Rapport général n° 115 (2022-2023) de MM. Georges PATIENT et Teva ROHFRITSCH , fait au nom de la commission des finances, déposé le 17 novembre 2022

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N° 115

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2022-2023

Enregistré à la Présidence du Sénat le 17 novembre 2022

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , considéré comme adopté par l'Assemblée nationale en application de l'article 49, alinéa 3, de la Constitution, pour 2023 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 20

OUTRE-MER

Rapporteurs spéciaux : MM. Georges PATIENT et Teva ROHFRITSCH

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean- Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) : 273 , 285 , 286 rect., 292 , 337 , 341 , 364 , 369 , 374 , 386 et T.A. 26

Sénat : 114 et 115 à 121 (2022-2023)

L'ESSENTIEL

La mission « outre-mer » a pour principal objectif le rattrapage des écarts persistants entre l'outre-mer et la métropole et la convergence des niveaux de vie. Elle rassemble les crédits du programme 138 « Emploi outre-mer » et du programme 123 « Conditions de vie outre-mer ».

I. UNE LÉGÈRE HAUSSE DES CRÉDITS DE LA MISSION NEUTRALISÉE PAR L'INFLATION

Les crédits présentés dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2023 s'élèvent à 2 701 millions d'euros en AE et 2 524,9 millions d'euros en CP soit une hausse de 1,7 % en AE et une hausse de 1,3 % en CP par rapport à la LFI 2022.

Cependant, cette hausse en valeur signifie une contraction des crédits de la mission en volume (référence euros 2022) qui s'établissent alors à 2 589,7 millions d'euros en AE et à 2 420,8 millions d'euros en CP soit une baisse de plus de 100 millions d'euros en AE et CP.

En réintégrant le bandeau « maladie » transféré vers la sécurité sociale, les crédits, corrigés de l'inflation enregistrent toutefois une hausse de 187,6 millions d'euros en AE et de 181,6 millions d'euros en CP. Cette hausse résulte du seul effet mécanique de l'action 1 du programme 138 relatif aux exonérations des charges sociales des entreprises qui sont des dépenses de guichet.

Évolution LFI 2022 / PLF 2023 des crédits de la mission « Outre-mer »

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir du PLF 2023

A. LE PROGRAMME 123 « CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER » ENREGISTRE UNE HAUSSE NOTABLE EN RAISON DU DÉVELOPPEMENT DE DISPOSITIFS DE SOUTIEN EXCEPTIONNEL AUX COLLECTIVITÉS

Entre la loi de finances initiale (LFI) pour 2022 et le PLF 2023, ce programme enregistre une hausse de 7,19 % en AE, soit 60,9 millions d'euros et de 6,25 % en CP soit 43,4 millions d'euros . Plusieurs mesures nouvelles, pour un montant total de 35,1 millions d'euros en AE et 23,1 millions d'euros en CP, expliquent en partie cette hausse :

- une hausse de 10 millions d'euros en AE et 4 millions d'euros en CP pour le renforcement de l'assistance technique auprès des collectivités ;

- un effort spécifique en faveur de l'alimentation en eau potable en Guadeloupe pour un montant de 10 millions d'euros en AE et CP ;

- des dispositifs de garantie pour les petites et moyennes entreprises et de subventions pour la lutte contre le changement climatique dans le Pacifique seront développés par la société de gestion des fonds de garantie d'outre-mer pour un montant de 7 millions d'euros en AE et 1 million d'euros en CP ;

- 3 millions d'euros en AE et CP seront ouverts pour participer à la diversification agricole ;

- un soutien de 5,1 millions d'euros en AE et CP sera attribué pour la réforme de la fonction publique territoriale à Wallis-et-Futuna .

Répartition des mesures nouvelles du programme 123 en PLF 2023

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire budgétaire

Cependant, les crédits ouverts au titre de la ligne budgétaire unique (LBU) ne permettent pas de répondre aux besoins dans ce domaine notamment concernant la résorption de l'habitat insalubre.

De surcroit, malgré une augmentation des crédits alloués aux dispositifs de soutien exceptionnel aux collectivités, les crédits ouverts pour les « contrats de redressement outre-mer » (COROM) restent stables. Or, dans ce contexte économique qui accentue la dégradation de la situation financière des collectivités d'outre-mer, les rapporteurs spéciaux estiment que ce dispositif pourrait utilement être renforcé pour s'étendre à un nombre plus important de collectivités.

B. INVERSEMENT, LE PROGRAMME 138 « EMPLOI OUTRE MER » ENREGISTRE UNE BAISSE DE PLUS DE 15 MILLIONS D'EUROS EN AE

Entre la LFI 2022 et le PLF 2023, il enregistre une baisse de 0,9 % en AE soit 15,6 millions d'euros et de 0,6 % en CP soit 11,2 millions d'euros en CP. Cette baisse résulte du solde entre la baisse de l'action 1 et la hausse de l'action 2.

En effet, les crédits de l'action 1 enregistrent une baisse apparente de 61,9 millions d'euros qui résulte de la mise en oeuvre d'une mesure de périmètre visant à transférer le « bandeau maladie » vers la sécurité sociale pour un montant de 264,53 millions d'euros sans modification du dispositif sur le fond. À périmètre constant, les crédits prévus pour 2023 au titre de la compensation des exonérations de cotisations sont en hausse de plus de 202,7 millions d'euros.

Les crédits de l'action 2 alloués au service militaire adapté (SMA) enregistrent une hausse de près de 15 % en AE et 17 % CP soit respectivement 44,6 millions d'euros en AE et 50,4 millions d'euros en CP par rapport à la LFI 2022 qui s'explique par la création de deux nouvelles compagnies et par le déploiement, à tous les territoires, du SMA 2025+ qui a notamment pour objectif d'ouvrir le dispositif à de nouveaux publics.

Les rapporteurs spéciaux notent que malgré l'efficacité du SMA le recrutement est freiné depuis quelques années par plusieurs phénomènes : décalage de croissance démographique entre les différents territoires, crise sanitaire et obligation vaccinale. De surcroit, dans un contexte économique difficile, ils s'interrogent sur la capacité à tenir le taux d'insertion cible en 2022 mais surtout en 2023 (cible fixée à 82,5 %).

Évolution du taux d'insertion entre 2016 et 2022

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires

II. DES DÉPENSES FISCALES DONT L'ÉVALUATION DOIT SE POURSUIVRE

Malgré les efforts de rationalisation, les dépenses fiscales enregistrent, en PLF 2023 une hausse de 2,5 % par rapport à 2022 en passant de 6 916 à 7 090 millions d'euros.

Si le principe même des dépenses fiscales n'est pas remis en cause en ce qu'elles représentent un complément indispensable aux crédits budgétaires, elles doivent pouvoir être mieux évaluées pour, au besoin, être mieux ciblées.

Les rapporteurs spéciaux notent toutefois que des évaluations ont récemment été menées et que d'autres sont prévues pour 2023 et sont très conscients des difficultés qui pèsent sur l'évaluation de ces dépenses fiscales. L'impact sur la création d'emplois est délicat à déterminer dans la mesure où les emplois mentionnés dans les agréments correspondent aux engagements de créations de la société bénéficiaire de l'agrément fiscal et non à une réalité mesurée ex-post . Par ailleurs, par manque de données disponibles, il est difficile de reconstituer le niveau de recettes potentiel avant la mise en place d'une dépense fiscale. L'évaluation demeure donc un exercice très complexe et subséquemment incomplet et à la fiabilité relative mais elle représente un préalable nécessaire à une réflexion plus large sur les dépenses fiscales.

III. UN EFFORT ACCRU EN PROVENANCE DES AUTRES MISSIONS DU BUDGET GÉNÉRAL MAIS DES CRÉDITS « PLAN DE RELANCE » INFÉRIEURS AUX ANNONCES INITIALES

A. DES CRÉDITS EN PROVENANCE DES AUTRES MISSIONS EN HAUSSE

En complément des crédits portés par la mission « outre-mer » et des dépenses fiscales, les outre-mer bénéficient de crédits en provenance d'autres programmes du budget général.

Ainsi, le montant total des contributions budgétaires s'élève, en PLF 2023, à 20,1 milliards d'euros en AE et 21,7 milliards d'euros en CP soit une hausse de 1,1 % en AE et de 3,7 % en CP par rapport à la LFI 2022.

Au total, en PLF 2023, les dépenses de l'État en faveur de l'outre-mer (crédits de la mission « Outre-mer » + dépenses fiscales + contributions des programmes du budget général) seront d'environ 27,1 milliards d'euros en AE et 28,7 milliards d'euros en CP.

Depuis 2018, cet effort total a augmenté de 15,4 % en AE et 23,1 % en CP soit, respectivement 3,6 milliards en AE et 5,4 milliards en CP.

Part des missions dans l'effort total en faveur de l'outre-mer (en AE)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents de politique transversale outre-mer

B. LES CRÉDITS EN PROVENANCE DU PLAN DE RELANCE : DES OUVERTURES DE CRÉDITS INFÉRIEURES AU NIVEAU ANNONCÉ ET UNE CONSOMMATION QUI N'EST PAS À LA HAUTEUR DES ATTENTES ET DES BESOINS

Lors des premières annonces relatives au plan de relance, les crédits du plan alloués à l'outre-mer devaient atteindre 1,5 milliard d'euros avec des engagements étalés entre 2021 et 2022 et au-delà de 2022, à la marge, pour des projets complexes d'infrastructures ou de rénovation lourde.

En juin 2022, 1,39 milliard d'euros a été ouvert en AE pour l'outre-mer dans le cadre du plan de relance soit environ 100 millions de moins que les premières annonces.

Enfin, alors que la partie du Ségur de la santé allouée à l'outre-mer était initialement de 1,06 milliard d'euros, il semble qu'en juin 2022 seuls 385 millions d'euros ont été ouverts.

En juin 2022, seulement 38,6 % des AE et 10,1 % des CP ont été consommés concernant les crédits budgétaires hors Ségur de la santé et fiscalité des entreprises (baisse des impôts de production).

Si ces taux sont décevants, il convient de surcroit de rappeler que les crédits non engagés et consommés pourraient être redéployés. En effet, la logique du plan veut que les crédits attribués le soient sous réserve d'un engagement rapide. Des redéploiements pourraient donc être opérés sur les crédits de mesures peu avancées qui n'engagent pas ni AE ni CP.

Les crédits du plan de relance se sont cependant accompagnés d'un effet levier important sur le financement des collectivités et ont permis de financer des projets indispensables aux territoires d'outre-mer et de renforcer des dispositifs existants.

Réunie le mercredi 16 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission tels que modifiés par ses amendements. Elle a également proposé d'adopter les articles 44 quater et 44 quinquies sans modification et l'article 44 sexies tel que modifié par son amendement.

Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a confirmé ses décisions.

L'article 49 de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) fixe au 10 octobre la date limite pour le retour des réponses aux questionnaires budgétaires.

À cette date, 99,2 % des réponses étaient parvenues aux rapporteurs spéciaux en ce qui concerne la mission « Outre-mer ».

PREMIÈRE PARTIE
UN PREMIER BUDGET DE QUINQUENNAT DANS UN CONTEXTE INFLATIONNISTE ET DE TENSIONS SOCIALES ET INSTITUTIONNELLES

I. UN CONTEXTE INFLATIONNISTE QUI RISQUE DE CREUSER LES ÉCARTS STRUCTURELS DE NIVEAU DE VIE ENTRE LA MÉTROPOLE ET LES TERRITOIRES D'OUTRE-MER

A. DES ÉCARTS DE NIVEAU DE VIE STRUCTURELS ENTRE L'OUTRE-MER ET LA MÉTROPOLE QUI PERSISTENT....

1. Un PIB par habitant qui se creuse

Des écarts forts et persistants demeurent entre les territoires d'outre-mer et la France métropolitaine dans le domaine socio-économique. De surcroît, dans certains territoires, ces écarts ont tendance à s'accroitre.

Ainsi, le PIB par habitant enregistre, en moyenne, une légère diminution en outre-mer entre 2019 et 2021 alors qu'il enregistre une hausse de plus de 5 % en métropole.

Évolution du PIB par habitant des DROM et COM entre 2019 et 2021

(en euros courants, estimation)

Population : estimations de l'INSEE au 01/01/2022 dans les DOM et recensements dans les COM : Nouvelle-Calédonie, recensement 2019.

PIB nominal 2021 d'après CEROM, INSEE, ISEE et ISPF.

Source : commission des finances à partir des données de l'IEOM et l'INSEE

Alors qu'en 2019, le PIB par habitant en métropole était 1,66 fois plus élevé qu'en outre-mer, en 2021, ce ratio s'élève à 1,76.

Les rapporteurs spéciaux notent également qu'en Guadeloupe, Nouvelle-Calédonie et Polynésie, le PIB par habitant a diminué entre 2019 et 2021. Dans les autres territoires d'outre-mer, il enregistre une progression comprise entre 1,93 % et 3,78 % (contre 5,22 % de hausse en métropole).

2. Des évolutions démographiques différentes par territoire mais globalement défavorables

En moyenne, sur les territoires d'outre-mer, la population a enregistré une augmentation de 5,6 % entre 2011 et 2021 contre 3,6 % en métropole.

Cette évolution est cependant très variable d'un territoire à l'autre mais créée, dans tous les cas, une déformation démographique et partant des difficultés économiques et sociales.

Ainsi, dans les territoires où la croissance démographique est importante (Guyane, Mayotte, Nouvelle-Calédonie et Polynésie), l'indice de vieillissement (part des plus de 65 ans par rapport aux moins de 20 ans) est beaucoup plus faible qu'en métropole. À l'inverse, dans les territoires enregistrant une évolution démographique à la baisse (Guadeloupe, Martinique), la part des personnes âgées de plus de 65 ans est supérieure à la métropole.

Population outre-mer : évolution et ratios

(1) : rapport de la population de plus de 65 ans sur la population de moins de 20 ans.

(2) : le rapport entre la population des jeunes et des personnes âgées (moins de 20 ans et 65 ans et plus) et la population de 20 à 65 ans. Il est défavorable lorsqu'il est supérieur à 100 (ou « fort »), c'est-à-dire lorsqu'il y a davantage de jeunes et seniors que de personnes en âge de travailler.

Source : commission des finances à partir des données de l'INSEE, ISPF, ISEE et STSEE

La Guadeloupe et la Martinique sont des territoires vieillissants contrairement aux autres territoires d'outre-mer qui présentent une part importante de personnes de moins de 20 ans.

Ces déformations démographiques génèrent des besoins spécifiques importants en équipements publics (accueil des enfants en bas âge et groupes scolaires ou au contraire, structures d'accueil pour personnes âgées).

De surcroit, dans les territoires à forte croissance démographique, le taux de dépendance économique, en apparence favorable, doit largement être pondéré par un taux de chômage important.

Taux de chômage en 2021 (% de la population active de 15 ans et plus)

Source : tableau de bord des outre-mer(IEOM) - données arrêtées au 1 er aout 2022

3. Des taux d'équipements publics très en deçà de ceux constatés en métropole et décorrélés des besoins réels

La plupart des infrastructures publiques en outre-mer sont aujourd'hui insuffisantes pour répondre à l'ensemble des besoins de la population, sont défaillantes ou présentent des coûts pour l'usager supérieurs à ceux constatés en métropole.

Écart des taux d'équipement entre les territoires d'outre-mer et la métropole
en nombre pour 100 000 habitants

Source : commission des finances du Sénat à partir des données de l'INSEE pour 2020. Les données relatives à l'outre-mer concernent les seuls territoires de la Guadeloupe, la Martinique, la Guyane, la Réunion et Mayotte

Ce constat général de besoins en équipements publics est ancien . Il avait déjà été établi par l'inspection générale de l'administration (IGA) dans un rapport de 2012 et il a été rappelé dans un récent rapport fait au nom de la commission des finances du Sénat sur le FEI, publié le 22 juin 2022 1 ( * ) . Aussi, force est de constater que malgré les outils d'aide à l'investissement développés depuis plus de 10 ans , et que les rapporteurs saluent, les besoins d'investissement sont toujours importants avec des écarts avec la métropole qui peinent à se réduire.

Ces faibles taux d'équipements publics contribuent également aux écarts structurels de niveau de vie puisque la prise en charge des enfants en bas âge, des personnes dépendantes ou encore la scolarisation des élèves ou l'accès aux soins se font dans des conditions détériorées par rapport à la métropole.

B. ... QUI POURRAIENT ÊTRE AGGRAVÉS PAR L'INFLATION

1. Un niveau d'inflation élevé malgré le bouclier qualité prix...

Les territoires d'outre-mer sont, comme la métropole, touchés par l'inflation actuelle.

En juillet 2022, la variation annuelle des prix sur 12 mois est inférieure en Martinique, à la Réunion et en Nouvelle-Calédonie par rapport au taux constaté en métropole. Elle est cependant supérieure en Guyane et en Polynésie.

Évolution de l'inflation entre janvier et juillet 2022 - comparaison entre la France et les territoires d'outre-mer

Source : commission des finances du Sénat à partir des données de l'INSEE, ISPF et ISEE

Inflation Antilles Guyane en glissement annuel

Inflation DOM océan indien en glissement annuel

Inflation COM pacifique en glissement annuel

Source : tableau de bord des outre-mer(IEOM) - données arrêtées au 1 er aout 2022 - dernier point : T2 2022 d'après les données INSEE

Il convient donc de souligner que l'inflation dans les territoires d'outre-mer enregistre une hausse notable malgré l'existence du bouclier qualité prix (BQP) mis en place en 2012.

Le bouclier qualité prix

Dans les départements et régions d'outre-mer, la loi de régulation économique dite loi Lurel adoptée en novembre 2012 met en place le bouclier qualité-prix (BQP), qui « prévoit qu'un certain nombre de produits de la consommation courante voient leurs prix fixés par négociation, ou, en l'absence d'accord, par le préfet ».

Ce dispositif s'applique en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à La Réunion, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et-Futuna.

Les modalités d'application sont fixées par l'article L.410-5 du code de commerce et par le décret n° 2012-1459 du 26 décembre 2012 relatif aux accords annuels de modération de prix de produits de grande consommation.

Les négociations commencent après un avis émis par l' observatoire des prix localement compétent et réunissent les organisations professionnelles du commerce de détail, leurs fournisseurs et le représentant de l'État. Elles doivent aboutir dans un délai d'un mois. L'accord qui en résulte fait l'objet d'un arrêté préfectoral . La liste des produits concernés ainsi que le niveau des prix sont définis pour chaque territoire.

Les négociations sont annuelles, l'accord devant être signé le 1 er mars. Une signalétique « BQP » permet d'identifier les produits concernés par ce dispositif.

À La Réunion en 2022, le panier comporte 153 produits , comme en 2021. Il est garanti à un prix global de 348 euros. Ce bouclier qualité-prix est en place dans 63 magasins depuis le 28 mars. Dans les zones rurales de l'île, un dispositif complémentaire a été déployé : 42 produits inscrits au BQP pour un prix global de 98,45 euros sont proposés dans les neuf commerces de proximité.

En Guadeloupe , l'accord a été signé le 7 avril 2022. Il distingue trois listes en fonction de la taille des magasins. Dans les magasins de plus de 2 000 m², 106 produits dont 12 fruits et légumes locaux pour un montant maximum de 320 euros. Entre 1 000 et 2 000 m², 104 produits dont 10 fruits et légumes locaux pour 320 euros également. Enfin, pour les commerces de moins de 1 000 m², 70 produits dont 8 fruits et légumes locaux pour 180 euros.

Entré en vigueur le 1 er mai 2022, l'accord établi en Martinique porte sur 101 produits, comme en 2021. Le prix global maximum autorisé reste inchangé, à 306 euros. Comme à La Réunion et en Guadeloupe, la liste est adaptée à la taille du magasin : entre 1 000 m² et 800 m², une liste de 52 produits de consommation courante au prix maximum de 160 euros et dans les petites surfaces, inférieures à 800 m ² une liste de 27 produits au prix de 86 euros.

À Saint-Pierre et Miquelon en 2022, le BQP comprend 55 produits pour un prix global maximum autorisé de 160 euros et est appliqué dans le centre commercial qui se situe à Saint-Pierre.

À Wallis et Futuna , 83 produits sont soumis à l'accord 2022 de modération des prix, et 18 commerces sont concernés. Le prix maximum global de cette liste est fixé à 758,65 euros, dont 260,12 euros pour les produits alimentaires importés, 95,49 euros pour les produits alimentaires locaux.

