III. LA MODIFICATION DES STRUCTURES GOUVERNEMENTALES AU NIVEAU DES SERVICES DÉCONCENTRÉS DE L'ÉTAT

Le rapprochement entre direction départementale de l'agriculture et de la forêt et direction départementale de l'équipement, a été engagé par la circulaire interministérielle du 22 janvier 1993, prise en application du décret portant charte de la déconcentration. Elle prévoyait la mise en place de chefs de projet et de pôles de compétences pour certaines missions spécifiques. Les résultats les plus significatifs concernent les missions interservices de l'eau.

D'après les informations obtenues par votre rapporteur pour avis, les projets d'expérimentation élaborés sous la précédente législature concernant, notamment, l'organisation de la politique de l'eau et l'appui technique aux collectivités territoriales et mettant en oeuvre des fusions de service ont été retirés par le Gouvernement . Ils avaient suscité de très vives inquiétudes et une réelle démobilisation de l'ensemble des personnels. Le ministre de la Fonction publique et de la réforme de l'État est en train de mettre au point une communication gouvernementale qui devrait proposer une méthode de travail et des objectifs à retenir pour assurer la plus grande efficacité de l'ensemble des services déconcentrés de l'État.

IV. LES PROJETS EN COURS AUX NIVEAUX NATIONAL ET COMMUNAUTAIRE

S'appliquant à un cadre général d'aménagement du territoire, la politique concernant l'espace rural se réfère à un tissu économique et social où agriculture, industries agro-alimentaires, sylviculture et industries du bois, commerce, artisanat, services, petites et moyennes entreprises constituent les activités principales. Elle vise à permettre un développement durable des activités qui sont en mesure de garantir le maintien de la vie économique en milieu rural, à encourager l'exercice d'activités complémentaires ou nouvelles, et à assurer la préservation et la mise en valeur du patrimoine naturel et bâti.

En termes d'actions, la prise en compte des besoins spécifiques de l'espace rural s'appuie sur plusieurs politiques sectorielles ; elle exige une programmation cohérente reposant sur des partenariats qui ne peuvent se manifester et se développer qu'à des échelles territoriales adaptées.

La recherche d'un meilleur équilibre de l'aménagement du territoire au profit des espaces ruraux, du rural profond au rural périurbain, nécessite la mise en oeuvre de solidarités nationales et européennes qui s'expriment :

- dans les contrats de plan État-région , à l'échelle de zones rurales correspondent à des bassins homogènes d'économie rurale fragile (notamment en territoires ruraux de développement prioritaires) ;

- dans les programmes européens de développement des zones rurales (objectif 5b), auxquels sont actuellement éligibles 50 % du territoire français, ainsi que dans les programmes d'aide aux régions en retard de développement (objectif 1) et, enfin, dans les programmes d'initiative communautaire (LEADER, INTERREG) procédures localisées et souples de soutien technique et financier.

En outre, la PAC a évalué, dans ses préoccupations, vers le développement rural et la prise en compte de l'environnement (prime à l'herbe et autres mesures agri-environnementales, actions sur les structures agricoles...). Les politiques communautaires sont complétées par des mesures d'initiative nationale dans le cadre de la politique d'aménagement du territoire ainsi que des différentes politiques sectorielles concernant l'espace rural.

Votre rapporteur pour avis tient à souligner, à ce propos, l'importance des propositions de la Commission européenne sur le volet agricole d'Agenda 2000 en matière de politique rurale.

A. AU NIVEAU NATIONAL

1. La préparation de textes législatifs importants

Après l'abandon du projet de loi d'orientation sur l'agriculture, l'alimentation et la forêt par le nouveau gouvernement, plusieurs textes ont été annoncés.

Outre l'annonce d'une réforme de la loi d'orientation d'aménagement et de développement du territoire, seuls deux textes qui concernent le développement rural sont en préparation.

a) La loi d'orientation agricole

Le projet de loi d'orientation sur l'agriculture, l'alimentation et la forêt a été déposé par le précédent Gouvernement au Sénat, le 6 mai 1997. Ce texte comportait un titre premier relatif " à la gestion de l'espace agricole et forestier " regroupant treize articles .

Les principales dispositions concernaient :

- la prise en compte, dans la mise en valeur des espaces agricoles et forestier, de ses fonctions économique, environnementale et sociale ;

- la mise en place d'un Conseil supérieur de l'espace agricole et forestier, et l'affirmation de la responsabilité du ministre de l'agriculture sur la mise en valeur de l'espace agricole et forestier ;

- une nouvelle procédure pour protéger l'espace agricole et forestier ;

- un engagement des exploitations vers les démarches de développement durable.

