N° 1989


ASSEMBLÉE NATIONALE

CONSTITUTION DU 4 OCTOBRE 1958

SEIZIÈME LÉGISLATURE

 

N° 203


SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2023-2024

Enregistré à la Présidence de l'Assemblée nationale
le 13 décembre 2023

 

Enregistré à la Présidence du Sénat le 13 décembre 2023

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission mixte paritaire(1) chargée de proposer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi
visant à revaloriser le métier de secrétaire de mairie,

PAR Mme Marie-Agnès POUSSIER-WINSBACK,
Rapporteure,

Députée

PAR Mme Catherine DI FOLCO,
Rapporteur,

Sénateur

(1) Cette commission est composée de : M. François-Noël Buffet, sénateur, président ; M. Sacha Houlié, député, vice-président ; Mme Catherine Di Folco, sénateur, Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, députée, rapporteurs.

Membres titulaires : Mmes Françoise Dumont, Françoise Gatel, MM. Hussein Bourgi, Jérôme Durain, Mme Patricia Schillinger, sénateurs ; Mmes Laure Miller, Marie-France Lorho, MM. Christophe Bex, Francis Dubois, Mme Mathilde Desjonquères, députés.

Membres suppléants : Mmes Nadine Bellurot, Marie Mercier, Dominique Vérien, Laurence Harribey, Cécile Cukierman, MM. Pierre-Jean Verzelen, Guy Benarroche, sénateurs ; MM. Guillaume Gouffier Valente, Thomas Ménagé, Mme Karen Erodi, MM. Jean-Claude Raux, Yannick Monnet, Jean-Félix Acquaviva, députés.

Voir les numéros :

Sénat :

Première lecture : 554, 689, 690 et T.A. 133 (2022-2023)

Commission mixte paritaire : 204 (2023-2024)

   

Assemblée nationale (16e législ.) :

Première lecture : 1361, 1779 et T.A. 183

Mesdames, Messieurs,

Conformément au deuxième alinéa de l'article 45 de la Constitution, et à la demande de la Première ministre, une commission mixte paritaire chargée d'élaborer un texte sur les dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à revaloriser le métier de secrétaire de mairie s'est réunie au Sénat le mercredi 13 décembre 2023.

Le bureau a été ainsi constitué :

- M. François-Noël Buffet, sénateur, président ;

- M. Sacha Houlié, député, vice-président.

La commission a désigné :

- Mme Catherine Di Folco, sénateur, rapporteur pour le Sénat ;

- Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, députée, rapporteure pour l'Assemblée nationale.

*

* *

La commission mixte paritaire procède ensuite à l'examen des dispositions restant en discussion.

Mme Marie-Agnès Poussier-Winsback, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Les secrétaires de mairie jouent un rôle indispensable dans la très grande majorité de nos communes. Le présent texte a pour objet de revaloriser leur statut, afin de reconnaître à leur juste valeur les compétences, l'expertise et les savoir-faire que ce métier requiert ainsi que de répondre à la nécessité de recrutements importants au cours des prochaines années au regard du nombre des départs en retraite.

La proposition de loi, telle que transmise par le Sénat, comptait neuf articles. L'Assemblée nationale en a supprimé deux - les articles 2 ter et 5 - ; elle a rétabli l'article 3 et amendé les autres, ayant à l'esprit l'objectif de ce texte.

Si aucun article n'a été adopté conforme, cela tient, en grande partie, à des précisions rédactionnelles ou à des précisions enrichissant le texte, et non à des divisions de fond entre les deux chambres.

Je tiens à remercier, dès à présent, ma collègue sénateur Mme Di Folco. Nous avons eu à coeur de rechercher des compromis lorsque cela était malgré tout nécessaire, prolongeant ainsi l'approche consensuelle et constructive qui prévaut avec cette proposition de loi depuis le début de son parcours. Rappelons qu'elle a été adoptée à l'unanimité à l'Assemblée nationale.

Nos positions convergent sur les articles 1er A, 1er, 2 bis A, 2 bis, 4 et 5. Nous vous proposons toutefois de clarifier la rédaction de deux d'entre eux.