En Guyane , les distributeurs et la chaîne logistique se sont entendus pour un gel des prix sur 85 produits de grande consommation pour 265 euros maximum. 120 enseignes sont engagées dans le dispositif.

En Nouvelle-Calédonie et en Polynésie des encadrements de prix ont été mis en oeuvre par les gouvernements locaux présentant des similitudes avec le BQP. En Nouvelle-Calédonie , un accord interprofessionnel a été signé le 4 juillet 2022 entre les représentants des industries locales de transformation, de l'importation, de la grande distribution et des petits commerces afin de plafonner le prix de 60 produits. L'accord est en application pour une durée de trois mois avec la possibilité d'être renouvelé une fois en septembre. En Polynésie une soixantaine de produits de première nécessité sont concernés, ainsi que plusieurs dizaines de produits de grande consommation .

En juillet 2022, le ministre délégué en charge des outre-mer, en réponse à une question de la députée de La Réunion Nathalie Bassire sur la vie chère, a indiqué vouloir renforcer le dispositif d'encadrement des prix dans tous les outre-mer en étendant le blocage des prix à 5 % des produits de consommation courante.

Les rapporteurs spéciaux seront donc attentifs aux suites qui pourront être données à cette annonce et qui pourraient représenter une piste de limitation de l'inflation en outre-mer et, partant, de protection du pouvoir d'achat des ultra-marins.

2. ...qui vient s'ajouter à des coûts déjà supérieurs en outre-mer par rapport à la métropole

Si les écarts de niveau d'inflation entre les territoires d'outre-mer et la métropole ne sont pas significatifs, cette inflation s'ajoute à un coût de la vie déjà supérieur dans les territoires d'outre-mer renchérissant encore l'approvisionnement des ménages, des entreprises et des collectivités ultra-marines.

En effet, les écarts de prix avec la métropole sont considérables. Selon les données publiées par l'Insee en 2015 2 ( * ) , ces écarts variaient de 12% aux Antilles (12,5 % en Guadeloupe et 12,3 % en Martinique), de 11,6 % en Guyane et de 7,1 % à La Réunion et à Mayotte (6,9 % hors loyers).

Ces écarts prennent en compte les différences de mode de vie des ménages selon les territoires (écart de Fischer). En effet, si tous les ménages consommaient le panier de biens et services moyen d'un ménage métropolitain, les écarts de prix seraient encore plus marqués (colonne A du tableau ci-dessous). En revanche, un ménage d'outre-mer ferait une économie plus limitée en payant son panier habituel aux prix métropolitains (colonne B).

Les écarts de prix s'expliquent essentiellement par la cherté des produits alimentaires en outre-mer : à ces prix, un ménage métropolitain paierait son alimentation de 37 % à 48 % plus cher ; un ménage d'outre-mer, lui, la paierait de 17 % à 23 % moins cher en métropole.

Écarts de prix entre les DOM et la métropole - 2015

(en %)

Écarts DOM/métropole (panier de consommation métropolitain) A

Écarts métropole/DOM (panier de consommation local) B

Écarts de Fisher DOM/métropole C

Martinique

17,1

-7,1

12,3

Guadeloupe

17

-7,5

12,5

Guyane

16,2

-6,8

11,6

La Réunion

10,6

-3,6

7,1

Source : Insee, enquête de comparaison spatiale de prix 2015

II. UNE SITUATION SOCIALE ET INSTITUTIONNELLE TENDUE

A. L'APPEL DE FORT-DE-FRANCE ENTENDU...

1. Un contexte de tension sociale face aux écarts de développement et à une pauvreté qui peine à se résorber

Face à la permanence voire l'aggravation des fragilités économiques, les tensions sociales se multiplient dans les territoires d'outre-mer depuis 2006 avec de nombreuses manifestations et mouvements de grève mais également une défiance accrue vis-à-vis du Gouvernement.

En attestent, récemment, le refus massif des populations ultra-marines de la vaccination contre le Covid-19 ou encore les résultats lors de élections présidentielles d'avril 2022 (plus de 50 % d'abstention et près de 60 %, en moyenne, des voix exprimées en faveur du rassemblement national au second tour (contre environ 24 % en 2017).

2. Une demande de changements structurels des élus locaux

Dans ce contexte de tensions qui perdurent, les présidents des régions de Guadeloupe, Réunion, Mayotte, Martinique, Saint-Martin et Guyane ont lancé, en mai 2022, un appel à l'État pour un changement des politiques d'aide au développement dans les territoires d'outre-mer . Ils y dénoncent "une situation de mal-développement structurel" et des inégalités "de plus en plus criantes" dont souffrent les populations.

Cette déclaration de Fort-de-France est un appel à une concertation avec les populations et les acteurs locaux pour agir autour de trois axes :

- refonder la relation entre les territoires d'outre-mer et la République par la définition d'un nouveau cadre permettant la mise en oeuvre de politiques publiques conformes aux réalités de chacune des régions ;

- conjuguer la pleine égalité des droits avec la reconnaissance des spécificités, notamment par une réelle domiciliation des leviers de décision au plus près des territoires ;

- instaurer une nouvelle politique économique fondée sur les atouts des territoires d'outre-mer notamment géostratégiques et écologiques.

Les signataires de l'appel de Fort-de-France ont été reçus le 7 septembre 2022 par Emmanuel Macron et par Gérald Darmanin, ministre de l'Intérieur et des outre-mer afin d'évoquer la situation en matière de vie chère, d'accès aux soins, à l'éducation, à l'emploi ou au logement.

B. ... MAIS À CE STADE PEU SUIVI D'EFFETS IMMÉDIATS

1. Des mesures à destination de l'outre-mer très limitées dans la loi de finances rectificative d'août 2022

Les territoires d'outre-mer ne forment pas un ensemble homogène. Leurs caractéristiques démographiques et économiques diffèrent largement d'un territoire à l'autre et les besoins en termes d'investissements ou de politiques publiques sont également très variables. Il en résulte que les réponses apportées par le Gouvernement ne peuvent être indifférenciées, de même que le dialogue entre l'administration centrale et les acteurs locaux doit se construire de manière bilatérale. Cette différenciation est l'objectif principal de l'appel de Fort-de-France.

Pourtant, la loi n°2022-1158 du 16 aout 2022 portant mesures d'urgence pour la protection du pouvoir d'achat et la loi n°2022-1157 du 16 aout 2022 de finances rectificative pour 2022 prévoient plusieurs dispositifs de soutien au pouvoir d'achat des ménages ainsi que des mécanismes d'aides aux collectivités territoriales qui s'appliqueront de manière uniforme sur l'ensemble du territoire national en ne tenant compte que très à la marge des spécificités des territoires d'outre-mer.

Ainsi, un bouclier pour plafonner la hausse des loyers à 3,5 % maximum a été mis en place pendant un an, jusqu'au 30 juin 2023. Les députés ont abaissé ce plafond à 2,5 % pour les loyers outre-mer.

De surcroit, des crédits ont été ouverts à hauteur de 19 millions d'euros pour l'aide alimentaire en outre-mer dont 4 millions d'euros pour les territoires du pacifique.

Hormis ces deux mesures, aucun dispositif spécifique aux territoires d'outre-mer n'a été adopté.

2. Quelles perspectives pour l'avenir : une nouvelle relation à définir entre l'État et les collectivités d'outre-mer

Un agenda doit être mis en place pour travailler sur l'ensemble des problématiques des territoires d'outre-mer et refondre le système actuel.

La Première ministre a annoncé la tenue d'un comité interministériel consacré à l'outre-mer (CIOM) dans un délai de 6 mois afin d'acter une première série de décisions . La possibilité d'un Oudinot du pouvoir d'achat a également été évoquée.

Le Président de la République s'est également déclaré ouvert sur la question des évolutions institutionnelles et statutaires. La question institutionnelle outre-mer fera d'ailleurs l'objet d'un des volets du comité qui se réunira d'ici la fin de l'année 2022.

DEUXIÈME PARTIE
LES CRÉDITS DE LA MISSION OUTRE-MER

Les crédits présentés dans le projet de loi de finances pour 2023 s'élèvent à 2 701 millions d'euros en AE et 2 524,9 millions d'euros en CP soit une hausse de 1,7 % en AE et une hausse de 1,3 % en CP par rapport à la LFI 2022.

Cependant, cette hausse en valeur signifie une contraction des crédits de la mission en volume (référence euros 2022) qui s'établissent alors à 2 589,7 millions d'euros en AE et à 2 420,8 millions d'euros en CP soit une baisse de plus de 100 millions d'euros en AE et CP.

En réintégrant le bandeau « maladie » transféré vers la sécurité sociale, les crédits, corrigés de l'inflation enregistrent toutefois une hausse de 187,6 millions d'euros en AE et de 181,6 millions d'euros en CP. Cette hausse résulte du seul effet mécanique de l'action 1 du programme 138 relatif aux exonérations des charges sociales des entreprises qui sont des dépenses de guichet.

Évolution LFI 2022 / PLF 2023 des crédits de la mission « Outre-mer »

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir du PLF 2023

Cette évolution à la hausse des AE et CP s'explique principalement par le renforcement ou la création des dispositifs suivants :

Sur le programme 138 « Emploi outre-mer » , la seule mesure nouvelle concerne le service militaire adapté (SMA) avec une augmentation de 30 millions d'euros des moyens alloués destinés à la mise en oeuvre du SMA 2025+ qui, après une expérimentation en 2022 à Mayotte, doit être étendu aux autres territoires en 2023. Cette hausse doit également permettre la poursuite de projets initiés en 2022 et notamment la création de nouvelles compagnies à Mayotte et en Polynésie. Pour les seules dépenses hors titre 2 (dépenses de personnel) cette mesure nouvelle est estimée à 4,9 millions d'euros en AE et 2,4 millions d'euros en CP.

Par ailleurs, le programme 138 enregistre une mesure de périmètre de 265 millions d'euros correspondant au bandeau maladie (réduction de 6 points sur les cotisations employeurs au titre de l'assurance maladie pour les rémunérations inférieures à 2,5 SMIC).

Sur le programme 123 « Conditions de vie outre-mer » plusieurs évolutions interviendront en 2023 :

- une hausse de 10 millions d'euros en AE et 4 millions d'euros en CP pour le renforcement de l'assistance technique auprès des collectivités ;

- un effort spécifique en faveur de l'alimentation en eau potable en Guadeloupe sera mis en oeuvre pour un montant de 10 millions d'euros en AE et CP. L'aide sera apportée au syndicat gestionnaire au vu de ses engagements d'amélioration de gestion ;

- des dispositifs de garantie pour les petites et moyennes entreprises (PME) et de subventions pour la lutte contre le changement climatique dans le Pacifique seront développés par la SOGEFOM (société de gestion des fonds de garantie d'outre-mer) pour un montant de 7 millions d'euros en AE et 1 million d'euros en CP ;

- 3 millions d'euros en AE et CP seront ouverts pour participer à la diversification agricole ;

- un soutien de 5,1 millions d'euros en AE et CP sera attribué pour la réforme de la fonction publique territoriale à Wallis-et-Futuna, compte tenu des surcoûts liés aux négociations menées en fin d'année 2021.

Le montant total arbitré de ces mesures nouvelles, pour le programme 123, est de 35,1 millions d'euros en AE et 23,1 millions d'euros en CP soit un niveau inférieur aux mesures nouvelles actées en LFI 2022 (39,3 millions d'euros en AE et 34,9 millions d'euros en CP ). Comme l'année précédente, ces crédits supplémentaires ne devraient pas être gagés par des mesures d'économie. Pour autant, le SMA devrait bénéficier de rattachements de fonds de concours en provenance de l'Union européenne (FSE) correspondant à 35 % de la mesure nouvelle du SMA.

Par ailleurs, le programme 123 enregistre deux mesures de périmètre pour un montant total de 3,7 millions d'euros par transferts sortants vers le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » et décomposés comme suit :

- le transfert de l'enveloppe de lutte contre les sargasses pour 3,5 millions d'euros ;

- le transfert de 222 000 euros pour financer la réforme de la fonction publique territoriale au profit des agents du service d'incendie et de secours de Wallis-et-Futuna.

Répartition des mesures nouvelles du programme 123
en PLF 2023

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire budgétaire

I. L'ÉVOLUTION DU PROGRAMME 123 « CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER »

Le programme 123 « Conditions de vie outre-mer » se compose de huit actions et rassemble les crédits des politiques publiques en faveur de l'amélioration des conditions de vie dans les outre-mer. À ce titre, il porte le financement des priorités suivantes : le logement social, l'aménagement du territoire (contrats de convergence et de transformation), les aides à la continuité territoriale, les dotations spéciales destinées à financer des projets structurants et/ou de reconversion) et le fonds exceptionnel d'investissement.

Entre la LFI 2022 et le PLF 2023, il enregistre une hausse de 7,19 % en AE, soit 60,9 millions d'euros et de 6,25 % en CP soit 43,4 millions d'euros. En AE comme en CP, toutes les actions de ce programme sont stables ou à la hausse à l'exception des CP de la ligne budgétaire unique (LBU) qui enregistrent une baisse de 10,6 % .

Évolution des crédits du programme 123

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir du PLF 2022

A. LA LIGNE BUDGÉTAIRE UNIQUE (ACTION 1) : UNE HAUSSE À SALUER QUI NE DOIT PAS MASQUER LA BAISSE CONTINUE DEPUIS 10 ANS

La LBU finance :

- le développement du locatif social (PLS 3 ( * ) et LLS 4 ( * ) ) et du locatif très social (LLTS 5 ( * ) ) et la réhabilitation de ces logements (SALLS 6 ( * ) ) ;

- l'accession sociale - via le Logement Évolutif Social (LES), mais également le PTZ 7 ( * ) et le PSLA 8 ( * ) - ainsi que l'amélioration de l'habitat des propriétaires- occupants via l'Aide à l'amélioration de l'habitat (AAH) ;

- la résorption de l'habitat insalubre (RHI) et spontané (RHS) ainsi que l'aménagement et la viabilisation des terrains en vue d'assurer la constitution de réserves foncières grâce au FRAFU 9 ( * ) .

1. Des contraintes géographiques et démographiques importantes qui génèrent des tensions sur le marché du logement en outre-mer
a) Des logements sociaux en nombre très insuffisant

Hormis la Guyane, les DROM sont des îles et archipels dans lesquels le foncier est rare et qui, pour des raisons de topographie, se prêtent parfois difficilement à la construction de logements. Par ailleurs, la situation géographique de ces territoires les expose également à des risques naturels importants générant ainsi une limitation, de fait, des terrains constructibles et renchérissant le coût de la construction.

De surcroit, la croissance démographique importante de certains DROM (notamment Mayotte et la Guyane), de même qu'un niveau de vie inférieur à la métropole créent un besoin de logements sociaux considérable.

Croissance démographique comparée en 2019 entre la métropole
et les territoires d'outre-mer

(en %)

Sources : Insee - recensement de la population

Revenu disponible brut des ménages en 2018 comparé en 2019 entre la métropole et les territoires d'outre-mer

(en euros)

Sources : Insee - Comptes économiques régionaux des ménages, Base 2014

À ce constat, s'ajoutent de nombreux logements insalubres qui pèsent sur l'offre globale de logements.

Il résulte de ce qui précède que 80 % des ménages des DROM sont éligibles au logement social alors que la part des ménages des DROM bénéficiant d'un logement social n'est que de 15 %.

Aussi, même si la part de logements sociaux dans les outre-mer atteint 22,3 % du parc de logements en 2021, pour une moyenne nationale de 17,1 %, les besoins ne sont pas satisfaits et la tension sur la demande de logements sociaux demeure très forte par rapport à l'offre disponible.

Part des logements sociaux

Source : commission des finances du Sénat à partir du rapport de la Cour des comptes « Le logement dans les DROM » (septembre 2020) + données INSEE + réponses au questionnaire budgétaire

Dans ce contexte, l'État a mis en place un plan logement outre-mer pour la période 2015-2019 (PLOM 1) avec un objectif de construction et de réhabilitation de 10 000 logements par an. Cet objectif n'a cependant pas été atteint en raison, notamment, d'une insuffisante prise en compte des spécificités de chaque territoire.

Un deuxième PLOM, signé le 2 décembre 2019, a été lancé pour les années 2019-2022. Il regroupe 77 mesures, autour de 4 axes :

- mieux connaître et mieux planifier pour mieux construire ;

- adapter l'offre aux besoins des territoires ;

- maîtriser les coûts de construction et de réhabilitation ;

- accompagner les collectivités territoriales en matière de foncier et d'aménagement.

Ce deuxième plan sera prolongé en 2023 afin de permettre à la fois d'achever sa mise en oeuvre, d'en faire le bilan et de lancer une réflexion associant les différents partenaires sur le contenu d'un futur nouveau plan.

La différence majeure entre le PLOM 1 et le PLOM 2 réside dans l'ambition affichée de prendre plus spécifiquement en compte les particularités de chaque DROM, partant du constat que le PLOM 1 était insuffisamment différencié par territoire. Ainsi, cette adaptation à chaque territoire devait passer par la déclinaison de plan territoriaux, négociés par les préfets avec les acteurs locaux entre fin 2019 et juin 2020.

Le comité de pilotage de ce plan s'est réuni les 18 mars et 20 octobre 2021, et à nouveau le 19 mai 2022 . Lors du dernier comité de pilotage, un point d'avancement du PLOM a été présenté : 32 mesures du plan logement outre-mer sont achevées. Ces mesures concernent essentiellement des assouplissements de procédures, des signatures de conventions, des renforcements de l'encouragement à l'investissement locatif social...

Toutefois, à ce jour, aucun bilan chiffré sur le nombre de constructions dans le cadre du PLOM 2 n'a été réalisé (à l'exception d'une communication sur la construction et la réhabilitation de 8 000 logements en 2020) et des outils doivent être mis en place afin de suivre le déploiement territorial de ce plan 10 ( * ) .

À noter par ailleurs, que contrairement au PLOM 1, ce deuxième plan n'a pas fixé d'objectifs quantitatifs et la mesure 2.1.1 précise simplement que « les objectifs annuels assignés à chaque territoire seront désormais à la fois quantitatifs, par type de produits, et qualitatifs, selon une grille d'objectifs adaptée à chaque territoire ».

À l'inverse, la loi de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer (loi EROM) 11 ( * ) et portant autres dispositions en matière sociale et économique prévoit, dans son article 3, que « la République s'assigne pour objectif la construction de 150 000 logements dans les outre-mer au cours des dix années suivant la promulgation de la présente loi. Cet objectif est décliné territorialement, en tenant compte des besoins de réhabilitation ».

Cet objectif de 150 000 logements recouvre tous les logements, sociaux, intermédiaires ou autres bénéficiant d'un soutien de l'État par des aides à la pierre ou des aides fiscales. L'objectif de production de logements directement subventionnés par l'État s'établit, pour sa part, à environ 130 000 logements sur 10 ans ce qui permettrait de répondre au déficit de logements sociaux estimé à plus de 100 000 12 ( * ) sur l'ensemble des DROM. Cet objectif a été territorialisé.

Objectifs annuels territorialisés de production de logements bénéficiant
de subventions de l'État

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire budgétaire

Enfin, il convient de souligner que le PLOM 2 ne fait aucune mention des objectifs de la stratégie nationale du Logement d'abord (LDA) 13 ( * ) , alors que certains territoires ultra marins, en particulier Mayotte et la Guyane, comptent un grand nombre de personnes sans domicile . À contre-courant même de cette stratégie, le Plan prévoit la construction d'hébergements temporaires en Guyane et à Mayotte pour accueillir transitoirement les occupants des bidonvilles dont les modalités d'évacuation et de destruction ont été accélérées par l'article 197 14 ( * ) de la loi ELAN.

Il en résulte que la part des logements sociaux alloués aux personnes sans-abri est très faible dans l'ensemble des DROM et particulièrement en Martinique, Guadeloupe et à Mayotte.

Part des logements sociaux attribués à des personnes sans abri

Source : Baromètre Logement d'abord

b) Des logements indignes et insalubres très difficiles à comptabiliser

Les DROM présentent une proportion de logements indignes et insalubres nettement supérieure à la métropole. En effet, près de 19,4 % du parc de logements (soit environ 150 000 habitations sur les 774 641 résidences principales que compte le parc) sont concernés contre 1,2 % en France métropolitaine.

Cette situation s'explique en partie par la construction d'un habitat informel important notamment dans un contexte de pénurie de logements.

La nature même de ces logements informels (auto-constructions sans déclaration et titres de propriété) rend leur recensement très complexe et peu fiable avec une multitude de situations hétérogènes allant de l'habitat dégradé à indigne voire insalubre.

