental des structures, dans un délai de dix-huit mois à compter de la publication de la loi d'orientation agricole ;

- la mise en cohérence du schéma avec le projet agricole départemental élaboré en application du deuxième alinéa de l'article L.313-1 du code rural ;

- le maintien, à titre transitoire, des schémas directeurs départementaux jusqu'à l'approbation des schémas révisés.

Votre rapporteur tient à rappeler l'importance du schéma directeur départemental des structures. Ce document est habituellement divisé en trois parties.

La première partie a trait au constat et à l'analyse de la situation économique et structurelle des exploitations par petites régions ou groupes de petites régions. La situation démographique, la situation foncière, la typologie technico-économique des petites régions agricoles, y sont traitées.

La deuxième est consacrée à la détermination des orientations et des priorités à respecter dans la région en cause, compte tenu des tendances et des perspectives d'évolution.

La troisième précise les moyens à mettre en oeuvre pour l'application du contrôle des structures.

Le schéma directeur départemental des structures se voit assigner un double objet :

- D'une part, il détermine pour chaque département les priorités de la politique de l'aménagement des structures d'exploitation. En tant que document d'orientation, il constitue donc un élément de référence essentiel, lors de l'instruction des demandes d'autorisation d'exploiter et de l'appréciation de la motivation des décisions prises.

Ainsi, la commission départementale, lorsqu'elle donne son avis sur une demande d'autorisation et le Préfet, qui motive sa décision, sont tenus de se conformer aux orientations définies par le schéma directeur du département sur le territoire duquel est situé le fonds, notamment pour ce qui concerne l'ordre des priorités établi entre l'installation des jeunes agriculteurs et l'agrandissement des exploitations.

- D'autre part, le schéma directeur doit fixer les principales modalités de mise en oeuvre du contrôle des structures. A ce titre, y figurent les dispositions variables, selon les départements, relevant du contrôle des structures. En outre, il établit les divers critères objectifs de mise en oeuvre de contrôle : surface minimum d'installation, seuil du déclenchement du contrôle.

Ce schéma est donc une illustration parfaite de la " régionalisation " des normes. Votre rapporteur considère que ce document, aujourd'hui destiné à organiser les transferts de droit d'exploiter, pourrait, demain, servir de guide pour gérer la circulation des droits à produire et de commercialisation.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 17 bis -

Contrôle des regroupements de références laitières

Cet article vise à contrôler les regroupements de références laitières, sans mouvement de foncier correspondant, qui échappent aujourd'hui aux prélèvements effectués en cas de réunions d'exploitations.

Cet article est composé de deux paragraphes. Le paragraphe I rend obligatoire le dépôt d'une demande d'autorisation préalable auprès du préfet du département en cas de:

- constitution d'association ou de personne morale entre producteurs de lait de vache ;

- mise en commun entre ces mêmes producteurs d'ateliers ou d'autres moyens de production laitière,

et ce, dès lors que le regroupement comporte ni cession, ni location, ni mise à disposition des surfaces utilisées pour la production laitière.

Le préfet dispose de trois mois pour délivrer une autorisation de regroupement qui doit être en conformité avec le régime du prélèvement supplémentaire dans le secteur du lait et des produits laitiers institué par le règlement (CEE) n° 3950/92 du Conseil du 28 décembre 1992.

Le paragraphe II prévoit que l'autorité administrative met les intéressés en demeure de régulariser leur situation dans un délai de deux mois lorsque :

- le regroupement a été effectué sans demande préalable ;

- le regroupement a été effectué alors que le Préfet avait notifié une décision de refus ;

- les conditions du regroupement ont été modifiées après l'autorisation administrative.

Le dernier alinéa de l'article 17 précise que l'autorité administrative peut procéder à tous les contrôles nécessaires auprès des productions et vérifier sur place le fonctionnement de l'atelier de production afin de rechercher et constater les irrégularités.

Actuellement, des regroupements de références laitières, sans mouvement de foncier correspondant, sont opérés à seule fin d'échapper aux prélèvements effectués en cas de réunion d'exploitations. Différents " montages " juridiques permettent ainsi de contourner la réglementation élaborée notamment par le décret du 22 janvier 1996 qui a mis en place un dispositif de prélèvement lors du transfert de références laitières résultant de l'agrandissement ou de la réunion d'exploitations laitières. Les quantités prélevées sont ainsi réattribuées à des jeunes agriculteurs récemment installés ou production laitière, ainsi qu'à d'autres producteurs auxquels elles permettent d'assurer la rentabilité de leur exploitation.

Dans l'arrêt Ballmann, la Cour de justice européenne a reconnu la possibilité de rapprochement entre deux ou plusieurs exploitations pour leur activité laitière, sans transfert du foncier, notamment par la réunion des cheptels et pour l'utilisation commune de moyens de production. Ce rapprochement n'entraîne pas de prélèvement sur les quotas laitiers sous réserve que la gestion de ceux-ci reste totalement distincte et qu'il réponde aux conditions cumulatives suivantes : existence d'un contrat entre le propriétaire du bâtiment et de ses équipements et l'utilisateur, autonomie de gestion et de décision de chacun des membres par rapport à son exploitation.

La vérification du respect de ces conditions implique que les regroupements soient connus de l'administration.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

CHAPITRE III -
Statut des conjoints travaillant dans les exploitations
et les entreprises et des retraités agricoles non salariés

Ce chapitre regroupe les articles 18 à 29 ter.

Les mesures les plus importantes concernent le statut du conjoint collaborateur, ainsi que les retraités agricoles et la mutualité sociale agricole.

Votre rapporteur, en ce qui concerne les dispositions de ce chapitre III du projet de loi, a décidé de ne déposer aucun amendement, s'en remettant, sur ce point, à la commission des affaires sociales, saisie pour avis.

Article 18 -
(Article L.321-5 du code rural) -

Création du statut de conjoint collaborateur

Cet article insère dans le code rural un article L.321-5 relatif au conjoint " collaborateur ".

L'article L.321-5 proposé par l'article 18 du projet de loi s'insère dans la section I (rapports entre les membres de l'exploitation familiale) du Chapitre Premier (L'exploitation familiale à responsabilité personnelle) du Titre II (Les différentes formes juridiques de l'exploitation agricole) du Livre III relatif à l'exploitation agricole.

Le texte proposé pour cet article L.321-5 est constitué de quatre alinéas :

Le premier alinéa offre la possibilité au conjoint du chef d'exploitation ou d'entreprise agricole non constituée sous la forme d'une société ou d'une co-exploitation entre les conjoints d'exercer son activité professionnelle en qualité de " collaborateur d'exploitation agricole ".

Le deuxième alinéa prévoit, sous réserve des dispositions de l'article L.321-1 relatif à la co-exploitation, que ce nouveau statut peut être obtenu aussi par le conjoint de l'associé d'une exploitation agricole constituée sous la forme d'une société. Il est cependant nécessaire que ce conjoint de l'associé ne soit pas lui-même associé de cette société pour pouvoir en bénéficier.

Le troisième alinéa précise les conditions que le conjoint doit remplir pour opter pour le statut de conjoint collaborateur :

- le bénéfice de ce statut doit être demandé par le conjoint en accord avec le chef d'exploitation ;

- l'entreprise agricole sur laquelle le conjoint exerce son activité doit atteindre au minimum 80 % de la SMI, conformément aux dispositions de l'article 1003-7-1 du code rural.

Le quatrième et dernier alinéa prévoit, dans le cas où le conjoint opte pour ce nouveau statut, qu'il doit cotiser pour la retraite proportionnelle et bénéficier du salaire différé. En outre, il bénéficie, au titre du deuxième alinéa de l'article L.321-1 du code rural, du mandat pour accomplir des actes d'administration.

Votre rapporteur se félicite de la mise en place d'un tel statut .

Actuellement, s'ils n'ont pas opté pour le statut de co-exploitant ou celui d'associé d'une exploitation sous forme sociétaire, les conjoints d'agriculteurs sont présumés participer aux travaux de l'exploitation familiale. Ce statut de droit commun est applicable par défaut aux épouses d'agriculteurs, dès lors qu'elles n'exercent pas une autre activité professionnelle et qu'elles n'ont pas opté expressément pour un autre statut.

Votre rapporteur souligne que le 16 avril 1996, le ministre de l'Agriculture, de la Pêche et de l'Alimentation avait présenté un rapport 30( * ) devant le Sénat afin d'introduire un débat sur le " statut des conjoints d'exploitants et des autres membres de la famille associés aux travaux d'exploitation " conformément à l'article 46 de la loi de modernisation de l'agriculture de 1995.

Rappelons pour mémoire que sur 601.200 conjoints (SCESS-1993), 487.700 sont des femmes dont 60 % d'entre elles déclarent travailler sur l'exploitation. Néanmoins 80 % des conjoints travaillent à temps partiel sur les exploitations.

Votre rapporteur indique que la situation actuelle des conjoints se caractérise par des statuts juridiques, économiques et sociaux assez différents.

- Les conjoints sont pour leur majorité régis par le statut de conjoint participant aux travaux qui résulte d'une présomption de travail sur l'exploitation dès lors que le conjoint ne relève pas d'un autre statut agricole ou d'un autre secteur d'activité.

Actuellement, le conjoint participant aux travaux a une reconnaissance sociale limitée : ayant droit du chef d'exploitation en assurance maladie, il peut bénéficier d'une allocation de remplacement en cas de maternité. Il peut prétendre à une retraite forfaitaire moyennant une cotisation de 3 % versée par le chef d'exploitation sur son revenu professionnel. Le montant de cette retraite est de 17.336 francs par an.

Au regard des aides économiques , sa participation aux travaux est partiellement reconnue par une majoration de la DJA et des possibilités supplémentaires de prêts bonifiés de modernisation.

- Les autres conjoints sont soit co-exploitants, soit associés en société.

Sur le plan social,
au sein de ces deux statuts les droits sont comparables et sont ceux des chefs d'exploitation. Ils cotisent en maladie et en vieillesse individuellement en s'assurant les mêmes droits à la retraite forfaitaire et à la retraite proportionnelle.

Au regard des aides économiques et notamment de l'accès aux prêts ou aux aides à l'installation, le conjoint co-exploitant se trouve dans la situation du conjoint participant aux travaux tandis que le conjoint associé bénéficie individuellement des aides.

Ces situations, parfois délicates, nécessitent des réponses que l'article 18 du projet de loi est en mesure d'apporter.

Sur le plan juridique : les droits du conjoint en cas de décès, de séparation ou de divorce résultent de constructions jurisprudentielles complexes qui ne constituent pas une réponse stable.

Sur le plan social : le statut de conjoint participant aux travaux ne correspond plus aux aspirations des agriculteurs d'aujourd'hui, qui préfèrent un statut positif et optionnel à un statut par défaut.

L'objectif de la réforme n'est pas seulement de créer au profit de ces conjoints un nouveau statut leur garantissant des droits à retraite améliorés, mais aussi de passer d'un " statut résiduel " à un statut délibérément choisi lorsque ces conjoints n'ont pas souhaité devenir co-exploitant ou associé de société.

Votre rapporteur s'interroge néanmoins sur le fait de savoir si le conjoint, lorsqu'il n'opte pas pour ce statut, dispose encore du bénéfice du mandat pour accomplir des actes d'administration.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 18 bis -
(Article 16 de la loi n° 97-1051 du 18 novembre 1997 d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines) -

Statut du conjoint du copropriétaire embarqué et du conjoint du chef d'exploitation de cultures marines

Cet article vise à étendre au domaine de la pêche et des cultures marines le bénéfice de l'article 18 du projet de loi d'orientation agricole.

Le I de l'article 16 de la loi n° 97-1051 du 18 novembre 1997 d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines octroie une pension versée par la caisse de retraites des marins au conjoint du patron propriétaire embarqué ou du chef d'exploitation ou d'entreprise de cultures marines relevant du régime spécial de sécurité sociale des marins.

L'article 18 bis adopté par l'Assemblée nationale a deux objets :

- d'une part, il tend à préciser que le statut du conjoint de patron pêcheur, instauré par le I de la loi n° 97-1051, s'applique dans les mêmes conditions au conjoint du copropriétaire embarqué afin d'éviter une interprétation restrictive, contraire à l'esprit initial de la loi ;

- d'autre part, il vise à tirer les conséquences du dispositif institué par l'article 18 du projet de loi d'orientation agricole. En effet, les mesures prévues pour les conjoints des chefs d'exploitation agricole dans ce projet de loi (droits d'assurance vieillesse et créance sur salaire différé) vont s'appliquer aux conjoints des chefs d'exploitation de cultures marines lorsque ces derniers relèvent du régime agricole. C'est notamment le cas des conchyliculteurs, qui relèvent soit de l'ENIM, soit de la MSA. Il convient donc de préciser que le statut du conjoint du chef d'exploitation s'applique également au conjoint de l'associé d'une exploitation de cultures marines lorsque celui-ci relève du régime spécial des marins, et non du régime agricole.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 19 -
(Article 1122-1 du code rural) -

Suppression progressive de la qualité de conjoint participant aux travaux

Cet article modifie l'article 1122-1 du code rural relatif au droit à la retraite forfaitaire des conjoints présumés participant aux travaux de l'exploitation.

En raison de la réforme opérée par l'article 18 du projet de loi, des modifications s'imposent à l'article 1122-1 du code rural.

Ces modifications font l'objet de deux paragraphes dans l'article 18 du projet de loi.

Le paragraphe 1° donne une nouvelle rédaction de la première phrase du premier alinéa de l'article 1122-1 en indiquant que le conjoint du chef d'exploitation ou d'entreprise agricole qui a le statut de conjoint participant aux travaux peut bénéficier d'une pension de retraite forfaitaire, sous réserve des dispositions du dernier alinéa de l'article 1122-1 introduit par le paragraphe II de l'article 46 du projet de loi. Ce premier paragraphe permet donc de maintenir le dispositif de la retraite forfaitaire pour les conjoints participant aux travaux .

Le paragraphe 2° permet d'envisager plusieurs situations en fonction du choix des conjoints, à compter du premier jour du mois suivant la publication du décret prévu à l'article L.321-5 :

- si le conjoint souhaite garder le statut actuel du conjoint participant aux travaux , les dispositions de l'article 1122-1 lui seront appliquées ainsi qu'aux membres de sa famille. Il pourra donc continuer à ne cotiser qu'au régime de retraite forfaitaire ;

- si le conjoint opte pour le nouveau statut de " collaborateur d'exploitation ", c'est le dispositif de l'article 1122-1-1 mis en place par l'article 20 du projet de loi qui sera mis en oeuvre.

Le paragraphe procède donc à la suppression du principe de présomption du statut de conjoint participant aux travaux. En effet, le statut, à compter de l'entrée en vigueur de la loi sera probablement remplacé par celui de collaborateur d'exploitation, devenant ainsi un statut en voie d'extinction sans nouveaux entrants.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 20 -

La retraite proportionnelle des conjoints collaborateurs

Cet article tend à insérer dans le code rural un nouvel article 1122-1-1 relatif à la retraite des conjoints " collaborateurs d'exploitation ou d'entreprise ".

Le texte proposé pour l'article 1122-1-1 proposé par l'article 20 du projet de loi est constitué de deux paragraphes.

Le premier paragraphe comporte cinq alinéas.

Il est tout d'abord précisé que le conjoint-collaborateur a droit à une pension de retraite (premier alinéa) comprenant :

- une pension de retraite forfaitaire, et ce dans les conditions prévues au 1er de l'article 1121 ;

- une pension de retraite proportionnelle, dans les conditions prévues soit à l'article 1121-2°, soit à l'article 1142-5-2° relatif au versement des pensions de retraite en outre-mer.

Le quatrième alinéa de l'article 1121-1-1 prévoit, en outre, qu'au cours des deux prochaines années, le conjoint collaborateur peut racheter des points pour les années où il cotisait pour la retraite forfaitaire.

Le cinquième et dernier alinéa du paragraphe I indique qu'au décès du conjoint collaborateur, le chef d'exploitation survivant peut bénéficier d'une pension de réversion cumulable avec sa propre pension.

Le paragraphe II du nouvel article 1121-1-1 permet aux chefs d'exploitation ou d'entreprise agricole qui ont eu pendant un certain temps le statut de conjoint collaborateur d'entreprise de racheter des points de retraite proportionnelle. Le nombre de ces personnes durant la période 1998-2003 est évalué à 48.500 personnes.

Votre rapporteur approuve un tel dispositif. Les conjoints qui opteront pour ce nouveau statut acquerront dorénavant des droits, non plus seulement à la retraite forfaitaire mais également à la retraite proportionnelle, à concurrence de 16 points par an selon les informations fournies à votre rapporteur. Au terme d'une carrière pleine de 37,5 années accomplies dans ces conditions, les intéressés seront assurés de percevoir une pension de retraite globale, retraite forfaitaire et retraite proportionnelle cumulées de 29.570 francs (valeurs 1998), soit une amélioration de l'ordre de 70 % par rapport au statut actuel.

Toutefois, les effets de cette réforme ne se feront sentir que progressivement : dans les prochaines années un nombre important d'assurés partiront à la retraite avec des pensions minorées du fait qu'avant de parvenir au statut de chef d'exploitation ou à celui de conjoint collaborateur, ils ont été considérés plus ou moins longtemps comme conjoints participants aux travaux et qu'ils n'ont pu se constituer, pendant cette période, des droits à la retraite proportionnelle.

Aussi, votre rapporteur se félicite qu'une possibilité de rachat de points de retraite proportionnelle soit proposée aux conjoints qui, ayant eu le statut de conjoint participant aux travaux, opteront pour le statut de conjoint collaborateur ou accéderont à celui de chef d'exploitation.

La mesure ne devrait entraîner aucun coût budgétaire durant la phase 1998-2003 . Elle pourrait même se traduire temporairement par des recettes supplémentaires résultant des rachats de points à taux avantageux.

Au-delà de 2003 , compte tenu de la démographie et des conditions réglementaires prévus pour le rachat, les effectifs des conjoints susceptibles d'être concernées par la mesure se réduiront par rapport à la période antérieure. Les dépenses annuelles supplémentaires de retraites induites par le rachat concerneront :

- les conjoints actuellement âgés de moins de 55 ans, qui auront choisi de devenir conjoints collaborateurs (ou co-exploitants ou associés d'exploitation) et auront racheté des points pour tout ou partie de la période considérée et qui prendront leur retraite, soit 1.500 personnes pour chaque classe d'âge à la retraite ;

- les conjoints également âgés de moins de 55 ans aujourd'hui qui seront devenus chefs d'exploitation et auront racheté des points pour tout ou partie de la même période et qui partiront à la retraite, soit environ 5.000 personnes arrivant chaque année à l'âge de la retraite.

Les dépenses supplémentaires de retraite induites par le rachat de points à un coût favorable de 117 francs s'élèvent, pour chaque classe d'âge, à 130 millions de francs.

La mesure ne devrait entraîner aucun coût pour le BAPSA jusqu'en 2001. Ensuite, le coût augmente progressivement et sera de toute façon limité.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 21 -
(Article 1123 du code rural) -

Paiement par le chef d'entreprise de la cotisation d'assurance vieillesse du conjoint collaborateur

Cet article complète l'article 1123 du code rural en précisant qu'il appartient au chef d'exploitation ou d'entreprise de payer la cotisation de retraite du collaborateur d'exploitation ou d'entreprise.

L'article 21 complète le b) de l'article 1123 du code rural en indiquant que le chef d'exploitation ou d'entreprise, qui s'acquitte déjà de la cotisation due pour la couverture des dépenses de prestations de l'assurance-vieillesse agricole pour les aides familiaux, doit payer celle du conjoint collaborateur d'exploitation ou d'entreprise.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 22 -
(Article 1121-5 du code rural) -

Revalorisation des retraites

Cet article insère dans le code rural un article 1121-5 attribuant aux conjoints dont la retraite a pris effet le 31 décembre 1997 une attribution gratuite de points de retraite proportionnelle.

L'article 22 du projet de loi crée un article 1121-5 dans le code rural. Il est composé de trois alinéas.


Le premier alinéa prévoit le versement d'une attribution gratuite de points de retraite proportionnelle aux personnes dont la retraite a pris effet après le 31 décembre 1997.

Plusieurs conditions doivent être néanmoins réunies pour bénéficier de cette attribution :

- le nombre de points acquis à titre personnel par l'intéressé pour sa retraite proportionnelle doit être inférieur à un niveau fixé par décret ;

- le bénéficiaire doit pouvoir justifier d'une durée d'assurance fixée par décret accomplie dans le régime d'assurance vieillesse des personnes non salariées des professions agricoles ;

- les personnes concernées ne doivent pas être titulaire d'un des avantages personnels de vieillesse et d'invalidité mentionnés au deuxième alinéa de l'article 1121-1 à l'article 1122 (réversion et avantages de vieillesse) ou au troisième alinéa de l'article 1122-1 et au cinquième alinéa du I de l'article 1122-1-1.

Le deuxième alinéa fixe les modalités de calcul du nombre de points attribué, afin d'assurer les intéressés d'un niveau minimum de pension de retraite professionnelle.

Le troisième et dernier alinéa prévoit la majoration de ce niveau minimum en faveur :

- des conjoints dont la retraite a pris effet après le 31 décembre 1998 et qui ont opté pour le statut de conjoint collaborateur,

- des aides familiaux,

- et le cas échéant, des chefs d'exploitation ou d'entreprise.

Il est ensuite fait état des modalités de calcul du nombre de points supplémentaires gratuits attribué aux intéressés.

En outre, il est précisé que les chefs d'exploitation ou d'entreprise agricoles sont considérés comme aides familiaux pour l'application des dispositions de cet alinéa dès lors qu'ils ont exercé le métier d'aide familiale pendant une durée définie par décret. Il s'agit par d'adapter aux conjoints, aides familiaux et chefs d'exploitation, visés à l'article 22 de la loi d'orientation agricole, la nouvelle revalorisation des retraites forfaitaires prévue dans le cadre de la loi de finances pour 1999, de façon à prévenir toute distorsion de traitement au détriment des agriculteurs.

Dans sa rédaction actuelle, l'article 22 permet en effet d'étendre aux aides familiaux, conjoints et chefs d'exploitation à carrière mixte, partis en retraite après le 31 décembre 1997, le bénéfice des revalorisations de retraite jusqu'alors réservées aux retraités d'avant 1998.

En cas de carrière complète en agriculture, ces nouveaux pensionnés auront donc droit à une majoration exprimée en points de retraite proportionnelle, égale à 6.600 francs par an. Ce montant représente l'équivalent de ce qui est accordé aux anciens retraités au titre des lois de finances pour 1997, mesure dite des 1.500 francs, puis pour 1998, mesure dite des 5.100 francs.

Dès lors que le projet de loi de finances pour 1999 prévoit pour les anciens retraités à compter du 1er janvier 1999 une revalorisation dont le montant variera selon que l'intéressé avait le statut de conjoint, d'aide familiale ou de chef d'exploitation, il a paru nécessaire, par souci d'équité, d'introduire, dans la présente loi, une disposition qui permette d'appliquer aux retraites liquidées après 1997 cette revalorisation.

Lorsque le bénéficiaire est un conjoint, les conditions sont adaptées aux spécificités du statut du conjoint collaborateur d'exploitation ou d'entreprise.

Cette mesure s'appliquera à 31.500 actifs familiaux en 1999.

La question des retraites agricoles est fort complexe

Le nombre des non-salariés agricoles retraités s'élève à environ 2.100.000 personnes. Ils représentent 16 % de l'ensemble des retraités, mais ne perçoivent que 4,9 % de l'ensemble des pensions versées annuellement. Seuls 2 % des exploitants perçoivent une retraite agricole supérieure à 75 % du SMIC. Par ailleurs, 41 % des 885.000 retraités agricoles chefs d'exploitation sont des polypensionnés qui ne perçoivent en moyenne que 29 % de leur retraite de la MSA, 30 % provenant du régime général et 41 % d'autres régimes. Ces chiffres confirment la faiblesse des retraites perçues par les retraités agricoles.

Alors que peu d'améliorations avaient été apportées jusqu'en 1993, des mesures significatives ont été prises depuis : d'abord, le dispositif de revalorisation prévu par la loi du 18 janvier 1994, a concerné les chefs d'exploitation qui ont été auparavant aides familiaux ; puis, la loi de modernisation de l'agriculture du 1er février 1995, a rendu possible, à compter du 1er janvier 1995, le cumul entre les droits propres à une pension de retraite et la pension de réversion dont peut bénéficier le conjoint survivant d'un agriculteur ; de plus, cette loi a accordé un relèvement forfaitaire de 6.000 francs par an pour les personnes veuves avant 1995 ; le dispositif de la loi de finances pour 1997, a concerné, d'une part, les chefs d'exploitation, d'autre part, les conjoints et les aides familiaux ;

En 1998, le Gouvernement a engagé un plan pluriannuel de revalorisation des petites retraites agricoles qui s'est traduit par l'attribution de 5.100 francs supplémentaires de retraite forfaitaire aux aides familiaux, aux conjoints et à ceux d'entre eux devenus chefs d'exploitation pendant une courte période.

La loi de finances pour 1999 comporte une mesure de revalorisation de 1,6 milliard de francs en année pleine. Elle permettra de porter à 3.000 francs par mois les pensions des 218.000 chefs d'exploitation qui ont eu une carrière complète, à 2.800 francs par mois celles de 174.000 veuves, à 2.500 francs par mois celles des aides familiaux et à 2.200 francs par mois celles des conjointes.

Ces mesures ont amélioré significativement le niveau de certaines pensions. Cependant, le niveau actuel des pensions de retraités agricoles met en évidence l'effort important qu'il reste à accomplir pour assurer à ces derniers un niveau de retraite comparable à celui des autres catégories sociales.

Afin de porter les pensions forfaitaires au minimum vieillesse, le coût net de la revalorisation sera d'environ 4 milliards de francs, dont 1,6 milliard programmé dans le budget pour 1999. Au rythme actuel, il faudra donc entre deux et trois ans pour atteindre l'objectif.

Pour atteindre 75 % du SMIC net, soit 3.900 francs, il faudra 4 milliards de francs supplémentaires.

Votre rapporteur approuve pleinement ce dispositif qui permet aux conjoints qui prendront leur retraite à compter du 1er janvier 1998 de bénéficier d'une majoration de leur retraite proportionnelle jusqu'à ce qu'ils aient pu, notamment par le rachat d'années antérieures, se constituer des droits suffisants.

Les retraités agricoles ont droit à la reconnaissance sociale. Ils ont beaucoup oeuvré pour amener notre agriculture à l'une des toutes premières places au niveau mondial. En outre, ils ont souvent exercé des travaux pénibles, tout en supportant des durées de travail hebdomadaire très importantes, sans congés ni jours de repos, pour la plupart d'entre eux. Ils ont travaillé souvent beaucoup plus que les trente-sept annuités et demie exigées par le régime de la fonction publique et les quarante annuités exigées par le régime de droit commun.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 23 -
(Article 1106-3-1 du code rural) -

Prise en charge des frais de remplacement en cas de maternité

Cet article modifie la première phrase du premier alinéa de l'article 1106-3-1 du code rural permettant la prise en charge totale des frais de remplacement en cas de maternité.

L'article 1106-3-1 prévoit
actuellement que l'assurance maternité prend en charge la couverture partielle des frais exposés par les personnes du sexe féminin pour assurer leur remplacement dans les travaux de l'exploitation agricole.

Votre rapporteur approuve la réforme proposée par l'article 23 du projet de loi qui vise à prendre en charge la totalité de ces frais.

Rappelons pour mémoire que le régime d'assurance maladie, maternité et invalidité applicable aux exploitants agricoles a été mis en place par la loi n° 61-89 du 25 janvier 1961, complétée par les décrets n°61-294 et 61-295 du 31 mars 1961.

Avant l'entrée en vigueur de ces dispositions, de nombreux agriculteurs, par manque d'information ou de moyens financiers, étaient privés de protection. Désormais, obligation est faite à tous les non-salariés de se prémunir contre les risques auxquels ils sont exposés.

Il convient de préciser qu'une femme concernée sur trois seulement recourt à une possibilité de remplacement sur l'exploitation à l'occasion d'une maternité, ce qui pose un véritable problème de santé publique.

La garantie est offerte, indistinctement par les caisses de mutualité sociale agricole ou par tout autre organisme d'assurance habilité, aux chefs d'exploitation mais aussi aux membres de leur famille (conjoint, enfants), aux associés d'un groupement et aux titulaires d'un avantage de vieillesse, d'une indemnité de départ ou d'une pension d'invalidité.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 24 -
(Article 1003-12 du code rural) -

Cotisations des nouveaux salariés

Cet article modifie l'article 1003-12 du code rural relatif à la détermination de l'assiette des cotisations dues au régime de protection sociale des personnes non salariées des professions agricoles.

1.
L'article 24 est constitué de trois paragraphes (1°, 2° et 3°).

Le 1° propose une nouvelle rédaction du paragraphe III de l'article 1003-12 du code précité.

Actuellement, l'assiette des cotisations est déterminée forfaitairement par décret, soit lorsque la durée d'assujettissement ne permet pas de calculer la moyenne des revenus professionnels se rapportant aux trois années de référence, soit lorsque les intéressés, ayant la qualité de gérants ou d'associés de sociétés, ne sont pas soumis à l'impôt sur le revenu dans l'une des catégories mentionnées au paragraphe I du présent article.

Les modifications introduits par le 1 ° de l'article 24 du projet de loi sont les suivantes :

le mécanisme de l'assiette forfaitaire définitive est supprimé pour les nouveaux installés (premier alinéa du III).

En effet, l'assiette forfaitaire des cotisations sociales constitue jusqu'à présent une assiette définitive qui s'applique durant la ou les premières années d'activité et se justifie du fait de l'absence de revenus professionnels antérieurs.

C'est cette assiette que le projet de loi entend rendre provisoire, en lui substituant dès qu'ils seront connus, les revenus professionnels correspondant aux premières années.

Il est en outre prévu que les conjoints, ayant participé aux travaux avant de s'installer en qualité de chef d'exploitation avec leur époux, voient leurs cotisations assises sur la part correspondant à leur participation aux bénéfices dans les revenus du foyer fiscal, et non sur une assiette forfaitaire (deuxième alinéa du III). Ainsi, dès la première année, le revenu dégagé antérieurement par l'exploitation est partagé entre les époux pour le calcul des cotisations.

Enfin, pour le conjoint reprenant l'exploitation, l'assiette des cotisations est constituée par les revenus dégagés par le cédant (troisième alinéa du III). Cette disposition concerne donc le transfert entre époux. L'ensemble du revenu agricole du foyer fiscal sert donc de base pour le calcul de la cotisation du nouvel exploitant.

Le quatrième alinéa proposé pour le paragraphe III de l'article 1003-12 précise que les dispositions relatives aux conjoints devenant co-exploitants et au transfert entre époux ne sont applicables que si la consistance de l'exploitation demeure identique.

Le 2° est une disposition de coordination.

Le 3° crée un nouveau paragraphe II au sein de l'article 1003-12 du code précité qui prévoit que, si deux époux sont en société, mais qu'un seul se déclare chef d'exploitation, il cotisera sur la totalité du revenu agricole du foyer fiscal.

2. Cette réforme présente un grand nombre d'avantages :

- en ce qui concerne les exploitants, la mise en place d'une assiette forfaitaire provisoire de cotisations sociales permet d'assurer que les cotisations sociales appelées aux exploitants dès le début d'activité seront représentatives des revenus réellement dégagés par l'activité.

En effet, au lieu de l'application d'une assiette forfaitaire de cotisations qui peut, dans certains cas, mettre à la charge des exploitants des sommes élevées au regard des revenus dégagés, les exploitants nouveaux installés acquitteront des cotisations strictement établies en fonction de leurs revenus réels.

Par ailleurs, cette réforme devrait faciliter la gestion prévisionnelle des exploitations et permettre aux exploitants de mieux anticiper le montant de leurs charges sociales personnelles.

- D'un point de vue financier, la disposition relative au transfert entre époux devrait permettre d'écarter le risque " d'évasion d'assiette " à laquelle on peut assister dans certains cas, en particulier lorsque le chef d'exploitation a réalisé des revenus importants au cours des dernières années. En effet, le conjoint qui reprend l'exploitation, paie ses cotisations sur une assiette forfaitaire en sa qualité de nouvel installé et les revenus élevés du cédant échappent ainsi à toute cotisation.

Cette réforme devrait donc une incidence financière faible , contribuant plutôt à mettre fin à des situations mal comprises par les intéressés et à avoir un effet de moralisation sur le prélèvement.

Cette réforme substitue à une législation uniforme (l'assiette forfaitaire définitive des cotisations sociales pour tous les nouveaux installés), deux réglementations distinctes : une assiette forfaitaire provisoire, et une assiette spécifique en cas d'installation d'un conjoint en qualité de chef d'exploitation ou de transfert de la qualité de chef d'exploitation.

En conséquence, votre rapporteur considère que cette réforme est mieux adaptée aux différentes situations des exploitants qui s'installent.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 25 -

Institution d'un salaire différé au profit du conjoint survivant du chef d'exploitation

Cet article d'insère dans le code rural un article L.321-21-1 permettant au conjoint survivant de bénéficier d'une créance de salaire différé

Le mécanisme proposé par l'article 25 du projet de loi pour l'article L.321-21-1 du code précité tend à étendre la créance du salaire différé au conjoint survivant du chef d'exploitation agricole ou de l'associé exploitant d'une société, qui a participé directement et gratuitement à l'activité de l'entreprise pendant au moins dix ans .

Il est prévu que ce droit de créance est d'un " montant égal à trois fois le salaire minimum interprofessionnel de croissance annuel en vigueur au jour du décès dans la limite de 25 % de l'actif successoral ". Il est important de souligner que le montant des droits propres du conjoint survivant dans les opérations de partage successoral est diminué de celui de cette créance.

Actuellement, seul le descendant qui est resté dans l'exploitation avec ses parents et a participé à sa mise en valeur sans aucune contrepartie (sinon les avantages inhérents à la communauté de vie), a droit, au décès de l'exploitant, à une rémunération dite " salaire différé ". Ce salaire s'ajoute à ses droit successoraux.

Sur le fondement de ce droit au salaire différé du descendant, leurs conjoints peuvent demander à bénéficier d'une créance de salaire. Votre rapporteur insiste toutefois sur le fait que le bénéfice de cette créance au profit du conjoint du descendant est lié au droit du descendant.

Notons que la loi du 4 juillet 1980 d'orientation agricole a opéré un toilettage du décret -loi du 29 juillet 1939 relatif au contrat de travail à salaire différé. Elle a substitué aux anciens éléments de calcul (salaire du valet de ferme fixé chaque année par arrêté préfectoral), la référence au SMIC beaucoup plus favorable soit 2/3 de la somme correspondant à 2080 fois le SMIC pour chacune des années de participation dans la limite de 10 ans.

Le salaire différé est institué en faveur des descendants de l'exploitant : fils, filles, petits-fils, petites-filles. Peu importe la nature de la filiation.

Les droits du descendant sont donc réglés comme s'il avait passé un contrat de travail avec ses parents lui assurant le paiement à terme des services rendus, d'où l'expression " contrat de travail à salaire différé ". Mais ces termes ne doivent pas faire illusion. Aucun accord ne lie les parties qui sont en relation de travail. Le descendant qui réunit objectivement certaines conditions, bénéficie d'un droit légal à rémunération. Ce droit a un caractère d'ordre public et constitue un bien propre.

Cette mesure est d'abord motivée par un souci d'équité. La créance de salaire différé permet, en premier lieu, de rétablir un certain équilibre entre l'enfant qui a fait prospérer l'exploitation familiale sans tirer un revenu de son travail et les autres enfants. En second lieu, elle facilite le règlement de la soulte due aux copartageants en cas d'attribution préférentielle de la propriété familiale à l'héritier exploitant.

Le texte proposé crée donc une troisième catégorie de personnes susceptibles de bénéficier d'une créance de salaire .

Le conjoint survivant , peut bénéficier de cette créance si deux conditions cumulatives sont réunies :

- il doit avoir participé à l'exploitation agricole : cette participation, sans être exclusive de toute autre activité, doit être cependant effective et non occasionnelle ; de plus, cette participation doit avoir duré au moins dix ans. Cette condition peut poser de délicats problèmes de preuve même si cette participation peut être prouvée par tous moyens.

- Le conjoint ne doit pas avoir été associé aux résultats de l'exploitation et ne doit pas avoir reçu de salaire en argent (article L.321-13 du code rural). Ainsi, dans l'hypothèse où l'existence d'une société de fait est établie, il ne peut prétendre au salaire différé.

Le régime de cette créance en faveur du conjoint survivant reste globalement moins favorable par rapport à celui du descendant, et ce pour trois raisons :

- tout d'abord, son montant est une somme forfaitaire (trois fois le SMIC annuel) ;

- ensuite, cette somme forfaitaire est plafonnée dans la limite de 25 % de l'actif successoral ;

- enfin, cette créance vient en diminution du montant des droits propres que le conjoint peut recevoir dans les opérations de partage successoral.

Sous réserve d'une expertise plus approfondie, votre rapporteur estime que ce dispositif pourrait être étendu au conjoint divorcé.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 26 -
(Articles 2101 et 2104 du code rural) -

Coordination

Cet article propose de compléter les articles 2101 et 2104 du code civil en raison de la création d'une créance de salaire différé au profit du conjoint survivant.

L'article 26 du projet de loi étendant le bénéfice de la créance de salaire différé au conjoint survivant, il est nécessaire de modifier les articles du code civil s'y rapportant.

Cette créance constituant une créance privilégiée sur la généralité des immeubles au sens du code civil, les articles 2101 et 2104 sont complétés en conséquence.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

CHAPITRE IV -

De l'emploi salarié

Ce chapitre regroupe six articles. Outre la création d'un titre emploi simplifié agricole, ce chapitre aborde des dispositions ayant trait au groupement d'employeurs. Il est en outre crée un comité d'oeuvres sociales et culturelles.

Article 27 -
(Article 1000-6 du code rural) -

Création du titre emploi simplifié agricole

Cet article tend à créer un chapitre IV intitulé " Titre emploi simplifié agricole ".

Cet article crée un article 1000-6 constituant à lui seul un chapitre IV " Titre emploi simplifié agricole dans le titre I " (régime du travail) du livre VII (dispositions sociales) du code rural. Cet article est composé de trois paragraphes.

Le paragraphe I crée l'article 1000-6 composé de cinq alinéas.

L'employeur, lors de l'embauche d'un salarié par contrat à durée déterminée, remplit les dix formalités jusqu'à présent nécessaires à l'embauche (premier et deuxième alinéas), en remettant au salarié et à la caisse de MSA les parties qui leur sont respectivement destinées du document unique appelé " titre emploi simplifié agricole ".

Il est prévu, selon le troisième alinéa, que ce document est délivré par les caisses de MSA à la demande des employeurs qui font appel, au moyen de contrat à durée déterminée, à des salariés relevant de l'article 1144-1° (salariés occupés dans les exploitations de culture et d'élevage, les exploitations de dressage, d'entraînement, les haras ainsi que dans tous les établissements de transformation et de commercialisation des produits agricoles ou dans les structures touristiques), 1144-2° (ouvriers et employés occupés dans les établissements de conchyliculture et de pisciculture), 1144-3° (ouvriers et employés occupés à des travaux forestiers et salariés des entreprise de travaux forestiers) et 1144-4° (salariés des artisans ruraux). Ce document peut être aussi demandé par les CUMA et par les coopératives agricoles employant moins de cinq salariés permanents.

Les quatrième et cinquième alinéas permettent, d'une part, de ne pas mentionner le calcul des cotisations patronales sur ce document et, d'autre part, de rémunérer les salariés à l'issue de chaque campagne saisonnière et au moins une fois par mois.

Le paragraphe II précise qu'un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article.

Le paragraphe III prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du titre emploi simplifié agricole dans les DOM.

En agriculture, un grand nombre de salariés sont embauchés pour des emplois de courte durée. Outre une certaine précarité du travail, ces embauches provoquent la répétition de formalités lourdes pour les employeurs. Ainsi, en 1994, sur 1.323.302 salariés qui ont exercé une activité dans le secteur agricole, 58,4 % ont travaillé moins de 120 jours et 33,7 % moins de 20 jours par an (Observatoire économique et social de la MSA - Observatoire du salariat). Par ailleurs, selon une étude menée par la MSA en 1995, la durée moyenne des travailleurs occasionnels était de 8,8 jours en viticulture, 9,9 jours pour la culture et l'élevage et de 17,5 jours pour les cultures spécialisées.

Une expérience pilote sur l'utilisation d'un chèque emploi-saisonnier (à l'instar du chèque emploi-services pour les particuliers) a été menée à l'automne 1995 en Alsace pendant les vendanges. Ce dispositif de simplification a été ouvert sur option à tous les employeurs dans tous les départements, à titre expérimental, sur décision du préfet.

Ce document se présente sous la forme d'un carnet composé de cinq volets. Il permet d'effectuer plusieurs formalités liées à l'embauche comme :

- la déclaration préalable d'embauche ;

- l'inscription sur le registre unique du personnel ;

- le contrat de travail ;

- la demande éventuelle d'une réduction des cotisations sociales patronales pour l'emploi d'un travailleur occasionnel ou d'un demandeur d'emploi ;

- le signalement de l'embauche aux services de la médecine du travail ;

- l'immatriculation éventuelle du travailleur salarié.

Quatre formalités à l'issue de la relation de travail :

- le bulletin de paie ;

- la tenue du livre de paie ;

- l'attestation destinée à l'Assedic ;

- la déclaration trimestrielle.

Ces documents tiennent lieu de registre unique du personnel, tous les documents comportant un numéro de série préimprimé ; il sera donc impératif de les utiliser dans l'ordre croissant de ces numéros en fonction de l'ordre d'embauche des salariés.

L'article 27 propose donc de consacrer, par la voie législative, ce dispositif que votre rapporteur considère comme une réelle avancée et qui pourrait concerner 600.000 saisonniers.

Il se félicite de voir consacrée par la loi une disposition expérimentée en 1995.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 27 bis
(Article L.127-10 du code du travail) -

Limitation des déplacements des salariés agricoles dans le cadre de travaux effectués par des groupements d'employeurs

Cet article vise à insérer dans le code du travail un article L.127-10, prévoyant que, pour les groupements d'employeurs faisant appel à des salariés agricoles, la zone géographique d'exécution du contrat ne peut prévoir que des déplacements limités.

Cet article prévoit que les groupements d'employeurs ne peuvent pas imposer aux salariés des déplacements géographiques trop importants.

Il appartient à un décret en Conseil d'Etat de fixer les modalités d'application de cet article.

Votre rapporteur est tout à fait conscient des difficultés que peuvent poser dans certains cas la multiplication des déplacements.

Néanmoins, il considère que, d'une part, cette disposition constitue un excès de bureaucratie et que, d'autre part, il sera quasiment impossible de définir un rayon d'action maximum sans prise en compte des réalités locales et du type d'exploitation.

Votre rapporteur exprime ses plus vives réserves sur l'intérêt de cet article.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 28 -
(Article 1000-7 du code rural) -

Création au niveau des départements de comités d'oeuvres sociales et culturelles

L'article 28 crée dans le titre premier du livre VII du code rural un nouveau chapitre V comportant un article 1000-7 qui prévoit la possibilité de constituer par voie conventionnelle des comités d'activités sociales et culturelles au bénéfice des salariés de la production agricole.

Le texte proposé pour cet article 1000-7 précise que ce comité est créé en vertu d'une convention ou d'un accord collectif de travail étendu sur le plan départemental, régional ou national. Constitué au niveau du département, il concerne :

- les salariés agricoles (salariés des exploitations de culture et d'élevage, des établissements de conchyliculture et de pisciculture, des entreprises de travaux forestiers et des entreprises de travaux agricoles) et leur famille ;

- les entreprises ou les exploitations agricoles dont l'effectif est inférieur à 50 salariés et qui dès lors ne disposent pas de comité d'entreprise.

Ce comité, qui dispose de la personnalité morale et détermine ses modalités de fonctionnement dans un règlement intérieur, est composé en nombre égal de représentants des organisations syndicales d'employeurs et de salariés agricoles représentatives dans le champ d'application des accords conclus.

Ces comités des activités sociales et culturelles s'apparentent aux comités d'entreprises puisqu'ils exercent leurs attributions (règles définies à l'article L.432-8 du code du travail). En outre, les employeurs doivent verser aux comités des contributions assises sur la masse salariale brute, destinées à couvrir leur fonctionnement ainsi que les activités sociales et culturelles elles-mêmes. Les règles existant pour les activités sociales et culturelles des comités d'entreprise en matière de prélèvements fiscaux et sociaux s'appliquent aux contributions versées et aux avantages servis.

Chaque convention ou accord collectif à l'origine de la création des comités doit mentionner :

- la composition des comités et aux modalités de désignation des représentants ;

- les modalités d'exercice du mandat détenu par les représentants des organisations de salariés ;

- le taux de contributions versées par chaque employeur et à leurs modalités de recouvrement ;

- la destination des fonds recouvrés et à leurs modalités d'utilisation.

Des comités d'activités sociales et culturelles ont déjà été mis en place par voie d'accords collectifs dans trois départements de la région Bretagne (Les Côtes d'Armor, le Finistère et le Morbihan).

Votre rapporteur tient à souligner, tout d'abord, que ce mécanisme soulève un certain nombre de difficultés :

- il induira des cotisations supplémentaires et donc de nouvelles charges pour les agriculteurs, à un moment où tous s'accordent sur l'importance de réduire les charges des entreprises ;

- il pourra provoquer à terme un renforcement de la bureaucratie au niveau départemental afin de gérer cet organisme ;

- certains salariés, élus représentants, disposeront de crédit d'heures pour assurer leurs responsabilités : or, beaucoup d'exploitations agricoles ne seront pas en mesure d'en supporter le poids financier.

Par ailleurs, l'innovation de l'article 28 crée une exception -une de plus dans le domaine agricole- puisqu'il n'existe dans aucune autre profession, pas même celles des artisans et des commerçants, dont les contraintes et le nombre des salariés par entreprise sont comparables à la profession d'agriculteur. Cette innovation risque de coûter cher en emplois et en investissements.

Enfin, votre rapporteur tient à faire remarquer que les relations entre employeurs et salariés agricoles sont globalement bonnes. En outre, les commissions paritaires fonctionnent correctement.

Votre rapporteur exprime ainsi ses plus vives réserves sur l'intérêt de cet article.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 29 -
(Article L.231-2-1 du code du travail) -

Création au niveau des départements de commissions paritaires d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail

Cet article prévoit l'institution au niveau de chaque département de commissions paritaires d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail en agriculture, complétant ainsi l'article 231-2-1 du code de travail.

Cet article prévoit la création dans chaque département de commissions paritaires d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail dans le domaine agricole et notamment dans les exploitations agricoles qui, du fait de leur taille, sont dépourvues de délégués du personnel et, a fortiori, de comités d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail.

L'article 29 du projet de loi précise que chaque commission comprend en nombre égal des représentants des organisations d'employeurs et de salariés les plus représentatives au plan national dans les branches professionnelles concernées ou encore des organisations locales représentatives dans les départements d'outre-mer nommés par le préfet. En outre, il est prévu que les commissions sont présidées alternativement par période d'un an par un représentant des salariés ou des employeurs.

Le temps passé par les représentants des salariés aux réunions des commissions est considéré et rémunéré comme temps de travail. Les intéressés bénéficient, par ailleurs, dans la limite de quatre heures par mois, d'une autorisation d'absence rémunérée pour exercer leurs fonctions. De la même façon, les représentants des employeurs bénéficient d'une indemnité forfaitaire représentative du temps passé.

Le fonds national de prévention prend en charge les frais de déplacement des différents membres de la commission, les salaires maintenus par les employeurs, les cotisations sociales afférentes et enfin les indemnités représentatives du temps passé. Enfin, les salariés désignés bénéficient de la protection contre le licenciement prévue par l'article 236-11 du code du travail.

Il est vrai que le secteur agricole est l'un de ceux où les risques d'accidents du travail sont les plus grands même si on constate moins d'accidents de travail depuis 20 ans.

Ainsi, depuis 1976, le taux de fréquence des accidents (nombre d'accidents par million d'heures travaillées) chez les salariés agricoles, qui s'est élevé à 37,5 en 1996, a diminué de 13 % et celui des accidents mortels de 66 %.

Le nombre total d'accidents du travail avec arrêt a chuté de 27 %. Selon les secteurs d'activités, ces taux varient et demeurent élevés chez les exploitants de bois (142,2), en sylviculture (94,4), dans le traitement de la viande (89,8). Depuis 1990, les taux de fréquence diminuent régulièrement dans les secteurs traitement de la viande, coopératives céréalières et dans les laiteries.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 29 bis -
(Articles L.932-1 et L. 932-2 du code du travail) -

Accès au capital temps-formation

Cet article permet de mettre en oeuvre les articles L.932-1 et L.932-2 du code du travail dans le domaine agricole.

Il convient de préciser, à titre liminaire, que l'article L.932-1 du code du travail, issu de la loi n° 91-1405 du 31 décembre 1991 indique qu'un accord national interprofessionnel étendu peut prévoir les conditions dans lesquelles des actions de formation peuvent être réalisées en partie hors du temps de travail. Il définit notamment la nature des engagements souscrits par l'employeur avant l'entrée en formation du salarié. Ces engagements font l'objet d'un accord conclu entre l'employeur et le salarié. Ils portent sur les conditions dans lesquelles le salarié accède en priorité, dans un délai d'un an à l'issue de la formation, aux fonctions disponibles correspondant à ses connaissances ainsi acquises et sur l'attribution de la classification correspondant à l'emploi occupé. Ces engagements portent également sur les modalités de prise en compte des efforts accomplis par le salarié à l'issue de la formation sanctionnée.

L'article L.932-2 du code précité est issu de la loi n° 96-376 du 6 mai 1996. Il prévoit qu' " un accord national interprofessionnel complété par des conventions de branches ou accords professionnels étendus détermine les conditions dans lesquelles les salariés peuvent bénéficier au cours de leur vie professionnelle d'un capital de temps de formation leur permettant de suivre des actions de formation pendant leur temps de travail dans le cadre du plan de formation de l'entreprise " .

L'article 29 bis permet la conclusion d'accords en matière d'investissement et de capital temps formation dans le secteur agricole. Jusqu'à présent, ceux-ci étaient réservés au MEDEF et à la CGPME.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 29 ter -

Création d'un observatoire de l'emploi salarié en agriculture

Cet article vise à créer un observatoire de l'emploi salarié en agriculture dans chaque département.

Seront présents au sein de cet organisme les organisations représentatives des salariés, des professionnels et l'inspection des lois sociales en agriculture (premier alinéa).

Le second alinéa de l'article précise les missions de cet observatoire :

- suivre l'évolution des emplois salariés agricoles ;

- comparer les écarts entre emplois permanents et emplois précaires,

- proposer des solutions pour renforcer les emplois permanents.

Par ailleurs, un bilan annuel sera établi auprès de l'autorité administrative et rendu public.

Votre rapporteur a conscience de l'importance du nombre d'emplois salariés permanents en agriculture, qui s'élève à environ 150.000.

Néanmoins, il exprime ses plus vives réserves sur cet article, le secteur agricole étant soumis à des conventions collectives, départementales pour la plupart, qui protègent les salariés de ce secteur. En outre, le commission nationale de l'emploi en agricole effectue un travail considérable sur l'emploi salarié agricole.

Il existe, par ailleurs, de multiples structures d'examen de l'emploi salarié agricole au niveau tant local que régional ou national.

En ce qui concerne la connaissance de l'emploi, le ministère de l'agriculture est attentif aux évolutions de l'emploi salarié et la caisse centrale de la MJA a mis en place un observatoire économique et social. Enfin, celle-ci travaille à l'élaboration d'un outil spécifique de suivi des salariés agricoles qui devrait être opérationnel en 1999.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

CHAPITRE V -

Du fonctionnement des organismes de mutualité sociale agricole

Ce chapitre a été adopté, sur proposition du Gouvernement, par l'Assemblée nationale lors de l'examen du projet de loi d'orientation agricole en séance publique.

Il est composé de cinq articles relatifs au fonctionnement des organismes de mutualité sociale agricole.

Rappelons que la Cour des comptes, à la suite d'une enquête engagée en juin 1996 sur la gestion de la Caisse centrale de la Mutualité sociale agricole, avait fait parvenir au ministre de l'agriculture et à celui de l'économie et des finances ainsi qu'au président et au directeur général de la Caisse centrale, en juin 1997, un projet d'insertion à son rapport public suite à un relevé de constatations provisoires.

Ces documents mettaient en évidence des défaillances graves et des irrégularités importantes dans la gestion de la caisse centrale. Il s'agissait notamment de vices dans la passation de marchés de fournitures et de travaux, de manque de rigueur dans l'action sanitaire et sociale, de diversifications qu'on pourrait qualifier de hasardeuses et de confusion des genres dans la gestion financière.

N'ayant reçu aucune réponse aux observations formulées le 17 juin 1997 et compte tenu de la démission du président de la caisse centrale, le conseil d'administration de la Mutualité sociale agricole a été suspendu et un administrateur provisoire a été nommé.

Depuis le 4 décembre 1997, la caisse centrale dispose d'une nouvelle équipe.

Les articles du chapitre V ont été présentés par le ministre de l'agriculture, au mois d'octobre dernier, comme étant " nécessaires pour compléter certaines lacunes des textes ".

Avant d'examiner ces articles, votre rapporteur tient à exprimer son plus vif étonnement. En effet, s'il est tout à fait normal que soient définies des règles de fonctionnement claires au sein des organismes de mutualité sociale agricole, la procédure utilisée par le Gouvernement paraît pour le moins surprenante. Les problèmes relatifs à la Mutualité sociale agricole ayant été révélés en juin 1997, le Gouvernement a attendu l'examen des amendements au projet de loi d'orientation agricole par la Commission de la production et des échanges de l'Assemblée nationale, c'est-à-dire le mardi 6 octobre 1998, pour que ces dispositions soient discutées. Or, ces mesures sont loin d'être anodines.

Votre rapporteur comprend donc mal ce qui justifiait d'abord un tel attentisme, maintenant une telle urgence.

Article 29 quater -

Renforcement du contrôle de l'Etat sur les organismes de Mutualité sociale agricole et divers organismes - Schémas directeurs informatiques des organismes de Mutualité sociale agricole

Cet article vise à renforcer le contrôle de l'Etat sur les décisions des organismes de Mutualité sociale agricole et de leur démembrements .

Cet article est composé de trois paragraphes :

Le paragraphe I complète, d'une part, l'intitulé du chapitre II du Titre V (contrôles) du Livre Ier (généralités - dispositions communes à tout ou partie des régimes de base) relatif aux " dispositions applicables au régime d'assurance vieillesse des professions libérales et aux régimes mentionnés aux articles 1002 et 1002-4 du code rural ". D'autre part, il précise l'article L.152-1 du code de la sécurité sociale, relatif au contrôle de l'Etat sur les décisions du Conseil d'administration des organismes d'assurance vieillesse des professions libérales et des organismes mentionnés aux articles 1002 et 1002-4 du code rural.

Il vise à assurer le contrôle de l'Etat, dans les mêmes conditions que celui des caisses de mutualité sociale agricole, sur les délibérations de plusieurs instances dirigeantes qui participent à l'utilisation de fonds publics.

Rappelons qu'afin de permettre la réalisation d'économies de gestion, les caisses de mutualité sociale agricole mettent en commun certains de leurs moyens de fonctionnement, notamment dans les domaines de l'informatique, de l'action sociale, de la gestion du risque de l'assurance maladie, à travers la création d'associations loi 1901 ou de GIE. Le financement de ces structures est assuré par des cotisations complémentaires versées par les exploitants et les employeurs de main-d'oeuvre agricole.

Le paragraphe II modifie la rédaction du dernier alinéa de l'article 1242 du code rural relatif aux assemblées générales des organismes de mutualité sociale agricole.

Actuellement, il est précisé qu'un exemplaire du rapport du commissaire aux comptes et une copie du procès-verbal de chaque assemblée générale doivent être transmis dans un délai d'un mois au ministère de l'agriculture et à celui des finances.

Le paragraphe II prévoit que l'autorité compétente de l'Etat donne son approbation non seulement aux décisions des assemblées générales des organismes de mutualité sociale agricole, mais aussi à celles des associations et groupements d'intérêt économique.

L'article 1002-2 du code rural prévoit les conditions dans lesquelles peut intervenir la fusion entre des caisses de mutualité sociale agricole. Cet article a confié aux caisses de mutualité sociale agricole la responsabilité de l'organisation de la médecine du travail en agriculture, sous la forme soit de sections internes aux caisses, soit d'associations spécialisées créées à cet effet.

Les décisions prises en la matière par les assemblées générales des caisses de mutualité sociale agricole et de leurs associations seront donc soumises au contrôle de l'autorité administrative, en raison, selon le Gouvernement, " de leurs incidences tant au plan financier qu'au plan de l'organisation des caisses de mutualité sociale agricole chargées de la gestion des régimes agricoles de protection sociale ".

Enfin, en application de l'article L.153-9 du code de la sécurité sociale, les schémas directeurs informatiques des organismes de sécurité sociale sont soumis à l'approbation des autorités de l'Etat. Les projets informatiques et bureautiques des caisses de mutualité sociale agricole sont aussi soumis à ce contrôle jusqu'au 31 décembre 1998, en application de la loi du 25 juillet 1994. La date du 31 décembre 1998 initialement prévue pour la mise en oeuvre du schéma directeur informatique, approuvé en février 1994 par le ministre chargé de l'agriculture, doit être reportée, aux termes du III proposé par cet article au 30 avril 2001, à la suite de la modification du schéma directeur informatique de la mutualité sociale agricole, tel qu'approuvé par arrêté ministériel du 27 janvier 1997, qui n'a pas encore pu être mené à son terme.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 29 quinquies -

Circonscription territoriale des organismes de MSA

Cet article tend à insérer un nouvel article 1002-3-1 dans le code rural relatif à l'étendue géographique de la circonscription des caisses fusionnées et à celle des associations à but non lucratif créées par regroupement de caisses de mutualité sociale agricole.

Le texte proposé pour ce nouvel article 1002-3-1 du code rural précise que la circonscription, d'une part, des caisses de mutualité sociale agricole fusionnées, d'autre part, des associations à but non lucratif créées par regroupement de caisses de mutualité sociale agricole, ne peut pas excéder les limites territoriales de la région administrative, sauf dérogation ministérielle.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 29 sexies -
(Articles 1002-4 et 1011 du code rural) -

Convention d'objectifs et de gestion au sein de la mutualité sociale agricole - Commissaire du Gouvernement

Cet article modifie, d'une part, l'article 1002-4 du code rural en créant la notion de convention d'objectifs et de gestion au sein de la Mutualité sociale agricole, et d'autre part, l'article 1011 du code précité en prévoyant la création d'un poste de commissaire du Gouvernement auprès de la caisse centrale de la Mutualité sociale agricole .

L'article 29 sexies est composé de trois paragraphes :

Le paragraphe I complète le deuxième alinéa du III de l'article 1002-4 du code rural issu de l'article 21 de la loi n° 94-114 du 10 février 1994.

Le I de l'article 1002-4 porte sur le transfert opéré en en 1993-1994 de plusieurs organismes sociaux et la création de la caisse centrale de Mutualité sociale agricole.

Le paragraphe II de ce même article énumère les missions de la caisse centrale de mutualité sociale agricole.

Le paragraphe III précise que cet organisme contribue à la mise en oeuvre de la politique sociale agricole (premier alinéa). Le deuxième alinéa précise que la caisse centrale " est soumise aux dispositions applicables en matière de gestion comptable et financière, aux caisses départementales de mutualité sociale agricole ".

Le paragraphe I de l'article 29 sexies complète cet alinéa en précisant que la convention d'objectifs et de gestion, signée par le Président du Conseil central d'administration et le directeur de la caisse centrale, fait l'objet de contrats pluriannuels de gestion entre la caisse centrale et les caisses de mutualité sociale agricole.

Le paragraphe II vise à compléter l'actuel deuxième alinéa du paragraphe III de l'article 1002-4 du code rural en mentionnant la notion de gestion administrative.

Le paragraphe III complète l'article 1011 du code précité relatif à la composition du conseil central d'administration de la Mutualité sociale agricole.

Il mentionne la représentation auprès de la caisse centrale de mutualité sociale agricole d'un commissaire du Gouvernement qui peut assister aux séances de l'assemblée générale centrale ainsi qu'à celles du conseil central d'administration.

Votre rapporteur considère qu'il serait plus opportun d'instaurer un mécanisme de surveillance plus approprié que la mise en place d'une commission du Gouvernement.



Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 29 septies -
(Article 1023 du code rural)

Cet article vise à modifier l'article 1023 du code rural relatif aux modalités de suspension ou de dissolution du conseil d'administration d'un organisme de mutualité sociale agricole.

L'article 1023 du code rural est composé de trois alinéas :

Le premier alinéa prévoit que le conseil d'administration d'un organisme de mutualité sociale agricole peut être suspendu ou dissout par un arrêté du ministre de l'agriculture en cas de :

- irrégularités graves ;

- mauvaise gestion ;

- carence.

En ce cas, un administrateur provisoire est nommé.

Rappelons que le ministre de l'agriculture a dissout le conseil d'administration de la mutualité sociale agricole l'année dernière.

Le deuxième alinéa prévoit la révocation par arrêté du ministre de l'agriculture d'un administrateur dès lors qu'une faute grave a été constaté. Le conseil d'administration doit néanmoins donner son avis.

Le troisième et dernier alinéa précise que les administrateurs révoqués et les membres du conseil d'administration dissout ne peuvent plus pendant quatre années faire partie d'un conseil d'administration, à quelque titre que ce soit.

L'article 29 septies apporte plusieurs modifications :

à l'alinéa premier, il est indiqué que la suspension ou la dissolution du conseil d'administration intervient à l'expiration d'un délai déterminé.

le deuxième alinéa complète le droit en vigueur en précisant que la révocation de l'administrateur peut aussi intervenir en cas de non paiement des cotisations dont il est redevable.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 29 octies -
(Article 1237 du code rural)

Cet article a pour objet de modifier l'article 1237 du code rural relatif à certaines actions menées par les organismes de Mutualité sociale agricole.

Cet article est issu de l'article 22 de la loi n° 94-114 du 10 février 1994. Il est composé de trois paragraphes.

Le paragraphe I prévoit que les caisses de mutualité sociale agricole et leurs associations peuvent constituer des unions avec d'autres organismes à but non lucratif menant des actions de prévoyance, de solidarité ou d'entraide. Ces unions leur permettent de représenter et valoriser les intérêts communs. Ces missions sont administrées par un comité commun.

Le paragraphe II indique que les caisses de mutualité sociale agricole peuvent créer avec des tiers des services communs en matière de gestion et d'action sanitaire et sociale.

Elles peuvent, en outre, conclure des conventions avec certains organismes afin de procéder au recouvrement des cotisations dues en application d'une convention ou d'un accord collectif étendu.

Le paragraphe III prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du présent article.

L'article 29 octies du projet de loi propose plusieurs modifications :

- les caisses de mutualités sociale agricole peuvent conclure des conventions avec des tiers en vue aussi de la gestion partielle d'une activité dès lors que cette dernière est en relation directe ou complémentaire avec la mission de service public dont elles sont chargées ;

- dès lors que la participation financière des caisses de mutualité sociale agricole atteint ou dépasse la majorité du capital social des organismes auxquels elles sont autorisées à participer, les budgets et les comptes annuels de ceux-ci subissent les mêmes contrôles que les caisses de mutualité sociale agricole, notamment en matière d'approbation.

Sous réserve des observations et des amendements que pourrait vous présenter votre Commission des Affaires sociales, votre Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter cet article sans modification.

TITRE III -

ORGANISATION ÉCONOMIQUE

Ce titre regroupe les articles 30 A à 38 ter.

CHAPITRE Ier -

Coopération agricole

En raison de l'article 30 A introduit lors de l'examen en séance publique à l'Assemblée nationale, il paraît nécessaire de compléter l'intitulé de ce chapitre qui peut être le suivant : " Coopération agricole et organisation de la production ".

Article 30 A -
(Article L.551-1 du code rural) -

Organisations des producteurs reconnues

Cet article modifie l'article L.551-1 du code rural, qui donne un statut aux organisations de producteurs reconnues.

L'article L.551-1 du code rural se trouve actuellement dans le chapitre Ier (groupements de producteurs) du titre V (groupements de producteurs et comités économiques agricoles) du Livre V du code rural relatif aux organismes professionnels agricoles.

Rappelons que les groupements de producteurs sont des organismes économiques et professionnels constitués par les agriculteurs dans le but d'organiser la production et la commercialisation des produits. Ils ont été institués par la loi n° 62-933 du 8 août 1962, complétée par différents textes d'application. Les groupements de producteurs réunissent les agriculteurs qui acceptent de se soumettre à de véritables disciplines de production et de mise en marché. Ils constituent l'élément de base de l'organisation.