À l'article 1er A, il paraît nécessaire, sans modification de fond, de couper court à toute ambiguïté : entre 2 000 et 3 500 habitants, si le choix est fait de recruter des secrétaires de mairie, ils ne peuvent l'être que dans la catégorie A. La disposition existe déjà au niveau réglementaire, mais nous avons été alertés sur le fait que la rédaction actuelle pouvait être mal interprétée.

À l'article 2 ter A, sur la demande de rapport, nous proposons de préciser les contours de la filière de formation que le Gouvernement s'engage à mettre en place.

Pour sa part, l'article 2 instaure une voie de promotion pérenne de la catégorie C vers la B au moyen d'une formation qualifiante. Le Sénat en réservait le bénéfice aux seuls secrétaires de mairie justifiant d'une durée minimale d'ancienneté. L'Assemblée nationale a souhaité en élargir la possibilité à l'ensemble des fonctionnaires de catégorie C, afin de favoriser les candidatures aux postes de secrétaire de mairie. Il nous est apparu nécessaire d'encadrer davantage le dispositif pour trouver un juste équilibre entre les versions des deux chambres et pour s'assurer que cet article apporterait bien une réponse à la pénurie actuelle des secrétaires de mairie.

Deux questions se posaient. D'une part, la formation qualifiante sera-t-elle suffisante pour que les agents promus grâce à l'article 2 soient en mesure d'exercer les fonctions de secrétaire de mairie ? D'autre part, comment nous assurer qu'ils exerceront effectivement ces fonctions une fois promus, plutôt que d'autres auxquelles ils auront désormais aussi accès ? Notre préoccupation a été d'éviter tout effet d'aubaine.

En réponse à ces considérations, nous vous proposons d'introduire une condition supplémentaire au dispositif prévu par l'article, à savoir le passage d'un examen professionnel. Par ailleurs, les agents ainsi promus ne pourront être nommés que pour exercer des fonctions de secrétaires de mairie, pour une durée minimale qui sera définie par décret.

Enfin, nous proposons de rétablir l'article 2 ter, introduit par le Sénat et supprimé par l'Assemblée nationale, et de maintenir l'article 3, supprimé par le Sénat et rétabli par l'Assemblée.

De nombreuses dispositions de ce texte auront vocation à être précisées par décret. Le ministre de la transformation et de la fonction publiques s'est engagé à mettre en place un groupe de travail avec les parlementaires volontaires sur le suivi de cette proposition de loi. Ce dernier permettra des échanges sur les sujets pour lesquels un décret est prévu.

J'espère que nos discussions nous conduiront à améliorer les perspectives et les conditions de travail des secrétaires de mairie, et à apporter des réponses à la crise que traverse cette profession.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur pour le Sénat. - Six mois après que le Sénat a adopté, également à l'unanimité, la proposition de loi présentée par François Patriat et ses collègues du groupe Rassemblement des démocrates, progressistes et indépendants (RDPI), il nous revient d'en examiner les dispositions restant en discussion. Ce vote était intervenu deux mois après l'adoption par le Sénat de la proposition de loi déposée par Céline Brulin et ses collègues du groupe Communiste Républicain Citoyen et Écologiste - Kanaky (CRCE-K), et dont un certain nombre de dispositions ont été reprises, sur mon initiative, dans le texte dont nous discutons aujourd'hui.

Nous partageons tous le constat de la nécessité d'adopter rapidement des mesures concrètes pour répondre au besoin légitime de reconnaissance des agents qui exercent les fonctions de secrétaire de mairie, et de remédier au manque d'attractivité dont ce métier souffre aujourd'hui.

Lors de l'examen de cette proposition de loi, nous avons suivi, en commission des lois comme en séance publique, une ligne claire, consistant à allier la reconnaissance de la spécificité du métier de secrétaire de mairie au respect du principe d'égalité de traitement des agents publics.

L'accord trouvé avec vous, madame la rapporteure de l'Assemblée nationale, me semble déboucher sur un texte porteur d'indéniables avancées pour les secrétaires de mairie, même s'il ne réglera pas à lui seul l'épineuse question du déficit d'attractivité de ce métier.

La mesure phare de la proposition de loi réside en la consécration, dans le code général des collectivités territoriales (CGCT), de l'emploi de secrétaire de mairie comme un emploi de catégorie B au moins. Cette disposition, intégrée en séance à l'Assemblée nationale à l'article 1er A par le Gouvernement, qui s'y était engagé devant le Sénat, était très attendue.