Une évaluation conduite par la direction générale des outre-mer au printemps 2022 sur la mise en oeuvre de la loi n° 2011-725 du 23 juin 2011 « portant dispositions particulières relatives aux quartiers d'habitat informel et à la lutte contre l'habitat indigne dans les départements et régions d'outre-mer » permet d'estimer à environ 150 000 le nombre de logements indignes en 2022 dans les cinq DROM dont une large part est informelle.

Les chiffres mentionnés dans le rapport annuel 2022 sur le mal-logement en France de la fondation Abbé Pierre s'élèvent, pour leur part, à plus de 210 000 logements relevant d'une de ces catégories 15 ( * ) .

Logements indignes, insalubres et informels dans les DROM

Source : Fondation Abbé Pierre, rapport annuel sur l'état du mal-logement en France - 2022

2. La programmation budgétaire de la LBU et le niveau de consommation des dernières années
a) Une programmation en baisse depuis 2011 qui repart à la hausse seulement depuis 2021

Entre la LFI 2022 et le PLF 2023, l'action 1 « Logement » enregistre une hausse de 1,8 % soit 4,2 millions d'euros en AE et une baisse de 10,6 % en CP soit 21,2 millions d'euros.

Toutefois, cette hausse ne doit pas masquer la tendance baissière constatée entre 2011 et 2021 tant en AE qu'en CP. Sur la période 2011-2023, les crédits de la LBU ont diminué de 13 % en AE et de 8 % en CP soit respectivement 35,6 millions d'euros et 15,5 millions d'euros.

Les hausses constatées, en AE, depuis 2021 n'ont pas permis de revenir au niveau du début des années 2010.

Évolution des crédits ouverts en LFI entre 2011 et 2023 (PLF)

(en euros)

Source : commission de finances du Sénat à partir des documents budgétaires (projets annuels de performance)

L'effort réalisé en PLF 2023 sur les AE, que les rapporteurs saluent, porte essentiellement, à hauteur de 6 millions d'euros en AE et 4 millions d'euros en CP, sur le fonds d'aménagement foncier urbain (FRAFU) qui a vocation à développer le nombre de logement sociaux dans des opérations d'aménagement et à faire bénéficier les quartiers d'habitat spontané et/ou insalubre d'équipements de viabilisation primaire.

Cependant, les crédits alloués à la construction de logements locatifs sociaux et très sociaux, en PLF 2023, affichent une baisse de 1,5 million d'euros en AE et 23 millions en CP par rapport à la LFI 2022.

Pour autant, le projet annuel de performance indique un objectif de 5 400 16 ( * ) logements construits (tous financements confondus c'est-à-dire LBU mais également dispositifs d'incitation fiscale) contre 5 200 en 2022. Les rapporteurs spéciaux s'interrogent donc sur la possibilité de construire plus de logements avec moins de crédits sur la base d'un coût moyen par logement demeuré inchangé à 22 200 euros.

Ainsi, les crédits alloués à cette action spécifique sont passés de 123,5 millions d'euros en AE et 114,4 millions d'euros en CP en LFI 2022 à 121,9 millions d'euros en AE et 91,3 millions d'euros en CP en PLF 2023.

De surcroit, il convient de souligner qu'avec un objectif de 5 400 constructions pour 2023 l'ambition de la loi de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer de 150 000 logements en 10 ans n'est pas atteinte au prorata d'une année.

Construction de logements sociaux (LLS) et très sociaux (LLTS) entre 2019 et 2021

Source : rapport annuels de performance 2021

En 2020, 4 240 logements sociaux et très sociaux ont été financés contre 3 674 logements en 2021.

En trois ans, 12 360 logements ont été financés soit moins que l'objectif annuel affiché. Aussi, et malgré les efforts reconnus par les rapporteurs, les constructions 2019 à 2021 (comprises entre 3 674 et 4 447 pour les LLS et LLTS) de même que l'objectif fixé pour 2023 à 5 400 n'atteignent pas les objectifs globaux et territorialisés tels que définis dans la loi EROM qui seraient de l'ordre de 13 000 par an (130 000 logements directement subventionnés par l'État sur 10 ans).

Par ailleurs, les crédits alloués à la résorption de l'habitat insalubre en Guadeloupe, Martinique, Réunion et Mayotte restent stables depuis 2021 et s'élèvent à 20 millions en AE et 15,1 millions en CP. Or, l'habitat insalubre concerne environ 150 000 logements sur un total de 774 000 logements soit près de 19 % du parc (cf. supra ).

Les moyens alloués à cette action, bien que stables, ne semblent pas à la hauteur des enjeux d'autant que les crédits alloués à l'amélioration de l'habitat privé n'augmentent que de 1 million d'euros.

Les rapporteurs spéciaux proposent donc un amendement II-16 visant à majorer de 4 millions d'euros en AE et CP les crédits destinés à la résorption de l'habitat insalubre.

b) Une sous-consommation récurrente en CP qui persiste et que ne devrait pas améliorer la baisse des crédits alloués à l'ingénierie et aux études

La sous-consommation constatée les précédentes années se tasse en 2020 mais augmente de nouveau en 2021.

En effet, les taux de consommation 17 ( * ) en 2019 étaient respectivement de 90 % pour les AE (consommation de 199,3 millions d'euros pour une LFI de 222 millions d'euros) et de 78 % pour les CP (consommation de 171,6 millions d'euros pour un LFI de 219,6 millions d'euros).

En 2020 , la consommation des AE enregistre une nouvelle hausse pour s'établir à 217,9 millions d'euros 18 ( * ) pour une LFI de 206,6 millions d'euros. Le taux de consommation des CP s'améliore également (98,6 % avec une consommation de 179,3 millions d'euros pour une LFI de 181,9 millions d'euros ). Cette amélioration du taux de consommation résulte cependant très largement d'une baisse des crédits ouverts en LFI en 2020 (- 37,6 millions d'euros par rapport à l'année précédente).

En 2021, les opérations nouvelles sur AE s'élèvent à 247,41 millions d'euros 19 ( * ) soit un montant supérieur aux crédits ouverts en LFI (224,6 millions d'euros). Cependant, en CP le taux de consommation s'établit à 83 % malgré la baisse des CP ouverts en LFI générant ainsi un niveau historiquement bas de consommation de CP (146,7 millions d'euros).

Taux de consommation des crédits de la LBU entre 2011 et 2021 en AE et CP

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (rapports annuels de performance)

Si les facteurs de cette sous-consommation sont multiples et doivent être analysés afin d'y apporter des solutions, cette sous-consommation récurrente ne doit pas servir de prétexte pour diminuer encore les crédits de paiement de la LBU.

De surcroit, le manque d'ingénierie est une des causes ciblées de cette sous-consommation. Or, les crédits alloués, au sein de la LBU, aux études et autres interventions en ingénierie diminuent de 3,3 millions d'euros en AE et 2,7 millions d'euros en CP entre 2022 et 2023. Dans ce contexte, les rapporteurs spéciaux ne peuvent que regretter un tel choix et craignent que cette contraction des crédits ne génère une nouvelle baisse des taux d'exécution de la LBU.

B. LES CRÉDITS DE SOUTIEN AUX COLLECTIVITÉS (ACTIONS 2 ET 6) : UN ENGAGEMENT DE L'ÉTAT RENFORCÉ

1. Les crédits destinés aux contrats de convergence et de transformation : un rythme d'exécution des contrats qui pourrait permettre d'atteindre 100 % d'engagement des AE à fin 2023

Prévus par la loi du 28 février 2017 relative à l'égalité réelle Outre-mer qui avait pour but de réduire les écarts de développement persistants avec la métropole, les contrats de convergence et de transformation (CCT) succèdent aux contrats de plan État-Région (CPER). Ils ont pour objectif d'investir en faveur du développement des territoires tout en prenant en compte les spécificités et les besoins de l'outre-mer et s'inscrivent, par ailleurs, dans la « Trajectoire 5.0 » déclinée pour les territoires ultramarins, à savoir zéro carbone, zéro déchet, zéro vulnérabilité au dérèglement climatique, zéro intrant polluant, zéro exclusion.

Ces contrats ont été signés le 8 juillet 2019 pour les collectivités territoriales de Guyane et de Martinique, les régions Guadeloupe et La Réunion, le département de Mayotte et les collectivités de Saint-Pierre-et-Miquelon et Wallis-et-Futuna, le 22 juin 2020 pour Saint-Martin 20 ( * ) . Le contrat de développement et de transformation 2021-2023 a été signé le 14 avril 2021 pour la Polynésie. La Nouvelle-Calédonie utilise un contrat de développement (CDEV) jusqu'en 2022.

Pour l'année 2023, des avenants de reconduction seront conclus afin d'assurer la continuité de la politique contractuelle dans l'attente de nouvelles négociations.

Ainsi, les crédits de l'action 2 visent à contribuer au développement économique, social ainsi qu'à la transition écologique et énergétique des territoires ultramarins en cofinançant les projets d'investissements structurants portés par les collectivités territoriales d'outre-mer via notamment les contrats susmentionnés.

En PLF 2023, les crédits alloués à cette action s'élèvent à 211,6 millions d'euros en AE et 158,1 millions d'euros en CP soit une hausse de respectivement 1 % et 0,9 % par rapport à la LFI 2022 (+ 2,1 millions d'euros et + 1,4 million d'euros).

Au titre de la contractualisation, 175,3 millions d'euros en AE et 122,1 millions d'euros en CP ont été ouverts (soit 13 millions d'euros de moins en AE et 10 millions d'euros de moins en CP qu'en 2022). Ces crédits contractualisés concernent essentiellement les CCT, le contrat de développement et de transformation pour la Polynésie et le contrat de développement de la Nouvelle-Calédonie mais également, à la marge, des reliquats de CP pour les contrats de plan État-Régions.

Au titre des seuls CCT, le montant contractualisé avec l'État sur le programme 123 s'élève à 387,33 millions d'euros pour la période 2019-2022. À l'issue de l'avant dernière année des contrats (2022 initialement), l'exécution de ces contrats en 2019 et 2021 est en deçà des montants attendus. Cependant, le prolongement d'un an des contrats devrait permettre, si le rythme d'engagement se maintient, d'engager tous les AE à fin 2023.

Exécution des contrats en cumulé 2019-2021

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (rapport annuel de performance 2021)

Ainsi, le taux moyen d'engagement est de 59 % après 3 ans et le taux moyen de couverture des engagements est de 35 %. Le taux de consommation des CP est encore bien inférieur puisqu'il se situe entre 6 et 59,6 % avec une moyenne, sur l'ensemble des territoires, de 14,3 %.

Le faible taux de consommation en 2020 s'expliquait en partie par l'impact de la crise sanitaire sur la vie économique des territoires d'outre-mer, et par voie de conséquence le ralentissement des chantiers et de la programmation des opérations.

L'année 2021 ayant également été touchée par la crise sanitaire, notamment dans les territoires d'outre-mer qui ont connu des périodes de confinement et/ou de couvre-feu plus longues qu'en métropole, les rapporteurs constatent une nouvelle sous-exécution en 2021. Ils avaient d'ailleurs alerté sur ce risque lors de leur précédent rapport relatif au PLF 2022.

Le prolongement d'une année de ces CCT devrait permettre l'engagement les AE restantes. Cependant, un risque demeure que l'entièreté des crédits des CCT ne soit pas engagée à la fin de l'année 2023. Les rapporteurs spéciaux seront attentifs à ce point.

En revanche, concernant spécifiquement le contrat de développement et de transformation de la Polynésie, signé en 2021 et couvrant la période 2021-2023, le taux de consommation des AE fin 2021, à l'issu de la première année, s'élève à 36 % et le taux de couverture des engagements à 19 %. Le taux de consommation des CP est de 7 %. En maintenant ce rythme d'engagement les AE pourraient être intégralement engagées d'ici la fin du contrat.

Exécution du CCT pour la Polynésie 2021-2023

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (rapport annuel de performance 2021)

Enfin, le contrat de développement de la Nouvelle-Calédonie, d'un montant total de 372,2 millions d'euros à partir du programme 123 a été porté à 795,9 millions d'euros à compter de 2020. Son exécution est la suivante :

Exécution du CDEV pour la Nouvelle-Calédonie en cumulé 2017-2022

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (rapport annuel de performance 2021)

Avec un taux d'engagement inférieur à 40 % avant la dernière année du contrat, la question de sa prorogation pour un an se pose sérieusement. Les rapporteurs invitent la DGOM à envisager cette solution qui permettrait, par ailleurs, de renégocier tous les nouveaux contrats ensemble avec une année de commencement fixée à 2024.

Dans tous les cas, les renégociations de nouveaux contrats devront veiller à prendre en compte, encore plus que par le passé, les spécificités et besoins mais également les contraintes et difficultés de chaque territoire, condition indispensable à l'utilité et à la réussite de ces contrats.

2. L'évolution des crédits destinés à l'action 6 caractérisée par un doublement du soutien exceptionnel à la Guyane et une mesure nouvelle pour la distribution d'eau en Guadeloupe

Cette action recouvre trois types de crédits :

- les dotations aux collectivités territoriales et financements adaptés à leurs spécificités afin de favoriser l'égal accès aux services publics locaux des populations ultramarines, notamment en termes d'éducation, en prenant en compte les particularités de ces collectivités et en répondant, par des crédits spécifiques, aux handicaps structurels des outre-mer. Il s'agit donc de maintenir la capacité financière des collectivités d'outre-mer par le versement de dotations ;

- les secours d'urgence et de solidarité nationale liés aux calamités ;

- les actions de défense et de sécurité civile.

En PLF 2023, les crédits de l'action 6 s'élèvent à 238,5 millions d'euros en AE et 242,7 millions d'euros en CP soit respectivement une hausse de 16,4 % des AE (soit 33,5 millions d'euros d'AE) et une hausse de 21,6 % des CP (soit 43,2 millions d'euros) par rapport à la LFI 2022.

Cette hausse notable des crédits s'explique par l'effort de l'État dans les domaines suivants :

- le doublement du soutien exceptionnel de l'État à la collectivité territoriale de Guyane en vue de rétablir sa capacité d'autofinancement en contrepartie d'engagements relatifs à la maitrise des dépenses de fonctionnement, de fiabilité des comptes ou de respect des délais de paiement. Le montant inscrit en LFI 2022, de 20 millions d'euros, pouvait être, au besoin réajusté en fonction de la trajectoire financière. Ainsi, en 2023, le PLF prévoit un soutien de 40 millions d'euros ;

- une hausse des CP de près de 18 millions d'euros pour la construction d'établissements scolaires, de collèges et lycées en Guyane, à Mayotte et à Wallis et Futuna ;

- l'ouverture de 10 millions d'euros en AE et CP afin d'améliorer la distribution et la desserte en eau potable dans les territoires d'outre-mer. Cette enveloppe est spécifiquement destinée à accompagner les efforts du syndicat mixte de gestion de l'eau et de l'assainissement en Guadeloupe sous réserve du respect d'engagements de performance à contractualiser.

Par ailleurs, les rapporteurs spéciaux saluent le maintien de 10 millions d'euros de CP pour le dispositif « contrats de redressement outre-mer » (COROM), introduit par amendement à la loi de finances pour 2021, qui vise à soutenir les communes souhaitant assainir leur situation financière et réduire les délais de paiement de leurs fournisseurs locaux.

Cette action apparait plus que jamais nécessaire dans un contexte de crise économique et les soutiens supplémentaires apportés dans le PLF 2023 sont salués par les rapporteurs.

En effet, même si les situations sont très variables d'un territoire à l'autre, sur l'ensemble des DROM 21 ( * ) , l'encours de dette a augmenté de 36,6 % entre 2016 et 2021 passant de 2 376,2 à 3 246,5 millions d'euros. Sur la période 2016-2022, les charges et les produits de fonctionnement ont diminué dans les mêmes proportions alors que les ressources d'investissement ont baissé de 31,47 % pour des charges d'investissement stables.

Cependant, pour certaines collectivités la situation est bien plus détériorée encore. En effet, le conseil régional de Guadeloupe a vu ses produits de fonctionnement augmenter de 4,7 % mais ses charges de 30,6 %. Les ressources d'investissement ont également augmenté à un rythme bien inférieur aux charges (77 % contre 127 %) générant une augmentation de l'encours de dette de plus de 51 %.

Evolution des charges et produits et de l'encours de dette des départements et régions d'outre-mer entre 2016 et 2022

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire budgétaire

Cette situation a pour conséquence l'allongement des délais de paiement. Il ressort des derniers rapports IEDOM sur les délais de paiement dans les DROM 22 ( * ) que le délai du secteur public local et hospitalier s'est globalement détérioré sur les dix dernières années , passant d'un peu moins de 40 jours en 2012 à près de 65 jours en 2021, soit un niveau largement supérieur au plafond réglementaire (30 jours pour les collectivités locales et 50 jours pour les établissements publics de santé). Au cours de la même période, le délai de paiement du secteur public local et hospitalier de l'Hexagone était stable à moins de 30 jours.

La dégradation des finances publiques locales conduit, subséquemment, à des comportements de paiement accumulant des retards aux conséquences lourdes pour la trésorerie et la pérennité des entreprises ultramarines. À titre d'exemple, les délais clients 23 ( * ) enregistrés par le secteur de la construction dans les DROM s'établissent à 107 jours en 2020, notamment en raison de la dépendance au secteur public. Une situation similaire est observée en Polynésie française : en dépit de délais de paiement structurellement plus courts que dans les DROM, les délais clients de la construction sont proches des 90 jours (soit le double de la moyenne du territoire tous secteurs confondus), en raison des retards de leurs partenaires commerciaux, et notamment des donneurs d'ordre publics 24 ( * ) .

Dans ce contexte économique et de dégradation continue de la situation financière des collectivités d'outre-mer, les rapporteurs spéciaux estiment cependant que le dispositif COROM susmentionné pourrait utilement être renforcé pour s'étendre à un nombre plus important de collectivités.

Ils proposent donc un amendement II-17 visant à majorer de 20 millions d'euros en AE et CP les crédits destinés au dispositif COROM.

C. LA PRISE EN COMPTE, EN PLF 2023 POUR LA PREMIÈRE FOIS, DE LA CONVENTION GLOBALE DE SANTÉ POLYNÉSIENNE

1. Une convention globale de santé signée en 2021 en remplacement de la contribution financière au régime de solidarité

Suite à l'achèvement, en 2020, de la contribution financière au Régime de solidarité de la Polynésie française (RSPF) 25 ( * ) une « convention globale de santé 2021-2023 » a été signée le 14 octobre 2021 entre l'État et le Pays.

Ainsi, après avoir contribué à l'équilibre du régime de solidarité (RSPF), de 1993 à 2007 puis de 2015 à 2020, et permis ainsi aux populations fragiles de bénéficier d'une protection sociale, l'État, à la demande du Pays, oriente, avec cette nouvelle convention globale de santé, son soutien vers l'amélioration de la prise en charge des patients, en favorisant l'accès et la qualité de l'offre de soins aux populations des îles éloignées.

La santé des populations des îles éloignées est particulièrement prise en compte puisque des crédits sont prévus pour l'acquisition de nouveaux équipements des centres de soins et le développement de la télémédecine.

Cette convention 2021-2023 prévoit de :

- renforcer les ressources humaines du centre hospitalier de Polynésie française (CHPF) et de la direction de la santé en poursuivant la mise à disposition annuelle d'une cinquantaine d'internes en médecine, auxquels s'ajoutent une douzaine d'assistants spécialistes, sélectionnés en fonction des besoins du CHPF ;

- soutenir la filière oncologie, dans la continuité de la convention 2017-2019 relative au financement par l'État de la prise en charge des patients atteints de cancer ;

- mettre en place une formation à la gestion des urgences pour les soignants exerçant dans les structures médicales des îles éloignées ;

- permettre aux étudiants polynésiens en médecine de revenir en Polynésie pour y effectuer un service sanitaire dans un établissement scolaire ou un stage d'été dans un établissement de santé.

En contrepartie du soutien financier de l'État à la politique de santé, le Pays s'engage à réduire d'ici le 1 er janvier 2024 de 50% les tarifs des soins facturés par le CHPF aux non-ressortissants de la caisse de prévoyance sociale (CPS) afin de tendre progressivement vers un alignement des tarifs pratiqués aux assurés de la CPS.

2. Une inscription des crédits en PLF

Dans le cadre de cette nouvelle convention, le ministère des outre-mer s'est engagé à verser annuellement sur la durée de la convention 4 millions d'euros en AE et CP à la collectivité de Polynésie Française au-delà des 4 millions d'euros prévus dans le contrat de développement et de transformation de ce territoire.