Les groupements de producteurs institués par la législation française prennent place aujourd'hui dans l'organisation commune des marchés et se trouvent en conséquence soumis aux directives communautaires. Suivant les principes communautaires, l'organisation ainsi réalisée reste libérale, en ce sens qu'aucune obligation n'est faite aux agriculteurs ni de se grouper ni de s'imposer des disciplines de production et de commercialisation .

Sous réserve de la politique communautaire d'organisation des producteurs dont l'application est à la fois sectorielle (fruits et légumes, tabac, houblon) et régionale (règlement n° 1360-78 du Conseil du 19 juin 1978), l'article 30 A du projet de loi se différencie sur un certain nombre de points du droit existant :

1. Le paragraphe I de l'article 30 A

L'autorité administrative reconnaît aujourd'hui des " groupements de producteurs " alors que l'article 30 A concerne des " organisations de producteurs " ; celles-ci conservent d'ailleurs la forme juridique de la structure dont elles sont l'émanation comme les groupements.

Cette reconnaissance intervient, aujourd'hui, lorsque ces organismes (coopératives, syndicats, associations, ...) sont constitués :

- soit pour améliorer la production ;

- soit pour normaliser les relations avec une ou plusieurs parties contractantes pour l'écoulement des produits et assurer l'exécution des contrats ;

- soit pour régulariser les cours.

La rédaction de l'article 30 A est différente en matière d'objectifs puisque ces même organismes, pour avoir le statut d'organisations de producteurs (OP), doivent :

- maîtriser durablement la valorisation de leur production ;

- renforcer l'organisation commerciale des producteurs ;

- organiser et pérenniser la production sur un territoire déterminé.

Si cette reconnaissance reste conditionnée à certaines dispositions précises énumérées aux 1°, 2° et 3° de l'actuel article L.551-1, l'article 30 A en modifie nettement le contenu.

Ainsi, dans le cadre de leur compétence et de leurs pouvoirs légaux, les groupements de producteurs doivent être en mesure d'édicter des " règles destinées à organiser et discipliner la production et la mise en marché, à régulariser les cours et à orienter l'action de leurs membres vers les exigences du marché ".

L'article 30 A indique que les règles édictées par les organisations de producteurs sont destinées à :

- adapter la production à la demande des marchés en quantité et en qualité, en respectant les cahiers des charges et en établissant des relations contractuelles avec leurs partenaires de la filière ;

- outre les aspects " organisation du marché " et " respect des relations contractuelles " qui sont présents dans la rédaction actuelle de l'article L.551-1, cet alinéa est à la fois plus complet -car il mentionne le nécessaire respect de la qualité dans la gestion du marché et le respect des cahiers des charges-, et plus précis, car il évoque clairement le nécessaire lien qui unit l'amont à l'aval au sein d'une filière.

- instaurer une transparence des transactions et régulariser les cours, notamment par la fixation éventuelle d'un prix de retrait.

Dans cet alinéa, c'est la référence à la transparence qui constitue une nouveauté : " mettre en oeuvre la traçabilité " et " promouvoir des méthodes respectueuses de l'environnement " constituent les principales innovations auxquelles les organisations de producteurs doivent faire face.

La couverture géographique d'un ou plusieurs secteurs complémentaires de produits agricoles constitue la seconde condition de reconnaissance des groupements de producteurs. Il en est de même pour les organisations de producteurs.

Enfin, les groupements de producteurs aujourd'hui, comme les organisations de producteurs, doivent justifier d'une activité économique suffisante. Le texte proposé pour l'article L.551-1 précise que l'examen de cette condition doit s'effectuer " au regard de la concentration des opérateurs sur le marché ".

2. Le paragraphe II de l'article 30 A modifie la rédaction du premier alinéa de l'article L.551-2 du code rural.

Le droit en vigueur reconnaît aux groupements de producteurs la possibilité de bénéficier :

- d'avantages et de priorités dans l'attribution des aides que l'Etat peut apporter en faveur de l'organisation de la production ou pour le conditionnement, le stockage, la transformation, la commercialisation aux fins de vente en gros des produits agricoles ;

- d'un droit de préférence à soumission égale, dans les marchés pour adjudication ou appel d'offres de l'Etat, des collectivités locales ou de leurs établissements publics.

Tout en maintenant le bénéfice d'un droit de préférence dans les marchés publics, le texte proposé pour la première phrase de cet alinéa précise que le bénéfice aux producteurs organisés d'une priorité dans l'attribution des aides de l'Etat doit s'effectuer :

- pour l'organisation de la production et des marchés, formule plus concise que celle du droit en vigueur ;

- en conformité avec les règles communautaires ;

- selon une modulation qui dépend du degré d'organisation et des engagements des producteurs.

3. Le paragraphe III de l'article 30 A tire la conséquence du remplacement du terme de " groupement de producteurs " par celui d'" organisation de producteurs ".

L'objectif de cette réforme de l'organisation économique des groupements de producteurs étant d'accroître leur développement et de clarifier leurs mécanismes, votre rapporteur se félicite d'un tel dispositif .

Actuellement, l'organisation économique regroupe près de 1.000 groupements répartis de la manière suivante :


Elevage

333 groupements de producteurs, dont 320 coopératives, plus 58 associations d'éleveurs

Aviculture

124 groupements, dont 91 coopératives

Fruits et légumes

272 organisations de producteurs reconnues après la réforme de l'OCM, dont 205 ayant la capacité commerciale (à 90 % sous forme coopérative)

Horticulture

34 groupements, dont 28 coopératives

Viticulture

140 groupements, dont 95 à forme coopérative

Productions spéciales

51 groupements, dont 25 à forme coopérative

- Dans le secteur des fruits et légumes , les modifications proposées sont en concordance avec la réforme de l'OCM (règlement CE 2200/96 du Conseil) qui fait des organisations de producteurs la charnière de l'Organisation commune du marché.

- Dans le secteur de l'élevage, on observe que 80.000 producteurs de bovins sont dans l'organisation économique. Vingt mille producteurs pourraient rejoindre celle-ci. L'observation faite dans le secteur bovin se retrouve à une moindre échelle dans le secteur ovin .

A cet égard, l'expérience réalisée dans le secteur du vin s'est révélée concluante. De nombreux producteurs indépendants, notamment dans le bassin méditerranéen, ont rejoint l'organisation économique au travers de la création d'associations de caves particulières.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 30 -
(Articles L.522-1 et L.522-2 du code rural) -

Associés coopérateurs des zones frontalières

Cet article modifie l'article L.522-1 du code rural en complétant la liste des personnes susceptibles de devenir associés coopérateurs, et l'article L.522-2, en permettant aux unions de coopératives étrangères dont la zone d'activité s'étend sur le territoire frontalier français d'être associés coopérateurs.

1. Les modifications apportées à l'article L.522-1


A l'origine, tous les membres des coopératives agricoles avaient la qualité de coopérateur. Ce n'est qu'à partir de 1967 qu'ont été autorisés le recrutement d'associés non coopérateurs et la conclusion de contrats avec des tiers.

Les associés coopérateurs adhèrent à la société pour utiliser ses services. Ils apparaissent à la fois comme des associés et des clients de la société coopérative. Pour cette raison, la qualité de coopérateur est, en principe, réservée aux agriculteurs. Cependant, il existe des personnes physiques ou morales qui, sans être exploitants agricoles, sont susceptibles d'utiliser les services des sociétés coopératives.

Pour répondre à cette diversité de situations, l'article L.522-1 du code rural donne une énumération des personnes qui peuvent entrer dans une société en qualité d'associé coopérateur. Il s'agit de :

1°. toute personne physique ou morale ayant la qualité d'agriculteur ou de forestier dans la circonscription de la société coopérative. Cette qualité doit être reconnue au moment de l'adhésion. Les conchyliculteurs qui valorisent une zone maintenue pour élever ou accueillir des coquillages peuvent être considérés comme des exploitants agricoles et sont en droit de constituer des coopératives.

2°. toute personne physique ou morale possédant dans cette circonscription des intérêts agricoles qui correspondent à l'objet de la société coopérative et souscrivent à l'engagement d'utiliser les services de la société. Cette disposition ouvre très largement les portes des sociétés à des personnes qui n'ont pas vraiment la qualité d'exploitant mais sont susceptibles d'utiliser leurs services : artisans ruraux, propriétaires, bailleurs à métayage qui ont droit à une part des récoltes des terres louées.

3°. tout groupement agricole d'exploitation en commun de la circonscription.

4°. toutes associations et syndicats d'agriculteurs ayant avec la société coopérative un objet commun ou connexe.

5°. d'autres sociétés coopératives agricoles, unions de ces sociétés et SICA, alors même que leurs sièges sociaux seraient situés en dehors de la circonscription de la société.

L'article 30 du projet de loi complète cette liste par une sixième catégorie. Il s'agit de toute personne physique ou morale qui :

- a la qualité d'agriculteur ou de forestier ;

- est ressortissant de la communauté européenne,

- dont le domicile ou le siège est situé hors du territoire de la République française dans une zone contiguë à la circonscription de la coopérative.

Rappelons que chaque société coopérative agricole a un champ d'action géographique qui varie en fonction de son objet, mais qui est toujours territorialement limité. Cette circonscription territoriale fait partie du statut de la coopérative dont la création est agréée par l'autorité administrative -le préfet du département, de la région ou le ministre de l'agriculture en fonction de l'implantation territoriale de la coopérative-.

Soulignons que la possibilité offerte par l'article 30 d'accueillir des associés coopérateurs européens ne se traduira pas par l'extension hors des frontières nationales de la circonscription des coopératives puisque la loi et les actes des autorités françaises sont soumis au principe de territorialité.

L'article 30 ne rend pas obligatoire le fait que l'exploitation de l'associé coopérateur européen soit contiguë à la frontière communautaire de la France. La finalité de cette disposition est la constitution de circonscriptions couvrant un bassin de production, donc des circonscriptions homogènes, ce qui est le cas pour les zones d'activités actuelles des coopératives (sauf quelques exceptions justifiées par la spécificité de produits agricoles). Ainsi, l'exploitation étrangère pourra être distante de la frontière mais devra correspondre à l'unité économique des circonscriptions des coopératives.

A cette occasion, votre rapporteur souhaite rappeler que les coopératives agricoles sont des sociétés constituées librement par les agriculteurs en vue d'assurer l'approvisionnement de leurs exploitations, d'améliorer les conditions de production et de faciliter l'écoulement des produits. Sociétés de services organisées conformément aux principes coopératifs, elles ne poursuivent pas un but lucratif et ont pour mission exclusive de favoriser le développement des exploitations de leurs adhérents. Elles reposent donc sur une philosophie particulière . En effet, ce fut à l'origine dans un esprit d'entraide et de solidarité que les exploitants se groupèrent afin de renforcer leur position face aux secteurs d'amont et d'aval.

D'abord soumises aux règles applicables en matière de crédit, la coopération agricole a été organisée par la loi du 12 juillet 1923 . Modifié à diverses reprises par la loi du 4 septembre 1943 et les ordonnances n° 45-2325 du 12 octobre 1945, n° 59-278 du 4 février 1959 et n° 67-813 du 26 septembre 1967, le régime juridique auquel obéissent les coopératives a été ensuite aménagé par la loi n° 72-516 du 27 juin 1972 puis plus récemment par les lois n° 91-5 du 3 janvier 1991 et n° 92-643 du 13 juillet 1992.

LES PRINCIPAUX SECTEURS D'ACTIVITE DE LA COOPERATION AGRICOLE
(en % du chiffre d'affaires)

Source : CFCA - année 1996.

Votre rapporteur rappelle que les sociétés coopératives constituées par les exploitants agricoles ne restent pas isolées. Elles s'unissent entre elles et forment des groupements importants dotés de moyens économiques significatifs. Il convient, en conséquence, de distinguer les coopératives de " premier degré ", formées par les exploitants eux-mêmes, et les unions sont soumises au même statut juridique et exercent, à leur niveau, les mêmes activités que les sociétés coopératives de premier niveau.

Depuis quelques années, l'accent est mis sur la nécessité de permettre au monde coopératif de lutter à armes égales avec les entreprises concurrentes . Dans cette perspective, l'idéal mutualiste doit se concilier avec le réalisme économique. Ainsi, le développement des coopératives passe, pour partie, par une présence accrue sur le marché européen et aussi sur les marchés mondiaux. Aussi de nombreuses coopératives ont déjà manifesté leur désir d'accueillir en qualité d'associés coopérateurs des agriculteurs installés en zone frontalière dans d'autres états membres de l'Union. Plus de cent cinquante coopératives situées dans des départements frontaliers pourraient être concernées par cette mesure . Cette dernière devrait permettre un développement de la notion de bassin de production et faciliter également des synergies entre coopératives.

2. Les modifications proposées à l'article L.522-2

L'article L.522-2 du code rural précise que toute autre personne morale peut être associé coopérateur d'une union de sociétés coopératives agricoles sous deux conditions :

- être intéressée à l'activité de l'union ;

- dans la limite de 20 % des voix à l'assemblée générale.

Cet article concerne notamment les sociétés d'intérêt collectif agricole, les groupements d'intérêt économique ou les sociétés commerciales.

Le texte proposé par l'article 30 complète les dispositions de l'article L.522-2 afin de permettre aux coopératives et unions de coopératives étrangères de la Communauté européenne, dont la zone d'activité s'étendrait sur le territoire frontalier français, d'être accueillies en tant qu'associés coopérateurs d'une union de coopératives françaises. Cette disposition peut être considérée comme la mise en oeuvre de la réciprocité. Ainsi, ces coopératives étrangères seront placées sur un pied d'égalité par les sociétés coopératives agricoles et leurs unions françaises, la loi de l'Etat dont elles relèvent devant néanmoins les autoriser à devenir de tels associés.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 30 bis -

Acquisition de parts sociales et déduction pour investissement

Cet article ouvre un droit à déduction fiscale au titre des opérations d'investissement lors d'acquisition de parts sociales dans la coopération agricole.

Les exploitants agricoles soumis à un régime réel d'imposition peuvent déduire une fraction de leur bénéfice à la clôture de chaque exercice en vue de financer, dans les cinq années qui suivent, l'acquisition ou la production d'immobilisations amortissables ou de stocks dont le cycle de rotation est supérieur à un an (art. 72 D du code général des impôts). La déduction est facultative : le choix de la pratiquer ou non au titre d'une année constitue une décision de gestion opposable 31( * ) .

La déduction peut être opérée par les exploitants individuels et les sociétés ou groupements agricoles relevant de l'impôt sur le revenu, mais est réservée à ceux soumis à un régime réel (normal ou simplifié), à l'exclusion par conséquent des agriculteurs relevant du forfait, du régime transitoire ou du régime spécial des exploitants forestiers. Cette condition s'apprécie l'année au cours de laquelle est pratiquée la déduction.

Cumulable avec d'autres abattements (jeunes agriculteurs notamment), la déduction est, en revanche, exclusive du système de blocage des stocks à rotation lente auquel les exploitants doivent alors renoncer définitivement ; la renonciation au blocage résulte de la simple réalisation de la déduction.

Le bénéfice sur lequel la déduction est pratiquée est le bénéfice soumis à l'impôt selon le barème progressif ou à un taux réduit d'imposition et réalisé au cours de l'exercice, à l'exclusion donc des bénéfices antérieurs non encore taxés (fraction de plus-values à court terme étalées sur trois ans). La déduction ne peut donner lieu à la constatation d'un déficit.

L'ordre d'imputation est le suivant : la déduction est calculée sur le bénéfice après l'abattement de 50 % des jeunes agriculteurs, mais avant imputation des déficits antérieurs, des amortissements différés et de l'abattement pour adhésion à un centre de gestion agréé, et avant application des systèmes du quotient et de la moyenne triennale.

Le montant de la déduction est déterminé librement par l'exploitant, dans la limite d'un plafond qui varie selon la date d'ouverture de l'exercice.

La déduction doit être utilisée dans les cinq années qui suivent celle de sa réalisation à l'acquisition ou à la production soit d'immobilisations amortissables, soit de stocks dont le cycle de rotation est supérieur à un an. Cette affectation constitue une décision de gestion.

Cette déduction a deux destinations :

La déduction peut être utilisée à la création ou l'acquisition d'immobilisations (neuves ou d'occasion) amortissables selon le mode linéaire ou dégressif, à conditions qu'elles soit strictement nécessaires c'est-à-dire affectées en totalité aux besoins de l'activité agricole.

L'exploitant doit alors réduire à due concurrence, en comptabilité ou de façon extra-comptable, la base d'amortissement des immobilisations à la clôture de l'exercice au cours duquel l'investissement est réalisé (l'affectation de la déduction aux immobilisations constitue donc un simple avantage de trésorerie).

En cas de cession ultérieure, la déduction est assimilée à un amortissement pour le calcul de la plus-value.

La déduction pour investissements peut être utilisée à l'acquisition ou à la production de stocks de produits ou animaux dont le cycle de rotation est supérieur à un an (gros bovins, pépinières, vins et spiritueux, ...). Cette déduction, qui ne modifie pas la valeur de ces stocks, est définitivement acquise s'il est constaté, au plus tard à la clôture du cinquième exercice au cours duquel elle a été pratiquée, une augmentation de leur valeur au moins égale à son montant. A la clôture du cinquième exercice, l'exploitation doit réintégrer :

- soit la totalité de la déduction si la valeur des stocks n'a pas augmenté (ou a diminué) ;

- soit la partie de la déduction correspondant à la différence entre son montant et l'augmentation en valeur des stocks si celle-ci est inférieure à la déduction pratiquée.

Si la déduction n'est pas utilisée conformément à son objet, elle doit en principe être rapportée aux résultats imposables. Toutefois, ce principe supporte une exception en cas de cessation résultant de l'apport de l'exploitation à une société civile agricole.

En principe, la déduction qui n'a pas été utilisée conformément à son objet doit être rapportée aux résultats de la cinquième année qui suit sa réalisation. Par exception, elle peut faire l'objet d'une réintégration anticipée :

- en cas de diminution significative du montant des bénéfices ;

- si l'exploitant cesse son activité par arrêt définitif de l'activité ou par apport en société, ou s'il est soumis à nouveau au régime du forfait.

Votre rapporteur approuve le principe de ce dispositif mais pour être opérationnel, l'extension de la DPI à l'acquisition des parts sociales de coopératives doit être inscrite dans le code général des impôts.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 31 -
(Article L.524-6 du code rural) -

Comptes consolidés des sociétés coopératives

Cet article modifie les dispositions de l'article L.524-6 relative aux comptes sociaux des coopératives. Il consacre l'extension aux coopératives agricoles des règles applicables aux sociétés de droit commun en matière de consolidation des comptes.

Actuellement, les sociétés coopératives agricoles qui font appel public à l'épargne doivent, depuis la loi n° 92-643 en date du 13 juillet 1992, établir et publier chaque année des comptes consolidés ainsi qu'un rapport sur la gestion du groupe dans les conditions prévues pour les sociétés commerciales par les articles 357-1 et 357-3 à 357-10 de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966.

Les coopératives qui ne font pas appel public à l'épargne sont soumises à ces mêmes dispositions si elles établissent des comptes consolidés.

Dans tous les cas, les comptes consolidés sont certifiés par deux commissaires aux comptes, dont l'un au moins doit être un commissaire inscrit, l'autre pouvant être un réviseur agricole.

Cette législation repose sur le principe selon lequel la vie de la coopérative agricole, comme celle d'une société commerciale, est divisée en exercices sociaux annuels. A la fin de chacun d'eux, l'inventaire et les comptes annuels (bilan, compte de résultat et annexe) sont établis afin de déterminer les résultats de l'activité de la société. Si ces résultats sont favorables, la société procède à l'affectation des excédents, c'est-à-dire des produits de l'exercice ; si, au contraire, les comptes font apparaître des pertes, la société doit les couvrir en prélevant sur ses réserves d'abord, sur son capital ensuite.

Votre rapporteur rappelle que l'affectation des excédents doit être réalisée en tenant compte de la législation propre aux coopératives et des dispositions des statuts types. Depuis la loi du 27 juin 1972 qui autorise ces sociétés à effectuer certaines opérations avec les tiers, l'origine des excédents commande leur affectation. Les excédents résultant de l'activité de la société avec les coopérateurs sont utilisés à la constitution de la réserve légale et des réserves libres ; pour le surplus, ils permettent la répartition des intérêts et des ristournes aux associés. En revanche, les opérations effectuées avec des tiers non associés sont comptabilisées à part et les profits qui en résultent portés à une réserve spéciale.

L'article 31 du projet de loi consacre l'extension aux coopératives agricoles de règles applicables aux sociétés de droit commun en matière de consolidation des comptes .

Le texte proposé pour l'article L.524-6 par le paragraphe I de l'article 31 du projet de loi est constitué de quatre alinéas.

Dans le premier alinéa, il est indiqué que toutes les coopératives établissent des comptes consolidés ainsi qu'un rapport sur la gestion du groupe dès lors qu'elles répondent aux critères applicables aux sociétés de droit commun, c'est-à-dire :

- qu'elles contrôlent de manière exclusive ou conjointe une ou plusieurs entreprises,

- ou qu'elles exercent une influence notable sur ces entreprises au sens de l'article 357-1 de la loi du 24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales.

Selon les termes de l'article 357-1 de la loi de 1966 sur les sociétés commerciales, le contrôle exclusif par une société résulte soit de la détention directe ou indirecte de la majorité des droits de vote dans une entreprise, soit de la désignation, pendant deux exercices successifs, de la majorité des membres des organes d'administration, de direction ou de surveillance d'une autre entreprise, soit du droit d'exercer une influence dominante sur une entreprise en vertu d'un contrat ou de clauses statutaires. Le contrôle conjoint est le partage du contrôle d'une entreprise exploitée en commun par un nombre limité d'associés ou d'actionnaires, de sorte que les décisions résultent de leur accord.

L'influence notable sur la gestion et la politique financière d'une entreprise est présumée lorsqu'une société dispose, directement ou indirectement d'une fraction au moins égale au cinquième des droits de vote de cette entreprise.

Il est prévu au deuxième alinéa que le 2° de l'article 357-2 de la loi de 1966 s'applique à toutes les coopératives agricoles, excepté celles qui font appel public à l'épargne.

Ainsi, lorsque l'ensemble constitué par la société et les entreprises qu'elle contrôle ne dépasse pas pendant deux exercices successifs, sur la base des derniers comptes annuels arrêtés, une taille déterminée par référence à deux des trois critères mentionnés au troisième alinéa de l'article 10 du code de commerce, la coopérative agricole est exemptée de l'obligation d'établir et de publier les comptes consolidés et un rapport sur la gestion du groupe. Cette exemption ne s'applique pas aux coopératives qui font appel public à l'épargne.

Le troisième alinéa est une disposition de coordination en ce qui concerne le contrôle des commissaires aux comptes.

En matière de certification de comptes consolidés, c'est l'article 228 de la loi du 24 juillet 1968 -et notamment le deuxième alinéa- qui définit les règles applicables. Ce deuxième alinéa, issu de la loi n° 85-11 du 3 janvier 1985, précise que " Lorsqu'une société établit des comptes consolidés, les commissaires aux comptes certifient que les comptes consolidés sont réguliers et sincères et donnent une image fidèle du patrimoine, de la situation financière, ainsi que du résultat de l'ensemble constitué par les entreprises comprises dans la consolidation. Sans préjudice des dispositions du quatrième alinéa de l'article 229, la certification des comptes consolidés est délivrée notamment après examen des travaux des commissaires aux comptes des entreprises comprises dans la consolidation ou, s'il n'en est point, des professionnels, chargés du contrôle des comptes desdites entreprises ; ceux-ci sont libérés du secret professionnel à l'égard des commissaires aux comptes de la société consolidante ".

La désignation de ces commissaires aux comptes doit être, selon l'article 31 du projet de loi, conforme au troisième alinéa de l'article 27 de la loi n° 84-148 du 1 er mars 1984 relative à la prévention et au règlement amiable des difficultés des entreprises. Cette disposition indique que " pour les coopératives agricoles et les sociétés d'intérêt collectif agricole qui n'ont pas la forme commerciale, lorsqu'elles ne font pas appel à des commissaires aux comptes inscrits, cette obligation peut être satisfaite par le recours aux services d'un organismes agréé selon les dispositions de l'article L.527-1 du code rural ". L'organisme visé est, selon l'article L.527-1 du code rural, une fédération de coopératives. En outre, c'est l'article R.527-12 du code rural qui définit les modalités selon lesquelles les membres de cette fédération peuvent exercer les fonctions de commissaires aux comptes. Il est enfin mentionné qu'au moins un commissaire aux comptes est choisi sur la liste mentionnée à l'article 219 de la loi n° 66-537 dès lors que les coopératives agricoles font appel public à l'épargne.

Le quatrième alinéa prévoit la fixation d'un décret en Conseil d'Etat.

Le paragraphe II précise que ces dispositions entreront en vigueur à compter du premier exercice ouvert après la date de publication de la loi.

Votre rapporteur se félicite d'un tel dispositif qui renforce le contrôle de la coopérative sur l'ensemble des sociétés filiales auxquelles elle participe .

Le développement des coopératives agricoles s'est, en effet, traduit par la constitution de groupes coopératifs qui rassemblent en leur sein des coopératives ou unions de coopératives mais aussi des sociétés de droit commun.

Toutefois, cette évolution doit s'accompagner d'un réel contrôle par les coopératives de l'ensemble des sociétés dans lesquelles elles interviennent de manière spécifique.

La présente disposition, en élargissant l'obligation de consolidation de l'ensemble des coopératives qui répondent aux critères applicables aux sociétés de droit commun, devrait favoriser la synergie à l'intérieur des groupes coopératifs et permettre une gestion plus performante en mettant à leur disposition un outil comptable moderne, gage d'une communication meilleure avec les partenaires du secteur économique et financier.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 32 -
(Article L.528-1 du code rural) -

Conseil supérieur d'orientation de la coopération

Cet article tend à insérer dans le code rural un nouvel article L.528-1 permettant d'élargir les compétences du Conseil supérieur d'orientation de la coopération.

L'article 32 propose de créer un article L.528-1
au chapitre VIII (conseils et commissions compétentes en matière de coopération agricole) du titre II (sociétés coopératives agricoles) du livre V (organismes professionnels agricoles).

Le régime applicable au Conseil supérieur de la coopération agricole se trouve dans l'article R-528-1 du code rural. Cette réglementation prévoit que ce Conseil assiste le ministre de l'agriculture " dans l'orientation et la mise en oeuvre de la politique poursuivie en matière de coopération agricole, en vue notamment d'assurer son adaptation aux besoins nouveaux, dans le cadre de l'organisation économique européenne ".

Il exerce un rôle permanent d'étude, de proposition et de conseil et peut être appelé à participer, à titre consultatif, à l'élaboration de la réglementation. Il suit enfin la mise en oeuvre de la politique poursuivie en matière de révision par l'association nationale de révision de la coopération agricole.

L'article 32 du projet de loi consacre par la voie législative cette instance en modifiant son intitulé puisque l'expression de " conseil d'orientation de la coopération " se substitue à celle actuellement en vigueur. De plus, l'objectif est quelque peu modifié puisque cette instance agit " en vue de concilier l'adaptation de la politique agricole aux évolutions économiques avec les préoccupations liées à l'aménagement du territoire ".

En outre, les compétences de ce conseil sont quelque peu élargies et précisées :

- ce conseil doit étudier les orientations qu'il juge souhaitable de donner à la politique économique du secteur coopératif, proposer des moyens permettant leur mise en oeuvre et concourir à la recherche des synergies entre les différents partenaires concernés.

- il doit, en outre, exercer un rôle permanent d'étude, de proposition et de conseil -deuxième alinéa de l'actuel article R.528-1 du code rural- et peut être consulté sur l'élaboration de la réglementation -troisième alinéa de l'actuel article R.528-1 du code précité-.

Présidé par le ministre de l'agriculture, il est indiqué que la composition et le fonctionnement de ce Conseil sont précisés par décret.

Votre rapporteur approuve un tel dispositif .

Afin de renforcer l'actuel conseil supérieur de la coopération agricole chargé d'assister le ministre de l'agriculture dans l'orientation, le développement et la mise en oeuvre de la politique poursuivie en matière de coopération agricole et en vue d'assurer son adaptation aux évolutions, notamment dans le cadre de l'organisation économique européenne, il convient de donner une valeur législative à cette instance en insistant notamment sur le volet orientation.

En outre, votre rapporteur souhaite préciser que cet organisme " est consulté " et non " peut être consulté ", afin de permettre à ce conseil de jouer un rôle effectif dans l'élaboration de la réglementation.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

CHAPITRE Ier BIS -

Offices d'intervention
Article 32 bis -
(Articles L.621-1 et L.621-3 du code rural) -

Actualisation des missions des offices d'intervention

Cet article tend à modifier la rédaction des articles L.621-1 et L.621-3 du code rural, afin d'actualiser les missions des offices d'intervention en fonction des nouvelles orientations de la politique agricole.

La plupart des offices d'intervention ont été créés par décret le 18 mars 1983, en application de la loi du 6 octobre 1982 sur les offices d'intervention dans le secteur agricole et l'organisation des marchés. Placés sous la tutelle de l'Etat, ils sont compétents pour la filière des produits dont ils ont la responsabilité.

L'organisation des offices

Les offices d'intervention ne constituent pas une catégorie particulière d'établissements publics, mais sont des établissements publics à " double visage " 32( * ) . La loi les a classés dans la catégorie des établissements publics industriels et commerciaux, afin notamment de leur permettre de percevoir des taxes parafiscales. Pourtant, la plupart des missions confiées aux offices sont des missions de service public administratif, ainsi que le Conseil d'Etat l'avait auparavant décidé pour le FORMA, l'ONIVIT et l'ONIBEV.

De façon générale, les offices sont dotés d'un conseil d'administration et d'un directeur sous la tutelle étroite de l'Etat qui les désigne. Leur autonomie financière est réduite car l'essentiel de leurs ressources sont constituées par des subventions, des taxes parafiscales et les cotisations des opérateurs.

Les missions des offices d'intervention

Les offices agricoles doivent contribuer à réaliser les objectifs de la politique agricole commune. A cette fin, ils doivent renforcer l'efficacité de leur filière, améliorer la connaissance et le fonctionnement des marchés, et appliquer les mesures communautaires. Leur compétence s'étend aux produits bruts et aux produits de première transformation.

Les offices d'intervention sont les opérateurs de la politique agricole commune et la loi du 6 octobre 1982 énoncent les règles de commercialisation (agrément des marchés, vente directe) qu'ils peuvent mettre en place. Il faut remarquer que les offices collaborent largement avec les organisations interprofessionnelles dont ils peuvent suppléer la carence ou auxquelles ils peuvent transférer partie de leurs attributions.

Les différents offices d'intervention

Deux offices d'interventions sont antérieurs à la loi du 6 octobre 1982 qui leur est partiellement applicable :

l'Office national interprofessionnel des céréales (ONIC), créé en 1936. L'ONIC gère le marché des céréales depuis le contrôle des surfaces jusqu'à la mise en marché ou au stockage.

le Fonds d'intervention et de régulation du marché du sucre (FIRS). Ce fonds joue un rôle comparable à l'ONIC pour les sucres, mélasses et sirops dans une filière où les mesures communautaires sont extrêmement nombreuses.

Les offices d'intervention, créés en application de la loi du 6 octobre 1982, sont les suivants :

l'Office national interprofessionnel des vins (ONIVINS), qui gère la filière viti-vinicole sous réserve des compétences de l'INAO.

l'Office national interprofessionnel des plantes à parfum, aromatiques et médicinales (ONIPPAM).

l'Office national interprofessionnel des fruits, des légumes et de l'horticulture (ONIFLHOR).

l'Office national interprofessionnel du lait et des produits laitiers (ONILAIT).

l'Office national interprofessionnel des viandes, de l'élevage et de l'aviculture (OFIVAL).

On précisera qu'un organisme commun est chargé des questions relatives aux moyens en personnels et matériels des offices : il s'agit de l'Agence centrale des organismes d'intervention dans le secteur agricole (ACOFA). Les problèmes particuliers des départements d'outre-mer sont confiés à l'office de développement agricole des départements d'outre-mer (ODEADOM).

L'article 32 bis modifie les articles L.621-1 et L.621-3 de la section 1 (dispositions communes) du chapitre Ier (Les offices d'intervention) du Titre II (Les organismes d'intervention) de la partie législative du livre VI nouveau du code rural (loi n° 98-565 du 8 juillet 1998).

Le paragraphe I de l'article 32 bis apporte plusieurs modifications à l'article L.621-1 du code rural, anciennement article 1er de la loi n° 82-847 du 6 octobre 1982.

Les objectifs fixés aux offices par l'article 32 bis sont plus larges : en effet, alors que l'article L.621-1 évoque uniquement ceux " définis par l'article 39 du traité du 25 mars 1957 ", le texte proposé par le projet de loi assigne aux offices d'autres objectifs :

- contribuer à la garantie et à l'amélioration des revenus,

- réduire les inégalités,

- employer de façon optimum les facteurs de production,

- veiller à une bonne régularisation des marchés dans l'intérêt des producteurs, des négociants et des consommateurs.

Votre rapporteur vous propose d'introduire dans cet article la catégorie professionnelle des commerçants qui sont, parmi d'autres, un des acteurs dans l'équilibre des marchés agricoles.

Le paragraphe II de l'article 32 bis propose une nouvelle rédaction, à la fois plus précise et plus large, pour l'article L.621-3 du code rural, qui a trait aux missions des offices.

- la première mission actuelle (1°) des offices est aujourd'hui de renforcer l'efficacité économique de la filière. Cette mission, tout en demeurant dans le texte proposé par l'article 32 bis pour le 2° de l'article L.621-3, est précisée puisque ce renforcement passe par la mise en place d'une politique de qualité ;

- la deuxième mission (2°) des offices aujourd'hui est d'améliorer la concurrence et le fonctionnement de la filière. Cette mission est prioritaire puisqu'elle devient le 1°) du texte proposé pour l'article L.621-3. En outre, cette mission doit " assurer, en conformité avec les intérêts des consommateurs, une juste rémunération du travail des agriculteurs et des conditions normales d'activité aux différents opérateurs de la filière ". Afin de réaliser cet objectif, les offices doivent favoriser " l'organisation des producteurs, ainsi que l'organisation des relations entre les diverses professions de chaque filière ".

- La troisième et dernière mission actuelle des offices (3°) -appliquer les mesures communautaires- est identique à celle proposée par l'article 32 bis du projet de loi.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

CHAPITRE II -

Organisation interprofessionnelle

L'organisation des marchés agricoles doit être une des préoccupations majeures des pouvoirs publics en raison du caractère excédentaire de la production agricole française et de la libéralisation des échanges internationaux consécutive à la création du marché commun.

La loi n° 62-933 du 8 août 1962, en instituant les groupements de producteurs, permet à ceux-ci de ne plus se présenter sur les marchés en ordre dispersé et, en conséquence, de pouvoir mieux défendre leurs intérêts. Elle constituait ainsi un premier pas vers une organisation professionnelle des marchés.

L'action des seuls groupements agricoles reste cependant limitée. L'inadaptation de l'offre à la demande, qui entraîne des variations de prix préjudiciables aux producteurs, remet toujours en cause les revenus auxquels ceux-ci peuvent légitimement prétendre. Pour remédier à cette situation et améliorer l'organisation de la production et de la distribution, le législateur invite les professions intéressées à s'entendre en vue de mener une action concertée. Plusieurs formules d'accords collectifs ont été ainsi proposées :

- les contrats types élaborés par le ministre de l'agriculture en application de l'article 32 de la loi n° 60-808 du 5 août 1960 ; ils furent peu utilisés car l'absence de procédure d'extension et l'insuffisance des sanctions les privaient d'une réelle efficacité ;

- les accords interprofessionnels et les conventions de campagne prévus par le loi du 6 juillet 1964 ; ils constituèrent une étape importante dans le développement de la politique contractuelle, mais la nécessité de recueillir les avis d'organisations nombreuses en limita l'application à quelques secteurs 33( * ) .

La conclusion d'accords interprofessionnels restait cependant difficile en raison du nombre et de l'indépendance des organisations professionnelles intéressées. Pour faciliter la rencontre de ces organisations et leur permettre de rapprocher leurs points de vue, un cadre juridique permettant la constitution d'organisations interprofessionnelles fut élaboré par le loi du 10 juillet 1975. Depuis cette date, de nombreuses organisations interprofessionnelles ont été créées, permettant la conclusion de nouveaux accords interprofessionnels. Le rapport de l'Assemblée nationale sur le projet de loi d'orientation agricole dresse la liste de ces organisations interprofessionnelles reconnues.

Le législateur n'a pas cru cependant devoir abandonner aux seules professions le soin d'organiser les marchés. Dans certains secteurs particulièrement difficiles, les pouvoirs publics interviennent directement dans l'établissement des relations contractuelles. Depuis longtemps déjà, des organismes aux formes assez diverses assurent cette mission dans plusieurs branches d'activité. L'Office National Interprofessionnel des Céréales (ONIC) en constitue l'exemple le plus remarquable. Ces offices d'intervention ne se substituent pas aux organisations interprofessionnelles qui conservent un rôle prédominant dans l'organisation des marchés agro-alimentaires. Si leur action est très proche de celle des organisations interprofessionnelles, elle apparaît moins souple que cette dernière. C'est pourquoi les pouvoirs publics semblent privilégier l'action des interprofessions au détriment de celle des offices (article 7 de la loi n° 82-847 du 6 octobre 1982, modifiée. par la loi n° 86-1321 du 30 décembre 1986 ). Le transfert aux organisations interprofessionnelles reconnues des attributions conférées aux offices pour un produit ou groupe de produits peut, à la demande de l'organisation intéressée, être décidé par le ministre de l'Agriculture.

Pendant longtemps, les interprofessions créées à l'initiative des professions intéressées n'ont fait l'objet d'aucune législation spécifique. Le texte fondamental en la matière est la loi du 10 juillet 1975, qui leur accorde un statut juridique adapté à leur finalité. Depuis cette loi, les organisations reconnues par les pouvoirs publics constituent un cadre juridique privilégié pour l'élaboration des accords nécessaires à l'organisation des marchés.

La loi autorise les autorités administratives à étendre les accords interprofessionnels ainsi conclus à l'ensemble du secteur de distribution concerné. La procédure d'extension n'est pas réservée aux interprofessions nouvelles et elle peut être utilisée par des organisations interprofessionnelles créées antérieurement par voie législative ou réglementaire.

Rappelons que les interprofessions reconnues par les pouvoirs publics constituent la pièce maîtresse de l'organisation des marchés dans le secteur agro-alimentaire. C'est dans le cadre de ces interprofessions que les professions intéressées élaborent les accords qui régissent les marchés. Ces accords, qui se rapportent à la commercialisation d'un ou plusieurs produits déterminés, lient tous les ressortissants de ces organisations, soit à l'échelon national, soit à l'échelon régional. Ils sont complétés par d'autres contrats : les conventions de campagne qui adaptent chaque année les programmes de transformation, de stockage et de commercialisation en fonction des prévisions de production et de débouchés ; également les contrats types qui sont établis pour régler les rapports entre les producteurs et leurs clients. Les accords interprofessionnels sont, en outre, susceptibles d'être étendus à tout un secteur de production et de distribution par un arrêté du ministre de l'Agriculture.

Bien que des accords interprofessionnels puissent être conclus en dehors d'une interprofession, cette faculté est de moins en moins utilisée. Les organisations interprofessionnelles occupent donc en ce domaine une place prépondérante ; mais elles ne peuvent agir que sous le contrôle des pouvoirs publics.

La loi de 1975 a été modifiée à plusieurs reprises, notamment par la loi d'orientation agricole du 4 juillet 1980 et par la loi de modernisation de l'agriculture du 1er février 1995. Cette dernière loi a renforcé le rôle du Conseil supérieur d'orientation de l'économie agricole et agro-alimentaire (CSO) et étendu le champ d'action des organisations interprofessionnelles en ce qui concerne plus spécialement la mise en oeuvre des disciplines de qualité. Alors que jusqu'à présent la loi du 10 juillet 1975 a été modifiée pour élargir l'objet des accords étendus, modifier la procédure d'extension et articuler les accords interprofessionnels étendus avec le droit de la concurrence, le chapitre II qui vous est présenté tend à :

- préciser les missions des organisations interprofessionnelles,

- autoriser leur constitution dans le secteur de la pêche et de l'aquaculture,

- associer de manière plus large les interprofessions à la définition de la politique agricole et de filière,

- permettre l'évaluation d'office des assiettes de cotisation,

- apporter d'importantes précisions sur les dérogations possibles à l'interdiction des ententes anticoncurrentielles,

- proposer des adaptations de la procédure d'extension.

Article 33 -
(Articles L.632-1 et L.632-2 du code rural) -

Statut et prérogatives des organisations interprofessionnelles

Cet article modifie les articles L.632-1 et L.632-2 du code rural, afin de préciser et d'élargir le statut et les prérogatives des organisations interprofessionnelles.

Il convient de préciser que l'article 33 du projet de loi d'orientation agricole initial proposait une nouvelle rédaction de l'ensemble de l'article premier de la loi n° 75-600 du 10 juillet 1975 relative à l'organisation interprofessionnelle agricole.

Cette loi a été codifiée par la loi n° 98-565 du 8 juillet 1998 relative à la partie législative du livre VI (nouveau) du code rural.

Pour mémoire :


Loi n° 75-600 du 10 juillet 1975

Livre VI (nouveau) du code rural - Partie législative

Article 1er, alinéas 1 à 3

L.632-1

Article 1er, alinéas 4 à 5

L.632-2

Article 2, alinéas 1 à 7

L.632-3

Article 2, alinéas 8 à 11

L.632-4

Article 2, alinéas 12 et 13

L.632-5

Article 3

L.632-6

Article 4

L.632-7

Article 4bis

L.632-8

Article 5

L.632-9

I. L'ARTICLE L.632-1 DU CODE RURAL

A. L'ARTICLE L.632-1 DU CODE RURAL EST COMPOSÉ DE TROIS ALINÉAS

Le premier alinéa prévoit que les organisations interprofessionnelles sont constituées librement par les organisations professionnelles les plus représentatives de la production agricole et, selon les cas, de la transformation et du négoce, représentant les intérêts en présence. Elles peuvent faire l'objet d'une reconnaissance par l'autorité administrative après avis du CSO. Cette reconnaissance se rattache à un produit ou un groupe de produits déterminés soit au niveau national, soit au niveau d'une zone de production.

Rappelons que, le plus souvent, les organisations interprofessionnelles constituent des associations régies par le loi de 1901, même si aucune forme juridique ne leur est imposée. Par ailleurs, la loi du 10 juillet 1975 ne précise pas les critères qui doivent être retenus pour déterminer les organisations représentatives. Il semble que l'on puisse rapprocher la notion de représentativité en matière d'accords interprofessionnels de celle qui s'est dégagée en droit du travail. Il convient donc de prendre en considération le nombre des adhésions des différentes organisations professionnelles et l'importance des cotisations qu'elles perçoivent.

La représentativité des organisations professionnelles doit également être appréciée en fonction de leur pouvoir économique, car il est nécessaire que l'interprofession tienne compte de la place occupée par chacune d'elles dans le secteur considéré. Un syndicat groupant des producteurs très importants possède un pouvoir économique plus grand qu'un syndicat comprenant de nombreux et petits exploitants. Les dirigeants de l'interprofession doivent donc, pour constituer leur organisation, prendre en considération l'importance de l'activité économique des organisations professionnelles adhérentes.

Le deuxième alinéa précise qu'une seule organisation interprofessionnelle peut être reconnue par produits ou groupe de produits, tant à l'échelon national qu'à celui d'une zone de production. Lorsqu'une organisation interprofessionnelle nationale est reconnue, les organisations interprofessionnelles régionales constituent des comités de cette organisation interprofessionnelle nationale et sont représentées au sein de cette dernière.

Le troisième alinéa prévoit que les conditions de reconnaissance sont déterminées par décret.

B. LE TEXTE PROPOSÉ POUR LE NOUVEL ARTICLE L.632-1 PAR L'ARTICLE 33 EST COMPOSÉ DE DEUX PARAGRAPHES

1. Le paragraphe I reprend le premier alinéa de l'article L.632-1 actuel et introduit plusieurs innovations :

a) Tout d'abord, il permet au secteur sylvicole et aux secteurs de la pêche maritime et de l'aquaculture marine d'accéder aux interprofessions.

L'extension des interprofessions à la filière bois.

La formule des groupements de producteurs, conçue pour organiser la production agricole et la mise en marché, a été étendue au secteur forestier. L'objectif poursuivi est de parvenir à une meilleure adéquation entre la production forestière et la demande de bois. Ces groupements de producteurs, institués par la loi n° 85-1273 du 4 décembre 1985, sont soumis aux dispositions nationales d'organisation des producteurs, sous réserve de certaines adaptations. Les organisations susceptibles d'être reconnues en qualité de groupement de producteurs forestiers sont les sociétés coopératives et leurs unions, les SICA, les associations et les groupements de propriétaires forestiers. Elle est accordée non par le ministre de l'agriculture, mais par le représentant de l'Etat dans la région, après avis du Centre régional de la propriété forestière.

Les organisations professionnelles les plus représentatives ont pu élaborer des accords interprofessionnels associant le secteur de la transformation et de la commercialisation. Cette reconnaissance en termes d'organisation de la production n'a pas néanmoins débouché sur le développement d'accords interprofessionnels dans la filière bois.

Plusieurs raisons expliquent la difficulté à admettre, sur la base de la loi de 1975, la légalité d'accords interprofessionnels dans la filière bois :

- l'article premier de la loi de 1975 mentionne la notion de production agricole : or, peut-on conclure que l'activité forestière fait partie de la production agricole ? Il n'existe aucune définition de la production agricole, tout au plus le code rural à l'article L.311-1 esquisse les contours de la notion d'activité agricole sans définir l'acte de production agricole auquel il se réfère. Ainsi, la mise en oeuvre du critère objectif -l'agriculture par nature- par la jurisprudence s'est parfois révélée contradictoire quant à la reconnaissance de l'activité forestière comme une activité agricole : si une activité de pressage de pommes, d'abattage et de cassage de bois a été reconnue comme étape du cycle biologique et activité agricole, l'abattage d'arbres seul n'a pas été reconnu comme activité agricole (TGI Bordeaux 1990) ;

- il existe deux codes distincts, l'un pour le droit rural, l'autre en droit forestier, ce qui confirme la distinction opérée entre ces deux secteurs d'activité ;

- les lois d'orientation, et notamment l'article 1er du projet de loi qui vous est présenté, relatif aux objectifs de la politique agricole française soit ne mentionnent pas la sylviculture, soit ne la considèrent pas comme une activité spécifiquement agricole ;

- la politique agricole commune ne concerne en aucune façon les activités forestières. Ainsi, le bois ne fait pas l'objet d'une organisation commune de marché et ne relève pas des dispositions du traité de Rome relatives à la PAC. D'ailleurs, si l'amorce d'une politique commune forestière a pu être constatée dans le chapitre VIII des propositions de l'Agenda 2000, un grand nombre d'Etats membres ne se sont pas montrés favorables à l'instauration d'une telle politique communautaire. Votre rapporteur, tout en étant conscient de cette distinction entre politique agricole et politique forestière, constate qu'il existe un certain paradoxe à reconnaître des accords interprofessionnels dans le domaine de l'agro-alimentaire, des semences... et à avoir refusé, jusqu'à présent une telle possibilité pour la filière bois.

La mise en place d'interprofessions dans le secteur sylvicole devrait entraîner l'intervention du Conseil supérieur d'orientation et de coordination de l'économie agricole et alimentaire (CSO). Or, actuellement, cet organisme ne comporte aucun membre de ce secteur d'activité. Le CSO devrait néanmoins pouvoir accueillir parmi ses membres, puisque ayant voix délibérative, des représentants de la production sylvicole ; l'avant-dernier alinéa du I de l'article 4 de la loi n° 80-502 du 4 juillet 1980 d'orientation agricole a prévu que " lorsque les problèmes de la forêt et de la transformation du bois sont évoqués au sein du Conseil supérieur d'orientation et de coordination, le Conseil supérieur de la forêt et des produits forestiers y est représenté ".

Votre rapporteur est tout à fait favorable à cette disposition de clarification.

L'extension des interprofessions aux secteurs de la pêche et de l'aquaculture.

Le dernier alinéa du paragraphe I du texte proposé par l'article 33 pour l'article L.632-1 du code rural étend la notion d'interprofession au secteur de la pêche maritime et de l'aquaculture.

La loi n° 97-1051 du 18 novembre 1997 d'orientation sur la pêche maritime et les cultures marines met l'accent sur une meilleure gestion de la ressource et une organisation de la filière de mise en marché, pour laquelle les organisations de production sont des acteurs de premier rang. Elle leur confie d'ailleurs un rôle important dans la gestion des quotas de capture.

En France, la création de la plupart des organisations de producteurs (OP) fait suite à l'adoption du règlement communautaire de 1970 . Les OP ont, dans leur majorité, entre 12 et 20 années d'existence. Nombre d'entre elles résultent d'une conversion de structures préexistantes, tels les FROM, dont la création remonte à la crise des marchés de 1965-1964 34( * ) .

On recense en France une trentaine d'organisations de producteurs, dont certaines spécialisées. Il existe aussi, au sein de ces OP, deux fédérations nationales, l'association nationale des organisations de producteurs de la pêche maritime et des cultures marines (ANOP) et la fédération des organisations de producteurs de la pêche artisanale (FEDOPA) qui ont un statut et des missions spécifiques. Les OP regroupent au total plus de 2.000 navires adhérents contre plus de 5.700 non-adhérents.

Les quantités commercialisées par les OP avoisinent le total des quantités vendues sous criée -les OP commercialisent certains produits en dehors des criées-. L'adhésion aux OP est importante, voire prédominante pour certains segments de la flottille ou certains ports. Les adhérents d'OP sont plus nombreux parmi les unités de taille importante et principalement parmi les chalutiers. Les navires adhérents d'OP ont des caractéristiques (en moyenne 15,44 m et 247 kW) nettement supérieures à celles des navires non-adhérents (en moyenne 9 m et 100 kW). De même, la moyenne d'âge des bateaux adhérents d'OP est inférieure à celles des non-adhérents (respectivement 15 et 19 ans). Cette situation tient à deux raisons principales : les petites unités qui commercialisent directement ou qui sont spécialisées dans des espèces nobles ne sont pas concernées par les prix de retrait ; les unités désirant bénéficier des services offerts par la confédération (coopératives d'armement, d'avitaillement ou de gestion) doivent adhérer à un OP coopérative.

En matière d'effectifs, il apparaît que plus de la moitié des OP ont une faible taille avec une production annuelle inférieure à 5.000 tonnes qui représente moins de 100 millions de francs.

Dès l'origine, la mission clé des OP a été le soutien des cours, en particulier par la gestion des retraits, seuls, les adhérents d'OP pouvant bénéficier d'un tel soutien. Au fil des modifications réglementaires successives de la politique commune de la pêche, le rôle des OP s'est progressivement élargi. Depuis leur création, du fait de la croissance de leurs effectifs et de l'accroissement des problèmes du marché, leur poids économique s'est affirmé. Ainsi, au niveau de leur zone d'intervention, elles sont de plus en plus fréquemment associées à la gestion de la ressource par les comités locaux et régionaux qui, en France, en ont institutionnellement la mission depuis l'ordonnance de 1945.

Les autres fonctions des OP sont diverses . L'importance de leur implication est liée à leur taille à leur poids économique du fait des contraintes de budget, qui sont, avec l'influence des producteurs non-adhérents, leur principale contrainte de fonctionnement. En effet, le budget des OP est alimenté, avec un délai par les versements de la CEE pour les espèces du règlement de base et par des cotisations des membres, qui sont fonction de leurs chiffres d'affaires. Outre ces sources régulières de financement, il peut s'ajouter ponctuellement des subventions du FIOM -aujourd'hui OFIMER- relatives à des actions précises de promotion ou de contrats d'approvisionnement des industries. Ainsi, le soutien de espèces non visées par la Commission européenne est-il contraint par les montants de cotisations ; assez fréquemment, les OP se voient obligées de suspendre le soutien de certaines espèces en cas de persistante de la baisse en cours.

Les OP participent à des politiques de diversification des apports, avec un soutien financier du FIOM, et mettent en place des systèmes de prévision des débarquements. Elles contribuent aussi à la valorisation des productions en oeuvrant pour normaliser la production (poids, tri, présentation), améliorer la qualité des produits (modalités de contrôle, catégories de qualité, moyens de conservation) et en mettant en place des politiques contractuelles d'approvisionnement des industries de transformation et des actions promotionnelles pour valoriser la production de leurs adhérents (étiquetage, salons, publicités, affiches, fiches recettes...).

Enfin, la majorité des OP pratique une politique d'information, voire de conseil, plus ou moins importante en fonction de la disponibilité des dirigeants et de leur budget. Contrairement à d'autres pays (par exemple en Grande-Bretagne ou aux Pays-Bas), la participation des OP françaises à la gestion des quotas (prévue par le règlement CEE 3759/92 du 17/12/1992) reste théorique, faute de règles de réparation homogènes et cohérentes et de moyens juridiques. En effet, une OP peut décider d'un plan de pêche mais ne peut l'imposer à l'ensemble des marins-pêcheurs.

Il apparaît que les OP sont devenues des acteurs indispensables pour au moins un tiers de la flotte française. Leur existence et leur logique d'intervention sont reconnues par l'ensemble de la profession et appréciées par leurs adhérents, en même temps que la place grandissante des grandes surfaces dans les circuits de distribution conforte le besoin de regroupement des producteurs, voire des OP pour lesquelles on observe d'ailleurs un processus de regroupement ou d'associations régionales. Outre la géographie, leur réglementation tend à les rapprocher, en même temps que la concurrence entre les structures limite leur capacité d'initiative individuelle 35( * ) .

Tandis qu'il semble que l'on s'oriente plutôt au niveau européen vers des politiques concertées dépassant l'échelle des ports et des structures, au contraire les OP françaises font montre d'une grande unité et de spécificités nationales qui les différencient par rapport aux autres structures européennes.

Les organisations de producteurs, disposant d'une situation particulière au sein de la filière qui leur permet d'animer les relations entre ce qui se passe en mer et ce qui se passe à terre, sont impliquées dans toutes les démarches " horizontales " portuaires et interportuaires : circulation d'information, harmonisation des tris sous criée, qualité à bord, formation...

Il est néanmoins impératif de consolider les démarches " verticales ", de nature interprofessionnelle. L'interprofession permet de mieux structurer l'amont, constitué par l'ensemble des organisations de producteurs et du mareyage, face à l'organisation de plus en plu structurée de l'aval. Ainsi, l'objectif de traçabilité pourrait être mis en oeuvre à travers l'interprofession.

Soulignons que la procédure de reconnaissance serait identique à celle mise en place dans les secteur agricole et sylvicole. L'avis du CSO est remplacé par celui du Conseil supérieur d'orientation des politiques halieutique, aquacole et halio-alimentaire, institué par l'article 2 de la loi n° 97-1051 du 18 novembre 1997.

Si la détermination de la zone de production " par produit ou groupe de produits " est aisée en matière aquacole, il en va différemment en matière de pêche maritime. C'est pourquoi il est convenu de renvoyer au travers de cette notion au rattachement des bateaux de pêche aux ports d'une zone maritime (Bretagne Méditerranée, Manche et mer du Nord, par exemple). Le lieu de mise sur le marché, c'est-à-dire les sites des criées qui constituent la zone d'apport du poisson sur le marché, est, en effet, l'aspect essentiel en matière de mise en marché, par ces nouvelles interprofessions. Deux types de mesures visant à améliorer la gestion des marchés pourront être mises en place. Il s'agit, en premier lieu, de l'établissement d'un classement des poissons selon leur type et leur qualité, les criées d'une même région maritime souffrant d'une absence d'homogénéité en la matière, et, en second lieu, de la mise en place d'un système d'information en temps réel des pêcheurs sur les besoins des mareyeurs des différentes criées de la zone de production.

b) le paragraphe I précise, de plus, les objectifs que poursuivent les interprofessions reconnues à travers les accords interprofessionnels.

Actuellement, les organisations interprofessionnelles ont pour objet de mettre en oeuvre les moyens juridiques de contrainte et les moyens financiers nécessaires pour mener à bien certaines tâches qui répondent à l'intérêt de la collectivité des professions elles-mêmes. Elles doivent notamment répondre à une double préoccupation :

- prolonger l'organisation des producteurs et faciliter la concertation d'une part, entre les différentes familles professionnelles concernées et, d'autre part, entre ces professions et les pouvoirs publics ;

- donner aux professions intéressées les moyens d'arrêter en commun des mesures d'organisation du marché compatibles, bien entendu, avec les dispositions des réglementations nationales et communautaires et appelées à les compléter.

Selon les termes du paragraphe I, les trois objectifs cumulatifs que doivent mettre en oeuvre les interprofessions sont les suivants :

- définir et favoriser des démarches contractuelles entre leurs membres : cet objectif paraît évident puisque c'est la raison d'être de l'organisation interprofessionnelle. Or, la contractualisation, notamment dans le secteur agricole, représente des enjeux essentiels. Rappelons que la contractualisation est une relation commerciale entre les producteurs agricoles, les transformateurs et les distributeurs. Ainsi, plutôt que d'acheter les produits sur les marchés, les distributeurs commandent aux producteurs des produits spécifiques définis par un cahier des charges précis. Pour la viande, les cahiers des charges peuvent préciser l'origine et la race de l'animal, le mode d'élevage, l'alimentation, l'âge d'abattage. Au niveau de la transformation, il précise l'obligation de traçabilité par animal. Les distributeurs, de leur côté, s'engagent sur la maturation de la viande, la présentation des produits, l'information des consommateurs... En contrepartie des engagements pris, la contractualisation apporte une plus-value aux producteurs et une sécurité sur les prix, destinée à lisser les effets de cours.

Ces relations commerciales d'un nouveau type se développent depuis quelques années déjà entre l'amont agricole et la majorité des grandes enseignes. Elles ont de nombreuses vertus. La première est de garantir la sécurité des produits et leur qualité, tant attendues des consommateurs. La deuxième est de diversifier l'offre en linéaire, diversification indispensable aujourd'hui pour les enseignes, afin de maintenir leurs parts de marché. Enfin, elle apporte aux producteurs une sécurité, en terme de volume d'achat et de prix, sur une période suffisamment longue. Sécurité qui leur permet de s'engager dans des démarches spécifiques, de produire pour répondre à une demande. La contractualisation concerne surtout les produits frais (viande, poissons, fruits et légumes...) mais s'étend aussi aux produits de grande consommation. Les volumes contractualisés sont en général modestes. Selon les enseignes, ils pourraient atteindre à terme de 20 % à 30 % des ventes par marché.

- contribuer à la gestion des marchés par une meilleure adaptation des produits aux plans quantitatif et qualitatif et par leur promotion ; ce rôle d'équilibre est implicitement inscrit dans la loi de 1975. En matière de promotion, on assiste à un très fort développement des activités de promotion de certains produits, notamment dans le secteur de la viande bovine et des fruits et légumes. Il convient en effet de confier cette mission aux interprofessionnels qui sont à même de la remplir dans les meilleures conditions.

- renforcer la sécurité alimentaire, en particulier par la traçabilité des produits. Cette union doit s'effectuer dans l'intérêt des consommateurs et des utilisateurs. Elle doit, en outre, gérer les signes d'identification de la qualité et de l'origine.

Il est important de préciser qu'apparaît pour la première fois dans un projet de loi la notion de " traçabilité des produits ", dont on peut trouver la définition dans la norme ISO 8402. Passée dans le langage commun, elle a été à l'origine de plusieurs démarches communes de filières de productions, transformateurs et distributeurs, afin de rassurer les clients, notamment dans les secteurs du blé et de la viande bovine. Les accords conclus permettent de suivre à la trace les produits vendus dans les rayons depuis leur origine ; ils servent aussi à déterminer leur qualité et leur prix. Ils sont d'ailleurs souvent complétés par des mesures de contrôle (méthode HACCP, norme ISO 9000-2) sans cesse plus sévères et plus innovantes.

Soulignons que ce troisième objectif s'adresse à l'ensemble des interprofessions et non pas seulement aux interprofessions spécifiques.

Votre rapporteur vous propose un amendement à ce paragraphe tendant à préciser qu'il n'appartient pas aux interprofessions de gérér les signes d'identification.

2.
Le paragraphe II reprend le deuxième alinéa de l'article L.632-1 actuel et le complète par la notion " d'organisation interprofessionnelle spécifique ". Il confirme donc bien le principe de l'exclusivité de l'interprofession par produit ou groupe de produits .

Malgré ce principe, il existe de nombreux organismes à caractère interprofessionnel représentatifs de la production, de la transformation et de la commercialisation des denrées de qualité produites dans des régions déterminées. Ils sont régis par des dispositions législatives ou réglementaires ou des décisions de justice antérieures à la loi de 1975. Les modalités de reconnaissance instaurées par cette loi ne leur sont pas applicables.

Tel est le cas de organismes à caractère interprofessionnel créés en vue de favoriser la production et la mise en marché de divers produits bénéficiant d'une appellation d'origine : comités interprofessionnels des vins d'appellation d'origine contrôlée, comité interprofessionnel de la volaille de Bresse, comité interprofessionnel des fromages du département du Cantal... La plupart de ces organismes ont été validés par la loi n° 77-731 du 7 juillet 1977.

Ces organismes demeurent autonomes et ne peuvent être obligés à devenir les sections minoritaires d'une organisation nationale. Ils continuent à bénéficier des droits et avantages qui leur ont été accordés et ne sauraient être associés sans leur consentement à une organisation interprofessionnelle à vocation plus étendue.

Les accords conclus dans le cadre de ces organismes peuvent faire l'objet de la procédure d'extension prévue par la loi du 10 juillet 1975.

L'article 33 du projet de loi consacre la notion d'organisation interprofessionnelle spécifique, ainsi qualifiée car elle concerne trois types de produits :

- ceux qui bénéficient d'une même appellation d'origine contrôlée, d'une même indication géographique protégée, d'un même label ou d'un même certificat de conformité ; soulignons que la possibilité pour une interprofession de gérer l'ensemble des produits sous le signe IGP est une mesure de cohérence avec la promotion de l'indication géographique protégée consacrée au titre IV du présent projet de loi. Votre rapporteur abordera l'examen de cette disposition lors de la présentation de l'article 39 ;

- ceux issus de l'agriculture biologique ;

- ceux portant la dénomination " montagne ".

Pour ces deux derniers types de produits, l'interprofession spécifique aura néanmoins une compétence nationale. Soulignons que le paragraphe II exclut la mise en place d'une interprofession spécifique pour les vins d'appellation d'origine contrôlée (AOC) dès lors qu'il existe déjà une interprofession reconnue, qualifiée, de portée générale.

Cette précaution évitera aussi la création d'interprofessions nouvelles spécifiques à certaines appellations car celles-ci conduiraient à un fractionnement des interprofessions existantes. En effet, le secteur viti-vinicole dispose déjà d'interprofessions spécifiques qui regroupent une ou plusieurs AOC selon une logique le plus souvent régionale : vins de Bordeaux, des Côtes du Rhône, d'Alsace.

La tendance est aujourd'hui plutôt, d'ailleurs, en faveur d'un regroupement des appellations au sein d'entités régionales de taille suffisante pour que l'interprofession dispose d'un certain poids et des moyens nécessaires. La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale protège ces interprofessions existantes mais n'empêche pas la création de nouvelles interprofessions là où il y aurait carence.

La procédure indiquée pour la création d'une interprofession spécifique est la suivante :

Demande d'une organisation interprofessionnelle spécifique

Avis de l'organisation interprofessionnelle de portée générale

Ministère de l'agriculture

Reconnaissance

Non Reconnaissance

Possibilité d'extension d'un accord interprofessionnel si :

- il existe des règles de coordinations entre l'organisation interprofessionnelle spécifique et celle de portée générale. Ces règles peuvent consister en la fixation de réunions conjointes périodiques et l'échange d'informations.

- ces règles doivent être notifiées à l'autorité administrative à l'origine de la reconnaissance.

Les interprofessions sont en effet des associations ou des syndicats qui sont régies par la liberté d'association et celle de contracter. S'il est impossible de conditionner la création d'une interprofession spécifique, ou la conclusion d'accords en leur sens, à l'accord de l'interprofession générale ou de l'Etat, s'il s'avère nécessaire néanmoins d'assurer une certaine cohérence.

La reconnaissance de l'interprofession " agriculture biologique " devrait, selon le Gouvernement, permettre aux producteurs et aux opérateurs défendant ce mode de production ou ce type de produits, d'appréhender de manière globale et transversale toutes les questions de maîtrise du marché des différents produits issus de l'agriculture biologique. Il en est de même pour la reconnaissance de l'interprofession " montagne ".