Lors de son examen en commission, j'avais déploré que la proposition de loi reste au milieu du gué en ne prévoyant rien pour mettre en adéquation les compétences attendues des secrétaires de mairie et les responsabilités confiées avec le niveau de catégorie hiérarchique reconnu.

En tant que parlementaires, il ne nous était toutefois pas possible, en raison de l'article 40 de la Constitution, de prévoir l'obligation de nommer à un emploi de secrétaire de mairie un agent de catégorie B au moins. Après avoir refusé d'agir en ce sens au Sénat, le Gouvernement a manifestement changé d'avis et introduit à l'Assemblée nationale la disposition tant attendue.

Nous proposons une nouvelle rédaction qui préserve l'esprit des dispositions votées à l'article 1er A, tout en les précisant et en facilitant leur articulation avec les autres articles de la proposition de loi.

D'une part, seraient inscrites dans la loi les règles aujourd'hui prévues au seul niveau réglementaire, à savoir l'obligation de nommer aux fonctions de secrétaire de mairie, dans les communes de 2 000 habitants et plus, des agents de catégorie A.

Bien sûr, si le maire a déjà nommé un directeur général des services - qui ne peut que relever de la catégorie A - dans les communes de cette catégorie, il ne sera pas soumis à l'obligation de nommer en plus un secrétaire de mairie.

Dans les communes de moins de 2 000 habitants, le maire aura l'obligation de nommer au poste de secrétaire de mairie un agent de catégorie B au moins, étant entendu que rien ne lui interdit de nommer un agent de catégorie A s'il le souhaite.

D'autre part, nous proposons de distinguer deux temporalités différentes.

Dès la promulgation de la loi, les fonctions liées au secrétariat de mairie seraient inscrites dans le CGCT et l'emploi de secrétaire général de mairie serait consacré.

Nous avions discuté, à l'occasion de l'examen de la proposition de loi déposée par Céline Brulin ainsi que de la présente proposition de loi, du choix d'une nouvelle appellation pour le métier de secrétaire de mairie. L'intitulé de « secrétaire général de mairie » paraît bien correspondre au niveau de responsabilités qui incombe à ces agents, et me semble participer d'une revalorisation symbolique, mais non moins importante, de ce métier. En tout cas, rien ne me semble s'opposer à l'entrée en vigueur dès la promulgation de la loi de ce nouvel intitulé.

En outre, le 1er janvier 2028 marquera le début d'une nouvelle dynamique de recrutement : à compter de cette date, les maires auront l'obligation de recruter leurs secrétaires de mairie sur des postes relevant au moins de la catégorie B. Naturellement, c'est un effort financier que nous demandons aux communes. Mais il ne me paraît pas scandaleux que l'exigence d'un niveau élevé de compétences ait un coût. Aussi suis-je convaincue que les maires joueront le jeu. Il y va de la bonne gestion des services communaux, voire de leur pérennité.

L'article 1er prévoit un plan de requalification des secrétaires de mairie de catégorie C en catégorie B, selon une voie de promotion interne dérogatoire à la règle des quotas. L'Assemblée nationale a conservé les garanties ajoutées au Sénat quant au grade exigé des fonctionnaires concernés et aux conditions d'ancienneté requise ; elle a simplement avancé au 31 décembre 2027, contre le 31 décembre 2028, la date de fin de ce dispositif exceptionnel.

Je ne reviendrai pas en détail sur les dispositions qui avaient été votées pour la première fois au Sénat à l'occasion de la proposition de loi de Céline Brulin. L'article 2 bis introduit une formation initiale obligatoire pour les agents prenant un poste de secrétaire de mairie ; l'article 2 ter vise à favoriser de façon pérenne la promotion interne de l'ensemble des secrétaires de mairie, quelle que soit leur catégorie  - mais nous visions plutôt le passage des agents de la catégorie B à la catégorie A - ; enfin, l'article 4 permet aux communes comptant entre 1 000 et 2 000 habitants de recruter des agents contractuels à temps complet aux emplois de secrétaire de mairie, sachant que, aujourd'hui, elles peuvent déjà le faire pour les emplois à temps non complet.

