Article 21 - Reconnaissance et retrait de la qualité de marchés réglementés

Commentaire : le présent article propose de donner compétence au ministre de l'économie et des finances, sur proposition du CMF et après avis de la Banque de France et de la COB, pour reconnaître a des marchés d'instruments financiers, la qualité de "marchés réglementes".

I. LE DISPOSITIF PROPOSÉ

Le présent article attribue compétence au ministre chargé de l'économie et des finances pour prendre les décisions de reconnaissance ou de déclassement d'un marché comme "marché réglementé". Toutefois, d'une part, l'initiative de la décision appartient au CMF et, d'autre part, la COB et la Banque de France doivent donner leur avis.

La déclaration de marché réglementé est effectuée par un arrêté du ministre de l'économie, auquel sont annexées les règles du marché.

L'article 68 de la proposition de loi adoptée par votre commission, prévoyait de donner cette compétence au Conseil supérieur de l'épargne et de l'investissement.

Il convient de noter d'emblée que l'article 61 II prévoit que :

"les marchés de valeurs mobilières et les marchés à terme sur effets publics et autres, sur des valeurs mobilières, denrées ou marchandises ainsi que tous marchés sur taux d'intérêt, sur indices ou sur devises fondés sur la loi du 28 mars 1885 et la loi du 22 janvier 1988 et fonctionnant régulièrement à la date de promulgation de la présente loi sont reconnus jusqu'au 1 er janvier 1997 au plus tard, comme des marchés réglementés".

Par ailleurs, on rappelle que, pour être déclaré réglementé au sens de la DSI (article premier, paragraphe 13.) un marché financier doit satisfaire à l'ensemble des conditions suivantes :

(a) porter sur des instruments financiers visés à la section B de l'annexe (unique) de la directive

Il s'agit potentiellement de tous les marchés financiers, à l'exception toutefois du marché au comptant des devises, du marché à terme sur marchandises, du marché de l'or et des placements portant sur biens réels (diamants, containers...).

(b) être déclaré réglementé par l'Etat d'origine

La déclaration de marché réglementé incombe à l'Etat d'origine, c'est à dire celui où est situé le siège statutaire de l'organisme qui assure les négociations ou, si conformément à son droit national il n'en a pas, l'Etat membre où est située l'administration centrale de cet organisme (article premier, paragraphe 6. point c. de la DSI).

Elle fait l'objet d'une liste qui doit être communiquée pour information aux autres Etats membres et à la Commission qui la publie au Journal des Communautés européennes.

(c) fonctionner régulièrement

(d) faire l'objet d'une réglementation minimale définie par les autorités publiques

Le paragraphe 13 de l'article premier fait référence à un marchée dont les dispositions sont "établies ou approuvées par les autorités compétentes". Le terme "d'autorités compétentes" doit être entendu (paragraphe 14 article premier et article 22 de la directive) comme celles désignées par les Etats membres. Il peut s'agir soit d'autorités publiques, soit d'organismes reconnus par le droit national ou par des autorités publiques expressément habilitées à cette fin par la loi nationale.

Ces dispositions doivent au moins définir les conditions de fonctionnement du marché et les conditions de négociation.

(e) garantir des conditions minimales d'information et de transparence

Ces conditions sont celles prescrites en application des articles 20 et 21 de la directive. Établies sur la base d'un compromis entre les pays dont les marchés sont déjà très réglementés (France) et ceux qui ont une forte culture du gré à gré (Royaume-Uni), ces normes établissent une base minimale d'harmonisation, inférieure, en général, au niveau requis pour les marchés français.

Il faut en retenir que les marchés réglementés sont ceux qui sont déclarés comme tels par les autorités compétentes de chaque pays ( ( * )18) et qui ont fait l'objet d'une réglementation approuvée soit par une autorité publique, soit par une autorité désignée par la loi.

II. POSITION DE LA COMMISSION

Cet article peut être accepté dans son principe. Toutefois, deux remarques s'imposent.

En premier lieu, il convient de souligner que la qualité de marché réglementé résulte bien sûr de la réglementation des opérations, mais aussi et surtout d'un acte réglementaire d'une autorité publique, en l'occurrence le ministre. Or, cet acte réglementaire n'emporte pas "création" ou "suppression" du marché, mais seulement "reconnaissance" ou "retrait" de la qualité de marché réglementé. Il est entendu par ailleurs que cette qualité entraîne l'application de certaines règles comme, notamment, l'obligation de concentration des opérations définies à l'article 24.

On notera également que, pour former sa décision quant à la nécessité de déclarer tel ou tel marché comme réglementé, le ministre de l'économie dispose d'un pouvoir discrétionnaire. Par ailleurs, dans l'hypothèse où il jugerait, à la lueur du fonctionnement de ce marché, l'application de ces règles insatisfaisantes, il serait toujours libre de retirer la reconnaissance.

Dès lors, le terme de "suppression" apparaît inadéquat et il conviendrait de lui préférer celui de "retrait".

Dans le même ordre d'idées, préciser que la décision du ministre est prise "au vu des règles de ce marché", apparaît comme un truisme. On peut espérer en effet que la décision de déclarer ou non un marché comme réglementé se sera pas prise au vu de la seule bonne foi des impétrants. Ces termes sont donc superfétatoires. On rappelle par ailleurs, que les règles des marchés doivent respecter les principes définis dans le règlement général du CMF (article 17 7°), ce qui suppose, peut-on penser, qu'avant d'établir leurs règles, les promoteurs d'un nouveau marché prennent un minimum de contacts avec l'autorité réglementaire compétente, en l'occurrence le CMF. Ceci semble d'autant plus vrai que la reconnaissance ne peut intervenir que si le CMF la propose.

En second lieu, le fait de prévoir la publication des règles du marché en annexe de la décision de l'arrêté du ministre de l'économie apparaît comme un formalisme excessif source de difficultés.

En effet, on notera que le principe du parallélisme des formes a conduit les rédacteurs du texte à prévoir, à l'article 22, l'intervention d'un décret en Conseil d'Etat pour fixer les conditions dans lesquelles ces règles pourraient être modifiées "sur proposition du Conseil des marchés financiers et après avis de la Commission des opérations de bourse et de la Banque de France".

Ainsi, chaque fois qu'une modification des règles du marché, même mineure, comme par exemple l'heure d'enregistrement des opérations, ou la détermination de la "fourchette moyenne pondérée" s'avérerait nécessaire, il faudrait un arrêté du ministre, pris sur proposition du CMF après avis de la COB et de la Banque de France pour les rendre effectives.

Ce dispositif n'est pas satisfaisant et se traduirait inévitablement, s'il était adopté en l'état, par des délais importants, préjudiciables à la bonne organisation des marchés financiers.

Au demeurant, on notera qu'un tel formalisme n'existe pas aujourd'hui. Ce serait donc faire preuve d'emblée à l'égard du CMF, d'une défiance supérieure à celle du CMT ou du CBV. Il s'inscrit, ce faisant, a contre courant de l'optique libérale qui est celle de la directive et en contradiction avec les objectifs d'adaptation rapide des marchés qui. dans un contexte de concurrence de plus en plus exacerbée ont motivé la création de simples sociétés commerciales en charge des marchés réglementés.

C'est pourquoi, il serait préférable de faire confiance au collège du CMF et de s'en remettre à son professionnalisme pour apprécier le caractère satisfaisant ou non des règles de fonctionnement d'un marché.

Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article sous réserve des modifications présentées.

* (18) C.F. Rapport Sénat n° 578 précité p. 117 et suivantes.

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