S'agissant des interprofessions spécifiques organisées autour d'un produit bénéficiant d'un sigle officiel de qualité, l'objectif est de leur conférer une large compétence pour maîtriser la qualité et pour mettre en oeuvre des procédures de contrôles de celle-ci. Il faut, en outre, permettre une véritable régulation du marché par le biais d'une maîtrise quantitative des mises au monde.

Rappelons qu'il existe aujourd'hui des interprofessions nationales et régionales. Ces dernières sont organisées et fonctionnent correctement, notamment dans le domaine viticole. En revanche, certaines interprofessions générales, comme celle du fromage, ne parviennent pas, et pour cause, à maîtriser la spécificité de chacune des productions. Ainsi, par exemple, les producteurs de fromage de comté ne se reconnaissent pas en tant que tels dans l'interprofession générale et ne sont pas d'accord avec les mesures de suivi de la qualité que celle-ci veut mettre en place en aval.

Votre rapporteur a analysé longuement le dispositif relatif à la reconnaissance d'une interprofession " agriculture biologique " et " montagne ". En effet, la rédaction adoptée par l'Assemblée nationale soulève deux difficultés :

- la première tient à l'ambiguïté de la rédaction du dernier alinéa du II, qui pourrait conduire à ne pas soumettre aux mêmes conditions de coordination avec les interprofessions générales l'interprofession nationale spécifique bio ;

- l'autre tient au risque d'isoler les interprofessions bio et montagne qui seront de compétence nationale, des autres interprofessions.

Face à ces problèmes votre rapporteur vous propose :

- qu'une interprofession spécifique autour de plusieurs AOC telle qu'une interprofession regroupant les produits cidricoles ou de l'oléiculture sous AOC soit également visée dans cet article à l'image des interprofessions déjà reconnues dans le secteur viticole et pour certains fromages d'AOC.

- tout d'abord de supprimer le dernier alinéa du paragraphe afin de clarifier les modalités qui s'appliquent aux différentes interprofessions afin d'éviter toute distorsion dans l'organisation des filières par les interprofessions ;

- ensuite, d'ouvrir la possibilité de créer au sein des interprofessions des sections consacrées aux produits issus de l'agriculture biologique et de la montagne : cette mesure pourrait compléter le deuxième alinéa du II ;

- enfin, de permettre, si les professionnels le souhaitent de créer une interprofession " agriculture biologique " en raison de la spécificité et de l'importance de ce type de production ou une interprofession " produits de montagne "; enfin, elle permettrait d'éviter toute distorsion dans l'organisation des filières par les interprofessions. Il apparaît en effet indispensable que le projet de loi rappelle le principe de subordination des règles des interprofessions spécifiques aux règles des organisations générales de façon à empêcher que des décisions contradictoires viennent gêner le développement des filières sur les marchés intérieurs et internationaux.

II. L'ARTICLE L.632-2 DU CODE RURAL.

Le texte proposé par l'article 33 du projet de loi pour cet article est composé de deux paragraphes.

A. LE PARAGRAPHE I REPREND ET COMPLÈTE LES DEUX ALINÉAS DE L'ARTICLE L632-2 DU CODE RURAL.

1. Il reprend tout d'abord les termes de l'article L.632-2

Ainsi, les organisations interprofessionnelles, pour être reconnues, doivent introduire dans leurs statuts une clause prévoyant le recours à des procédures de conciliation et d'arbitrage pour tenter de résoudre les litiges susceptibles de survenir à l'occasion de l'application des accords interprofessionnels.

Il est en outre précisé que l'exécution de la sentence arbitrale et les recours portés contre cette sentence sont de la compétence du juge judiciaire. Ainsi, lorsque les organisations n'exercent pas de prérogatives de puissance publique et sont parties à des actes ou des contrats qui peuvent être accomplis par toute personne morale de droit privé, les litiges relèvent de la compétence des juridictions judiciaires. Au contraire, lorsque les organisations interprofessionnelles participent à l'exécution d'engagements internationaux, notamment de ceux définis par les règlements communautaires, elles agissent en qualité d'autorités nationales et leurs décisions relèvent des juridictions administratives.

2. Les innovations apportées par le projet de loi

a) Le paragraphe I apporte néanmoins trois innovations importantes :

Les missions des organisations interprofessionnelles sont clairement citées. Alors que l'article 632-1 faisait référence aux objectifs des interprofessions, l'article 632-2 en énumère les différentes attributions :

- elles peuvent être consultées sur les orientations et les mesures des politiques de filière les concernant ; il convient de souligner que cette consultation n'est que facultative. Rappelons que ces orientations sont définies par le ministère en fonction des décisions de la Communauté européenne. Les mesures sont arrêtées par les offices d'intervention en fonction des décisions d'organisation commune des marchés prises à Bruxelles.

L'opposition entre interprofessions privées et interprofessions publiques est classique et sans doute nécessaire. Elle ne se fonde pas sur les critères juridiques des missions de service public, ni sur l'existence ou l'absence d'une collaboration entre certaines interprofessions et l'Etat. Elle s'appuie sur la distinction entre les établissements publics et les personnes morales de droit privé. Les premiers, tels que l'ONIC (Office national interprofessionnel des céréales) ont pourtant des conseils d'administration où les professionnels ont une place variable, mais toujours importante. Les interprofessions privées sont " reconnues " par l'Etat et collaborent étroitement avec les services ou les établissements publics. Elles reçoivent souvent des prérogatives de puissance publique, mais demeurent juridiquement des personnes morales de droit privé.

- elles contribuent à la mise en oeuvre des politiques économiques nationales et communautaires : cette contribution apparaît logique puisque les interprofessions unissent pour une action commune les différents agents économiques d'une filière agro-alimentaire.

Afin de remplir ces missions dont le libellé reste volontairement très vague, les interprofessions peuvent associer plusieurs catégories de personnes. Il s'agit :

- des organisations représentatives des consommateurs,

- des salariés des entreprises du secteur concerné.

Votre rapporteur comprend tout à fait le souci de faire participer ces deux catégories de personnes au missions de l'interprofession. En effet, sans consommateurs, il n'y aurait pas de marché pour les produits dont les interprofessions cherchent à assurer la promotion. De même, sans les salariés de ce secteur, il n'y aurait pas de produits. La possibilité d'une telle participation est donc tout à fait justifiée. Tel n'aurait pas été le cas si, comme certains députés le souhaitaient, il avait fallu obliger les interprofessions à élargir de façon excessive la représentation d'un grand nombre de catégories de personnes au sein des instances délibérantes des interprofessions. En effet, les interprofessions décident, à l'unanimité, des disciplines de production, de transformation et de mise sur le marché : au cas où leurs membres ne parviennent pas à se mettre d'accord, il est prévu une procédure d'arbitrage confiée à une instance constituée des grandes organisations professionnelles représentatives des producteurs, des transformateurs et des distributeurs.

Ainsi, comme l'indiquait M. François Guillaume lors de l'examen en séance publique à l'Assemblée nationale, supposons que le marché ne puisse pas absorber les quantités produites. Il est clair que les représentants des consommateurs au sein des interprofessions auraient tout intérêt à s'opposer à une politique de limitation de la production, puisque son accroissement provoque une baisse des prix favorable aux consommateurs. Voilà un exemple très précis qui démontre qu'une trop large extension de la composition de l'interprofession conduirait à l'inefficacité.

En fait, c'est à l'Etat d'être le garant des intérêts des consommateurs puisqu'il lui appartient d'homologuer les accords interprofessionnels conclus par les trois " familles ". S'il décide de ne pas les homologuer, il est clair que ces accords ne pourront pas être étendus à l'ensemble de la production et que leur efficacité sera des plus aléatoires.

La troisième innovation de ce paragraphe I consiste dans le fait de prévoir explicitement le retrait de reconnaissance à une interprofession. Actuellement, le troisième alinéa de l'article L.632-1 susmentionné précise qu'un décret fixe les conditions de reconnaissance des organisations interprofessionnelles.

Les organisations interprofessionnelles qui désirent faire l'objet d'une reconnaissance doivent adresser leur demande au ministre de l'Agriculture. Celui-ci en assure l'instruction en liaison avec les ministres chargés de l'Economie et du Budget.

Le dossier doit comprendre, outre la demande de reconnaissance, les statuts de l'organisation interprofessionnelle. Le ministre chargé de l'instruction de la demande peut demander à l'organisation interprofessionnelle la communication de toute pièce complémentaire comportant des éléments d'information utiles à l'instruction du dossier.

La demande de reconnaissance est soumise par le ministre chargé de son instruction au Conseil supérieur d'orientation de l'économie agricole et alimentaire. Après avoir reçu l'avis du Conseil, les ministres chargés de l'Economie, du Budget et de l'Agriculture prononcent la reconnaissance.

Rappelons que, jusqu'à présent, une seule organisation interprofessionnelle peut être reconnue par produits ou groupe de produits tant à l'échelon national qu'à celui d'une zone de production. Lorsqu'une organisation interprofessionnelle nationale est reconnue, les organisations interprofessionnelles régionales constituent des comités de cette organisation interprofessionnelle nationale et son représentées au sein de cette dernière.

En cas de refus de reconnaissance, la décision est notifiée à l'organisation intéressée par le ministre chargé de l'instruction du dossier. Néanmoins, rien n'est dit sur le retrait de la reconnaissance. Par la notion de retrait, on entend la suspension ou la cession des effets de la décision de la reconnaissance et non, comme c'est le cas en droit administratif, l'annulation rétroactive de toutes les décisions prises par l'interprofession.

Actuellement, certaines interprofessions reconnues tombent en désuétude ou ont cessé toute activité faute d'accord entre leurs membres et de moyens financiers. De plus, la suppression d'une interprofession ayant un champ d'activité déterminé est nécessaire avant la reconnaissance d'une nouvelle interprofession ayant le même objet.

En l'absence d'indication contraire, les règles applicables en matière de retrait sont conformes au principe du parallélisme des formes.

b) Le paragraphe II concerne le cas des accords conclus au sein des interprofessions reconnues spécifiques à un produit sous sigle officiel d'identification (AOC, IGP, label ou certificat de conformité)

Ces accords, qui doivent viser à adapter l'offre à la demande, ne peuvent pas comporter de restrictions à la concurrence, sauf exceptions.

Le problème de la compatibilité des accords professionnels avec le droit de la concurrence, tant au niveau national qu'au niveau communautaire, revient périodiquement sur le devant de l'actualité.

Au niveau national


Il convient, pour bien comprendre cette question assez complexe, d'en revenir aux textes.

L'article 2 de la loi de 1975 dans son texte initial, mentionne que les actions des interprofessions doivent être conformes aux règles de la communauté économique européenne.

L'ordonnance de 1986, relative à la liberté des prix et de la concurrence, a été adoptée dans un contexte économique particulier. Elle fait suite à l'encadrement des prix institué en 1940 et reformalisé dans l'ordonnance de 1945.


Elle intervient dans un contexte où l'objectif essentiel est de juguler une forte inflation, en favorisant les distributeurs au détriment des producteurs. Ainsi, l'interdiction du refus de vente, imposée en 1940 pour des raisons de pénurie, et l'interdiction de fixer un prix minimum où des conditions discriminatoires ont été consolidées par la circulaire Fontanet du 31 mars 1960, et reprises dans l'ordonnance de 1986.

Elle tient compte, en outre, de la décision des chefs d'Etat et de Gouvernement de la Communauté européenne de réaliser, au 1er janvier 1993, l'Union européenne, c'est-à-dire la libre circulation des hommes, des capitaux et des marchandises dans un Marché unique européen ce qui présuppose la liberté des prix et de la concurrence.

Le titre III de cette ordonnance porte sur les pratiques anticoncurrentielles. Il définit ce qu'on entend par " pratiques anticoncurrentielles " avec trois articles qui constituent le coeur de l'ordonnance :

L'article 7, qui prohibe les actions visant à :

. limiter l'accès au marché,

. entraver la libre concurrence,

. faire obstacle à la fixation des prix par le seul jeu du marché,

. contrôler la production, les débouchés ou les investissements,

. répartir les marchés et les sources d'approvisionnement.

L'article 8, qui prohibe l'exploitation :

. des positions dominantes sur un marché,

. de dépendance économique vis-à-vis d'un fournisseur ou d'un client.

Sont considérés comme des abus le refus de vente, les ventes liées, les ventes sous conditions discriminatoires, la rupture de relations commerciales quand un partenaire refuse de se soumettre à des conditions commerciales injustifiées ;

L'article 10, qui prévoit des dispositions dérogatoires aux articles 7 et 8 lorsque les pratiques :

. résultent d'un texte législatif ou réglementaire (1°),

. assurent un progrès économique, une répartition équitable du profit, sans éliminer la concurrence (2°).

Certaines catégories d'accords, notamment celles améliorant la gestion des PME, sont reconnues dans le cadre de l'article 10, sous réserve d'un décret en Conseil d'Etat pris sur avis du Conseil de la Concurrence.

En outre, la loi de modernisation de l'agriculture du 1er février 1995 dispose qui entrent dans le cadre des dérogations prévues à l'alinéa I de l'article 10 de l'Ordonnance de 1986, les accords étendus, conclus dans le cadre des organisations interprofessionnelles agricoles reconnues.

Les articles suivants précisent les modalités d'action du Conseil de la Concurrence pour réprimer les pratiques répréhensibles et les peines encourues.

Les sanctions pécuniaires, doublées d'une publication de la sanction dans les journaux s'élèvent :

. à 5 % du chiffre d'affaires hors taxe de l'année close pour une entreprise,

. à 10 millions de francs lorsqu'il ne s'agit pas d'une entreprise,

. de 6 mois à 4 ans de prison et/ou 5 à 500.000 francs d'amende pour toute personne ayant frauduleusement mis en oeuvre des pratiques anticoncurrentielles.

La réforme de la loi de modernisation agricole en 1995 fait suite à la signature, le 20 juillet 1994 entre la FNSEA, le CNJA, la CFCA et la grande distribution, d'un accord cadre sur les promotions agro-alimentaires des produits frais et peu transformés. Cet accord national a pour objectif " d'instaurer un climat de confiance propice à une collaboration commerciale, loyale et dynamique " entre ceux qui sont devenus ainsi des partenaires.

On peut donc considérer qu'à la fin de 1995, la législation agricole actuelle permettait déjà, dans certains cas, de tolérer une entente anticoncurrentielle. Ainsi :


- dans le secteur des vins, VDQS et AOC notamment, la réglementation communautaire prévoit des dispositions assimilables à une restriction d'accès au marché (droit de plantation, fixation du nombre d'hectolitres par hectare, etc.) ;

- les groupements de producteurs et les accords interprofessionnels bénéficient de mesures législatives ou réglementaires dérogatoires à l'ordonnance de 1986. Seules, les actions directes sur les prix sont interdites.

Mais les dérogations prévues par l'article 10 de l'ordonnance sont difficilement applicables :

- la notion de " progrès économique " est trop restrictive et diversement appréciée par le Conseil de la Concurrence et les tribunaux. Les conditions sont cumulatives : durabilité du progrès économique, partage équitable des profits entre les membres de l'entente et la collectivité nationale, maintien d'un minimum de concurrence, limitation des pratiques restrictives, caractère indispensable de l'entente. Il en résulte qu'il est pratiquement impossible de réunir ces conditions et donc de pouvoir bénéficier de la dérogation au titre du progrès économique ;

- le décret d'exemption reconnaît qu'une catégorie d'accords peut apporter le progrès économique et donne ainsi aux opérateurs l'autorisation préalable d'entreprendre des actions concertées. Toutefois, il existe plusieurs limites qui expliquent que cette procédure n'ait jamais été utilisée depuis 1986 :

l'exemption doit être justifiée par le progrès économique attendu et le décret ne pourra reconnaître ce que le Conseil de la Concurrence n'admet pas dans sa jurisprudence,

la procédure est longue et complexe. Aucun délai n'est prévu et les étapes sont multiples :

* accord formalisé entre les demandeurs,

* publication au BOCCRF,

* instruction par la DGCCRF,

* projet soumis à l'avis conforme du Conseil de la Concurrence,

* publication au Journal Officiel

- seules des catégories d'accord sont prévues dans le cadre des décrets d'exemption. Ainsi, un accord entre des producteurs de fraises et un distributeur pour écouler le produit à un prix donné est considéré comme un accord individuel et tombe sous le coup de l'ordonnance.

Alors même que la révision de l'ordonnance de 1986 était en cours, le Gouvernement a pris, en juin 1996, deux décrets autorisant les ententes entre producteurs bénéficiant de " signes de qualité " ou victimes de " situations de crise ".

C'est sur la base du 2° de l'article 10 de l'ordonnance de 1986 (c'est-à-dire du dernier alinéa) que ces décrets d'exemption ont été fondés.

- le décret n° 96-499 du 7 juin 1996a été pris en application du 2° de l'article 10 de l'ordonnance n °86-1243 du 1er décembre 1986 relatif aux accords entre producteurs bénéficiant de signes de qualité dans le domaine agricole.

Les ententes entre producteurs agricoles et entre producteurs et entreprises bénéficiant d'un label, d'une appellation d'origine contrôlée (AOC) ou portant la mention agriculture biologique sont autorisées pour une durée maximale de trois ans (sont exclues les entreprises qui détiennent une position dominante sur le marché).

Les ententes peuvent permettre une régulation de la production (volume, capacité des outils), une restriction temporaire à l'accès des nouveaux opérateurs et la fixation de prix de cession ou de prix de reprise des matières premières, mais d'aucun autre prix.

- Pour ce qui est des crises agricoles, le second décret n° 96-500 du 7 juin 1996 les définit comme une " inadaptation de l'offre à la demande révélant une perturbation grave du marché ", caractérisée par trois au moins des conditions suivantes : " l'augmentation des stocks ou invendus ", dans les quatre cas " pendant deux campagnes ou années successives ou par rapport à la moyenne des trois campagnes ou années précédentes ".

Les accords visés ne peuvent concerner que " la réduction durable des outils de production " et " le renforcement des exigences de qualité, ayant pour conséquence une limitation du volume de la production ". Conclus au plus pour un an et reconductibles, ils devront être notifiés au ministre de l'économie et à celui de l'agriculture.

Les vins et les eaux-de-vie bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée sont exclus de ces deux autorisations d'ententes agricoles.

Quelques jours après la parution de ces deux décrets, la loi n° 96-588 du 1er juillet 1996 sur la loyauté et l'équilibre des relations commerciales a réformé l'ordonnance de 1986.

Deux raisons majeures expliquaient
l'acuité d'une telle réforme :

- d'une part, la modification du contexte économique : l'ordonnance de 1986 a été prise à une époque où la lutte contre l'inflation constituait la priorité gouvernementale et où le commerce était encore dispersé ;

- d'autre part, la modification du rapport de force entre distributeurs et fournisseurs : la forte concentration de la grande distribution s'impose aux entreprises, qui n'ont souvent pas d'autre possibilité que d'accepter des conditions commerciales toujours plus dures, sans contrepartie réelle.

La loi sur la loyauté et l'équilibre des relations commerciales réformant l'ordonnance de 1986 doit désormais permettre de rééquilibrer les relations commerciales entre producteurs et distributeurs.

De façon générale, la loi porte sur la clarification de la facturation, le renforcement de l'interdiction du refus de vente et la condamnation des pratiques abusives telles que le chantage au déréférencement et la fausse coopération commerciale.

Les produits agricoles et alimentaires font l'objet de dispositions spécifiques comme l'encadrement des promotions, la suppression de l'exception d'alignement dans les magasins de plus de 300 m² et la reconnaissance de la possibilité de s'organiser de façon particulière.

Les délais de paiement applicables aux produits alimentaires périssables sont étendus aux viandes congelées et surgelées. La notion de prix abusivement bas est introduite.

La loi ne traite donc pas des questions relatives aux restrictions de concurrence à la suite de la signature d'accords interprofessionnels. Il était donc nécessaire de clarifier la situation juridique de ces accords.

Au niveau européen , ces accords restent cependant tenus de respecter les règles communautaires de concurrence et ils ne sauraient notamment méconnaître les dispositions de l'article 85, paragraphe 1, du Traité de Rome. Plusieurs accords considérés comme non conformes à ces dispositions ont été condamnés par la Cour de justice des Communautés. Au-delà des raisons qui, dans chaque espèce, ont pu motiver ces décisions, la Cour de justice paraît très défavorable à la pratique française des accords interprofessionnels et à la procédure d'extension de ces accords.

En dépit de cette hostilité, la Cour de cassation se montre toujours favorable à une reconnaissance de la régularité des accords, dès lors qu'ils permettent une meilleure connaissance du marché et assurent un progrès économique.

Par rapport à la réglementation existante, le texte proposé par l'article 33 pour le II de l'article L.632-2 reprend certaines dispositions existantes.

Ainsi, trois des restrictions de concurrence prévues au paragraphe II existaient déjà dans le décret n° 96-499. Il s'agit :

-d'une programmation personnelle et coordonnée de la production en fonction des débouchés ;

- d'un plan d'amélioration de la qualité des produits ayant pour conséquence directe une limitation du volume de production ;

- d'une limitation des capacités de production ;

En ce qui concerne les deux dernières dispositions :

- le décret de 1996 ne mentionne pas le fait que les producteurs fixent le prix de cession ou le prix de reprise des matières premières.

- le décret de 1996 limite la restriction temporaire à l'accès des nouveaux opérateurs selon des critères objectifs et appliqués de manière non discriminatoire aux produits bénéficiant d'un label. Compte tenu de la rédaction de l'article 33, cette précision est inutile.

Il convient d'indiquer que la commission de la production et des échanges de l'Assemblée nationale avait initialement supprimé ces deux dernières restrictions. Votre rapporteur s'étonne d'ailleurs de cette position. En effet, dans le rapport de M. F. Patriat (p. 262), les raisons qui ont incité le Gouvernement à supprimer ces deux restrictions sont largement développées : il est dit que " les restrictions temporaires d'accès de nouveaux opérateurs aux labels agricoles et la fixation de prix de cession ou de reprise des matières premières ont été jugées, par le Gouvernement, particulièrement restrictives de concurrence dans le cadre des dérogations de plein droit du 1° de l'article 10 de l'ordonnance. En effet, si un accord mettait en place de telles mesures sur le fondement des dispositions du décret n° 96-499, celles-ci ne seraient que réputées conformes aux conditions posées par le 2° de l'article 10. Leur suspension ou annulation par le juge judiciaire ou le Conseil de la concurrence est possible, alors qu'avec le dispositif du projet de loi un recours en justice est toujours possible mais les mesures bénéficient d'une protection supérieure. En effet, la mesure qui résulterait des dispositions de la loi, c'est-à-dire qui aurait un lien direct et pertinent avec les situations définies par le loi, sera considérée par le juge comme bénéficiant d'une dérogation légale aux règles de concurrence définies à l'article 7 de l'ordonnance. Elle ne pourra donc pas être appréciée au regard du régime des ententes illicites mais seulement au regard de son lien avec les dispositions du IV du présent article et du respect des conditions qu'il fixe ".

Or, le rapporteur, ayant proposé la suppression de ces deux restrictions dans son rapport, a déposé un amendement pour les rétablir en séance publique afin de restaurer une " plus grande équité dans la répartition de la valeur ajoutée au sein des filières des produits alimentaires sous signe de qualité, qui exigent des investissements particuliers et un suivi poussé des denrées ". Il ne s'agit pas, selon M. F. Patriat, d'établir des prix minimaux de vente aux consommateurs, ni de fixer des marges minimales aux intermédiaires, mais de s'accorder en cas de nécessité sur une juste rémunération des producteurs. La restriction de l'accès de nouveaux opérateurs doit permettre de réguler le marché en cas de crise de surproduction. Elle ne saurait donc être que temporaire, objective -c'est-à-dire fondée sur des critères quantitatifs ou de qualité reconnus par la profession et préétablis- et non discriminatoire ".

Votre rapporteur se félicite de la sagesse du rapporteur de l'Assemblée nationale sur ce point.

Par ailleurs, le paragraphe II précise que cette exemption ne s'applique pas si l'une des parties à l'accord détient une position dominante sur le marché du produit concerné. De plus, si le décret limite la durée de l'accord à trois ans, l'article 33 prévoit que ces accords peuvent être étendus pour une durée déterminée.

De même, l'accord fait l'objet d'une notification au ministre de l'agriculture et à celui des finances. Son entrée en vigueur prend effet néanmoins après cette notification. Dans les deux cas, il est fait mention de cet accord ou de cette exemption au bulletin officiel de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes. Ces précisions ont été souhaitées par le Conseil de la concurrence. En outre, la mention au bulletin officiel vise à garantir les droits des tiers qui pourraient être lésés par certaines dispositions de cet accord.

L'article 33 se différencie néanmoins sur un certain nombre de points du décret de 1996.

- Les accords visés par le décret étaient réputés conformes à l'ordonnance du 1er décembre 1986 sur le fondement du 2° de son article 10, qui concerne les dérogations ayant trait aux " pratiques dont les auteurs peuvent justifier qu'elles ont pour effet d'assurer un progrès économique et qu'elles réservent aux utilisateurs une partie équitable du profit qui en résulte, sans donner aux entreprises intéressées la possibilité d'éliminer la concurrence pour une partie substantielle des produits en cause ". Or, le projet de loi fait bénéficier les dispositions prises par les interprofessions spécifiques d'une dérogation sur le fondement du 1° de l'article 10, c'est-à-dire concernant les pratiques résultant de l'application d'une loi ou d'un texte réglementaire pris pour son application. Cette différence fondamentale permet de rendre de plein droit légales les mesures arrêtées par ces interprofessions dès lors qu'elles répondent aux conditions fixées par le IV du présent article, tandis que les accords conclus en application du décret n° 96-499 peuvent être censurés par le Conseil de la concurrence ou le juge judiciaire car ils ne sont que réputés conformes à l'ordonnance.

- Alors que l'article 1er du décret concerne uniquement les accords passés entre des producteurs agricoles ou entre des producteurs agricoles et des entreprises, quelque soit le secteur ou le produit, l'article 33 concerne les accords conclus dans le cadre d'une organisation interprofessionnelle reconnue.

Votre rapporteur approuve sans réserve ce dispositif qui devrait contribuer à débloquer des situations grâce à l'exemption sur le fondement du 1° de l'article 10 et à la négociation des mesures entre les organisations professionnelles.

L'article 33 est d'autant plus nécessaire que le Conseil de la concurrence, à la fin de l'année 1997, a considéré que les accords régionaux ainsi que l'accord cadre national signé en 1994 sur les promotions et les pratiques commerciales étaient contraires à l'article 7 de l'ordonnance de 1986 qui interdit les ententes concertées ayant pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence.

L'article 33 du projet de loi devrait permettre d'éviter à l'avenir de telles situations.

Votre rapporteur vous propose de modifier la rédaction du septième alinéa du texte proposé par cet article pour le II de l'article L.623-2 du code rural afin d'introduire un parallélisme avec l'article 34 sur l'extension des accords. En effet, le terme de " profession " renvoie à celle de " collège ". La rédaction adoptée par l'Assemblée nationale signifierait que l'unanimité soit recherchée au niveau de chacune des organisations professionnelles composant chacun des collèges. Une telle disposition risque de conduire rapidement au blocage.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 34 -
(Article L.632-4 du code rural) -

Extension des accords interprofessionnels

Cet article propose une nouvelle rédaction de l'article L.632-3 du code rural ainsi que du premier alinéa de l'article L.632-4 du code rural qui portait sur l'extension des accords interprofessionnels.

1. Le droit en vigueur


Actuellement l'article L.632-3, issu de l'article 2 de la loi du 10 juillet 1975 et complété par l'article 7 de la loi n° 99-95 du 10 février 1995 sur la modernisation de l'agriculture prévoit que les organisations reconnues sont spécialement habilitées à élaborer et à conclure des accords qui peuvent être étendus, en tout ou partie, par les pouvoirs publics pour une durée indéterminée. Ces accords interprofessionnels sont des contrats collectifs, tendant à réglementer la commercialisation d'un ou de plusieurs produits agricoles, conclus entre les organisations professionnelles les plus représentatives des producteurs agricoles et les acheteurs ou leurs groupements. Ces accords doivent, pour être étendus, avoir pour objet :

- la connaissance de l'offre, de la demande et des mécanismes de marché ;

- l'amélioration du fonctionnement, de la maîtrise, de la transparence du marché, en particulier par l'adaptation et la régularisation de l'offre et l'instauration, sous le contrôle de l'Etat, des règles de mise en marché, de prix, de condition de paiement et de vente ;

- la qualité des produits : à cet effet, les contrats peuvent notamment prévoir l'élaboration et la mise en oeuvre de disciplines de qualité et de règles de production, de conditionnement, de transport et de présentation, si nécessaire jusqu'au stade de la vente au détail des produits ;

- la promotion des produits sur les marchés intérieur et extérieur ;

- l'organisation et l'harmonisation des pratiques et relations professionnelles ou interprofessionnelles dans le secteur intéressé ;

- la réalisation de programmes de recherche appliquée, d'expérimentation et de développement, notamment dans les domaines de la qualité des produits et de la protection de la santé et de l'environnement.

Il résulte de ces dispositions que, depuis la loi du 1er février 1995, l'objet des accords n'est plus limité aux conditions de fonctionnement de l'offre, mais porte sur l'ensemble des mécanismes régissant le marché du ou des produits agricoles sur lesquels porte l'accord.

La jurisprudence a considéré que l'énumération des objectifs que doivent poursuivre les accords interprofessionnels n'est pas limitative.

Pour réaliser leurs objectifs, les accords doivent prévoir l'élaboration de conventions de campagne et de contrats types ainsi que la mise en oeuvre d'actions communes conformes à l'intérêt général et compatibles avec les règles de la Communauté européenne.

Rappelons pour mémoire que les conventions de campagne sont conclues chaque année par les organisations signataires en vue d'appliquer, suivant les conditions de la production et du marché, les principes conclus dans les accords interprofessionnels. Les conventions de campagne sont donc passées en exécution des accords dont elles constituent le complément. Elles établissent chaque année les prix de campagne en fonction des coûts de production et déterminent les catégories de produits ainsi que les tonnages auxquels elles s'appliquent.

Par ailleurs, les rapports entre les producteurs, individuellement ou groupés, et les acheteurs sont fixés par des contrats particuliers de production. Ces contrats doivent être conclus conformément aux termes des contrats types établis en exécution de l'accord interprofessionnel et de la convention de campagne.

l'article L.632-4 du code rural, dans sa version actuelle, indique que seuls peuvent être étendus les accords qui ont été adoptés par les différentes familles professionnelles représentées dans l'interprofession, soit par une décision unanime, soit à la suite d'un arbitrage prévu par l'organisation interprofessionnelle.

En ce qui concerne la procédure, les ministres saisis du dossier d'extension disposent d'un délai de deux mois, à compter de la réception de la demande présentée par l'organisation interprofessionnelle, pour statuer sur la mesure sollicitée. Si la demande paraît justifiée, l'extension est prononcée par arrêté conjoint du ministre de l'agriculture et du ministre de l'économie. Si, au terme du délai de deux mois, l'autorité compétente n'a pas notifié sa décision, la demande est réputée acceptée. Dans ce cas, la mention de cette extension par acceptation tacite est publiée au Journal Officiel.

Si la proposition d'extension apparaît injustifiée, le rejet de la demande doit résulter d'une décision motivée de l'autorité compétente.

Lorsque l'extension est prononcée, les mesures arrêtées par l'organisation interprofessionnelle s'imposent, dans le cadre géographique prévu, à tous les membres des professions constituant cette organisation.

Par ailleurs, les accords interprofessionnels étendus conclus dans le cadre des organisations interprofessionnelles agricoles reconnues ne peuvent être assimilés à des pratiques anticoncurrentielles au sens de la législation relative à la liberté des prix et de la concurrence. Ils restent cependant tenus de respecter les règles communautaires de concurrence et ils ne sauraient notamment méconnaître les dispositions de l'article 85, paragraphe I, du Traité de Rome.

2. Le texte proposé par l'article 34 du projet de loi.

Cet article est composé de deux paragraphes.

Le paragraphe I propose une nouvelle rédaction pour l'article L.632-3. Les modifications sont les suivantes :

- au 1° les termes " mécanismes de marché " sont supprimés ;

- la rédaction du 2° est simplifiée et scindée, la deuxième partie du 2° faisant l'objet d'un 3°. Il est désormais fait uniquement référence à l'adaptation et la régularisation de l'offre ;

- le 3° reprend les termes de la deuxième partie du 2° actuel ;

- le 4° reprend intégralement le 3° actuel en complétant le texte par une mention expresse aux accords conclus sur les AOC pour lesquels des procédures de contrôle de qualité peuvent être mises en oeuvre ;

- le 5° fusionne les dispositions des 5° et 6° du texte en vigueur en les simplifiant. Il est ainsi prévu que les accords interprofessionnels doivent favoriser " les relations interprofessionnelles dans le secteur intéressé, notamment par l'établissement de mesures techniques et de programmes de recherche appliquée et de développement " ;

- le 6° reprend le 4° actuel.

La rédaction proposée pour l'article L.632-3 s'avère beaucoup plus large que le droit, en vigueur puisqu'il est question de mise en valeur des produits, de la dimension internationale du marché, de l'harmonisation des règles de commercialisation et de l'ensemble des règles du marché.

Le paragraphe II introduit deux modifications :

- en premier lieu, le recours à l'instance arbitrale disparaît. Ainsi, seule l'adoption de l'accord à l'unanimité rend possible son extension. Soulignons à cet égard qu'aucun accord étendu n'a été adopté à la suite d'une décision de l'instance de conciliation de l'interprofession ou d'un arbitrage en cas d'échec de la conciliation. La règle de l'unanimité est par contre essentielle, car en son absence, un accord qui serait adopté par arbitrage ou conciliation serait fragilisé.

- En second lieu, il est prévu que les accords applicables à une partie seulement des professions représentées dans l'organisation peuvent être étendus sans pour autant que soit réunie l'unanimité au sein de l'organisation si deux conditions sont réunies.

Les professions concernées doivent être favorables sans exception aux dispositions de l'accord, ce qui constitue le corollaire indispensable à la règle de l'unanimité ;

Aucune autre profession non concernée par l'accord, mais membre de l'organisation, ne doit s'opposer formellement à cet accord.

Cette seconde innovation tire les conséquences de l'inclusion des représentants de la distribution dans les organisations interprofessionnelles. Les nombreux accords relevant uniquement des activités de production et de transformation doivent pouvoir aussi s'appliquer sans que les autres partenaires (distributeurs, commerçants) y participent pleinement. Néanmoins contrairement à ce qu'indique M. François Patriat dans son rapport, l'article 34 donne à ces partenaires non concernés par l'accord étendu un droit de veto puisqu'il est indiqué que l'opposition d'une profession, même non concernée, rend inapplicable l'extension de l'accord.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 35 -
(Article L.632-6 du code rural)

Assiette des cotisations interprofessionnelles

Cet article complète le premier alinéa de l'article L.632-6 du code rural et améliore l'évaluation de l'assiette des cotisations en cas de défaillance du déclarant.

L'article  L.632-6 du code rural, issu de l'article 3 de la loi du 10 juillet 1975, dans sa version actuelle, permet aux organisations interprofessionnelles reconnues de prélever sur tous les membres de la profession les constituant des cotisations résultant des accords étendus qui, nonobstant leur caractère obligatoire, demeurent des créances de droit privé. Ces cotisations sont recouvrées, après mise en demeure du débiteur, par les voies du droit commun en matière civile ou commerciale. La procédure d'injonction de payer peut être utilisée pour le recouvrement des cotisations de l'année en cours et des deux années précédentes, même si la créance n'a pas un caractère contractuel.

Afin d'éviter toute distorsion de concurrence entre les produits français et les produits étrangers, la loi décide que des cotisations d'un même montant que celles établies par l'interprofession peuvent être prélevées sur les produits importés. A la demande des interprofessions bénéficiaires, ces cotisations seront recouvrées en douane à leurs frais.

Par ailleurs, votre rapporteur souligne que certaines organisations interprofessionnelles régies par des textes particuliers (comités vinicoles interprofessionnels, centre technique interprofessionnel des fruits et légumes...) sont habilités à percevoir des taxes parafiscales. Les conditions de prélèvement de ces taxes sont alors fixées par arrêté interministériel.

L'article 35 du projet de loi complète l'article L.632-6 en insérant un nouvel alinéa après le premier alinéa qui prévoit que l'organisation interprofessionnelle peut procéder à une évaluation d'office du montant des cotisations, dans des conditions précisées par l'accord étendu. Plusieurs conditions doivent être néanmoins réunies pour permettre la mise en oeuvre de ce dispositif :

- sur le fond, l'assujetti doit avoir omis d'effectuer sa déclaration ;

- sur la forme, l'interprofession doit faire une mise en demeure et patienter un délai d'un mois à compter de cette mise en demeure pour agir ;

Les deux systèmes pour le calcul des cotisations sont ainsi les suivants :

- la déclaration visée par l'article 35 du projet de loi,

- le volume des achats et des ventes de produits faisant l'objet de l'interprofession. Ce second système est le plus fréquent.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 36 --

Rapport d'activité et comptes des interprofessions. Bilan d'application des accords étendus.

Cet article comble une lacune de la législation relative aux organisations interprofessionnelles en définissant leurs règles de contrôle.

L'article 36 du projet de loi introduit
dans le code rural un article L.632-8-1 qui prévoit que les organisations interprofessionnelles reconnues doivent rendre compte, chaque année, de leur activité aux autorités compétentes (ministres de l'agriculture, de l'économie, du commerce, préfet de région, etc., selon le cas) en fournissant :

- les comptes financiers ;

- un rapport d'activité et le compte rendu des assemblées générales ;

- un bilan de chaque accord étendu.

En outre, en cas de demande de la part de ces mêmes autorités, les organisations interprofessionnelles doivent présenter et communiquer tous les documents nécessaires à l'exercice du contrôle. Votre rapporteur considère qu'en raison des missions confiées à ces organisme, des effets des accords étendus et des prélèvements que ceux-ci opèrent, le renforcement du contrôle et de la transparence proposé par le projet de loi est tout à fait justifié.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 37 -

Contrats de lutte contre les crises conjoncturelles

Le dispositif de l'article 37 définit les dérogations possibles à l'interdiction des ententes anticoncurrentielles fixée par l'article 7 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence. Il donne la possibilité aux organisations interprofesionnelles de conclure des contrats qui permettent d'adapter l'offre en qualité et en volume aux besoins du marché.

1. Les crises en agriculture


Dans la plupart des ouvrages ayant trait à l'agriculture, il est question de " la crise que notre agriculture affronte depuis le milieu des années soixante-dix ".

Or derrière cette notion de crise qui frappe tous les secteurs agricoles -viande bovine, fruits et légumes, porc- se cache plusieurs réalités. La crise en agriculture peut avoir deux origines :

- une origine structurelle qui se manifeste par des difficultés et des handicaps sur le plan national au niveau de l'organisation de la production, de la mise en marché, des tendances lourdes de la consommation, et de la pression exercée par la grande distribution. Sur le plan européen, les réformes successives de la PAC peuvent susciter des mouvements de fond qui tendent à réorganiser et à restructurer certains pans entiers de notre agriculture ; il en est de même au niveau international avec la libéralisation et la globalisation des marchés qui affectent durablement certains secteurs agricoles.

Seules des dispositions et des réformes d'envergure peuvent permettre de faire face à ces problèmes : amélioration dans l'organisation de la production, campagne de promotion programmée sur plusieurs années, dispositif financier d'accompagnement permanent, mesures de gestion du marché communautaire... Plusieurs mécanismes existent aujourd'hui afin d'affronter ces difficultés.

- une origine conjoncturelle : ces crises ont comme particularité de survenir soudainement et brutalement. Elles proviennent de chevauchement dans les calendriers de production en raison souvent des conditions climatiques, de mouvements erratiques dans la gestion quotidienne des marchés (déstockage, exportations difficiles, importations nécessaires...). Ces événements entraînent une inadéquation forte entre l'offre et la demande et donc, en conséquence, des variations de prix d'envergure.

Or, il s'avère excessivement difficile, d'une part, de prévoir ces crises conjoncturelles et, d'autre part, de les enrayer. Le secteur des fruits et légumes peut être pris en exemple. Si l'on parvient peu à peu à prévoir ces mouvements conjoncturels, il est toujours extrêmement complexe d'y faire face.

2. Les articles 7 et 10 de l'ordonnance de 1986

L'article 7 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 prohibe les pratiques anticoncurrentielles et, notamment, celles qui pourraient voir le jour au sein du secteur agricole lors d'une crise conjoncturelle. Néanmoins l'article 10 de la même ordonnance permet de déroger aux interdictions présentées par l'article 7 lorsque de telles pratiques :

- résultent d'un texte législatif ou réglementaire (1°),

- assurent un progrès économique, une répartition équitable du profit, sans éliminer la concurrence (2°).

C'est sur le fondement de cet article 10 2° que le gouvernement de M. Alain Juppé a pris en juin 1996 le décret d'exemption n° 96-500.

Ce décret précise dans son article 1er, qu'en cas d'inadaptation de l'offre à la demande révélant une perturbation grave du marché, les accords passés entre producteurs agricoles et entreprises d'approvisionnement ou de transformation, destinés à résorber la surcapacité pour rétablir l'équilibre du marché, sont réputés conformes à la législation sur la concurrence.

Il faut néanmoins que cette situation d'inadaptation de l'offre à la demande visée précédemment soit caractérisée par trois au moins des conditions suivantes :

- augmentation du volume de l'offre pendant deux campagnes ou années successives, ou par rapport à la moyenne des trois campagnes ou années précédentes ;

- baisse de la consommation pendant deux campagnes ou années successives, ou par rapport à la moyenne des trois campagnes ou années précédentes ;

- baisse de la moyenne des cours pendant deux campagnes ou années successives, ou par rapport à la moyenne des trois campagnes ou années précédentes ;

- augmentation des stocks ou des invendus pendant deux campagnes ou années successives, ou par rapport à la moyenne de trois campagnes ou années précédentes (article 2 du décret).

En outre, les accords visés à l'article 1er de ce décret doivent être passés par écrit. Ils ne peuvent comporter que les restrictions de concurrence suivants :

- une réduction durable des capacités de production ;

- un renforcement des exigences de qualité, ayant pour conséquence une limitation du volume de la production.

Ces restrictions peuvent, le cas échéant, être assorties de mesures d'accompagnement comme la limitation temporaire des quantités produites ou mises sur le marché.

Ces mesures doivent rester proportionnées à ce qui est nécessaire pour résorber les déséquilibres.

Les accords ne peuvent en aucun cas comporter de dispositions portant sur les prix (article 3).

Il convient de préciser qu'à ce jour aucun accord n'a été conclu.

Cette absence d'accord est due, en premier lieu, au flou relatif de la base légale sur laquelle ces accords auraient du reposer (2° de l'article 10 de l'ordonnance) et, en second lieu, sur le fait que ces mêmes accords devaient être conclus exclusivement entre exploitants et entreprises.

3. L'article 37 du projet de loi

L'article  37 du projet de loi propose donc de nouveaux moyens juridiques incitatifs. Il se distingue sur de nombreux points des dispositions du décret précédemment analysé :


Les contrats conclus conformément à l'article 37 ont pour fondement non le 2° de l'article 10 de l'ordonnance de  1986 comme c'est le cas pour le décret n° 96-500 mais le 1° de l'article 10. Cette différence permet de rendre de plein droit légales les mesures arrêtées par ces interprofessions dès lors qu'elles répondent aux conditions fixées par l'article 37 du projet de loi, tandis que les accords conclus en application du décret n° 96-500 peuvent être censurées par le Conseil de la concurrence ou le juge judiciaire car ils sont que réputés conformes uniquement à l'ordonnance. Les accords conclus en application de l'article 37 ne pourront pas être appréciés au regard du régime des ententes illicites, mais seulement au regard de leur lien direct et pertinent avec l'article 37 et en fonction du respect des conditions qu'il fixe.

L'article 37 concerne, outre toutes les productions de produits agricoles périssables ou issus de cycles courts de production, les productions de la pêche maritime et des cultures marines.

La situation qui permet de justifier de tels accords est constituée dans le décret par l'inadaptation de l'offre à la demande révélant une perturbation grave du marché, cette inadaptation étant caractérisée par trois au moins des quatre conditions énumérées à l'article 2 du décret (augmentation du volume de l'offre, baisse de la consommation, baisse des cours et augmentation des stocks). L'article 37 permet la conclusion d'accords pour " faire face aux crises conjoncturelles " ce qui rend le déclenchement du dispositif d'exemption beaucoup plus aisé et rapide. Ces crises conjoncturelles doivent néanmoins remplir deux conditions pour permettre la mise en oeuvre de l'article 37 :

- elles doivent affecter les productions,

- elles doivent aboutir à des situations où le prix de cession des produits concernés par le producteur est anormalement bas par rapport à la moyenne des prix observés lors des périodes correspondantes des trois précédentes campagnes.

Rappelons que la loi n° 96-588 du 1er juillet 1996 sur la loyauté et l'équilibre des relations commerciales a interdit dans son article  5 les offres de prix ou pratiques de prix de vente aux consommateurs abusivement bas par rapport aux coûts de production, de transformation et de commercialisation dès lors que ces offres ou pratiques ont pour objet ou peuvent avoir pour effet d'éliminer d'un marché ou d'empêcher d'accéder à un marché une entreprise ou l'un de ses produits.

C'est au travers de la réglementation du prix d'appel que les pouvoirs publics ont jusqu'ici tenté de lutter contre l'offre de prix anormalement bas.

Des circulaires sont ainsi intervenues en 1960, 1970 et 1978, qui se sont révélées inefficaces. La dernière en date est la circulaire du 22 septembre 1980 qui, pour la première fois, a défini le prix d'appel.

Il s'agit d'une pratique consistant " à mener une action de promotion par les prix sur un produit déterminé, pour lequel (le distributeur) adopte un niveau de marge si faible et dispose de quantités tellement insuffisantes que les avantages à attendre ne peuvent être en rapport avec l'action de promotion engagée, sauf pour le distributeur à pratiquer la dérive des ventes, c'est-à-dire à inciter, par quelque moyen que ce soit, les clients attirés par la publicité à acheter un produit substituable à celui sur lequel la publicité a porté. "

Mais ces modalités et conditions d'application n'ont pas permis de sanctionner sur cette base des pratiques de prix d'appel. 36( * )

La jurisprudence, tant communautaire que nationale, sanctionne des pratiques de prix inférieurs aux coûts variables.

La Commission européenne poursuit les prix " prédateurs " sur le fondement de l'article 86 du traité de Rome lorsqu'ils sont le fait d'entreprises exploitant de façon abusive une position dominante. La Cour de justice des Communautés européennes a établi, pour la première fois, dans un arrêt du 3 juillet 1991 (AKZO Chimie/Commission), une définition du prix abusivement bas. Il s'agit des prix inférieurs à la moyenne des coûts variables ou, quand ils ont un but prédateur, inférieurs à la moyenne des coûts totaux mais supérieurs à la moyenne des coûts variables.

Le Conseil de la concurrence (mesures conservatoires du 14 septembre 1994), puis la Cour d'Appel de Paris (arrêt en appel du 3 novembre 1994) ont repris cette définition du prix prédateur. Ils ont ainsi condamné la vente à un prix inférieur au coût variable de production du béton prêt à l'emploi de filiales de grands groupes du ciment et du béton de la région de Toulon. Cette pratique a été analysée comme une présomption d'entente entre des entreprises visant à empêcher l'accès d'une entreprise concurrente sur ce marché. Ainsi au sens de la loi de 1996, un prix prédateur est un prix qui non seulement ne rémunère pas les coûts de production mais est totalement déconnecté de la réalité du marché.

L'article 37 évoque non pas la notion de prix abusivement bas mais celle d'anormalement bas . On peut néanmoins estimer que dans les deux cas, il s'agit d'un prix de cession inférieur aux coûts unitaires de production. Par ailleurs, comme pour la loi de 1996, il s'agit bien des prix de vente aux consommateurs après fabrication ou transformation par les distributeurs, ainsi que par les artisans, associations... Enfin, il est nécessaire pour que l'article 37 s'applique, que les prix soient anormalement bas durant un certain délai, en effet sont visées dans le cas présent non les baisses anormales de prix mais les niveaux moyensde baisse.

Comme le précise l'article 37, le caractère anormal du prix se mesure par rapport à la moyenne des prix lors des périodes correspondantes des trois dernières campagnes. Une référence à la période de campagne correspondante est en effet nécessaire car des produits peuvent avoir une campagne de production longue en raison de l'existence de deux récoltes qui offrent des produits sensiblement différents.

Les accords passés par les producteurs agricoles entre eux ou avec des entreprises d`approvisionnement ou de transformation sont visés par le décret n° 96-500. Le projet de loi concerne des contrats conclus entre les organisations professionnelles représentatives de la transformation, de la commercialisation ou de la distribution. Les signataires des accords prévus à l'article 37 du projet de loi seront donc exclusivement des organisations professionnelles contrairement au décret qui ne s'adresse qu'à des exploitants et des entreprises. Par ailleurs, le décret n° 96-500 n'englobe pas la commercialisation ou la distribution dans son champ d'application contrairement au projet de loi.

Alors que le premier alinéa du décret n°96-500 prévoit que les accords passés doivent être destinés à résorber " la surcapacité pour rétablir l'équilibre du marché ", l'article  37 indique que de tels accords doivent parvenir à adapter l'offre aux besoins des marchés non seulement en quantité mais aussi en qualité.

Le projet de loi fixe une limite de 3 mois à la durée des accords alors qu'elle ne peut excéder un an dans le décret.

Si le décret prévoit comme unique restriction de concurrence possible, soit une réduction durable des capacités de production, soit un renforcement des exigences de qualité ayant pour conséquence une limitation du volume de la production, l'article 37 mentionne :

- la programmation des crises en production ou des apports,

- le renforcement des mesures et critères requis pour la mise en marché,

- la fixation de prix de cession au premier acheteur ou la reprise des matières premières.

4. La position de votre commission

Votre rapporteur considère que si la faculté de passer des accords entre des organisations professionnelles représentatives de la production, de la transformation, de la commercialisation ou de la distribution est un élément positif, la sécurité juridique requiert néanmoins que ces accords, lorsqu'ils ne sont pas passés dans le cadre de l'interprofession, puissent faire l'objet d'une homologation par l'Etat. Il vous propose donc un amendement en ce sens.

Le dernier alinéa de l'article  37 prévoit, que sur proposition des organisations syndicales ou de consommateurs, une information sur les accords " anti-crises " ainsi passés est donnée aux consommateurs sur les lieux de vente. Une telle information serait, selon les auteurs de cette mesure, de nature à peser en faveur de la réduction de la marge entre les prix à la production et les prix à la consommation. D'aucuns considèrent qu'elle pourrait, en outre, en baissant les prix à la consommation, relancer celle-ci et relever les prix à la consommation.

Votre rapporteur approuve la démarche qui sous-tend cette mesure. Néanmoins, sans vous proposer d'amendement, il considère que cette obligation d'affichage pourrait remettre en cause toute la réglementation relative au secret commercial. En effet, l'article 1er de l'ordonnance de 1986 prescrit que " les dispositions des deux premiers alinéas ne font pas obstacle à ce que le Gouvernement arrête, par décret en Conseil d'Etat, contre les baisses de prix des mesures temporaires motivées par une situation de crise, des circonstances exceptionnelles, une calamité publique ou une situation manifestement anormale du marché ". Il suffirait ainsi que les pouvoirs publics appliquent la loi pour que les prix ne puissent plus chuter de manière excessive.

Votre rapporteur vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 38 -

Modification de la composition du Conseil supérieur d'orientation (CSO)
de l'économie agricole et alimentaire

Cet article modifie le premier alinéa du I de l'article L.611-1 du code rural relatif au CSO en élargissant sa composition .

L'article L.611-1 du code rural est issu de l'article 4 de la loi n° 80-502 du 4 juillet 1980 d'orientation agricole.

Ce premier alinéa de l'article L.611-1 du code rural a fait l'objet d'une importante modification dans la loi du 4 février 1995 relative à la modernisation de l'agriculture.

En 1980, le CSO regroupait les représentants des pouvoirs publics, de la production agricole, des salariés agricoles, de la transformation, de la commercialisation et de la consommation.

Depuis la loi de 1995, le CSO comprend également les représentants de la transformation et de la commercialisation des produits de l'artisanat et du commerce indépendant de l'alimentation, ainsi qu'un représentant du comité permanent du financement de l'agriculture.

L'article 38 du présent projet de loi tend à élargir la composition du CSO aux représentants des consommateurs et des associations agréées pour la protection de l'environnement.

Votre rapporteur estime cet élargissement opportun, eu égard aux défis nouveaux que doit relever notre agriculture, tant en matière de sécurité alimentaire que d'environnement.

Néanmoins, à partir du moment où les associations de défense de la nature et celles des consommateurs sont représentés au sein du CSO, votre rapporteur considère qu'il convient aussi d'associer les propriétaires des biens fonciers sur lesquels s'exercent les productions, ainsi que les représentants des organisations professionnelles représentatives des salariés agricoles.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

CHAPITRE IV -

Création d'un Conseil supérieur des exportations alimentaires
Article 38 bis -

Création d'un Conseil supérieur
des exportations agricoles et alimentaires

Cet article institue un Conseil supérieur des exportations agricoles et alimentaires.

Cette instance doit permettre une concertation entre les pouvoirs publics et les représentants des entreprises tournées vers l'exportation dans les domaines de la production, de la transformation et de la commercialisation des produits agricoles et agroalimentaires.

Il a deux objets :

- formuler des recommandations sur les politiques d'appui à l'exportation ;

- veiller à la cohérence de la mise en oeuvre de ces politiques.

Il appartiendra à un décret de fixer les missions, la composition et les règles de fonctionnement de cet organisme.

Votre rapporteur souligne que le décret n° 77-1127 du 5 octobre 1977 portait création d'un Conseil supérieur des exportations agricoles et alimentaires (voir annexe n°2).

L'instauration de cette concertation Etat-professions sur la question des exportations peut s'avérer utile, l'appui public à l'exportation étant une nécessité pour la promotion du " modèle alimentaire français ".

Ainsi, ce Conseil devrait permettre une meilleure synergie entre les différents intervenants :

- à l'échelon régional : conseils généraux, conseils régionaux, chambres de commerce et d'industrie, chambres d'agriculture, agences de développement économique...

- à l'échelon national, comme la Société pour l'Exploitation des Produits Agroalimentaires (SOPEXA), le Centre Français pour le Commerce Extérieur (CFCE)...

- à l'étranger : conseiller agricoles, chargés de mission agricole du CFCE, Postes d'expansion des Ambassades, chambres de commerce et d'industrie à l'étranger, SOPEXA, représentations permanentes des régions.

Votre rapporteur vous propose un amendement tendant à compléter et àclarifier la rédaction de cet article.

Votre rapporteur vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 38 ter -

Missions du Conseil supérieur des exportations agricoles et alimentaires

Cet article définit les missions du Conseil supérieur des exportations alimentaires.

Le premier alinéa de l'article 38 ter précise la mission principale de cet organisme, qui doit orienter les interventions publiques dans l'appui à l'exportation et faciliter l'accès des entreprises au dispositif.

L'article 38 ter définit ensuite les missions de cette instance qui, sont relativement larges :

- définir les axes de la politique d'appui public à l'exportation à partir d'analyses basées sur des matrices croisées pays-produits et les types d'action à privilégier ;

- faire connaître les axes retenus à tous les organismes publics en utilisant des fonds publics qui participent à l'appui à l'exportation ;

- diffuser l'information économique sur les marchés et faire connaître les mesures de politique commerciale qui concernent les exportateurs ;

- veiller à la cohérence des programmes pluriannuels de l'ensemble des organismes nationaux et territoriaux (régions, départements) qui fonctionnent sur crédits publics ;

- s'assurer de la cohérence des moyens mis en oeuvre à l'étranger.

Votre rapporteur vous propose une nouvelle rédaction de cet article visant à clarifier les missions de cet organisme.

Votre rapporteur vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article additionnel après l'article 38 ter -

Rapport sur l'intégration et le renforcement du pouvoir économique des producteurs

Cet article additionnel prévoit un rapport sur les adaptations législatives ou réglementaires nécessaires pour encadrer le phénomène de l'intégration et du renforcement du pouvoir économique des producteurs.

L'intégration étend chaque jour un peu plus ses ramifications en agriculture. Les textes qui la régissent doivent être revus et complétés afin de couvrir tous les aspects de ce phénomène.

C'est pourquoi votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

TITRE IV -

QUALITÉ ET IDENTIFICATION DES PRODUITS

Ce titre est composé de 18 articles.

Il regroupe trois catégories de dispositions.

Tout d'abord, plusieurs articles sont relatifs aux produits de qualité et aux signes d'identification, ainsi qu'à l'organisation et à la composition de l'INAO. L'une des mesures principales consiste dans la reconnaissance de l'indication géographiquement protégée comme signe d'identification.

Par ailleurs, d'autres dispositions concernent le contrôle et la surveillance biologique du territoire. Il s'agit ici de tirer les conséquences des rapports parlementaires sur les organismes génétiquement modifiés (OGM) qui sont parus au mois de juin dernier et des événements contentieux survenus récemment.

Enfin, diverses mesures ont trait à l'identification des animaux et à la qualité sanitaire des denrées destinées à l'alimentation humaine ou animale. Le projet de loi d'orientation agricole reprend bon nombre des articles figurant dans le projet de loi, adopté par l'Assemblée nationale, relatif à la qualité sanitaire des denrées destinées à l'alimentation humaine et animale 37( * ) . Ce projet de loi avait été examiné par votre commission des Affaires économiques, le 26 mars1997 mais son examen en séance publique par votre Haute Assemblée avait été différé en raison de la dissolution.

Afin de tenir compte de l'important volet relatif à la qualité sanitaire des produits, votre rapporteur vous propose de modifier l'intitulé du titre IV du projet de loi.

Article 39 A -
(Article L.640-1 (nouveau) du code rural) -

Politique de la qualité et de l'origine des produits agricoles ou alimentaires

Cet article insère dans le code rural un article L.640-1 qui fixe les objectifs auxquels doit répondre la politique conduite dans le domaine de la qualité et de l'origine des produits agricoles, de la mer ou alimentaires.

1. Le dispositif proposé


Ce nouvel article L.640-1 est inséré avant le chapitre 1 er (les appellations d'origine) du titre IV (la valorisation des produits agricoles ou alimentaires) du livre VI (production et marchés) (nouveau) du code rural.

Les objectifs auxquels la politique conduite dans le domaine de la qualité et de l'origine des produits agricoles, de la mer ou alimentaires doit répondre de façon globale et équilibrée sont les suivants :

- promouvoir la diversité des produits et l'identification de leurs caractéristiques, ainsi que leur mode de production ou leur origine, pour renforcer l'information du consommateur et satisfaire ses attentes ;

- renforcer le développement des secteurs agricoles et alimentaires et accroître la qualité des produits par une segmentation claire du marché ;

- fixer sur le territoire la production agricole et alimentaire et assurer la maintien de l'activité économique notamment en zones rurales défavorisées
par une valorisation des savoir-faire et des bassins de production ;

- répartir de façon équitable la valorisation des produits agricoles, de la mer, ou alimentaires entre les agriculteurs ou les pêcheurs, les transformateurs et les entreprises de commercialisation.

Cet article définit, pour la première fois, les objectifs de la politique de qualité et d'origine conduite par les pouvoirs publics.

L'idée de distinguer certains produits présentant des caractéristiques qualitatives que n'ont pas les autres produits du même type est très ancienne et c'est en France qu'elle a sans doute pris le plus d'ampleur 38( * ) . Sans s'engager dans la délicate entreprise qui consiste à définir la notion de qualité, on peut distinguer :

- la qualité objective, qui repose sur des critères précis et mesurables ;

- la qualité subjective, qui prend appui sur des critères plus vagues et imprécis : elle exprime la préférence, le choix ;

- une troisième conception, qui s'est imposée en Europe du Nord considère la qualité comme l'absence de défauts et la conformité à des mesures sanitaires, hygiéniques et de présentation.

La France a toujours voulu faire prévaloir la spécificité des terroirs, la saveur des produits et la culture gastronomique.

Cette politique de qualité s'est articulée autour de deux axes principaux : tout d'abord, elle a visé à cerner des concepts opérationnels pour caractériser des signes distinctifs. Ensuite, elle a cherché à gérer de manière rationnelle ces signes.

2. L'évolution de la politique des signes distinctifs

La conceptualisation des signes distinctifs s'est faite en deux étapes :

A l'origine, des différences ont été établies spontanément dans la désignation des produits de façon à les distinguer les uns des autres. Comme l'écrit Anthelme Brillat-Savarin, brillant gastronome de la fin du XVIIIe siècle : " la gourmandise est un acte de notre jugement, par lequel nous accordons la préférence aux choses qui sont agréables au goût sur celles qui n'ont pas cette qualité ".

La différenciation qualitative des produits s'est ainsi cristallisée autour de la provenance du produit : la loi du 28 juillet 1824 crée deux délits : d'une part, l'apposition sur un produit de mentions tendant à faire croire à une fausse provenance ; d'autre part, l'utilisation de tous moyens tendant à faire croire à une origine différente de la véritable. Par la suite, la loi du 1er août 1905, toujours en vigueur, a prévu des amendes et des peines d'emprisonnement pour " quiconque aura trompé ou tenté de tromper le contractant... sur l'origine... de toutes marchandises ". Enfin, l'article 44 de la loi du 27 décembre 1973 a interdit toute publicité mensongère, notamment sur l'origine des produits.

C'est la loi du 26 mars1930 qui constitue le texte de référence en matière d'indication de provenance : " la provenance dont l'indication est protégée consiste dans tout lieu quelconque, géographiquement déterminé et réellement dénommé. Il peut s'agir d'un pays, d'une province, d'une ville, d'un village ou d'un lieudit ".

Les règles de production

Les corporations ont défini progressivement, à partir du Moyen Age, des usages locaux, loyaux et constants relatifs aux conditions d'élaboration et de préparation de la plupart des produits alimentaires 39( * ) .

Les méthodes de fabrication et le savoir-faire ancestral ont donné lieu à diverses codifications et déontologies professionnelles au respect desquelles les instances représentatives des producteurs concernés ont veillé avec une grande vigilance.

La disparition de l'organisation corporative dans la tourmente révolutionnaire a balayé toutes ces normes professionnelles. Au nom du libéralisme, chaque producteur est devenu libre d'élaborer, sans aucune contrainte, sans aucune règle, sans aucun contrôle, tous les produits de son choix.

Les règles des productions corporatives supprimées, il ne restait plus que de simples règlements, pris par l'autorité publique, destinés à assurer un minimum d'hygiène, d'état sanitaire et de fraîcheur dans la préparation et la commercialisation des produits.

La signature du producteur

Depuis l'Antiquité, différents produits alimentaires ont été commercialisés sous la marque du producteur. L'objectif était de garantir l'authenticité du produit pendant toute la durée de son transport vers le lieu de consommation. Nombre d'amphores romaines contenant du vin portaient le sceau du vigneron producteur.

Durant le Moyen-Age, toutefois, la marque collective de la corporation s'impose à la marque individuelle. Il est vrai que les règles corporatives d'élaboration des produits étaient telles que peu de différences distinguaient, selon le producteur, les mêmes fabrications.

L'anonymat n'était cependant pas total, car s'est développée la pratique de l'enseigne commerciale. Même sans marque sur le produit, le consommateur avait l'habitude de se fournir auprès de tel ou tel fabricant à l'enseigne commerciale bien visible et fort réputée. En 1692, Abraham du Pradel publie le " Livre commode des adresses de Paris ", qui recense toutes les enseignes de la capitale sous lesquelles les principaux fabriquants de denrées alimentaires exerçaient leurs activités.

L'usage de la marque s'est développée pour deux raisons essentielles.

Tout d'abord, les autorités publiques chargées du contrôle sanitaire et de l'hygiène ont voulu connaître l'identité de chaque producteur des denrées. C'est ainsi que les boulangers parisiens ont été obligés d'apposer un signe individuel distinctif, à partir de 1594, sur chaque pain. La directive du Conseil des Communautés européennes du 14 juin 1989 relative aux mentions ou marques permettant d'identifier le lot auquel appartient une denrée alimentaire n'a donc rien inventé...

Ensuite, devant la prolifération de produits médiocres, les fabricants soucieux de la qualité, ont voulu se différencier des autres et signaler aux consommateurs les produits élaborés avec le plus grand soin. Progressivement, et surtout avec le développement de l'étiquetage et de la publicité, tous les producteurs ont eu recours à une marque pour commercialiser leurs produits.

La généralisation du phénomène a nécessité la loi du 23 juin 1857 qui a défini la notion de marque et fixé les conditions d'emploi des marques. Ce texte a été remplacé par la loi du 31 décembre 1964 puis par la loi du 4 janvier 1991 relative aux marques de fabrique, de commerce ou de service.