Aux termes de l'accord conclu avec la rapporteure de l'Assemblée nationale, nous vous proposons d'adopter ces trois articles, dans la rédaction de l'Assemblée pour les articles 2 bis et 4, et dans celle du Sénat pour l'article 2 ter.

J'en viens aux dispositions dont le Sénat ne partageait pas la philosophie initiale et pour lesquelles j'ai accepté de faire un pas vers l'Assemblée nationale. Tel est le cas de l'article 2.

En commission, nous avions jugé nécessaire de lever l'ambiguïté qui affectait la rédaction de cet article dans la version de la proposition de loi. C'est pourquoi nous avions réservé aux secrétaires de mairie déjà en poste la voie de la promotion interne par la formation qualifiante. Notre objectif était de ne pas accroître, pour l'avenir, le nombre de secrétaires de mairie issus de la catégorie C : la disposition initiale prévue à l'article 2 nous semblait en contradiction avec la conviction selon laquelle l'emploi de secrétaire de mairie doit être réservé aux catégories B et A.

De votre côté, madame la rapporteure, vous avez mis en avant la nécessité de prévoir une disposition attractive pour les agents de catégorie C qui n'exercent pas le métier de secrétaire de mairie, mais qui pourraient être intéressés. Vous avez rappelé la nécessité d'anticiper la pénurie annoncée de secrétaires de mairie en élargissant le vivier de candidats.

Je n'ignore évidemment pas les difficultés majeures qui se présenteront dans quelques années, lorsque près d'un tiers des effectifs partiront en retraite. Pour autant, il ne me semble pas pertinent d'ouvrir l'accès à la catégorie B aussi largement que le prévoyait l'article 2 adopté par l'Assemblée nationale.

Si je suis prête à accepter la philosophie générale de l'article 2, je juge indispensable de prévoir des conditions suffisantes pour garantir à la fois la compétence des agents qui bénéficieraient de la voie de promotion interne dérogatoire ainsi créée, et leur engagement de servir en tant que secrétaire de mairie.

La rédaction de l'article 2 que nous vous proposons prévoit donc les trois dispositions suivantes.

Tout d'abord, seuls les fonctionnaires de catégorie C relevant des grades d'avancement seraient éligibles, autrement dit seuls les adjoints administratifs principaux, et non les adjoints administratifs du premier grade qui sont recrutés sans concours.

Ensuite, il ne suffirait pas d'avoir suivi une formation qualifiante aux fins d'exercer les fonctions de secrétaire de mairie ; encore faudrait-il l'avoir validée par le biais d'un examen professionnel pour vérifier ainsi l'acquisition effective de savoirs et de compétences.

Enfin, l'inscription sur la liste d'aptitude du cadre d'emplois de catégorie B ne vaudrait que pour la nomination à un poste de secrétaire de mairie ; de plus, l'agent aurait l'obligation d'exercer ces fonctions pendant une certaine durée minimale, définie par décret.

L'objectif que je poursuis au travers de cette rédaction est simple : éviter le prodigieux effet d'aubaine en vertu duquel tout agent de la catégorie C, quels que soient sa filière et son métier, serait éligible à la catégorie B, en l'occurrence au cadre d'emplois de rédacteur territorial, pour la simple raison qu'il aurait été assidu à une formation de quelques semaines ou de quelques mois portant sur le métier de secrétaire de mairie - sans compter le risque que l'agent, sitôt promu rédacteur territorial, choisisse un tout autre emploi que celui de secrétaire de mairie !

C'est pourquoi je considère comme essentiels les garde-fous proposés à l'article 2, sur lesquels, avec Mme la rapporteure de l'Assemblée, nous sommes tombées d'accord.

Enfin, je vous ferai part d'un regret, celui de ne voir aucune disposition viser en particulier les secrétaires de mairie qui relèvent aujourd'hui de la catégorie B.

