B. L'EXAMEN DE LA CONVENTION DU 15 JUIN 2022 CONSTITUE UNE ILLUSTRATION D'UNE ÉVALUATION INSUFFISANTE DES CONVENTIONS FISCALES PAR L'ADMINISTRATION

1. Au stade de l'étude d'impact, les conséquences économiques et fiscales de l'entrée en vigueur de la convention devraient être davantage détaillées

Il est devenu d'usage, au cours de l'examen des projets de loi portant approbation ou ratification d'une convention fiscale par la commission des finances, de déplorer le caractère lacunaire des études d'impact fournies au Parlement. Force est de constater que l'étude d'impact relative à l'approbation de la convention du 15 juin 2022 n'y déroge pas.

Si de longs développements sont consacrés aux relations économiques et commerciales entre la France et la Moldavie, certaines informations essentielles sont pourtant manquantes ou datées. L'étude d'impact n'indique ainsi aucun chiffre sur le nombre de ressortissants français résidant en Moldavie et de ressortissants moldaves en France, ni sur le nombre d'entreprises présentes dans les deux pays. Les réponses écrites au questionnaire du rapporteur et l'audition des commissaires du Gouvernement ont toutefois permis de combler ces manques.

De plus, le rapporteur regrette que ce document n'opère qu'une analyse de la situation actuelle et ne se penche que brièvement sur les conséquences de l'entrée en vigueur de la convention. À titre d'exemple, s'agissant de l'impact économique et commercial de la convention, l'étude d'impact indique sobrement que « la convention permettra de renforcer les échanges économiques et les investissements entre la France et la Moldavie ».

Surtout, l'étude d'impact ne comporte aucune estimation chiffrée des conséquences de la mise en oeuvre de cette convention sur nos recettes fiscales. Malgré la complexité d'un tel exercice, la transmission de ces données au Parlement paraît indispensable à sa bonne information.

La Cour des comptes, dans un référé daté du 31 mai 2019 et relatif aux conventions fiscales internationales, avait pourtant souligné que l'expertise économique consacrée aux négociations fiscales internationales pouvait être renforcée pour conforter notre capacité de négociation et enrichir les dossiers législatifs transmis aux parlementaires. La Cour recommandait, par ailleurs, de constituer une « cellule de veille stratégique » ad hoc, associant la direction générale des finances publiques (DGFiP), la direction générale du Trésor et la Banque de France. En dépit de son utilité certaine, une telle cellule n'a pas été constituée à ce jour.

2. Une évaluation a posteriori des conventions récemment entrées en vigueur permettrait d'éclairer notre politique en matière de conventions fiscales internationales

En sus du renforcement de l'évaluation a priori de l'impact économique et fiscal des nouvelles conventions, le rapporteur reprend la recommandation de notre collègue Vincent Delahaye12(*) sur la nécessité d'envisager une évaluation a posteriori de notre réseau conventionnel.

D'une part, il apparait essentiel d'évaluer la rénovation de notre réseau conventionnel sous les effets des avancées des standards de l'OCDE. Un tel travail permettrait d'éclairer utilement notre politique en matière de convention fiscales internationales. Nous disposons à cet effet d'un recul de quatre ans depuis l'entrée en vigueur de l'instrument multilatéral de l'OCDE et d'un recul de plus d'un an depuis la décision de la France de l'appliquer à toutes les conventions fiscales de son réseau conventionnel.

D'autre part, l'évaluation des effets de l'instrument multilatéral ne devrait pas nous dispenser d'assurer un suivi a posteriori des conséquences économiques et fiscales de la convention du 15 juin 2022 entre la France et la Moldavie. Un travail de suivi dans le temps de l'impact de l'entrée en vigueur des nouvelles conventions permettrait de constater avec précision les effets de ces nouveaux accords et d'éclairer l'élaboration de notre politique fiscale dans les années à venir.


* 12 Op. cit.

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