La prolifération des marques est telle que cette distinction ne suffit plus, à lui seul, de nos jours, à caractériser les produits de qualité.

De nombreuses tentatives ont été faites pour approfondir la différenciation des produits. Elles ont progressivement abouti à l'établissement de systèmes cohérents et organisés d'encadrement de plusieurs signes distinctifs.

Une distinction s'est imposée entre les appellations d'origine contrôlées et les autres signes.

L'effort entrepris en France pour conceptualiser les signes distinctifs de la qualité des produits agro-alimentaires rencontre de nombreux échos dans un nombre croissant de pays. L'Italie, l'Espagne et la Grèce, en particulier, ont mis en place des systèmes assez comparables aux nôtres.

La notion française d'appellation, notamment dans le secteur viticole -grâce à l'action efficace de l'Office international de la vigne et du vin- se propage lentement mais sûrement dans le monde entier.

Mais si la France veut servir de référence dans ce domaine des signes distinctifs de qualité, elle doit rationaliser sa politique de manière à la rendre opérationnelle, compréhensible et utile pour les consommateurs.

La rationalisation des signes distinctifs

La rationalisation des signes distinctifs est assurée de deux façons. Tout d'abord, la gestion des signes a été confiée, de manière décentralisée, aux professionnels. Ensuite, une simplification permanente doit être apportée dans les relations complexes entre les signes.

Votre rapporteur considère que si l'objectif du projet de loi qui vous est soumis est bien de développer la valorisation des produits de qualité, certaines dispositions proposées ne contribuent pas à cette nécessaire clarification.

La France dispose aujourd'hui d'un patrimoine très étendu de produits agricoles ou alimentaires de qualité et d'une tradition gastronomique réputée qu'elle s'est efforcé de protéger et de valoriser.

Sur le plan économique, le développement d'une production de qualité correspond, tout d'abord, à une demande de la part des consommateurs qui, à côté d'une alimentation banalisée, recherchent également des produits présentant une spécificité, une authenticité, une qualité supérieure ou une origine géographique certaine. La notoriété auprès des consommateurs des appellations d'origine contrôlées et du label rouge en témoigne.

Les signes d'identification français ont généré en France, en 1997, un chiffre d'affaires de 113 milliards de francs.

Ils correspondent aussi à l'intérêt des producteurs, qui obtiennent une meilleure valorisation de leurs produits en contrepartie des contraintes liées à une politique de qualité. L'accroissement de la valeur ajoutée par les producteurs et les entreprises de transformation apparaît déterminant pour assurer le maintien d'activités en zone rurale.

Ce choix stratégique constitue, par ailleurs, un atout pour l'aménagement du territoire, notamment dans les zones rurales fragiles, en permettant de compenser l'écart de compétitivité dû à leurs handicaps naturels par une valorisation du savoir-faire des hommes et en évitant ainsi les délocalisations vers des bassins de production mieux pourvus.

Sur le plan juridique, la France s'est dotée très tôt d'un dispositif permettant l'identification par le consommateur des produits agricoles ou alimentaires qu'ils soient d'une origine géographique certaine (AOC appellation ou indication de provenance " montagne ", qu'ils présentent un niveau de qualité (labels) ou qu'ils soient conformes à des caractéristiques ou à des règles préalablement fixées (certifications de conformité) ou à un mode de production particulier (agriculture biologique).

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 39 -

Signes d'identification et emploi des termes " fermier ",
" montagne " et " produits pays "

Cet article insère dans le code rural un nouvel article L.640-2 qui pose, d'une part, le principe selon lequel les signes d'identification de la qualité et de l'origine sont délivrés par l'autorité administrative et, d'autre part, dresse la liste de ces signes.

Le premier alinéa précise que l'autorité administrative délivre les signes d'identification : il s'agit, sans ordre hiérarchique, de l'appellation d'origine contrôlée (AOC), du label, de la certification de conformité, de la certification du mode de production biologique et de la dénomination " montagne ".

Cet article ajoute comme sixième signe officiel d'identification, l'indication géographiquement protégée.

Signalons qu'à la notion traditionnelle de " signes de qualité " se substitue celle de signes d'identification. L'expression retenue par l'article39 est plus logique puisque ces signes sont soit des indications de qualité (labels, certifications), soit des indications d'origine (AOC), soit des indications de mode de production spécifique (Agriculture biologique).

Ces signes sont les instruments essentiels de la politique de qualité. Ils doivent permettre à la fois au consommateur de mieux identifier un produit et d'avoir la garantie que le produit acquis est en mesure de répondre à un certain nombre d'attentes précises. D'ailleurs, les mesures communautaires ISO 8402 et française NFX 50-120 contiennent une définition générale de la qualité ; il s'agit " d'un ensemble des propriétés et caractéristiques d'un produit ou d'un service qui lui confère l'aptitude à satisfaire des besoins exprimés ou implicites ".

L'insertion de l'IGP comme sixième signe d'identification nécessite de présenter chacun des signes mentionnés à l'article 39.

1. Le droit français en vigueur

a) L'AOC et l'indication de provenance

L'appellation d'origine contrôlée est considérée par l'article 39 comme fondée sur la reconnaissance d'une ou des qualités spécifiques liées respectivement au terroir et à la zone de production ou de transformation. Elle est donc la dénomination d'un pays, d'une région ou d'une localité servant à désigner un produit qui en est originaire et dont la qualité ou les caractères sont dus au milieu géographique comprenant des facteurs naturels et des facteurs humains.

Cette définition, qui reprend les termes essentiels de l'article 2 de l'Arrangement de Lisbonne du 3 octobre 1958, fait ressortir l'existence de trois éléments caractéristiques :

- l'appellation d'origine est un nom de pays, de région ou de localité ;

- elle désigne des produits d'une aire territoriale ;

- elle est réservée aux produits qui présentent des qualités et des caractères dus au milieu géographique, obtenus suivant des modes de production naturels ou humains.

Ainsi définie, l'appellation d'origine est un signe distinctif susceptible de s'appliquer à toute catégorie de produits, à la condition qu'ils soient originaires d'une région déterminée (ex. : huîtres de Belon, poteries de Vallauris, toile de Cholet).

La notion d'appellation d'origine contrôlée a été construite à partir de l'expérience des indications de provenance et des règles professionnelles de production. C'est sans doute en Champagne que ce concept a été forgé et appliqué pour la première fois.

Dans un arrêt du 12 juillet 1845, la Cour de cassation avait reconnu que " les vins de Champagne sont des produits fabriqués et les lieux où on les récolte et où on les prépare, des lieux de fabrication ". Par la suite, dans une décision du 9 avril 1894, elle a ajouté que " le mot Champagne ne désigne pas un procédé de fabrication de vin mousseux en général, mais un vin mousseux spécial récolté et fabriqué dans l'ancienne province de Champagne ".

A partir de cette jurisprudence, les Champenois entreprirent de délimiter la zone de production et d'élaboration des vins de Champagne, tout en précisant les normes de production 40( * ) . Le décret du 17 décembre 1908 dressa la liste des communes retenues, après examen technique par une commission d'experts, en fonction de la nature du sol, de l'exposition des coteaux et de la tradition viticole. Cette délimitation a été ensuite modifiée et complétée par la loi du 22 juillet1927. La même loi détermina les seuls cépages autorisés et rendit obligatoire le recours à la seconde fermentation en bouteilles. Enfin, un décret-loi du 28 septembre 1935 fixa les règles relatives au rendement à l'hectare, à la conduite de la vigne, au titre alcoométrique, au rendement au pressurage, à la durée de vieillissement, etc...

Tous les ingrédients de l'appellation d'origine contrôlée étaient donc réunis avant même que la notion ait été mise en oeuvre par le Comité national des appellations d'origine créé en 1935.

L'article 11 de la loi du 1er août 1905 sur la répression des fraudes dans la vente des marchandises et des falsifications des denrées alimentaires et des produits agricoles, en réprimant la tromperie sur l'origine de la marchandises, donnait une protection au nom de lieu désignant des produits connus sous cette dénomination. A la demande des Champenois, le Gouvernement envisagea de délimiter des régions viticoles, mais le Conseil d'Etat estima que la loi ne le permettait pas. Il fallut une nouvelle loi, du 5 août 1908, pour confier expressément à l'autorité administrative " la délimitation des régions pouvant prétendre exclusivement aux appellations de provenance des produits ". Sur la base de ce texte, outre la Champagne, furent délimités, en particulier, le Cognac (décret du 1er mai 1909), l'Armagnac (décret du 25 mai 1909), le Banyuls (décret du 18 septembre 1909) et le Bordeaux (décret du 18 février 1911).

La délimitation administrative ne donna pas pleinement satisfaction et un projet de loi fut déposé le 30 juin 1911 par le ministre de l'Agriculture Jules Pams en vue d'instaurer la délimitation judiciaire. Le projet aboutit à la loi du 6 mai 1919 relative à la protection des appellations d'origine.

L'article 1er de la loi précisait que " sur la base d'usages locaux, loyaux et constants, le juge pourra délimiter l'aire géographique de production et déterminer les qualités ou caractères du produit ". Toute personne ou tout syndicat qui estimait qu'une appellation d'origine était appliquée, à son préjudice direct ou indirect et contre son droit, à un produit naturel ou fabriqué, contrairement à l'origine de ce produit, pouvait engager une action en justice pour faire interdire l'usage de cette appellation. C'est ainsi que furent reconnues les appellations Cassis de Dijon (jugement du 21 décembre 1923) et Vermouth de Chambéry (jugement du 10 mars 1928).

Il résulta de cette loi, dans son application concrète, que l'appellation d'origine était d'abord une indication de provenance très large, sans guère de référence à la nature spécifique du produit et moins encore à une qualité particulière. Pour combler cette lacune, la loi du 22 juillet 1927 ajouta, pour les seuls vins, des conditions de terroirs précisément délimités et de cépages consacrées par les usages locaux, loyaux et constants.

Sans toucher à la notion d'appellation d'origine ainsi définie, l'article 21 du décret-loi du 30 juillet 1935 a institué la catégorie des appellations d'origine contrôlées pour les seuls vins et eaux-de-vie. Le Comité, devenu en 1947 l'Institut national des appellations d'origine des vins et eaux-de-vie, était chargé de déterminer les conditions de production auxquelles devait satisfaire le vin ou l'eau-de-vie de chacune de ces appellations contrôlées. Les conditions étaient relatives à l'aire de production, aux cépages, au rendement à l'hectare, au degré alcoolique minimum, aux procédés de culture et de vinification ou de distillation. A partir de 1936 ont été créées et définies près de 500 appellations d'origine contrôlées de vins et d'eaux-de-vie.

Le secteur des fromages a connu une évolution comparable. A partir de l'expérience du Roquefort, dont l'appellation a été consacrée par la loi du 26 juillet 1925, la loi du 28 novembre 1955 avait créé le Comité national des appellations d'origine des fromages. Cette instance était chargée de déterminer l'aire géographique de production, les conditions de fabrication et d'affinage, les caractéristiques des fromages présentant une originalité propre et une notoriété évidente.

Sans poursuivre plus avant le rappel des textes relatifs aux appellations, on constate l'enchevêtrement des notions et le manque de cohérence entre ces strates successives. L'appellation pouvait être simple, réglementée ou contrôlée, résulter d'une loi, d'un décret ou d'un jugement et les conditions à remplir variaient selon la nature des produits.

Bien plus, aucun texte ne donnait la définition de l'appellation. Il a fallu attendre la loi du 6 juillet 1966 pour que cette notion soit explicitée : " Constitue une appellation d'origine la dénomination d'un pays, d'une région ou d'une localité servant à désigner le produit qui en est originaire et dont la qualité ou les caractères sont dus au milieu géographique comprenant des facteurs naturels et des facteurs humains ". Encore convient-il de remarquer que ce texte restait très théorique et sans incidence sur les définitions propres de chaque produit ayant reçu l'appellation par un texte ou une décision judiciaire spécifique.

Une fois les appellations simples supprimées par la loi du 13 décembre 1973, la synthèse est venue, après la loi du 16 décembre 1984 destinée au seul secteur viti-vinicole, de la loi du 2 juillet 1990 qui vise l'ensemble du secteur agro-alimentaire. Depuis le 1er juillet 1995, il n'y a plus, à l'exception des vins délimités de qualité supérieure et des appellations des départements d'Outre-Mer, d'autres appellations que les appellations d'origine contrôlées conformes à ce nouveau texte. La loi, qui s'adresse à tous les produits agricoles ou alimentaires, bruts ou transformés, détermine trois conditions pour qu'un produit bénéficie d'une appellation d'origine contrôlée :

- répondre à la définition de l'appellation d'origine énoncée par la loi du 6 juillet 1966 ;

- posséder une notoriété dûment établie ;

- faire l'objet d'une reconnaissance par décret sur proposition de l'Institut national des appellations d'origine (cette reconnaissance comporte la délimitation des aires géographiques de production et la détermination des conditions de production et d'agrément de chacune des appellations d'origine contrôlées).

Mais les appellations d'origine non contrôlées subsistent. Pour ces produits, l'appellation d'origine est définie par décret en Conseil d'Etat qui délimite l'aire géographique de production et les qualités ou caractères des produits, après enquête publique au cours de laquelle les groupements professionnels directement intéressés doivent être consultés (article L.641-24 du code rural).

Les AOC regroupent aujourd'hui 133.000 exploitations. Sur les 83 milliards de chiffre d'affaires dégagés en 1997, par les AOC, les vins représentent 62 milliards, les spiritueux 9,5 et les produits laitiers 10,5 milliards de francs.

Alors que l'AOC a été construite à partir de l'expérience des indications de provenance, elle s'en distingue aujourd'hui fortement.

Ainsi, l'indication de provenance a seulement pour objet de désigner le lieu de préparation ou de fabrication du produit. Elle se distingue de l'appellation d'origine car elle ne garantit aucune qualité particulière tenant au terrain (climat, sol, faune, flore) et aux modes de production ou de fabrication.

Certaines de ces dénominations peuvent tomber dans le domaine public du fait que le produit n'est plus exclusivement produit dans sa zone d'origine (nougat de Montélimar, saucisson de Lyon, moutarde de Dijon).

b) Les marques collectives

Les marques collectives sont définies dans le Titre II de la loi n° 64-1360 du 31 décembre 1964 sur les marques de fabrique de commerce ou de service. Les prescriptions générales sur les marques collectives s'appliquent sans préjudice des dispositions relatives aux labels agricoles et aux certificats de qualification.

Rappelons que la loi du 12 mars 1920 a permis à des syndicats de déposer des marques collectives, et ce par dérogation à la loi du 21 mars 1984 qui leur interdisait de commercer. L'attribution de ces marques, qui sont destinées à certifier l'origine et les conditions de fabrication des produits, est conditionnée par le respect d'un règlement technique établi par le syndicat. Successivement ont été réglementés la marque artisanale en 1937, le label des travailleurs handicapés en 1997 et les labels agricoles en 1960.

De notables différences opposent la marque à l'appellation d'origine et à l'indication de provenance :

- d'abord, les signes susceptibles de servir de marque sont nombreux (noms de fantaisie, noms patronymiques, emblèmes, chiffres, couleurs, etc.); l'appellation d'origine, comme l'indication de provenance, est toujours une dénomination géographique ;

- ensuite, la finalité de la marque est très différente de celle de l'appellation d'origine ou de l'indication de provenance : la marque a pour objet d'individualiser le produit ou le service sur lequel elle est apposée, et non de désigner son origine géographique ;

- ensuite, la marque est un droit privatif appartenant à un commerçant ou à un groupement de professionnels ; l'appellation d'origine, droit collectif reconnu aux producteurs d'une région donnée, ne peut, au contraire, être l'objet d'une appropriation privative ; elle doit, comme l'indication de provenance, rester à la disposition des producteurs de la région qui remplissent les conditions requises pour son utilisation.

Ce dernier caractère permet d'opposer les marques collectives aux appellations d'origine. En effet, les marques collectives utilisées par les membres d'un groupement ou d'une collectivité, présentent, comme les appellations d'origine, un caractère collectif. Elles s'en distinguent cependant car c'est le groupement ou la collectivité propriétaire du label qui détermine les conditions de son utilisation alors que le droit à une appellation d'origine résulte des usages complétés, le cas échéant, par des dispositions législatives et réglementaires. Aussi, pour éviter toute confusion, est-il interdit de choisir une marque susceptible de porter atteinte à une appellation d'origine ou d'utiliser des labels agricoles pour des produits bénéficiant d'une appellation d'origine.

Parmi ces marques collectives, se trouvent :

Le label agricole qui est une dénomination ou un signe homologué par les autorités administratives et délivré par l'organisme certificateur afin d'attester qu'une denrée alimentaire ou qu'un produit agricole non alimentaire et non transformé. Il possède un ensemble de qualités et caractéristiques spécifiques fixées dans un cahier des charges et établissant un niveau de qualité supérieure ( article L.115-22 du code de la consommation) .

Un label ne peut être délivré pour un produit bénéficiant d'une appellation d'origine, un vin délimité de qualité supérieure ou un vin de pays (article L.115-22 du code de la consommation).

La notion de label agricole a été précisée par différents textes : lois des 5 août 1960, 10 janvier 1978 et 30 décembre 1988, décrets des 13 janvier 1965, 17 juin 1983 et 20 septembre 1990.

Il s'agit d'une marque collective attestant qu'une denrée alimentaire ou un produit agricole non alimentaire et non transformé possède un ensemble de caractéristiques spécifiques préalablement fixées et correspondant à un niveau de qualité la distinguant des produits similaires. La spécificité résulte de règles particulières de production et de fabrication et même, le cas échéant, d'origine.

Les labels peuvent être nationaux (label rouge) ou régionaux (on en compte 6 actuellement). Ils sont la propriété de toute personne morale de droit public ou privé qui demande l'homologation à l'autorité publique. Concrètement, ce sont des syndicats professionnels, des interprofessions, des groupements de producteurs, des chambres d'agriculture ou de simples associations qui déterminent le règlement technique précisant les caractères spécifiques du produit concerné, veillent au respect de ces normes par les producteurs intéressés et assurent la promotion du label auprès des consommateurs.

Le label peut être un logo, une dénomination ou tout autre signe distinctif. Il figure obligatoirement sur chaque produit répondant aux conditions requises et soumis régulièrement à des contrôles précis. Après homologation par arrêté interministériel, le label doit être enregistré, en tant que marque collective, auprès de l'Institut national de la propriété industrielle, selon la procédure prévue par la loi du 4 janvier 1991.

Actuellement, 359 produits sont sous label homologué, 315 sous label rouge et 44 sous label régional. Leur chiffre d'affaires s'est élevé en 1997 à 6,2 milliards de francs.

La certification de conformité atteste qu'une denrée alimentaire ou qu'un produit agricole non alimentaire et non transformé est conforme à des caractéristiques spécifiques ou à des règles préalablement fixées par un cahier des charges portant, selon le cas, sur la production, la transformation ou le conditionnement ( article L.115-23 du code de la consommation) .

La certification de conformité ne peut être délivrée pour les produits bénéficiant d'une appellation d'origine, les vins délimités de qualité supérieure et les vins de pays ( article L.115-26 du code de la consommation) .

Elle a été définie par la loi du 30 décembre 1988 et le décret du 25 septembre 1990.

Il s'agit d'une notion différente de celle de certificat de qualification destiné aux produits industriels et aux produits agricoles non alimentaires transformés définis initialement par la loi n° 78-23 du 10 janvier 1978 sur la protection et l'information des consommateurs de produits et de services.

Des spécifications de type normatif, contenues dans un référentiel technique, précisent pour chacun des produits auxquels elles s'appliquent les caractéristiques de sa composition ou de son usage, les procédés de son obtention, de sa fabrication, de sa conservation ou de son transport. Un contrôle du respect de ces caractéristiques est prévu.

La présentation des produits bénéficiant d'une certification de conformité doit indiquer la nature des caractéristiques certifiées. Les certifications de conformité, qui se présentent le plus souvent sous la forme d'un texte informatif descriptif, peuvent être accompagnées ou matérialisées par un signe distinctif déposé auprès de l'Institut National de la propriété industrielle en tant que marque collective.

c) La certification du mode de production biologique

La certification du mode de production biologique est une marque collective dont la création résulte du III de l'article 14 de la loi n° 80-502 du 4 juillet 1980 d'orientation agricole. Pour porter cette dénomination, il faut que ce produit issu de l'agriculture biologique -produit agricole ou denrée alimentaire- résulte d'un mode de production agricole exempt de produits chimiques de synthèse. En outre, les agriculteurs biologiques appliquent des méthodes de travail fondées sur le recyclage des matières organiques naturelles et sur la rotation des cultures. Les cahiers de charges que doivent respecter les acteurs de la filière biologique sont homologués par arrêté ministériel après avis de la commission nationale des labels et certification.

Le premier texte communautaire qui fixe les grands principes de l'agriculture biologique et les règles à suivre pour la transformation, la vente et l'importation est le règlement CEE 2092/91 du 24 juin 1991 qui vise seulement les produits agricoles végétaux non transformés (fruits et légumes, céréales) et ceux destinés à l'alimentation humaine composés essentiellement d'ingrédients d'origine végétale (pain, biscuits...).

Depuis 1996, une réflexion a été engagée pour parvenir à un projet de structure sur l'élevage en agriculture biologique. Ce texte a fait l'objet d'une accélération importante dans son examen en 1998. Il devrait d'ailleurs être soumis au Conseil cette semaine. Votre rapporteur souhaite que les dispositions de cette future directive ne conduisent pas à affaiblir les mécanismes rigoureux applicables en France pour la reconnaissance de la qualité d'élevage biologique.

d) La dénomination montagne

La loi n° 85-30 du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne a créé l'appellation " montagne " . Celle-ci est attribuée à des produits agricoles et alimentaires, autres que le vin, bénéficiant d'une appellation d'origine, d'un label ou d'une certification.

La procédure est la suivante :

Une commission régionale des produits agricoles de qualité, présidée par le préfet de région, détermine les conditions d'utilisation du mot " montagne " et autorise son emploi au regard des techniques de fabrication utilisées, du lieu de production et d'élaboration des produits et de l'origine des matières premières.

2. Le dispositif communautaire

Les instances européennes ont mis en place un régime d'authentification
permettant le développement de produits agricoles et de denrées de qualité (Règlements du Conseil n° s 2081-92 et 2082-92 du 14 juillet 1992).

Le règlement n° 2081-92 comprend deux groupes de dispositions. Le premier vise à assurer la protection des produits dont les caractères sont dus essentiellement ou exclusivement au milieu géographique et qui peuvent bénéficier d'une appellation d'origine protégée (AOP).

Le second groupe correspond aux produits dont la réputation ou une autre caractéristique est attribuée à leur origine géographique et qui, pour cette raison, peuvent être commercialisés avec une indication géographique protégée (IGP).

Le règlement n° 2082-92 , pour sa part, assure la valorisation des produits agricoles ou des denrées alimentaires spécifiques . Suivant les termes de son article 2, la spécificité doit être comprise comme un élément ou un ensemble d'éléments qui permettent de distinguer un produit des produits similaires de la même catégorie. Elle est attestée par une procédure d'enregistrement européenne.

La Communauté européenne reconnaît et protège également les attestations de spécificité de produits agricoles et de denrées alimentaires (à l'exclusion des eaux). Cette dénomination est réservée aux produits obtenus à partir de matières premières traditionnelles ou dont la composition ou le mode de production ou de transformation est fixé par une tradition. Ce signe de qualité est proche du label rouge en ce sens que la spécificité est une marque de reconnaissance de la différence substantielle du produit par rapport à ceux de la même catégorie qui lui sont similaires. L'attestation de spécificité doit faire l'objet d'un enregistrement auprès de la Commission. Cet enregistrement donne la garantie que le produit est fabriqué conformément à un cahier des charges et assure une protection comparable aux IGP à l'échelon communautaire.

La loi n° 94-2 du 3 janvier 1994 a intégré les signes européens définis par les règlements du 14 juillet 1993 dans le dispositif français. Elle dispose, en effet, que les labels et certifications de conformité ne peuvent faire référence à une origine géographique qu'à la condition d'avoir fait l'objet d'un enregistrement auprès de la Commission européenne.

Il en résulte un double système d'authentification de la qualité des produits agricoles et alimentaires.
Un premier niveau de garantie de qualité et de caractéristiques spécifiques sans mention d'origine géographique résultant de la délivrance d'un label ou d'une certification de qualité par les autorités françaises. Un niveau d'identification plus complet est assuré par l'enregistrement de la qualification françaises auprès de la Commission, lequel permet au label ou au certificat de conformité de se prévaloir d'une indication d'origine géographique ou d'une attestation de spécificité et d'être reconnu dans l'ensemble de l'Union européenne.

Ce système évite la multiplication des signes distinctifs de qualité et renforce l'efficacité des labels et certificats de conformité. La clarification opérée par la loi n'est cependant pas complète. En effet, l'existence d'une double réglementation, européenne et nationale, ne soulève pas de difficulté majeure en ce qui concerne les appellations d'origine. Les appellations d'origine protégées (AOP) correspondent bien à nos appellations d'origine contrôlées (AOC). Il suffit donc que les appellations d'origine reconnues par les autorités françaises soient enregistrées par la Commission comme appellations d'origine protégées pour répondre aux exigences de la réglementation européenne.

La situation est différente en ce qui concerne les indications géographiques protégées (IGP), car ces indications n'ont pas d'équivalent en France. Dans un souci de simplification, la loi n° 94-2 du 3 janvier 1994 a décidé que les indications d'origine géographique ne peuvent désormais être introduites dans les labels agricoles et certificats de conformité qu'à la condition d'être enregistrées par la Commission comme indications géographiques protégées.

3. Le dispositif proposé par l'article 39

a) La principale difficulté posée par l'article 30

L'indication géographique protégée (IGP), est une marque collective communautaire. Elle est attribuée aux produits agricoles ou alimentaires conformes à un cahier des charges établi par un groupement de producteurs selon la procédure de la certification, et dont la demande d'inscription sur le registre communautaire des IGP a été acceptée et transmise à la Commission européenne par le Gouvernement d'un Etat membre.

Le règlement (CE) n° 2081/92 du Conseil du 14 juillet 1992 fixe le régime des IGP qui figure aux articles L.115-26-1 à L.115-26-3 du code de la consommation, les mesures d'application ayant fait l'objet du décret n° 94-598 du 6 juillet 1994 relatif aux procédures d'examen des demandes d'enregistrement des indications géographiques protégées et des attestations de spécificité. Rappelons que l'IGP n'est pas applicable aux vins et boissons spiritueuses ; les produits sous label ou certification de conformité ne peuvent mentionner une indication d'origine que si celle-ci est enregistrée comme IGP.

Or, l'article 39 propose de considérer cette protection commerciale communautaire comme un nouveau signe d'identification géré par l'INAO.

Examinons les arguments qui militent en faveur d'une telle mesure :

- un argument financier : actuellement il existe deux procédures pour valoriser l'origine d'un produit : la première fait appel à l'Institut national des appellations d'origine (INAO), qui est gratuite et de nature administrative, et une seconde nécessite le recours à des organismes certificateurs et faisant appel à la Commission nationale des labels et des certifications de produits agricoles et alimentaires, qui exige un investissement, par les producteurs, de l'ordre de 200 à 400.000 francs. Actuellement, les indications géographiques protégées doivent emprunter la seconde procédure. Mais, votre rapporteur souhaite préciser que la " voie INAO " est loin d'être gratuite : elle est largement payée par le contribuable ;

- un argument psychologique : selon le rapporteur de l'Assemblée nationale, " l'indication géographique protégée devient peu à peu, dans l'esprit des consommateurs, un signe plus fort que l'appellation d'origine contrôlée (AOC), car le consommateur a tendance à lier une indication de lieu géographique avec la reconnaissance d'une qualité ". Votre rapporteur tient à souligner qu'aucune étude n'a montré une telle hiérarchie des valeurs chez les consommateurs qui, par ailleurs, ne connaissent pas encore bien ces protections européennes. De plus, M. François Patriat précise que la démarche actuelle " finit par induire en erreur les consommateurs sur la nature même de plusieurs produits bénéficiant d'une indication géographique protégée. Ainsi, il faut savoir que la majorité des jambons de Bayonne sont produits en Bretagne avec du porc breton. Le sel de Guérande est source de mêmes confusions " .

Votre rapporteur ne partage en aucune façon ces propos. L'IGP " Jambon de Bayonne " est aujourd'hui enregistrée par l'Union européenne ; par définition, cette protection assure aux consommateurs que les porcs utilisés sont élevés autour de Bayonne et non en Bretagne. Le sel de Guérande est, quant à lui, en démarche IGP couplée à un label rouge et à une certification de conformité, destinées à couvrir l'ensemble des productions de sel de Guérande. La démarche de qualité est donc en cours.

- un argument administratif : la gestion des IGP par l'INAO devrait permettre à cet organisme de gérer à la fois les AOC et les IGP : si votre rapporteur n'est pas opposé à l'apparition de l'INAO dans la gestion de l'IGP, ceci ne constitue en aucune façon une raison justifiant la reconnaissance de l'IGP comme un signe d'identification totalement indépendant.

- un argument d'efficacité : selon le rapporteur de l'Assemblée nationale, l'INAO pourra " exercer un contrôle efficace et apprécier le lien entre le terroir, un produit et un savoir-faire. Sans contrôle de l'IGP par l'INAO, à terme, n'importe qui pourra détourner des produits d'appellation d'origine contrôlée en faisant reconnaître des indications géographiques protégées. Même si l'indication géographique protégée n'est pas un signe de qualité, la maintenir hors des signes d'identification protégés par la loi serait donc faire un cadeau aux négociants et distributeurs souhaitant tirer profit de la crédulité des consommateurs ".

Là encore, il risque d'y avoir une certaine confusion. Peut-on considérer que le signe d'identification de la qualité et de l'origine, tel qu'il est vu ici, s'appuie sur un système de contrôle équivalent en terme d'indépendance, d'impartialité et de compétence aux systèmes des signes de qualité actuels ? En tant qu'organisme public chargé à termes des contrôles de l'AOPC, AOP et de l'IGP, l'INAO est par nature un contrôleur indépendant impartial et compétent. Mais, a-t-il réellement tous les moyens nécessaires à cette indépendance, cette impartialité et cette compétence ?

Mais il est inexact de prétendre qu'en faisant contrôler les IGP par l'INAO, celles-ci deviendront un vrai signe de qualité. Sans une réforme du système de contrôle, cet objectif ne paraît guère envisageable. A une époque, où le contrôle devient la logique même du système partout en Europe, nous avions une typicité en France, celle d'être en avance pour notre qualité. Nous allons avoir la réputation d'être le premier pays où l'on diminuera les contrôles.

Compte tenu de l'apparition du logo IGP sur les étiquetages et du programme de communication de Bruxelles sur ce logo, l'INAO va se trouver confronté à un certain nombre de questions auxquelles il devra apporter des réponses, comme le souligne, à juste titre, le n° 116 du 30 septembre 1998 du journal " Qualité infos " :

- Comment fera-t-on pour expliquer à la presse et aux consommateurs qu'ils trouveront des IGP identifiées par un même logo mais à plusieurs niveaux de qualité et de contrôle dans les rayons ? En quelle IGP devront-ils avoir confiance ?

- Les IGP sans signes de qualité seront-elles dévalorisées par rapport à celles passant par un label alors qu'elles auront été attribuées par le même organisme ?

- Comment fera-t-on demain pour expliquer en termes simples, clairs et précis la différence entre l'AOC et l'IGP sans dévaloriser l'une par rapport à l'autre ? Le consommateur sera-t-il suffisamment perspicace pour faire la différence entre " typicité " et " réputation " ?

- Comment fera-t-on pour expliquer la qualité " réputée " sans contrôles ?

- Si l'INAO met en place des procédures de contrôles spécifiques aux IGP, pourra-t-il en faire l'économie sur les produits AOC ?

C'est pourtant toute la problématique du système que l'on nous propose en voulant déconnecter l'IGP du système label ou certification de conformité, donc d'un dispositif de qualité.

Les pouvoirs publics doivent être conscients qu'avec une telle démarche, ils entraînent, à la moindre erreur qualitative, à la décrédibilisation du système et à leur propre mise en cause. Ils doivent être conscients qu'ils sont en train de mettre en place des distorsions à l'intérieur même de l'IGP en donnant naissance à des IGP bas de gamme et des IGP haut de gamme. Ils doivent être conscients, enfin -et c'est peut être là le véritable problème- que la non réglementation de l'indication de provenance va amener, de la part de certains industriels, une " ruée " sur les appellations géographiques sans reconnaissance officielle qui se fera au détriment de la politique de qualité et d'aménagement du territoire et de ceux qui auront fait l'effort de se lancer dans une stratégie de qualité et d'origine basée sur les garanties officielles.

C'est pourquoi votre rapporteur, tout en comprenant les motivations qui conduisent à proposer cette réforme, vous propose de supprimer la reconnaissance de l'IGP comme signe autonome d'identification en revenant au statut communautaire de l'IGP.

b) Les autres innovations apportées par l'article 39

il précise qu'un décret définit l'utilisation de la dénomination " produits pays dans les départements d'outre-mer " ;

l'utilisation du qualificatif " fermier " ou de la mention " produit de la ferme " ou " produit à la ferme " ou toute autre dénomination équivalente est subordonnée au respect des conditions fixées par décret. L'engouement des agriculteurs (environ 13000) comme des consommateurs pour les démarches " produits fermiers " nécessite d'encadrer cette notion qui, sauf dans de rares secteurs, ne fait l'objet d'aucune réglementation précise.

Il n'y a donc pas aujourd'hui de définition générale du terme fermier mais la doctrine de DGCCRF permet d'esquisser certains traits des " produits fermiers ". Peuvent aussi être considérés comme " fermiers " :

- les produits fermiers " par nature " : le fermier est l'acteur principal, voire unique, de la construction de la qualité ou le gardien d'un espace naturel : il en est ainsi de la volaille fermière. De même, l'appartenance de certains produits laitiers peuvent être considérés comme fermiers quand ils sont liés à la présence de technologies simples et traditionnelles, quand ils peuvent être attachés à la spécificité de l'origine animale, pour la matière première ou quand la proximité de la matière première joue un rôle pour le lait ou pour la consommation 41( * ) ,

- les produits dont l'image est " fermière ". Cette catégorie est moins tributaire de la personnalité du fermier que du lieu d'achat ou de la provenance. Ceci s'applique par exemple aux fruits et légumes frais. La ferme, comme espace naturel, se substitue au fermier comme acteur dans la garantie,

- les produits fermiers " par extrapolation ". Ici, alors qu'au départ l'appellation ne va pas de soi, le concept de savoir-faire personnel joue un rôle déterminant. Il s'applique par exemple aux produits carnés nécessitant de la découpe. C'est le cas lorsqu'il existe un marché résiduel lié à la tradition, aux " rites " et à l'usage.

Actuellement, le terme " fermier " est défini de façon très précise pour les fromages (décret du 30 décembre 1988), aux oeufs (règlement communautaire du 26 juin 1990 modifié en 1995) et aux volailles (règlement communautaire de juin 1990 et décret de 1967).

Outre ces définitions réglementaires, des définitions contractuelles existent notamment pour les produits bénéficiant d'un label. Enfin, la jurisprudence a esquissé plusieurs définitions.

Ainsi, la Cour d'appel, dans un arrêt du 8 octobre 1992, a noté : " il est admis, et de jurisprudence constante, que le qualificatif " fermier " implique l'existence d'un circuit intégré à la ferme, étant précisé que les préparations sont réalisées suivant des méthodes traditionnelles, que ce caractère fermier s'induit, en outre, d'une production ayant ces caractéristiques mais également d'une commercialisation sur place, à la ferme, ou sur les marchés ", et elle relève " qu'ainsi pour se prévaloir du terme " fermier " les prévenus n'auraient dû commercialiser que leur production " . Toutefois, elle introduit une certaine souplesse dans cette définition en rappelant qu'en première instance, le tribunal de Cahors avait considéré que " l'élargissement des méthodes de production ne faisait pas perdre la qualité fermière de celle-ci dans la mesure où l'entreprise en cause conservait un contrôle direct sur les agriculteurs auprès desquels elle s'approvisionnait et dans la mesure également où la proximité de ceux-ci favoriserait le contrôle ".

En 1996, la même Cour d'appel (23 mai 1996) indiquait : " en effet, le caractère fermier d'une production implique que tous les stades de la méthode de production soient intégrés à la ferme, quelle que soit la forme juridique de l'exploitation, et correspondent à des méthodes traditionnelles, qu'il ne peut être toléré un élargissement de la production que lorsque l'entreprise conserverait un contrôle direct sur la qualité des produits, leur caractère fermier et la méthode traditionnelle de leur production ". " Celle-ci ne contrôle pas, soit qualitativement, soit par des stipulations contractuelles, le caractère fermier et artisanal de ces productions ".

La Cour d'appel de Bordeaux, le 7 juillet 1993, avait précisé : " les produits ne proviennent pas principalement mais par exception de l'exploitation et le surplus n'est pas acquis des fermes voisines, dans un cadre de relations d'entraide et de proximité, impliquées par la cause considérée, mais bien par des fournisseurs réguliers de quantités importantes de matières premières, retenus non en raison de liens de voisinage, mais en considération de leur capacité à fournir les quantités nécessaires à l'activité artisanale, leur proximité géographique étant d'ailleurs toute relative. Le fait que les plats principaux servis par X soient constitués de conserves réalisées à la ferme, avec des denrées achetées à l'extérieur est insuceptible d'en faire des produits de la ferme ".

La jurisprudence permet donc de tracer les grandes lignes de la définition du terme " fermier " : méthodes de production traditionnelles dans un circuit intégré à la ferme, quels que soient le statut juridique de l'exploitation et les modalités de commercialisation. Les produits doivent provenir principalement de l'exploitation mais également de fermes voisines, si l'exploitant conserve un contrôle direct sur la qualité des produits.

La notion de " produits fermiers " est donc loin d'être définie avec précision, d'autant que le terme " fermier " n'est pas réservé aux produits bénéficiant d'une appellation d'origine ou d'un autre signe de qualité.

Votre rapporteur considère que le produit, pour détenir la mention de " fermier " doit respecter quatre principes essentiels :

- le produit doit provenir d'un producteur qui possède nécessairement le statut social d'agriculteur ;

- le produit doit être issu de l'exploitation ;

- la transformation doit s'effectuer sous la responsabilité de l'agriculteur ;

- la commercialisation doit être maîtrisée.

Il appartient donc au décret de préciser ces conditions et de les compléter. Or, l'administration s'est forgée une doctrine stricte. Pour les pouvoirs publics, l'emploi des termes " ferme " ou " fermier " doit être réservé pour qualifier des produits fabriqués par un producteur agricole sur le lieu de son exploitation avec des ingrédients qui proviennent de la ferme. Dans ce cadre, toute transformation extérieure, même assurée par l'exploitant apparaît interdite.

Votre rapporteur considère ainsi urgent de réglementer en la matière, compte tenu de la triple problématique rencontrée par les produits fermiers : le traitement juridique, fiscal et social des producteurs, l'information des consommateurs et la réglementation sanitaire.

Il vous propose de compléter cet alinéa relatif aux produits fermiers, ce terme étant aujourd'hui employé pour des fromages AOC et pour des volailles, des gros bovins, des veaux, des agneaux et des porcs bénéficiant du label rouge.

Cette utilisation qui combine un mode de production avec la spécificité ou la qualité des produits, consignée dans des cahiers des charges stricts contrôlés par des organismes tiers, ne doit pas être remise en cause par une définition qui concerne des produits n'entrant pas dans le dispositif des signes d'identification.

En conséquence, votre commission vous propose d'adopter cet article dans la nouvelle rédaction proposée par votre rapporteur.


Article 40 A -
(Article L.646-1 du code rural) -

Commission nationale des labels et des certifications de produits agricoles et alimentaires

Cet article ne modifie aucune des règles applicables à la commission des labels. Il vise à insérer un nouveau chapitre VI afin de légaliser le statut de cet organisme.

Cet article insère dans le code rural un nouveau chapitre VI -Commission nationale des labels et des certifications de produits agricoles et alimentaires- dans le titre IV (valorisation des produits agricoles ou alimentaires), du livre VI (nouveau).

1. Le dispositif réglementaire en vigueur

La Commission nationale des labels et des certifications de produits agricoles et alimentaires a pour mission de donner son avis aux ministres chargés de l'Agriculture, de l'Alimentation et de la Consommation sur :

- les demandes d'homologation des cahiers des charges de labels agricoles, les demandes d'examen des cahiers des charges établis en vue d'une certification de conformité et les demandes d'enregistrement des indications géographiques protégées (IGP) et des attestations de spécificité ;

- les demandes d'homologation des cahiers des charges relatives au mode de production biologique pour la production animale ou les denrées d'origine animale ,

- les demandes d'agrément des organismes certificateurs chargés de délivrer les labels agricoles, les certifications de conformité ou les certifications agriculture biologique ainsi que les demandes d'agrément des organismes de contrôle du respect du mode de production biologique prévus par le règlement CE n°2092-91 du Conseil du 24 juin 1991.

La commission a également pour mission de proposer toutes mesures susceptibles de concourir au bon fonctionnement des procédures d'octroi des labels et des certifications de produits agricoles et alimentaires et à leur développement. Elle émet un avis sur les questions que lui soumettent les ministres, dans le domaine de sa compétence et notamment en matière d'agriculture biologique.

La commission fait également toutes propositions susceptibles de contribuer à l'amélioration des méthodes de production et de transformation des produits issus de l'agriculture biologique et de leur contrôle afin de les adapter à l'évolution des techniques et des connaissances.

La commission nationale comprend trois sections selon le décret n° 96-193 du 12 mars 1996 :

- la section " examen des référentiels " est compétente pour examiner les demandes d'homologation des cahiers des charges de labels agricoles, les demandes d'examen des cahiers des charges se rapportant aux certifications de conformité, les demandes d'enregistrement des indications géographiques protégées (IGP) et des attestations de spécificité.

- la section " agriculture biologique " est compétente pour recevoir les demandes d'homologation des cahiers des charges concernant le mode de production biologique pour la production animale et les denrées alimentaires d'origine animale,

- la section " agrément des organismes certificateurs " est compétente pour examiner les demandes d'agrément des organismes certificateurs ainsi que les demandes d'agrément de tous les organismes chargés du contrôle du respect du mode de production biologique.

La commission nationale et les sections qu'elle comporte sont composées, en proportion équilibrée, de représentants de l'administration, de producteurs, de transformateurs, d'artisans, d'organismes certificateurs et de consommateurs ainsi que des personnalités qualifiées désignés par arrêté conjoint des ministres chargés de l'Agriculture, de l'Alimentation et de la Consommation.

Les modalités de fonctionnement de la Commission nationale et des sections sont fixées par arrêté interministériel.

Dans leur domaine de compétence, les sections peuvent émettre des avis au nom de la Commission nationale et faire des propositions entrant dans leurs attributions. Ces avis et propositions peuvent, s'il y a lieu, être émis par la Commission nationale siégeant en formation plénière.

Le président de la Commission nationale transmet aux ministres les avis émis par chacune des sections et par la commission.

La commission mixte comporte en nombre égal des représentants désignés par la Commission nationale et des représentants désignés par l'INAO. Elle comprend également des représentants de l'Etat mais ceux-ci ne peuvent constituer plus du tiers des membres de la commission.

La commission mixte a pour mission d'examiner les cahiers des charges accompagnant les demandes d'enregistrement des indications géographiques protégées et de formuler un avis concernant le nom du produit et le lien existant entre le produit et son origine géographique. L'avis émis sur ces points par la commission mixte s'impose à la Commission nationale des labels et des certifications de produits agricoles et alimentaires.

La commission nationale est présidée par une personnalité désignée par arrêté interministériel. Elle est composée des membres de chacune des sections.

Toutefois, les administrations, les organisations professionnelles et de consommateurs et les établissements publics que siègent dans chacune des sections sont représentées au sein de la Commission nationale au travers d'un seul représentant. En cas de vote, chacun de ces représentants détient une voix double.

La commission permanente composée du président de la Commission nationale et des présidents des sections transmet aux ministres concernés les avis émis par chacune des sections. Elle veille à la cohérence de ces avis.

Le secrétariat de la Commission nationale et des sections est assuré par la direction générale de l'alimentation.

2. Le dispositif proposé par le projet de loi

Le texte proposé pour l'article L.646-1 par l'article 40 A est composé de deux alinéas.

Le premier alinéa définit les grandes missions de cet organisme qui doit :

- donner des avis au ministre de l'agriculture et à celui chargé de la consommation sur la délivrance des signes d'identification (label, certification de conformité, certification du mode de production biologique et dénomination montagne) ;

- proposer toutes mesures susceptibles de concourir au bon fonctionnement, au développement et à la valorisation de ces signes.

Le second alinéa précise qu'un décret en Conseil d'Etat fixe la composition et les modalités de fonctionnement de cet organisme.

Votre rapporteur vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article additonnel après l'article 40 A -
(Article L.641-2 du code rural)

Reconnaissance d'une AOC

Cet article additionnel vise à compléter et à clarifier la rédaction de l'article L.641-2 du code rural relatif à la procédure de reconnaissance d'une AOC.

Votre rapporteur vous propose trois modifications à cet article :

- la première complète le premier alinéa de cet article : cet ajout, issu de l'article L.641-15, alinéa 3, est spécial au secteur des vins et eaux-de-vie. Son application a été étendue à toutes les AOC par l'article L.641-6 premier alinéa ;

- la deuxième supprime le terme " géographique " dans le quatrième alinéa de l'article L.641-2, afin de permettre une protection plus efficace de l'ensemble des termes qui composent le nom d'une appellation d'origine, comme le Muscadet ou le Roblochon ;

- la troisième crée un sixième alinéa concernant la procédure de reconnaissance des appellations d'origine contrôlée, qui se trouve ainsi placé dans la section ad hoc. Il est rédigé de telle manière à en harmoniser la rédaction avec celle de l'article L.641-25 nouveau.

En outre, il ne fait plus référence à la notion de représentativité.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Article additionnel avant l'article 40 -
(Article L.641-3 et L.641-4 du code rural) -

Définition de l'AOC

Cet article vise à modifier le régime de reconnaissance de l'ensemble des AOC et à éviter de confondre les AOC avec les appellations d'origine des produits manufacturés.

Cet article est composé de deux paragraphes.

Le paragraphe I a trait à l'article L.641-3 du code rural.

Votre rapporteur vous propose de modifier la rédaction de l'article L.641-3 du code rural afin d'unifier le régime de reconnaissance de l'ensemble des AOC.

En outre, la répartition antérieure en plusieurs articles entre AOC viticoles d'un côté et non viticoles de l'autre est supprimée, la procédure étant identique.

Le paragraphe II est relatif à l'article L.641-4 du code rural : il procède à trois modifications :

- au premier alinéa, il évite au lecteur du code rural toute confusion entre les AOC et les appellations d'origines des produits manufacturés -qui ne peuvent pas être AOC (Dentelle du Puy, Poteries de Vallauris, Monoï de Tahiti...) ;

- au deuxième alinéa, il rectifie une erreur de codification ;

- il ajoute un troisième alinéa permettant d'étendre la disposition pénale antérieurement prévue à l'article L.641-21 alinéa 2.

Cette extension est placée à cet article en raison de l'obsolescence future des deux premiers alinéas, une fois le 1er juillet 2000 passé.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel ainsi rédigé.

Article 40 -
(Articles L.641-5, L.641-6, L.642-1 et L.642-2 du code rural) -

Organisation de l'INAO, extension des compétences de l'INAO aux indications géographiquement protégées

Cet article porte sur plusieurs dispositions relatives à l'INAO.

L'article 40 du projet de loi comprend quatre paragraphes.

1. L'article L.641-5 du code rural (paragraphe I)

Outre une modification des dénominations des trois comités nouveaux existants, qui font désormais référence aux termes d'appellation d'origine, le paragraphe I complète l'article L.641-5 du code rural, issu de l'article L.115-19 du code de la consommation, en ajoutant aux trois comités nationaux existant, un quatrième comité compétent pour les IGP.

L'Institut national des appellations d'origine a pour objet de proposer aux autorités administratives les décisions de reconnaissance des produits agricoles ou alimentaires et de préparer toutes les dispositions réglementaires se rapportant à ces appellations.

L'organisation et les règles de fonctionnement de l'INAO sont fixées par différents textes (article L.115-19 du code de la consommation ; Décret n° 91-368 du 15 avril 1991, modifié par le décret n° 93-875 du 25 juin 1993).

Depuis la réforme opérée par la loi du 2 juillet1990, l'INAO comprend trois comités nationaux :

- le comité pour les vins, eaux-de-vie, cidres, poirés, apéritifs à base de cidres, de poirés ou de vins ;

- le comité pour les produits laitiers ;

- le comité pour les autres produits ;

Ces comités sont composés de représentants professionnels, de représentants des administrations et de personnalités qualifiées permettant notamment la représentation des consommateurs.

Un conseil permanent, composé des membres choisis parmi ces comités, établit le budget de l'Institut et détermine la politique générale relative aux appellations d'origine contrôlées.

Des comités régionaux complètent cette organisation ; ils étudient toutes les questions intéressant leur région qui relèvent de l'INAO.

La gestion de l'INAO est assurée par un directeur nommé par le ministre de l'Agriculture.

L'article 40 du projet de loi propose donc la création d'un quatrième comité national, compétent pour les indications géographiques protégées.

Toutes les demandes de reconnaissance d'un produit pour lequel ses producteurs regroupés en un syndicat ou organisation de producteurs souhaitent obtenir une indication géographique protégée conformément à la procédure communautaire seront adressées à ce quatrième comité.

Il est nécessaire de souligner deux points importants :

- ce comité n'attribuera pas le signe d'identification, qui relève de la seule compétence de la Communauté européenne ; il définira les caractéristiques de ce produit (origine et production) et les conditions de production, sous réserve d'une homologation interministérielle,

- le comité national pour les indications géographiques protégées sera amené à statuer sur des produits relevant de la compétence des trois autres comités au cas où ceux-ci bénéficieraient d'une appellation d'origine contrôlée ou appartiennent à une gamme de produits où il existe des AOC. Siégeront donc à ce comité des membres des autres comités.

Votre rapporteur, n'approuvant pas le dispositif nouveau relatif à l'IGP, vous propose de modifier la rédaction du 4° de l'article L.641-5 afin d'associer la Commission Nationale des labels et des certifications de produits agricoles et alimentaires à l'instruction des demandes d'IGP par le Comité 4 de l'INAO. Les attributions de ce dernier sont, en matière d'IGP, limitées à la délimitation de l'aire géographique et à la détermination du lien existant entre le produit et son origine géographique. En outre, il est souhaitable de coordonner la rédaction du décret de 1991 sur l'INAO et celle du projet de loi.

Votre rapporteur vous propose, en conséquence, une nouvelle rédaction pour les sept premiers alinéas de l'article L.641-5 du code rural.

2. L'article L.641-6 du code rural (paragraphe II)


a) Le dispositif proposé

Cet article remplace les deuxième et troisième alinéas de l'article L.641-6 (issu de l'article 115-20 du code de la consommation) par quatre nouveaux alinéas qui a trait aux compétences de l'INAO aux IGP.

Le premier alinéa du texte proposé par l'article 40 pour l'article L.641-6 du code rural apporte deux modifications au texte en vigueur :

- il corrige, tout d'abord, une erreur matérielle intervenue lors de la codification de l'article 7-8 de la loi du 6 mai 1919 relative à la protection des appellations d'origine sous l'article L.115-20 du code de la consommation, par la loi n° 93-949 du 26 juillet 1993 relative à la partie législative du code de la consommation : les mots " et la détermination des conditions " avaient été omis, sans pour autant nuire à la portée du dispositif.

- ensuite, il introduit une notion de représentativité. Ainsi l'INAO proposera la reconnaissance des AOC après avis des syndicats de défense représentatifs intéressés. Cette mesure, comme l'a rappelé M. François Patriat en séance publique, n'interdit nullement à l'INAO de consulter les syndicats qui ne sont pas représentatifs. L'effet de cette disposition est que l'omission de leur consultation n'entachera pas de nullité l'arrêté ministériel pour vice de procédure.

Rappelons qu'avant toute reconnaissance d'une appellation d'origine contrôlée concernant des produits alimentaires autres que les vins, l'INAO organise une consultation afin de recenser les professionnels qui utilisent la même appellation pour des produits similaires et sont situés hors de l'aire géographique projetée pour l'appellation ( Décret n° 96-943 du 25 oct. 1996).

Les trois autres alinéas du paragraphe II de l'article 40 visent à permettre à l'INAO, sur la base d'un cahier des charges, de proposer aux pouvoirs publics (Ministres de l'agriculture et de la consommation), la reconnaissance des produits susceptibles de bénéficier d'une IGP.

Cette proposition regroupe 3 types d'information :

- la délimitation de l'axe géographique,

- les conditions de production,

- les conditions d'agrément de chacun des produits.

Les pouvoirs publics pourront homologuer cette proposition de reconnaissance par arrêté ministériel.

Cette procédure est identique à celle mise en oeuvre par les AOC.

Il est précisé que cette proposition de reconnaissance par l'INAO sur les produits susceptibles de bénéficier d'une IGP s'effectue sans préjudice des dispositions du chapitre III relatif aux labels et certification.

Une telle indication signifie désormais que deux procédures coexistent :

- la première, au titre de l'article L.643-2, permet à tout label ou certificat de conformité peut obtenir, comme caractéristique spécifique, l'origine géographique dès lors qu'ils sont enregistrés comme IGP conformément à l'article L.643-4 du code rural ;

- la seconde, au titre de la nouvelle rédaction de l'article L.641-6, permet à tout produit, même si ce n'est ni un label ni un certificat de conformité, d'être proposé à l'enregistrement comme IGP par l'INAO.

Dans les deux cas, la décision de reconnaissance appartient à l'autorité communautaire.

L'avant-dernier alinéa du paragraphe II ajoute que l'INAO est responsable du contrôle des conditions de production non seulement pour les AOC mais aussi pour les IGP.

Aujourd'hui, l'INAO peut opérer un contrôle de la production et de la commercialisation des produits agricoles ou alimentaires bénéficiant d'une appellation d'origine.

Le texte qui nous est présenté précise que l'INAO étendra ce contrôle des conditions de production pour les IGP, et ce quelle que soit la procédure utilisée pour sa reconnaissance. Ainsi, l'INAO contrôlera les conditions de production du label et de la certification de conformité qui ont été reconnus IGP et dont le cahier des charges a été mis au point par un organisme certificateur.

Le dernier alinéa du II de l'article 4° étend les compétences consultatives de l'INAO aux questions d'étiquetage et de présentation des produits et permet de le consulter sur toute question relative aux appellations d'origine et aux IGP.

b) Les propositions de votre commission

Votre commission vous propose tout d'abord de modifier en profondeur la rédaction de l'article L.641-6 afin de :

- supprimer le premier alinéa de cet article en raison de l'harmonisation opérée entre les articles L.641-2 et L.641-15 ;

- supprimer le deuxième alinéa qui figure dans l'article L.641-2, 6ème alinéa ;

- harmoniser sur la forme le troisième alinéa ;

- tenir compte au quatrième alinéa de la suppression de l'article L.641-15, alinéa 2 ;

- imposer au cinquième alinéa des registres pour faciliter le contrôle ;

- distinguer au septième alinéa la promotion de la défense des AOC, en raison des IGP dont il appartient à la CNLC de faire la promotion ;

- compléter cet article par des dispositions issues de l'article L.641-16.

En outre, votre commission vous propose plusieurs paragraphes supplémentaires afin d'achever l'amélioration de la rédaction de cette section 2 et de tenir compte des modifications proposées par le projet de loi :

- le paragraphe II bis prend en compte le rôle de l'INAO dans les IGP (article L.641-7) ;

- le paragraphe II ter supprime l'article L.641-14 compte tenu de l'harmonisation opérée au niveau de l'article L.641-5 du code rural. Il est remplacé par l'article L.641-22 qui se trouve à une place plus adéquate ;

- le paragraphe II quater modifie la rédaction de l'article  L.641-15 du code rural afin de prendre en compte la question de l'embouteillage. Il permettra de supprimer l'article 43 bis du projet de loi. Ce paragraphe II quater permet ensuite de supprimer :

le deuxième alinéa de l'article L.641-15 repris par le 3 ème alinéa de l'article L.641-4 et le deuxième alinéa de l'article L.641-6, qui étendent le principe à toutes les AOC ;

le troisième alinéa de l'article L.641-15, puisque le champ d'application des appellations d'origine contrôlées est désormais fixé à l'article L.641-2. Il convient seulement de réintroduire les critères de reconnaissance ici exprimés (" ainsi que celles qui, par leur qualité et leur notoriété, sont considérées par le comité national comme méritant d'être classées parmi les appellations contrôlées ") au sein de ce même article.

le quatrième alinéa, qui a épuisé tous ses effets.

le cinquième et dernier alinéa, qui figure au quatrième alinéa, sous forme étendue, de l'article L.641-3.

- le paragraphe II quinquies supprime l'article L.641-16 actuel dont le contenu se trouve couvert par l'article L.641-6. En outre, l'avant dernier alinéa de l'actuel article L.641-6 est inutile compte tenu des missions de l'INAO et le dernier alinéa est intitulé depuis longtemps et couvert par le décret de 1991.

Le nouvel article L.641-16 proposé par votre rapporteur concerne le rôle de l'INAO en matière de droits de plantation. En effet, en matière de plantations, l'OCM prévoit la compétence des Etats membres :

- en matière de répartition des droits de plantations nouvelles ;

- et de transferts des droits de replantation.

Pour appliquer ces mesures dans le secteur des appellations d'origine, l'INAO est chargé de proposer aux ministres de l'agriculture et de l'économie, par appellation ou groupe d'appellations, les contingents de plantations nouvelles et de transferts de droits de replantation ainsi que les critères de répartition de ces contingents.

Il est également chargé de l'instruction des dossiers des demandeurs par l'intermédiaire de ses 26 centres régionaux.

Afin de garantir la maîtrise du potentiel de production, il est impératif que soit reconnu le rôle primordial de l'INAO en matière de gestion des droits de plantation. La gestion des droits de plantations par appellations ou groupe d'appellations, les contingents de plantations nouvelles et de transferts de droits de replantations ainsi que les critères de répartition de ces contingents.

L'INAO est également chargé de l'instruction des dossiers des demandeurs par l'intermédiaire de ses 26 centres régionaux.

Afin de garantir la maîtrise du potentiel de production, il est impératif que soit reconnu le rôle primordial de l'INAO en matière de gestion des droits de plantation. La gestion des droits de plantation par appellations ou groupe d'appellations nécessite en effet une vision nationale. L'équilibre des différenes régions viticoles à AOC implique une harmonisation nationale des contingents et des critères.

Cette vision nationale est d'autant plus fondamentale eu égard aux singularités locales. Sachant que de nombreuses AOC s'étendent sur plusieurs départements, seule une approche nationale permet de rendre leur gestion cohérente.

- le paragraphe II sexies supprime les deux premiers alinéas de l'article L.641-17 : le premier alinéa a été introduit à l'article 10 de la loi du 6 mai 1919, par l'article 3 de la loi du 22 juillet 1927 et n'avait vocation qu'à poser des critères pour les décisions judiciaires délimitant et fixant des conditions de productions pour les appellations d'origine. Elles sont ainsi bien antérieures au décret-loi du 30 juillet 1935 qui créée les appellations d'origine contrôlées. Le législateur n'a jamais entendu contraindre le travail de l'INAO par les usages locaux, loyaux et constants. Le Conseil d'Etat l'a confirmé dans sa jurisprudence et notamment son arrêt de 1960 Lalande de Pomerol. Seul l'INAO peut décider de s'y conformer ou de s'en affranchir. Le décret-loi de 1935 ne fait jamais référence à ces usages. Il convient donc afin d'éviter toute difficulté contentieuse ultérieure d'abroger cette disposition qui aurait dû l'être dès la loi de 1973.

Le second alinéa est renvoyé et étendu à l'article L.641-3.

- le paragraphe II septies supprime l'article L.641-21 du code rural, le premier alinéa étant inutile et le second renvoyé en extension à l'article L.641-4 ;

- le paragraphe II octies supprime l'article L.641-22 qui trouve sa place à l'article L.641-14.

3. L'article L.642-1 du code rural (paragraphe III)

Le III de l'article 40 du projet de loi remplace le dernier alinéa de l'article L.642-1 est issu de l'article L.115-26-1 du code de la consommation relatif à la procédure d'enregistrement des indications géographiques protégées et des attestations de spécificité.

Dans le premier alinéa de l'article L.642-1, il est précisé que constitue une AOP et une IGP, la dénomination inscrite au registre des AOP et IGP tenu par la commission des communautés européennes.

Le deuxième alinéa indique que constitue une attestation de spécificité le nom du produit qui figure au registre des attestations de spécificité tenu par la CE.

Le troisième alinéa porte sur les appellations d'origine qui peuvent faire l'objet d'une demande en vue d'être reconnue comme AOP.

Le quatrième et dernier alinéa de l'actuel article L.642-1 souligne que la demande d'enregistrement d'une indication géographique ou d'une attestation de spécificité ne peut s'effectuer que dans le cadre des dispositions du Chapitre III relatif aux labels et à la certification. Compte tenu de la création d'une nouvelle procédure mentionnée au I de l'article 40 du projet de loi effectuée devant l'INAO, il était nécessaire d'adapter cet alinéa en conséquence et de différencier la demande d'enregistrement d'une IGP qui a lieu, soit conformément au même chapitre III, soit, dans le cadre de la section 3 du chapitre Ier.

Votre rapporteur vous propose un amendement de conséquence visant à supprimer ce paragraphe.

4. L'article L.642-2 du code rural (paragraphe IV)


Le paragraphe IV modifie la rédaction du premier alinéa de l'article L.642-2 du code rural relatif aux organismes certificateurs : cet article est issu de l'article L.115-26-2 du code de la consommation.

Les labels agricoles et les certificats de conformité sont délivrés par des organismes certificateurs agréées par l'administration, en conformité l'article L.643-5 du code rural.

L'article L.642-2 du code rural les charge en conséquence du contrôle du respect des cahiers des charges des indications géographiques protégées et des attestations de spécificité.

Rappelons que le nom d'organisme certificateur est donné à l'organisme agréé par l'Administration pour délivrer soit les labels agricoles, soit les certificats de conformité, soit les certificats de respect du mode de production biologique, soit plusieurs de ces certifications. L'organisme certificateur présente à l'Administration le dossier d'homologation du label et, lorsque cela est nécessaire, de la certification de conformité. Il délivre le logo, certifie le produit, opère les contrôles.

Dans le cas particulier des labels agricoles, l'organisme certificateur doit prévoir dans ses statuts la possibilité pour les groupements bénéficiaires de l'homologation d'un label d'être associés à son fonctionnement sans toutefois porter atteinte à son indépendance.

Toute personne physique ou morale de droit privé peut bénéficier d'un agrément comme organisme certificateur à la condition qu'elle offre les garanties nécessaires pour apprécier la qualité des produits à revêtir d'un label ou d'une certification de conformité : chambre d'agriculture, syndicat, fédération...

En toute hypothèse, il est nécessaire que la personne physique ou morale agréée comme organisme certificateur soit distincte du groupement bénéficiaire du label ou du certificat de conformité. Elle ne doit être ni producteur, ni fabricant, ni vendeur de produits de même nature que ceux revêtus d'un signe attestant de leur qualité. Plus généralement, elle doit présente toutes les garanties nécessaires pour assurer en toute indépendance le contrôle des produits revêtus d'un label ou d'une certification de conformité.

Pour éviter les distorsions de concurrence et ne pas mettre en cause sa crédibilité, l'organisme certificateur ne peut pas recevoir d'aides publiques, notamment des collectivités locales.

Tout organisme qui désire être habilité à délivrer des labels ou des certifications de conformité doit en adresser la demande aux ministres chargés de l'Agriculture, de l'Alimentation et de la Consommation. La demande est déposée au secrétariat de la Commission nationale. Elle précise le ou les produits et le ou les types de certification pour lesquels l'organisme demandeur sollicite l'agrément.

La demande est accompagnée d'un dossier permettant de vérifier que les conditions requises par l'article L.115-23-2 du Code de la consommation sont remplies. En fait, l'organisme demandeur doit répondre aux exigences d'une norme européenne, la norme EN 45011, en matière d'indépendance, d'impartialité, d'efficacité et de compétence.

Dans l'hypothèse où l'organisme certificateur doit faire appel, pour l'exécution de certaines opérations techniques, à un autre organisme, le dossier comprend les documents attestant que l'organisme demandeur s'est assuré que le prestataire de service présente les mêmes garanties de compétence technique et d'impartialité que lui-même. Le dossier indique la nature des opérations confiées à cet organisme.