L'objectif prioritaire de cette proposition de loi est clair : il s'agit de consacrer les fonctions de secrétaire de mairie comme un emploi de catégorie B au moins. Mais au-delà, il importe de revaloriser cet emploi, comme l'indique l'intitulé de ce texte. Dès lors, il me semble essentiel de ne pas oublier les agents qui exercent déjà aujourd'hui les fonctions de secrétaire de mairie en catégorie B - qui représentent près d'un quart de l'ensemble des secrétaires de mairie. Une grande partie d'entre eux exercent ce métier depuis de nombreuses années, souvent dans la même commune. En raison de leur âge ou de leur situation familiale, il leur est extrêmement compliqué de passer le concours pour accéder à la catégorie A, tandis que les règles actuelles de la promotion interne de droit commun, très rigides, ne leur permettent pas non plus aisément un tel accès.

Je vous pose la question : ces agents ne méritent-ils pas également de bénéficier d'une disposition exceptionnelle favorisant leur promotion dans la catégorie supérieure, à savoir la catégorie A ? Pourquoi leur refuser ce que la loi s'apprête à accorder à leurs collègues qui relèvent aujourd'hui de la catégorie C et qui appartiendront demain à la catégorie B de manière systématique, ou presque ?

Mettons-nous un instant à leur place : comment ne pas ressentir une forme de frustration devant la requalification en catégorie B de la majorité de leurs collègues secrétaires de mairie ?

Je ne pense pas que l'intention des auteurs de cette proposition de loi ni du Gouvernement ait été de favoriser des clivages au sein de cette profession ; je crains toutefois que cela ne soit un effet secondaire de la loi.

Je m'en suis ouverte hier après-midi au ministre de la transformation et de la fonction publiques, Stanislas Guerini, qui a fait mine de ne pas voir le problème. Une disposition visant à faciliter la promotion interne des secrétaires de mairie de la catégorie B vers la catégorie A, même à titre exceptionnel et pour une durée limitée dans le temps, aurait, pour des raisons de recevabilité financière, nécessité l'accord du Gouvernement. Nous sommes donc contraints d'en rester là pour le moment ! La réintroduction de l'article 2 ter facilitera néanmoins partiellement l'accès à la catégorie A.

Mes chers collègues, nous reconnaissons tous que cette proposition de loi ne pourra pas remédier à elle seule au manque d'attractivité dont souffre le métier de secrétaire de mairie ni répondre au besoin criant de reconnaissance de milliers d'agents. Elle marque toutefois une première étape, en offrant un certain nombre d'outils, dont il reviendra aux maires de se saisir.

Surtout, il incombera au Gouvernement de travailler aux évolutions relevant du domaine réglementaire, qu'elles soient propres aux secrétaires de mairie ou communes à l'ensemble des agents publics territoriaux. À ce propos, il serait nécessaire de revoir l'ensemble des grilles indiciaires de la fonction publique territoriale.

Mme Mathilde Desjonquères, députée. - Vous mentionnez un examen professionnel après la formation qualifiante. Les examens professionnels font l'objet d'une définition juridique précise, qui prévoit l'organisation des épreuves par les centres de gestion de la fonction publique territoriale. Or les formations qualifiantes seraient ici organisées par le Centre national de la fonction publique territoriale (CNFPT) ou par d'autres organismes tels que les universités, lesquels déterminent, déjà de leur côté, les modalités de validation des formations.

Le risque existe donc d'ajouter une épreuve supplémentaire. Ne serait-il pas plus avisé de faire simplement état d'une évaluation ou d'un examen, en laissant au décret d'application le soin d'en préciser les modalités en fonction des cas de figure ?

Mme Françoise Gatel, sénateur. - Merci pour ce travail positif, constructif et convergent en dépit des nuances qui persistent.

Ce texte est important d'abord pour les agents concernés, mais également pour les élus locaux et les communes. Nous ne saurions imaginer un maire accomplir son mandat sans avoir à côté de lui un ou une - il s'agit souvent d'une femme - secrétaire de mairie. Le secrétaire de mairie accomplit une mission unique. Il sécurise les décisions du maire, doit faire preuve d'anticipation et montre de multiples compétences. Il traite aussi bien des ressources humaines que des marchés publics ou des dossiers d'urbanisme, dont on sait le niveau d'exigence et le risque procédural qu'ils représentent. C'est un métier à part entière, qui suppose un sens élevé des responsabilités.

