VI. LA POLITIQUE IMMOBILIÈRE : LE MINISTÈRE DES ARMÉES FACE AU MUR DE LA « DETTE GRISE »

Tous programmes confondus, les crédits de la politique immobilière portée par la mission « Défense » s'élève à 2,3 milliards d'euros en AE et 2,2 milliards d'euros en CP, soit un niveau relativement stable par rapport aux exercices précédents.

Évolution des crédits totaux dédiés à la politique immobilière

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Malgré l'importance des montants en jeu, l'ensemble des responsables du ministère auditionnés par le rapporteur spécial ont attesté d'un état particulièrement dégradé des bâtiments, au préjudice de l'attractivité des armées dans un contexte de ressources humaines tendues ainsi que des besoins opérationnels.

Les sous-dotations chroniques en matière d'entretien et de rénovation ont entraîné la constitution d'une importante et coûteuse « dette grise ».

La dégradation de l'état général du patrimoine du ministère est bien attesté par les travaux du service d'infrastructure de la défense (SID) qui évalue annuellement sa performance14(*).

Le SID définit un indicateur de risque, qui mesure :

- les risques pour la sécurité des personnes et des biens ;

- la présence de défauts avérés de disponibilité de nature à compromettre la mission des forces armées ou l'exécution du service public de défense.

Performance du patrimoine du ministère des Armées mesuré
par le Service d'infrastructures de la défense

(en pourcentage de la superficie en m2)

Année

Risque faible

Risque moyen

Risque élevé

Risque très élevé

2014

25,0

64,1

10,0

0,9

2015

22,9

65,4

11,0

0,7

2016

20,6

65,2

13,5

0,7

2017

18,3

60,8

18,9

2,0

2018

15,1

64,4

18,8

1,7

2019

9,9

70,4

18,0

1,7

2020

12,9,

66,4

19,2

1,5

2022

12,8

61,3

24,1

1,8

Note : les données 2021 sont indisponibles.

Source : commission des finances du Sénat, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

Comme le montre le tableau ci-dessus, la part du patrimoine représentant un risque élevé ou très élevé est passée de 10,9 % en 2014 à 25,9 % en 2022.

À cet égard, le rapporteur ne peut que saluer l'effort important annoncé en LPM 2024-2030 en matière d'infrastructures. Celle-ci prévoit à cet effet une enveloppe de 16 milliards d'euros (contre 12 milliards d'euros prévus sous la précédente programmation), même si un tel niveau de dépenses aurait sans doute pu être évité en anticipant davantage les besoins et en procédant en temps utile aux remises en état nécessaires.

S'agissant par exemple du SSA, les hôpitaux d'instruction des armées (HIA) Percy (Clamart), Clermont-Tonnerre (Brest), et Laveran (Marseille) se trouvent sur ce plan dans un état particulièrement dégradé. La décision de remplacer l'hôpital Laveran à Marseille par un HIA de nouvelle génération (HIA-NG) pour 2031, projet donc le coût est estimé à 300 millions d'euros, constitue donc un symbole fort et positif. Le projet avait été inscrit dans le rapport annexé à la LPM 2024-2030 grâce à un amendement du rapporteur spécial (alors en sa qualité de rapporteur pour avis) retenu dans le texte adopté.

Il conviendra, pour l'avenir de se montrer certes vigilant à ce que les projets programmés soit menés à bien, mais surtout de veiller à ce que les dépenses d'entretien des nouvelles infrastructures soit prévues à un niveau suffisant pour éviter la constitution d'une nouvelle « dette grise ».


* 14 Cette performance dépend du niveau de qualité du patrimoine (fonction de son état et de son âge) et de son importance stratégique (priorités opérationnelles fixées par les armées).

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