Le Gouvernement a souhaité procéder à des nouvelles consultations en vue du dépôt d'un nouveau projet de loi d'orientation agricole. Les premiers groupes de travail, regroupant les différents acteurs du monde agricole et rural, ont commencé à se réunir. Cette concertation devrait, selon les informations fournies à votre rapporteur pour avis, s'achever vers la fin 1997. Parmi les objectifs fixés par le Gouvernement, figurent la lutte contre les déséquilibres territoriaux, une politique spécifique en faveur des zones défavorisées, la prise en compte des zones intermédiaires et l'instauration d'un contrat de développement durable pour restaurer le lien entre agriculture et territoires.

b) Un projet de loi sur la forêt

Le projet de loi d'orientation sur l'agriculture, l'alimentation et la forêt comportait un titre " Compétitivité de la filière-bois " relatif à la forêt. Ce titre regroupait 33 articles . Étaient prévus :

- une définition de la gestion durable des forêts ;

- l'extension des missions de l'Office national des Forêts (ONF) ;

- la création d'un établissement public, le Centre national de la propriété forestière ;

- l'obligation pour les chambres d'agriculture d'établir un programme d'action pour la mise en valeur des bois et forêts.

Le nouveau Gouvernement a annoncé dernièrement le dépôt prochain d'un projet de loi sur la forêt.

2. Une politique forestière à renforcer

a) Les objectifs de la politique forestière

L'importance de la forêt dans la politique d'aménagement rural n'est plus à souligner.

La politique forestière du ministère de l'Agriculture et de la Pêche visait jusqu'à présent à valoriser, simultanément et en cohérence, les trois fonctions écologique, économique et sociale de la forêt en tirant partie des synergies entre ces fonctions et en assurant les arbitrages indispensables lorsque celles-ci ne sont pas totalement compatibles. Il convient de noter que la fonction économique est seule à même d'assurer la rémunération des gestionnaires forestiers et donc de financer la gestion forestière, y compris à des fins environnementales et paysagères, au moindre coût pour le contribuable.

Outre sa fonction économique, la forêt remplit un rôle essentiel de protection biologique (flore et faune sauvages) et physique (érosion mécanique) ; elle contribue de façon marquée à l'amélioration du cadre de vie tant en ce qui concerne la récréation de tous les agressions dont elle est l'objet. Les axes d'intervention prioritaires sont :

- la protection des forêts contre les incendies ;

- la restauration des terrains en montagne ;

- la fixation des dunes et cordons littoraux ;

- la sauvegarde des milieux urbains remarquables.

Votre rapporteur pour avis souhaite que le nouveau ministre de l'Agriculture poursuive cette politique active en faveur du monde forestier.

Les moyens financiers nécessaires proviennent du budget général et du fonds forestier national (FFN), compte spécial du trésor alimenté par une taxe prélevée sur divers produits forestiers. Dans les forêts domaniales, gérées par l'Office national des forêts, les produits des coupes de bois et des locations de chasse assurent l'essentiel du financement de la gestion, des travaux d'entretien et des travaux neufs.

Au total, l'évolution des crédits consacrés à la forêt par le budget du ministère de l'Agriculture et de la Pêche et par le fonds forestier national a été de 1.655 millions de francs pour 1997.

b) L'importance du boisement des terres agricoles

Le boisement des terres agricoles en France a fait l'objet d'un plan d'application du règlement (CEE) n° 2080/92 du Conseil, instituant un régime communautaire d'aide aux mesures forestières en agriculture. Ce plan, approuvé par la Commission européenne le 27 avril 1994, prévoit principalement deux mesures, cumulables :

- une aide à l'investissement que constituent la plantation et les trois ou premiers entretiens, généralement sous la forme d'une subvention au taux de 40 % du devis des travaux hors taxes. Cela correspond, en moyenne, à une subvention de 6.000 F/ha (coût moyen des travaux : 15.000 F/ha) ;

- une prime annuelle destinée à compenser la perte de revenu découlant du boisement de superficies agricoles , versée à taux plein aux exploitants agricoles à titre principal, à taux réduit aux autres personnes morales ou physiques de droit privé qui boisent leurs terres. Cette deuxième mesure a fait l'objet du décret n° 94-1054 du 1er décembre 1994, remplaçant le décret n° 91-1227 du 6 décembre 1991, qui avait instauré une première prime réservée aux exploitants agricoles à titre principal ou secondaire. Le montant de cette nouvelle prime, modulé par département et éventuellement par région agricole et nature de terre, est de 150 à 1.000 francs par hectare et par an pour les non-exploitants, et de 700 à 2000 F par hectare et par an pour les exploitants à titre principal. Elle est versée pendant sept ans pour le peuplier, dix ans pour les résineux et les feuillus divers, quinze ans pour le hêtre et le chêne.