Il souffre cependant d'un déficit d'attractivité : un peu plus de 1 600 postes de secrétaire de mairie sont vacants. Nous savons que cette difficulté tient à une forme de précarité du métier ainsi qu'à des conditions d'exercice solitaire. Nombre de secrétaires de mairie sont employés à temps très partiel et se retrouvent seuls devant la complexité des dossiers.

Il nous faut prendre en considération la manière dont le métier évolue. Il arrive ainsi que des intercommunalités portent des contrats de travail, afin de constituer un pool de secrétaires de mairie, ce qui évite à ces derniers de se retrouver seuls et garantit la continuité du service dans les communes.

En ce sens, la proposition qui consiste à demander aux centres de gestion de constituer un réseau de secrétaires de mairie me semble des plus utiles. Elle est à même d'inciter ces agents à échanger sur leurs bonnes pratiques et à atténuer le risque de leur isolement au travail.

Je souscris aux propos de Catherine Di Folco sur la temporalité de la mise en place du dispositif.

Il importe aussi, tout en apportant de la reconnaissance aux agents, de sécuriser les communes prêtes à accomplir des efforts en matière de formation. La vie est ainsi faite qu'une occasion professionnelle peut à tout moment s'offrir ailleurs à une personne embauchée par une commune et qui a suivi une formation.

Enfin, les communes demeurent les employeurs et ont l'obligation d'établir des budgets de fonctionnement équilibrés. Nous pouvons nous en remettre à la responsabilité des maires qui, entendant saluer la qualité du travail de leur secrétaire de mairie et prévenir le risque d'un possible départ, leur proposeraient de passer de la catégorie B à la catégorie A. Ce n'est pas une obligation pour les maires, mais une possibilité qui leur est laissée. Faisons-leur confiance ! D'autant que le coût de la promotion restera souvent modéré, s'agissant d'emplois à mi-temps.

M. Hussein Bourgi, sénateur. - Je remercie à mon tour nos deux rapporteurs du travail de convergence effectué de concert. Nous y voyons un prolongement de l'unanimité qui s'est manifestée sur le texte tant au Sénat qu'à l'Assemblée nationale. Cette loi est attendue par ceux qu'elle concerne et je me réjouis de son adoption prochainement.

Lorsque nous avions adopté la proposition de loi au Sénat en juillet dernier, le ministre nous avait annoncé son inscription prioritaire à l'ordre du jour des travaux de l'Assemblée nationale. La procédure a finalement pris six mois pour arriver à son terme... Mais nous y sommes habitués !

Je regrette à mon tour que les agents de catégorie B en poste n'aient pas de perspective d'évolution vers la catégorie A. Nous serons amenés à voter un texte qui concernera surtout les secrétaires de mairie de catégorie C. Il importe que nous ne laissions pas ceux de la catégorie B dans un angle mort et sous un plafond de verre qui les maintient bloqués dans cette catégorie. Ce constat nous donne dès à présent l'occasion de prendre date pour une clause de revoyure !

Les maires expriment de fortes attentes que nous avons, les uns et les autres, relayées auprès du ministre Stanislas Guerini. Celui-ci annonce depuis plusieurs mois l'arrivée prochaine d'un projet de loi sur l'attractivité de la fonction publique - l'année 2024 est évoquée. Je ne le vois toujours pas poindre à l'horizon. Je ne voudrais pas que ce projet n'aboutisse pas alors que nous nous alarmons tous des difficultés de recrutement dans les collectivités territoriales ainsi que dans la fonction publique d'État et que nous nous accordons sur le diagnostic. Nous verrons quel sera le contenu de ce projet de loi, qui soulève beaucoup d'espoir.

Le groupe de travail annoncé sur le suivi de la mise en oeuvre de la future loi relative aux secrétaires de mairie a certainement vocation à alimenter et à enrichir la réflexion du ministre et de ses équipes. Lors des auditions que nous avons organisées au Sénat, j'ai mesuré combien était parfois parcellaire la connaissance qu'ils avaient de la complexité du métier de secrétaire de mairie, qui est aux prises avec la réalité du terrain.

Enfin, les efforts que les maires et les équipes municipales consentent sur le plan financier méritent d'être également accompagnés par l'État.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur pour le Sénat. - Madame Desjonquères, votre interrogation est légitime. L'organisation des examens professionnels ne représentera pas une charge supplémentaire pour les centres de gestion, qui s'y consacrent déjà régulièrement.