L'agrément de l'organisme certificateur est accordé après un examen de la structure, notamment du conseil de certification, et des modalités de fonctionnement du demandeur. Il est prononcé pour une durée de trois ans par arrêté des ministres chargés de l'agriculture, de l'alimentation et de la consommation.

Le cas échéant, l'agrément pour trois ans n'est accordé qu'après une période probatoire d'un an ; cette période probatoire ne peut être prolongée qu'une fois.

L'organisme fédérateur agréé sur la base de la norme européenne peut contrôler et certifier des produits venant d'un Etat membre de l'Union européenne ou d'un pays tiers sur la base de cahiers des charges validés par les pouvoirs publics français, de normes ou de règles communautaires ou internationales.

L'organisme certificateur agréé tient à la disposition des ministres compétents les documents permettant de contrôler son fonctionnement, la régularité de ses activités et l'efficacité de ses contrôles. Il leur communique toute modification des conditions d'exercice de ses activités, telles qu'elles sont énoncées dans sa demande d'agrément. Si ces modifications sont importantes, le dépôt d'une nouvelle demande d'agrément peut être nécessaire. Chaque année l'organisme certificateur présente aux ministres intéressés un rapport d'activité comprenant des informations économiques sur les produits certifiés. Ce rapport est également adressé à la Commission nationale.

L'organisme certificateur tient à la disposition du public les documents décrivant les systèmes de certification et, pour chacun de ceux-ci, la liste des groupements ou entreprises, bénéficiaires et la liste des produits ayant obtenu une certification ainsi que la nature de la certification délivrée. Il ne peut rendre publiques les informations confidentielles dont il pourrait avoir connaissance à l'occasion de ses activités.

L'agrément peut être suspendu à tout moment, pour tout ou partie des produits, si l'organisme certificateur n'a pas délivré de certificat ou de label pour le ou les produits concernés pendant une période d'au moins un an.

Le retrait d'agrément peut être prononcé à tout moment, pour tout ou partie des produits, en cas d'inobservation des dispositions légales et réglementaires.

Le retrait ou la suspension est prononcée dans les formes prévues pour l'agrément. La décision de suspension peut être levée à tout moment sur demande de l'organisme certificateur.

La mission de contrôler les conditions de production des IGP étant confiée à l'INAO, le IV du présent article en tire les conséquences en retirant aux organismes certificateurs la charge de contrôler les cahiers des charges des IGP.

Votre rapporteur vous propose de supprimer ce paragraphe compte tenu de la dispariton de l'IGP comme signe autonome d'identification.

Votre commission vous propose d'adopter l'ensemble de cet article ainsi modifié.

Article 40 bis -
(Article L.112-1 (nouveau) du code de la consommation) -

Etiquetage des produits bénéficiant d'une appellation d'origine contrôlée

Cet article vise à insérer dans le code de la consommation un nouvel article L.112-1 précisant que l'étiquetage d'un produit bénéficiant d'une AOC fromagère doit comporter les nom et adresse du fabricant.

1. Le droit en vigueur


Les règles générales

Les produits offerts à la vente doivent être présentés de façon à permettre une bonne information du consommateur. Cette exigence qui se fonde sur les principes d'honnêteté et de moralité gouvernant les relations commerciales s'applique à toutes les ventes mais elle s'impose encore plus lorsqu'il s'agit des produits agricoles et alimentaires. La consommation d'une nourriture saine et appropriée est, en effet, la condition première de la préservation de la santé de l'homme 42( * ) .

Il faut comprendre par présentation des produits agricoles et alimentaires les mentions, indications, marques de commerce ou de fabrique, images ou signes se rapportant à un produit et figurant sur tout emballage, document, écriteau, étiquette, bague ou collerette accompagnant ou se référant à ce produit.

Le vendeur doit faire connaître ses conditions de vente en évitant de tromper l'acheteur par une présentation insuffisante ou inexacte.

Pour prévenir les erreurs d'appréciation des consommateurs ou les fraudes des vendeurs, les pouvoirs publics imposent aux professionnels certaines obligations d'étiquetage. Toutefois, seuls les prix font l'objet d'une obligation générale : ils doivent être indiqués sur tous les produits offerts à la vente. Les autres mentions, en revanche, ne sont obligatoires qu'en application des dispositions propres à chaque catégorie de produits.

En l'absence de disposition impérative, le commerçant conserve toute liberté pour présenter ses produits, sous la condition qu'il s'abstienne de toute fraude. La question s'est cependant posée de savoir s'il pouvait dépasser le formalisme réglementaire et fournir des indications plus complètes que celles requises par les textes.

L'emploi de la langue française est obligatoire pour toutes les opérations relatives à la vente des biens et services. Tout manquement à cette obligation dans la désignation, l'offre ou la présentation des produits ou services est punissable d'amende.

Les règles communes à toutes les denrées alimentaires

La présentation des denrées destinées à l'alimentation de l'homme a fait l'objet de la directive CE n° 79-112 du Conseil du 18 décembre 1979, plusieurs fois modifiée et complétée. En application de cette directive, les règles de présentation des produits ont été, en France, définies par des dispositions réglementaires.

Ces dispositions concernent en principe tous les produits alimentaires. Elles sont cependant totalement ou partiellement exclues pour ceux qui font l'objet d'une réglementation communautaire de marchés :

- pour les vins, les règles d'étiquetage et de présentation sont définies par les règlements CE n° 822-87 du 16 mars 1987 du Conseil et n° 3201-90 de la Commission du 16 octobre 1990 modifiés ;

- pour les oeufs, les normes de commercialisation et règles de présentation fixées par le règlement CE n° 1907-90 du Conseil du 26 juin 1990 et n° 1274-91 de la Commission du 15 mai 1991 modifiés ;

- pour les fruits et légumes, les conditions générales de commercialisation fixées par le règlement CE n° 2200-96 du Conseil du 28 octobre 1996.

En ce qui concerne ces deux dernières catégories de produits, les dispositions du décret relatives à la prévention des confusions leur sont applicables dans la mesure où elles ne résultent pas déjà des règlements communautaires.

Les denrées alimentaires sont vendues en vrac ou préemballées.

Les denrées vendues en vrac ou non préemballées sont celles qui n'ont fait l'objet d'aucun conditionnement préalable ; elles sont emballées sur les lieux de vente à la demande de l'acheteur. Leur présentation ne doit pas prêter à confusion. En outre, avec la mention du prix, certaines indications précisant la nature des produits offerts sont exigées.

Les denrées préemballées sont celles qui ont été conditionnées avant d'être offertes à la vente. Leur présentation doit non seulement éviter toute confusion mais encore comporter de nombreuses mentions indispensables à l'information des acheteurs.

Quelle que soit la présentation d'une denrée, en vrac ou préemballée, il convient d'éviter que l'étiquetage et les modalités selon lesquelles il est réalisé ne créent une confusion dans l'esprit de l'acheteur sur les caractéristiques de la denrée offerte à la vente. Toute confusion doit, plus particulièrement, être écartée concernant la nature, l'identité, les qualités, la composition, la quantité, la durabilité, la conservation, l'origine ou la provenance, le mode de fabrication ou d'obtention de la denrée mise en vente.

L'étiquetage ne doit notamment comporter aucune mention tendant à faire croire que la denrée bénéficie de caractéristiques particulières alors que toutes les denrées alimentaires similaires possèdent ces mêmes caractéristiques.

L'étiquetage ne saurait davantage fait état de propriétés de prévention, de traitement et de guérison d'une maladie. Il peut, toutefois, être dérogé à cette interdiction pour les denrées, destinées à une alimentation particulière et les eaux minérales.

Pour l'application de ces dispositions, l'étiquetage est compris dans un sens large : en ce qui concerne les vins, il comprend notamment les incrustations de la bouteille et les décors publicitaires.

Les denrées alimentaires présentées non préemballées doivent être offertes au consommateur munies sur elles-mêmes ou à proximité immédiate, sans risque de confusion, d'une affiche, d'un écriteau ou de tout autre moyen approprié comportant la dénomination de vente.

L'indication du lot de fabrication des denrées alimentaires non préemballées doit également figurer sur l'emballage ou le récipient les contenant ou à défaut sur les documents commerciaux s'y référant. Certaine denrées alimentaires non préemballées sont toutefois dispensées de cette indication.

Sous réserve des dispositions propres à chaque denrée ou catégorie de denrées, l'étiquetage des produits alimentaires préemballées doit comporter les mentions suivantes :

1° La dénomination de vente ;

2° La liste des ingrédients ;

3° La quantité nette ;

4° La date jusqu'à laquelle la denrée conserve ses propriétés spécifiques ainsi que l'indication des conditions particulières de conservation ;

5° Le nom ou la raison sociale et l'adresse du fabricant ou d'un vendeur établi à l'intérieur de la Communauté ;

6° Le lieu d'origine ou de provenance, chaque fois que l'omission de cette mention est de nature à créer une confusion dans l'esprit de l'acheteur sur l'origine ou la provenance réelle de la denrée alimentaire ;

7° Le mode d'emploi chaque fois que son omission ne permet pas de faire un message approprié de la denrée alimentaire ainsi que, le cas échéant, les conditions particulières d'utilisation, notamment les précautions d'emploi ;

8 °Le cas échéant, les autres mentions obligatoires prévues par les dispositions réglementaires à certaines denrées alimentaires ;

9° Le titre alcoométrique volumique acquis pour les boissons tirant plus de 1,2 % d'alcool en volume ;

10° L'indication du lot de fabrication.

La commercialisation de la plupart des denrées alimentaires fait l'objet d'une réglementation spécifique. L'étiquetage et la présentation des denrées sont notamment soumis à des dispositions précises, souvent modifiées, pour tenir compte de l'évolution des techniques de production et des conditions de vente.

L'utilisation de mentions spécifiques

La présentation des produits ayant droit à des mentions (labels, AOC...), fait l'objet d'exigences particulières ; en plus des règles générales, elle est soumise à des règles spécifiques.

Les produits bénéficiant d'un label ou d'une reconnaissance " agriculture biologique " doivent comporter, dans leur étiquetage, les signes correspondant à la qualité qui leur est accordée : logo, coordonnées de l'organisme certificateur, caractéristiques certifiées. Les conditions de présentation de chaque signe sont définies par les textes qui en régissent l'utilisation.

2. Le dispositif proposé par l'article 40 bis

Si plusieurs décrets encadrent l'étiquetage des produits afin de garantir la clarté et la précision de l'étiquetage ou à faire figurer certaines mentions obligatoires sur les denrées alimentaires préemballées, le législateur n'est jamais intervenu pour fixer des règles sur les modes de présentation des biens vendus aux consommateurs ni sur les inscriptions devant figurer sur les étiquettes.

L'article qui vous est proposé tend à imposer pour les produits bénéficiant d'une AOC fromagère, le nom et l'adresse du fabricant.

Soulignons que la disposition adoptée initialement par la commission de la production et des échanges concernait tous les produits.

Le ministre de l'agriculture et de la pêche ayant exprimé, à cet égard, ses réserves en séance publique, la disposition votée par l'Assemblée nationale ne concerne plus que les seules AOC fromagères.

Votre rapporteur est conscient des difficultés de la profession et des problèmes posés par l'étiquetage, notamment en matière d'organisme génétiquement modifié. Il se demande néanmoins s'il est opportun que le législateur impose une telle obligation.

En outre, la notion de fabricant n'est pas adéquate. Enfin, la limitation d'un tel dispositif aux AOC fromagères est beaucoup trop réductrice.

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 40 ter -

Création d'un logo " appellation d'origine contrôlée "

Cet article tend à insérer, d'une part, un article L.112-2 dans la code de la consommation et, d'autre part, un article L.641-1-1 dans le code rural. Ces deux nouvelles dispositions créent un nouveau logo " appellation d'origine contrôlée ".

L'article 40 ter tend à créer deux nouveaux articles, le premier dans le code de la consommation, le second dans le code rural, leur rédaction étant identique.

Il est institué un nouveau signe d'identification usuel officiel, dénommé logo " Appellation d'origine contrôlée " au sens du 2 l'article 6 ter de la convention de Paris du 20 mars 1983 pour la protection de la propriété industrielle qui interdit " d'utiliser à titre de marque les signes, poinçons officiels de contrôle et de garantie adoptés par les Etats des pays de l'Union ".

En effet, la convention d'Union de Paris, révisée en dernier lieu à Stockholm le 14 juillet 1967 s'applique à la propriété industrielle dans son ensemble. La protection des appellations d'origine entre donc dans son champ d'application.

Ce signe étant déposé à l'Office national de la propriété intellectuelle sera assuré d'une large protection sur le plan international. Il a pour ambition de devenir un élément fédérateur en termes d'affichage, mais aussi de communication pour les produits concernés.

Toute présentation des produits agricoles et des denrées alimentaires bénéficiant d'une AOC nécessite l'utilisation ce logo.

Le secteur des vins est néanmoins exclu de cette obligation. Il a été considéré que le vin était soumis à une réglementation européenne en matière d'étiquetage qui énonce limitativement, avec une extrême précision, toutes les mentions qui figurent sur l'étiquette, que ce soit à titre obligatoire ou facultatif. Par conséquent, la mention obligatoire d'un logo AOC sur les vins ne pourrait apporter que confusion dans l'esprit des consommateurs. Le système AOC consiste à garantir, au moyen de différents instruments (définition des conditions de production, procédures d'agrément des produits...) que chaque AOC est " typique " Il convient, dès lors, de mettre en avant chaque appellation et non le principe administratif des appellations. Ce sont les hommes et les produits qui ont créé l'appellation et fait sa notoriété, son système administratif d'encadrement (l'AOC) ne doit pas devenir plus important qu'eux. Il se pose en outre, dans ce secteur, de véritables difficultés de gestion d'un tel logo compte tenu des stocks anciens.

Il est ajouté qu'un décret en Conseil d'Etat fixe le modèle du logo et ses modalités d'utilisation après avis de l'INAO.

Votre rapporteur vous propose un amendement tendant à prévoir la consultation de l'INAO lors de l'élaboration du décret. Un logo ayant été adopté par les comités nationaux, il est important que ce soit ce dernier qui soit proposé au Gouvernement.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 40 quater -
(section 6 (nouvelle) du chapitre I du titre IV du livre VI (nouveau) du code rural) -

Statut des syndicats de producteurs de produits d'appellation d'origine contrôlée

Cet article a pour objet de donner un statut législatif aux syndicats ou associations de producteurs d'un produit d'appellation d'origine contrôlée reconnus par l'autorité administrative.

L'article 40 quater tend à insérer une nouvelle section 6 au chapitre Ier (les appellations d'origine) du titre IV du livre VI du code rural.

Cette section est composée d'un unique article, l'article L.641-25, regroupant deux paragraphes.

Le paragraphe I concerne tous les syndicats et associations de producteurs d'un produit AOC ainsi que leurs groupements. Ceux-ci peuvent ainsi faire l'objet d'une reconnaissance, par l'autorité administrative, en tant qu'organisme de défense et de gestion sur une zone de production pour un produit ou groupe de produits.

Il est en outre précisé qu'une association " loi de 1901 " peut être reconnue en tant qu'organisme de défense et de gestion, si :

- un syndicat, une association ou un groupement en a fait la demande,

- l'association créée en tant que tel a été constituée pour gérer et défendre sur une zone de production un produit ou un groupe de produits bénéficiant d'une AOC et remplit donc les missions précisées dans le paragraphe II.

Rappelons que dès la reconnaissance des appellations d'origine contrôlée en 1935, les syndicats professionnels de défense des appellations d'origine en France et à l'étranger ont été des partenaires à part entière de l'INAO.

Les syndicats d'AOC ne disposent actuellement d'aucune base juridique particulière précisant les conditions d'exercice de leur mission et prévoyant le niveau de représentativité souhaitable pour intervenir dans la consultation organisée par l'INAO.

Hors secteur viticole, les syndicats de producteurs sont par nature interprofessionnels ; la reconnaissance proposée par l'article 33 du présent projet de loi devrait donner les bases légales d'une action constructive pour l'avenir des AOC non-viticoles.

En revanche, les syndicats de producteurs de produits viticoles à AOC, par nature non interprofessionnels, ont besoin d'une base légale pour pouvoir exercer leurs prérogatives, qui ne se superposent pas à celles des interprofessions viticoles. Dans le secteur viticole, les syndicats de producteurs contribuent à la reconnaissance des AOC et les organisations interprofessionnelles à la gestion des marchés.

- le syndicat agit au niveau de la connaissance et du suivi du potentiel de production et de ses mécanismes d'évolution. Les syndicats sont amenés à collecter et traiter les informations données par les producteurs dans leurs différentes déclarations afin d'avoir une connaissance aussi minutieuse que possible du vignoble et de l'évolution du potentiel de production des appellations,

- il oeuvre à la maîtrise de l'évolution de ce potentiel, sous le contrôle de l'Etat. Les syndicats disposent de préorgatives en matière de gestion du potentiel de production. En effet, ils proposent à l'INAO la détermination d'un portefeuille de droits de plantation, les critères de répartition et l'attribution de ces droits ;

- le syndicat propose la définition des règles de production. Les syndicats sont amenés à proposer à l'INAO des modifications de certains des critères de production de leur appellation : encépagement ou rendement par exemple ;

- le syndicat est garant de la protection du nom, de l'image, de la qualité, des conditions de production et de l'aire de l'appellation d'origine. Notamment les syndicats assurent la protection des vignobles classés contre toute amputation ou dégradation dont ils pourraient faire l'objet ;

- le syndicat participe à la reconnaissance et à la valorisation des appellations. Il peut notamment inciter les viticulteurs à rechercher la meilleure qualité possible pour leurs produits. Cette incitation passe par le conseil et l'assistance des viticulteurs, délivrés par les responsables et techniciens des syndicats, au cours des phases de production, d'élaboration et de conservation des produits.

Le paragraphe II tend à définir les missions des syndicats ou associations ou groupements dans le secteur viticole à appellation d'origine contrôlée.

Cette définition n'interfère pas avec celles des interprofessions et ne leur confère aucun droit de regard sur le fonctionnement des exploitations.

Les missions confiées à ces organismes, conformément à l'intérêt général sont les suivantes :

" - connaissance et suivi du potentiel global de production et de ses mécanismes d'évolution ;

" - maîtrise de l'évolution de ce potentiel, sous le contrôle de l'Etat ;

" - propositions de définition des règles de production, conformément aux dispositions de l'article L.641-15 ;

" - protection du nom, de l'image, de la qualité, des conditions de production et de l'aire de l'appellation d'origine, conformément aux dispositions des articles L.115-8 du code de la consommation et L.641-11 du présent code ;

" - participation à la reconnaissance et à la valorisation des appellations ".


Votre rapporteur s'interroge sur les possibilités offertes aux syndicats d'autres secteurs.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification

Article 41 -
(Articles L.115-16 et L.115-8 du code de la consommation article L.642-3 du code rural) -

Présentation trompeuse d'une appellation d'origine contrôlée et poursuite des infractions

Cet article vise à réprimer la présentation trompeuse d'une AOC et complète la poursuite des infractions en matière d'AOC, d'AOP, d'IGP et d'attestation de spécificité.

L'article 41 est composé de trois paragraphes.

Le paragraphe I complète l'article L.115-16 du code de la consommation.

Le premier alinéa de l'article L.115-16 prévoit que sont punis de 250.000 francs d'amende et de deux ans d'emprisonnement -peines applicables en cas de tromperie selon l'article L.213-1 du code de la consommation- les délits d'opposition frauduleuse.

Un premier délit est constitué lorsqu'une personne fait d'apposer, fait apparaître, par addition, retranchement ou par une altération quelconque, sur des produits matériels ou fabriqués une appellation d'origine dès lors que cela est inexact. Ce délit " d'apposition frauduleuse " est constitué seulement si l'appellation inexacte est portée sur le produit ou sur le récipient qui le contient. Un emballage ou une présentation analogue ne suffit pas à constituer un délit.

Constitue un second délit d'opposition frauduleuse, le fait d'utiliser l'appellation inexacte à l'occasion de la vente ou de la mise en vente d'un produit. Ce délit ne réside pas dans la mise en vente d'un produit.

Le paragraphe I punit des mêmes peines la présentation faisant croire ou de nature à faire croire qu'un produit bénéficie d'une AOC, même en l'absence de toute intention frauduleuse.

Votre rapporteur considère cette mesure nécessaire car, malgré l'absence de visées frauduleuses, cet acte risque en effet d'induire en erreur le consommateur.

Le paragraphe II complète l'article L.115-18 du code de la consommation.

l'article L.115-18, dans sa version actuelle, est composée de deux alinéas. Le premier alinéa précise que les peines prévues à l'article L.115-16 et les dispositions de l'article L.115-17 qui permet aux personnes, syndicats et associations de gestion et de défense des AOC de se constituer partie civile -s'appliquent en cas d'utilisation des mentions interdites en vertu des articles L.115-3 et L.115-9- création relative à l'indication pouvant provoquer une confusion sur l'origine pour des produits autres que ceux bénéficiant de l'appellation d'origine ou sur les emballages qui les contiennent.

Le second alinéa indique que les peines énumérées à l'article L.115-16 sont applicables en cas d'utilisation de toute mention interdite en vertu du quatrième alinéa de l'article L.115-5. Rappelons que ce quatrième alinéa précise que le nom géographique qui constitue l'appellation d'origine ou toute autre mention l'évoquant ne peuvent pas être employés par aucun produit similaire.

Cette procédure pénale bénéficie donc aux seules AOC.

Le paragraphe II de l'article 41 complète l'article L.115-18 en étendant le bénéfice des dispositions de l'article L.115-25 aux produits bénéficiant d'une appellation d'origine.

Actuellement, l'article L.115-25 prévoit l'application des dispositions relatives à la recherche et à la constatation des infractions aux labels et certifications des produits alimentaires et agricoles. Cette procédure de recherche et de constatation a été mise en place par la loi du 1er août 1905 sur les fraudes et falsifications en matière de produits et services.

Rappelons que cette procédure repose sur l'attribution de pouvoirs d'enquête étendus à l'administration, la définition de procédures de recherche et de constatation des infractions adaptées aux situations concrètes et l'existence d'une panoplie de mesures conservatoires, d'urgence, d'exécution et de publicité permettant d'adapter les décisions de justice aux différents cas de figure.

Le II de l'article 41 du projet de loi fait donc bénéficier aux appellations d'origine de cette procédure, alors que les indications géographiques protégées en bénéficient actuellement du fait qu'elles sont liées à un label agricole ou une certification de conformité.

Le paragraphe III modifie en conséquence l'article L.642-3 du code rural.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 41 bis -
(Article L.642-4 du code rural) -

Utilisation de l'indication de provenance dans les dénominations de vente

Cet article propose une nouvelle rédaction pour l'article L.642-4 du code rural, relatif à l'utilisation de l'indication de provenance, afin de mieux encadrer l'utilisation de cette mention dans les dénominations de vente.

1. Le droit en vigueur


L'article L.642-2 est actuellement composé de deux alinéas : le premier alinéa précise que " l'utilisation d'indication d'origine ou de provenance ne doit pas être susceptible d'induire le consommateur en erreur sur les caractéristiques du produit, ni de détourner ou d'affaiblir la notoriété d'une dénomination enregistrée comme indication géographique protégée ou comme attestation de spécificité ".

Le second alinéa prévoit qu'un décret en Conseil d'Etat fixe les modalités d'application du premier alinéa.

Rappelons que l'indication de provenance est une notion plus générale et moins affinée que l'appellation d'origine. L'origine géographique à laquelle elle fait référence peut être utilisée pour tous les produits provenant de la région ainsi désignée, quels que soient les moyens et techniques de fabrication utilisés. C'est ainsi que la Cour de cassation a pu décider que la dénomination " Beurre de Surgères " constitue une indication de provenance dès lors qu'elle est mise à la disposition de tous les producteurs qui se tiennent dans cette aire agricole.

En France, les deux notions paraissent toutefois se rapprocher dans la mesure où, dans certains secteurs d'activité, le droit à une indication de provenance est soumis à des conditions particulières. Ces conditions sont cependant moins strictes que celles imposées pour la reconnaissance d'une appellation d'origine.

Tout producteur d'une région donnée peut utiliser le nom de cette région pour faire connaître l'origine géographique de ses produits. Il suffit que cette origine géographique soit exacte, c'est-à-dire que les produits proviennent effectivement de la région indiquée. La fausse indication d'origine est sanctionnée pénalement.

En aucun cas, l'utilisation d'une indication de provenance ne doit être susceptible d'induire en erreur sur les caractéristiques d'un produit ou d'affaiblir la notoriété d'une dénomination enregistrée comme indication géographique protégée ou comme attestation de spécificité.

Or, le développement de l'utilisation des mentions géographiques dans les dénominations de vente des produits induit parfois le consommateur en erreur sur les caractéristiques du produit.

2. Le dispositif proposé

Le texte proposé pour l'article L.642-41 issu de l'article L.115-26-4 du code de la consommation est constitué de quatre paragraphes.

Le paragraphe I reprend en termes différents l'interdiction mentionnée au premier alinéa de l'article L.642-4. Ainsi, l'utilisation d'une indication d'origine ou de provenance ne doit pas :

induire le consommateur en erreur sur les caractéristiques du produit, de détourner ou d'affaiblir la notoriété d'une dénomination reconnue comme AOC, IGP ou attestation de spécificité ;

porter atteinte au caractère spécifique de la protection réservée à ces signes d'identification notamment par l'utilisation abusive d'une mention géographique.

Ce premier alinéa apporte plusieurs innovations :

- tout d'abord, la notoriété de l'AOC est prise en compte au même titre que celle de l'IGP ou de l'attestation de spécificité ;

- par ailleurs, il est indiqué que l'utilisation abusive d'indications géographiques, dans une dénomination de vente, ne doit pas porter atteinte au caractère spécifique des réservations de vocabulaire communautaire.

Ainsi, pour les produits ne bénéficiant ni d'une AOC ni d'une IGP, l'utilisation d'une indication d'origine ou de provenance doit s'accompagner d'une information sur la nature de l'opération liée à cette indication qui doit être précisée, dans tous les cas où cela est nécessaire à la bonne information du consommateur. Cette disposition n'est cependant pas applicable à certains produits viti-vinicoles.

Enfin, l'utilisateur de l'indication d'origine ou de provenance doit réunir deux conditions :

- être en mesure de justifier cette utilisation ;

- présenter ces éléments de justifications à tout moment et pouvoir les présenter aux agents compétents.

Le dernier alinéa du I prévoit que l'utilisation de l'indication de provenance ou d'origine est encadrée par décret en Conseil d'Etat.

Le paragraphe II constitue une dérogation par rapport au premier paragraphe. En effet, il est indiqué qu'un décret en Conseil d'Etat définit les conditions dans lesquelles un label agricole ou une certification de conformité peut comporter une insertion géographique et les modalités de l'information des consommateurs.

Cette dérogation est néanmoins réservée exclusivement aux produits issus de la pêche maritime, qui ne peuvent pas, par nature, être " inféodés " à une zone géographique. C'est pourquoi ils ne peuvent pas répondre aux critères des IGP ou des AOC définis pour les autres produits agricoles.

Il convient d'ajouter que cette dérogation n'est valable que si la mention géographique utilisée n'est pas enregistrée comme IGP ou AOC.

Votre rapporteur vous propose un amendement permettant de réintroduire -celles-ci figurant en effet dans l'avant projet de loi du Gouvernement- les dispositions prévoyant la possibilité d'emploi d'une mention géographique qui n'est pas une IGP sur les produits sous label ou avec certificat de conformité.

Cette disposition est nécessaire, car l'interdiction d'un nom géographique met les produits sous label et certification de conformité :


- en distorsion de concurrence avec les produits courants qui peuvent sans contraire particulière utiliser un terme géographique sur leur étiquetage ou dans leur marque,

- en concurrence déloyale selon que l'entreprise comporte ou non une mention géographique dans sa marque ou dénomination (marque Le Gall sur un beurre Label Rouge, impossibilité de mettre la marque Paysan Breton),

- en porte à faux avec les réglementations nationales (viande bovine) ou communautaires (fruits et légumes) qui rendent obligatoire l'indication de provenance.

Le paragraphe III complète le premier alinéa de l'article L.643-5 issu de l'article L.115-23-2 du code de la consommation en rendant nécessaire, pour les organismes certificateurs, l'accréditation par une instance reconnue par l'autorité administrative.

Le règlement CEE n° 2091/92 du 24 juin 1991 relatif au mode de production biologique, le règlement CEE n° 2081/92 du 14 juillet 1992 relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d'origine et le règlement CEE n° 2082/92 du 14 juillet 1992 relatif aux attestations de spécificité disposent que ces organismes certificateurs doivent être conformes aux exigences de la norme EN 45011 à compter du 31 décembre 1998.

En France, les pouvoirs publics et les acteurs économiques et sociaux ont créé le Comité français d'accréditation (COFRAC) dont la mission est d'assurer l'accréditation des organismes français, c'est-à-dire la vérification de leur conformité aux normes de la série 45000 et de faire reconnaître ces accréditations au plan international dans le cadre d'accords de reconnaissance mutuelle.

La modification du paragraphe III de l'article a aussi pour but de se conformer à la réglementation européenne en rendant l'accréditation par le COFRAC obligatoire, transférant aussi cette compétence d'accréditation de la Commission nationale des labels et certifications (CNCL) au COFRAC.

Votre rapporteur se félicite d'une telle mise en conformité, qui ne peut que renforcer le poids des labels et certifications de conformité.

Le paragraphe IV crée la possibilité de constituer des groupements d'intérêt public pour développer et promouvoir des produits agricoles et agroalimentaires. Cette possibilité sera exploitée dans le secteur des produits issus de l'agriculture biologique. En effet, pour assurer un développement harmonieux de cette agriculture, il importe de créer une structure souple, efficace, associant plusieurs ministères, des organismes de droit public et des organismes de droit privé. La formule du groupement d'intérêt public paraît adaptée tant sur le plan juridique, parce qu'elle permet d'institutionnaliser un partenariat avec les pouvoirs publics et les acteurs de l'agriculture biologique, que sur le plan opérationnel.

La création de ces GIP ne doit pas néanmoins empiéter sur la compétence des offices d'intervention mentionnés aux articles L.621-1, L.621-2 et L.621-3 du code rural.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 42 -
(Articles L.644-2, L.644-3 et L.644-4 du code rural) -

Appellation montagne

Cet article propose une nouvelle rédaction des articles fixant le régime de l'identification des produits de montagne.

Les articles L.644-1 à L.644-4 constituent le chapitre IV (les produits de montagne) du titre IV relatif à la valorisation des produits agricoles ou alimentaires. Ces articles sont issus de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985, relative au développement et à la protection de la montagne.

1. Le droit en vigueur

A titre liminaire, l'article L.644-1 indiquent qu'un grand nombre d'organismes publics (offices, notamment) doivent concourir à l'élaboration de programmes spécifiques aux productions agricoles de montagne et à la promotion de produits de qualité, notamment par le développement des procédures de certification et d'appellation.

L'article L.644-2 indique que le terme " montagne " et les références spécifiques aux zones de montagne au sens de l'article 3 de la loi n° 85-30 précitée (telles que les noms d'un massif, d'un sommet, ...) ne peuvent pas être utilisées pour les denrées alimentaires autres que les vins et les produits agricoles non alimentaires et non transformés, sauf autorisation administrative.

L'article L.644-3 précise qu'un décret en Conseil d'Etat fixe les conditions dans lesquelles cette autorisation est délivrée. Ce décret peut, en outre, indiquer les conditions insérées dans les cahiers des charges, comme par exemple les techniques et le lieu de fabrication et la provenance des matières premières.

L'article L.644-4 souligne que ces dispositions relatives aux produits de montagne ne portent pas atteinte à l'article L.641-6 relatif à la protection des appellations d'origine ni à l'article L.642-4 relatif à l'utilisation des indications géographiques.

2. L'arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes du 7 mai 1997

La Cour de cassation française a posé à la Cour de justice des communautés européennes, en 1994, en vertu de l'article 177 du traité CE, une question préjudicielle relative à l'interprétation de l'article 2 du règlement (CEE) n° 2081/92 du Conseil, du 14 juillet 1992 relatif à la protection des indications géographiques et des appellations d'origine des produits agricoles et des denrées alimentaires et des articles 30 et 36 du traité CE.

Cette question a été soulevée dans le cadre de poursuites pénales exercées à l'encontre de gérants de sociétés, et sur le fondement du chef d'étiquetages de nature à induire le consommateur en erreur sur la qualité ou la provenance de produits.

Ces gérants, ressortissants français, gérants de sociétés établies à Lacaune, dans le départements du Tarn fabriquent et commercialisent des produits de salaison. Ils ont été poursuivis pour avoir commercialisé, en 1991, de la charcuterie sous un étiquetage faisant mention des dénomination " montagne " ou " Monts de Lacaune ", alors qu'ils n'avaient pas reçu, pour ces produits, l'autorisation d'employer les mentions spécifiques aux zones de montagne requise par l'article 34 de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1985, relative au développement et à la protection de la montagne, et le décret n° 88-194 du 26 février 1988, fixant les conditions d'utilisation pour les produits agricoles et alimentaires de l'indication de provenance " montagne ".

Par jugement du 26 mai 1992, le tribunal de police de Castres a relaxé les prévenus des fins de la poursuite, estimant que la réglementation relative à l'indication de provenance " montagne " était contraire au principe de la libre circulation des marchandises prévu par le traité CEE, et qu'elle ne pouvait être appliquée même aux producteurs nationaux, en raison d'un risque de discrimination à rebours.

Sur appel du ministère public, la cour d'appel de Toulouse a infirmé les jugements du tribunal de police de Castres et a déclaré les prévenus coupables. Ils ont été condamnés à différentes amendes. La cour d'appel de Toulouse a considéré que les dispositions en cause, qui réservaient l'utilisation de l'indication de provenance " montagne " à certains produits nationaux et visaient à assurer la sauvegarde des intérêts des producteurs contre la concurrence déloyale ainsi que celle des consommateurs contre les indications susceptibles de les induire en erreur, n'étaient pas, malgré la différence de traitement qui en résulte entre produits nationaux et produits importés, de nature à entraver les importations.

Les prévenus se sont pourvus en cassation contre ces arrêts. Ils ont notamment fait valoir que les dispositions en cause, du fait qu'elles subordonnent la mise en vente d'un produit à une autorisation administrative préalable, constituent des mesures d'effet équivalant à des restrictions quantitatives au commerce entre Etats-membres contraires aux articles 30 et 36 du traité.

Dans ses décisions de renvoi, la Cour de cassation observe, d'une part, que les textes pertinents de la loi n° 85-30 et du décret n° 88-194 prévoient que la délimitation des aires de montagne s'étend aux zones montagneuses, aux zones présentant une certaine déclivité et aux zones des départements d'outre-mer situées au-dessus de 100 mètres, et qu'ils comportent d'importantes dérogations à l'obligation de localisation du processus de production, en admettant notamment que la matière première entrant dans la composition du produit ne provienne pas de l'aire géographique ou que le produit n'y soit pas totalement fabriqué.

D'autre part, elle renvoie au règlement n° 2081/92 et relève que celui-ci, entré en vigueur le 26 juillet 1993, limite la protection des indications de provenance aux seuls produits originaires d'une région délimitée, dont une qualité déterminée ou une autre caractéristique peut être attribuée à l'origine géographique et dont la production a lieu sur place, et organise une procédure particulière d'agrément communautaire des dénominations existantes.

Estimant que se pose, par suite, la question de la compatibilité de la loi n° 85-30 et du décret n° 88-194 avec les dispositions, apparemment plus restrictives, du règlement n° 2081/92, la Cour de cassation a décidé de surseoir à statuer et de poser à la Cour la question préjudicielle suivante :

" Les dispositions combinées des articles 30 et 36 du traité CE et 2 du règlement (CEE) n° 2081/92 du conseil, du 14 juillet 1992, s'opposent-elle ou non à l'application d'une législation nationale comme celle issue de la loi n° 85-30 du 9 janvier 1995 et de son décret d'application n° 88-194 du 26 février 1988 ? "

Pour répondre à la question du juge de renvoi, la Cour de justice des communautés européennes a estimé qu'il convenait d'abord de s'interroger sur l'interprétation du règlement n° 2081/92 qui, quoique entré en vigueur après les faits à l'origine des poursuites au principal, pourrait avoir une incidence sur leur issue en application du principe connu du droit national en cause de la rétroactivité de la loi pénale la plus favorable. Si, au terme de ce premier examen, il apparaît que ce règlement ne s'oppose pas à l'application d'une réglementation nationale telles que celles en cause dans le litige, il conviendra de vérifier s'il en va de même pour les articles 30 et 36 du traité.

La loi de 1985 et la réglementation communautaire

Selon la Cour de justice des communautés européennes : " il y a lieu de constater qu'une réglementation nationale telle que celle en cause dans le litige, qui fixe des conditions d'utilisation pour les produits agricoles et alimentaires de la dénomination " montagne ", ne peut être considérée comme couvrant une appellation d'origine ou une indication géographique au sens du règlement n° 2081/92. En effet, la dénomination " montagne " revêt un caractère tout à fait général qui transcende les frontières nationales, alors que, selon l'article 2 du règlement n° 2081/92, un lien direct doit exister entre la qualité ou les caractéristiques du produit et son origine géographique spécifique 43( * ) .

Plus généralement, la dénomination " montagne " ne constitue pas davantage une indication de provenance, telle que cette notion a été définie par la Cour dans sa jurisprudence relative aux articles 30 et 36 du traité. En effet, selon celle-ci, une indication de provenance est destinée à informer le consommateur que le produit qui en est revêtu provient d'un lieu, d'une région ou d'un pays déterminé ".


Dans ces circonstances, il convient de constater que, comme l'ont relevé le Gouvernement français et la Commission, une réglementation nationale, comme celle en cause dans les litiges au principal, qui se limite à donner une protection générale à une dénomination évoquant chez les consommateurs des qualités liées abstraitement à la provenance des produits de zones de montagne, est trop éloignée de l'objet matériel du règlement n° 2081/92 pour que celui-ci s'oppose à son maintien.

A cet égard, il est indifférent que la réglementation nationale en cause protège non seulement la dénomination générale " montagne " en tant que telle, mais également, et selon les mêmes conditions, les références géographiques spécifiques aux zones de montagne telles que la référence " Monts de Lacaune ".

Il convient par conséquent de constater que le règlement n° 2081/92 ne s'oppose pas à l'application d'une réglementation nationale, telle que celle prévue par l'article 34 de la loi n° 85-30 et le décret n° 88-194, qui fixe les conditions d'utilisation, pour les produits agricoles et alimentaires, de la dénomination " montagne ".

Les articles 30 et 36 du traité

Le Gouvernement français ayant admis que la réglementation nationale en cause est susceptible d'être appliquée aux produits importés d'autres Etats-membres, il convient d'abord de constater qu'elle constitue une entrave aux échanges intracommunautaires au sens de l'article 30 du traite.

Il y a lieu de relever ensuite qu'une réglementation telle que celle en cause dans les litiges au principal est discriminatoire à l'encontre des marchandises importées des autres Etats-membres dans la mesure où elle réserve l'utilisation de la dénomination " montagne " aux seuls produits fabriqués sur le territoire national et élaborés à partir des matières premières nationales.

Selon une jurisprudence constante, une telle réglementation nationale, dès lors qu'elle revêt un caractère discriminatoire, ne peut trouver sa justification que, le cas échéant, dans l'un des motifs énoncés à l'article 36 du traité.

En l'occurrence, il y a lieu de constater qu'aucun des motifs énumérés à l'article 36 ne permet de justifier la réglementation concernée. En effet, parmi ces motifs, seule la protection de la propriété industrielle et commerciale, à savoir en l'espèce la protection des indications de provenance, peut être prise en considération. Or, la Cour a considéré que la dénomination " montagne " telle que protégée par la réglementation nationale en cause ne peut être qualifiée comme une indication de provenance.

La CJCE a estimé donc que l'article 30 du traité s'oppose à l'application d'une réglementation nationale, telle que celle prévue par l'article de la loi n° 85-30 et le décret n° 88-194, qui réserve l'utilisation de la dénomination " montagne " aux seuls produits fabriqués sur le territoire national et élaborés à partir de matière premières nationales.

La Cour a estimé que, dans ces conditions, il n'y a pas lieu d'examiner la question de savoir si et, le cas échéant, à quelles conditions, une réglementation nationale semblable à la législation française concernée, mais qui ne comporterait pas de discrimination à l'encontre des produits importés des autres Etats-membres, pourrait être conforme aux exigences des articles 30 et 36 du traité.

Sur la base de la décision de la CJCE, la Chambre criminelle de la Cour de Cassation a tiré les conséquences de cette interprétation dans deux arrêts (n°s 93-80-109 et 93-80-138) du 18 septembre 1997 en jugeant que les articles 33, 34 et 35 de la loi du 9 janvier 1985 et leur décret d'application n° 88-194 du 26 février 1988, " en réservant l'utilisation de la dénomination " montagne " aux seuls produits fabriqués en France à partir des matières premières françaises, instituent une discrimination entre produits nationaux et non nationaux constitutive, au sens de l'article 30 du Traité, d'une entrave actuelle ou potentielle aux échanges intracommunautaires " ; (...) " en l'absence d'un droit à protection des dénominations de fantaisie reconnu par la réglementation communautaire, une telle discrimination n'est justifiée par aucun des motifs que l'article 36 de ce Traité autorise à invoquer ".

3. Le dispositif proposé

L'article 39 du projet de loi range l'appellation " montagne " parmi les signes d'identification de la qualité et de l'origine délivrés par les autorités administratives, réglant de ce fait la question de la nature de l'appellation " montagne ".

Le texte proposé pour l'article L.644-2 par l'article 42 apporte deux innovations importantes :

- il limite la procédure administrative pour l'utilisation de l'appellation " montagne " aux :

denrées alimentaires ;

produits agricoles non alimentaires et non transformés.

Il est à noter que le produit doit être soit issu de zones de montagne, soit fabriqué dans ces zones. La procédure d'autorisation est néanmoins applicable même si les matières premières utilisées pour la fabrication de ces produits proviennent d'autres zones de montagne en Europe.

Cette restriction territoriale de la procédure signifie que l'utilisation de l'appellation " montagne " est libre pour tout produit communautaire non français introduit en France. S'il s'avère que l'utilisation de la mention " montagne " est frauduleuse, l'importateur et le distributeur pourront être poursuivis sur le fondement de l'article L.213-1 du code de la consommation.

- les références aux " noms d'un massif, d'un sommet, d'une vallée, d'une commune ou d'un département " sont supprimées en raison de la difficulté à protéger cet ensemble de références spécifiques et la préservation dont peuvent bénéficier les producteurs par le biais des AOP et IOP.

Le texte proposé pour l'article L.644-3 du code rural par le projet de loi opère au sein de l'article L.644-3 du code rural la même suppression de la protection des références géographiques spécifiques aux zones de montagne.

Il complète, en outre, l'article pour préciser que la provenance des matières premières ne peut être limitée aux seules zones de montagne françaises afin d'éviter une discrimination constitutive d'entrave au commerce intracommunautaire à l'égard des matières premières provenant des zones de montagne d'autres Etats-membres.

Le texte proposé pour l'article L.644-4 du code rural ajoute aux signes mentionnés dans cet article qui font l'objet d'une protection l'attestation de spécificité.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 42 bis -

Création d'un fonds de valorisation et de communication destiné à promouvoir les produits agricoles et alimentaires

Cet article vise à créer un fonds de valorisation et de communication destiné à promouvoir les produits agricoles et alimentaires.

Ce fonds doit avoir deux missions essentielles :

- d'une part, valoriser les spécificités et les savoir-faire de l'agriculture ;

- d'autre part, à communiquer sur ses métiers et ses terroirs.

Un décret en Conseil d'Etat doit fixer les modalités de ces dispositions.

S'il importe de promouvoir les produits agricoles et alimentaires, la création d'un tel fonds suscite plusieurs interrogations :

- comment ce fonds s'articulera-t-il avec la SOPEXA et le CFCE ? Pourquoi ne pas accroître ainsi les crédits de ces deux organismes plutôt que de créer un nouveau fonds ? Est-ce véritablement en multipliant le nombre des organismes intervenant sur le commerce extérieur que nous parviendrons à rationaliser le dispositif d'appui à l'exportation ?

- ce fonds sera un chapitre budgétaire, avec des dépenses de fonctionnement et des dépenses d'investissement. Ce sera donc au sens de l'article 7 de la loi organique de 1959 un crédit global. Dès lors, la répartition entre le crédit global de ce fonds et les autres chapitres de fonctionnement et d'investissement du ministère ne dépendra-t-elle pas d'un arrêté du ministre des finances et non de celui de l'agriculture ?

- comment sera alimenté ce fonds ? Soulignons qu'il était prévu à l'origine que ce soient les cotisations professionnelles qui alimentent ce fonds. Cette recette a été abandonnée lors de l'examen de cet article en séance publique à l'Assemblée nationale. Si elle avait été maintenue, ce serait d'ailleurs posée une question sur le régime juridique de ces cotisations professionnelles. En effet, en droit budgétaire français, les taxes parafiscales constituent une catégorie intermédiaire entre les impositions de toutes natures et les rémunérations de services rendus. Ainsi, l'affectation de ces recettes au nouveau fonds aurait pu être jugée inconstitutionnelle. Mais, en l'absence de cotisations professionnelles, quels seront les crédits du ministère qui seront redéployés pour être consacrés à ce fonds ?

De plus les professionnels du vin ne sont pas exclus de ce système : or, il paraît paradoxal que ceux-ci, qui pourraient être amenés, dans l'avenir, à apporter leur contribution à un fonds dont l'objectif principal est la promotion, ne puissent pas en bénéficier en raison de l'interdiction de la publicité pour leurs produits.

Votre rapporteur aurait, en outre, souhaité que le Conseil supérieur des exportations alimentaires, prévu à l'article 38 bis, puisse rendre ses premières conclusions avant la création de ce fonds.

Néanmoins, votre rapporteur constate que l'ensemble du monde professionnel agricole est favorable à cette disposition.

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose donc d'adopter cet article sans modification.

Article 43 -
(Articles L.648-9 et L.641-10 du code rural)

Cotisations à l'INAO et aux organismes de contrôle agréés
pour les produits autres que le vin -

Cet article vise à modifier l'assiette et le taux des cotisations versées aux organismes de contrôle agréés et des droits perçus par l'INAO sur les produits d'AOC autres que le vin.

L'article 43 du projet de loi modifie la rédaction des articles L.641-9 et L.641-10 du code rural.

1. Les paragraphes I et II concernent les cotisations perçues par les organismes de contrôle agréés. Ils modifient en conséquence l'article L.641-10 du code rural.

Le paragraphe I complète l'article L.641-10 du code rural.

L'article L.641-10 du code rural est composé actuellement de deux alinéas. Il est indiqué que les organismes agréés par l'INAO pour satisfaire aux obligations qui leur sont imposées en matière d'organisation d'examens analytiques et organoleptiques et lors de la dégustation des vins à appellation d'origine, sont habilités à prélever sur les producteurs concernés des cotisations. Celles qui ont le caractère de droit privé malgré leur caractère obligatoire, ne peuvent dépasser 5 francs par hectolitre de vin revendique une appellation d'origine. Elle est exigible lors du dépôt de la demande d'agrément des vins.

Il appartient à la Cour des comptes d'assurer la vérification des comptes et la gestion desdits organismes.

Cet article, issu de la loi du 8 juillet 1998 relative à la partie législative du Livre VI (nouveau) du code rural aurait dû codifier l'intégralité de l'article 61 de la loi n° 88-1202 du 30 décembre 1998 relative à l'adaptation de l'exploitation agricole à son environnement économique et social.

Le dispositif du projet de loi

Or, deux alinéas -qui n'ont pas été codifiés- ont été ajoutés à cet article 61 initial par l'article 33 de la loi n° 91-5 en date du 3 janvier 1991. Ces deux alinéas permettent aux même organismes agréés par l'INAO, pour satisfaire aux obligations qui leur sont imposées en matière d'organisation de l'agrément des produits laitiers, de percevoir des cotisations dont le montant ne peut excéder 800 francs par échantillon présenté à l'agrément.

Cet oubli dans l'élaboration de la loi de codification du Livre VI du code rural justifie le premier alinéa qui complète l'article L.641-10.

Les autres alinéas du paragraphe I proposent de fixer le seuil maximal pour les cotisations assises sur les quantités des produits destinés à la commercialisation en AOC et perçues par les organismes agréés à :

- 5 francs par hectolitre ou 50 francs par hectolitre d'alcool pur pour les boissons alcoolisées autres que le vin ;

- 0,50 francs par kilogramme pour tous les autres produits agro-alimentaires.

Il convient de préciser que le I souligne l'annualité de ces cotisations et qu'il appartient au ministre de l'agriculture et à celui du budget de fixer par appellation le montant de ces cotisations, après avis des comités nationaux concernés de l'INAO.

Le paragraphe II prévoit pour 1998 l'application des deux alinéas abrogés par la loi n° 98-565 et fixe l'entrée en vigueur des nouvelles dispositions définies par le I de l'article 43 du présent projet de loi au 1 er janvier 1999.

2. Les paragraphes III et IV concernent les droits perçus par l'INAO

L'article 24 du décret n° 91-368 du 15 avril 1991 portant organisation et fonctionnement de l'INAO indique que : " Le budget de l'Institut national des appellations d'origine préparé par le directeur est établi par le conseil permanent après examen par son bureau.

Il n'est exécutoire qu'après approbation par arrêté conjoint du ministre de l'économie, des finances et du budget et du ministre chargé de l'agriculture.

Outre la dotation budgétaire de l'Etat prévue à l'article 2 de la loi du 2 juillet 1990 susvisée et les autres ressources dont il bénéficie en application de textes particuliers, l'institut perçoit des redevances pour services rendus et des recettes diverses dont le montant est fixé par arrêté conjoint du ministre de l'économie, des finances et du budget et du ministre chargé de l'agriculture, sur proposition du conseil permanent.

L'Institut peut recevoir en outre, et le cas échéant, tous legs, subventions et dons
".

BUDGET DE L'INAO

 

1997

1998
(prévisions)

Subvention versée par le ministère de l'agriculture

65,5

72,0

Droits perçus sur les vins

9,6

9,6

Droits perçus sur les produits laitiers

3,3

3,5

Recettes diverses (*)

11,6

6,4

TOTAL des recettes

90

91,5

(*) Ventes d'études et de publications, recettes tirées de l'accord de délimitation des appellations avec l'ONIVIN, frais de dossier pour les demandes de plantation, remboursement de frais engagés au profit des organisations interprofessionnelles.

Source : ministère de l'agriculture - Direction de la production et des Echanges

Depuis dix ans, on peut constater une augmentation de 134 % des subventions et de 29,4 % des ressources propres.

EVOLUTION DU BUDGET DE L'INAO

 

Subvention
(en millions de francs)

Ressources propres
(en millions de francs)

1990

32,5

13,14

1991

52,2

15,6

1992

56,8

17,5

1993

61,9

12,2

1994

64,8

10,2

1995

67,6

10,7

1996

65,4

15,4

1997

67,8

19,7

1998

72

19,5*

1999

76*

17,0*

(*) Prévisions

Source : Ministère de l'agriculture et de la pêche

L'article L.641-9 est composé de deux alinéas. Il établit, au profit de l'INAO, un droit par hectolitre de lait servant à la fabrication d'un produit laitier revendiqué en AOC.

Ce droit fixé, sur proposition de l'INAO, par un arrêté conjoint du ministre de l'agriculture et celui chargé du budget ne peut dépasser 0,24 franc par hectolitre de lait servant à la fabrication du produit laitier.

Actuellement, il est de 15 centimes par hectolitre de lait destiné à la fabrication de fromages et de 7,5 centimes par hectolitre de lait destiné à la fabrication de beurres et crèmes. La loi dispose qu'il est acquitté par les producteurs lors du dépôt d'agrément de leur AOC.

Rappelons que, selon les termes de l'article L.641-8, pour les vins revendiqués en appellation d'origine, la loi autorise la perception d'un droit maximal de 0,50 franc par hectolitre de récolte revendiqué en appellation d'origine. Un arrêté des ministres de l'agriculture et du budget fixe, sur proposition de l'INAO, le montant de ce droit ; il est actuellement de 0,40 franc par hectolitre (22 à 25 millions d'hectolitres sont déclarés en vin d'appellation d'origine chaque année). Le droit est exigible au moment du dépôt de la demande d'agrément de la récolte auprès de l'INAO.

Le paragraphe III de l'article 43 du projet de loi modifie sur de nombreux points la législation en cours :

- il est question de droit acquitté par tous les producteurs des produits AOC autres que les vins, et non plus seulement d'un droit par hectolitre de lait ;

- il est mentionné que les comités nationaux de l'INAO donnent leur avis et non plus que l'INAO fasse une proposition.

- ce droit est perçu sur les quantités exprimées en unités de masse ou de volume des produits destinés à la commercialisation en AOC ;

- les seuils maximaux pour ces droits sont de deux ordres :

0,50 par hectolitre ou 5 francs par hectolitre d'alcool pur pour les boissons alcoolisées autres que les vins ;

0,005 franc par kilogramme pour les produits agro-alimentaires autres que les vins et les boissons alcoolisées.

Ce droit, exigé annuellement, entrera en vigueur, selon le paragraphe IV, à compter de la publication de l'arrêté mentionné et au plus tard le 1 er juillet 1999.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 43 bis -

Mise en bouteille et conditionnement des vins
bénéficiant d'une appellation d'origine

Cet article vise à rendre obligatoire la mise en bouteille et le conditionnement des vins AOC dans la région de production.

L'article 43 bis indique que le ministre de l'agriculture peut décider que la mise en bouteille et le conditionnement des vins bénéficiant d'une appellation d'origine s'effectuent dans les régions de production. Deux conditions sont néanmoins nécessaires :

- le respect des dispositions communautaires ;

- les avis du syndicat de défense concerné et de l'organisation professionnelle compétente.

Le non respect des prescriptions définies dans ce cadre par le ministre entraîne l'application des peines prévues à l'article L.213-1 du code de la consommation.

En outre, les agents de l'INAO commissionnés, ainsi que ceux mentionnés à l'article L.215-1 du code précité (agents de la DGCCRF, officiers de police judiciaire, vétérinaires inspecteurs, médecins inspecteurs, agents de l'IFREMER,...) sont qualifiés pour procéder à la recherche et à la constatation des infractions.

En cas d'infraction, les produits font l'objet d'une saisie conformément aux dispositions des articles L.215-5 à L.215-8 du code de la consommation.

Enfin, cet article s'applique à compter de la mise en bouteille et du conditionnement des vins vinifiés avec les raisins récoltés en 1999.

Le conditionnement des vins AOC dans la région de production présente plusieurs avantages :

- Il permet une meilleure traçabilité.

L'information et la protection des consommateurs exigent de plus en plus de transparence dans la garantie apportée aux produits mis sur le marché.

Il est, à cet égard, paradoxal que l'appellation d'origine implique que soient rigoureusement définis l'aire de production, les cépages, les rendements, le titre alcoolémique du vin, les procédés de culture et de vinification mais que la loi soit muette sur le conditionnement.

Votre rapporteur approuve cette disposition. En effet :

- Il est tout à fait logique que les producteurs, c'est-à-dire les viticulteurs, tirent profit du produit qu'ils élaborent. Le conditionnement du produit dans la région d'origine permet, à ce titre, de valoriser davantage le travail de l'agriculteur.

La mise en bouteille dans la région de production amènera ainsi une plus-value pour les zones de production et donc pour les vignerons.

- Cette mise en bouteille peut engendrer dans les zones rurales des activités débouchant sur de nombreux emplois. En effet, à chaque fois que l'on conditionne dans la région d'origine, des cartonniers, des étiqueteurs, des marchands de bouchons, des embouteilleurs et des employés à façon seront concernés. Ainsi, l'aménagement du territoire sera directement concerné par cette disposition.

- Il permet enfin de lutter contre le transport de vin d'appellation en vrac et le risque d'embouteillage en dehors de la région qui peut donner lieu à des mélanges altérant définitivement le produit.

Or, actuellement, la mise en bouteille des vins dans leur région de production n'est pas une obligation légale, sauf en ce qui concerne les vins d'Alsace. La loi n° 72-628 du 5 juillet 1972 relative à la commercialisation des vins à appellation d'origine contrôlée " vins d'Alsace " impose en effet la mise en bouteille de ces vins dans les départements du Bas-Rhin et du Haut-Rhin.

L'INAO a comme mission de déterminer les conditions de production des vins et eaux-de-vie des appellations d'origine contrôlée après avis des syndicats de défense intéressés selon la loi n° 84-108 du 16 décembre 1984 relative aux appellations d'origine dans le secteur viticole.

Néanmoins, rien n'est spécifié sur l'embouteillage.

En outre, jusqu'à présent, l'obligation d'embouteillage dans la région de production était considéré comme incompatible avec le droit communautaire et notamment constituait une entrave à la libre circulation des marchandises, non justifiable au titre des exceptions prévues à l'article 36 du traité de Rome et relatives à la protection de la propriété industrielle et commerciale.

Cette position était fondée sur le fait que l'obligation d'embouteillage n'était pas nécessaire pour garantir que le produit sous AOC provienne d'une zone géographique déterminée et présente des caractéristiques particulières.

Cette analyse de la commission a d'ailleurs été conformée en 1992 par un arrêt de la CJCE relatif à une obligation d'embouteillage des vins espagnols l'appellation d'origine " Rioja ".

Cette obligation d'embouteillage s'est multiplié depuis au Portugal et en Italie.

Mais s'appuyant sur les conclusions d'une récente expertise, la Commission européenne a fait évoluer sa position initiale. Elle estime aujourd'hui que l'obligation d'embouteillage de certains vins dans les régions de production peut être jugée compatible avec le droit communautaire parce qu'elle permet de conserver de façon plus sûre les caractéristiques acquises par un produit d'appellation.

Ce dossier de la mise en bouteille étant actuellement en débat au niveau européen, il s'avère impératif de faire progresser la disposition présentée dans l'article 43 bis du projet de loi, notamment dans le cadre de la réforme de l'OCM vitivinicole.

Cette disposition étant reprise à l'article 40 du projet de loi par un amendement de votre rapporteur insérant un paragraphe II quater pour l'article L.641-15 du code rural, l'article 43 bis devient sans objet.

Votre commission vous propose de supprimer cet article.

Article 43 ter -

Mise en place d'un système de biovigilance

Cet article vise à instaurer un système de biovigilance en insérant un chapitre VI dans le titre X du Livre II du code rural.

Votre rapporteur ne souhaite pas revenir dans le détail sur la question des organismes génétiquement modifiés, deux excellents rapports 44( * ) ayant traité de manière exhaustive cette question. Il souhaite néanmoins vous rappeler qu'aujourd'hui 26 millions d'hectares d'organismes génétiquement modifiés sont déjà cultivés dans le monde, dont 16 millions aux Etats-Unis et 10 dans les autres pays.

En France, on compte seulement 1.430 ha, une autorisation de mise en marché étant nécessaire avant d'effectuer la mise en culture (870 ha en Poitou-Charentes, 217 ha en Aquitaine, 168 ha en Rhône-Alpes, auxquels il faut ajouter 250 ha d'essais, notamment en Alsace). Ces premières cultures ont été encadrées par un dispositif de biovigilance mis en place par un arrêté du 5 février 1998 portant inscription au catalogue officiel des semences de trois variétés de maïs transgénique.

Le 25 septembre 1998, le Conseil d'Etat a prononcé un sursis à exécution suspendant la commercialisation de ces variétés de maïs transgénique jusqu'à sa décision au fond de décembre 1998.

Soulignons que le 3 août dernier, un nouvel arrêté a inscrit au catalogue officiel des semences douze autre variétés de maïs transgénique.

L'arrêté du 5 février était accompagné d'un texte sur la biovigilance stipulant qu'un " dispositif " assurant le suivi de la commercialisation des semences serait mis en place et qu'il permettrait de suivre différents paramètres comme l'efficacité des variétés contre les ravageurs ciblés, l'apparition éventuelle de pyrales résistantes à la toxine Bt ou d'effets non intentionnels sur les auxiliaires.

Si l'utilité de légiférer en ce domaine paraît évidente, votre rapporteur s'interroge :

- sur la philosophie qui animent cet article 43 ter : votre rapporteur considère en effet nécessaire la mise en place d'un dispositif sérieux de biovigilance et d'une réglementation stricte en matière d'OGM. Mais cette démarche doit, notamment dans l'esprit de MM. Bizet et Le Déaut, s'accompagner d'une ouverture sur ces technologies qui servent l'agriculture de demain. Or, la situation est toute différente : on ferme la porte aux OGM tout en réglementant sur le sujet. Il y a donc là un véritable paradoxe.

- sur la rédaction et le contenu même de l'article 43 ter : votre rapporteur souhaite, lors de l'examen détaillé des articles, attirer l'attention de la Haute Assemblée sur quelques difficultés posées par le mécanisme prévu à l'article 43 ter.

1. Le dispositif proposé par l'article 43 ter

L'article 43 ter insère un chapitre VI relatif au contrôle et à la surveillance biologique du territoire dans le titre X -de la protection des végétaux- du livre II (Des animaux et des végétaux) du code rural.

Ce nouveau chapitre est composé de quatre articles.

Article 364 bis du code rural -

Surveillance des végétaux - Création d'un comité de biovigilance

Dans le paragraphe I, il est indiqué, au premier alinéa, qu'une surveillance renforcée est effectuée sur :

- les végétaux, y compris les semences ;

- les produits antiparasitaires à usage agricole et les produits assimilés ;

- les matières fertilisantes ;

- les supports de cultures, dès lors que ceux-ci sont composés en tout ou en partie d'OGM disséminés dans l'environnement ou mis sur le marché.

Il appartient aux agents chargés de la protection des végétaux de pratiquer cette surveillance.

Soulignons que la réglementation relative à la protection des végétaux a recours à diverses désignations pour qualifier les agents de la protection des végétaux chargés de procéder au contrôle et à la surveillance phytosanitaire du territoire (agents de la protection des végétaux, agents chargés de la protection des végétaux, inspecteurs et contrôleurs de la protection des végétaux).

La multiplicité des dénominations employées trouve son origine dans les modifications réglementaires successives de l'organisation des services du ministère chargé de l'agriculture.

A l'origine, le service de la protection des végétaux, créé par l'ordonnance du 2 novembre 1945 (articles 342 à 364 du code rural) et le décret n° 46-2612 du 7 octobre 1946 portant organisation des services extérieurs de la protection des végétaux a été organisé sur la base de circonscriptions phytosanitaires, placées chacune sous l'autorité d'un inspecteur de la protection des végétaux.

Chacun de ces échelons comprenait un cadre permanent, constitué par des inspecteurs et des contrôleurs titulaires assistés de contrôleurs et d'agents techniques auxiliaires.

La Convention internationale de la protection des végétaux, ratifiée par la France le 22 septembre 1961 a imposé à chaque partie contractante l'obligation de mettre en place une organisation officielle de la Protection des végétaux.

Lors de la création des corps d'agronomie, le corps des inspecteurs et celui des contrôleurs de la protection des végétaux ont été mis en voie d'extinction pour être remplacés par ceux des ingénieurs d'agronomie, des ingénieurs des travaux agricoles et les techniciens d'agriculture, qui ont une vocation plus générale.

Avec la réforme des services extérieurs des ministères, les décrets du 28 décembre 1984 portant réorganisation des services extérieurs du Ministère de l'Agriculture ont mis fin à l'organisation initiale du service de la Protection des végétaux, en abrogeant le décret du 7 octobre 1946.

Aujourd'hui, l'inspection et le contrôle des végétaux, produits végétaux et denrées d'origine végétale destinés à l'alimentation humaine ou animale sont effectués par les ingénieurs chargés de la protection des végétaux, assistés de techniciens des services du ministère de l'agriculture et d'autres personnels qualifiés du ministère de l'agriculture ayant la qualité de fonctionnaires ou agents de l'Etat.

Le deuxième alinéa prévoit que ces agents, assermentés, ont deux missions spécifiques :

- la première est une mission de police administrative puisqu'il s'agit de procéder à l'inspection des produits antiparasitaires à usage agricole et des produits assimilés dans le cadre de l'article 364 quater et ce afin de vérifier notamment que leur mise sur le marché et leur utilisation sont subordonnées à une autorisation délivrée par le ministre de l'agriculture dans les conditions prévues par la loi n° 525 du 2 novembre 1943 relative à l'organisation du contrôle des produits antiparasitaires à usage agricole.

La loi n° 525 du 2 novembre 1943 relative à l'organisation du contrôle des produits antiparasitaires à usage agricole et des produits assimilés, validée en application des dispositions de l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental dresse le cadre du contrôle de la qualité et de la conformité des spécialités antiparasitaires. Ce dispositif a démontré son efficacité et sa fiabilité puisque la directive du Conseil n° 91/414/CEE concernant la mise sur le marché des produits phytopharmaceutiques en a repris les principes fondamentaux. Cette directive a d'ailleurs été transposée en droit interne par la voie réglementaire (décret n° 94-559 du 5 mai 1994).