Cette nouvelle prime, après une mise en place laborieuse (mise au point des arrêtés préfectoraux définissant les montants et les conditions particulières d'attribution de la prime) semble enfin toucher sérieusement les propriétaires non-agriculteurs, puisque au cours du premier semestre 1997, pour la première fois, les surfaces nouvellement primées appartenaient plus aux non-agriculteurs (2.200 hectares) qu'aux agriculteurs (1.000 hectares), atteignant un rythme de 6.400 hectares primés par an, au lieu des 3.000 hectares/an primés en moyenne en cours des trois années précédentes.

Les montants des engagements français éligibles au cofinancement communautaire sont les suivants :

En millions de francs

Année

Prime compensatoire

Subventions

Total

1993

1,5

20,4

21,9

1994

3,8

31,0

34,8

1995

5,5

35,6

41,1

En 1994, la surface de terres non forestières boisées avec une aide de l'État a été d'environ 9.500 hectares , ce qui représente un montant d'engagement (hors prime) de 57 milliards de francs, dont 30 milliards de francs venant du fonds forestier national, et 27 millions de francs venant du chapitre 61-44 du budget de l'État. Toutefois, seul un montant de 31 millions de francs au total (correspondant à environ 5.200 hectares) concerne les terres agricoles au sens strict (encore cultivées au 31 juillet 1992). Cette partie des aides sera remboursée à 50 % par l'Union européenne, au fur et à mesure des paiements.

En 1995, le fonds forestier national a consacré 26 millions de francs au boisement des terres agricoles au sens strict , et le budget de l'État a apporté au financement de ces actions (hors prime) une contribution de 9 millions de francs. Cela représente environ 6.150 hectares de terres agricoles boisés avec une aide de l'État (sur un total de 10.000 hectares de terre non forestières boisées avec une aide de l'État).

En 1996, une enveloppe de 24 millions de francs était réservée sur le FFN pour le boisement des terres agricoles . En incluant la contribution de l'État, on peut espérer des résultats analogues à ceux de 1995 (résultats non encore disponibles).

En 1997, une enveloppe de 22 millions de francs était réservée sur le FFN pour le boisement des terres agricoles. La contribution de l'État (fortement régulée) devrait être réduite (- 50 % entre 1996 et 1997 sur le sous-article du 61-44-30 relatif aux travaux forestiers), on peut espérer environ 5.000 hectares de terres agricoles boisées avec une aide de l'État (résultats non encore disponibles).

En 1998, l'enveloppe réservée sur le FFN pour le boisement de terres agricoles est en baisse puisque son montant s'élève à 20,4 millions de francs. La contribution de l'État prévue pour 1998 est néanmoins légèrement supérieure à celle de 1997 après régulation. Au total, votre rapporteur pour avis escompte, pour 1998, des résultats analogues à ceux de 1997.

3. La nécessité d'une politique en faveur de la montagne

L'espace montagnard français s'étend sur près du quart du territoire national (22,5 %) et se répartit en sept massifs : les Vosges, le Jura, les Alpes du Nord, les Alpes du Sud, le Massif Central, les Pyrénées et la Corse, d'importance très inégale. Les Vosges représentent 6 % de cet espace contre 40 % pour le Massif Central. La densité de population est trois fois moindre que la moyenne du territoire national.

Avec la promulgation de la directive 75/268 CEE sur l'agriculture de montagne et certaines zones défavorisées, les spécificités de l'agriculture de montagne ont été prises en compte au niveau européen.

Cette directive est restée la pierre angulaire de l'intervention communautaire en faveur de ces zones jusqu'à la publication du règlement (CE) n° 950/97 du Conseil du 20 mai 1997 concernant l'amélioration de l'efficacité des structures de l'agriculture.

Dorénavant, pour la montagne, la délimitation des zones défavorisées montagne doit faire référence à l'article 23 de ce règlement qui donne la possibilité d'octroyer des indemnités compensatoires de handicaps aux exploitatons agricoles financés en France à 25 % par le FOEGA-Orientation.