En 2021, année de la signature de la convention, les 4 millions ont été versés générant ainsi une sur-exécution par rapport aux crédits ouverts en LFI sur l'action 4 du programme 123.

Pour autant, en LFI 2022, les crédits destinés à la convention de santé n'ont pas été ouverts laissant présager une nouvelle sur-exécution de cette action en 2022.

Le PLF 2023 prévoit pour la première fois l'inscription de 4 millions d'euros en AE et CP à ce titre ce qui explique la hausse de 70,8 % de cette action qui passe de 5,6 millions d'euros à 9,6 millions d'euros.

D. UN APPUI AUX FINANCEMENTS BANCAIRES ET À L'INGÉNIERIE RENFORCÉ MAIS QUI INTERROGE SUR L'AVENIR

L'action 9 du programme 123 vise à favoriser les investissements des acteurs publics en réduisant le coût des ressources empruntées et à assurer l'accompagnement des collectivités ultramarines dans la mise en oeuvre de leurs projets d'investissements. Cette action est mise en oeuvre par l'intermédiaire de l'Agence française de développement (AFD).

Cet appui se traduit par une bonification d'intérêt aux prêts accordés par l'AFD aux collectivités territoriales et aux personnes publiques mais aussi par la mise en oeuvre d'actions d'assistance à maîtrise d'ouvrage (AMO) dont l'exécution est confiée à l'AFD, via les dispositifs du Fonds outre-mer (FOM) et de l'initiative Kiwa.

1. Des crédits pour financer des taux bonifiés abondés de 8 millions d'euros en CP

Dans le cadre d'une stratégie de soutien au financement des personnes publiques et en lien avec le programme du Fonds exceptionnel d'investissement (FEI) ainsi qu'au travers de la politique contractuelle de l'État, le programme 123 porte les crédits destinés à la bonification des prêts octroyés aux personnes publiques pour leurs opérations d'investissement par l'Agence française de développement (AFD).

Au moyen des prêts qu'elle octroie au profit du secteur public, mais aussi par son rôle d'appui technique et d'accompagnement, l'AFD favorise le financement des projets d'investissement et la réalisation d'infrastructures et d'équipements publics, notamment dans les domaines de l'adduction d'eau potable, de l'assainissement, de la gestion des déchets mais aussi de la cohésion sociale et de l'aménagement urbain.

Afin de porter un soutien croissant à ce projet, les crédits alloués à ces taux bonifiés sont majorés, en PLF 2023, de 8 millions d'euros en CP.

2. Un soutien accru à l'ingénierie

Le Fonds 5.0 a été doté, en 2019, de manière exceptionnelle, de 17,5 millions d'euros en AE et CP, transférés à l'AFD. Le contexte du plan de relance a renforcé la nécessité d'un appui à l'ingénierie au profit des collectivités territoriales, afin de leur permettre d'engager rapidement les nombreux projets qu'elles doivent réaliser. Ainsi, le Fonds 5.0 a été reconduit sous l'appellation « Fonds outre-mer » (FOM) et doté de crédits issus du plan de relance, à hauteur de 30 millions en AE pour 2021 et 2022.

Pour poursuivre ce soutien à l'ingénierie, via l'AFD, le PLF 2023 prévoit un financement de ce dispositif à hauteur de 10 millions d'euros en AE et 4 millions d'euros en CP.

3. Un soutien au financement des sociétés privées

La SOGEFOM, détenue à 58,7 % par l'AFD, a pour but d'apporter une garantie partielle à des opérations de financement engagées par les établissements de crédit en faveur des TPE et PME intervenant dans les collectivités d'outre-Mer du Pacifique.

Cependant, au 31 décembre 2021, le niveau du potentiel d'engagement de la SOGEFOM ne permettait plus de poursuivre l'activité de garantie sur la totalité de l'année 2022. Aussi, le besoin 2022 a été comblé par la réallocation de 4 millions d'euros, depuis les disponibilités de la Caisse d'investissement des outre-mer (CIOM).

En PLF 2023, 3 millions d'euros en AE, avec une clé d'écoulement des CP de 1 million d'euros par an sur les trois prochaines années sont prévus pour financer l'activité de cet établissement de crédit.

4. Un rallongement de crédits pour l'initiative Kiwa pour compléter la contribution initiale intégralement consommée

L'initiative Kiwa, dotée de près de 41 millions d'euros, a été lancée par l'AFD en mars 2020. Elle vise à faciliter l'accès aux financements de porteurs de projets (incluant les collectivités locales) en lien avec le développement de solutions fondées sur la nature (SFN), à travers des subventions ou de l'assistance technique, avec pour objectif de lutter contre les effets du changement climatique.

Cependant, au début de l'été 2022, l'intégralité des AE issues de la contribution initiale du ministère chargé des outre-mer avait été consommée, excluant de fait la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie des prochains appels à projets. Ainsi, le projet de loi de finances pour 2023 prévoit un abondement complémentaire au bénéfice de l'Initiative Kiwa à hauteur de 4 millions d'euros en AE.

Si les rapporteurs spéciaux saluent les efforts faits sur les crédits alloués à l'accès aux financements bancaires, ils constatent que les crédits ouverts correspondent à des nécessités résultant de dispositifs saturés (SOGEFOM) ou déjà intégralement consommés (Kiwa). Cependant, au regard des besoins dans ce domaine, notamment dans un contexte de crise économique, de remontée des taux d'intérêt et de détérioration en cours ou à prévoir de la santé financière des collectivités comme des entreprises du secteur privé, ils émettent des doutes sérieux sur le caractère suffisant de ces mesures et craignent un durcissement des conditions d'accès aux prêts pour les acteurs outre-mer que ces abondements ne seraient pas en mesure de compenser.

E. UNE STABILITÉ DES AUTRES ACTIONS DU PROGRAMME EN L'ABSENCE DE MESURES NOUVELLES OU D'ÉCONOMIES ET D'ÉVOLUTION LÉGISLATIVE ET RÉGLEMENTAIRE

Les crédits des actions 3, « continuité territoriale », 7 « Insertion économique et coopération régionales » et 8 « Fonds exceptionnels d'investissement » restent stables entre la LFI 2022 et le PLF 2023 à respectivement 45 millions d'euros, 1 million d'euros et 110 millions d'euros en AE.

Concernant les crédits alloués à la continuité territoriale , après une baisse notable en 2021 dans un contexte de crise sanitaire et de suspension de nombreux vols, les crédits ouverts en PLF 2022 et 2023 ont été établis :

- en faisant l'hypothèse d'un retour à la normale, dès 2022, des liaisons aériennes entre les territoires d'outre-mer et la métropole. L'exécution 2022 permettra de vérifier cette hypothèse ;

- en tenant compte des mesures de simplification et plus favorables mises en oeuvre concernant la continuité territoriale des outre-mer par le décret n°2021-845 du 28 juin 2021 modifiant le code des transports en matière de continuité territoriale entre les collectivités d'outre-mer et le territoire hexagonal et par l'arrêté du 28 juin 2021 modifiant les arrêtés pris en application des articles L. 1803-3, R. 1803-18, R. 1803-19 et D. 1803-42 du code des transports.

Concernant le FEI et notamment la sous-consommation qui caractérise ces crédits, les rapporteurs spéciaux renvoient au rapport 26 ( * ) fait au nom de la commission des finances sur le fonds exceptionnel d'investissement et publié en juin 2022 et à leurs recommandations en vue d'améliorer l'utilisation du fonds et la consommation des crédits. Ils saluent cependant le maintien, en 2023, du niveau d'AE constaté les années précédentes à 110 millions d'euros.

Ouverture et consommation des crédits du fonds exceptionnel d'investissement (FEI) entre 2018 et 2023

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (projets et rapports annuels de performance)

II. L'ÉVOLUTION DU PROGRAMME 138 « EMPLOI OUTRE-MER »

Le programme 138 « Emploi outre-mer » se compose de quatre actions et rassemble les crédits des politiques publiques en faveur de la compétitivité des entreprises, de l'amélioration de l'employabilité des jeunes et de la qualification des actifs ultramarins. À ce titre, il porte notamment les crédits relatifs à la compensation des exonérations de cotisations patronales, au financement du service militaire adapté (SMA) et divers dispositifs de financement de l'économie.

Entre la LFI 2022 et le PLF 2023, il enregistre une baisse de 0,9 % en AE soit 15,6 millions d'euros et de 0,6 % en CP soit 11,2 millions d'euros.

Cette baisse résulte du solde entre la baisse de l'action 1 et la hausse de l'action 2.

Évolution des crédits du programme 138

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir du PLF 2023

A. LES CRÉDITS DESTINÉS À L'EXONÉRATION DES CHARGES SOCIALES (ACTION 1) : UNE SURCONSOMMATION POSSIBLE EN 2022 ET DE NOMBREUSES INCERTITUDES SUR LES NIVEAUX ATTENDUS EN 2023

1. Évolution et description du dispositif

Afin de diminuer le taux de chômage outre-mer (compris entre 9,5 % et 30 % en 2021 contre 7,4 % en métropole) d'une part, d'améliorer la compétitivité des entreprises ultramarines et de favoriser la création d'emplois, d'autre part, un dispositif d'allègement et d'exonération de cotisations de sécurité sociale a été mis en place par la loi du 25 juillet 1994 tendant à favoriser l'emploi, l'insertion et les activités économiques dans les départements d'outre-mer et à Saint-Pierre-et-Miquelon , et la loi du 13 décembre 2000 d'orientation pour l'outre-mer .

Ce dispositif d'exonérations de cotisations de sécurité sociale spécifiques aux outre-mer, dit « LODEOM », résulte des dispositions de l'article L. 752-3-2 du code de la sécurité sociale en ce qui concerne les entreprises implantées outre-mer et des articles L. 756-4 et L. 756-5 de ce même code pour les travailleurs indépendants ultramarins .

Il a fait l'objet de plusieurs modifications depuis sa création. En effet, la loi de finances pour 2014 et la loi de financement de la sécurité sociale (LFSS) pour 2016 ont ainsi abaissé les niveaux de salaires concernés par les exonérations de charges patronales afin de recentrer l'application de celles-ci sur les bas et moyens salaires, compte tenu de l'importance plus grande que joue, à ce niveau, le facteur du coût du travail sur l'emploi.

Par ailleurs, la loi de financement de la sécurité sociale pour 2017 a poursuivi ces recentrages, cette fois, sur le dispositif d'exonérations applicables aux cotisations dont les travailleurs indépendants sont redevables.

Enfin, le dispositif d'allègements et d'exonérations de charges patronales de sécurité sociale spécifiques aux outre-mer a été modifié par la loi de financement pour la sécurité sociale de 2019 afin de compenser la suppression du CICE (crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi) au 1 er janvier 2019 en renforçant les exonérations de charges patronales.

Cette réforme avait entrainé, en 2019, une augmentation de plus de 42 % des crédits affectés à la compensation de ces exonérations de charges.

Le nouveau régime des exonérations de cotisations patronales en outre-mer

Les niveaux d'exonération de cotisations patronales se déclinent dorénavant comme suit :

Barème dit de « compétitivité » : une exonération totale jusqu'à un seuil de 1,3 SMIC suivie d'une dégressivité de cette exonération avec un point de sortie désormais fixé à 2,2 SMIC pour toutes les entreprises de moins de 11 salariés et pour les employeurs occupant plus de onze salariés et relevant des secteurs du bâtiment et des travaux publics, de la presse, de la production audiovisuelle, du transport aérien, maritime et fluvial pour les personnels assurant la desserte des départements d'outre-mer, de Saint-Martin et Saint-Barthélemy.

Barème dit de « compétitivité renforcée » : une exonération totale jusqu'à un seuil de 1,7 SMIC suivie d'une dégressivité avec un point de sortie fixé à 2,7 SMIC pour les employeurs occupant moins de 250 salariés, ayant réalisé un chiffre d'affaires annuel inférieur à 50 millions d'euros et qui :

- soit relèvent des secteurs de l'industrie, de l'environnement, de l'agronutrition, des énergies renouvelables, des nouvelles technologies de l'information et de la communication, des centres d'appel, de la pêche et des cultures marines, de l'aquaculture, de l'agriculture, du tourisme y compris les activités de loisirs s'y rapportant, du nautisme, de l'hôtellerie, de la recherche et du développement ;

- soit sont situés en Guyane et exercent une activité principale relevant de l'un des secteurs d'activité éligibles à la réduction d'impôt prévue à l'article 199 undecies B du code général des impôts, ou correspondant à l'une des activités suivantes : comptabilité, conseil aux entreprises, ingénierie ou études techniques.

Barème dit « innovation et croissance » : une exonération totale jusqu'au seuil de 1,7 SMIC, le maintien de l'exonération calculée pour un salaire de 1,7 SMIC jusqu'au seuil de 2,5 SMIC, seuil à partir duquel elle décroît avec un point de sortie fixé à 3,5 SMIC pour la catégorie des employeurs occupant moins de 250 salariés et ayant réalisé un chiffre d'affaires annuel inférieur à 50 millions d'euros, au titre de la rémunération des salariés concourant essentiellement à la réalisation de projets innovants dans le domaine des technologies de l'information et de la communication.

2. Une baisse apparente en raison d'une mesure de périmètre mais une hausse réelle de plus de 200 millions d'euros

En PLF 2023, les crédits de l'action 1 s'élèvent à 1 416,2 millions d'euros soit une baisse de 4,19 % représentant 61,9 millions d'euros par rapport à la LFI 2022.

Cette baisse apparente résulte de la mise en oeuvre d'une mesure de périmètre visant à rationaliser les modalités de compensation des exonérations, afin de simplifier les relations financières entre l'État et la sécurité sociale. Ainsi, le « bandeau maladie » (abattement de 6 points de la cotisation des employeurs au titre de l'assurance-maladie pour les salaires de moins de 2,5 SMIC) est transféré vers la sécurité sociale pour un montant de 264,53 millions d'euros sans modification du dispositif sur le fond. Retraitement fait de cette mesure de périmètre, c'est-à-dire à périmètre constant, les crédits prévus par le projet de loi de finances pour 2023 au titre de la compensation des exonérations de cotisations sociales sont en hausse de plus de 202,7 millions d'euros.

Les dépenses de cette action étant des dépenses de guichet, il convient de rappeler que le niveau des crédits ouverts en 2023 pourrait être ajusté et que la hausse réelle (hors mesure de périmètre) constatée entre les crédits ouverts en LFI 2022 et ceux prévus pour 2023 résulte des seuls effets de la reprise de l'activité après la crise sanitaire et le recours massif au chômage partiel par les entreprises qui avait généré une baisse importante lors des exécutions 2020 et 2021.

Dans leur précédent rapport budgétaire, les rapporteurs spéciaux avaient alerté sur les conséquences d'une reprise de l'activité en 2022 par rapport à 2020 et 2021 qui pourrait générer une consommation plus importante que les crédits prévus en LFI 2022. A cet égard, les niveaux d'exécution au 6 octobre 2022 tendent à leur donner raison dans la mesure où, à cette date, l'exécution de l'action 1 du programme 138 se situe déjà à 1 416,8 millions d'euros pour des ouvertures à hauteur de 1 478 millions d'euros soit 95 % des crédits.

De plus, il convient de noter que le projet de loi de finances rectificative déposé devant l'Assemblée nationale de 2 novembre dernier prévoit une ouverture de crédits sur le programme 138 à hauteur de 236,7 millions d'euros en AE et 241,6 millions d'euros en CP essentiellement pour couvrir la hausse des exonérations de cotisations patronales.

Les rapporteurs spéciaux saluent cette ouverture de crédits supplémentaires qui permettra de financer les besoins de fin d'année sans redéploiements au sein du programme.

Par ailleurs, dans un contexte économique incertain venant accroitre les difficultés rencontrées par certaines entreprises, il est délicat, à ce stade, d'avoir une prévision fine de ce que pourrait être le besoin réel en 2023 en raison des éventuelles conséquences sur l'emploi et les salaires de l'inflation. Les rapporteurs spéciaux se montreront donc attentifs, en cours d'année, au niveau de consommation de ces crédits.

B. UNE HAUSSE DES CRÉDITS ALLOUÉS AU SERVICE MILITAIRE ADAPTÉ (ACTION 2) POUR RENFORCER CE DISPOSITIF EFFICACE

Les crédits de l'action 2 financent, à titre principal, le service militaire adapté (SMA) mais également la subvention pour charges de service public de l'agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM) ainsi que des actions de formations en mobilité à destination des ressortissants des départements et collectivités outre-mer de 18 à 30 ans notamment via le passeport mobilité formation professionnelle (PMFP) et enfin la subvention versée à l'institut de formation aux carrières administratives, sanitaires et sociales (IFCASS).

1. Le SMA, une évolution positive mais freinée par des difficultés de recrutement

Le Service militaire adapté (SMA) est un dispositif militaire d'insertion socioprofessionnelle créé en 1961 au profit des jeunes ultramarins, de 18 à 25 ans, éloignés de la qualification et du marché de l'emploi qui permet d'apporter une réponse ciblée à l'exclusion, au chômage, à la désocialisation et à l'illettrisme dans les territoires d'outre-mer.

Déployé en Martinique, Guadeloupe, Guyane, La Réunion, Mayotte, Nouvelle-Calédonie et en Polynésie française, ainsi qu'à Périgueux (24) avec un centre dédié à la mobilité et à la formation, le SMA initialement prévu pour accueillir 3 000 jeunes est, depuis 2017, en capacité d'accueillir chaque année 6 000 bénéficiaires depuis la mise en oeuvre, sur la période 2012-2017 du Plan « SMA 6000 » qui visait à atteindre le doublement du nombre de bénéficiaires.

Deux nouvelles compagnies ont été ouvertes en juillet 2022 : une en Polynésie, sur l'île de Hao, suite à l'annonce faite par le Président de la République lors de sa visite en juillet 2021 en Polynésie et une à Mayotte conformément à l'annonce du ministre des outre-mer du 29 août 2021.

La mission principale du SMA est de faciliter l'insertion dans la vie active de jeunes adultes, volontaires, en situation d'échec et/ou en voie de marginalisation résidant dans les départements et collectivités d'outre-mer.

Annuellement, le SMA recrute en moyenne 60 % de non diplômés et environ 43 % de jeunes illettrés selon la catégorisation de l'Agence nationale de lutte contre l'illettrisme (ANLCI).

Avec 1 283 cadres (465 personnels affectés à la gestion et 818 personnels affectés à l'encadrement), soit 80 de plus qu'en 2021, le SMA propose donc, sous statut de volontaire dans les armées, un parcours complet pour développer et renforcer les compétences sociales et professionnelles des bénéficiaires. Il est articulé autour d'une formation militaire initiale, d'une remise à niveau dans les savoirs de base, d'une éducation civique, d'une formation aux premiers secours et d'une préformation professionnelle. Ce parcours est sanctionné par un certificat d'aptitude personnelle à l'insertion et complété par l'obtention du permis de conduire.

En 2017, le SMA a accueilli 6 000 jeunes atteignant ainsi l'objectif fixé en 2010 de doublement des effectifs accompagnés . Depuis 2018, le SMA a lancé des études et des expérimentations dans le cadre du projet SMA 2025 qui poursuit quatre finalités :

- développer l'employabilité initiale des jeunes par le renforcement de leurs compétences individuelles ;

- renforcer la qualité du parcours pour une efficacité durable ;

- engager le virage du numérique dans les formations avec des outils pédagogiques adaptés ;

- amplifier le rôle de chaque régiment comme plate-forme locale.

Celles-ci répondent notamment aux préconisations faites par la Cour des comptes ou le Conseil économique, social et environnemental, et s'inscrivent dans les politiques publiques centrées sur l'emploi, la formation et la jeunesse.

Dans la continuité du SMA 2025, le SMA 2025+ a pour ambition de renforcer l'actuel plan SMA 2025 en prolongeant son action qualitative tout en s'ouvrant à d'autres publics également en grande difficulté.

Son expérimentation a débuté à Mayotte en 2022 et doit être déployée dans les autres territoires d'outre-mer à compter de 2023.