Rappelons que l'article premier de la loi de 1943 instaure une autorisation pour la crise sur le marché en France des produits antiparasitaires.

- La seconde consiste en une mission de police judiciaire puisqu'il s'agit de rechercher et de constater les infractions commises pour non respect de la législation relative aux produits antiparasitaires à usage agricole ainsi que celle relatives à la mise sur le marché des végétaux y compris les semences, composés en tout ou partie d'OGM.

Cette mission de police judiciaire s'effectue dans les conditions prévues au chapitre V -pouvoir d'enquête- du titre Ier -Conformité- du livre II -Conformité et sécurité des produits et des services- du code de la consommation.

Ce chapitre V concerne les autorités qualifiées pour mener les enquêtes, leurs prérogatives, les mesures d'urgence, les expertises et le marquage communautaire de conformité.

Cet alinéa conclut en précisant que ce dispositif de surveillance doit permettre d'identifier et de suivre l'apparition éventuelle d'effets non intentionnels sur les écosystèmes agricoles ou naturels et notamment " les effets sur les populations de ravageurs, sur la faune et la flore sauvage, sur les milieux aquatiques et les sols, ainsi que sur les populations microbiennes, y compris les virus ".

Le texte proposé pour le paragraphe II de l'article 364 bis est composé de deux alinéas.

Le premier alinéa précise que le ministre de l'agriculture peut faire appel, en tant que de besoin, à toute autre personne remplissant les conditions de qualification fixées en décret en Conseil d'Etat, afin d'assurer cette surveillance renforcée.

Le second alinéa instaure un comité de biovigilance chargé de :

- donner un avis sur les protocoles de suivi de l'apparition éventuelle d'événements défavorables ;

- alerter le ministre de l'agriculture et celui chargée de l'environnement lorsque de tels événements sont mis en évidence.

Cette instance, co-présidée par les ministres susmentionnés, est composée :

- de personnalités compétentes en matière scientifique ;

- d'un député et d'un sénateur membres de l'Office parlementaire d'évaluation des choix scientifiques et technologiques ;

- de représentants des associations agréées au titre de l'article L.252-1 du code rural ;

- de représentants des consommateurs ;

- de représentants des groupements professionnels concernés.

Il est précisé que ces trois catégories de représentants forment au moins la moitié des membres du comité.

Article 364 ter -

Obligations des différents acteurs - Traçabilité des produits - Registre des modifications - collecte des données - Rapport d'activité

Cet article est composé de quatre paragraphes :

Le paragraphe I oblige toute personne qui constate une anomalie ou des effets indésirables susceptibles d'être liés à la dissémination ou à la mise sur le marché des produits susmentionnés a en informer immédiatement le service de la protection des végétaux. Cet alinéa instaure une sorte d'obligation de dénonciation sanctionnée par une amende dont le plafond est fixé à 50.000 francs. Votre rapporteur considère cette somme excessive.

Soulignons que cette disposition existe déjà en droit de l'environnement, notamment en matière de substances phytosanitaires.

Le paragraphe II responsabilise celui qui assure la mise sur le marché, le distributeur et l'utilisateur de ces produits en les impliquant de deux façons :

- par la participation au dispositif de surveillance biologique ;

- par le respect des obligations présentées dans ce nouveau chapitre V.

Il est, en outre, précisé que la traçabilité des produits doit être assurée soit par le suivi du produit, soit par analyse, et ce par garantie pour les consommateurs.

Par ailleurs, le responsable de la mise sur le marché a l'obligation de fournir toute information relative à la modification génétique introduite : cette obligation a pour objet d'établir un registre des modifications opérées dans les organismes telles que les séquences nucléotidiques, d'amorces ou d'autres types d'informations utiles.

Il appartient à un décret en Conseil d'Etat de fixer les modalités de participation et les obligations de ces responsables de la mise en marché pour chaque catégorie de produits.

Soulignons que ce registre, proposé par M. J. Y. Le Déaut, existe déjà dans la réglementation européenne : la création de ce registre a été justifiée par l'exemple suivant : prenons une semence modifiée une première fois, puis une deuxième fois, une troisième fois.... Au bout de quelques années, il sera donc devenu impossible de recenser avec exactitude l'ensemble des opérations génétiques effectuées sur une espèce. Le registre devrait permettre de suivre " à la trace " les différentes modifications effectuées. Cet outil, assurant le suivi en continu des produits modifiés, permettra donc l'identification du ou des gènes modifiés.

Le paragraphe III permet à l'autorité administrative, dans l'intérêt de la santé publique et de l'environnement, de collecter les données et informations relatives aux opérations de modification génétique des produits. Cette collecte, dont les modalités sont définies par arrêté, a plusieurs objets :

- elle doit permettre d'assurer le traitement et la diffusion de ces données et informations ;

- elle peut aboutir à des mesures d'interdiction, de restriction ou de prescriptions particulières concernant la mise sur le marché, la délivrance et l'utilisation des produits antiparasitaires à usage agricole et des produits assimilés.

Le paragraphe IV précise que le Gouvernement adresse chaque année, après avis du comité de biovigilance, à l'Assemblée nationale et au Sénat un rapport d'activité du dispositif de surveillance biologique.

Article 364 quater -

Renforcement des pouvoirs d'inspection
et de contrôle des agents habilités

Le texte proposé pour cet article est constitué de deux paragraphes.

Le paragraphe I précise que, dans le cadre de la surveillance biologique, les agents habilités à effectuer des inspections et des contrôles des produits antiparasitaires à usage agricole et des produits assimilés ont accès :

- aux installations, lieux et locaux, à l'exclusion des domiciles et de la partie des locaux à usage professionnel à usage de domicile ;

- aux lieux où sont réalisées les opérations de dissémination, de mise sur le marché et l'utilisation des produits concernés ;

- aux lieux, locaux et installations qui se trouvent à proximité du site de ces opérations. Il est néanmoins nécessaire que la personne chez laquelle ces agents souhaitent se rendre soit préalablement informée de cette visite.

Il convient de préciser que cet accès ne peut avoir lieu qu'entre 8 et 20 heures ou, indique l'article 43 ter, en dehors de ces heures quand l'accès au public est autorisé ou lorsqu'une activité est en cours. Ces agents peuvent, en outre, recueillir tous les renseignements propres à l'accomplissement de leur mission et en prendre copie.

C'est dans un souci d'efficacité de la répression que ce paragraphe confie aux agents habilités des pouvoirs de police administrative dans l'exercice de leurs missions de contrôle et de surveillance générale .

Cependant, bien que les agents de l'administration disposent de larges pouvoirs lorsqu'il s'agit d'investigations s'inscrivant dans le cadre d'une procédure administrative de contrôle. Ces agents doivent respecter le régime des garanties constitutionnelles applicables au droit d'accès de l'administration aux locaux professionnels, défini par le Conseil constitutionnel. Il s'agit de :

- la présence de l'occupant hors de la visite ; votre rapporteur vous propose un amendement tendant à insérer cette disposition ;

- la notification du procès-verbal de visite à l'occupant, imposée par la décision n° 90-286 DC du 28 décembre 1990 ; cette mesure est prévue au paragraphe I ;

- le respect du principe du contradictoire (décret n° 83-1025 du 28 novembre 1983) sauf urgence ou circonstances exceptionnelles et sous réserve des nécessités de l'ordre public ;

- une limitation du droit d'accès dans le temps et dans l'espace.

C'est au regard de ces garanties constitutionnelles que des pouvoirs de police administrative ont été conférés aux agents habilités en vertu de l'article 43 ter du projet de loi.

Le dernier alinéa du paragraphe I fait mention de la possibilité pour ces agents habilités, dans le cadre de leur mission de police administrative, de prélever des échantillons.

Le paragraphe II précise les pouvoirs des agents habilités qui agissent, soit dans le cadre d'une mission de police administrative (surveillance biologique), soit dans celui d'une mission de police judiciaire (recherche des infractions).

Rappelons que, dès 1951, dans un arrêt du conseil d'Etat " Baud ") (CE sect. 11 mai 1951), le commissaire du Gouvernement indiquait que l'administration accomplissait des missions de police administrative lorsqu'elle exerçait des missions de contrôle et de surveillance générale et qu'il n'y avait de police judiciaire que lorsque l'opération consistait dans la recherche ou à l'arrestation des auteurs d'une infraction déterminée.

La distinction ainsi opérée par le Conseil d'Etat entre pouvoirs de police judiciaire et pouvoirs de police administrative a été reprise par le Conseil constitutionnel dans sa décision du 27 décembre 1990 (décision n° 90-281 du 27 décembre 1990 relative à la loi sur la réglementation des télécommunications) puisque le Conseil reconnaît aux agents de l'administration le pouvoir non seulement de constater les infractions à la législation sur les télécommunications en dressant à cet effet un procès-verbal, mais également de les rechercher.

C'est dans le respect de cette jurisprudence constante du Conseil constitutionnel que ce paragraphe confère ainsi aux agents habilités des pouvoirs de police judiciaire en vue de la recherche et de la constatation des infractions aux dispositions du chapitre VI.

Ainsi, dès lors que ces agents constatent que la dissémination, la mise sur le marché ou l'utilisation des produits concernés présentent ou peuvent présenter un danger pour la santé publique ou pour l'environnement, ils peuvent ordonner, dans des conditions définies en Conseil d'Etat, prendre des sanctions administratives qui sont les suivantes :

- la consignation, la destruction totale ou partielle de ces produits ainsi que des végétaux et des animaux présentant des anomalies ou des effets indésirables ;

- toutes autres mesures propres à éviter ou à éliminer le danger.

Il est prévu que, préalablement à l'exécution de ces mesures, l'intéressé doit pouvoir présenter ses observations, et ce dans un souci de renforcer les garanties de la personne contrôlée contre les éventuelles erreurs de l'administration. En outre, le coût de ces mesures est à la charge du responsable de la dissémination, de la mise sur le marché ou de l'utilisateur.

Article 364 quinquies -

Sanctions pénales

Cet article est composé de trois paragraphes.

Dans le paragraphe I, il est indiqué qu'est puni de six mois et de 50.000 francs d'amende :

- le défaut d'information prévue au I de l'article 364 ter,

- le fait de mettre obstacle à l'exercice des fonctions des agents mentionnés à l'article 364 bis.

Le paragraphe II prévoit une peine d'emprisonnement et de 200.000 francs d'amende en cas de :

- non respect par les obligations mentionnées au II de l'article 364 ter,

- inexécution des mesures prises en application du III de l'article 364 ter ou ordonnées en application de l'article 364 quater ;

- utilisation des produits antiparasitaires à usage agricole et des produits assimilés ne bénéficiant pas de l'autorisation mentionnée au I de l'article 364 bis.

S'agissant de professionnels dans la plupart des cas et en raison des risques que pourrait provoquer le non respect de certaines dispositions, il apparaît logique que les peines prévues soient plus lourdes.

Le paragraphe III prévoit des peines complémentaires éventuelles d'affichage ou de diffusion de la décision prononcée pour les personnes physiques. Pour les personnes morales, dont la responsabilité pénale peut être engagée, sont prévues tout d'abord, une amende dont le montant est le quintuple de celui prévu pour les personnes physiques (article 131-38 du code pénal), puis, ensuite, l'affichage ou la diffusion de la décision prononcée dans les conditions du 9° de l'article 131-39 du code pénal.

Votre rapporteur approuve cette échelle de peine. Il souhaite néanmoins que la distinction des peines entre personnes physiques et personnes morales ne conduise pas à des situations injustes (situation de l'exploitant individuel par rapport à la société agricole, cas des GAEC...).

2. Les proposition de votre commission

Votre rapporteur vous propose de modifier complètement la rédaction de l'article 43 ter.


En effet, l'article 43 ter, adopté lors de l'examen du projet de loi en séance publique, mélange la surveillance et le contrôle des produits phytosanitaires avec celle des produits antiparasitaires à usage agricole et celle des matières fertilisantes et des supports de culture. En outre, il est mis en oeuvre dans le même article un mécanisme de biovigilance.

Votre rapporteur n'approuve pas la méthode consistant à insérer dans le projet de loi d'orientation agricole autant de dispositions relatives au contrôle et à la protection des végétaux.

Néanmoins, il ne peut que constater que l'article 43 ter actuel confond OGM et produits antiparasitaires, qui sont des produits différents relevant de réglementations spécifiques aux objectifs eux-mêmes différents. L'objectif en ce qui concerne les OGM -qui recouvrent de nombreuses classes de produits- est d'évaluer l'effet du gène modifié dans l'environnement. La surveillance et le suivi demandés de surcroît par la directive européenne, s'effectuent sur les conséquences de cette modification.

Pour les produits antiparasitaires, il s'agit de contrôler le respect d'une réglementation. La rédaction initiale mélange surveillance des effets " non intentionnels " et contrôle des infractions en donnant possibilité aux agents de la protection des végétaux d'intervenir dans les exploitations sans que le champ de leur mission ne soit clairement défini.

Ainsi, votre rapporteur vous propose l'architecture suivante :

- l'article 43 ter est consacré à la mise en oeuvre de la biovigilance en matière d'OGM ;

- un premier article additionnel après l'article 43 ter est relatif aux produits phytosanitaires ;

- un deuxième article additionnel après l'article 43 ter est relatif aux produits antiparasitaires à usage agricole ;

- un troisième et dernier article additionnel après l'article 43 ter porte sur les matières fertilisantes et les supports de culture.


Ce schéma concilie les préoccupations actuelles du projet de loi avec la nécessité de renforcer le contrôle et la protection des végétaux. Les différentes dispositions reprises par votre rapporteur sont en grande partie issues du projet de loi n° 228 (Sénat - 1996-1997) adopté par l'Assemblée nationale relatif à la qualité sanitaire des denrées destinées à l'alimentation humaine ou animale. M. Marcel Deneux avait présenté, au nom de la Commission des Affaires économiques, un rapport n° 288 annexé au procès-verbal de la séance du 26 mars 1997.

La rédaction proposée pour l'article 43 ter porte donc exclusivement sur la biovigilance. Elle apporte néanmoins quelques modifications par rapport au dispositif adopté par l'Assemblée nationale :

- Le mot indésirable, employé déjà en matière de pharmacovigilance, est plus approprié que celui, plus vague, de défavorable. Il figure d'ailleurs à la rédaction du 364 ter I, au même article et est donc repris par votre rapporteur ;

- un décret en Conseil d'Etat doit fixer les conditions d'organisation et de fonctionnement du Comité de biovigilance ;

-la rédaction du V de cet article est modifiée afin de :

complète la notion floue, de " participation " à la biovigilance par une obligation de communication des informations aux agents chargés de la protection des végétaux ;

supprimer l'amendement introduit par l'Assemblée nationale relatif à la traçabilité et à la création d'un registre des modifications génétiques.

En effet, les informations relatives aux nouvelles structures génétiques introduites par transgénèse sont déjà déposées à la Commission du génie biomoléculaire (CGB) dès le stade de l'instruction des demandes d'autorisation.

Par ailleur, instaurer ainsi, hâtivement, sans concertation ni étude d'impact, une obligation de traçabilité soit par produit soit par analyse (les deux méthodes étant contradictoires) semble pour le moins précipité. L'enjeu en termes d'organisation, mais aussi de financement, de la traçabilité mérite une réflexion plus approfondie.

- La présence du propriétaire ou de l'occupant est inscrite dans le le 364 ter afin d'assurer le respect du droit de propriété ;

- En matière d'échantillons, il est nécessaire de veiller au respect de la propriété industrielle et au principe du contradictoire ;

- La sanction en cas de défaut d'information prévue au IV de l'article 364 bis est minorée afin de maintenir une échelle progressive et proportionnée des peines.

Votre commission vous propose d'adopter cet article dans la rédaction proposée par votre rapporteur

Article additionnel après l'article 43 ter -

Surveillance et contrôle phytosanitaire

Cet article additionnel vise à renforcer la lutte contre les organismes nuisibles pour les végétaux.

Cet article modifie le titre X du livre II du code rural relatif à la protection des végétaux.

L'objectif est, tout d'abord, de renforcer les contrôles en donnant une base législative aux actions de surveillance et d'inspection relevant des missions de police administrative, puis d'accroître le nombre et la consistance des infractions pénales, ainsi que d'aggraver les sanctions administratives et pénales en se fondant sur l'importance des risques encourus.

L'article additionnel qui vous est présenté comprend dix paragraphes :

- le I tend à actualiser la rédaction du titre X et du livre II du code rural en modifiant la dénomination des agents compétents ;

- le II insère un nouvel article 363-1 dans le code rural qui précise quels sont les agents du ministère de l'agriculture habilités à effectuer les opérations de police phytosanitaire, donne une base législative aux opérations de surveillance et de contrôle relevant des missions de police administrative et indique la portée des contrôles opérés par les services des douanes et les services de la concurrence, de la consommation et de la répression des fraudes ;

- le III précise les conditions d'exercice des contrôles phytosanitaires dans le cadre d'une nouvelle rédaction de l'article 364 du code rural.

- le IV tend à donner une nouvelle rédaction de l'article 348 et 349 du code rural relatif à l'interdiction d'introduire en France, de doter sciemment ou de transporter des organismes nuisibles aux végétaux ;

- le V modifie la rédaction de l'article 350 du code rural en la simplifiant et en l'actualisant ;

- le VI modifie la rédaction de l'article 351 du code rural relatif à l'obligation pour les détenteurs de végétaux, de laisser les agents de la protection des végétaux accéder aux terrains, jardins, dépôts et magasins dans le cadre de la recherche, de l'identification ou de la destruction des organismes nuisibles ;

- le VII élargit les pouvoirs de police phytosanitaire du ministre de l'agriculture, de nature essentiellement curative, en les complétant par un volet préventif.

- le VIII a pour objet de corriger une erreur rédactionnelle qui s'est insérée dans la rédaction de l'article 358 du code rural lorsqu'il a été modifié par la loi n° 92-1477 du 31 décembre 1992.

- le IX, qui modifie la rédaction de l'article 359 du code rural, a deux objets : étendre au contrôle et à l'inspection sanitaire des végétaux l'habilitation des agents de la protection des végétaux à des personnes qualifiées autres que les fonctionnaires ou agents de l'Etat, et réserver les pouvoirs de police phytosanitaire aux seuls agents de la protection des végétaux, dans le respect des garanties constitutionnelles ;

- le X renforce, de manière substantielle, les peines prévues par l'article 363 du code rural en cas de violation des règles phytosanitaires.

Votre commission vous propose d'adopter l'article additionnel ainsi rédigé.

Article additionnel après l'article 43 -

Des produits antiparasitaires à usage agricole

Les dispositions de cet article tendent à modifier la loi n° 525 du 2 novembre 1943 relative à l'organisation du contrôle des produits antiparasitaires à usage agricole et des produits assimilés, validée en application des dispositions de l'ordonnance du 9 août 1944 relative au rétablissement de la légalité républicaine sur le territoire continental.

Cet article, composé de sept paragraphes, a deux objectifs :

- d'une part, éviter que les produits non autorisés en France, mais autorisés dans l'autres Etats-membres de la communauté soient quand même employés dans notre pays ;

- d'autre part, sanctionner des comportements peu responsables et dommageables pour l'environnement, comme le veut la directive communautaire n° 91-414, qui prescrit dans son article 3 que " les Etats-membres veillent à ce que les produits phytopharmaceutiques soient utilisés conformément aux prescriptions d'emploi mentionnées sur l'étiquette ".

Afin de remplir ces objectifs, le dispositif proposé renforce les sanctions pénales en cas d'infraction aux règles régissant la mise sur le marché des produits, et crée deux nouvelles infractions liées l'une à l'usage d'un produit non autorisé, l'autre à l'usage non conforme d'un produit autorisé.

- Le I a pour objet de remplacer le mot " homologation " par le mot " autorisation de mise sur le marché " dans la loi n° 525 du 2 novembre 1943.

- Le II tend à modifier l'article premier de la loi n° 525 du 2 novembre 1943 relatif à la mise sur le marché en France des antiparasitaires.

- Le III insère dans la loi le principe de l'interdiction d'une utilisation non conforme des antiparasitaires, déjà prévue tant par l'article 3 de la directive n° 91/414 précitée que par les articles 17 et 18 du décret n° 94-359 du 5 mai 1994 relatif au contrôle des produits phytosanitaires.

- le IV prévoit un renforcement significatif des sanctions pénales prévues à l'article 11 de la loi n° 525 du 2 novembre 1943 précitée en cas d'infraction aux règles relatives à l'autorisation et à l'utilisation des produits antiparasitaires à usage agricole.

- le V précise les compétences des différents agents publics pour veiller à l'application de la loi n° 525 du 2 novembre 1943, en donnant une nouvelle rédaction de l'article 12 de cette loi.

- le VI précise les conditions d'exercice des contrôles phytosanitaires dans le cadre d'un nouvel article de la loi n° 525 du 2 novembre 1943 précitée.

- le VII insère dans la loi n° 525 du 2 novembre 1943 un article 12 ter prévoyant les sanctions administratives applicables dans le cadre de l'exercice des missions de police administrative effectuées par les agents du ministère de l'agriculture chargés de la protection des végétaux.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Article additionnel après l'article 43 ter -

Des matières fertilisantes et des supports de cultures

Cet article additionnel vise à modifier la rédaction de la loi n° 79-595 du 13 juillet 1979 relative à l'organisation du contrôle des matières fertilisantes et des supports de cultures (tourbes, etc).

Cet article additionnel prévoit que l'utilisation de produits non homologués sur le territoire français sera interdite. La suppression des contrôles aux frontières dans le cadre communautaire, rend cette disposition essentielle, les autres pays de la Communauté pouvant, en effet, autoriser la commercialisation de produits non homologués en France.

En outre, cet article permet la délivrance d'autorisations provisoires à des fins d'expérimentation.

- Le I aménage l'article 2 de la loi n° 79-595 du 13 juillet 1979 qui fixe le régime de l'importation et de la commercialisation des fertilisants et des supports de culture, subordonnées à une homologation.

- Le II procède à une coordination avec l'article 4 de la loi n° 79-595 du 13 juillet 1979.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Article 44 -
(article 276-4 du code rural)

Idendification des équidés

Cet article tend à rendre obligatoire l'identification des équidés.

1. L'identification des cheptels

L'identification des animaux de rente
vise plusieurs objectifs : suivi technique des élevages, suivi sanitaire des animaux, contrôle des performances en vue de l'amélioration génétique, usage de mentions valorisantes dans les filières, gestion des aides, fiscalité.

Les principaux textes réglementaires qui l'organisent sont les suivants : directive communautaire 92/102 du 27 novembre 1992 concernant l'identification et l'enregistrement des animaux : arrêté du 28 novembre 1980 sur l'identification des veaux et porcins destinés à la boucherie ; arrêté du 22 novembre 1979 aux transactions sur les reproducteurs porcins ; arrêtés du 18 juillet 1969 relatif à l'identification des porcins et à l'immatriculation des cheptels ; décret n° 69-422 du 6 mai 1969 relatif à l'identification des animaux et aux enregistrements zootechniques ; loi n° 66-1005 du 28 décembre 1966 sur l'élevage.

Pour les ovins et caprins

L'application de la directive communautaire 92/102 sur l'identification des ovins et caprins a rendu obligatoire, à compter de 1997, la tenue d'un registre qui a été fourni aux éleveurs en décembre 1996 par les établissements départementaux d'élevage (EDE) où doit être porté au minimum l'effectif total des " jeunes " et béliers au 1 er janvier 1997, l'effectif des animaux éligibles à la prime compensatrice ovine (PCO), et les flux d'animaux : date d'entrée et de sortie, origine (nom du vendeur, numéro de cheptel à 8 chiffres), destination (nom de l'acheteur, de l'abattoir...).

Tous les animaux doivent être marqués d'un repère simple. C'est l'arrêté du 30 mai 1997 qui a précisé les dispositions d'identification. Ainsi, le numéro d'identification est apposé à l'oreille gauche.

Le contrôle sur place des effectifs de brebis et chèvres bénéficiant de la prime PCO est effectué à partir du registre tenu à jour par l'éleveur.

Pour le cheptel bovin

L'identification des bovins est confiée aux éleveurs eux-mêmes depuis le décret du 30 août 1997. Avant, elle était confiée aux EDE (décret n° 95-276 du 9 mars 1995).

Les dispositions déjà prévues par la directive 92/102 s'étant avérées insuffisantes notamment lors de la crise dite de la " vache folle ", le conseil a adopté, le 21 avril 1997, un système communautaire d'identification et d'enregistrement des bovins ainsi que les règles d'étiquetage de la viande bovine et des produits à base de viande bovine qui doit être opérationnel depuis le 1 er janvier 1998. Chaque Etat-membre est tenu d'établir un système d'identification et d'enregistrement des bovins comportant :

- une identification individuelle des animaux et des exploitations (obligatoire dans la CEE à compter du 1 er janvier 1998). Elle est, en France, basée sur un marquage à l'oreille droite d'un numéro national à 10 chiffres (par tatouage ou la fixation d'une boucle plastique couleur saumon ou d'une plaquette métallique). A l'oreille gauche est fixée une boucle plastique couleur saumon, indiquant le numéro de cheptel de naissance et le numéro de travail. La notification de la naissance et des données d'identification devra être effectuée à l'EDE ;

- des bases de données informatisées, qui devront être opérationnelles avant le 31 décembre 1999,

- des registres individuels (le registre des bovins) tenus dans chaque exploitation.

Les animaux dûment identifiés reçoivent un passeport (tout animal provenant d'un Etat-membre conserve sa marque d'origine) dans les quatorze jours suivant la notification de la naissance ou, dans le cas d'animaux importés, de la nouvelle identification. Lorsqu'un animal est déplacé, il doit être accompagné de son passeport. Chaque détenteur d'animaux (excepté les transporteurs) tient à jour un registre et signale toutes les naissances, les déplacements et les décès d'animaux dans l'exploitation en précisant la date, dans les sept jours suivant celle-ci (Règlement. n° 820-97 du 21 avril 1997, entré en vigueur le 1 er juillet. Ces règles ont été complétées par des règlements d'application de la Commission (n° 494/98/CE du 27 février 1998, n°s 2629/97/CE et 2630/97/ce du 29 décembre 1997).

Pour les cheptels porcins

Conformément à l'arrêté du 18 juillet 1969 relatif à l'immatriculation des cheptels, il appartient aux éleveurs de s'adresser à l'EDE de son département pour se faire attribuer un ou plusieurs numéros de cheptel et indicatifs de marquage pour son ou ses lieux d'élevage des porcs. L'identification est constituée par le numéro de cheptel à 8 chiffres précédés des caractère FR (signifiant France) et par l'indicatif de marquage complémentaire indiquant la localisation de l'élevage.

2. Le dispositif actuel concernant les équidés

L'article 276-4 se trouve dans le titre V (de la protection des animaux domestiques et des animaux sauvages apprivoisés ou tenus en captivité) du Livre II (des animaux et des végétaux) du code rural.

Cet article, dans sa version actuelle, prévoit que tous les équidés 45( * ) faisant l'objet d'un transfert de propriété doivent être préalablement identifiés par tatouage ou par tout autre procédé agréé par le ministre.

Le décret n° 97-1007 du 30 octobre 1997 modifiant le décret n° 76-352 du 15 avril 1976 fixant les modalités d'application aux équidés de la loi n° 66-1005 du 28 décembre 1966 sur l'élevage leur a en outre imposé de les faire identifier et immatriculer lorsqu'ils participent à une manifestation publique, sont inscrits sur un livre généalogique ou sont transférés dans un autre Etat-membre de la Communauté européenne. L'immatriculation doit être effectuée dans les six mois suivant la naissance. Environ 55.000 chevaux sont ainsi identifiés, soit par une marque au fer rouge, soit par un tatouage à l'intérieur des lèvres, soit par micro-puce placée sous le cuir (obligatoire pour les trotteurs). En outre, tout équidé destiné à la boucherie doit être identifié préalablement à son entrée à l'abattoir.

Ces mesures d'identification sont incomplètes et permettent à certaines personnes d'organiser des trafics de chevaux.

3. Le dispositif proposé pour l'article 44 du projet de loi

La rédaction proposée par l'article 44
pour l'article 276-4 du code rural complète et modifie le dispositif en vigueur :

- l'identification est obligatoire pour tout propriétaire d'équidés et non plus seulement lors d'un transfert de propriété ;

- tout changement de propriété doit être déclaré aux autorités compétentes.

Actuellement, l'absence d'identification préalable à la cession d'un équidé est punie d'une contravention de 3 e classe (600 à 1.300 francs d'amende). Les nouvelles sanctions en cas de non respect des dispositions de l'article 276-4 du code rural devraient être fixées dans le décret prévu par le projet de loi. En effet, la valeur marchande des équidés justifient un régime uniquement contraventionnel. Rappelons que cette valeur marchande des équidés (10.000 francs en moyenne pour un cheval de selle, c'est-à-dire un cheval sans origine définie, 4.500 francs à 5.000 francs pour une carcasse de cheval de selle ou de trait (prix fixé au kilogramme à l'entrée en abattoir, variable selon des critères de conformation de qualité) et 25.000 francs à 50.000 francs pour un cheval de course moyen).

4. Les propositions de votre commission

Votre rapporteur approuve ce dispositif.

Il s'est interrogé sur la nécessité d'aller au-delà. En effet, pour assurer la transparence et la cohérence des numéros de cheptels sur l'ensemble du territoire, il est important que l'attribution des numéros de cheptel de toutes les espèces soit assurée par un seul organisme. Les EDE sont déjà missionnés pour attribuer les numéros de cheptels pour les espèces bovine, ovine, caprine et porcine depuis 1966, il pourrait apparaître logique d'étendre leur activité aux autres espèces.

Par ailleurs, pour des raisons de préservation de la santé des cheptels, il est indispensable de répertorier, pour certaines espèces, tous les élevages existants, y compris si ces élevages ne livrent pas leur production en vue de la consommation. La notion de " livraison au public en vue de la consommation " prévue dans le projet de loi voté par les députés ne répond pas à ce besoin. Il est nécessaire de rendre obligatoire la déclaration de tout cheptel quelle que soit sa destination et de fixer espèce par espèce les possibilités de dérogation.

Enfin, il pourrait être souhaitable de rassembler sous un même article l'obligation d'identification pour toutes les espèces qui y sont soumises. Par contre, seuls les animaux des espèces identifiées par un numéro individuel unique peuvent et doivent faire l'objet d'une déclaration de changement de détenteur.

Votre rapporteur estime néanmoins nécessaire que cette réforme fasse l'objet de négociations entre les pouvoirs publics et les organisations professionnels avant de proposer un texte définitif.

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification

Article 44 bis -
(Articles 253, 253-1 et 253-2 du code rural) -

Mesures relatives au contrôle des élevage, au suivi sanitaire dans les abattoirs et aux pouvoirs des agents habilités

Cet article modifie les articles 253, 253-1 et 253-2 du code rural, qui tendent à renforcer le contrôle des élevages, le suivi sanitaire dans les abattoirs et les pouvoirs de destruction et de traitement des produits des agents habilités.

L'article 44 bis est composé de trois paragraphes.

L'article 253 du code rural

Le paragraphe I de l'article 44 bis donne une nouvelle rédaction de l'article 253 qui interdit la vente et la livraison à la consommation de la chair des animaux soit morts de maladies quelles qu'elles soient, soit abattus au motif qu'ils ont été atteints de certaines maladies, comme par exemple la peste bovine.

Le texte proposé pour l'article 253 du code rural est composé de quatre paragraphes ayant trait aux mesures relatives à l'enregistrement et au contrôle des élevages et au renforcement des pouvoirs des agents de contrôle.

Le paragraphe I prévoit que les détenteurs professionnels d'animaux appartenant à des espèces dont la chair ou les produits doivent être livrés au public en vue de la consommation doivent déclarer leur élevage à l'autorité administrative, qui leur attribue un numéro d'identification.

Cette obligation de déclaration des élevages d'animaux dont les produits sont destinés à la consommation permet de recenser tous les élevages, y compris les plus singuliers.

Cette contrainte constitue une condition essentielle au bon fonctionnement du dispositif de contrôle des maladies contagieuses animales et un élément important dans la maîtrise de la qualité sanitaire des denrées d'origine animale livrées à la consommation.

Cependant, tout en constituant une contrainte supplémentaire pour les administrés, cette obligation devrait peser seulement sur les élevages ne faisant pas l'objet d'un programme de prophylaxie des maladies contagieuses officielles (les élevages de bovins, ovins, caprins, porcins, qui représentent l'essentiel du cheptel national, sont déjà recensés). D'après les informations obtenues par votre rapporteur auprès des services du ministère de l'agriculture et de la pêche, sont principalement visés par cette disposition les élevages de volailles. La mesure concernerait également certains élevages de chevaux, les élevages de pigeons, lapins, poissons et escargots.

Le paragraphe II prévoit ensuite que, selon des modalités fixées par arrêté du ministre de l'agriculture, tout éleveur d'animaux appartenant à des espèces dont la chair ou les produits doivent être livrés au public en vue de la consommation (ce qui exclut donc le cas de l'autoconsommation, assez importante en France non par les volumes traités, mais par le nombre de personnes concernées), tient à jour un registre d'élevage conservé sur place et présenté à toute réquisition des agents visés à l'article 259 du code rural.

Ce registre contient un recensement chronologique des informations sanitaires, zootechniques (soit, pour celles-ci, essentiellement la croissance et la reproduction des animaux) et médicales relatives à l'élevage concerné ; tout vétérinaire est tenu d'y mentionner les interventions qu'il y a opérées.

Cette mesure, qui résulte de la transposition en droit national des dispositions de l'article 10 de la directive n° 96/23/CEE du Conseil du 29 avril 1996, constitue une contrainte sensible pour les éleveurs qui doivent tenir à jour un registre, et pour les vétérinaires, obligés d'y consigner les traitements administrés aux animaux. Ce registre est à la disposition des agents visés aux articles 215-1, 215-2, 259, 283-1 et 283-2, c'est-à-dire les vétérinaires inspecteurs, les agents techniques sanitaires et les préposés sanitaires et les agents du service d'Etat d'hygiène alimentaire.

Elle a évidemment pour objectif l'amélioration du contrôle de la salubrité des denrées animales par une prise en considération des informations concernant la période d'élevage et notamment des données relatives aux traitements médicaux susceptibles de laisser des résidus toxiques dans les productions animales ; ceci devrait permettre, d'ailleurs, un allégement des contrôles physiques effectués en abattoir.

Votre rapporteur estime que conserver les ordonnances cinq ans pour toutes les espèces animales n'a pas de sens dans la mesure où les âges d'abattage sont extrêmement variés : trois mois pour les poulets, jusqu'à sept ou huit ans pour une vache laitière.

Le délai de conservation doit donc s'apprécier en fonction d'une durée de vie moyenne de l'animal.


Le paragraphe III précise que le ministre de l'agriculture fixe par arrêté la liste des espèces et des catégories d'animaux qui doivent être accompagnées, lorsqu'elle sont dirigées vers un abattoir, par une fiche sanitaire ainsi que les informations d'ordre sanitaire issues du registre d'élevage qui doivent y être portées.

Cette mesure est issue de la transposition de la directive n° 92-116 en date du 17 décembre 1992.

Une meilleure connaissance de l'état de santé du cheptel -et donc une meilleure maîtrise de la salubrité des denrées animales destinées à la consommation- est l'objectif recherché par la création de cette fiche sanitaire d'accompagnement.

D'après les informations recueillies par votre rapporteur auprès des services du ministère de l'agriculture, de la pêche et de l'alimentation, le secteur des volailles, puis celui des porcs devraient être successivement concernés par cette mesure.

Si la technique du registre d'élevage ainsi que celle de la fiche sanitaire sont largement pratiquées actuellement dans des groupements d'élevage intégrés, le texte proposé par l'article 44 bis pour les trois premiers paragraphes de l'article 253 a pour but de prévoir que le registre d'élevage sera désormais obligatoire pour tous les éleveurs dont les produits sont livrés à la consommation humaine et que la fiche sanitaire sera obligatoirement appliquée, et ce de façon progressive, aux différentes catégories d'animaux .

Votre rapporteur approuve ces dispositions, qui permettront de parvenir à un système d'information efficace sur la santé de notre cheptel.

Il souhaite néanmoins souligner
que les précisions zootechniques demandées ne doivent pas augmenter de manière trop importante les formalités administratives, en exigeant des intéressés le recensement de certaines données zootechniques ne concourant pas directement à la salubrité des produits.

Le paragraphe IV comprend trois alinéas relatifs au renforcement des pouvoirs des agents de contrôle.

Il est prévu qu'en cas de non respect des dispositions (essentiellement la mise en place de fiches sanitaires accompagnant les animaux, lorsqu'ils sont dirigés vers un abattoir) les agents habilités par l'article 259 peuvent différer ou interdire l'abattage des animaux, dans l'attente des renseignements sanitaires nécessaires à l'accomplissement de leur mission pour autant que cette mesure n'affecte pas de manière disproportionnée le fonctionnement de l'abattoir et que ces renseignements puissent être obtenus dans un délai raisonnable compatible avec le respect des règles relatives au bien être des animaux.

Les agents mentionnés ont également la possibilité de différer ou d'interdire l'abattage des animaux, lorsqu'ils disposent d'éléments leur permettant de conclure que les viandes examinées seraient impropres à la consommation humaine ou encore que les délais d'attente ou de retrait pour les médicaments ou les additifs n'ont pas été respectés.

C'est au détenteur des animaux qu'incombe la garde des animaux concernés ; il doit également prendre toutes les mesures utiles pour assurer leur bien être.

Par ailleurs, en cas de non présentation dans les quarante-huit heures des documents sanitaires d'accompagnement, les animaux sont saisis et abattus.

Votre rapporteur juge inadmissible que puissent encore circuler des animaux non identifiés et estime que cette disposition permet seule de garantir réellement la traçabilité du produit.

Soulignons que cet article transpose une disposition de la directive n° 92/116/CEE du conseil en date du 17 décembre 1992.

Les agents du service d'inspection peuvent différer l'abattage jusqu'à l'obtention d'informations sur les conditions d'élevage des animaux. Cette obligation d'information donne une base technique meilleure au contrôle, le facilite et permet de l'adapter au risque.

En outre, les vétérinaires inspecteurs habilités en vertu de l'article 259 procèdent à la saisie et au retrait de la consommation humaine ou animale des viandes qui en sont issues.

Enfin, il est précisé que les frais entraînés par ces mesures décidées à la suite de la constatation du non respect des dispositions mentionnées ci-dessus sont à la charge exclusive du propriétaire ou du détenteur ; il est indiqué que les mesures en cause ne donnent lieu à aucune indemnité, précision que votre rapporteur souhaite supprimer en vous proposant un amendement . En effet, étant en présence d'infractions, il est logique que les contrevenants ne perçoivent d'indemnités pour les frais occasionnés lors de la constatation de ces infractions.

De plus, il importe que le propriétaire ou le détenteur des animaux concernés puissent présenter ses observations.

2. L'article 253-1 du code rural


Le paragraphe II insère dans le code rural un article 253-1 nouveau composé de cinq alinéas.

Le premier alinéa prévoit que le propriétaire ou le détenteur a quarante-huit heures pour présenter aux agents habilités les informations manquantes d'un animal qui a été présenté à l'abattoir sans être identifié conformément à la législation en vigueur.

A l'issue de ce délai de 48 heures, l'animal est abattu. En l'absence d'informations permettant d'établir son âge et son origine, les vétérinaires inspecteurs procèdent à la saisie et au retrait de la consommation humaine ou animale des viandes qui sont issues de l'animal abattu (deuxième alinéa).

Avant la saisie de ces viandes, le propriétaire ou détenteur est mis en mesure de présenter ses observations et dispose d'un nouveau délai de 48 heures pour produire les informations utiles (troisième alinéa).

Le quatrième alinéa précise que durant ces deux délais de 48 heures (l'un avant l'abattage, l'autre avant la saisie) le propriétaire ou le détenteurs doit conserver la garde de l'animal et des viandes -ce qui exige un processus de réfrigération et doit s'assurer soit du bon entretien de l'animal soit de la bonne conservation des viandes.

Le dernier alinéa indique que les frais induits par des mesures prises à la suite de la constatation du non respect des dispositions sur l'identification soit à la charge du propriétaire ou du détenteur et ne donnent lieu à aucune indemnité. Votre rapporteur vous propose de supprimer cette précision peu utile.

Animal présenté à l'abattoir

Identification correcte

Identification incorrecte

48 heures pour présenter les pièces

Chaîne d'abattage, de découpe, de distribution, de commercialisation et d'emballage

Informations produites

Informations non produites

Abattage

48 heures pour présenter ses observations et produire les informations

Informations non produites

Informations produites

Saisie et retrait

3. L'article 253-2 du code rural

Le paragraphe III insère dans le code rural un nouvel article 253-2 composé de deux alinéas.

Le premier alinéa prévoit que, lorsqu'il est établi que les denrées destinées à la consommation humaine présentent un danger pour la santé publique, les vétérinaires inspecteurs ordonnent leur destruction ou la conduite d'un traitement permettant d'éliminer ledit danger avant la consommation.

Le deuxième alinéa indique que le ministre de l'agriculture fixe les critères applicables aux élevages qui produisent ces denrées ainsi que les conditions de leur assainissement.

Cette nouvelle disposition permettra de retirer de la consommation des denrées qui, provenant d'une exploitation contaminée, risquent d'être contaminées sans qu'il soit toujours possible de mettre en évidence leur contamination.

La base de la décision est donc clairement l'élevage et non plus le produit.


Votre rapporteur vous proposera de compléter ce paragraphe par un nouvel alinéa. En effet, le coût du retrait de la consommation de toute une production étant élevé, il est nécessaire de prévoir une aide de l'Etat aux propriétaires des animaux ou des denrées qui ont dû accepter leur destruction ou leur traitement. C'est l'hypothèse de l'abattage du troupeau rencontrée avec l'ESB qui est ici visée. Toutefois, l'attribution de cette aide est subordonnée à la mise en place sans délai, par les intéressés, de procédures d'auto-contrôle.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 44 ter -
(Article 254 du code rural) -

Mesures relatives aux anabolisants

L'article 44 ter modifie la rédaction des articles 254 et 255 du code rural et rétablit les articles 256 et 338 : il traite des mesures relatives aux anabolisants, de celles concernant les établissements traitant des produits d'alimentation animale, du renforcement des pouvoirs des agents de contrôle et des dispositions pénales.

Ces dispositions figuraient dans le projet de loi relatif à la qualité sanitaire des denrées destinées à l'alimentation humaine ou animale, dont l'examen en séance publique a été interrompu en raison de la dissolution.

Votre rapporteur s'est fortement inspiré, pour l'examen de ces articles, des commentaires figurant dans l'excellent rapport de notre collègue Marcel Deneux 46( * ) .

1. L'article 254 du code rural

L'article 254, dans sa rédaction actuelle, précise que lorsque des animaux ont dû être abattus en raison d'une affectation particulière (peste porcine...), la chair ne peut être livrée à la consommation qu'en vertu d'une autorisation spéciale du maire, sur l'avis conforme, écrit et motivé, délivré par le vétérinaire sanitaire. Une copie de celle-ci est adressée au préfet. Néanmoins, les poumons et autres viscères sont systématiquement détruits ou enfouis.

Le texte proposé par l'article 44 ter pour l'article 254 du code précité est composé de cinq paragraphes qui encadrent très strictement tout à la fois l'utilisation en élevage de substances susceptibles de demeurer à l'état de résidus toxiques dans les denrées alimentaires d'origine animale et la mise sur le marché de denrées contenant des substances toxiques.

Au paragraphe I, il est prévu d'interdire l'administration, la mise sur le marché, l'introduction sur le territoire métropolitain ou dans les départements d'outre-mer et la détention en vue de leur administration, même dans un but thérapeutique, aux animaux de toute espèce, dont la chair ou les produits sont destinés à l'alimentation humaine, des produits contenant des stilbènes, leurs dérivés, sels ou esters et des substances à action thyréostatique.

Sur ce paragraphe, votre rapporteur vous propose un amendement qui prévoit l'intervention d'un décret en Conseil d'Etat pour fixer les conditions dans lesquelles les dispositions relatives aux stilbènes sont applicables aux carnivores domestiques : en effet, s'il est logique que l'usage des stilbènes soit interdit pour les gros animaux, ces produits sont indispensables pour provoquer une période de chaleur chez les chattes et les chiennes. Cette modification permet donc, par dérogation permettant l'utilisation de ces produits dans le cabinet des vétérinaires canins.

Le paragraphe II interdit, ensuite, de mettre sur le marché ou d'introduire sur le territoire métropolitain ou dans les départements d'outre-mer, pour des animaux appartenant à des espèces dont la chair (la viande) ou les produits (lait par exemple) sont destinés à l'alimentation humaine, ou encore d'administrer à ces animaux, des substances à activité anabolisante, anticatabolisante ou bêta-agoniste.

Ces substances peuvent cependant après autorisation de l'autorité administrative, entrer dans la composition de médicaments, lesquels ne peuvent être administrés que par un vétérinaire ou sous sa responsabilité ayant satisfait aux obligations prévues à l'article 309 du code rural.

Au paragraphe III, sont interdites la détention, la cession à titre gratuit ou onéreux des animaux et des denrées alimentaires eux-mêmes provenant d'animaux ayant reçu une substance dont l'usage est prohibé en application des paragraphes I et II.

Le paragraphe IV prescrit l'administration aux animaux des espèces d'une substance ou composition relevant de l'article L.617-6 du code de la santé publique (cas des substances ne constituant pas des médicaments vétérinaires mais susceptibles d'entrer dans leur fabrication) qui ne bénéficie pas d'une autorisation conforme aux dispositions du code de la santé publique concernant les médicaments vétérinaires ou à celles relatives aux produits ou substances destinés à l'alimentation animale.

Il est en outre précisé qu'il est interdit pour les personnes ayant la garde d'animaux appartenant aux espèces dont la chair ou les produits sont destinés à l'alimentation humaine de détenir une substance ou composition présentant les caractéristiques susmentionnés.

Ces dispositions visent à renforcer la protection de la santé publique et à interdire :

- l'utilisation en élevage de substances susceptibles de demeurer à l'état de résidus toxiques dans les denrées alimentaires d'origine animale ;

- la mise sur le marché de denrées contenant des substances toxiques.

Elles reprennent et complètent les mesures de la loi n° 84-609 du 16 juillet 1984 " relative à l'usage de substances anabolisantes et à l'interdiction de certaines substances ", qui n'avaient pas été codifiées.

Elles appliquent et transposent par ailleurs en droit national plusieurs textes communautaires interdisant l'usage d'anabilisants dont le règlement n° 2377/90 CEE du 26 juin 1990 et la directive 96/23/CEE en date du 20 décembre 1995 relative aux facteurs de croissance.

2. L'article 255 du code rural

L'article 255, dans sa rédaction actuelle prévoit, d'une part, la saisie des viandes des animaux tuberculeux et, d'autre part, soit leur destruction, soit leur utilisation après stérilisation.

Cet article traite, enfin, du lait des animaux susmentionnés et du sang des bovidés qui doit être livré à la consommation.

Le paragraphe II de l'article 44 ter modifie l'article 255 du code rural composé de deux alinéas.

Ces alinéas prévoient le principe d'une procédure d'agrément ou d'enregistrement des établissements de la filière de l'alimentation.

- Le texte proposé pour l'article 255 du code rural, dans son premier alinéa, dispose que les établissements préparant, manipulant, entreposant ou cédant soit des produits ou de simples substances destinés à l'alimentation animale et présentant des risques pour la santé animale ou humaine, soit des matières premières dont l'incorporation dans les aliments pour animaux ou l'utilisation dans l'alimentation animale fait l'objet de restrictions en vue de prévenir la transmission de contournement, ces établissements font l'objet d'un agrément ou d'un enregistrement décidé par l'autorité administrative.

- Dans un second alinéa, il est prévu que le ministre de l'agriculture et ceux chargés de la santé et de la consommation, fixent par arrêté la liste des produits, substances concernés, les conditions auxquelles doivent répondre les établissements, les modalités selon lesquelles leur respect est contrôlé et attesté ainsi que les modalités d'enregistrement et d'agrément des établissements.

Rappelons, pour mémoire, que la fabrication industrielle d'aliments pour animaux est une activité qui s'est fortement industrialisée et développée depuis une trentaine d'années, jouant ainsi un rôle très important dans l'amélioration de la compétitivité des productions animales, notamment celles en hors-sol.

Le développement de cette industrie en amont des filières hors sol et, dans une moindre mesure, des filières d'élevage plus traditionnel, a conduit à trois types de produits commercialisés auprès des éleveurs :

- les aliments complets, aliments prêts à l'emploi, utilisés en élevage hors sol (volailles, lapins, porcins) ;

- les aliments complémentaires destinés à compléter les matières premières produits ou achetées directement par l'éleveur, par leur apport en nutriments (en général protéines), et en vitamines, oligo-éléments et autres additifs, permettant ainsi d'atteindre les objectifs de croissance ou d'engraissement pour lesquels une alimentation complètement traditionnelle ne suffit plus ;

- les pré-mélanges qui sont des mélanges d'additifs et de support organique ou minéral et qui constituent un stade intermédiaire entre les additifs et les aliments composés, visant à diminuer le risque d'une mauvaise homogénéisation ou dilution des additifs dans ces aliments.

Parmi les Etats membres, la France se situe au premier rang pour la fabrication industrielle d'aliments composés : 21.700.000 tonnes en 1994, avant l'Allemagne (18,9 millions de tonnes) et les Pays-Bas (16,1 millions de tonnes), sur un total communautaire de 121,9 millions de tonnes.

La répartition de cette industrie sur le territoire est très hétérogène : les régions les plus productrices sont, en effet, la Bretagne (43%), les Pays de la Loire (16,8 %), Poitou-Charentes (4,8%), Rhône-Alpes (4,5 %) et Nord-Pas-de-Calais (3,9 %).

Ces dispositions transposent en droit national la directive 95/69/CE en date du 22 décembre 1995, adoptée à la demande principalement de la France.

En ce qui concerne le mode de fonctionnement des établissements, la directive 95/69 du Conseil établit un système d'agrément et d'enregistrement applicable aux opérateurs qui fabriquent des matières premières spécifiques, à ceux qui fabriquent ou utilisent des additifs ou pré-mélanges et à ceux qui utilisent des matières premières contenant une teneur en substances indésirables trop élevée pour être utilisées telles qu'elles, ainsi qu'aux revendeurs de ces produits.

Elle impose à ces opérateurs :

- des bonnes pratiques de fabrication et de manipulation pour les substances " sensibles " ou les produits en contenant, de telle sorte qu'au niveau de l'aliment composé, l'homogénéité, la dilution ou la nature de ces substances ne présentent pas de défauts susceptibles d'avoir un effet défavorable sur la santé ou l'environnement ;

- un système de traçabilité qui permet de suivre a posteriori le circuit de ces substances " sensibles  ".

Selon le risque lié au type de substance et à sa concentration dans les produits manipulés, la directive prévoit un agrément (vérification préalable) ou un enregistrement (inspection a posteriori par sondage et règles moins contraignantes).

Elle est complétée par des dispositions sur la distribution des produits " sensibles ", visant à prévenir leur utilisation dans des conditions inadaptées : les produits devant être manipulés par des opérateurs agréés ou enregistrés ne pourront être cédés qu'à de tels opérateurs.

Le dispositif proposé va bien au-delà de la réglementation actuelle, qui comporte seulement :

- une déclaration auprès de l'autorité compétente (décret n° 86-1037, article 13), pour les importateurs et utilisateurs de matières premières dont la teneur en substances indésirables doit être contrôlée ;

- l'obligation de déclaration, l'utilisation " d'équipements appropriés " et la tenue d'un cahier d'entrées et sorties, pour la fabrication et la commercialisation des additifs à vocation zootechnique et des pré-mélanges et aliments contenant de tels additifs (article 4 dernier alinéa et article 7 du décret n° 73-1101).

Il nécessite d'une base législative spécifique, puisqu'il limite la pratique de certaines activités du secteur de l'alimentation animale aux opérateurs ayant bénéficié d'un agrément ou enregistrement de l'autorité compétente.

L'impact du texte proposé pour l'article 255 varie selon que l'on se place du point de vue des opérateurs économiques ou de l'administration.

Pour les opérateurs économiques
, les procédures de déclaration ne sont pas une nouveauté. L'article 44 ter du projet de loi introduit, en revanche, des contraintes renforcées sur le mode de fonctionnement des établissements, en leur imposant une démarche de qualité qui entraînera, le cas échéant, des investissements matériels. La directive prévoit cependant une graduation du niveau de contrainte en fonction des risques liés aux produits manipulés : ce niveau est ainsi plus élevé pour les établissements, mélangeant des additifs que pour ceux incorporant les pré-mélanges d'additifs dans les aliments. Ce nouveau dispositif ne devrait pas entraîner de fermeture d'établissements dans la mesure où les entreprises adapteront le type de produits manipulés au niveau de garanties dont elles disposeront.

Pour l'administration , de nouvelles charges seront induites par les vérifications préalables à l'agrément et les inspections par sondage des établissements enregistrés. Sur la base des déclarations faites au titre du décret n° 73-1101 article 7 et des données de l'Annuaire de l'Alimentation animale, on peut estimer que l'agrément concernera 400 à 600 fabricants industriels ou revendeurs d'additifs, pré-mélanges et aliments composés, et un millier d'éleveurs. L'enregistrement visera 400 à 600 fabricants industriels ou revendeurs et un nombre beaucoup plus élevé d'éleveurs. Il est probable cependant qu'une partie des opérateurs choisira de modifier les procédés de fabrication et les produits utilisés pour relever de la seule procédure d'enregistrement ou ne pas être couvert par le champ d'application de l'agrément-enregistrement.

Votre rapporteur tient à souligner l'intérêt d'un tel dispositif.

3. L'article 256 du code rural

Le paragraphe III rétablit l'article 256 du code rural : il prévoit différentes sanctions administratives en cas :

- de non respect des dispositions de l'article 254 ;

- d'administration aux animaux des espèces dont la chair ou les produits sont destinés à la consommation humaine, d'une substance ou composition relevant de l'article L.617-6 du code de la santé publique, qui bénéficie d'une autorisation sans respect des conditions prévues dans la décision d'autorisations.

Les vétérinaires inspecteurs peuvent ordonner en tout ou partie :

- la séquestration, le recensement, le marquage des animaux de tout ou partie de l'exploitation, puisqu'il ne s'agit pas de maladies contagieuses ;

- le contrôle sanitaire des produits avant leur mise sur le marché ;

- l'abattage puis la destruction de ces animaux et de leurs produits ;

- la destruction des substances en cause et des aliments dans lesquels elles sont incorporées ;

- la mise sous surveillance de l'exploitation pendant les douze mois suivant l'abattage ;

- le contrôle des élevages et établissements ayant été en relation avec l'exploitation concernée, ceci afin de lutter contre d'éventuelles filières.

Ces dispositions reprennent et complètent la loi 84-609 du 16 juillet 1984 relative à l'usage de substances anabolisantes et à l'interdiction de certaines substances, qui n'avait pas été codifiée.

Elles transposent les dispositions communautaires relatives à l'interdiction d'usage des certaines substances (règlement 2377/90 CEE, directive 92/23 CEE relative aux facteurs de croissance) et aux sanctions administratives à mettre en oeuvre en cas d'infraction (directive 96/23 articles 22, 23 et 24).

Elles sont destinées à renforcer la protection de la santé publique en exerçant un meilleur contrôle de la qualité des denrées livrées à la consommation.

L'article 44 ter prévoit que, préalablement à l'exécution des mesures prévues, le propriétaire ou le détenteur de l'animal est mis en mesure de présenter ses observations.

En outre, les frais entraînés par les mesures prévues, décidées à la suite de la constatation du non respect des dispositions mentionnées ci-dessus sont à la charge exclusive du propriétaire ou du détenteur ; il est indiqué que les mesures en cause ne donnent lieu à aucune indemnité, précision que votre rapporteur souhaite supprimer en vous proposant un amendement . En effet, étant en présence d'infractions, il est logique que les contrevenants ne perçoivent pas d'indemnités pour les frais occasionnés lors de la constatation de ces infractions.

4. L'article 338 du code rural

Le paragraphe IV rétablit l'article 338 du code rural en instaurant des dispositions pénales.


Auparavant les sanctions pénales figuraient à l'article 6 de la loi n° 84-609 du 16 juillet 1984 relative à l'usage vétérinaire de substances anabolisantes et à l'interdiction de diverses autres substances : l'amende allait de 2.000 francs à 250.000 francs et l'emprisonnement de dix jours à six mois, ces peines pouvant être doublées en cas de récidive.

L'article 338 du code rural, rétabli par cet article 44 ter comporte quatre paragraphes.

- Au paragraphe I, il est prévu qu'est puni de deux ans d'emprisonnement et/ou 250.000 francs d'amende le fait d'introduire sur le territoire métropolitain ou dans les départements d'outre-mer, de mettre sur le marché ou de céder en vue de son utilisation en élevage un produit visé au A de l'article 254 (produits contenant des stilbènes, leurs dérivés, sels ou esters et substances à action thyréostatique) ou une substance visée au II du même article (substances à activité anabolisante, anticatabolisante ou bêta-agoniste) ne bénéficiant pas d'une autorisation de l'autorité administrative.

- Au paragraphe II, il est prévu une peine de six mois d'emprisonnement et 200.000 francs d'amende pour les autres infractions mentionnées à l'article 254.

- Au paragraphe III, il est prévu une peine de six mois d'emprisonnement et 50.000 francs d'amende dès lors que l'on fait obstacle à l'exercice des fonctions des agents habilités en vertu de l'article 259.

- Le paragraphe IV prévoit des peines complémentaires susceptibles d'être infligées aux personnes physiques : l'affichage ou la diffusion par voie écrite ou audiovisuelle de la condamnation et de la sanction.

Sont également précisées les conditions de responsabilité des personnes morales. Le plafond de la peine d'amende est quintuplé par rapport à celui applicable aux personnes physiques, dans les conditions prévues à l'article 131-38 du code pénal, ce qui conduit à des montants fort élevés de 2,5 millions de francs pour les infractions liées à la dissémination des fléaux, et d'un million de francs pour celles liées au refus d'exécuter les mesures de prophylaxie ou de destruction et désinfection des végétaux contaminés.

En outre, l'affichage ou la diffusion de la condamnation, par la voie écrite ou audiovisuelle, est prévue, à titre complémentaire, pour les personnes morales comme pour les personnes physiques.

- Le paragraphe V abroge, par coordination, les articles 1 à 7 de la loi n° 84-609 du 16 juillet 1984 relative à l'usage vétérinaire de substances anabolisantes et à l'interdiction de diverses autres substances.

Votre commission vous propose d'adopter l'ensemble de cet article ainsi modifié.

Article 44 quater -
-

Mesures diverses relatives au renforcement de la qualité sanitaire des denrées destinées à l'alimentation humaine ou animale

Cet article, composé de quatorze paragraphes, modifie la rédaction de plus d'une douzaine d'articles du code rural et en insère de nouveaux dans ce même code.

Le paragraphe I complète l'article 258 du code rural en renforçant les dispositifs d'inspection pour toutes les denrées alimentaires.

L'article 258 prévoit, dans sa version actuelle, que, dans l'intérêt de la protection de la santé publique, il doit être procédé :

- à l'inspection sanitaire des animaux vivants présentés sur les foires, marchés ou expositions et, avant et après leur abattage, à l'inspection sanitaire et qualitative des animaux dont la chair doit être livrée au public en vue de la consommation ;

- à la détermination et au contrôle des conditions d'hygiène dans lesquelles a lieu l'abattage ;

- à l'inspection de la salubrité et de la qualité des denrées animales ou d'origine animale destinées à cette consommation ;

- à la détermination et à la surveillance des conditions d'hygiène dans lesquelles ces denrées sont préparées et conservées, notamment lors de leur transport et de leur mise en vente.

L'article 44 quater (I) du projet de loi, complétant cet article 258, prévoit qu'il peut être procédé à l'inspection sanitaire, mais aussi qualitative des animaux vivants appartenant à des espèces dont la chair (la viande) ou les produits (lait par exemple) sont destinés à l'alimentation humaine et de leurs conditions de production dans tous les lieux et locaux professionnels autres que les foires, marchés ou expositions, où ils sont détenus et dans les véhicules professionnels de transport.

Par cet ajout, l'article 44 ter (I) élargit clairement le champ d'investigation des contrôles exigés par la protection de la santé publique :

- tout d'abord, ces contrôles, obligatoires au stade de l'abattage et à celui de l'aval de la production dans la rédaction actuelle de l'article 258 du code rural, peuvent désormais -le texte ne rendant pas ces contrôles obligatoires- être effectués en amont des établissements d'abattage , notamment " dans tous les lieux et locaux professionnels ".

- Par ailleurs, l'article 44 ter (I) du projet de loi précise que ces contrôles portent non seulement sur les données sanitaires des élevages, comme l'indique la rédaction actuelle de l'article 258, mais aussi sur les aspects qualitatifs.

- Enfin, l'alimentation et les conditions d'élevage des animaux se trouvent intégrées dans le champ des contrôles , l'inspection des animaux vivants pouvant porter sur les conditions de production.

Le paragraphe II complète l'article 259 du code rural afin de confier de nouvelles missions aux vétérinaires titulaires d'un mandat sanitaire de l'Etat.

Il tend à associer les vétérinaires titulaires du mandat sanitaire (qui sont de droit privé) aux missions de conseil aux éleveurs.

Ces praticiens pourront concourir :

- aux fonctions d'inspection sanitaire et qualitative des animaux vivants appartenant à des espèces dont la chair (la viande) ou les produits sont destinés à l'alimentation humaine sur les foires, marchés ou expositions dans tous les lieux et locaux professionnels de transport ;

- à la surveillance des conditions sanitaires et qualitatives dans lesquelles ces mêmes animaux sont produits, alimentés, entretenus, transportés et mis en vente.

Pour la plupart des maladies qui en sont justiciables, les mesures de prophylaxie et/ou de police sanitaire comportent des interventions à effectuer sur les animaux en cause (prélèvements, vaccinations, etc...).

Conformément aux dispositions de l'article 215-8 du code rural, ces actes ne peuvent et ne doivent être exécutés que par des vétérinaires sanitaires ou, à titre très exceptionnel et dans certaines conditions bien précisées, par des fonctionnaires ou agents de l'Etat spécialement qualifiés à cet effet (article 311-1 du code rural).

Les conditions d'attribution et d'exercice du mandat sanitaire font du vétérinaire sanitaire un agent investi d'une mission de service public qu'il exerce sous l'autorité du Préfet et du Directeur des Services Vétérinaires départementaux.

Cette qualification trouve sa justification dans les considérations ci-après :

- la définition par la loi des missions du vétérinaire sanitaire ;

- l'attribution du mandat sanitaire par le Préfet ;

- la compétence territoriale fixée par le ou les Préfets ;

- la publicité de l'arrêté préfectoral d'attribution du mandat sanitaire dans le recueil des actes administratifs de la préfecture et dans deux journaux locaux ;

- l'obligation du respect des prescriptions techniques édictées par le Ministre chargé de l'Agriculture ;

- l'obligation de rendre compte de l'exécution des missions ;

- l'obligation du respect des tarifs de rémunérations fixés conformément à la procédure réglementaire définie par le décret n° 90-1032 du 19 novembre 1990 ;

- l'éventualité d'une désignation d'office par le Préfet, désignation qui ne peut être refusée ;

- la procédure disciplinaire pouvant aller jusqu'à la révocation à titre définitif.

L'administration compétente est ainsi en mesure de se démultiplier et de couvrir la totalité du terrain pour intervenir et faire appliquer partout la réglementation en vigueur.

Dans un souci d'une prise en compte de l'hygiène alimentaire depuis l'amont de la filière, les possibilités d'inspection et de contrôle devant être étendues aux produits dans les exploitations et les élevages avec l'appui des vétérinaires praticiens, la logique commande à l'évidence que la loi élargisse à cet effet le champ d'attribution des agents chargés de missions de service public que sont les vétérinaires investis d'un mandat sanitaire au titre de l'article 215-8 du code rural.

Votre rapporteur, par cet amendement, ne remet pas en cause le dispositif adopté par l'Assemblée nationale : il ne fait que l'insérer à l'endroit adéquat dans le code rural.

En effet, les vétérinaires titulaires du mandat sanitaire prévu par l'article 215-8 du code rural sont associés, à travers les prophylaxies, à la police sanitaire des animaux que l'Etat conduit depuis longtemps. Le texte adopté par l'Assemblée nationale vise à les associer également à la surveillance sanitaire et qualitative des animaux, et de leur conditions de production, d'alimentation et de transport.