Il n'est pas envisagé de revenir sur les critères de délimitation de zonage, actuellement en vigueur au sein de l'Union Européenne. Sur la base de ces derniers, 12 communes (ou parties de communes) déjà classées en zone de piémont ont été classés en zone de montagne par décision de la Communauté Européenne 97/158 du 13 février 1997 et arrêté interministériel France correspondant du 28 mai 1997.

Le protocole sur l'agriculture de montagne et le paysage adopté le 20 décembre 1994, dans le cadre de la convention alpine signée le 7 novembre 1991 par 6 pays riverains des Alpes, répond à une volonté commune de favoriser l'agriculture de montagne.

Mais surtout, la loi du 9 janvier 1985 relative au développement et à la protection de la montagne marque au niveau national une étape décisive. Cette loi dote, en effet, la montagne d'un statut juridique et en fait une entité particulière.

Conformément aux deux axes essentiels de cette loi, " l'expression de la solidarité nationale en compensation des handicaps naturels et de la prise en compte des spécificités montagnardes ", les pouvoirs publics ont mis en oeuvre jusqu'à présent :

Une politique spécifique de soutien à l'agriculture de montagne, qui se manifeste par trois types d'actions :

des aides aux agriculteurs, en particulier des indemnités compensatoires de handicaps naturels,

des aides au développement économique favorisant une meilleure gestion de l'espace par des aménagements agricoles collectifs et une amélioration des équipements forestiers,

des aides à la promotion des produits agricoles de qualité.

Une poltique de prévention des risques naturels par la restauration des terrains en montagne.

Une politique de développement rural des zones rurales montagnardes fragiles par la réalisation de programmes cofinancés au titre de l'objectif 5b de la réforme des fonds structurels.

Certaines de ces orientations ont fait l'objet de dispositions proposées dans le mémorandum pour l'agriculture et la forêt transmis le 16 septembre 1996 à Bruxelles.

Ces propositions portent sur :

Le renforcement des outils structurels par :

La revalorisation de l'indemnité spéciale de montagne (ISM) qui prévoit :

de porter le cofinancement européen de 25 % à 50 %, celui des ICHN hors montagne restant à 25 %,

de porter de 180 à 250 écus le plafond communautaire de l'ISM avec une possible modulation en fonction des handicaps particuliers afin de prendre en compte la très grande diversité des situations.

Une incitation à la mise en oeuvre des mesures agri-environnementales

pour leur donner un nouvel élan, le taux de remboursement par le FEOGA-Garantie des budgets des programmes régionaux agri-environnementaux, en zone de montagne devrait être porté de 50 % à 75 %.

Une identification " montagne " pour l'ensemble de ces actions

certains investissements collectifs dans le secteur de l'élevage : production de fourrage, équipement des pâturages, des points d'eau..., qui bénéficient déjà du cofinancement, devraient voir leur plafond relevé.

d'autres actions collectives indispensables au développement de l'agriculture de montagne : les surcoûts des transports, le travail en commun... ou encore, hors plan d'amélioration des matériels, les investissements liés aux activités agricoles (comme les bâtiments d'élevage), devraient être prises en compte par le budget européen.

une aide en faveur des opérateurs des filières spécifiques à la montagne devrait être instaurée pour la valorisation des produits à cycle court notamment pour les produits de qualité.

L'instauration d'une politique de qualité " montagne " assortie de moyens de promotion et de développement des produits agricoles et alimentaires.

Afin de préserver les intérêts du consommateur et dans un souci de concurrence loyale, de protection et de développement des productions, il est proposé de créer un cadre juridique communautaire en faveur des produits agro-alimentaires de montagne (incluant les produits de l'aquaculture et de la pêche continentales).

La mise en oeuvre d'une véritable politique communautaire de la forêt et de la filière bois.

A cet effet, il est proposé de promouvoir une gestion durable des forêts de montagne assortie d'actions en faveur d'une incitation à l'exploitation du bois, d'une gestion des forêts à fonction de protection dominante, d'une recherche sur les écosystèmes forestiers montagnards.

La gestion des risques naturels

Il est proposé d'encourager une coopération accrue entre Etats membres, ce qui permettrait aux collectivités publiques d'assurer une mission essentielle de sécurité et de conservation du patrimoine montagnard.

A ce jour, la Commission ne s'est pas encore prononcée sur les propositions.

Page mise à jour le

Partager cette page