Le projet SMA 2025+ se concentre sur les neuf projets opérationnels concrets et chiffrés suivants :

- allonger d'un mois la durée moyenne de formation des volontaires stagiaires, et développer des filières en apprentissage, pour augmenter la proportion des filières qualifiantes ;

- renforcer les savoirs de base (lire, écrire, compter, maîtriser l'accès à internet) ;

- accueillir, dans tous les RSMA, les mineurs décrocheurs de 16 à 18 ans , dans le cadre du volontariat jeune cadet (VJC) ;

- accueillir 200 mères célibataires supplémentaires par la création de places en crèches et de maisons des familles au sein des régiments ;

- présenter 100 % des volontaires au permis de conduire , avec un taux de réussite de 100 % (contre 87 % et 75 % aujourd'hui) ;

- développer des formations de chefs d'équipe et de cadres intermédiaires à destination des volontaires ;

- accueillir 320 jeunes métropolitains (service civique ou étudiants) pour favoriser le brassage social et géographique ;

- augmenter de 11 % le nombre de bénéficiaires , soit 380 volontaires stagiaires et 280 volontaires techniciens par an ;

- relocaliser le centre de formation du SMA de Périgueux avant de le rendre plus accessible, et porter sa capacité d'accueil de 100 à 300 stagiaires, en partenariat avec l'Afpa.

Cependant, le recrutement de 6 000 bénéficiaires a été confronté à plusieurs difficultés depuis 2017 :

- un décalage de la croissance démographique entre les différents territoires d'outre-mer avec une baisse démographique en Guadeloupe et à la Martinique (respectivement - 7,1 % et - 9,5 % entre 2011 et 2021) et une croissance importante en Guyane et à Mayotte ce qui est venu perturber la répartition territoriale des recrutements en compensant les moindres recrutements des Antilles par des sur recrutements dans d'autres territoires. Cependant, ces transferts, sans investissements importants pour accroitre les capacités d'accueil de certains centres, rencontrent des limites venant ainsi freiner le nombre total de recrutements. Afin de remédier à cette difficulté, une modification des critères de recrutement a été actée dès 2020 avec un abaissement de l'âge des recrutés ;

- la crise sanitaire a affecté les recrutements à compter de 2020 ;

- l'obligation vaccinale contre le COVID pour les militaires a également pesé sur les recrutements, particulièrement aux Antilles où le refus de la vaccination est venu ajouter un frein supplémentaire aux difficultés de recrutement rencontrées du fait de la baisse démographique.

Dès lors, depuis 2017, le nombre de volontaires a enregistré une baisse notable jusqu'à 2020. Le nombre de recrutements est de nouveau en hausse depuis 2021.

Évolution du nombre de volontaires stagiaires (VS), volontaires jeunes cadets (VJC) et volontaires techniciens (VT) entre 2016 et 2022

Années

2016

2017

2018

2019

2020

2021

2022 27 ( * )

RSMA-M

VS / VJC

791

811

768

516

404

433

550

VT

181

191

187

180

168

162

152

RSMA-Ga

VS / VJC

828

828

791

781

275

617

670

VT

190

199

191

189

192

171

158

RSMA-Gy

VS / VJC

538

563

560

570

276

621

650

VT

138

138

138

138

140

149

163

RSMA-R

VS / VJC

1067

1090

1106

1125

821

1145

1150

VT

278

277

283

282

280

290

292

RSMA-My

VS / VJC

522

540

547

575

273

607

700

VT

117

124

126

126

134

145

166

RSMA-Pf

VS / VJC

508

516

518

532

445

635

630

VT

132

139

141

140

140

146

160

RSMA-NC

VS / VJC

431

462

476

492

499

497

560

VT

114

119

125

127

132

139

145

CFSMA-P

VS

Non comptabilisés28 ( * )

VT

12

13

13

14

14

14

14

TOTAL

VS / VJC

4685

4810

4766

4591

2993

4548

4910

VT

1162

1200

1204

1196

1200

1216

1250

VOL (VS+VT)

5847

6010

5970

5787

4193

5771

6160

Source : DGOM

Dans un contexte de crise sanitaire, les rapporteurs soulignent le maintien des bons taux d'insertion en 2020 et le rebond en 2021 malgré une légère diminution par rapport à 2018.

Cependant, ils constatent que le taux d'insertion augmente à un rythme moins rapide que celui des personnels encadrants et du total des personnels affectés au SMA.

Enfin, dans un contexte économique difficile, ils s'interrogent sur la capacité à tenir le taux d'insertion cible en 2022 mais surtout en 2023 (cible fixée à 82,5 %).

Évolution des taux d'encadrement et d'insertion entre 2017 et 2022

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires et des réponses au questionnaire budgétaire

Évolution du taux d'insertion entre 2016 et 2022

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires et des réponses au questionnaire budgétaire

2. Des crédits en hausse pour le déploiement du SMA 2025 à tous les territoires d'outre-mer

En PLF 2023, les crédits de l'action 2 s'élèvent à 348,8 millions d'euros en AE et 344,9 millions d'euros en CP (avec les fonds de concours) soit une hausse de 14,66 % en AE et 17,1 % en CP qui représente respectivement 44,6 millions en AE et 50,4 millions en CP par rapport à la LFI 2022. Hors fonds de concours attendus, cette hausse est de 36,4 millions d'euros en AE et 40,8 millions d'euros en CP.

Cette hausse est répartie comme suit :

- 24 millions d'euros en titre 2 ;

- 3,5 millions d'euros (AE) et 2,3 millions d'euros (CP) en dépenses de fonctionnement ;

- 9 millions d'euros (AE) et 15 millions d'euros (CP) en dépenses d'investissement.

En titre 2, la hausse s'explique essentiellement par un schéma d'emplois positif en raison de la création de nouvelles compagnies à Mayotte et en Polynésie, à des mesures catégorielles (notamment la prime d'activité des jeunes stagiaires), la revalorisation du point d'indice et le glissement vieillesse technicité (GVT) positif.

En hors titre 2, la hausse des crédits s'explique également par la création des nouvelles compagnies mais aussi par le déploiement du SMA 2025 à tous les territoires d'outre-mer avec des actions nouvelles (permis pour tous, accueil des mineurs de 16 à 18 ans ou encore des parents isolés).

Ce renforcement du dispositif génère en effet une hausse mécanique des dépenses de fonctionnement et d'investissement destinées à l'accueil des bénéficiaires et des personnels encadrant.

En revanche, les dépenses d'intervention restent stables.

C. LES OUTILS DE FINANCEMENT DE L'ÉCONOMIE (ACTION 4) : UN IMPACT DE LA CRISE ÉCONOMIQUE DIFFICILE À ESTIMER MAIS QUI POURRAIT GÉNÉRER DES BESOINS DE FINANCEMENT SUPPLÉMENTAIRES

Cette action créée en loi de finances pour 2019 porte des mesures transférées depuis l'action 1 du programme 138, ainsi que des dispositifs nouveaux issus d'une partie des ressources dégagées par les réformes fiscales d'extinction de la TVA non perçue récupérable (NPR) et de réforme de l'impôt sur le revenu.

Ces mesures spécifiques de soutien aux entreprises et associations ultramarines ont pour objectif d'accompagner le développement économique et l'attractivité des territoires ultramarins par la mise en oeuvre de plusieurs dispositifs :

- le prêt de développement outre-mer (PDOM) Bpifrance ;

- l'élargissement des bénéficiaires et des critères d'attribution ;

- les subventions d'investissement ;

- le soutien au microcrédit outre-mer.

1. Une stabilité des crédits qui pourrait s'avérer insuffisante en 2023

En PLF 2023, les crédits de l'action 4 s'élèvent à 24,3 millions d'euros en AE et 21,8 millions d'euros en CP soit un niveau strictement équivalent à celui de la LFI 2022 en AE et en légère baisse (1,2 million d'euros) en CP .

Ce niveau de crédits, identique à celui des années précédentes, génère cependant quelques interrogations de la part des rapporteurs spéciaux .

En effet, en 2020 une importante sur-exécution 29 ( * ) des crédits de cette action a été constatée notamment en raison du contexte de crise sanitaire qui a engendré un accroissement des demandes de financement via le dispositif de PDOM. En 2021, les niveaux de consommation 30 ( * ) , face à la reprise de l'activité économique, se sont établis en deçà des crédits ouverts en LFI.

Au 6 octobre 2022, hors retraitement d'AE, la consommation des AE était déjà de 23,8 millions d'euros.

Dans le contexte économique actuel, la situation des entreprises en 2023 pourrait se détériorer. Le recours au microcrédit ou au PDOM pourrait alors enregistrer une hausse par rapport à l'année 2021 voire 2022.

Les rapporteurs spéciaux proposent donc un amendement II-18 visant à majorer de 5 millions d'euros en AE et CP les crédits de l'action 4 du programme 138.

2. Les incertitudes concernant l'évolution de l'aide au fret

Le décret n°2017-1476 du 16 octobre 2017 prévoit que l'État apporte aux entreprises situées dans les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Wallis-et-Futuna une aide ayant pour objectif de soutenir le développement économique régional en accordant une compensation au surcoût de transport de marchandises produites dans les DOM et à Saint-Martin à l'intérieur des frontières nationales, au surcoût de transport des produits primaires de leur lieu de production au lieu de transformation et aux coûts liés au transport de déchets dangereux qui ne peuvent être traités ou éliminés dans leurs territoires respectifs de production.

Cette aide au fret finance une partie des dépenses de transport engagées par les entreprises sur justification de leurs frais effectifs.

La base éligible de l'aide est égale au coût prévisionnel annuel hors taxes des dépenses de transport le plus économique, maritime ou aérien, incluant les assurances, les frais de manutention et de stockage temporaire avant enlèvement et, s'agissant des déchets, les coûts spécifiques de conditionnement et de contrôles de sécurité d'affrètement :

- des matières premières ou produits importés par l'entreprise depuis l'Union européenne ou les pays tiers ou acheminés depuis les collectivités territoriales mentionnées à l'article 1 er pour y entrer dans un cycle de production ;

- des matières premières ou produits issus de la production locale expédiés vers l'Union européenne, y compris vers ces collectivités territoriales ;

- des déchets importés de l'Union européenne, y compris depuis ces collectivités territoriales ou des pays tiers, aux fins de traitement ;

- des déchets expédiés vers l'Union européenne, y compris vers ces collectivités territoriales, aux fins de traitement.

Le montant de l'aide apportée par l'État ne peut dépasser 25 % de la base éligible, lorsque l'entreprise bénéficie d'une aide financière dans le cadre de l'allocation additionnelle spécifique de compensation des surcoûts liés aux handicaps des régions ultrapériphériques prévue par le Fonds européen de développement économique régional ou d'une aide des collectivités territoriales ou de leurs groupements.

En l'absence de ces aides, le montant de l'aide apportée par l'État peut être porté à 50 % de la base éligible.

L'ensemble de ces aides financières ne peut avoir pour effet de porter le niveau de compensation des coûts de transport au-delà de 100 % de la base éligible.

Or, si les coûts des transports diminuent légèrement en 2022 par rapport à 2021, ils demeurent à un niveau exceptionnellement haut et leur évolution en 2023 reste difficile à estimer quant au point d'atterrissage de cette baisse.

Évolution de l'indice mondial du fret par conteneur entre janvier 2017 et aout 2022

(en dollars)

Source : Freightos

Dans ce contexte, les rapporteurs spéciaux se montreront attentifs à l'exécution 2022 des crédits de l'action 4 mais également à celle de 2023.

III. FOCUS SUR LES MOYENS ALLOUÉS À LADOM

L'Agence de l'outre-mer pour la mobilité (LADOM) est, depuis le 1 er janvier 2016, un établissement public administratif (EPA), en vertu des articles 4 et 6 de la loi n°2015-1268 du 14 octobre 2015 d'actualisation du droit des outre-mer (LODEOM). Elle bénéficie également du soutien financier de l'Union européenne via le Fonds social européen (FSE) et des collectivités territoriales, au travers de conventions bipartites.

Le financement en provenance de l'État de l'agence provient des deux programmes de la mission « Outre-mer ».

Des crédits du programme 123 « Conditions de vie outre-mer » : l'action 3 du programme 123 retrace la subvention allouée à LADOM, pour le financement des dispositifs du fonds de continuité territoriale (FCT), et notamment les aides ACT, PME, PMFP et PMSP 31 ( * ) et l'aide au transport de corps, versées sous conditions de ressources.

Ces crédits, qui s'élèveront à 28,6 millions d'euros en AE et CP en 2023 soit le même montant qu'en 2022 :

- confirment le maintien des orientations prises par le Gouvernement envers l'opérateur pour la période 2019-2022 ;

- permettent d'ajuster les dotations aux besoins réels de l'opérateur au titre du fonds de continuité territoriale. En raison de la crise sanitaire, les voyages entre les outre-mer et l'hexagone ont connu une forte baisse en 2020 et en 2021 qui explique ces ajustements. Pour 2022, le niveau des CP progresse permettant de financer le retour à un niveau normal des liaisons aériennes.

Des crédits du programme 138 « Emploi outre-mer » : l'action 2 du programme 138 porte la subvention pour charges de service public (SCSP) allouée à l'établissement. Cette subvention s'élèvera en 2023, à 7 447 074 euros en AE et CP, soit le même montant que celui attribué en 2022. Par ailleurs, l'action 2 du programme 138 porte également les crédits d'intervention de l'agence en faveur des jeunes ultramarins. Ces crédits, qui visent à financer la formation et l'emploi des jeunes, s'élèvent, en PLF 2023, à 23,5 millions euros en AE et 18,3 millions euros en CP, niveau quasiment équivalent à celui de la LFI 2022.

Enfin, l'agence est dotée de 127 ETPT sous plafond et 15 ETPT hors plafond en 2023 soit un niveau stable depuis 2016. Cette stabilisation est conforme au principe d'affirmation de la participation des opérateurs de l'État à l'effort de maîtrise des finances publiques traduit dans la loi de programmation des finances publiques (LPFP) pour la période 2018-2022 et réitéré dans les articles 10 et 11 de la LPFP 2023-2027.

TROISIÈME PARTIE
LES DÉPENSES FISCALES EN FAVEUR DE L'OUTRE-MER

I. UNE AMÉLIORATION DE LA PRÉSENTATION DES DÉPENSES FISCALES PRÉCONISÉE MAIS NON MISE EN oeUVRE DANS LE PROJET ANNUEL DE PERFORMANCE (PAP) DE LA MISSION « OUTRE-MER »

A. LES INSTRUCTIONS ISSUES DE LA CIRCULAIRE DE LA DIRECTION DU BUDGET SUR LA PRÉPARATION DES PAP 2023

La circulaire DB-2PERF-22-3123 du 19 avril 2022, dans son annexe 7 relative aux dépenses fiscales, prévoit que dans une logique d'agrégation par politique publique, les PAP devront présenter les imbrications qui existent entre crédits budgétaires et dépenses fiscales, afin que l'ensemble des moyens mis en oeuvre par politique puisse être apprécié de façon agrégée. À ce titre, le ratio entre dépenses fiscales et crédits budgétaires sera calculé sur chaque programme conformément aux dispositions de la loi organique du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques 32 ( * ) .

Par ailleurs, la circulaire invite les ministères, pour le PLF 2023, à décrire de manière plus systématique dans les PAP la contribution des différentes dépenses fiscales aux objectifs du programme.

Cette amélioration s'impose tout particulièrement aux dépenses fiscales relativement coûteuses, notamment au regard des crédits budgétaires concourant aux mêmes objectifs, et dont l'action n'est pas ou peu mentionnée dans les PAP. Cette exigence avait d'ailleurs été formulée par les commissions des finances des deux assemblées.

Ces compléments concernent tout particulièrement :

- la présentation stratégique du projet annuel de performances : il est notamment demandé aux ministères de mentionner dans cette partie les dépenses fiscales rattachées les plus coûteuses, en précisant leur contribution aux objectifs mis en avant dans le programme d'affectation au même titre que les crédits budgétaires. Il s'agira en particulier de montrer en quoi la dépense fiscale participe à la mise en oeuvre de la politique publique ;

- la présentation des actions dans la JPE : lorsque cela est possible, il est demandé aux ministères de mentionner une ou plusieurs dépenses fiscales considérées comme des leviers d'action pour chaque action du programme en décrivant l'articulation entre les dépenses fiscales mentionnées et les crédits budgétaires poursuivant un objectif similaire.

B. LA NON APPLICATION DE CES INSTRUCTIONS AUX DÉPENSES FISCALES OUTRE-MER

Concernant les dépenses fiscales rattachées aux deux programmes de la mission « Outre-mer », force est de constater que les améliorations susmentionnées n'ont pas été mises en oeuvre.

À cet égard, le ratio entre dépenses fiscales et crédits budgétaires sur chaque programme n'est pas indiqué.

Par ailleurs, aucune mention n'est faite dans la présentation stratégique de la mission et des programmes des dépenses fiscales rattachées les plus couteuses.

Enfin, dans les parties « justification au premier euro » (JPE) le lien entre certaines dépenses fiscales et les politiques publiques mises en oeuvre n'est pas décrit, de même que l'articulation entre les dépenses fiscales et les crédits budgétaires n'est pas précisée.

Pourtant, les exemples de dépenses fiscales servant de levier aux actions budgétaires sont nombreux. A titre d'exemple, les dépenses fiscales afférentes aux crédits et réductions d'impôts dans le secteur du logement (710110, 110210, 110256, 320136) pourraient être reliées aux dépenses budgétaires de la LBU (action 1 du programme 123).

Sur le programme 138, l'abattement sur les bénéfices dans les ZFANG (210322), en ce qu'il a pour objectif l'amélioration de la rentabilité des entreprises situées dans les DOM pourrait être mis en regard de l'action 1 qui vise à diminuer leurs coûts de production et à améliorer leur compétitivité.

Ce travail permettrait de surcroit de mieux comprendre le rattachement de certaines dépenses fiscales à un programme plutôt qu'à l'autre. Ainsi, les abattements de fiscalité directe locale dans les zones franches d'activité sont rattachés au programme 123 alors que, contribuant à la compétitivité des entreprises, ils pourraient être rattachés au programme 138.

Inversement la non applicabilité de la TVA en Guyane et à Mayotte, concourant au même objectif de baisse des prix pour le consommateur final que les taux réduits de TVA en Guadeloupe, Martinique et à la Réunion, pourrait être rattachée au programme 123 relatif aux conditions de vie outre-mer.

II. UN OUTIL CONTESTÉ QUI PEINE À ÊTRE RATIONALISÉ ET ÉVALUÉ

A. LES DÉPENSES FISCALES : DES OUTILS QUI RESTENT TRÈS CONTESTÉS...

En sus des crédits budgétaires, les dépenses fiscales sont un outil essentiel pour contribuer à la dynamisation de l'économie, à l'attractivité des territoires et à l'effort général de rattrapage de l'écart de niveau socio-économique entre l'outre-mer et la métropole.

Sur les deux programmes de la mission, elles devraient s'établir, en 2023, à 7 090 millions d'euros soit 2,6 fois plus que les crédits budgétaires portés par la mission « outre-mer ».

En raison des montants en jeu, les dépenses fiscales sont cependant des outils contestés pour plusieurs raisons mises en exergue de manière récurrente par la Cour des comptes dans ses rapports sur l'exécution budgétaire, dans son rapport sur le logement outre-mer 33 ( * ) , et dans son rapport sur les financements de l'État en outre-mer.

Elle estime, en effet, que l'efficacité de ces dépenses n'est pas avérée et que leur surcoût est important par rapport à d'autres dispositifs en raison notamment :

- des difficultés de chiffrage et, de fait, du coût réel qu'elles représentent pour l'État ;

- des difficultés de pilotage ;

- de l'absence d'évaluation de l'efficacité et de l'efficience des dépenses fiscales et, à tout le moins, des plus significatives ;

- de l'absence de règles précises et formalisées relatives à la définition et à la modification du périmètre des dépenses fiscales.

Dans ce contexte, spécifiquement sur les dépenses fiscales relatives à la construction de logements, la Cour des comptes , dans son rapport sur le logement social outre-mer estimait que « l'efficience des financements publics nécessite un pilotage géographique précis pour apporter une réponse appropriée aux besoins de logements dans chaque territoire [...] Or, la localisation des logements bénéficiant d'incitations fiscales est le fait de chaque promoteur et non des pouvoirs publics. Ces dépenses n'orientent donc pas toujours les investissements là où ils sont nécessaires. De plus, les investisseurs mobilisent le plus souvent les aides fiscales pour des logements intermédiaires et non pour des logements locatifs très sociaux». Aussi, la Cour préconise-t-elle, « de supprimer le dispositif de défiscalisation relatif aux logements dans les outre-mer, compte tenu de son coût significatif pour le budget de l'État et de son absence d'efficacité démontrée » et recommande dans son rapport sur les financements de l'État en outre-mer de supprimer les dépenses fiscales inefficientes en faveur du logement et d'abonder du montant correspondant les crédits de la LBU.