Par ailleurs, le décret à venir pourrait prévoir que si la formation est déjà sanctionnée par un examen, ce dernier sera suffisant. Cependant, à titre d'exemple, aucun certificat d'aptitude n'est délivré à l'issue d'une formation suivie au CNFPT. L'examen professionnel pourra au contraire sanctionner le suivi d'une telle formation. Le décret précisera ces points.

Mme Agnès Poussier-Winsback, rapporteure pour l'Assemblée nationale. - Je partage l'analyse de Mme Di Folco : il appartiendra au décret de préciser dans quelles conditions le suivi d'une formation devra être sanctionné. Il sera donc nécessaire de constituer un groupe de travail réunissant les parlementaires intéressés, qui se pencheront sur le sujet.

EXAMEN DES DISPOSITIONS RESTANT EN DISCUSSION

Article 1er A
Inscription dans le code général des collectivités territoriales
des fonctions de secrétaire de mairie

L'article 1er A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 1er
Dispositif temporaire de requalification dans un emploi de catégorie B
des secrétaires de mairie de catégorie C

L'article 1er est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 2
Création d'une voie de promotion interne par la formation qualifiante
en vue de l'exercice des fonctions de secrétaire de mairie

L'article 2 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 2 bis A
Mission d'animation du réseau des secrétaires de mairie
confiée aux centres de gestion

L'article 2 bis A est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 2 bis
Introduction d'une formation initiale obligatoire
propre à l'emploi de secrétaire de mairie

L'article 2 bis est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 2 ter A
Rapport sur les modalités de création d'une filière supérieure
préparant au métier de secrétaire de mairie

L'article 2 ter A est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 2 ter
Prise en compte de l'exercice des fonctions de secrétaire de mairie
pour la promotion interne

L'article 2 ter est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 3
Avantage spécifique d'ancienneté pour les agents
exerçant les fonctions de secrétaire de mairie

L'article 3 est adopté dans la rédaction issue des travaux de la commission mixte paritaire.

Article 4
Ouverture aux communes de 1 000 à 2 000 habitants
de la possibilité de recruter des contractuels
pour les emplois de secrétaire de mairie

M. Christophe Bex, député. - Le recours aux emplois contractuels pour les communes de moins de 2 000 habitants ne constitue pas une solution. Cette disposition rendra plus précaires ces emplois et entraînera des rémunérations moindres puisque, lorsqu'on signe ce type de contrat, on choisit l'indice qui s'applique. Or la proposition de loi vise à faire sortir ces emplois de la précarité et à les stabiliser, ainsi qu'à leur redonner de l'attractivité. L'État doit accompagner ce texte pour que nous puissions aller au bout de nos préconisations. De plus, ces personnes recrutées directement par le maire lui seront redevables, ce qui entachera l'indépendance de l'administration.

Par ailleurs, il faudrait porter une attention aux élus et aux maires, qui ont aussi besoin d'être formés, notamment pour mieux accompagner les secrétaires de mairie. De telles formations stabiliseraient le binôme constitué par le maire et le secrétaire de mairie.

Néanmoins, le texte va globalement dans le bon sens.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur pour le Sénat. - Les personnes recrutées sur des emplois contractuels seront de catégorie B, puisque ce sera obligatoire. De plus, elles pourront ensuite être titularisées.

L'article 4 est adopté dans la rédaction de l'Assemblée nationale.

Article 5 (supprimé)
Rapport sur la requalification en catégories A et B
des emplois de secrétaire de mairie

L'article 5 est supprimé.

Mme Catherine Di Folco, rapporteur pour le Sénat. - Je veux remercier Mme la rapporteure de l'Assemblée nationale de son écoute pour parvenir à un consensus.

La commission mixte paritaire adopte, ainsi rédigées, l'ensemble des dispositions restant en discussion de la proposition de loi visant à revaloriser le métier de secrétaire de mairie.

*

* *

En conséquence, la commission mixte paritaire vous demande d'adopter la proposition de loi visant à revaloriser le métier de secrétaire de mairie dans le texte figurant dans le document annexé au présent rapport.

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