L'inclusion de ces nouvelles dispositions au sein de l'article 259 du code rural qui crée le service d'Etat d'hygiène alimentaire pose néanmoins problème dans la mesure où les articles 253,253-1,253-2, 256, 259-1 et 259-2 confient aux agents habilités en vertu de l'article 259 ou aux vétérinaires inspecteurs habilités en vertu de l'article 259 des pouvoirs de police administrative importants. Or, ces pouvoirs doivent être réservés aux fonctionnaires ou agents de l'Etat. Dés lors il y a lieu d'insérer les dispositions adoptées par l'Assemblée nationale en créant un article spécifique.

Le paragraphe III insère six nouveaux articles dans le code rural : il s'agit de :

l'article 258-1 qui prévoit des mesures de prévention des risques d'origine alimentaire pour la mise en place d'un dispositif de collecte, de traitement et de diffusion d'informations.


Le premier alinéa de ce nouvel article 258-1 du code rural prévoit que l'autorité administrative peut, selon des modalités définies par un décret en Conseil d'État, décider de mesures visant la collecte, le traitement et la diffusion d'informations relatives aux denrées visées à l'article 258 en vue d'études épidémiologiques des affections et maladies liées à leur consommation.

Le deuxième alinéa de ce nouvel article 258-1 du code rural indique que le décret précise les conditions dans lesquelles les producteurs, les distributeurs et les laboratoires agréés ou reconnus par l'autorité administrative sont tenus de communiquer à celle-ci des résultats d'examens concernant une denrée ou un groupe de denrées, lorsque cela s'avère nécessaire pour prévenir ou maîtriser les risques pour la santé humaine ou animale.

Le troisième et dernier alinéa de l'article 258-1 du code rural prévoit que ces résultats sont portés à la connaissance des autorités sanitaires. C'est le réseau national de santé publique, ainsi que le Conseil supérieur de l'Hygiène, qui sont notamment visés dans cet alinéa.

On rappellera pour mémoire que ce réseau national de santé publique a été créé en 1992 sous la forme d'un groupement d'intérêt public constitué entre l'État, l'INSERM et l'École nationale de santé publique pour renforcer le dispositif français d'intervention épidémiologique.

Ces dispositions nouvelles du code rural s'inscrivent ainsi dans une logique de santé publique , celle de la protection contre les zoonoses (les maladies animales transmissibles aux hommes), étant précisé que les recherches menées portent sur les aliments et non sur les malades.

Selon les informations obtenues par votre rapporteur, le décret en Conseil d'État prévu à l'article 44 quater (III) du projet de loi précisera les conditions dans lesquelles les données et informations correspondantes sont collectées, traitées puis diffusées. En outre, il précisera également dans quelles conditions les producteurs, les distributeurs et les laboratoires agréés ou reconnus par l'autorité administrative sont tenus de communiquer à cette dernière les résultats d'examens menés sur une denrée ou un groupe de denrées. Ces transmissions d'informations devraient être limitées à un nombre réduit d'hypothèses par le décret en Conseil d'État.

Si la loi n° 89-412 du 22 juin 1989 codifiée à l'article 214-1A du code rural permet déjà au ministre de l'agriculture de mettre en place et de diffuser des enquêtes épidémiologiques en matière de santé animale, l'article 44 quater (III) présente un certain nombre d'avantages.

Il vise tout d'abord à permettre la réalisation d'enquêtes portant sur l'aval, c'est-à-dire sur les denrées alimentaires, puisque c'est la collecte des données sur les contaminations alimentaires qui est ici visée.

Ensuite, l'analyse des résultats des enquêtes épidémiologiques aidera à définir les mesures de prévention des risques d'origine alimentaire et à mieux cibler les actions de contrôle.

Par ailleurs, ce nouvel article donnera une base juridique solide aux plans de surveillance déjà mis en place par l'administration.

En outre, l'article 44 quater (III) du projet de loi permettra une connaissance précise de la situation sanitaire de la France, basée sur des enquêtes menées avec toute la rigueur scientifique, et de nature à améliorer l'image des produits alimentaires français à l'étranger, tant dans la Communauté européenne que dans les pays tiers, et à faciliter leur exportation.

Enfin, ces dispositions permettront de répondre aux obligations communautaires d'information épidémiologique découlant de la directive n° 92/117 du Conseil du 17 décembre 1992 concernant les mesures de protection contre certaines zoonoses et certains agents zoonotiques chez des animaux et dans les produits d'origine animale en vue de prévenir les foyers d'infection et d'intoxication dus à des denrées alimentaires.

L'article 258-2 met en place la traçabilité des produits d'alimentation humaine ou animale.

Cet article comporte deux alinéas :

Le premier prévoit qu'un décret en Conseil d'État détermine les produits et denrées dont les producteurs et les distributeurs peuvent être tenus de garantir la traçabilité. Ceux-ci peuvent être amenés à établir et tenir à jour des procédures écrites d'informations enregistrées et d'identification des produits ou lots de produits, afin d'en connaître les conditions de production et de distribution.

Le second précise que ce décret indique les étapes de production et de commercialisation pour lesquelles la traçabilité doit être assurée ainsi que les moyens à mettre en oeuvre en fonction de la taille des entreprises.

En matière de traçabilité, il est nécessaire de distinguer :

- la traçabilité en tant que moyen de preuve de la conformité du produit fini à certaines caractéristiques (origine, mode de production,...) prédéfinies, par exemple dans un cahier des charges ;

- la traçabilité en tant que moyen de " remonter " la filière alimentaire en cas de problème, par exemple de toxi-infection alimentaire collective.

En ce qui concerne le premier aspect, les garanties officielles mises en place par les pouvoirs publics (appellation d'origine contrôlée, label, certification de conformité, agriculture biologique), qui sont basées sur le respect de cahier des charges de production, contrôlée par des organismes publics ou agréés par l'État, permettent d'apporter toutes les garanties aux consommateurs. La maîtrise complète de la traçabilité des produits bénéficiant de ces garanties officielles est systématiquement exigée afin de gérer la production et assurer les contrôles.

Par ailleurs, les opérateurs qui souhaitent communiquer sur l'origine de leurs produits doivent être en mesure de démontrer aux services de contrôle qu'ils maîtrisent suffisamment la traçabilité de leurs produits. Pour ce faire, ils peuvent utiliser les normes AFNOR en cours d'élaboration.

En ce qui concerne le second aspect, plusieurs éléments déjà existants permettent aux services de contrôle de remonter la filière :

- les règles d'étiquetage fixent l'obligation d'indiquer sur les produits préemballés le nom et l'adresse du responsable de la mise sur le marché du produit, ainsi qu'un numéro de lot ;

- les produits animaux sont soumis à un marquage sanitaire qui permet de connaître l'établissement (abattoir, atelier de découpe, laiterie, ...) qui a assuré la transformation du produit ;

- pour la viande bovine, il convient de préciser que les animaux sont identifiés à l'aide d'une boucle placée à l'oreille, qui permet de connaître les cheptels de naissance et l'âge des animaux.

C'est à ce second volet que cet article donne une consécration législative , la traçabilité étant devenue une exigence essentielle depuis la crise de l'ESB. La traçabilité des produits devrait ainsi répondre aux demandes des consommateurs et améliorer l'image des filières françaises de production sur le marché extérieur.

Les avantages attendus de cette disposition sont les suivants :

- la mise en place de dispositifs assurant la traçabilité des produits devrait fiabiliser les filières de production. En fonction des objectifs et des produits, cette traçabilité doit être assurée de manière descendante et ascendante ;

- la traçabilité " descendante " a pour objet de garantir en aval que le produit en amont répondait bien à certains critères, notamment quant à l'origine des animaux ;

- inversement, la traçabilité " ascendante " a pour objet de rechercher l'origine d'un produit ayant occasionné par exemple une toxi-infection alimentaire afin d'imposer des mesures correctives au niveau du chaînon défaillant.

Parmi les produits visés en priorité par ces dispositions, on peut citer les viandes bovines, conformément au voeu émis par le Conseil national de la Consommation, les viandes de cheval importées susceptibles de transmettre la trichine, les oeufs devant provenir d'élevages indemnes de Salmonella entéritidis, les viandes hachées dont l'atelier de préparation doit s'approvisionner auprès de plusieurs abattoirs ou ateliers de découpe.

Pour que cette traçabilité puisse être attestée par les autorités administratives, une procédure précise doit être mise en place. Cette attestation officielle doit être limitée au cas où elle s'avère nécessaire.

Il convient de donner une base législative à cette exigence de traçabilité qui, auparavant, était au cas par cas considérée comme entrant dans le cadre des conditions sanitaires de fonctionnement des établissements, la responsabilité des autres opérateurs approvisionnant l'établissement ou s'y approvisionnant étant alors juridiquement mal définie.

Il convient de noter que l'autorité administrative précise pour chaque produit ou denrée les étapes de production et de commercialisation pour lesquelles la traçabilité doit être assurée, ainsi que les moyens à mettre en oeuvre en fonction de la taille des entreprises.

Votre rapporteur, tout en trouvant opportun cette prise en compte de la taille des entreprises, souligne néanmoins que les résultats doivent être les mêmes pour toutes les entreprises.

En outre, il propose un amendement qui clarifie les obligations des producteurs et des distributeurs . En effet, dès lors qu'un produit figure sur la liste déterminée par l'autorité administrative, il est logique que les producteurs et les distributeurs soient tenus de respecter certaines procédures. De plus, il est inutile de préciser dans la loi que ces procédures sont " écrites " dans la mesure où l'article 259-3 concerne des " informations enregistrées, et d'identification des produits " ; cette précision rédactionnelle est trop réductrice en raison du développement des nouvelles technologies. Votre rapporteur vous propose donc un second amendement .

L'article 259-1 reconnaît aux agents habilités du pouvoir d'ordonner la consignation ou le rappel de lots.

Cet article est composé de trois alinéas.

Le premier alinéa indique que, s'il est établi après son départ de l'établissement d'origine qu'un lot d'animaux ou de denrées présente un danger pour la santé publique, les vétérinaires inspecteurs et les ingénieurs chargés de la protection des végétaux dans leur domaine de compétence en ordonnent la consignation ou le rappel en un ou plusieurs lieux, pour en permettre le contrôle.

Votre rapporteur vous propose un amendement tendant à prévoir l'intervention du préfet lors du lancement de la procédure de rappel.

Le deuxième alinéa prévoit que toute personne (l'éleveur, le producteur, le fabricant, le transporteur, le négociant ou le distributeur) ayant acquis ou cédé un ou plusieurs éléments du lot et ayant connaissance de la décision de consignation ou de rappel doit en informer celui qui lui a fourni la marchandise et ceux à qui il l'a cédée.

Le troisième alinéa précise que les frais résultant de la décision ou de consignation ou de rappel sont à la charge de l'opérateur concerné sans préjudice de la mise en cause de la responsabilité du fournisseur.

Cet article donne une base légale à une mesure de police administrative, -ce qui en permettra la mise en oeuvre dans de bonnes conditions de sécurité juridique-, son non respect étant sanctionné par le nouvel article 338 du code rural.

Actuellement, lorsqu'un produit s'avère, après sa mise sur le marché, présenter un danger, le ministre chargé de la consommation et le ministre chargé de l'agriculture peuvent, par arrêté conjoint pris en application de l'article L.221-3 du Code de la Consommation faire procéder à son retrait du marché.

On conçoit difficilement la mise en place d'une procédure aussi lourde pour un seul lot.

Le rappel est donc, le plus souvent, pratiqué à l'initiative des entreprises. Le rappel de lots a, pour celle-ci, un coût financier moindre que les conséquences dommageables de sa commercialisation, qu'elles sont tenues de réparer. C'est pourquoi, dans la majorité des cas, l'entreprise y recourt spontanément.

Ce nouvel article permet de rendre obligatoire le rappel immédiat des lots dans le cadre d'une mesure de police administrative.

L'article 259-2 reconnaît aux agents habilités des pouvoirs d'injonction aux industriels.


Cet article prévoit que, lorsqu'un établissement présente une menace pour la santé publique, les vétérinaires inspecteurs ordonnent la réalisation de travaux, d'opérations de nettoyage, d'actions de formation du personnel et autres mesures correctives, ainsi que le renforcement des auto-contrôles.

Enfin, en cas de nécessité, le préfet peut prononcer, sur proposition de ces agents, la fermeture de tout ou partie de l'établissement.

Cet article donne ainsi un fondement législatif unique à plusieurs mesures de police administrative, qui répondent à la même préoccupation de protection de la santé publique . Il donne une base légale à certaines interventions du service de contrôle qui en étaient dépourvues, et permet ainsi de graduer les mesures en fonction de la gravité des infractions, l'objectif étant d'éviter le recours à la procédure pénale, soit pour des situations qui peuvent être aisément redressées, soit en cas d'urgence.

Actuellement, les services vétérinaires peuvent constater les infractions aux règles relatives aux conditions de production des denrées alimentaires.

La prescription éventuelle de mesures coercitives n'a pas de base réglementaire et s'apparente à du simple conseil. La non réalisation de ces mesures n'est donc pas susceptible d'être sanctionnée, sauf par un nouveau relevé d'infraction. Ce nouvel article fait entrer cette prescription dans le cadre de la maîtrise sanitaire de la filière alimentaire .

Par ailleurs, la fermeture d'un établissement constitue une décision extrême.

Dans l'état actuel du droit, ces fermetures sont proposées par les services de contrôle aux maires des communes concernées , en vertu des pouvoirs de police que leur confère l'article L.131-2 du code général des collectivités territoriales qui constituait la base légale de l'action des services vétérinaires municipaux avant leur regroupement dans le service de l'État d'hygiène alimentaire par la loi du 8 juillet 1965.

En fait, le code général des collectivités territoriales est tout à fait imprécis en la matière ; il ne prévoit pas explicitement la fermeture des établissements et ne peut donc pas mentionner les modalités de cette fermeture. Ceci a conduit à de nombreux contentieux administratifs.

Or, les maires ont des difficultés pour donner suite à la proposition de fermeture.

Enfin, même lorsque le maire prend un arrêté de fermeture, son l'exécution de celui-ci n'est pas assurée, car si le responsable de l'établissement refuse d'obtempérer, le code général des collectivités territoriales ne prévoit pas de procédure particulière pour faire appliquer la mesure. Il est fait aussi appel au code des débits de boissons, ce qui pourrait parfois être considéré comme un détournement de procédure.

Pour ce qui concerne la procédure judiciaire, elle suppose l'existence d'un délit et nécessite la mobilisation d'un juge d'instruction, qui sera souvent refusée pour ce type d'affaire en raison de l'encombrement des tribunaux dans les grandes villes.

Conformément à l'objectif de meilleure lisibilité de la loi, il convient d'éviter d'avoir à " jongler " entre différents codes pour un même domaine précis, et de regrouper dans le code rural les procédures relatives à l'hygiène alimentaire.

La loi de 1965 ayant transféré du maire à l'État le contrôle des denrées animales ou d'origine animale, les lois de décentralisation ont distingué en ce domaine ce qui relevait de la compétence de l'État, à savoir les contrôles et les mesures de police administrative, et ce qui relevait des collectivités territoriales, à savoir l'expertise purement technique des laboratoires. La fermeture des établissements entrant dans le cadre des mesures de police administrative, il apparaît nécessaire, pour assurer la cohérence du dispositif réglementaire de l'hygiène alimentaire, de la faire relever du représentant de l'État dans le département.

En fonction des risques pour la protection de la santé publique évalués par les vétérinaires inspecteurs, votre rapporteur vous propose un amendement visant à restreindre l'activité d'un établissement à la manipulation ou la transformation de certaines denrées, sans qu'il y ait obligation d'arrêt d'une chaîne de fabrication ou d'interdiction d'utilisation des locaux déterminés comme les termes " fermeture de tout ou partie de l'établissement " pourraient le laisser supposer.

L'article 262-1 est un article de coordination.


Il prévoit que, lorsqu'un règlement ou une décision communautaire contient des dispositions entrant dans le champ d'application du titre IV (du contrôle sanitaire des animaux et des viandes - de l'équarrissage des animaux) du livre du II du code, un décret en Conseil d'Etat constate que ces dispositions constituent des mesures d'exécution de ce titre.

L'article 272 prévoit que les établissements qui traitent des produits animaux visés aux articles 264 et 271 présentant des risques sanitaires doivent, pour les assainir, répondre à des normes précises.

Il prévoit que les établissements qui traitent, en vue de détruire des agents pathogènes, des produits visés aux articles 264 ou 271 (cadavres d'animaux, viandes et abats soumis à l'abattoir reconnus impropres à la consommation humaine et animale, saisies vétérinaires, déchets d'origine animale provenant d'abattoirs ou d'établissements de manipulation ou de préparation de denrées animales ou d'origine animale), doivent répondre à des conditions sanitaires et avoir été agréés ou enregistrés par l'autorité administrative. Celle-ci fixe par arrêté ministériel les conditions d'application de ces différentes dispositions.

L'article 44 quater (III) permet la transposition de la directive CEE n° 90-667 du Conseil du 27 novembre 1990 " arrêtant les règles sanitaires relatives à l'élimination et à la transformation des déchets animaux, à leur mise sur le marché et à la protection contre les agents pathogènes des aliments pour animaux d'origine animale ou à base de poisson ".

Les normes auxquelles doivent satisfaire les établissements en cause sont fixées pour l'essentiel par des directives communautaires. Suivant les dispositions de l'article 44 quater (III) du projet de loi, le respect de ces normes est attesté, selon l'importance du risque que présentent les matières traitées, par un enregistrement ou un agrément décidé par le préfet.

Il faut noter que la création des établissements en cause relève par ailleurs du régime de l'autorisation au titre de la législation sur les établissements classés. En outre, la plupart des établissements concernés étaient déjà soumis à autorisation en vertu des articles 266, 267 et 268 du code rural, la procédure d'agrément se substituant ainsi à la procédure d'autorisation.

Votre rapporteur vous propose d'introduire un paragraphe III bis : en effet, la recherche et la constatation des infractions dans le domaine de la lutte contre les maladies des animaux ou de la protection animale doit pouvoir être opérée dans les abattoirs.

Or la grande majorité des vétérinaires inspecteurs chargés de l'inspection sanitaire en abattoir sont des agents contractuels de l'Etat, recrutés à temps partiel et rémunérés par des vacations horaires.

Ils sont amenés à effectuer des contrôles sur les documents ou certificats sanitaires, voire à diagnostiquer l'existence d'une maladie réputée contagieuse. De même, lors de la manipulation des animaux ou de leur abattage, ils peuvent être amenés à constater des mauvais traitements ou des actes de cruauté envers les animaux.

Il convient donc de les habiliter à rechercher et à constater les infractions dans le domaine de la lutte contre les maladies des animaux ou de la protection animale, comme ils le sont déjà pour les dispositions prises en application du titre IV du code rural relatif au contrôle sanitaire des animaux et des viandes.

De plus, ces vétérinaires encadrent des agents habilités, en vertu des dispositions actuelles, à constater les infractions dans le domaine de la lutte contre les maladies des animaux ou de la protection animale.

La rédaction de ces articles doivent ainsi être cohérents avec celle utilisées aux articles 259 et 275-2 du code rural modifiés par le présent projet de loi.

Le paragraphe IV remplace dans les articles 215-2 et 283-2 du code rural les mots " techniciens des services vétérinaires " par les mots " les ingénieurs des travaux agricoles et les techniciens des services du ministère chargé de l'agriculture ".

- Actuellement, l'article 215-2 du code rural désigne les agents techniques sanitaires et les préposés sanitaires, qu'ils soient fonctionnaires ou agents contractuels à temps complet de l'Etat, et les techniciens des services vétérinaires pour rechercher et constater les infractions aux dispositions des articles 214 à 252 du présent code sur la lutte contre les maladies des animaux et des textes réglementaires pris pour leur application.

Or, par concours interne exceptionnel, certains techniciens des services de catégorie 3 sont devenus ingénieurs des travaux agricoles, donc de catégorie A. Au même titre que les techniciens, ces ingénieurs peuvent effectuer des mission d'inspection en vue de la recherche et de la constatation des infractions visées au titre III du code rural relatif à la lutte contre les maladies des animaux.

Il est logique que ce nouveau corps de fonctionnaires soit inclus parmi les autorités qualifiées au titre de l'article 215-2 du code rural.

En outre, le texte proposé élargit les missions à l'ensemble des techniciens des services du ministère de l'agriculture et non pas seulement les vétérinaires.

- L'article 283-2 désigne les agents techniques sanitaires et les préposés sanitaires, qu'ils soient fonctionnaires ou agents contractuels à temps complet de l'Etat, ainsi que les techniciens des services vétérinaires pour rechercher et constater les infractions aux dispositions des articles 276 à 283 du présent code sur la protection des animaux domestiques et des animaux sauvages apprivoisés ou tenus en captivité et des textes réglementaires pris pour leur application.

La modification proposée à cet article est identique à la précédente.

Le paragraphe V effectue la même substitution à l'article 259 du code rural qu'aux articles 215-2 et 283-2.

Le paragraphe VI modifie le 3° de l'article 215-1 du code de la consommation. Cet article dresse la liste des autorités qualifiées pour procéder, dans l'exercice de leurs fonctions, à la recherche et à la constatation des infractions aux chapitres II à VI du code précité.

Le paragraphe VI, tirant la conséquence des paragraphes IV et V, complète le 3° de l'article 215-1 en mentionnant les ingénieurs des travaux agricoles et les techniciens spécialisés des services du ministère chargé de l'agriculture.

Le paragraphe VII, qui complète l'article 444-3 du code pénal par un 3°, fait référence à " la contrefaçon ou la falsification d'estampilles et de marques attestant l'intervention des services d'inspection ou de surveillance sanitaire de la France ou d'un pays étranger ".

Actuellement, sont punies de cinq ans d'emprisonnement et de 500.000 francs d'amende :

1° La contrefaçon, ou la falsification des sceaux, timbres ou marques d'une autorité publique, ou l'usage de ces sceaux, timbres ou marques, contrefaits ou falsifiés ;

2° La contrefaçon ou la falsification des papiers à en-tête ou imprimés officiels utilisés dans les assemblées instituées par la Constitution, les administrations publiques ou les juridictions, la vente, la distribution ainsi que l'usage de ces papiers ou imprimés ainsi contrefaits ou falsifiés.

Le paragraphe VIII complète l'article 444-4 du code pénal en tenant compte de la modification de l'article 444-3.

Rappelons que l'article 444-4 précise que l'usage frauduleux des sceaux, marques, timbres, papiers ou imprimés visés à l'article 444-3 est puni de trois ans d'emprisonnement et de 300.000 francs d'amende.

Le paragraphe IX complète le premier alinéa de l'article 275-1 du code rural.

L'article 275-1 du code rural prévoit, dans son premier alinéa, que l'introduction sur le territoire métropolitain et dans les départements d'outre-mer " des animaux vivants et de leurs produits " ainsi que " des denrées animales ou d'origine animale " doit satisfaire aux conditions sanitaires ou ayant trait à la protection des animaux fixes par le ministre de l'agriculture.

Dans son deuxième alinéa, il dispose que le ministre de l'agriculture peut imposer un agrément aux personnes physiques et aux établissements destinataires des marchandises mentionnées au premier alinéa, lorsque l'introduction de celles-ci peut constituer un danger grave pour la santé humaine ou animale.

Le troisième alinéa indique, enfin, que le ministre de l'agriculture peut exiger que soient soumis à agrément les personnes physiques et les établissements d'où viennent les marchandises mentionnées au premier alinéa.

Le paragraphe IX prévoit :

- dans son 1° de compléter le premier alinéa de l'article 275-1 du code rural par une phrase indiquant que le ministre " peut notamment exiger que les personnes physiques et les établissements de provenance soient soumis à un agrément ". Ces dispositions figurent actuellement dans le troisième alinéa de l'article 275-1 du code rural.

- Le 2° du paragraphe IX propose enfin la suppression du troisième alinéa de l'article 275-1 du code rural avec le  1°.

Le paragraphe X complète l'article 275-2 du code rural par deux alinéas. Soulignons que l'article  275-2 du code rural est relatif aux conditions sanitaires que doivent remplir les marchandises destinées aux échanges intracommunautaires.

Le texte proposé pour le premier alinéa supplémentaire énonce que les différents organes de contrôle mentionnés dans le code rural (vétérinaires inspecteurs, vétérinaires investis d'un mandat sanitaire, agents de contrôle mentionnés à l'article 259 du code rural) sont habilités à établir et à délivrer tous certificats et documents (certificats sanitaires tout particulièrement) attestant de la conformité aux conditions sanitaires mentionnées dans le texte actuel de l'article 275-2 des animaux, de leurs produits et des produits et denrées destinés à l'alimentation humaine ou animale.

Le second alinéa indique les autorités à même d'exécuter ces contrôles. Il précise, en outre, que les marchandises qui ont subi un contrôle favorable dans un poste d'inspection frontalier habilité d'un autre Etat-membre de la Communauté européenne font l'objet éventuellement des contrôles prévus en application de l'article 275-5 relatif aux échanges intracommunautaires.

Votre rapporteur vous propose un amendement d'ordre rédactionnel.

L'article 44 ter (XI) du projet de loi apporte quelques modifications.

- Tout d'abord, au premier alinéa de l'article 275-4 du code rural :

*il prévoit, par coordination, l'extension aux produits d'alimentation animale du contrôle vétérinaire ;

*il indique, en outre, que ces contrôles ont un objectif non seulement sanitaire, mais aussi qualitatif et zootechnique ou ayant trait à la protection des animaux. Ces contrôles peuvent être systématiques ou non. Il convient de signaler que les contrôles vétérinaires sont maintenus en cas d'importation en provenance d'un Etat tiers.

Le renforcement des contrôles à l'importation devrait permettre d'éviter les distorsions de concurrence résultant de l'importation de denrées répondant à des normes inférieures à celles exigées pour la mise sur le marché français ;

- le second alinéa du texte proposé pour l'article 44 quater (XI) introduit des dispositions nouvelles pour le contrôle des animaux domestiques accompagnant les voyageurs ; le contrôle en ce cas est allégé, peut être effectué dans tout port, aéroport, gare ferroviaire ou routière ouvert aux liaisons internationales et se limiter à un contrôle documentaire effectué par les agents des douanes. Des arrêtés conjoints du ministre chargé de l'agriculture et du ministre chargé des douanes fixent les listes des animaux domestiques concernés ainsi que les modalités du contrôle prévu.

Votre rapporteur , tout en soulignant l'intérêt d'un tel dispositif, vous propose un amendement tendant à réécrire cet article afin de réintroduire le dernier alinéa de l'article 275-4 du code rural, " oublié " dans le texte du projet de loi.

Le paragraphe XII complète l'article 275-5 du code rural relatif aux contrôles effectués en matière d'échanges intracommunautaires.

Il modifie le début du premier alinéa de cet article en ajoutant à la liste des agents chargés des contrôles vétérinaires ceux qui sont mentionnés à l'article 259 du code rural.

Le paragraphe XIII a pour objet de compléter le deuxième alinéa de l'article 35 de l'ordonnance n° 86-1243 du 1 er décembre 1986 relative à la liberté des prix et de la concurrence.

Rappelons que l'article 35 de l'ordonnance précitée indique :

" A peine d'une amende de 500.000 francs, le délai de paiement, par tout producteur, revendeur ou prestataire de services, ne peut être supérieur :

- à trente jours après la fin de la décade de livraison pour les achats de produits alimentaires périssables, à l'exception des achats de produits saisonniers effectués dans le cadre de contrats dits de culture visés à l'article 17 de la loi n° 64-678 du 6 juillet 1964 tendant à définir les principes et les modalités du régime contractuel en agriculture ;

- à vingt jours après le jour de livraison pour les achats de bétail sur pied destiné à la consommation et de viandes fraîches dérivées ;

- à trente jours après la fin du mois de livraison pour les achats de boissons alccoliques passibles des droits de consommation prévus à l'article 403 du code général des impôts ;

- à défaut d'accords interprofessionnels conclu en application de la loi n° 75-600 du 10 juillet 1975 relative à l'organisation interprofessionnelle agricole et rendus obligatoires par voie réglementaire à tous les opérateurs sur l'ensemble du territoire métropolitain pour ce qui concerne les délais de paiement, à soixante-quinze jours après le jour de livraison pour les achats de boissons alccoliques passibles des droits de circulation prévus à l'article 438 du même code
".

L'insertion proposée par le paragraphe XIII a pour objet de raccourcir les délais de paiement à 30 jours pour les produits de conservation ainsi que les poissons surgelés et les plats cuisinés.

Le rapporteur du projet de loi à l'Assemblée nationale s'est montrée favorable, en séance publique, à cet amendement, constatant que le retard de paiement, par rapport au délai contractuel de quarante-neuf jours, n'avait pas diminué en 1997. Il a, à cet égard, souligné que les délais de paiement accordés en 1996 par les fournisseurs à leurs clients correspondaient à un emprunt de 240 milliards de franc. Ainsi, les entreprises agricoles financent-elles indirectement la grande distribution.

Soulignons que les industriels de la conserve appertisée et surgelée, composante de la première industrie de France, représente 28 % des entreprises implantées en zone rurale. Cette industrie emploie plus de 30.000 personnes et réalise un chiffre d'affaires supérieur à 30 milliards de francs.

Les plats cuisinés frais sous vide sont des produits alimentaires périssables, donc soumis aux délais réglementés de l'article 35 de l'ordonnance du 1 er décembre 1986. Les produits lyophilisés, conserves et semi-conserves, en revanche, ne sont pas soumis à des délais de paiement réglementés. Le plus souvent, les conserves sont fabriquées à partir de produits saisonniers achetés par les industriels à des producteurs dans le cadre de contrats de cultures. A ce titre, les délais de règlement de leurs approvisionnements sont expressément exclus des délais réglementés par l'article 35 de l'ordonnance.

Une directive communautaire faisant actuellement l'objet de discussions, le Gouvernement a considéré inopportun le fait de prendre une mesure spécifique pour des produits autres que des produits alimentaires périssables soumis par nature à des rotations de stocks rapides.

Tout en étant conscient que cette question est surtout de nature contractuelle et qu'elle traduit, la plupart du temps, un rapport de forces entre l'amont et l'aval, votre rapporteur est favorable à ce dispositif, pour deux raisons :

- le dispositif proposé ne s'applique pas aux plats cuisinés et aux conserves fabriqués à partir de produits saisonniers récoltés dans le cadre de contrats de cultures, exclus du champ d'application du délai de paiement de trente jours en fin de décade ;

- la proposition de directive présentée au mois de mars 1998 par la Commission européenne prévoit de fixer à vingt et un jours le délai de paiement maximum, sauf clause contraire stipulée dans le contrat de vente.

Le paragraphe XIV concerne la fabrication des pâtes alimentaires. Il modifie les deux premiers articles de la loi du 3 juillet 1934 relative à la fabrication des pâtes alimentaires.

Ce paragraphe vise à mettre la législation française relative à la fabrication des pâtes alimentaire en conformité avec le droit communautaire.

En effet, la loi du 3 juillet 1934 autorise la vente en France de pâtes alimentaires fabriquées uniquement à base de blé dur. Cette législation fait obstacle à l'introduction de pâtes alimentaires fabriquées à partir de blé tendre ou d'un mélange de blé dur/blé tendre.

Ces dispositions contreviennent ainsi au principe de libre circulation
des produits entre les pays membres de l'Union européenne et de l'Espace économique européen.

Les professionnels sont unanimes à reconnaître qu'il n'est pas possible de maintenir la législation en vigueur sur ce point. En revanche, ils considèrent comme essentiel le maintien des règles de fabrication des pâtes alimentaires à base de blé dur, qui sont un gage de qualité et correspondent à une tradition française.

Il s'agit donc de modifier la loi de 1934 afin de garantir la libre circulation des produits au sein de l'Union européenne et de l'Espace économique européen tout en sauvegardant la législation relative à la fabrication des pâtes alimentaires.

Cette position conduit, en conséquence, à proposer le principe de libre circulation de produits légalement fabriqués et commercialisés dans leur pays d'origine.

Ce paragraphe permettra d'éviter que certains producteurs d'Etats soumis également à une réglementation strictement " blé dur " sur leur marché intérieur, cherchent à expédier vers la France des pâtes alimentaires fabriquées selon d'autres normes ou encore se livrent à des détournements de trafic.

Par exemple, un Etat-membre comme l'Italie, principal producteur de pâtes, exporte des pâtes au blé tendre vers d'autres Etats-membres, mais ne commercialise sur son territoire que des pâtes au blé dur.

Il s'agit, en d'autres termes, de faire respecter les traditions nationales et de favoriser la diffusion des produits correspondants, conformément au principe de reconnaissance mutuelle des normes.

Votre rapporteur vous propose un amendement d'ordre rédactionnel.

Votre commission vous propose d'adopter l'ensemble de cet article ainsi modifié.

TITRE V -

GESTION DE L'ESPACE AGRICOLE ET FORESTIER

Ce titre regroupe les articles  45 à 50 du projet de loi. Outre la création d'un document départemental de gestion de l'espace agricole et une disposition relative aux SAFER, la mesure la plus importante de ce titre est l'apparition de zones agricoles protégées.

Votre rapporteur considère en effet essentiel de préserver dans les années à venir, la surface agricole utile qui, depuis 50 ans, n'a cessé de se réduire.

MOINS DE SURFACE AGRICOLE

(en millions d'hectares)

Source : Agreste, Statistique agricole annuelle

Article 45 -
(Articles L.111-1 et 111-2 du code rural) -

Prise en compte des fonctions économique, environnementale et sociale de l'espace agricole et forestier

Cet article vise à prendre en compte la multifonctionnalité de l'agriculture.

L'article  45 du projet de loi comprend quatre paragraphes.

Le paragraphe IA remplace le mot économique par le mot durable.

Rappelons que dans sa version actuelle, l'article L.111-1 du code rural dispose que " l'aménagement et le développement économique de l'espace rural constituent une priorité essentielle de l'aménagement du territoire ".

Le paragraphe I complète l'article L.111-1 en définissant trois fonctions -économique, environnementale et sociale- qui doivent être impérativement prises en compte lors de la mise en valeur et de la protection de cet espace agricole et forestier. Il s'agit ici de reconnaître la trifonctionnalité de l'espace agricole et forestier, et non pas de l'espace rural pris dans sa globalité.

Votre rapporteur vous propose une nouvelle rédaction de cet alinéa afin :

- d'une part, d'affirmer que la préservation du modèle d'agriculture et de gestion de l'espace est, compte tenu de sa diversité, de son histoire, de son rôle dans la culture de nos pays, un objectif d'intérêt général,

- d'autre part, de reconnaître que l'agriculture et la forêt font partie du patrimoine commun et qu'en tant que telles, elles doivent faire l'objet d'une gestion économe et harmonisée au sens de l'article L.110 du Code de l'Urbanisme.

Il n'est pas neutre que le projet de loi d'orientation agricole qui affirme ce principe.

Rappelons que l'article L.110 du code de l'urbanisme indique que :

" Le territoire français est le patrimoine commun de la Nation. Chaque collectivité publique en est le gestionnaire et le garant dans le cadre de ses compétences. Afin d'aménager le cadre de vie, de gérer le sol de façon économe, d'assurer la protection des milieux naturels et des paysagers ainsi que la sécurité et la salubrité publiques, et de promouvoir l'équilibre entre les populations résidant dans les zones urbaines et rurales, les collectivités publiques harmonisent,dans le respect réciproque de leur autonomie, leurs prévisions et leurs décisions d'utilisation de l'espace ".

Le paragraphe II donne une nouvelle rédaction du 1° de l'article L.111-2 du code rural.

L'article L.111-2 actuel précise que, pour parvenir à la réalisation des objectifs définis par le titre 1er du livre Ier du code précité relatif au développement et à l'aménagement de l'espace rural, la politique d'aménagement rural doit  :

1° favoriser le développement de toutes les potentialités du milieu rural ;

2° améliorer l'équilibre démographique entre les zones urbaines et rurales ;

3° maintenir et développer la production agricole tout en organisant sa coexistence avec les activités non agricoles  ;

4° assurer la répartition équilibrée des diverses activités concourant au développement du milieu rural ;

5° prendre en compte les besoins en matière d'emploi ;

6° encourager en tant que de besoin l'exercice de la pluriactivité dans les régions où elle est essentielle au maintien de l'activité économique ;

7° permettre le maintien et l'adaptation de services collectifs dans les zones à faible densité de peuplement.

Le II de l'article 45 substitue à la rédaction actuelle du 1° la version suivante : " favoriser la mise en valeur durable des potentialités et des caractéristiques locales de l'espace agricole et forestier. "

Le paragraphe III modifie le 3° de l'article L.111-2 en intégrant la multifonctionnalité de l'agriculture. Votre rapporteur vous y propose une nouvelle rédaction de ce paragraphe car il serait réellement dommageable d'isoler les activités agricoles et forestières des autres activités qui composent le milieu rural, même si la coexistence entre toutes ces activités n'est pas exempte de conflits. Le maintien de la référence à la coexistence de toutes les activités entre elles a précisément pour but d'offrir un fondement législatif au règlement des dits conflits.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article additionnel avant l'article 45 bis -
(Article L.111-3 du code rural)

Création de locaux d'habitation ou professionnels
à proximité des bâtiments agricoles

Cet article additionnel vise à insérer un nouvel article L.111-3 dans le code rural relatif aux conditions de création de locaux d'habitation ou professionnels à proximité des bâtiments agricoles.

Alors que sont imposées aux bâtiments agricoles (création ou extension) relevant ou non de la législation sur les installations classées des règles d'éloignement par rapport aux constructions et habitations existantes, les mêmes exigences ne sont pas requises en cas de création de locaux d'habitation ou professionnels à proximité de ces mêmes bâtiments, ce qui donne lieu à des conflits croissants.

La nouvelle rédaction de l'article R.111-2 du Code de l'Urbanisme, récemment parue, ne donne pas satisfaction dans la mesure où elle ne fait que compléter la liste des motifs qu'un maire peut invoquer pour accorder ou refuser un permis de construire, sans poser le principe général de la réciprocité.

C'est pourquoi, votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Article 45 bis -
(article  16-1 de la loi n° 76-663) -

Petites carrières de marne

Cet article vise à faire sortir les petites carrières de marne du régime des installations classées.

L'article 16-1 de la loi n° 76-663 du 19 juillet  1976 relative aux installations classées pour la protection de l'environnement est en fait un apport de la loi n° 93-3 du 4 janvier 1993. Il a trait aux dispositions applicables aux exploitations de carrières. Il prévoit que " les exploitations de carrière sont soumises à l'autorisation administrative prévue à l'article 3.

L'autorisation administrative visée à l'alinéa précédent ne peut excéder trente ans.

Cette autorisation ne peut excéder quinze ans pour les terrains dont le défrichement est autorisé en application des articles  L.311-1 ou L.312-1 du code forestier. Toutefois, lorsque l'exploitation de ces terrains est associée à une industrie transformatrice nécessitant des investissements lourds, la durée de l'autorisation d'exploiter pourra être portée à trente ans, après avis conforme de la commission départementale des carrières.

L'autorisation est renouvelable dans les formes prévues à l'article 5.

Toute autorisation d'exploitation de carrières est soumise, dans les vignobles classés appellation d'origine contrôlée, vin délimité de qualité supérieure et dans les aires de production de vins de pays, à l'avis du ministre de l'agriculture après avis de l'Institut national des appellations d'origine et de l`Office national interprofessionnel des vins.

L'article 45 bis propose de compléter le premier alinéa de cet article en excluant du régime des installations classées les carrières de marne de dimension et de rendement faibles utilisées " sans but commercial " dans le champ même des exploitants agricoles ou dans la carrière communale. Ces petites carrières permettent en effet aux maires des petites communes d'entretenir leurs chemins à moindre frais.

Votre rapporteur est tout à fait conscient des difficultés posées par le dispositif prévu pour ces petites carrières aux communes rurales. Néanmoins, il ne souhaite pas instaurer une " brèche " dans la loi de 1993. C'est pourquoi, il vous propose de mettre en place un régime de déclaration. Ce dispositif a deux avantages : d'une part, il maintient la logique du régime des installations classées pour toutes les carrières, les petites carrières de marne faisant donc l'objet d'un contrôle. D'autre part, en substituant au régime d'autorisation un régime de déclaration, il permet de rendre l'exploitation de ces carrières plus souple.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 46 -
(section 1 du chapitre II du titre Ier du Livre Ier (nouveau)
du code rural-article  L.112-1 du code rural) -

Document départemental de gestion de l'espace agricole et forestier

Cet article vise, d'une part, à modifier l'intitulé d'une section dans le code rural, et d'autre part à créer un document de gestion de l'espace agricole et forestier départemental.

L'article 46 est composé de deux paragraphes.

Le paragraphe I modifie l'intitulé de la section 1 du chapitre II du titre Ier du code rural.

Dans cette section 1, intitulée actuellement " élaboration des documents d'urbanisme ", sont incluses les dispositions visant à prendre en compte l'agriculture dans les procédures d'urbanisme. La rédaction proposée est très différente, puisqu'elle serait la suivante : " affectation de l'espace agricole et forestier ".

Le changement proposé par le projet de loi intéresse sa philosophie générale : en effet, les terres agricoles ne doivent pas être utilisables sans limites pour l'urbanisation. L'espace agricole et forestier n'est donc pas une réserve foncière, mais en raison de ses fonctions multiples, un espace approprié à des fins spécifiques. Sans geler la mise en place d'infrastructures, la société doit se donner les outils permettant une véritable négociation et, si besoin, un don sélectif des emprises à artificialiser.

Tout en étant conscient des difficultés à voir figurer dans le code rural des termes empruntés au code de l'urbanisme, votre rapporteur s'interroge sur le bien-fondé du terme d'affectation. Celui de destination n'est-t-il pas plus judicieux ?

Le paragraphe II propose une nouvelle rédaction pour l'article L.112-1 du code rural.

Dans sa version actuelle, l'article L.112-1 du code précité indique que, lors de l'élaboration des documents d'urbanisme et, à défaut, pour l'application du règlement national d'urbanisme aux communes rurales, il doit être tenu compte des particularités locales telles que la situation démographique, le type d'habitat, les besoins en matière de logement et la répartition des terrains entre les différentes activités économiques et sociales.

Le texte proposé par l'article 46 pour l'article L.112-1 du code rural est composé d'un seul alinéa qui vise en fait à reprendre, tout en les modifiant, les dispositions de l'article L.112-2 du code rural. L'article 46 remplace la notion de " carte des terres agricoles " par celle " de documents de gestion de l'espace agricole et forestier ".

La rédaction actuelle de l'article L.112-2 fait référence à une " carte des terres agricoles " publiée dans chaque commune du département et qui doit être consultée à l'occasion de l'élaboration des documents d'urbanisme et des études précédant les opérations susceptibles d`entraîner une réduction grave de l'espace agricole ou d'affecter gravement l'économie agricole de la zone concernée.

La notion de " cartes agricoles " est devenue aujourd'hui obsolète, 10 % seulement des départements les ayant créées. Il est donc logique que ce type d'outils soit remplacé par des documents descriptifs plus pratiques et plus riches en information.

Ces documents pourraient constituer un document de référence utilisable par les pouvoirs publics dans le cadre des documents de planification et des études d'impact pour veiller à la cohérence de leur action au niveau départemental. Ce document devrait être aussi utilisé lors de l'élaboration des documents d'urbanisme, des schémas de carrière ou encore des zones agricoles prioritaires prévues à l'article 47.

La dernière phase du II de cet article prévoit que, préalablement à sa publication et sa diffusion, ce document sera transmis pour avis aux maires des communes concernées, aux associations de propriétaires et d'exploitants forestiers ainsi qu'aux syndicats agricoles représentatifs.

Votre rapporteur vous propose de compléter la liste des organismes consultés . En effet, les Chambres d'Agriculture sont des établissements publics qui sont, de par la loi, associés à l'élaboration ou à la révision des documents d'urbanisme et qui, de ce fait, sont reconnues compétentes en matière de gestion de l'espace. Il est donc naturel qu'elles soient consultées avant la publication des documents de gestion de l'espace agricole et forestier. L'article 48 du projet de loi prévoit d'ailleurs leur avis en cas de réduction des espaces agricoles et forestiers.

Par ailleurs, il est nécessaire de prévoir une articulation entre le projet agricole départemental et le document de gestion, compte tenu des répercussions spatiales du premier.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 47 -
(Article L.112-2 du code rural) -

Zones agricoles protégées

Cet article propose une nouvelle rédaction de l'article L.112-2 du code rural, dont les dispositions sont refondues dans l'article L.112-1 par l'article 46 du projet de loi. Il crée la notion de zones agricoles protégées.

L'article 47 est composé de cinq alinéas.

Le premier alinéa crée des zones agricoles protégées (ZAP), dont la préservation présente un intérêt général en raison,

- soit de la qualité de leur production,

- soit de leur situation géographique.

Ces zones, qui font l'objet d'un classement en ZAP, sont délimitées par un arrêté préfectoral. Ce classement doit, préalablement recueillir :

- l'accord du conseil municipal des communes concernées -qui peut d'ailleurs être à l'origine de la proposition de la ZAP-,

- après avis de la Chambre d'agriculture,

- après avis de l'INAO,

- après avis de la CDOA,

- à la suite d'une enquête publique.

Ces conditions sont cumulatives.

La procédure d'élaboration des zones agricoles protégées a été calquée sur celle applicable aux zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager instituées par les articles 70, 71 et  72 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat pour protéger et mettre en valeur des monuments historiques et des quartiers, sites et espaces présentant un intérêt d'ordre esthétique, historique ou culturel.

Il est précisé que la présence de petites parcelles boisées (moins de quatre hectares selon l'article L.311-2 du code forestier) n'empêche pas le classement en ZAP, les espaces boisés faisant l'objet d'une réglementation dérogatoire au regard du droit de l'urbanisme.

Le deuxième alinéa protège la ZAP, en cas de changement :

- d'affectation,

- de mode d'occupation du sol. Lorsqu'il n'existe pas de document d'urbanisme (c'est le cas dans 40% des communes rurales), il doit être soumis à l'avis de la chambre d'agriculture et de la CDOA.

Il est nécessaire néanmoins que ce changement de mode de production allie durablement le potentiel agronomique, biologique ou économique de la ZAP concernée. Si l'une des deux instances consultées est défavorable, seul le préfet, par une décision motivée, peut autoriser le changement.

Le troisième alinéa exclut de la procédure susmentionnée tout changement de mode d'occupation du sol issu :

- d'une autorisation au titre du code forestier (défrichement),

- du code de l'urbanisme (permis de construire),

- du code rural (affectation de terres agricoles),

- ou de la législation sur les installations classées.

Le quatrième alinéa précise que le POS prend en compte la délimitation de la ZAP conformément à l'article L.126-1 du code de l'urbanisme.

Il permet au préfet d'imposer l'insertion en annexe d'un document.

Le cinquième et dernier alinéa confie à un décret en Conseil d'Etat le soin de fixer les modalités d'application de l'article 47.

Il convient de souligner que la délimitation de la ZAP, laisse aux préfets un pouvoir d'appréciation, ce dont votre rapporteur se félicite.

Il vous propose, en outre, un amendement tendant à supprimer dans le deuxième alinéa la mention relative au document d'urbanisme.

En effet, ce membre de phrase n'est pas cohérent avec l'esprit de la ZAP et avec la forme de la rédaction du quatrième alinéa de l'article 47 :

- sur le fond, les ZAP sont prévues pour protéger l'agriculture là où elle est menacée de disparition en raison de fortes pressions foncières, notamment en milieu périurbain. Ces espaces sont en général couverts par des documents d'urbanisme,

- sur la forme, le quatrième alinéa dispose que les ZAP sont annexées aux POS dans les mêmes conditions que les servitudes. C'est donc bien qu'elles sont créées là où il y a un document d'urbanisme.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 47 bis -
(Article L.142-3 du code de l'urbanisme) -

Association des représentants des OPA
à la délimitation des zones de préemption

Cet article vise à faire participer les associations des représentants des organisations professionnelles agricoles à la délimitation des zones de préemption.

L'article L.142-8 du code de l'urbanisme permet au conseil général d`instituer, au titre des espaces naturels sensibles, des zones de préemption, afin de préserver la qualité des sites, des paysages et des milieux naturels. Cette disposition législative, importante pour la préservation de l'environnement, risque parfois de conduire certains départements à instituer des zones de préemption recouvrant des superficies très étendues.

Or, une définition extensive de ces espaces naturels risquerait d'entraîner pour les agriculteurs des contraintes, parfois difficilement compatibles avec les impératifs de l'exercice de leur activité de production. Par ailleurs, elle pourrait aussi conduire à une réduction dangereuse de l'espace agricole et conduire à des difficultés accrues pour l'installation des jeunes agriculteurs.

C'est pourquoi la participation des OPA à la délimitation des zones de préemption paraît nécessaire.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 48 -
(Article L.112-3 du code rural) -

Réduction des espaces agricoles et forestiers

Cet article propose une nouvelle rédaction de l'article L.112-3 du code précité modifiant les modalités de publicité des documents d'urbanisme.

Dans sa version actuelle, l'article L.112-3 prévoit que " pour assurer la sauvegarde de l'espace agricole, les documents relatifs aux opérations d'urbanisme ou d'infrastructure et les documents relatifs aux schémas d`exploitation coordonnée des carrières qui prévoient une réduction grave des terres agricoles ne peuvent être rendus publics qu'après avis de la Chambre d'Agriculture et de la commission départementale d'orientation de l'agriculture. Cette disposition s'applique également aux modifications et aux révisions desdits documents, ainsi qu'aux opérations d'aménagement dont l'enquête publique n'a pas encore été prescrite dès lors qu'elles sont susceptibles d'entraîner l'une des conséquences mentionnées à l'article L.112-2. "

La nouvelle rédaction proposée par l'article 48 modifie l'article L.112-3 du code rural sur plusieurs points :

- la notion de " réduction grave " visée dans l'actuelle rédaction pose un réel problème d'interprétation. Il est donc préférable de la supprimer : ainsi seraient concernées toutes les réductions d'espaces agricoles et forestiers et pas seulement les réductions " graves " ;

- l'avis de l'INAO est désormais nécessaire dans cette procédure ;

- l'avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture est supprimé dans la nouvelle rédaction de l'article L.112-3. Votre rapporteur vous propose de réintroduire cette précision en raison de l'efficacité remplie par ces instances ;

- la consultation du Centre régional de la Propriété forestière est prévue par l'article 48 du projet de loi ;

- le dernier alinéa de l'article 48, prévoit que ces différents avis sont rendus dans un délai de deux mois à compter de la saisine. En cas d'absence de réponse à l'issue de ce délai, l'avis est réputé favorable.

Soulignons que cette nouvelle formalité imposée pour l'élaboration de documents d'urbanisme ne devrait pas fragiliser ceux-ci à l'excès en cas de vice de procédure tiré de l'oubli de la saisine de la chambre d`agriculture ou du centre régional de la propriété forestière, car l'article L.600-1 du code de l'urbanisme limite à six mois à compter de la prise d'effet du document la possibilité d'invoquer l'exception d'illégalité pour vice de forme ou de procédure d'un schéma directeur, d'un plan d'occupation des sols ou d'un document en tenant lieu.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

Article 49 -
(Article L.143-2 du code rural) -

Droit de préemption des sociétés d'aménagement foncier
et d'établissement rural.

L'article 49 du projet de loi vise à harmoniser les dispositions de l'article L.143-2 du code rural avec les nouvelles règles du contrôle des structures définies à la section  2 du chapitre II du titre II du projet de loi et la nouvelle approche multifonctionnelle de la gestion de l'espace agricole et forestier proposée par le titre V du projet de loi.

L'article L.143-2 du code rural fixe les cas où les SAFER peuvent exercer un droit de préemption.

Le droit de préemption des SAFER est un droit finalisé. Elles n'en bénéficient que pour atteindre des objectifs énumérés par la loi. Aux termes de l'article L.143-2 du code rural, l'exercice de ce droit a pour objet :

1 °L'installation, la réinstallation ou le maintien des agriculteurs ;

2° L'agrandissement des exploitations existantes dans la limite de quatre fois la SMI et l'amélioration de leur répartition parcellaire, afin d'en faire des exploitations équilibrées (par référence à l'article 2-7°, de la loi d'orientation agricole du 5 août 1960) ;

3° La préservation de l'équilibre des exploitations lorsqu'il est compromis par l'emprise des travaux d'intérêt public ;

4° La sauvegarde du caractère familial de l'exploitation ;

5° La lutte contre la spéculation foncière ;

6° La conservation d'exploitations viables existantes lorsqu'elle est compromise par la cession séparée des terres et de bâtiments d'habitation ou d`exploitation ;

7° La mise en valeur et la protection de la forêt ainsi que l'amélioration des structures sylvicoles dans le cadre des conventions passées préalablement avec l'Etat ;

Le droit de préemption peut être également exercé à la demande d'un organisme de jardins familiaux afin d'acquérir des terrains destinés à la création ou à l'aménagement de tels jardins.

Une préemption exercée dans un but différent de ceux exposés ci-dessus est irrégulière.

L'article 49 comprend trois paragraphes :

le paragraphe I est une disposition de coordination.

le paragraphe II, en modifiant le  2° de l'article L.143-2, vise à prendre en compte les nouvelles règles du contrôle des structures définies à la section 2 du chapitre II du titre II du projet de loi.

le paragraphe III tire les conséquences de la nouvelle approche multifonctionnelle de la gestion de l'espace agricole et forestier.

Le droit de préemption institué par la loi n° 62-933 du 8 août 1962 est destiné à permettre aux SAFER de s'opposer à la réalisation des opérations contraires aux orientations définies dans le cadre de la politique agricole.

Prérogative exorbitante du droit commun, le droit de préemption ne peut être mis en oeuvre qu'à l'occasion d'un nombre limité de transactions et selon une une procédure rigoureuse.

Malgré l'extension du domaine d'intervention des SAFER, le droit de préemption continue de ne pouvoir être utilisé que dans l'intérêt de l'agriculture. Au surplus, afin d'éviter les interventions injustifiées, obligation est faite à la SAFER de motiver ses décisions.

Les modalités de purge du droit de préemption varient selon que l'aliénation est amiable ou revêt la forme d'une adjudication. En dehors des ventes forcées, le rôle du notaire chargé d'instrumenter est primordial dans la mesure où il lui revient d'accomplir les formalités requises. Sa mission est d`autant plus importante que les actes conclus au mépris du dispositif légal encourent l'annulation.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 49 bis -
(Article L.141-1 du code rural) -

Missions des SAFER

Cet article vise à redéfinir les missions des SAFER en tenant compte de l'esprit du projet de loi.

Les SAFER sont investies d'une mission de service public. Leur fonction est notamment d'accroître la superficie de certaines exploitations agricoles ou forestières, de faciliter la mise en culture du sol et l'installation ou le maintien d'agriculteurs à la terre et de réaliser des opérations parcellaires.

Les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural (SAFER) ont été -rappelons-le- instituées par la loi d'orientation agricole du  5 août 1960. Elles constituent des organismes de droit privé chargés, sous le contrôle de l'administration, de la gestion d'un service public administratif en vue de l'amélioration des structures agricoles.

La mission de ces sociétés était, à l'origine, exclusivement agricole. Elle consistait à favoriser l'amélioration de la structure foncière des exploitations et l'installation d'exploitants. Depuis, l'objet des SAFER s'est élargi : les sociétés peuvent étendre leurs activités au-delà du secteur purement agricole et concourir à l'aménagement rural et à la protection de l'environnement. Elles sont aussi habilitées à réaliser des études préalables à des opérations d'aménagement ou de mise en valeur des sols et à apporter un concours technique aux collectivités publiques. Autrement dit, les attributions des SAFER se sont diversifiées. La vocation en matière d'aménagement et de développement rural étant devenue générale, votre rapporteur souhaiterait, à cette occasion, connaître précisément le pourcentage réel de l'activité des SAFER consacré à des opérations foncières et non à de simples achats/reventes. A cette fin, elles peuvent acquérir à l'amiable des terres ou des exploitations agricoles ou forestières librement mises en vente par leurs propriétaires, ainsi que des terres incultes. Cependant depuis la loi n° 62-933 du 8 août 1962, elles ont aussi la possibilité d'acquérir par préemption.

Le texte proposé par l'article 49 bis pour le nouvel article L.141-1 est composé de quatre alinéas.

Le premier alinéa indique que des SAFER peuvent être constituées pour " contribuer, en milieu rural, à la mise en oeuvre du volet foncier des politiques agricole, forestière, de protection de l'environnement, d'aménagement du territoire rural et de développement local . "

Le deuxième alinéa précise que les SAFER ont pour mission :

- de faciliter l'installation ou le maintien d'exploitants agricoles ou forestières,

- d'accroître la superficie de certaines exploitations agricoles ou forestières,

- de faciliter la mise en oeuvre des sols,

- de contribuer au développement équilibré des entreprises et de l'emploi et à la répartition des activités en milieu rural,

- de concourir à la préservation de l'environnement et à la transparence du marché foncier rural.

le troisième alinéa souligne qu'elles sont constituées en vue d'acquérir des propriétés rurales ou exploitations agricoles mises en vente, ou toute autre société ou fraction de société représentative de ses biens dans le but de les rétrocéder après aménagement et remaniement parcellaire éventuel. En outre, les SAFER peuvent concourir à la transmission de ces mêmes biens sous forme locative dans le cadre du statut du fermage ou selon les modalités de l'article L.481-1 concernant les contrats d'exploitation de terres à vocation pastorale, ou par bail emphytéotique.

Votre rapporteur s'interroge sur le sens du terme " fraction " présent dans cet article.

Le quatrième et dernier alinéa autorise les collectivités publiques et les personnes morales représentatives des activités économiques et sociales rurales à participer au capital social des SAFER.

Votre rapporteur s'interroge sur plusieurs points :

- il est indiqué que les SAFER pourront concourir à la transmission des biens concernés " sous forme locative dans le cadre du statut du fermage ". Est-ce à dire que les SAFER vont rapprocher l'offre et la demande locative ? Les SAFER étant uniquement des intermédiaires ne prendront donc pas les biens en location. N'entreront-elles pas alors en concurrence avec des personnes ou des entreprises qui jouent ce rôle d'intermédiaire ? Un problème relatif au droit de la concurrence ne va-t-il pas se poser ?

En outre, cette mission paraît assez éloignée de l'aménagement rural. Les SAFER agiront-elles comme un simple commerçant ? Comment la SAFER se transformera-t-elle en bailleur de fonds ?

- Par ailleurs, quel sera le régime fiscal et juridique des intermédiaires dans le cadre susmentionné ? Vont-elles payer la taxe professionnelle, la TVA sur services rendus ou l'impôt sur les sociétés ?

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 50 -
(Article L.253-1 du code rural) -

Attribution des droits reconnus à la partie civile aux chambres d'agriculture et centres régionaux de la propriété forestière

Cet article complète l'article L.253-1 du code rural relatif à l'action civile des personnes morales de droit public.

L'article L.253-1 du code rural reconnaît aux personnes chargées de la protection de l'environnement et du patrimoine (Agence de l'environnement et de la maîtrise de l'énergie, Conservatoire de l'espace littoral et des rivages lacustres, agences financières de bassin, Caisse nationale des monuments historiques et des sites) la possibilité d'exercer les droits reconnus à la partie civile dès lors que sont commis des faits portant un préjudice direct ou indirect aux intérêts qu'ils ont pour objet de défendre et constituant une infraction aux dispositions législatives relatives à la protection de la nature et de l'environnement, à l'amélioration du cadre de vie, à la protection de l'eau, de l'air, des sols, des sites et paysages, à l'urbanisme ou ayant pour objet la lutte contre les pollutions et les nuisances, ainsi qu'aux textes pris pour leur application.

Il paraît légitime de compléter cette liste d'organismes par les chambres d'agriculture et les centres régionaux de la propriété forestière. Ces organismes exercent en effet d'importantes missions consultatives dans le cadre de la gestion multifonctionnelle de l'espace agricole et forestier.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 50 bis -
(Articles L.135-3-1, L. 136-7-1, L.135-4 et L.136-8) -

Renforcement du dispositif relatif aux associations foncières,
pastorales et agricoles

Cet article vise à renforcer le dispositif en faveur des associations foncières, pastorales et agricoles.

1. Les associations foncières pastorales


a) Le droit en vigueur

L'association foncière pastorale est une personne morale constituée entre des propriétaires de terres pastorales et, le cas échéant, de terrains boisés situés en zone de montagne ou en zone d'économie pastorale ou extensive en vue de favoriser le regroupement, l'aménagement, l'entretien de ces terres, et de contribuer au maintien et au développement de la vie rurale.

Ce groupement de propriétaires est une forme particulière ou dérivée d'association syndicale. A ce titre, il obéit pour une part aux règles générales de la loi du 21 juin 1865 et, pour le reste, aux dispositions particulières du Code rural. Les règles édictées par le Code rural sont plus souples que celles de la loi de 1865 : il faut tenir compte d'abord du fait que les terres pastorales appartiennent souvent à une multitude de propriétaires, dont beaucoup sont éloignés et se désintéressent de la gestion de leurs biens, ensuite de la nécessité de regrouper de grands pâturages et de vastes parcours se prêtant à une exploitation extensive des ressources herbagères (pastoralisme), enfin des possibilités d'équipement touristique ou de création de stations que les propriétaires montagnards peuvent toujours espérer.

Toute personne physique ou morale, de droit privé ou de droit public, peut être membre d'une association foncière pastorale si elle est propriétaire de terrains qui répondent aux conditions suivantes :

- Ils doivent avoir une destination agricole ou pastorale. L'association foncière peut aussi regrouper les propriétaires de terrains boisés ou à boiser concourant à l'économie agricole, pastorale et forestière dans son périmètre.

- Les terrains doivent être situés dans les communes classées en zone de montagne ou dans les communes comprises dans les zones d'activités pastorales ou extensives délimitées par arrêté préfectoral.

Il faut distinguer trois catégories d'associations foncières : les associations libres, autorisées et forcées.

Les associations foncières libres

L'association foncière libre est une personne morale de droit privé constituée par le consentement unanime des associés, sans aucune intervention de l'administration. Mais cette " unanimité " exigée par l'article 5 de la loi du 21 juin 1865 ne signifie pas que l'accord de tous les propriétaires intéressés par les travaux soit obtenu : une association libre peut être valablement constituée entre deux propriétaires. Une collectivité locale propriétaire de terres pastorales peut participer à la constitution d'une telle association.

Les associations foncières autorisées

L'association foncière autorisée est un groupement de propriétaires constitué sous le contrôle de l'administration et qui dispose de prérogatives de puissance publique pour exécuter certains travaux d'utilité générale. C'est un établissement public soumis au contrôle du juge administratif.

L'initiative appartient à un ou plusieurs propriétaires intéressés, au préfet ou sous-préfet et au maire . Le plus souvent ce sont les propriétaires qui sollicitent l'intervention du préfet.

Le préfet, par arrêté, soumet le projet d'association à une enquête administrative et convoque les propriétaires intéressés en assemblée générale après clôture de l'enquête. La délibération de cette assemblée est déterminante. Le préfet ne peut autoriser l'association foncière pastorale que si, tout à la fois, certaines conditions de majorité sont remplies et certains engagements pris. Ainsi, il faut que :

- le projet soit expressément approuvé par la volonté d'une majorité qualifiée -la moitié au moins des propriétaires représentant la moitié au moins de la superficie totale des terrains-. Les propriétaires intéressés qui, dûment convoqués et avertis des conséquences de leur abstention, ne formulent pas leur opposition par écrit avant la réunion de l'assemblée générale ou par un vote à cette assemblée, sont considérés comme ayant adhéré à l'association.

Lorsque les collectivités territoriales participent à la constitution de l'association, la condition de majorité est tenue pour remplie si ces collectivités et les autres propriétaires susceptibles d'être considérés comme ayant adhéré à l'association possèdent au moins la moitié de la superficie des terres.

- l'association, un propriétaire des terres situées dans le périmètre ou à défaut un tiers, prenne l'engagement d'acquérir les biens qui peuvent être délaissés. Cet engagement doit être annexé au procès-verbal de l'assemblée générale constitutive de l'association autorisée ou de l'assemblée qui a pour objet l'extension du périmètre d'une telle association.

Si ces conditions sont remplies, le préfet peut autoriser l'association. Celle-ci n'est constituée qu'à compter de l'arrêté d'autorisation.

Les propriétaires de terres incluses dans le périmètre soumis à enquête préfectorale ne peuvent plus procéder à leur boisement à partir de l'ouverture de l'enquête jusqu'à décision préfectorale. Toutefois, cette restriction ne peut avoir une durée supérieure à un an 47( * ) .