B. ...MALGRÉ LA SUPPRESSION DE PLUSIEURS DÉPENSES INEFFICIENTES ET LES DIFFÉRENTES RÉFORMES

Dans ce contexte, gouvernement et législateur ont tenté de rationaliser les dépenses fiscales et notamment celles applicables à l'outre-mer. Ainsi, récemment, les réformes de 2019 ont notamment concerné :

- la suppression du dispositif de la TVA non perçue récupérable 34 ( * ) (ce qui représente une économie d'environ 100 millions d'euros) rattachée au programme 138 ;

- la réfaction de la réduction d'impôt sur le revenu spécifique pour les contribuables résidant dans les DOM 35 ( * ) (ce qui représente une économie d'environ 70 36 ( * ) millions d'euros) rattachée au programme 123 ;

- la diminution du régime classique de défiscalisation prévu aux articles 199 undecies B et C du CGI au profit d'un crédit d'impôt en faveur de l'investissement dans les DROM (article 244 quater W du CGI) ce qui a diminué la dépense fiscale de 700 millions d'euros à 377 millions d'euros et a augmenté parallèlement le crédit d'impôt qui atteint un niveau de 150 millions d'euros en 2021.

De surcroit, la loi de finances pour 2020 37 ( * ) a supprimé deux dispositifs non chiffrables :

- dépense fiscale n°170308 : exclusion temporaire du revenu imposable des bénéfices provenant de l'exploitation de terrains auparavant non cultivés affectés à des cultures agréées pour la détermination du revenu imposable afférent aux exploitations agricoles situées dans les DOM ;

- dépense fiscale n°710106 : exonérations de TVA relatives à la mise en valeur agricole de terres dans les DOM.

Enfin, la LFI 2022 a acté la suppression de l'exonération des bénéfices réinvestis dans l'entreprise pour les sociétés de recherche et d'exploitation minière dans les départements d'outre-mer, cette dépense fiscale apparaissant comme obsolète et sans objet depuis l'extinction de son fait générateur en 2001.

C. POUR AUTANT, LES DÉPENSES FISCALES REPRÉSENTENT UN OUTIL INDISPENSABLE ET DANS BIEN DES CAS À L'EFFICACITÉ AVÉRÉE

Malgré les critiques récurrentes, les rapporteurs spéciaux estiment que ces dépenses représentent un outil essentiel pour contribuer à la dynamisation de l'économie, à l'attractivité des territoires et à l'effort général de rattrapage de l'écart de niveau socio-économique entre l'outre-mer et la métropole. À ce titre, elles sont considérées par le droit de l'Union européenne comme des aides à finalité régionale, placées sous le régime du règlement général d'exemption par catégorie 38 ( * ) , car considérées comme de faible ampleur sur la concurrence et de nature à compenser les surcoûts liés à cette situation géographique particulière.

Elles ont un effet incitatif notamment sur la construction de logements qui même si elle n'est pas totalement ciblée géographiquement comme le souhaiterait la Cour des comptes répond à un besoin prégnant, dans la mesure où le déficit de logements concerne la quasi intégralité des territoires d'outre-mer.

Par ailleurs, les rapporteurs spéciaux rappellent que certaines dépenses fiscales permettent un certain ciblage géographique des constructions et rénovations. Ainsi, le bénéfice du crédit d'impôt en faveur du logement social dans les départements d'outre-mer est conditionné au financement de l'investissement à hauteur de 5 % minimum par la LBU. Les services préfectoraux de la direction de l'environnement, de l'aménagement et du logement (DEAL) instruisent d'ores et déjà la pertinence du projet de construction de logements pour le territoire dans le cadre de l'attribution de la LBU.

En outre, s'agissant de la localisation des investissements consistant en la rénovation de logements sociaux, le législateur a d'ores et déjà désigné dans la loi les quartiers ou territoires dans lesquels les rénovations sont prioritaires. Ainsi, le bénéfice du crédit d'impôt prévu au 4 du I de l'article 244 quater X du CGI en faveur de la rénovation ou de la réhabilitation des logements sociaux de plus de vingt ans est circonscrit aux logements situés dans les quartiers du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU) 39 ( * ) ou dans les quartiers prioritaires de la ville (QPV) 40 ( * ) des départements d'outre-mer. De la même manière, le bénéfice de la réduction d'impôt prévue au VI bis de l'article 199 undecies C du CGI est restreint aux immeubles situés dans certaines communes ou territoires expressément visés par la loi 41 ( * ) . Ces dispositions visent à dynamiser la réhabilitation du parc social vieillissant dans certaines zones ciblées, afin de répondre aux besoins locaux et à l'enjeu prioritaire de réhabilitation du parc ancien dans certains territoires.

De surcroit, les rapporteurs spéciaux soulignent que la rareté du foncier, élément transversal à tous les territoires d'outre-mer, explique également l'absence de constructions dans certaines régions et il leur semble illusoire de penser qu'un pilotage au niveau central, par une rebudgétisation, serait plus performant sur le plan du déploiement géographique.

Hors dépenses fiscales relatives au logement, elles permettent un maintien du pouvoir d'achat des ultramarins et contribuent aux tentatives de réalignement des niveaux de vie avec la métropole. C'est notamment le cas des exonérations ou des taux réduits de TVA.

Elles concourent, enfin, à l'amélioration de la compétitivité des entreprises ultramarines dans un marché plus contraint qu'en métropole et favorisent l'investissement privé.

Les dépenses fiscales ont, enfin, une portée politique dont il ne faudrait pas négliger l'impact en termes de climat social dans les territoires d'outre-mer.

III. UNE HAUSSE CONTINUE DES DÉPENSES FISCALES QUI NÉCESSITE DES ÉVALUATIONS

A. L'ÉVOLUTION DES DÉPENSES FISCALES EN PLF 2023

Malgré les efforts susmentionnés, les mouvements de rationalisation n'ont pas généré de baisse des dépenses fiscales. En effet, en 2020, la diminution enregistrée par rapport à 2019 (-6 %) s'explique essentiellement par l'impact de la crise sanitaire sur la consommation et l'activité économique.

En 2021 et 2022, ces dépenses enregistrent une nouvelle hausse.

En 2023, comme lors des années précédentes, l'évaluation des dépenses fiscales enregistre une hausse de 2,5 % par rapport à 2022 en passant de 6 916 millions d'euros à 7 090 millions d'euros en raison notamment du dynamisme de certaines dépenses (notamment le taux de TVA réduit en Guadeloupe, Martinique et à la Réunion). Cette hausse est mécanique et renforcée dans un contexte inflationniste où le niveau en valeur de TVA augmente. De fait, la dépense fiscale relative à des taux réduits ou à des exonérations de TVA est évaluée à la hausse.

Évolution des dépenses fiscales entre 2021 et 2023

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir du PLF 2023

Au-delà des effets mécaniques intrinsèques à certaines dépenses fiscales, la hausse s'explique également, en partie, par un changement de méthode de chiffrage de certaines dépenses fiscales. Dans le cadre de l'élaboration du tome II des voies et moyens annexé au PLF 2022, certaines améliorations ont été apportées au chiffrage de dépenses fiscales relatives à des taux réduits de taxe sur la valeur ajoutée (TVA), dans le sens d'une amélioration de l'exhaustivité du périmètre à retenir 42 ( * ) , qui conduit à observer une hausse importante du coût de la dépense fiscale n° 710103 entre 2019 et 2020 par exemple (TVA réduite en Guadeloupe, Martinique et à la Réunion).

B. CETTE HAUSSE CONTINUE REND NÉCESSAIRE DES ÉVALUATIONS PRÉCISES DES DÉPENSES FISCALES

Les rapporteurs spéciaux ne remettent donc pas en cause le principe même des dépenses fiscales en ce qu'elles représentent un complément indispensable aux crédits budgétaires et présentent des avantages connexes en termes de compétitivité des entreprises ultramarines et de création d'emplois. Cependant , ils partagent largement le constat récurrent de la Cour des comptes sur la nécessité de mieux les évaluer pour, au besoin, mieux les cibler. Or, à ce jour, force est de constater que les évaluations réalisées sont très limitées, ce qu'avaient d'ailleurs déjà souligné les rapporteurs spéciaux dans leur rapport réalisé dans le cadre de l'examen du PLF 2022.

1. Les évaluations déjà menées

En effet, ils y précisaient que « le chiffrage des dépenses fiscales est incomplet et manque parfois de fiabilité » . Dans le PLF 2023 (comme en 2022), sur les 25 dépenses fiscales, neuf ne sont pas chiffrées dont trois qui présentaient, en 2020, un chiffrage supérieur à 120 millions d'euros .

Il convient cependant de souligner que la DLF a mené des travaux de fiabilisation pour les quatre principales dépenses fiscales de la mission, (n°710103, 800401, 110224 et 110302) permettant de fournir des chiffrages avec un très bon degré de fiabilité pour trois d'entre elles.

Par ailleurs, plusieurs dépenses fiscales ont été évaluées au cours des deux dernières années. Il s'agit des dépenses fiscales n° 110224, n° 210325 et n° 320113 (rapport d'évaluation de l'aide fiscale à l'investissement productif outre-mer pour validation du plan d'évaluation par la Commission européenne), n° 110256 et n° 320136 (rapport sur le logement dans les départements et régions d'outre-mer de la Cour des comptes) et enfin n° 210322 (rapport d'évaluation de la réforme des zones franches d'activité nouvelle génération ZFANG de KPMG).

2. Les perspectives d'évaluations

La DGOM a établi un programme pluriannuel d'évaluation 2022-2025 portant sur divers dispositifs rattachés à la mission « outre-mer », parmi lesquels figurent :

- le régime de TVA ultramarine et son articulation avec l'octroi de mer ;

- le régime de duty free aux Antilles ;

- l'expérimentation des emplois francs à La Réunion.

Les rapporteurs spéciaux notent toutefois que le contenu de ce programme demeure limité puisqu'il exclut un montant de plus de 6 milliards d'euros de dépenses fiscales outre-mer et ne comporte que deux des 29 dépenses fiscales, retenues sur le seul critère de la nécessité de justifier de leur caractère dérogatoire au droit commun devant la Communauté européenne.

Par ailleurs, dans le cadre d'une réflexion conjointe sur les potentielles évolutions des dispositifs d'aide fiscale en faveur des investissements productifs et du logement en outre-mer, le directeur général des finances publiques et la directrice générale des outre-mer ont demandé à la direction de la législation fiscale (DLF) et la direction générale des outre-mer (DGOM) de proposer au Gouvernement une évaluation des aides fiscales existantes en faveur de l'investissement en outre-mer.

Enfin, la mise en oeuvre de l'article 25 de la loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publiques, prévoit que le Tome II des Voies et moyens relatif aux dépenses fiscales comporte chaque année la liste des dépenses fiscales qui feront l'objet d'une évaluation dans l'année : à ce titre, les dispositifs fiscaux en outre-mer sont visés par le programme d'évaluation 2023 qui oriente cette évaluation sur l'efficience de tout ou partie de ces dispositifs, leur adéquation avec les objectifs poursuivis, leur correct ciblage et leur lisibilité.

3. Contraintes et difficultés des évaluations

Les rapporteurs spéciaux alertent, comme ils l'ont déjà fait dans leur précédent rapport réalisé dans le cadre du PLF 2022, sur le fait que « nombre de dépenses fiscales présentent un fait générateur qui s'éteindra en 2025 (voire en 2023). Il conviendrait, dans ce contexte, d'avoir des évaluations et des réflexions en amont de cette date afin d'anticiper l'extinction de ces dispositifs ou, au contraire, de demander leur prorogation pour les plus utiles et efficaces d'entre eux ».

Cependant, les rapporteurs sont également très conscients des difficultés qui pèsent sur l'évaluation de ces dépenses fiscales.

L'impact sur la création d'emplois est délicat à déterminer dans la mesure où les emplois mentionnés dans les agréments correspondent aux engagements de créations de la société bénéficiaire de l'agrément fiscal et non à une réalité mesurée ex-post.

Par ailleurs, par manque de données disponibles, il est difficile de reconstituer le niveau de recettes potentiel avant la mise en place d'une dépense fiscale.

L'évaluation des dépenses fiscales demeure donc un exercice très complexe et subséquemment incomplet et à la fiabilité relative .

Cette évaluation exhaustive est cependant un préalable nécessaire à une réflexion plus large sur les dépenses fiscales qui devra porter sur :

- la possibilité d'étendre certains dispositifs existants à l'efficacité démontrée ;

- la prorogation de dispositifs en voie d'extinction ;

- la suppression des dépenses fiscales les moins efficientes et la possibilité d'une réallocation de ces montants pour renforcer d'autres dispositifs (dépenses fiscales ou rebudgétisation sur les actions qui saturent la consommation des crédits ouverts).

QUATRIÈME PARTIE
LES CRÉDITS HORS MISSION OUTRE-MER
EN FAVEUR DES OUTRE-MER

I. UN EFFORT EN PROVENANCE DES MISSIONS SECTORIELLES DU BUDGET DE L'ÉTAT

A. DES CRÉDITS RETRACÉS DANS UN DPT ALLÉGÉ EN 2023

En complément des crédits portés par la mission « outre-mer » et des dépenses fiscales rattachées aux programmes 138 et 123, les territoires d'outre-mer bénéficient de crédits en provenance d'autres programmes du budget général qui sont retracés dans le document de politique transversale « outre-mer ».

1. Des critiques récurrentes à l'encontre du DPT outre-mer

Ce document, bien que permettant d'avoir une vision exhaustive des crédits alloués à l'outre-mer, a été largement critiqué par les parlementaires (notamment dans un rapport d'information des rapporteurs spéciaux 43 ( * ) faisant suite au rapport de la Cour des comptes sur les financements de l'État en outre-mer) en raison d'insuffisances et de biais structurels.

Ainsi, les modalités de confection de ce document (contributions de près de 100 programmes) coordonné par la seule DGOM, dont les moyens pour cette mission restent relativement limités, engendrent des fragilités et des inconvénients.

Premièrement, le DPT étant l'agglomération de toutes les contributions des programmes, c'est un document très dense (plus de 400 pages) qui nécessite un temps long de rédaction, de vérification et de mise en forme. Dès lors, la publication du document est souvent tardive (à titre d'exemple le 14 octobre 2021 pour un passage en commission à l'Assemblée nationale le 22 octobre) et qui laisse peu de temps pour l'exploiter pleinement.

Par ailleurs, ces mêmes contraintes relatives à l'élaboration du DPT génèrent des données peu fiables, des incohérences, des redondances ou le maintien de paragraphes obsolètes.

De surcroit, le DPT outre-mer ne fait que peu, voire pas le lien entre les objectifs de la loi EROM et du livre bleu et les moyens qui y sont consacrés. Si les axes du DPT couvrent en partie certaines de ces problématiques, les développements littéraires ne permettent pas toujours de cibler les crédits spécifiques à ces objectifs.

Les contributions des programmes aux CCT n'apparaissent pas distinctement au sein des axes et sont agrégés avec des mentions qui ne sont pas spécifiques aux outre-mer. Parallèlement, l'annexe relative aux CCT récapitule les crédits de chaque programme à l'ensemble des CCT mais pas à chaque CCT pris individuellement ce qui réduit considérablement son utilité. Il en est de même pour les contributions des programmes aux différents plans d'urgence en faveur des outre-mer.

Enfin, alors même qu'un DPT a vocation à présenter les crédits alloués à une politique transversale, le DPT outre-mer vise une présentation exhaustive des crédits alloués par l'État à l'outre-mer en dehors de toute considération de la notion de politique transversale sauf à estimer que l'outre-mer est une politique en soi. Ce parti pris génère une présentation de tous les crédits destinés à l'outre-mer, y compris des crédits qui sont alloués de manière similaire et sur les mêmes bases légales et règlementaires aux autres départements de métropole. En ce sens, il y a un dévoiement de l'objectif du DPT qui en se voulant un document exhaustif des dépenses réalisées par l'État en outre-mer stigmatise ces territoires en pointant les crédits qui y sont alloués alors même que les autres communes, EPCI, départements et régions de métropole bénéficient de ces mêmes crédits . Dans cette configuration, le document ne permet pas de mettre en exergue la politique de l'État et les efforts financiers déployés dans le seul objectif de mettre l'économie des territoires d'outre-mer au niveau de celle de la métropole.

2. Les modifications opérées dans le PLF 2023

En 2022, le DPT outre-mer se déclinait en 9 axes 44 ( * ) . En 2023, la rédaction a été resserrée autour de 6 axes plus en lien avec la loi EROM et le livre bleu :

- axe n° 1 : développer l'emploi, la production et l'investissement outre-mer ;

- axe n° 2 : promouvoir l'égalité des chances en outre-mer ;

- axe n° 3 : valoriser les atouts et favoriser les conditions de vie en outre-mer ;

- axe n° 4 : promouvoir un aménagement durable et la transition écologique des territoires ultramarins ;

- axe n° 5 : relations avec les collectivités territoriales ;

- axe n°6 : plan d'urgence face à la crise sanitaire / plan de relance.

Sur les 92 programmes contributeurs en 2023, seuls 48 ont apporté des contributions littéraires. En revanche, les 92 programmes sont repris dans les annexes relatives à l'effort financier. Ces dernières passent d'ailleurs de 7 à 4 pour se concentrer uniquement sur les emplois, les crédits totaux, T2 et HT2 à l'exclusion des titres 5 à 7 qui apportaient peu d'informations utiles et exploitables par les parlementaires conformément aux pistes d'amélioration proposées par les rapporteurs spéciaux dans leur rapport susmentionné.

Concernant les autres annexes, certaines propositions des rapporteurs spéciaux ont également été suivies et notamment la suppression des annexes relatives à LADOM et au FEI, redondantes avec les informations figurant dans les PAP.

Il résulte de ces modifications que le DPT outre-mer 2023 a été considérablement allégé par rapport au précédent (300 pages contre 480 en 2022). Il a, par ailleurs, été transmis au Parlement le 7 octobre 2022 (contre le 14 octobre en 2021).

Les rapporteurs spéciaux saluent ces modifications qui font gagner le document en lisibilité et exploitabilité mais notent que des progrès sont encore possibles.

À titre d'exemple, le tableau de suivi des contrats de convergence et de transformation pourrait être amélioré en intégrant :

- une présentation distincte pour chacun des CCT (et contrat de développement et de transformation pour la Polynésie et contrat de développement pour la Nouvelle-Calédonie) ;

- les montants contractualisés initiaux et à date pour chacun des programmes budgétaires et organismes contributeurs ;

- l'exécution de chaque contrat avec le détail de consommation par programme contributeur ;

- la liste, par contrat, des projets financés et leur état d'avancement.

Par ailleurs, une annexe spécifique au suivi des crédits du plan de relance pourrait utilement être ajoutée.

Enfin, les PSR devraient être listés dans un tableau distinct de celui de la contribution budgétaire des programmes.

B. L'ÉVOLUTION DES CRÉDITS EN PROVENANCE DES AUTRES MISSIONS DU BUDGET DE L'ÉTAT

1. Une hausse notable sous l'effet des missions « écologie » et « Enseignement scolaire »

Le montant total des contributions budgétaires s'élève, en PLF 2023, à 20,1 milliards d'euros en AE et 21,7 milliards d'euros en CP soit une hausse de 1,1 % en AE et de 3,7 % en CP par rapport à la LFI 2022.

Évolution de l'effort financier de l'État en faveur de l'outre-mer
entre 2021 et 2023 par mission

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents de politique transversale outre-mer

En sus de la mission « Outre-mer » les missions contributrices sont essentiellement les missions « Enseignement scolaire », « Relations avec les collectivités territoriales », « Écologie », « Solidarité, insertion et égalité des chances », et « Sécurités ». Ces 6 missions contribuent à hauteur d'environ 73 % du total de l'effort financier de l'État. Ce ratio est stable sur les dernières années.

Part des missions dans l'effort total en faveur de l'outre-mer (en AE)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents de politique transversale outre-mer

Au total, en PLF 2023, les dépenses de l'État en faveur de l'outre-mer (crédits de la mission « Outre-mer » + dépenses fiscales + contributions des programmes du budget général) seront d'environ 27,1 milliards d'euros en AE et 28,7 milliards d'euros en CP.

Depuis 2018, cet effort total a augmenté de 15,4 % en AE et 23,1 % en CP soit, respectivement 3,6 milliards en AE et 5,4 milliards en CP.

Évolution de l'effort financier de l'État en faveur de l'outre-mer
entre 2018 et 2023

(en euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des documents budgétaires (PAP et DPT)

2. Des crédits pluri ministériels qui permettent notamment le financement des plans thématiques outre-mer

Il existe cinq plans thématiques outre-mer :

- le plan d'actions pour les services d'eau potable et d'assainissement en Guadeloupe, Guyane, Martinique, la Réunion, Mayotte et Saint-Martin (Plan eau DOM) ;

- le plan séismes Antilles ;

- le plan sargasses II ;

- le plan logement outre-mer (PLOM) ;

- le plan chlordécone.

a) Le plan d'action pour les services d'eau potable et d'assainissement en Guadeloupe, Guyane, Martinique, la Réunion, Mayotte et Saint-Martin (plan Eau DOM)

Le plan Eau DOM (PEDOM), adopté en 2016 pour une période de 10 ans, accompagne l'amélioration du service rendu aux usagers en matière d'eau potable et d'assainissement. Le ministère chargé des outre-mer cofinance, dans le cadre du programme 123 , l'élaboration et la réalisation des contrats de progrès. Ainsi, depuis 2016, le ministère a engagé 126 millions d'euros et consommé, au 31 juillet 2022, 72,5 millions d'euros à partir des crédits de la mission « Outre-mer » :

- FEI : 58 millions d'euros en AE entre 2016 et 2022 et 39 millions d'euros en CP au 31 juillet 2022.

- CPER/CDEV : 43 millions d'euros en AE sur la période 2016-2022 et 28,5 millions d'euros en CP au 31 juillet 2022.

- CCT : 25 millions d'euros en AE entre 2016 et 2022 et 5 millions d'euros en CP au 31 juillet 2022.

D'autres partenaires cofinancent des opérations d'investissement en eau et assainissement dans le cadre de ce plan :

- le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires (MTECT) : 5 millions d'euros en AE entre 2016 et 2022 et 3,1 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021 ;

- l'Office français de la biodiversité (OFB ) qui pilote le dispositif de solidarité interbassins (117 millions en AE sur la période 2016-2022 et 73 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021) et les crédits du Plan de relance alloués au plan Eau (47 millions d'euros en AE sur la période 2016-2022 et 12 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021) ;

- l'Agence française de développement (AFD) qui octroie des prêts long terme bonifiés par le ministère des outre-mer (173 millions d'euros depuis 2016, ayant mobilisé 11,9 millions d'euros de bonifications), des préfinancements de subventions via des prêts court terme (48 millions d'euros depuis 2016) et qui subventionne des études, en direct et via le fonds outre-mer à partir de 2020 (7,4 millions d'euros en AE pour la période 2016-2022 et 4,5 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021 ;

- la Banque des territoires qui octroie des prêts pour un montant total de 114 millions d'euros depuis 2016.

Au total, depuis 2016 et à date, ce sont 625 millions d'euros se décomposant en 290 millions d'euros de subventions et 335 millions d'euros de prêts, qui ont été mis à disposition des collectivités ultra-marines par l'État ou ses opérateurs bancaires sur les thématiques de l'adduction en eau potable et de l'assainissement.

b) Le plan séismes Antilles

Les Antilles sont les territoires où l'aléa et le risque sismique sont les plus forts à l'échelle nationale (classement en zone de sismicité 5, dite « forte »). Dans ce contexte, le Gouvernement a adopté, en 2007, le plan séisme Antilles (PSA), prévu pour une durée de 30 ans, dont l'objectif est d'améliorer la sécurité de la population.

Pour la période 2007-2019, plus de 562 millions d'euros ont été consacrés au confortement ou à la construction aux normes parasismiques pour la Martinique et 491 millions d'euros pour la Guadeloupe, soit plus d'un milliard d'euros au total.

Le troisième volet du plan séisme Antilles (PSA3) a été arrêté le 22 avril 2021. Il prévoit la construction ou la mise aux normes de bâtiments et infrastructures de gestion de crise, d'établissements d'enseignement, d'établissements de santé et de logements sociaux, et des actions de prévention à l'attention des populations, pour un montant global de 1,2 milliard d'euros entre 2021 et 2027, dont le financement assuré par l'État (MTECT) s'élève à 654,9 millions d'euros (dont 50 millions d'euros issus du plan de relance).

En 2021, au titre du fonds de prévention pour les risques naturels majeurs (FPRNM), 37,5 millions d'euros ont été engagés en AE pour 15,8 millions d'euros de CP.

Les actions pour le confortement des bâtiments utiles à la gestion de crise pour la période 2021-2027 sont cofinancées par le ministère de l'Intérieur et des outre-mer à hauteur de 42,8 millions d'euros et par le ministère chargé des finances via le compte d'affectation spéciale « Gestion du patrimoine immobilier de l'État » à hauteur de 6,92 millions d'euros.

Pour ce qui concerne les opérations relatives au confortement des hôpitaux, le ministère de la Santé et de la Prévention y contribue également sur les crédits du fonds pour la modernisation et l'investissement en santé (FMIS) du budget de la Sécurité sociale. 30 des 50 millions d'euros du plan de relance destinés au confortement parasismique gérés par le MTECT ont, par ailleurs, été affectés pour le confortement des établissements de santé de Guadeloupe et de Martinique.

Il est à noter que, concernant le confortement des établissements d'enseignement, l'Agence française de développement (AFD) contribue à la mise en oeuvre du PSA en proposant aux collectivités une offre « clé en mains » comportant :

- un volet « ingénierie » portant sur l'aide au montage de projets et aux dossiers de subvention : 1,5 million d'euros de subventions pour la Martinique et la Guadeloupe pris sur le fonds Outre-mer ;

- un volet d'accompagnement financier par des prêts.

L'AFD vient également en appui des bailleurs pour le confortement des logements sociaux.

c) Le plan Sargasses II

Le plan Sargasses II (2022-2025) a été publié le 14 mars 2022. Le montant annuel total prévu par le plan Sargasses II s'élève à 7,6 millions d'euros et le montant total du plan sur la période 2022-2025 s'élève à 36,5 millions d'euros.

Les origines des financements annuels, décidées lors de la réunion interministérielle du 13 décembre 2021, se répartissent comme suit :

- programme 123 : 3,5 millions d'euros ;

- divers programmes du budget général et opérateurs : 4,13 millions d'euros.

A partir de 2023, une action « Sargasses » est créée au sein du p rogramme des interventions territoriales de l'État (PITE) pour un montant total de 5,1 millions d'euros.

d) Le plan logement outre-mer (PLOM)

Le PLOM 2 (2019-2022) a été signé le 2 décembre 2019, suite à la conférence « logement outre-mer » qui s'est tenue de janvier à juillet 2019. Sa prolongation d'un an, actée au comité de pilotage de mai 2022, permettra à la fois de finir sa mise en oeuvre, d'en faire le bilan et de lancer une réflexion associant les différents partenaires du plan au premier semestre 2023 afin de définir le contenu du futur PLOM 3.

Le PLOM est constitué de mesures opérationnelles dont l'objectif est de lever les freins à la construction et la réhabilitation de logements dans les DROM. Il ne prévoit pas de crédits spécifiques. Il contribue donc indirectement à une meilleure utilisation des crédits affectés à la ligne budgétaire unique du ministère chargé des Outre-mer (MOM), action 1 du programme 123.

e) Le plan chlordécone

Ce plan a été lancé le 24 février 2021 pour un montant total de 92,3 millions d'euros. Les montants consommés au 31 décembre 2021 sont de 8,4 millions en AE et 5,5 millions en CP. Les origines de financement de ce plan sont :

- programme 162 « Interventions territoriales de l'État3 : 31 millions d'euros ;

- programme 204 « Prévention, sécurité sanitaire et offre de soins » du ministère en charge de la santé : 3 millions d'euros ;

- divers programmes du budget général et opérateurs : 18,47 millions d'euros ;

- Assurance maladie : 20 millions d'euros ;

- Plan de relance : 3 millions d'euros ;

- fonds européens et collectivités : 16 millions d'euros.

Origine des financements des plans outre-mer

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat à partir des réponses au questionnaire budgétaire

II. LES CRÉDITS EN PROVENANCE DU « PLAN DE RELANCE » : DES EFFETS RÉELS MALGRÉ UNE CONSOMMATION INFÉRIEURE AUX ATTENTES

A. DES OUVERTURES DE CRÉDITS INFÉRIEURES AU NIVEAU ANNONCÉ ET UNE CONSOMMATION QUI N'EST PAS À LA HAUTEUR DES ATTENTES ET DES BESOINS...

1. Des crédits ouverts inférieurs aux annonces initiales

Lors des premières annonces relatives au plan de relance, les crédits du plan alloués à l'outre-mer devaient atteindre 1,5 milliard d'euros avec des engagements étalés entre 2021 et 2022 et au-delà de 2022, à la marge, pour des projets complexes d'infrastructures ou de rénovation lourde.

Par ailleurs, il avait été annoncé une contribution du « Ségur de la Santé » (financé par France Relance à hauteur de 6 milliards d'euros nationalement) de 1,06 milliard d'euros d'investissement pour les systèmes de santé ultramarins en sus du 1,5 milliard.

Les crédits estimés de France Relance dans les outre-mer devaient, initialement, se répartir comme suit entre les 3 axes prioritaires du plan de relance :

- écologie et transition énergétique : 640 millions d'euros ;

- compétitivité des entreprises : 316 millions d'euros dont 267 millions au titre de la baisse des impôts de production ;

- cohésion des territoires : 535 millions d'euros.

Les rapporteurs s'étaient alors quelque peu étonnés, dans leur rapport budgétaire sur les crédits de la mission « Outre-mer » dans le cadre du projet de loi de finances 2022, de cette répartition qui, bien que théorique, ne reflétait pas la répartition nationale (quasiment un tiers par axe) et ne reflétait pas nécessairement les besoins des outre-mer dans la mesure où la compétitivité des entreprises demeure un enjeu essentiel pour créer de l'emploi et relancer l'investissement.

En juin 2022, 1,39 milliard d'euros a été ouvert en AE pour l'outre-mer dans le cadre du plan de relance soit environ 100 millions de moins que les premières annonces.

En effet, 498 millions d'euros ont été ouverts en AE sur le programme 362 « Ecologie et transition énergétique », 51 millions d'euros sur le programme 363 « Compétitivité des entreprises », auxquels s'ajoutent 267 millions d'euros de baisse des impôts de production (soit un total pour les entreprises de 318 millions d'euros) et 506 millions d'euros sur le programme 364 « Cohésion des territoires ».

Par ailleurs, 70 millions ont été transférés sur le programme 123 de la mission « outre-mer ».

Enfin, alors que la partie du Ségur de la santé allouée à l'outre-mer était initialement de 1,06 milliard d'euros, il semble qu'en juin 2022 seuls 385 millions d'euros ont été ouverts.

Or, il convient de rappeler que le Gouvernement avait précisé que la part des outre-mer dans le plan de relance national devrait être en ligne avec leur poids respectif dans l'économie française. Cependant, la population outre-mer représente 4,2 % de la population totale française et le PIB des DROM et COM représente 2,5 % du PIB total français. Ainsi, avec des crédits à hauteur de 1,5 milliard d'euros soit 1,5 % du plan de relance de 100 milliards, les outre-mer étaient moins bien dotés qu'une stricte répartition proportionnelle l'aurait permis.

L'ouverture réelle des AE accentue encore cette sous dotation par rapport aux critères de poids démographique ou de PIB.

2. Une consommation très en deçà des attentes et des besoins des territoires d'outre-mer

En juin 2022, seulement 38,6 % des AE et 10,1 % des CP ont été consommés concernant les crédits budgétaires hors Ségur de la santé et fiscalité des entreprises (qui correspond à la baisse des impôts de production).

Concernant ces deux catégories, les données relatives aux dépenses ne sont pas disponibles dans Chorus.

Consommation des crédits du Plan de relance en outre-mer
à fin juin 2022

(en millions d'euros)

Source : DGOM en réponse au questionnaire budgétaire

Si ces taux sont décevants, il convient de surcroit de rappeler que les crédits non engagés et consommés pourraient être redéployés. En effet, la logique du plan veut que les crédits attribués le soient sous réserve d'un engagement rapide. Des redéploiements pourraient donc être opérés sur les crédits de mesures peu avancées qui n'engagent pas ni AE ni CP. Les crédits ouverts pour l'outre-mer pourraient donc évoluer à la baisse en cas de consommation insuffisante.

En revanche, il convient de souligner que les AE ouvertes sur le programme 123 (20 millions d'euros pour la LBU, 20 millions d'euros pour les CCT et 30 millions d'euros pour de l'ingénierie) ont été intégralement consommées en 2021.

B. ...MAIS UN EFFET LEVIER IMPORTANT SUR LE FINANCEMENT DES COLLECTIVITÉS

1. Les crédits du plan de relance se sont accompagnés de crédits ouverts par les régions et les fonds européens et ont permis la réalisation de nombreux projets
a) Un levier pour des financements locaux

Au-delà des crédits consacrés par l'État au plan de relance outre-mer il convient de prendre en compte l'effet-levier de ces financements exceptionnels sur les financements apportés par les collectivités locales.

Conformément à la circulaire du Premier Ministre du 23 octobre 2020 relative à la mise en oeuvre territorialisée du plan de relance, des accords de relance ont ainsi été conclus entre décembre 2020 et mai 2021 sur chacun des départements et régions d'outre-mer, avec les montants initiaux suivants :

- En Guadeloupe : 761 millions d'euros comprenant les financements État, Région, européens, ainsi que les mesures économiques d'urgence dans le cadre des accords de relance signés par l'État et la Région le 18 décembre 2020 ;

- En Guyane : 250 millions d'euros comprenant les financements État et Région dans le cadre des accords de relance signés par l'État et la Région le 15 mars 2021 ;

- En Martinique : 375 millions d'euros comprenant les financements État et Région dans le cadre des accords de relance signés par l'État et la Région le 11 février 2021 ;

- À La Réunion : 1 milliard d'euros comprenant les financements État, Région, européens, ainsi que les mesures économiques d'urgence dans le cadre des accords de relance signés par l'État et la Région le 25 mars 2021 ;

- À Mayotte : 602,34 millions d'euros comprenant les financements de l'État, de la Région, européens ainsi que de la Caisse des dépôts et consignations dans le cadre des accords de relance signés par l'État et le département le 27 mai 2021.

b) De nombreux projets indispensables financés

Concernant le volet énergétique, le dispositif « Ma Prime Renov' » a permis de financer des travaux de rénovation. Ainsi, à la Réunion, 4 200 dossiers ont été engagés pour 15 millions de travaux dont 9 millions d'euros de subvention. Le dispositif national a été adapté aux outre-mer avec la possibilité d'installer des chauffe-eau solaires, mesure plébiscitée par les ménages réunionnais. En Martinique, 2 000 foyers ont bénéficié de cette aide pour plus de 1,8 million d'euros.

Le fonds « friches » a permis de réhabiliter des terrains et locaux à l'abandon. En Martinique, huit dossiers ont été retenus en 2021 pour 1,5 million d'euros. A la Réunion, 13 projets pour 9 millions d'euros ont été financés.

La rénovation énergétique des bâtiments de la commune de Bora Bora en Polynésie française a été subventionnée pour 1 143 526 euros.

Enfin, pour faire face au changement climatique, l'État a accordé 9,5 millions d'euros de financement exceptionnel pour la construction d'abris de survie dans l'archipel des Tuamotu en Polynésie française.

Concernant le volet agriculture , l'appel à projets « Agroéquipements » a permis d'accompagner 350 agriculteurs à la Réunion pour environ 7 millions d'euros. En Guyane, sur les 12 millions d'euros du plan de relance, 25 % ont été consacrés à la ruralité avec, par exemple, 9 millions d'euros pour la route de Maripasoula à Papaichton.

L'appel à projets Territoires d'industrie a permis d'octroyer 1,36 million d'euros à 11 entreprises de Guyane et 400 000 euros à une scierie sur l'île de Hiva Oa dans l'archipel des Marquises en Polynésie française pour créer une industrie locale de transformation du bois.

Pour assurer la transition écologique , l'appel à projets verdissement des ports a permis de financer 6,5 millions d'euros sur 19,68 millions d'euros de travaux au Grand port de Martinique afin de développer, notamment, la mise en place de bornes électriques à quai pour les navires porte-conteneurs ou des solutions de production d'énergie électrique.

Enfin, le plan de relance a permis de renforcer de dispositifs spécifiques aux outre-mer déjà existants : le plan séisme Antilles, les CCT, la LBU ou encore l'ingénierie portée par l'AFD (cf. supra ).

2. La persistance de difficultés pour engager les crédits intrinsèques aux territoires d'outre-mer

Cependant, des difficultés intrinsèques aux territoires d'outre-mer expliquent des taux de consommation des crédits du plan de relance relativement faibles qui viennent minorer l'impact de ces crédits sur la relance et/ou les investissements en outre-mer. Il s'agit pour l'essentiel :

- de l'allongement des délais de mise en oeuvre suite à la crise de la COVID-19 qui a été plus marquée, en 2021, dans les territoires ultra-marins par rapport à la métropole ;

- du manque structurel d'ingénierie locale ;

- des difficultés ou réticences des collectivités à financer la part résiduelle des investissements soutenus par France Relance ;

- du nombre important de dispositifs, qui a parfois pu nuire à leur lisibilité ;

- du manque d'adaptation des critères ou seuils des appels à projets (AAP), et ce malgré l'adaptation de quelques critères sur plusieurs AAP, comme les dispositifs « Territoires d'industrie », « MaPrimeRénov' » ou encore « eau et assainissement ».

Par ailleurs, certains territoires ont fait face à des difficultés spécifiques. Ainsi, en Polynésie française, certains dispositifs se sont révélés inadaptés au statut d'autonomie de la Polynésie française. Certains prérequis, comme le SIRENE, n'ont pas permis de mettre en place des conseillers numériques, dispositif pourtant très attendu localement.

En Nouvelle-Calédonie, des phénomènes météorologiques ont généré des difficultés de mise en oeuvre. A titre d'exemple, les opérations de confortement de talus de la zone 14 de la promenade Jules Renard à Dumbea, celles de reprise d'ouvrage d'adduction d'eau potable à Paité ou encore la réhabilitation de certaines routes ont été fortement retardées.

En Guadeloupe , la crise sociale a freiné l'activité économique en raison de blocages des transporteurs et des collectivités et, de fait, les candidatures aux appels à projets. De surcroit, l'inflation liée au fret maritime et aux matières premières a conduit à des réponses aux appels d'offres dépassant les prévisions financières.

De manière générale, les difficultés pour trouver du foncier économique allongent les délais de réalisation des projets sélectionnés de même que la hausse du coût des matériaux et la disponibilité de certaines fournitures font également peser un risque sur la réalisation des projets.

LES MODIFICATIONS CONSIDÉRÉES COMME ADOPTÉES PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE EN APPLICATION DE L'ARTICLE 49, ALINÉA 3, DE LA CONSTITUTION

En première lecture à l'Assemblée nationale, le Gouvernement a retenu, dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, trois articles additionnels rattachés à la présente mission (voir commentaires infra ).

En outre, il a retenu dix amendements de crédits dont un déposé par le Gouvernement.

I. LES AMENDEMENTS PORTANT OUVERTURE DE CRÉDITS SUR LE PROGRAMME 123 « CONDITIONS DE VIE OUTRE-MER »

L'amendement du Gouvernement majore les AE et CP du programme 123 de 2,5 millions d'euros afin de financer la revalorisation de la part de l'État dans le financement du Contrat social afin d'augmenter les allocations ainsi versées d'environ 200 euros par mois. En effet, dans le cadre du « Contrat social » signé entre l'État et Wallis et Futuna depuis 2015, l'État contribue au financement de deux prestations mensuelles accordées aux retraités ayant de faibles ressources : l'allocation aux personnes âgées (APA) et l'allocation aux personnes âgées dépendantes (APAD). Cependant, le Contrat social n'a pas fait l'objet d'échanges approfondis ni de revalorisation depuis 2015. Or, à ce jour, le montant mensuel de l'APA s'élève à 125 euros et celui de l'APAD à moins de 150 euros alors même qu'un habitant sur cinq vit en dessous du seuil de pauvreté dans ce territoire et notamment les personnes de plus de 65 ans. Par conséquent, une revalorisation de l'APA et de l'APAD se révèle nécessaire.