En outre, les droits des propriétaires qui refusent d'adhérer à l'association sont sauvegardés. Ceux-ci peuvent, en effet, dans un délai de 3 mois à partir de la publication de l'arrêté préfectoral d'autorisation, délaisser leurs immeubles moyennant indemnité. A défaut d'accord amiable, cette indemnité est fixée comme en matière d'expropriation . Le propriétaire ayant acquis cette qualité à l'issue de la procédure de purge d'un droit d'usage grevant des terrains compris dans le périmètre d'une association peut délaisser son immeuble dans les conditions exposées ci-dessus. Il doit agir dans un délai de 3 mois à compter de l'établissement de son nouveau droit.

Les associations foncières forcées

Une association forcée est une association constituée d'office par le préfet. Elle a qualité d'établissement public.

Une association foncière pastorale peut être constituée d'office lorsque l'état d'abandon des fonds ou leur défaut d'entretien est de nature à constituer un danger pour ces fonds ou pour ceux situés dans leur voisinage et qu'une association libre ou autorisée n'a pu être constituée pour y remédier. L'impossibilité de mettre en place une association libre ou autorisée est une condition essentielle que le préfet doit constater avant de procéder à la constitution d'office. Pour que les propriétaires intéressés mesurent exactement les conséquences de leur refus, l'arrêté préfectoral qui soumet le projet d'association autorisée à une enquête administrative doit les prévenir qu'à défaut de constitution de l'association, l'administration usera de ses pouvoirs de coercition. Le projet d'arrêté préfectoral portant constitution d'office d'une association est joint aux pièces de l'enquête sur la formulation de l'association autorisée.

En outre, l'association forcée ne peut pas avoir pour objet de réaliser des équipements à des fins autres qu'agricoles ou forestières.

La transformation en association autorisée peut intervenir à tout moment si les conditions légales sont remplies.

L'association foncière pastorale ne peut être constituée qu'en vue de développer certaines activités énumérées par la loi. Son objet peut comprendre l'ensemble des missions dont les associations sont légalement investies mais il peut être aussi limité à certaines d'entre elles. L'étendue exacte des objectifs poursuivis est déterminée par les statuts.

Cette obligation de respecter strictement l'énumération légale s'applique à toutes les formes d'associations.

Les associations foncières pastorales ont également pour objet d'assurer ou de faire assurer :

- l'aménagement, l'entretien et la gestion des ouvrages collectifs permettant une bonne utilisation des fonds inclus dans leur périmètre ;

- les travaux nécessaires à l'amélioration ou à la protection des sols ;

- la mise en valeur et la gestion des fonds à destination pastorale ou agricole ainsi que des terrains boisés ou à boiser inclus à titre accessoire dans leur périmètre .

Ainsi, les associations foncières ont pour mission non seulement d'accomplir des travaux immobiliers d'intérêt collectif (pistes d'accès, réfection des châlets, réaménagement d'enclos, débroussaillement, captages et réservoirs...) mais aussi de gérer les biens des propriétaires qu'elles regroupent.

Les associations foncières pastorales peuvent, le cas échéant, mais seulement à titre accessoire, autoriser ou réaliser des équipements à des fins autres qu'agricoles ou forestières, mais de nature à contribuer au maintien de la vie rurale et à des actions tendant à la favoriser. Ainsi, dans leur périmètre, elles peuvent permettre la réalisation d'un monte-pentes, d'un télésiège, d'une hélistation, de sentiers de randonnée, de pistes de VTT, de bâtiments d'accueil et gîtes d'alpages, etc. Mais, d'une part, elles doivent en confier la gestion à des tiers. D'autre part, seules les associations libres ou autorisées peuvent avoir pour objet la réalisation de tels équipements .

L'association foncière pastorale peut exploiter directement les terres qu'elle a rassemblées et aménagées ; certains avantages financiers sont prévus. Mais l'exploitation directe doit normalement rester l'exception. Les associations foncières sont appelées à conférer l'usage de terrains à des tiers, en les louant à des groupements pastoraux ou à d'autres personnes, physiques ou morales.

L'utilisation des terres à des fins non agricoles peut ne pas valablement rentrer dans l'objet (accessoire) de l'association soit parce qu'il s'agit d'une association forcée, soit parce qu'elle dépasse les possibilités limitativement ouvertes par les statuts. Dans ce cas, la distraction de certains terrains peut être justifiée. Mais elle doit rester exceptionnelle afin de ne pas compromettre la bonne gestion de l'association. La loi indique que le préfet peut, par arrêté, autoriser la distraction des terres incluses dans le périmètre d'une association autorisée ou forcée en vue d'une affectation non agricole, soit dans le cadre d'un plan d'occupation des sols, soit sur avis favorable du syndicat et de la commission départementale d'aménagement foncier.

Les associations foncières pastorales autorisées ou constituées d'office d'une certaine superficie peuvent bénéficier d'une aide de démarrage destinée à couvrir les frais engagés avant la création de l'association et à alléger les charges de première gestion.

Ces aides sont de deux ordres :

- pour l'entretien de l'espace : les parcelles qui figurent dans le périmètre d'associations foncières pastorales ouvrent droit en priorité aux aides prévues pour l'entretien de l'espace,

- dans les zones de montagne.

b) Le dispositif proposé par le projet de loi

L'article 50 bis est composé de trois paragraphes. Le paragraphe I concerne les associations pastorales. Il insère un nouvel article L.135-3-1 qui prévoit, dans le premier alinéa, que la durée d'une association foncière pastorale autorisée, constituée pour une durée limitée, peut être prorogée sans modification de statut. Il suffit d'une délibération répondant aux critères de majorité de l'article L.135-3 de l'assemblée générale de tous les associés convoqués dans les conditions prévues à l'article 11 de la loi du 21 juin 1865.

Le deuxième alinéa du texte proposé pour l'article L.135-3-1 considère les propriétaires dûment avertis, mais restant silencieux, comme favorables à la prorogation.

Le troisième et dernier alinéa précise que cette prorogation fait l'objet d'un affichage pendant quinze jours dans les communes concernées.

2. Les associations foncières agricoles

a) Le droit en vigueur

L'association foncière agricole est une variété d'association syndicale inspirée de l'association foncière pastorale. Elle regroupe des propriétaires de terrains ruraux en vue de réaliser des aménagements permettant la constitution d'unités économiques viables, le développement de systèmes de production extensifs, l'implantation d'activités en milieu rural. Cette formule d'organisation et de gestion des terres doit contribuer au maintien d'activités agricoles et au développement rural dans les zones où il y a des risques de déprise agricole ou d'abandon de terres. La création d'associations foncières agricoles n'est pas limitée, toutefois, à certaines régions fragiles, difficiles ou en déclin. A la différence des associations foncières pastorales dont l'action est circonscrite aux zones définies par arrêté, les associations foncières agricoles peuvent être constituées sur l'ensemble du territoire.

Les associations foncières agricoles sont régies, elles aussi, par les dispositions générales de la loi du 21 juin 1865 relative aux associations syndicales et par les dispositions particulières du code rural . Les associations autorisées sont, en outre, soumises aux dispositions générales du décret du 18 décembre 1927 relatif aux associations syndicales et aux dispositions particulières du Code rural 48( * ) .

Les associations foncières agricoles peuvent être libres ou autorisées . Les associations foncières agricoles libres se forment par la réunion volontaire et unanime des propriétaires intéressés et constituent des personnes morales de droit privé. Les associations foncières agricoles autorisées sont instituées par le préfet après accord d'une majorité qualifiée de propriétaires intéressés. Elles sont placées sous le contrôle de l'administration et ont la qualité d'établissement public à caractère administratif.

Les associations foncières agricoles sont constituées entre propriétaires de terrains à vocation agricole, pastorale ou forestière. Les propriétaires regroupés peuvent être des personnes physiques ou morales de droit privé et des collectivités territoriales. Peu importe la localisation du terrain leur appartenant. La création de ce type de groupement n'est pas limitée territorialement ; elle peut intervenir en toutes régions.

Les associations foncières agricoles ne peuvent être constituées qu'en vue de réaliser des opérations correspondant aux objectifs particuliers que la loi leur assigne. Ces effectifs sont limités en toutes régions.

Les associations foncières agricoles ne peuvent être constituées qu'en vue de réaliser des opérations correspondant aux objectifs particuliers que la loi leur assigne. Ces objectifs sont limités à deux activités :

1° Aménager . Il s'agit :

- d'assurer ou de faire assurer l'exécution, l'aménagement, l'entretien et la gestion des travaux ou ouvrages collectifs permettant la mise en valeur agricole, pastorale ou forestière des fonds ;

- d'assurer ou de faire assurer l'exécution des travaux ou d'ouvrages à des fins autres qu'agricoles, pastorales ou forestières à la condition que ces travaux ou ouvrages contribuent au développement rural dans le périmètre de l'association.

Ces dispositions montrent clairement que l'aménagement rural ne doit pas être compris comme une activité complémentaire ou accessoire des AFA. Selon les circonstances et les nécessités, les associations serviront soit l'agriculture, soit l'aménagement rural.

2° Gérer . L'association foncière agricole peut recevoir un mandat pour gérer les terrains compris dans son périmètre. Elle peut alors, dans les limites du pouvoir qui lui a été confié, conclure des baux.

L'association foncière n'a pas pour objet d'exploiter directement . La loi ne pose pas toutefois une règle absolue : elle énonce seulement qu'une association foncière ne peut pas se livrer " d'une manière habituelle " à l'exploitation directe.

La portée de cette règle est précisée à l'égard des associations foncières autorisées par l'article R. 136-5 du code rural. L'exploitation directe doit demeurer exceptionnelle : une association autorisée ne peut y procéder que pour une durée maximum de 3 ans et à condition qu'il s'agisse d'un fonds qui n'a fait l'objet d'aucune proposition de location, y compris de la part de la SAFER, depuis 6 mois au moins. Cette période de 3 ans peut être prolongée par le préfet après avis de la commission départementale d'orientation de l'agriculture.

L'objet de l'association foncière est déterminée par ses statuts. La clause qui le définit doit être rédigée avec soin, car elle limite strictement la mission de l'association et elle doit être en accord avec l'énumération légale. Celle-ci étant une régle commune aux associations foncières agricoles, elle s'applique, à l'évidence, aux associations libres qui ne pourront pas avoir un objet statutaire plus large que l'objet légal.

b) Le dispositif proposé par le projet de loi

Le paragraphe II de l'article 50 bis insère dans le code rural un article L.136-7-1 relatif à la prorogation des AFA. Ce dispositif est identique à celui mentionné au paragraphe I.

Le paragraphe III est un amendement de coordination.

Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 50 ter -
(Article L.2411-10 du code général des collectivités territoriales) -

Attribution des biens de section

Cet article tend à modifier les modalités d'attribution pour l'exploitation des biens de section en fixant un ordre de priorité entre les différentes catégories possibles de preneurs et d'attributaires.

L'article L.2411-10 du code général des collectivités territoriales fait partie du chapitre Ier (dispositions générales) du Titre Ier (section de commune) du Livre IV (intérêt propres à certaines catégories d'habitants).

1. Le dispositif en vigueur

Comme l'indique l'article 2411-1, " constitue une section de commune toute partie d'une commune possédant à titre permanent et exclusif des biens ou des droits distincts de ceux de la commune ". La section de commune a la personnalité juridique. En outre, la gestion des biens et droit de la section est assurée par le conseil municipal, par le maire et, dans certains cas prévus limitativement dans la loi, par une commission syndicale et son président.

L'article L.2411-6 comporte trois alinéas. Le premier alinéa prévoit que les membres de la section ont la jouissance de ceux des biens de la section dont les fruits sont perçus en nature.

Le deuxième alinéa indique que les biens à vocation agricole ou pastorale, propriété de la section, sont attribués par bail à ferme, par convention pluriannuelle d'exploitation agricole ou de pâturage en faveur en priorité :

- des ayants droit répondant aux conditions de capacité et d'expérience professionnelle et de superficie visées au Code rural, ou à leur groupement ;

- aux personnes exploitant des biens agricoles sur le territoire de la section.

Le troisième et dernier alinéa précise que les revenus en espèces ne peuvent être employés que dans l'intérêt des membres de la section. Ils doivent être affectés en priorité à la mise en valeur et à l'entretien des biens de la section ainsi qu'aux équipements reconnus nécessaires à cette fin.

2. Le dispositif proposé par le projet de loi

L'article 50 ter remplace le deuxième alinéa de l'article L.2411-10 par cinq alinéas.

Les principales modifications sont les suivantes :

Un nouvel ordre dans l'attribution des terres à vocation agricole et pastorale de la section est défini. Les terres sont destinées en premier lieu aux exploitants agricoles, à condition que ceux-ci aient sur la section :

- leur domicile réel,

- le siège de leur exploitation.

Le cas échéant ces terres peuvent être attribuées aux exploitants agricoles ayant un bâtiment d'exploitation hébergeant, pendant la période hivernale, leurs animaux sur la section ; à défaut, ces terres peuvent être proposées aux personnes exploitant des biens sur le territoire de la commune. Enfin, à titre subsidiaire, les personnes exploitant des biens seulement sur le territoire de la section peuvent en être attributaires.

Toutes les catégories d'exploitants mentionnées, devront remplir les conditions prévues aux articles L.331-2 à L. 331-5 du code rural. Le fait de ne plus remplir ces conditions entraîne la résiliation de plein droit des contrats.

Ces dispositions ne remettent pas en cause les droits et usages traditionnels tels que l'affouage, la cueillette, la chasse attribuée aux ayants droit non agriculteurs, dans le respect de la multifonctionnalité de l'espace rural.

Le dernier alinéa indique que, chaque fois que cela est possible, il est constitué une réserve foncière destinée à permettre ou faciliter de nouvelles installations agricoles.

Tout en comprenant la nécessité des biens sectionnaires, votre rapporteur émet des réserves quant à la conformité de telles dispositions à la réglementation communautaire et au principe d'égalité.

Sous réserve de ces observations, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 50 ter -
(Article L.123-7 du code rural) -

Intervention du président de la CDOA dans le cadre d'une procédure d'élaboration ou de révision d'un document d'urbanisme

Cet article vise à compléter l'article L.123-7 du code rural afin de permettre à un propriétaire d'une parcelle agricole, en cas de changement d'affectation dans le cadre d'une procédure d'élaboration ou de révision d'un document d'urbanisme, de saisir la CDOA.

L'article L.123-7 du code rural précise qu'" à l'intérieur du périmètre de remembrement, la Commission peut décider la destruction des semis et plantations existant sur des parcelles de faible étendue et isolées lorsqu'elle estime que leur maintien est gênant pour la culture.

Elle fixe l'indemnité à verser aux propriétaires de ces parcelles pour reconstitution de semis ou plantations équivalents dans les zones de boisement et pour perte d'avenir.

Les frais de destruction et les indemnités sont pris en charge par le département ".


Or, il est relativement fréquent, surtout en milieu périurbain, que des aménagements fonciers ayant fait l'objet d'investissements publics coûteux, soient remis en cause par un document ou une opération d'urbanisme peu de temps après leur réalisation.

Le présent article a donc pour objet, sinon d'empêcher, du moins de freiner de telles pratiques.

Votre commission vous propose d'adopter sans modification cet article additionnel.

Article additionnel après l'article 50 ter -
(Article L.352-1 du code rural) -

Aides à la reconversion ou à la réinstallation

Cet article vise à compléter l'article L.352-1 du code rural relatif aux aides à la reconversion ou à la réinstallation.

L'article L.352-1 précise que " lorsque les expropriations en vue de la réalisation des aménagements des ouvrages mentionnés à l'article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature sont susceptibles de compromettre la structure des exploitations dans une zone déterminée, l'obligation est faite au maître de l'ouvrage, dans l'acte déclaratif d'utilité publique, de remédier aux dommages causés en participant financièrement à l'installation, sur des exploitations nouvelles comparables, des agriculteurs dont l'exploitation aurait disparu ou serait gravement déséquilibrée, ou, s'ils l'acceptent, à la reconversion de leur activité. S'ils le demandent, ces agriculteurs bénéficient d'une priorité d'attribution par les sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural sur l'ensemble du territoire sauf si, devant être installés sur une exploitation entièrement différente de la précédente, ils refusent de céder au maître de l'ouvrage ou aux sociétés susmentionnées les terres dont ils restent propriétaires dans un périmètre déterminé conformémen au 3° de l'article L.142-45.

La même obligation est faite au maître de l'ouvrage dans l'acte déclaratif d'utilité publique en cas de création de zones industrielles ou à urbaniser ou de constitution de réserves foncières.

Un décret détermine les conditions dans lesquelles le maître d'ouvrage devra apporter une contribution financière aux sociétés d'aménagement foncier et d'établissement rural ou aux sociétés d'aménagement régionales lorsque ces sociétés assurent l'établissement sur de nouvelles exploitations des agriculteurs expropriés dans les conditions prévues aux premier et deuxième alinéa du présent article, ainsi que des agriculteurs que les opérations de remembrement prévues à l'article L.123-24 n'ont pas permis de maintenir sur place ".


Cet article additionnel a pour but de donner un fondement législatif à des pratiques contractuelles qui ont été autorisées par le Conseil d'Etat (notice annexée à la note du Conseil d'Etat -séance du 13 juin 1978- dans le cadre de la DUP de la liaison fluviale Rhin-Saône), lequel précisait qu'indépendamment des obligations qui résultent de l'article 10 de la loi d'orientation agricole du 8 août 1962 et des décrets pris pour son application, le maître de l'ouvrage participerait financièrement à des opérations de mise en valeur destinées à rétablir le potentiel agricole des zones concernées.

Ces dispositions ont par ailleurs été précisées par la circulaire dite " circulaire Bianco " du 20 décembre 1992, qui imposait aux maîtres d'ouvrage la réalisation d'un bilan économique, social et environnemental des infrastructures pouvant constituer le fondement de compensations économiques pour la reconstitution du potentiel agricole déstructuré.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

Article additionnel après l'article 50 ter -

Eligibilité au financement des opérations d'aménagement foncier de la réorganisation foncière et des échanges d'immeubles ruraux

Cet article additionnel vise à étendre les listes des opérations éligibles au financement des opérations d'aménagement foncier.

L'article L.123-24 du code rural dispose que lorsque les expropriations en vue de la réalisation des aménagements ou ouvrages mentionnés à l'article 2 de la loi n° 76-629 du 10 juillet 1976 relative à la protection de la nature sont susceptibles de compromettre la structure des exploitations dans une zone déterminée, l'obligation est faite au maître de l'ouvrage, dans l'acte déclaratif d'utilité publique, de remédier aux dommages causés en participant financièrement à l'exécution d'opérations d'aménagement foncier visées au :

- 2° (remembrement ou remembrement aménagement),

- 5° (aménagement foncier forestier),

- 6° (aménagement foncier agricole et forestier, et de travaux connexes).

La même obligation est faite au maître de l'ouvrage dans l'acte déclaratif d'utilité publique en cas de création de zones industrielles ou à urbaniser, ou de constitution de réserves foncières.

Cet article additionnel a pour objectif de rendre éligibles au financement des opérations d'aménagement foncier non seulement le remembrement, le remembrement aménagement, l'aménagement foncier forestier ou l'aménagement foncier agricole et forestier, mais aussi la réorganisation foncière et les échanges d'immeubles ruraux.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel.

TITRE VI -

FORMATION DES PERSONNES, DÉVELOPPEMENT AGRICOLE, RECHERCHE AGRONOMIQUE ET VÉTÉRINAIRE

Ce chapitre du projet de loi comprend 14 articles. Ses dispositions concernent l'aménagement et la formation agricole, le développement agricole, ainsi que la recherche agronomique et vétérinaire.

Rappelons tout d'abord brièvement la situation actuelle de l'enseignement agricole.

I. L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE AUJOURD'HUI

A. L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE DU SECOND DEGRÉ


L'enseignement agricole du second degré, qui relève du ministère de l'Agriculture, est dispensé dans des établissements publics et privés qui comprennent parfois des centres de formation d'apprentis et des centres de formation continue pour les adultes.

L'enseignement technique agricole recrute à partir de la fin de la 5e et jusqu'au baccalauréat, et offre des filières de formation variées se répartissant dans les trois voies de formation définies lors de la rénovation des lycées en 1991 :

- filière générale : seconde générale et technologique, baccalauréat général S et classes préparatoires aux grandes écoles ;

- filière technologique : 4e et 3e technologiques, bac technologique ;

- filière professionnelle : certificat d'aptitude professionnelle agricole (CAPA), brevet d'études professionnelles agricoles (BEPA), brevet de technicien agricole (BTA), Bac professionnel, brevet de technicien supérieur agricole (BTSA).

Plus de 110 diplômes au total peuvent être préparés par l'enseignement agricole.

Il est mis en oeuvre dans 868 établissements répartis sur tout le territoire français et accueillant 174.362 élèves à la rentrée de 1997.

Il présente des établissements diversifiés, répartis dans quatre catégories :

- des établissements publics relevant du ministère de l'agriculture (40,4 % des effectifs) ;

- des établissements privés sous contrat avec le ministère de l'agriculture (59,6 % des effectifs), appartenant à trois fédérations :

le CNEAP (Conseil national de l'enseignement agricole privé) : 51.648 élèves,

l'UNMFREO (Union nationale des maisons familiales rurales d'éducation et d'orientation) : 45.202 élèves,

l'UNREP (Union nationale rurale d'éducation et de promotion) : 6.521 élèves.

Ces établissements sont soit :

- des établissements dits " à temps plein " (établissements fédérés au sein du CNEAP et une partie de ceux adhérant à l'UNREP), fonctionnant sur un régime proche de celui des établissements publics ;

- des établissements dits " à rythme approprié " et mettant en oeuvre l'alternance entre établissements de formation et entreprises (établissements fédérés au sein de l'UNMFREO et une partie de ceux adhérant à l'UNREP).

Les parcours de formation de l'enseignement agricole sont décrits ci-après :

LES PARCOURS DE FORMATION ET LES DIPLÔMES DE L'ENSEIGNEMENT AGRICOLE

Enseignement supérieur agronomique et vétérinaire

Classe prépa post BTS en 1 an

Concours A

Concours C

Classes préparatoires en 1 ou 2 ans

BTSA 2

BTSA 1

Terminale Bac pro

Terminale S

Terminale Bac techno

Terminale BTA

1ère Bac pro

1ère Bac S

1ère Bac techno

1ère BTA

BEPA 2

CAPA 2

Seconde générale et technologique

BEPA 1

CAPA 1

CAPA en 1 an

Ministère de l'agriculture

CPA en 1 ou 2 ans

Enseignement agricole

3ème collège

3ème techno

3ème préparatoire

Enseignement agricole et éducation nationale

Education nationale

4ème collège

4ème techno

4ème préparatoire

Diplôme pouvant se préparer par la voie de l'apprentissage ou de la formation professionnelle continue

Source : " Chambre d'agriculture " - numéro spécial octobre 1996.

NB : CAP = Certificat d'aptitude professionnelle

CAPA = Certificat d'aptitude professionnelle agricole

BEPA = Brevet d'études professionnelles agricoles

BTA = Brevet de technicien agricole

BTSA = Brevet de technicien supérieur agricole

BTS = Brevet de technicien supérieur

B. L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

L'enseignement supérieur agricole a vocation à former des ingénieurs, des vétérinaires, des architectes paysagistes, des professeurs et des chercheurs.

Il est dispensé dans dix-huit établissements publics et sept privés sous contrat. Les effectifs pour l'année 1997-1998 s'élèvent à 11.099 élèves répartis pour 70 % dans le secteur public et 30 % dans le secteur privé.

ÉTUDES SUPÉRIEURES AGRICOLES

(en 1993)

TYPE DE FORMATION

DIPLÔME ET TITRE

Formations courtes

BTSA, DUT

Formation au professorat

Certificat d'aptitude au professorat

Formation vétérinaire

Docteur vétérinaire

Formation d'ingénieurs

Ingénieur agronome et agro-alimentaire, Ingénieur des techniques agricoles et autres ingénieurs

Autres formations universitaires longues

DEUST, MST, DEA, DESS, Doctorat

NB : BTSA = Brevet de technicien supérieur agricole

DUT = Diplôme universitaire de technologie

DEUST = Diplôme d'études universitaires de sciences et techniques

MST = Maîtrise des sciences et techniques

DEA = Diplôme d'études approfondies

DESS = Diplôme d'études supérieures spécialisées

II. LES PRINCIPALES DISPOSITIONS DU CHAPITRE V DU PROJET DE LOI

Les principales dispositions du texte proposé pour le Titre VI du projet de loi n'apportent pas de modification importante aux régles existantes en matière d'enseignement agricole. Elles respectent en particulier l'équilibre entre les enseignements techniques publics et privés.


Elles visent pour l'essentiel à adapter le contenu des textes applicables aux objectifs et aux préoccupations retenues par ailleurs (multifonctionnalité de l'agriculture, développement durable) et à tirer les conséquences sur le contenu du livre VIII du code rural de l'intervention de nouveaux textes, en particulier la loi n° 93-1313 du 20 décembre 1993 " relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle " ou encore la loi n° 95-836 du 13 juillet 1995 " de programmation du nouveau contrat pour l'école ".

Les dispositions nouvelles de ce projet de loi sont :

- la reconnaissance d'un statut législatif pour la recherche et pour le développement agricoles ;

- dans l'enseignement supérieur, la mise en place de formations doctorales ;

- l'association du ministre de la recherche à la cotutelle des établissements.

Votre commission, en ce qui concerne les dispositions du chapitre V du projet de loi qui vous est soumis, a décidé de ne déposer aucun amendement, s'en remettant, sur ce point, à votre commission des affaires culturelles, saisie pour avis.

Article 51 -
(Article L.811-1 du code rural) -

Principes et unions de l'enseignement et de la formation professionnelle agricoles publiques

Cet article regroupe dans l'article L.811-1 du code rural les dispositions de l'actuel article L.811-1 et des cinq premiers alinéas de l'article L.811-2, elles-mêmes issues de l'article premier de la loi n° 84-579 du 9 juillet 1984 " portant rénovation de l'enseignement agricole public ".

L'article 51 fusionne dans l'article L.811-1 la rédaction actuelle de l'article L.811-1 et des cinq premiers alinéas de l'article L.811-2 qui traitent respectivement de l'objet et des missions de l'enseignement agricole.

L'article 51 présente plusieurs différences par rapport au texte en vigueur.

- alors que le texte actuel prend en compte " l'enseignement et la formation professionnelle agricoles publics ", l'article 51 élargit la définition de l'enseignement agricole en précisant qu'il s'agit aussi de " l'enseignement général " ;

- en ce qui concerne l'objet de cet enseignement, la formation technologique est davantage prise en compte ; en outre, les métiers de la forêt, de l'aquaculture et de la filière agro-alimentaire sont mentionnés alors que l'article L.811-1 n'évoque que les " activités annexes à l'agriculture ".

De plus, les domaines des services et de l'aménagement de l'espace agricole, rural et forestier, de la gestion de l'eau et de l'environnement remplacent la simple mention actuelle " aux divers modes de développement rural ", tout en insistant sur le fait que ces activités ne sont prises en compte par l'enseignement agricole uniquement car elles concourrent au développement des métiers susmentionnés.

Il est précisé enfin que l'enseignement agricole contribue au " développement personnel des jeunes, à l'élévation et à l'adaptation de leurs qualifications et à leur insertion scolaire, professionnelle et sociale.

- pour ce qui est des missions, l'article 51 prend en compte la multifonctionnalité de l'agriculture et de l'espace rural ;

Soulignons que les grandes missions énumérées par l'article 51 -excepté celle relative à l'insertion professionnelle et sociale des jeunes et des adultes- sont déjà présentes dans la loi n° 84-579 du 9 juillet 1998 " portant rénovation de l'enseignement agricole public ".

Enfin, l'article 51 indique que l'enseignement et la formation professionnelle agricoles publics sont une composante du service public d'éducation et de formation ; ils obéissent aux principes traditionnels du service public que sont la laïcité, la liberté de conscience et l'égal accès de tous au service public ; ils relèvent du ministre de l'agriculture.

Votre rapporteur souligne que l'extension de la liste des missions des établissements peut conduire à relativiser la mission de formation qui est la raison d'être de ces établissements.

Sous réserve de ces observations et des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 52 -
(Article L.811-2 du code rural) -

Architecture générale de l'enseignement et de la formation professionnelle agricoles publics

Cet article clarifie l'architecture générale de l'enseignement et de la formation professionnelle agricoles publics prévue à l'article 2 de la loi n° 84-579 du 9 juillet 1984 " portant rénovation de l'enseignement agricole public ".

Alors que dans le code rural actuel, l'article L.811-2 traite des missions de l'enseignement agricole public (formation initiale ; formation continue ; développement, expérimentation, recherche et animation du milieu rural) et décrit les grandes lignes de l'organisation de cet enseignement, l'article 57 du projet de loi propose pour l'article L.811-2 une rédaction qui ne reprend que les principes d'organisation de l'enseignement agricole, étant entendu que l'article précédent L. 811-1 détaillait ses missions.

Au premier alinéa, l'organisation proposée, qui est déjà présente dans la version actuelle du code rural, est la suivante :

- les formations s'étendent de la 4ème au 1er cycle de l'enseignement supérieur inclus (ce qui comprend les brevets de technicien supérieur agricoles, par exemple) ;

- l'enseignement comprend des classes préparatoires et des classes d'adaptation ;

- le " service d'orientation commun à l'enseignement général, technologique et professionnel et à l'enseignement agricole " est maintenu dans la rédaction proposée. D'après les informations obtenues par votre rapporteur, ce service commun n'existe pas. Des procédures d'orientation non communes mais " parallèles " remplissent toutefois son objet. Elles sont fixées par la voie réglementaire.

Au deuxième alinéa proposé pour l'article L.811-2, le texte du projet de loi pose, en premier lieu, le principe de programmes et référentiels nationaux pour l'enseignement agricole , fixés soit par le ministre de l'agriculture, soit par le ministre de l'éducation nationale, soit les deux. Le texte de " référentiel " est déjà utilisé par l'Education nationale. En second lieu, cet alinéa fixe une organisation des formations agricoles en cycles à l'issue desquels les élèves, apprentis, étudiants et stagiaires peuvent soit poursuivre leurs études, soit s'engager dans la vie professionnelle. L'introduction des apprentis et des stagiaires est nouvelle. Elle devrait favoriser une meilleure porosité entre formations sous statut scolaire et formations sous statut non scolaire.

Le troisième et dernier alinéa affirme que des diplômes d'Etat ou des diplômes nationaux sanctionnent les formations dispensées par l'enseignement technique et la formation professionnelle agricoles publics. L'introduction de la notion de " diplôme national " est nouvelle et importante. Elle contribue à une meilleure reconnaissance de l'enseignement agricole.

Ces dispositions s'appliquent sous réserve des dispositifs prévus :

- à l'article L.115-1 du code du travail relatif à l'apprentissage ;

- à l'article L.900-2 du code du travail relatif aux actions de formation professionnelle continue ;

- à l'article L.980-1 du code du travail relatif aux formations professionnelles en alternance.

Ceci pour tenir compte du fait que ces filières préparent à des diplômes, comme les certificats de qualification professionnelle, qui ne sont ni des diplômes d'Etat ni des diplômes nationaux.

Sous réserve des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 53 -
(Article L.811-8 du code rural) -

Création des établissements publics locaux d'enseignement et de formation professionnelle agricoles

Cet article, qui modifie l'article L.811-8 du code rural, est relatif aux établissements publics locaux d'enseignement de formation. Il précise leur statut et le processus d'élaboration de leur projet pédagogique.

La nouvelle rédaction proposée pour l'article L.811-8 relatif au statut des établissements d'enseignement entraîne, par rapport à la rédaction actuelle, les conséquences suivantes : certaines dispositions sont modifiées, certaines sont abrogées, certaines sont maintenues et des dispositions nouvelles sont introduites.

I. LES DISPOSITIONS MODIFIÉES

La rédaction actuelle de l'article L.811-8 énumère les établissements qui assurent l'enseignement et la formation agricoles publics , avant de s'intéresser à leur statut -qui est soit celui d'un établissement public local, soit celui d'un établissement rattaché à un établissement public local, est celui d'un établissement " visé au VI de l'article 14 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 ", qui relève de la responsabilité de l'Etat-.

La rédaction proposée s'intéresse au statut d'établissement public local d'enseignement et de formation professionnelle agricole , dans le but de le clarifier, notamment pour les établissements qui sont aujourd'hui dits " rattachés " ou " de rattachement ".

Elle dispose que ces établissements publics regroupent :

- les lycées d'enseignement général et technologique agricole et les lycées professionnels agricoles ;

- les centres de formation professionnelle et de promotion agricoles ;

- les centres de formation d'apprentis ;

- les exploitations agricoles, ateliers technologiques à vocation pédagogique qui assurent l'adaptation et la formation aux réalités pratiques et qui contribuent à la démonstration, à l'expérimentation et à la diffusion des techniques nouvelles.

II. LES DISPOSITIONS ABROGÉES

La rédaction proposée ne fait plus mention des centres de formation professionnelle pour jeunes, qui n'existent plus, non plus que de la nécessité pour chaque établissement d'enseignement de disposer d'une exploitation agricole ou d'ateliers technologiques.

Par ailleurs, en raison du changement d'objet de l'article L.811-8 qui ne s'intéresse désormais plus qu'aux établissements publics locaux, le texte ne fait plus référence aux établissements relevant de la responsabilité de l'Etat " dans les conditions prévues au VI de l'article 14 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983 complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition des compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat ".

III. LES DISPOSITIONS MAINTENUES EN L'ÉTAT

Le dernier alinéa de l'ancien article L.811-8, relatif aux enseignements artistiques, est repris par la proposition de nouvelle rédaction.

Toutefois, ces dispositions s'appliquent aux établissements d'enseignement " mentionnés au présent article ". Les établissements qui sont sous la responsabilité de l'Etat (en vertu du VI de l'article 14 de la loi n° 83-663 précitée) n'étant plus mentionnés au présent article, ces dispositions ne s'appliquent plus à eux. Ce changement est voulu : en effet, de par leur nature, ces établissements se prêtent mal à un tel enseignement.

IV. LES DISPOSITIONS NOUVELLES : STATUT ET PROJET D'ÉTABLISSEMENT

A. LE STATUT

La nouvelle rédaction confirme que les établissements publics locaux sont dotés de la personnalité civile et de l'autonomie financière. Elle confirme ainsi l'autonomie pédagogique et administrative des établissements -qui, si elle était prévue par décret, n'était pas encore inscrite dans le code rural-. Elle dispose qu'une implantation sur plusieurs sites est possible si " la nature ou l'importance des activités le justifie ". Il a pour siège soit un lycée d'enseignement général et technologique agricoles, soit un lycée professionnel agricole.

B. LE PROJET D'ÉTABLISSEMENT

L'article 18 de la loi n° 89-486 du 10 juillet 1989 d'orientation sur l'éducation dispose que :

ARTICLE 18 LOI N° 89-486

" Les écoles, les collèges, les lycées d'enseignement général et technologique et les lycées professionnels établissent un projet d'établissement. Celui-ci définit les modalités particulières de mise en oeuvre des objectifs et des programmes nationaux . Il fait l'objet d'une évaluation. Il précise les activités scolaires et périscolaires prévues à cette fin.

Les membres de la communauté éducative sont associés à l'élaboration du projet qui est adopté par le Conseil d'administration ou le conseil d'école, qui statue sur proposition des équipes pédagogiques pour ce qui concerne la partie pédagogique du projet (...) ".

Les trois derniers alinéas du texte proposé pour l'article L.811-8 précisent les modalités de mise en oeuvre de ces dispositions pour les établissements publics d'enseignement technique et de formation professionnelle agricole.

Le contenu du projet d'établissement

Le texte dispose que, dans le respect des programmes mentionnés à l'article L.812-2, le projet d'établissement définit la façon dont les objectifs nationaux et régionaux sont mis en oeuvre et la nature des actions qui relèvent de l'autonomie pédagogique de l'établissement et de sa vie intérieure.

Conformément à l'article 18 de la loi n° 89-486 précitée, le texte prévoit que c'est le conseil d'administration de l'établissement qui adopte le projet d'établissement.

Ce dernier est élaboré, " sous la responsabilité du chef d'établissement ", avec le concours des personnels et des élèves ainsi que des parents d'élèves, parents d'élèves, étudiants, apprentis et stagiaires. Il est établi pour une durée de trois à cinq ans.

L'article 53 reste silencieux sur l'éventualité de conclure une Convention relative au projet d'établissement, par exemple, entre l'établissement et l'Etat, la région et, le cas échéant, d'autres collectivités publiques intéressées.

L'évaluation

Une évaluation de la mise en oeuvre du projet d'établissement est prévue au dernier alinéa de la rédaction proposée pour l'article L.811-8, dans des conditions fixées par le ministre de l'agriculture.

Sous réserve des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 54 -

Qualité d'autorité académique reconnue au directeur régional de l'agriculture et de la forêt comme autorité académique

Cet article a pour objet de préciser que l'autorité académique sur l'enseignement agricole est la direction régionale de l'agriculture et de la forêt.

Actuellement, l'article L.811-10 indique que l'autorité académique désigne le service régional chargé de l'enseignement agricole.

L'article 54 précise dans un premier alinéa que l'autorité académique sur l'enseignement agricole est la direction régionale de l'agriculture et de la forêt.

Le second alinéa confie cette mission au directeur régional délégué par le ministre de l'agriculture.

Initialement le projet de loi confiait l'autorité académique directement au directeur régional de l'agriculture et de la forêt, permettant ainsi une identification claire de cette autorité.

En outre, l'autorité académique, qui est l'équivalent de la compétence exercée dans l'enseignement général par le recteur, doit être uniquement confiée à un fonctionnaire expressément désigné et non à un service qui n'a pas d'existence juridique propre.

Sous réserve de ces observations et des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 55 -
(Article L.812-1 du code rural) -

Principes, missions et architecture générale de l'enseignement supérieur agricole public

Cet article modifie en partie les dispositions de l'article L.812-1 du code rural. Il énonce les principes régissant l'enseignement supérieur agricole public, dont il élargit les missions, s'inscrivant dans la nouvelle vision multifonctionnelle de l'agriculture.

Rappelons, à titre liminaire, que l'enseignement supérieur agricole public, qui a vocation à former des ingénieurs des paysagistes, des vétérinaires, des professeurs et des chercheurs, relève du titre 1er de la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur, ainsi que des articles L.812-1 à L.812-3 (enseignement supérieur public) et L.813-10 (enseignement supérieur privé) du code rural.

I. MODIFICATION D'INTITULÉ

Le paragraphe I du présent article propose de transformer le titre actuel du chapitre II du Titre Ier du livre VIII du code rural : " Dispositions propres à l'enseignement supérieur agricole et vétérinaire public " en : " Dispositions relatives à l'enseignement supérieur agricole public " . Le terme d'enseignement supérieur agricole est conçu comme regroupant l'ensemble des formations supérieures agricoles qui sont énumérées au deuxième paragraphe du présent article.

II. MISSIONS DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR AGRICOLE PUBLIC

Définition générale de l'objet de l'enseignement supérieur agricole public

Le présent article II précise l'objet de l'enseignement supérieur agricole public, qui est destiné à former des ingénieurs, des paysagistes, des cadres spécialisés, des enseignants, des chercheurs et des vétérinaires.

Le texte proposé dispose que l'enseignement supérieur agricole " constitue une composante du service public de l'enseignement supérieur " .

Missions de l'enseignement supérieur agricole

Comme le code rural actuel, la rédaction proposée fait référence au titre Ier de la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur , intitulé : " Le service public de l'enseignement supérieur ", qui détermine les grands principes auxquels celui-ci est soumis et qui précise que les dispositions des titres II, III et IV peuvent être étendues par décret à l'enseignement supérieur agricole.

Le texte enrichit les missions de l'enseignement supérieur agricole, comme le montre le tableau suivant :

MISSIONS DE L'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR AGRICOLE

ACTUEL L.812-1

ARTICLE L.812-1 DU PROJET DE LOI

1°) Dispenser des formations en matière de production, distribution, commercialisation

1°) En plus des anciennes missions, apparition des missions de formation à l'hygiène, à la qualité et à la sécurité de l'alimentation, au développement, de gestion et de protection de l'espace rural, de la forêt, de l'eau, des milieux naturels et du paysage.

2°) Participer à la politique de développement scientifique

2°) Missions reprises mais en partie dans une nouvelle rédaction.

 

3°) Actions de recherche, d'innovation et d'ingénierie dans les domaines de l'éducation et de la formation.

 

4°) Veille scientifique et technique, innovation technologique, valorisation des résultats de la recherche.

 

5°) Diffusion de l'information scientifique et technique.

3°) Participation à la coopération scientifique et technique internationale

6°) Coopération scientifique, technique et pédagogique internationale.

Le texte procède à une redéfinition du rôle de l'enseignement supérieur agricole qui voit sa vocation élargie et ses ambitions renouvelées. En effet, il est important que l'enseignement supérieur français est de moins en moins visible au plan international .

Le présent article (II) pose aussi le principe d'une évaluation régulière de l'enseignement supérieur agricole, dont les conditions ne sont pas précisées.

L'antépénultième alinéa de cet article (II) précise que l'enseignement supérieur agricole public est dispensé selon les voies de la formation initiale et de la formation continue. Il est, en outre, indiqué que cet enseignement comprend des formations supérieures professionnelles, des formations supérieures de spécialisation et des formations doctorales.

L'avant-dernier alinéa de l'article 55 souligne que le ministre de l'enseignement supérieur est associé à la tutelle et à la définition du projet pédagogique des établissements d'enseignement supérieur agricole publiés.

Le dernier alinéa indique que les établissements d'enseignement supérieur agricole public peuvent délivrer des diplômes nationaux de troisième cycle . Notons que si la loi n° 84-52 du 26 janvier 1984 sur l'enseignement supérieur prévoit cette possibilité, elle n'a pas été complètement utilisée.

Avec la nouvelle rédaction, le ministre de l'Agriculture pourrait délivrer, par exemple, des diplômes d'études approfondies (DEA) qui ne soient pas des DEA délivrés conjointement par plusieurs ministres, comme c'est actuellement le cas. Il s'agit d'une avancée réelle, notamment pour les écoles vétérinaires.

Néanmoins, certaines conditions doivent être réunies :

- l'établissement peut délivrer ce diplôme dans son domaine de compétence, seul ou conjointement avec des établissements publics à caractère scientifique, culturel et professionnel,

- il doit être habilité par le ministre chargé de l'enseignement supérieur, après avis du ministre de l'agriculture.

Sous réserve des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 56
(article L.812-3 du code rural) -

Administration des établissements
d'enseignement supérieur agricole public

Cet article insère dans le code rural un nouvel article qui traite de l'administration des établissements d'enseignement supérieur agricole publics.

I. TRANSFORMATION DE L'ACTUEL ARTICLE L.812-3 EN ARTICLE L.812-4


Le texte du projet de loi propose de conserver au sein de l'article L.812-4 (nouveau) les dispositions de l'actuel article L.812-3 relatif aux conventions de coopération avec les établissements d'enseignement supérieur privés. L'actuel article L.812-3 deviendrait donc l'article L.812-4.

II. INSERTION D'UN NOUVEL ARTICLE L.812-3 RELATIF À L'ADMINISTRATION ÉTABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR

La rédaction proposée par le projet de loi pour l'article L.812-3 reprend une partie des dispositions actuelles de l'article L.812-2, qu'elle complète.

Ainsi, les établissements d'enseignement supérieur agricole publics sont créés par décret, sont dirigés par un directeur et administrés par un conseil d'administration dont la composition et les pouvoirs sont précisés.

Chaque établissement élabore un projet d'établissement .

Les dispositions relatives au conseil d'administration sont détaillées ci-après :

LE CONSEIL D'ADMINISTRATION DES ÉTABLISSEMENTS D'ENSEIGNEMENT SUPÉRIEUR AGRICOLE PUBLICS

Composition : le conseil d'administration est composé :

- de représentants de l'Etat,

- de représentants des collectivités territoriales

- de représentants des enseignants-chercheurs et autres enseignants : au moins 20 % des membres, dont la moitié de professeurs et personnel de niveau équivalent,

- de représentants des étudiants et élèves,

- de représentants des personnels administratifs, techniques, ouvriers et de service,

- de représentants des professions et activités éducatives, économiques et de recherche.

Présidence : le président est élu au sein du conseil d'administration parmi les personnes extérieures à l'établissement ne représentant pas l'Etat.

Pouvoirs : le conseil d'administration :

- détermine les " statuts " et les structures internes de l'établissement,

- ses délibérations sont exécutoires un mois après leur transmission soit au ministre de l'agriculture soit conjointement au ministre de l'enseignement supérieur si l'un des deux ministres ne s'y est pas opposé.

Un décret en Conseil d'Etat doit fixer les modalités d'application de cet article.

Sous réserve des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 57 -
(Article L.812-5 (nouveau) du code rural) -

Création de groupements d'intérêt public par les établissements publics d'enseignement supérieur agricole

Cet article insère dans le code rural un nouvel article L.812-5 relatif aux groupements d'intérêt public que sont susceptibles de créer les établissements publics d'enseignement supérieur agricole.

Le présent article vise à permettre aux établissements publics d'enseignement supérieur agricole de constituer, soit entre eux, soit avec d'autres personnes morales, qu'elles soient de droit public ou de droit privé, un groupement d'intérêt public (GIP).

Ce GIP, qui est doté de la personnalité morale et de l'autonomie financière, a pour objet :

- soit de créer des pôles de compétences à vocation internationale . Une proposition du ministre chargé de l'agriculture est alors nécessaire à sa constitution. Il s'agit de remédier à l'éparpillement et à l'insuffisance du rayonnement international de l'enseignement supérieur agricole ;

- soit d'exercer en commun des activités de caractère scientifique, technique, professionnel, éducatif et culturel, ou de gérer des équipements ou des services d'intérêt commun. Il s'agit alors plutôt de donner aux établissements d'enseignement la taille critique nécessaire à l'exercice de certaines activités. Organisés sur une base territoriale, les GIP permettent de fédérer progressivement des établissements qui conserveraient pourtant leur autonomie et leur personnalité morale.

Un décret en Conseil d'Etat détermine les modalités d'application du présent article.

Sous réserve des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 58 -

Principes et missions de l'enseignement
et de la formation professionnelle agricoles privés

Cet article, qui modifie partiellement l'article L.813-1 du code rural, reprend pour les établissements d'enseignement et de formation professionnelle agricoles privés dont l'association ou l'organisme responsable a passé un contrat avec l'Etat la plupart des dispositions prévues à l'article 51 pour l'enseignement et la formation professionnelle agricoles publics.

Votre rapporteur renvoie donc sur cet article au commentaire effectué à l'article 51.

En effet, l'article 58 élargit le champ couvert par l'enseignement et la formation professionnelle agricoles prises à l'instar de l'article 51.

En outre, les missions mentionnées à l'article 58 reprennent les dispositions contenues dans la loi n° 89-486 du 10 juillet 1989 d'orientation sur l'éducation.

Votre rapporteur aurait souhaité que les missions retenues pour l'enseignement agricole privé soient identiques à celles définies dans l'article 51 pour l'enseignement agricole public, et ce par respect du principe d'homothétie de la loi de 1984.

Sous réserve de ces observations et des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 59 -
(Article L.813-2 du code rural) -

Architecture générale de l'enseignement technique agricole privé

Cet article modifie les dispositions de l'article L.813-2 du code rural ; comme l'article 58, il reprend pour le secteur privé les dispositions prévues par le projet de loi pour l'enseignement et la formation professionnelle agricoles publics, l'article " de référence " étant cette fois l'article 52 de ce projet de loi.

L'article 59 rappelle l'architecture générale de l'enseignement agricole privé prévue par l'article 2 de la loi n° 84-1285 du 31 décembre 1984 " portant réforme des relations entre l'Etat et les établissements d'enseignement agricole privés ".

Il est précisé que les formations de l'enseignement agricole privé s'étendent de la quatrième du collège jusqu'à la dernière année de formation de techniciens supérieurs.

Comme le souligne M. François Patriat, " l'article 52 du projet de loi prévoit que les formations dispensées par l'enseignement technique agricole public s'étendent, quant à elles, jusqu'au premier cycle de l'enseignement supérieur inclus. La formulation retenue pour l'enseignement privé empêche celui-ci de bénéficier de contrats avec l'Etat pour les classes autres que celles de techniciens supérieurs, en particulier, les classes d'adaptation " post BTS " préparatoires aux grandes écoles ".

Les dispositions relatives aux programmes et référentiels nationaux et en cycles sont identiques à celles figurant à l'article 52. Il en est de même pour les mesures relatives à la diffusion des langues et cultures régionales présentées à l'article L.811-5 pour l'enseignement public et celles qui concernent les enseignements artistiques.

Les alinéas relatifs aux diplômes sanctionnant ces formations et au projet d'établissement sont également comparables à celles figurant aux articles 52 et 53.

Enfin, l'article 59 du projet de loi précise que les dispositions de l'article L.811-3 sont applicables aux établissements agricoles privés sous contrat. Cet article, codifiant l'article 3 de la loi n° 84-579 du 9 juillet 1984 " portant rénovation de l'enseignement agricole public " indique que : " la nature, les taux et conditions d'attribution des aides aux familles des élèves de l'enseignement agricole public seront progressivement harmonisés avec ceux de l'enseignement général, technologique et professionnel ".

Sous réserve des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 60 -

Schéma prévisionnel national des formations de l'enseignement agricole

Cet article modifie l'article L.814-2 du code rural relatif au Conseil national de l'enseignement agricole (CNEA).

Rappelons que cet organisme présidé par le ministre de l'agriculture et comprend soixante membres représentant les différentes parties prenantes de l'enseignement agricole.

Cet article modifie le deuxième alinéa de l'article L.814-2 du code rural. Il traite du rôle du CNEA dans l'élaboration du schéma prévisionnel national des formations de l'enseignement agricole, outil de pilotage de l'enseignement agricole, qui fixe ses objectifs et ses orientations et donne lieu à un bilan annuel.

Dans l'actuelle rédaction de l'article L.814-2, le Conseil national de l'enseignement agricole est chargé de faire des propositions pour ce schéma et de vérifier sa " cohérence avec les objectifs du plan de la nation " , il peut proposer sa modification.

Le présent article tend à n'accorder plus au Conseil national de l'enseignement agricole que la possibilité d'émettre un avis sur le projet de schéma prévisionnel national des formations de l'enseignement agricole, ce dernier étant arrêté pour 5 ans par le ministre chargé de l'agriculture , après consultation des régions.

Il est précisé que ledit schéma tient compte des besoins de formations régionaux et sert de fondement à l'action de l'Etat, qui " conduit le dispositif national " de l'enseignement technique et de la formation professionnelle agricoles.

Sous réserve des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification .

Article 61 -

Coordination

Cet article insère deux nouveaux alinéas dans l'article L.814-4 du code rural. Ceux-ci doivent assurer la coordination entre les dispositions relatives aux comités régionaux de l'enseignement agricole et au schéma prévisionnel national des formations de l'enseignement agricole, dont il est question à l'article 60 du projet de loi, et les mesures présentes dans plusieurs lois intervenues depuis 1983.

Le premier alinéa inséré à l'article L.814-4 prévoit que le comité régional de l'enseignement agricole est consulté sur le projet de plan régional de développement des formations professionnelles des jeunes , prévu à l'article 83 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 précitée, complétée par la loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993 relative au travail à l'emploi et à la formation professionnelle. Cette disposition est nouvelle.

Il est de plus consulté sur le plan régional de l'enseignement agricole.

Le second alinéa, inséré à l'article L.814-4, prévoit que sont prises en compte les orientations du schéma prévisionnel national des formations de l'enseignement agricole lors de l'élaboration :

- du schéma prévisionnel régional, prévu à l'article 13 de la loi n° 83-663 du 22 juillet 1983, complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 " relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat ",

- du plan régional de développement des formations professionnelles des jeunes (PRDFP), défini à l'article 83 de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 complétée par la loi quinquennale n° 93-1313 du 20 décembre 1993 relative au travail, à l'emploi et à la formation professionnelle.

Sous réserve des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 62 -

Abrogation du 1er alinéa de l'article L.815-2 du code rural

L'article 62 abroge les dispositions du premier alinéa de l'article L.815-2 devenues obsolètes .

Le premier alinéa de l'article L.815-2 du code rural indique que " les dispositions des articles L.811-1 à L.811-5, L.812-1, L.814-1, L.814-2 et L.814-4 seront étendues par décret " aux DOM, et " éventuellement adoptées après avis de leurs conseils généraux ".

Les mesures susmentionnées s'étant appliquées directement, le dispositif prévu à cet article a été inutile.

Sous réserve des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 62 bis -

Création de l'inspection de l'enseignement agricole

Cet article crée une inspection de l'enseignement agricole

L'article 62 bis indique que cette inspection participe à la mise en oeuvre de la politique éducative arrêtée par le ministre de l'agriculture.

Elle doit concourir :

- aux contrôles,

- aux évaluations,

- aux expertises

des agents et des dispositifs.

Sous réserve des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article 63 -

Développement agricole

Cet article donne au développement agricole une base législative.

Actuellement, les articles du code rural applicables en matière de développement agricole (les articles R.821-1 à R.825-4) ont pour origine le décret n° 86-484 du 14 mars 1986 modifié par le décret n° 90-187 du 28 février 1990.

Par développement agricole, il faut entendre l'ensemble des actions qui concourent à la diffusion du progrès technique en agriculture.

L'article 63 prévoit ainsi la création au sein du livre VIII du code rural d'un titre II intitulé " développement agricole " et comportant cinq articles (articles L.820-1 à L.820-5).

Article L.820-1 du code rural -

Principes et missions du développement agricole

Le développement agricole a comme objectif :

- de répondre à la nécessité d'une adaptation permanente de l'agriculture et du secteur agro-alimentaire aux évolutions scientifiques, technologiques, économiques et sociales ;

- de promouvoir le développement durable de l'agriculture, la qualité des produits ;

- de favoriser la diversité des modes de développement des exploitations, et ce dans le souci de la protection de l'environnement, du maintien de l'emploi dans l'espace rural et pour l'aménagement du territoire.

Les missions d'intérêt général du développement agricole sont au nombre de deux :

- des actions de recherche finalisées,

- l'appui aux initiatives locales.

L'article 63 prévoit enfin que la politique de développement rural est définie et mise en oeuvre par une concertation de l'Etat et des OPA et qu'elle est soumise à des évaluations régulières.

Article L.820-2 du code rural -

Financement de la politique de développement agricole

L'article L.820-2 du code précité prévoit que la politique du développement agricole peut être financée par le fonds national de développement agricole (FNDA). Soulignons que cet organisme a notamment pour but de réaliser des programmes de développement élaborés aux différents échelons, départemental, régional, national, communautaire ou international.

Le libellé de l'article L.820-2, qui indique que la politique de développement agricole " peut être financée " par le FNDA rend possible, comme l'indique M. François Patriat, le recours complémentaire à des fonds privés.

Article L.820-3 du code rural -

Gestion du fonds national de développement agricole

Cet article prévoit que l'Etat peut confier la gestion du FNDA à une association par le biais d'une convention. L'Etat, les organisations professionnelles concernées et les organisations syndicales représentant les exploitants agricoles sont représentés sur une base paritaire au sein de cette association.

Elle peut, en outre, remplir plusieurs missions comme la préparation du programme national de développement agricole, sa coordination, son suivi, son évaluation et la contribution à son financement.

Il appartient, par ailleurs, aux chambres d'agriculture d'élaborer des programmes de développement départementaux et régionaux.

Soulignons que l'ANDA (association nationale de développement agricole), qui dispose d'un budget annuel de 750 millions de francs et d'un financement par taxe parafiscale, est l'instance concernée par cet article.

En outre, l'article 820-3 précise les modalités d'élaboration des programmes départementaux, régionaux et nationaux. Il n'aborde pas les modalités d'élaboration des programmes communautaires et internationaux.

L'ANDA n'a pas ainsi à financer des programmes communautaires et internationaux, en dehors des actions mises en oeuvre sur le territoire national.

Article L.820-4 du code rural -

Énumération des acteurs du développement agricole

L'article L.820-4 dresse la liste des acteurs du développement agricole. Il s'agit des chambres d'agriculture, des établissements d'enseignement agricole, des groupements professionnels à caractère technique, économique et social ou d'autres organismes publics ou privés.

Ces organismes agissent avec le concours de l'Etat et éventuellement des collectivités locales.

Leurs actions sont soumises au contrôle technique, administratif et financier de l'Etat dès lors qu'elles bénéficient de crédits publics.

Article L.820-5 du code rural -

Liaison entre développement et recherche agricoles

Cet article prévoit une coopération entre les organismes en charge de développement agricole mentionnés à l'article L.820-4 et ceux chargés de la recherche agronomique et vétérinaire.

Le but de ce rapprochement est d'assurer l'exploitation et la diffusion des résultats de cette recherche.

Par ailleurs, les organismes de développement agricole peuvent saisir ceux de la recherche de toute question soulevée par les acteurs de la filière agricole et agro-alimentaire justifiant leur intervention.

Sous réserve des amendements présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter l'ensemble de cet article sans modification.

Article 64 -
(Article L.830-1 du code rural) -

Principes et missions de la recherche agronomique et vétérinaire

Cet article crée dans le livre VIII du code rural un titre III, intitulé " Recherche agronomique et vétérinaire " comportant un article unique, l'article L.820-1 relatif précisément à la recherche en agriculture.

A l'heure actuelle, aucune disposition législative sur la recherche agronomique ne figure au code rural , alors même que le livre VIII comprend la recherche dans son intitulé.

Actuellement, la recherche agronomique et vétérinaire est soumise au droit commun défini par la loi n° 82-610 du 15 juillet 1982 " d'orientation et de programmation pour la recherche et le développement technologique de la France ".

L'actualité récente a pourtant montré l'importance primordiale des questions scientifiques, tant pour la compétitivité de la filière agricole et agro-alimentaire que pour la sécurité alimentaire de nos concitoyens.

Le présent article propose donc de préciser les objectifs de la recherche agronomique, ses missions et le rôle du ministre de l'agriculture dans ce domaine.

1. Les objectifs de la recherche agronomique

Les objectifs de la recherche agronomique énumérés dans l'article 64 sont les suivants :

- concourir au développement et à la compétitivité de la filière agricole et agro-alimentaire et de la filière forêt-bois, ainsi qu'à l'équilibre des territoires ruraux ;

- s'attacher à répondre prioritairement aux impératifs de la gestion durable de l'espace rural, de la sécurité et de la qualité des produits alimentaires, ainsi qu'à ceux de l'équilibre alimentaire et de la préservation des ressources naturelles mondiales. En outre, il est précisé que la recherche agronomique conserve une mission de recherche fondamentale.

2. Organismes et tutelle de la recherche agronomique

Le deuxième alinéa du texte proposé précise les principes d'organisation de la recherche agronomique. Celle-ci est conduite :

- par des organismes publics de recherche (INRA, CEMAGREF, CNEVA...) ;

- par des établissements d'enseignement supérieur (écoles nationales vétérinaires, écoles nationales d'agronomie...) ;

- par des instituts et centres techniques liés aux professions, regroupés au sein de l'association de coordination technique agricole (ACTA) ;

- par des centres d'innovation technologique ;

- par des entreprises et centres privés de la filière agricole et agro-alimentaire qui peuvent y apporter leur concours.

Il s'agit donc d'une définition large des acteurs de la recherche agronomique.

Votre rapporteur souligne, en outre, que les chambres d'agriculture réalisent de la recherche appliquée et gèrent des stations d'expérimentation.

La tutelle des organismes publics de recherche est exercée conjointement par le ministre chargé de l'agriculture, le ministre chargé de la recherche et, le cas échéant, d'autres ministres intéressés.

Le projet de loi précise toutefois l'apport spécifique de la tutelle exercée par le ministre chargé de l'agriculture : ce dernier veille à la meilleure articulation de l'action des organismes avec l'avenir du ou des secteurs socio-économiques concernés.

3. Missions de la recherche agronomique

Le texte précise que les capacités d'expertise et de soutien scientifique des organismes publics de recherche doivent contribuer à la préservation de la santé publique et de l'environnement. Il s'agit là d'attentes très fortes de la part de nos concitoyens. Le texte dispose : " Par l'identification et l'évaluation des risques [les organismes de recherche] contribuent à la prévention des atteintes à la sécurité et à la qualité des productions agricoles et agro-alimentaires et à la protection des ressources et milieux naturels ".

4. Evaluation


Le dernier alinéa du présent article prévoit une évaluation des résultats obtenus par les organismes publics chargés de la recherche agronomique, dans des conditions que le texte ne précise pas.

Sous réserve des modifications présentés par la Commission des Affaires culturelles, votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.

Article additionnel après l'article 64 -
(article 309 du code rural) -
Conditions d'exercice de la profession vétérinaire

Cet article, d'une part, rend plus équitable les procédures d'instruction des demandes et d'attribution des autorisations d'exercer la profession de vétérinaire, et d'autre part, régularise la situation des vétérinaires qui ont bénéficié d'un arrêté ministériel les autorisant à exercer la médecine et la chirurgie des animaux, pris antérieurement à la promulgation de la loi n°89-412 du 22 juin 1989.

Cet article additionnel a deux objets :

En premier lieu, la nouvelle rédaction de l'article 309 du code rural ne fait plus référence à la liste établie par arrêté du ministre de l'agriculture permettant aux détenteurs de certains diplômes de ne subir que des épreuves de vérification de la législation sanitaire française.

L'ensemble des candidats sera soumis à la totalité des épreuves de vérification d'ensemble des connaissances.

Les procédures d'instruction des demandes et d'attribution des autorisations d'exercer seront ainsi rendues plus équitables.

De plus, cette nouvelle rédaction permettra aux titulaires de diplômes étrangers non reconnus par l'Union européenne de bénéficier des mêmes conditions. Il s'agit essentiellement du diplôme français d'université qui est délivré aux étudiants étrangers admis dans les écoles vétérinaires françaises sans passer par la voie du concours et qui ont suivi la même scolarité que leurs condisciples.

D'autre part, le principe de délivrance des autorisations selon l'ordre d'antériorité des demandes est supprimé car, par analogie avec les autres concours, lorsque le nombre de candidats ayant satisfait au contrôle des connaissances excède le quota fixé, les intéressés devraient avoir la possibilité de conserver le bénéfice de ce contrôle lors de la session suivante.

En second lieu, l'avant dernier alinéa a pour objet de régulariser la situation de douze vétérinaires, français de naissance, qui ont bénéficié d'un arrêté ministériel les autorisant à exercer la médecine et la chirurgie des animaux pris antérieurement à la promulgation de la loi n° 89-412 du 22 juin 1989.

Ces arrêtés ont été annulés par la juridiction administrative au motif que les intéressés étaient français de naissance au lieu de l'être par naturalisation.

Le ministre de l'agriculture avait à l'époque jugé discriminatoire de traiter les français de naissance différemment de ceux ayant acquis ou recouvré cette nationalité par décision de l'autorité publique.

Il s'agit d'une mesure de justice qui s'impose d'autant plus que les intéressés exercent leur profession depuis une dizaine d'années étant régulièrement inscrits aux tableaux de l'Ordre des vétérinaires territorialement compétents.

Votre commission vous propose d'adopter cet article additionnel dans la rédaction proposée par votre rapporteur.

TITRE VII -

DISPOSITIONS DIVERSES
Article 65 -

Présentation d'un rapport sur l'adaptation de la fiscalité agricole

Cet article prévoit la présentation au Parlement, avant le 1er octobre 1999, d'un rapport du Gouvernement portant sur l'adaptation de la fiscalité agricole, des charges sociales et de la transmission des exploitations.

M. François Patriat, rapporteur du projet de loi d'orientation agricole à l'Assemblée nationale, et le Gouvernement, ayant estimé que les dispositions fiscales ne relevaient pas, sur le fonds, d'une loi d'orientation mais devaient trouver leur place dans un projet de loi de finances, ont souhaité inscrire dans le projet de loi agricole une disposition relative au dépôt d'un rapport relatif à la fiscalité agricole par le Gouvernement devant le Parlement.

Le ministre de l'agriculture a indiqué qu'il avait mis sur pied, dans le cadre du conseil supérieur d'orientation, un groupe de travail avec les OPA. Trois grands thèmes émergent des premiers travaux de ce groupe de travail : l'avenir du forfait agricole, l'adaptation du régime fiscal à la pluriactivité et la fiscalité de transmission des exploitations.

Conscient de la complexité de ces questions et de l'absence d'unanimité au sein même des OPA, votre rapporteur approuve l'article 65 du projet de loi.

Il sera néanmoins attentif au fait que ce rapport ne tombe pas dans l'oubli.

En outre, il vous propose de compléter cet article afin de consacrer l'émergence d'un véritable droit des entreprises agricoles et de comparer la situation fiscale et sociale des différents acteurs en milieu rural.

Votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.

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Sous le bénéfice de ces observations et sous réserve des amendements qu'elle vous soumet, la Commission des Affaires économiques vous propose d'adopter le présent projet de loi.

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