L'amendement II-140 déposé par le député Max Mathiasin majore de 30 millions d'euros les AE et les CP du programme 123 afin de renforcer le dispositif des « Contrats de redressements Outre-mer » (COROM). Ce dispositif permet à l'État d'accompagner sur le long terme, par un appui technique, humain et financier, des communes volontaires, en échange d'engagements leur permettant de revenir à une meilleure santé financière. Intégré au projet de loi de finances pour 2021 par un amendement du Gouvernement, l'enveloppe budgétaire initialement allouée à ce dispositif est de 30 millions d'euros sur trois ans (ouverture de 10 millions d'euros de CP par an pendant trois ans) et permet d'accompagner 9 communes situées en Guadeloupe, Martinique, Guyane, Mayotte ainsi qu'à La Réunion. Cependant cette enveloppe est rapidement apparue insuffisante face au nombre croissant de collectivités d'outre-mer rencontrant des difficultés financières. Le contexte de crise inflationniste devrait, par ailleurs, détériorer la situation de certaines d'entre elle rendant nécessaire un renforcement de ce dispositif.

L'amendement II-311 déposé par les députés Yoann Gillet et Guillaume Vuilletet majore de 500 000 euros les AE et les CP du programme 123 pour permettre le financement, par les collectivités désireuses de mener un projet d'aménagement impliquant une assise foncière en indivision, des recherches afin de déterminer le nombre et l'identité des indivisaires ce qui permettra de sécuriser l'action des notaires et d'accélérer la résolution des blocages successoraux.

L'amendement II-1006 déposé par le député Max Mathiasin et plusieurs de ses collègues majore les AE et CP du programme 123 de 2 millions d'euros afin d'abonder le fond de secours (FSOM), dispositif visant à indemniser les sinistrés ultramarins suite à un événement naturel d'une intensité exceptionnelle. Au vu de la multiplication et de la gravité des catastrophes naturelles qui ont touché récemment les territoires d'outre-mer, il apparait nécessaire d'augmenter les crédits d'aide d'urgence, notamment pour l'indemnisation des biens des particuliers non assurés ou des dégâts provoqués par une cause non reconnue dans l'arrêté de reconnaissance de l'état de catastrophe naturelle, comme les glissements de terrain déclenchés par l'ouragan Fiona au mois de septembre dernier en Guadeloupe.

L'amendement II-1550 déposé par le député Stéphane Lenormand et plusieurs de ses collègues majore de 1 million d'euros les AE et CP du programme 123 pour abonder les moyens alloués à la continuité territoriale afin de permettre une prise en charge des frais de transport et des indemnités forfaitaires journalières de résidence des parents résidant dans un territoire ultramarin et devant se rendre dans l'hexagone pour y faire soigner leur enfant atteint d'une maladie incurable en l'absence de structure ou spécialiste sur place.

L'amendement II-1582 déposé par le député Frédéric Maillot et plusieurs de ses collègues majore de 5 millions d'euros les AE et CP du programme 123 pour abonder les moyens alloués à la continuité territoriale afin de garantir réellement le principe de continuité territoriale dans un contexte inflationniste qui se caractérise par une hausse des prix des billets d'avion entre la métropole et les territoires d'outre-mer d'environ 20 % sur un an.

Au total les crédits du programme sont majorés de 41 millions d'euros.

II. LES AMENDEMENTS PORTANT OUVERTURE DE CRÉDITS SUR LE PROGRAMME 138 « EMPLOI OUTRE-MER »

L'amendement II-11 déposé par le député Philippe Naillet et plusieurs de ses collègues majore de 10 millions d'euros en AE et CP les crédits du programme 138 afin de créer une aide budgétaire pour répondre de manière urgente aux surcoûts d'approvisionnement en énergie des entreprises industrielles et de services des DROM. En effet, le décret n° 2022-967 du 1 er juillet 2022, modifié par le décret n° 2022-1250 du 23 septembre 2022, instituant une aide visant à compenser la hausse des coûts d'approvisionnement de gaz naturel et d'électricité des entreprises particulièrement affectées par les conséquences économiques et financières de la guerre en Ukraine présente des critères trop restrictifs qui, en l'état, ne répondent pas à la situation préoccupante des entreprises ultramarines industrielles ou de service notamment dans la mesure où le gazole non routier (GNR) n'est pas intégré dans le périmètre de l'aide. D'autre part, le critère du doublement du prix du gaz et/ou de l'électricité sur la période éligible par rapport à une moyenne de prix sur l'année 2021 ne permet pas d'intégrer des entreprises pourtant très énergétivores qui subissent des augmentations de leur facture énergétique à date, certes moindres que le doublement exigé, mais suffisamment conséquentes en termes d'impact sur le chiffre d'affaire ou sur la marge pour mettre en péril leur modèle économique. C'est notamment le cas des entreprises de l'eau de la Réunion.

L'amendement II-1507 déposé par le député Jiovanny William et plusieurs de ses collègues majore de 45 000 euros en AE et CP les crédits du programme 138 afin de permettre l'accueil d'apprentis au sein du service militaire adapté (SMA) en 2023.

Au total les crédits du programme sont majorés de 10 045 000 euros.

III. LES AMENDEMENTS PORTANT CRÉATION DE NOUVEAUX PROGRAMMES AU SEIN DE LA MISSION « OUTRE-MER »

L'amendement II-768 déposé par le député Jean-Hugues Ratenon et plusieurs de ses collègues créé un nouveau programme « Centres d'examen des concours de la fonction publique dans chaque collectivité ultra-marine » doté d'un million d'euros en AE et CP. Cet amendement a pour objectif de permettre aux citoyens ultra-marins de passer les concours de la fonction publique dans leur territoire respectif en créant un centre d'examen dans chaque territoire d'outre-mer et en mettant en place les conditions pratiques afin de garantir une égalité de traitement pour le déroulement des épreuves.

L'amendement II-776 déposé par le député Jean-Philippe Nilor et plusieurs de ses collègues créé un nouveau programme « Extension du passeport mobilité aux personnes engagées dans le dispositif de validation des acquis » doté d'un millions d'euros en AE et CP. Ce nouveau dispositif a pour objectif de compléter des dispositifs existants (le passeport mobilité formation (PMF) ou le passeport mobilité étude (PME)) en créant un nouveau dispositif qui serait axé sur les personnes en recherche d'emploi et dans un démarche d'insertion professionnelle par validation de leurs qualifications professionnelles.

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

ARTICLE 44 quater (nouveau)
Remise d'un rapport au Parlement établissant un bilan annuel de l'expérimentation des contrats de redressement en outre-mer

. Le présent article prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport établissant un bilan annuel de l'expérimentation des contrats de redressement en outre-mer. Ce rapport présente de manière détaillée la pertinence du pilotage financier proposé aux collectivités signataires du dispositif.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LA CRÉATION D'UN DISPOSITIF DE « CONTRATS DE REDRESSEMENT EN OUTRE-MER » EN LOI DE FINANCES INITIALE POUR 2021

A. UN DISPOSITIF DESTINÉ À ASSAINIR LA SITUATION FINANCIÈRE DES COLLECTIVITÉS ULTRA MARINES EN DIFFICULTÉ

1. Les modalités de sélection des communes

Ce dispositif introduit par la loi de finances initiale pour 2021 vise à accompagner les communes ultra marines faisant face à des difficultés financières.

Sont susceptibles de bénéficier du dispositif les communes en grave difficulté financière, ayant occasionné des procédures de contrôle budgétaire et de règlement d'office du budget, et dont le retour à l'équilibre ne peut être raisonnablement envisagé que sur plusieurs exercices.

Ces dernières doivent alors adresser une demande qui sera instruite par les préfets. La sélection définitive est ensuite réalisée par le ministre des outre-mer sur la base des propositions motivées transmises par les préfets.

2. La signature d'un contrat

La signature d'un contrat d'accompagnement est subordonnée à l'établissement d'un diagnostic partagé sur l'état des dépenses et des recettes sur l'exercice en cours et s'inscrit dans une perspective à trois ans.

La trajectoire présentée par le maire au moment de sa candidature doit indiquer des montants cibles précis, en cohérence avec les préconisations de la chambre régionale des comptes. Elle est fondée sur une base de départ qui est celle des comptes de gestion 2019. Il s'agit de prendre en compte l'ensemble des budgets de la collectivité (budgets annexes, et le cas échéant, les liens avec les organismes périphériques).

En ce qui concerne la section d'investissement, un programme pluriannuel des investissements (PPI), réaliste au regard des capacités de financement de la commune, devra également être transmis.

Cette trajectoire pluriannuelle d'évolution de la section de fonctionnement et cette programmation pluriannuelle des investissements ont vocation à être annexées au contrat.

B. UN DISPOSITIF CARACTÉRISÉ PAR DES ENGAGEMENTS RÉCIPROQUES DES COMMUNES SÉLECTIONNÉES ET DE L'ÉTAT

1. Les engagements des communes, condition nécessaire pour percevoir une aide financière

Les engagements de la commune doivent être définis dans le contrat avec un suivi régulier de leur exécution.

Le contrat renvoie à un tableau de bord qui comporte des indicateurs financiers chiffrés précis (évolution des dépenses réelles de fonctionnement) et des objectifs d'optimisation de la gestion (délibération sur la révision du temps de travail ou du régime indemnitaire ; optimisation de la chaîne de la dépense ; respect des calendriers budgétaires et comptables ; travaux de fiabilisation de l'actif pour améliorer la qualité comptable etc...).

Un comité national évalue ensuite la démarche de redressement qui justifie l'octroi d'une dotation en fonction de différents indicateurs, notamment du respect de la trajectoire budgétaire pluriannuelle ainsi que des réformes structurelles déjà engagées la première année du contrat.

2. Les engagements de l'État

Le contrat prévoit la mise à disposition de la collectivité d'une assistance technique qui aura la charge :

- d'accompagner la collectivité dans l'établissement de son analyse financière rétrospective et prospective, dans l'élaboration du plan de redressement et dans les échanges avec l'État pour son adoption sur une base acceptée par les deux parties ;

- de proposer une feuille de route des chantiers prioritaires de la collectivité conformément aux objectifs du contrat. À chacun de ces chantiers doit être associé un gain budgétaire réparti sur chaque exercice du contrat ;

- de proposer le cadre d'une programmation pluriannuelle des investissements (PPI) qui sera suivie sur l'ensemble de la durée du contrat ;

- de fiabiliser, en lien avec cette feuille de route et la PPI, une trajectoire financière prospective portant sur la durée du contrat pour sa durée de validité initiale de 3 ans ;

- de suivre, au regard de la trajectoire financière prospective, l'exécution budgétaire et d'en présenter les caractéristiques lors de chacun des comités de suivi locaux ;

- de produire tous les outils de suivi et de gestion (tableaux de bord...) indispensables au pilotage de la collectivité comme à la supervision par l'État des actions mise en oeuvre.

Par ailleurs, l'État s'engage à verser à la collectivité un soutien budgétaire exceptionnel. En effet, les communes sélectionnées se caractérisant par le fait que le retour à l'équilibre n'est possible que sur plusieurs exercices, l'État pourra décider d'octroyer à la collectivité concernée une subvention budgétaire exceptionnelle.

Celle-ci est prévue au contrat initial et versée chaque année au plus tard en septembre de l'exercice concerné, après décision du comité de suivi national, qui peut en suspendre le versement ou mettre fin au contrat si les engagements de la collectivité ne sont pas respectés.

C. LES MONTANT INITIAUX PRÉVUS DANS LES COROM ET LA SÉLECTION DES COMMUNES CONTRACTANTES

1. Une enveloppe initiale de 30 millions d'euros

La loi de finances initiale pour 2021 a ouvert, sur l'action 6 du programme 123, 30 millions d'euros en AE pour le dispositif COROM, les CP étant ouverts à hauteur de 10 millions d'euros par an pendant trois ans.

Les derniers CP sont ouverts au titre de l'année 2023.

2. Les communes sélectionnées

À ce jour, neuf communes ont été sélectionnées pour intégrer ce dispositif de soutien expérimental.

Il s'agit de Sada à Mayotte, Saint-Benoit à la Réunion, Cayenne et Iracoubo en Guyane, Pointe-à-Pitre, Saint-François et Basse-Terre en Guadeloupe et Fort-de-France et Saint-Pierre à la Martinique.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA DEMANDE D'UN RAPPORT SUR LE DISPOSITIF COROM AFIN D'ÉTABLIR UN BILAN DE SES EFFETS

Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, reprend un amendement déposé par le député Elie Califer et plusieurs de ses collègues prévoyant que le Gouvernement remet au Parlement chaque année, avant le 1 er septembre, un rapport donnant lieu à un bilan annuel de l'expérimentation des contrats de redressement en Outre-mer.

Ce rapport présente de manière détaillée la pertinence du pilotage financier proposé aux collectivités signataires du dispositif.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UN RAPPORT UTILE POUR MIEUX SUIVRE LES EFFETS DES CONTRATS DE REDRESSEMENT SUR LA SITUATION FINANCIÈRE DES COMMUNES CONTRACTANTES

En l'état actuel du dispositif, les derniers CP seront engagés en 2023 et concernent les neufs communes sélectionnées.

Le rapport pourra utilement présenter les effets de ces contrats sur la situation financière de chacune des communes contractantes et le montant des soutiens exceptionnels perçus.

Cependant, un rapport annuel , au-delà de 2024, n'a de sens que si les crédits ouverts au titre du dispositif COROM sont reconduits.

C'est d'ailleurs le sens de l'amendement II-140, retenu dans le texte sur lequel le Gouvernement a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, qui prévoit une ouverture de 30 millions d'euros en AE et CP supplémentaires.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 44 quinquies (nouveau)
Remise d'un rapport au Parlement sur l'évaluation des ressources affectées par le budget de l'État à l'aide aux collectivités territoriales pour la distribution d'eau potable et l'entretien des systèmes d'assainissement dans chaque département et région d'outre-mer

. Le présent article prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement d'un rapport évaluant des ressources affectées par le budget de l'État à l'aide aux collectivités territoriales pour la distribution d'eau potable et l'entretien des systèmes d'assainissement dans chaque département et région d'outre-mer.

La commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

I. LE DROIT EXISTANT : LA CRÉATION D'UN PLAN EAU POUR LES DÉPARTEMENTS D'OUTRE-MER AFIN D'AMÉLIORER LES CONDITIONS D'ACCÈS À CE BIEN DE PREMIÈRE NÉCESSITÉ

A. DES PROBLÉMATIQUES LIÉES À L'EAU ET À L'ASSAINISSEMENT EN OUTRE-MER PERSISTANTES MALGRÉ LA CRÉATION DU PLAN « EAU DOM »

1. La mise en place d'un plan d'action spécifique à l'eau

Par lettre conjointe en date du 14 mai 2014, les ministres de l'Écologie et des Outre-mer ont demandé aux vice-présidents du conseil général de l'alimentation, de l'agriculture et des espaces ruraux et du conseil général de l'environnement et du développement durable et au chef de service de l'inspection générale de l'administration de constituer une mission conjointe pour conduire l'élaboration d'un plan d'actions pour l'eau dans les territoires d'outremer, dont la nécessité avait été actée lors de la Conférence environnementale de 2013.

Faisant suite à cette mission, un rapport détaillant les « Propositions pour un plan d'action pour l'eau dans les départements et régions d'outre-mer et à Saint-Martin » a ainsi été produit en juin 2015.

Établi sur ces bases, le plan d'action pour les services d'eau potable et d'assainissement en Guadeloupe, Guyane, Martinique, à la Réunion, Mayotte et Saint-Martin, dit plan "Eau DOM" a été lancé le 29 juin 2016 prévoyant que toutes les collectivités d'outre-mer compétentes pour la gestion de l'eau potable et de l'assainissement devaient signer un contrat de progrès avant le 31 décembre 2018, condition préalable au maintien des crédits d'investissement alloués par l'État.

2. Modalités de fonctionnement du plan « Eau DOM »

Prévu pour une durée de 10 ans, le plan d'actions est mis en oeuvre par période de contractualisation de 5 ans.

La Conférence régionale des acteurs lance tous les 4 mois des appels à candidatures auprès des collectivités compétentes en eau et assainissement. Les collectivités retenues se voient proposer un nouveau mode de contractualisation. Le contrat est élaboré à l'appui d'un diagnostic partagé entre la Conférence régionale et la collectivité. Il lie les investissements à des objectifs d'amélioration des performances techniques et financières évalués par des indicateurs.

3. Un retard structurel persistant en équipements nécessaire au traitement, à l'assainissement et à l'adduction d'eau.

La plupart des territoires d'outre-mer présentent un retard structurel en équipements nécessaires au traitement, à l'assainissement et à l'adduction d'eau . Malgré le plan « Eau Dom », la situation en 2020 était encore préoccupante dans de nombreux territoires outre-mer.

Ainsi, d'après le rapport du Conseil économique social et environnemental (CESE) relatif à « l'accès aux services publics dans les outre-mer » 45 ( * ) :

- à Mayotte 46 ( * ) et en Guyane, un quart de la population ne dispose pas d'eau potable à son domicile ou à proximité. Le traitement des eaux usées est parfois embryonnaire et toutes les communes ne sont pas dotées d'un réseau d'assainissement ;

- en Guyane , la contamination de l'eau des fleuves au mercure liée à l'orpaillage illégal est régulièrement constatée. Une étude de 2019 de l'institut de recherche pour le développement (IRD) fait état de l'imprégnation des poissons et des populations ;

- à La Réunion , 52 % de la population est alimentée par des réseaux dont la sécurité sanitaire est insuffisante ;

- en Martinique , le prix de l'eau par mètre cube est le plus élevé de France avec un prix d'environ 5,4 euros le mètre cube, en grande partie à cause des difficultés d'assainissement. En effet, le prix au mètre cube se compose d'une partie pour l'eau potable et d'une partie pour l'assainissement. En métropole, et selon les régions, les prix moyens totaux varient entre 2,2 et 4,8 euros 47 ( * ) ;

- en Guadeloupe , certaines localités ne sont pas raccordées à un réseau d'eau potable, des rotations dans la distribution d'eau étant alors mises en place pour réguler l'approvisionnement. 60 % de l'eau est perdue à cause d'un entretien lacunaire des réseaux de distribution. Les deux tiers des stations d'épuration ne sont pas conformes et seule la moitié des foyers vit dans une zone de raccordement au tout-à-l'égout. Les réseaux de collecte des eaux usées ne sont pas étanches avec des rejets sans traitement dans le milieu naturel.

B. LE FINANCEMENT DU PLAN « EAU DOM » : UNE MULTITUDE DE SOURCES DE FINANCEMENT QUI REND DIFFICILE UNE VISION EXHAUSTIVE

1. Des financements en provenance de la mission budgétaire « Outre-mer »

Le ministère chargé des outre-mer cofinance, dans le cadre du programme 123 , l'élaboration et la réalisation des contrats de progrès.

Ainsi, depuis 2016, le ministère a engagé 126 millions d'euros et consommé, au 31 juillet 2022, 72,5 millions d'euros à partir des crédits de la mission « Outre-mer » :

- FEI : 58 millions d'euros en AE entre 2016 et 2022 et 39 millions d'euros en CP au 31 juillet 2022 ;

- CPER/CDEV : 43 millions d'euros en AE sur la période 2016-2022 et 28,5 millions d'euros en CP au 31 juillet 2022 ;

- CCT : 25 millions d'euros en AE entre 2016 et 2022 et 5 millions d'euros en CP au 31 juillet 2022.

2. Des financements complémentaires sous forme de subventions ou de prêts

D'autres partenaires cofinancent des opérations d'investissement en eau et assainissement dans le cadre de ce plan :

- le ministère de la Transition écologique et de la Cohésion des Territoires (MTECT) : 5 millions d'euros en AE entre 2016 et 2022 et 3,1 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021 ;

- l'Office français de la biodiversité (OFB ) qui pilote le dispositif de solidarité interbassins (117 millions en AE sur la période 2016-2022 et 73 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021) et les crédits du Plan de relance alloués au plan Eau (47 millions d'euros en AE sur la période 2016-2022 et 12 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021) ;

- l'Agence française de développement (AFD) qui octroie des prêts long terme bonifiés par le ministère des outre-mer (173 millions d'euros depuis 2016, ayant mobilisé 11,9 millions d'euros de bonifications), des préfinancements de subventions via des prêts court terme (48 millions d'euros depuis 2016) et qui subventionne des études, en direct et via le fonds outre-mer à partir de 2020 (7,4 millions d'euros en AE pour la période 2016-2022 et 4,5 millions d'euros en CP au 31 décembre 2021) ;

- la Banque des territoires qui octroie des prêts pour un montant total de 114 millions d'euros depuis 2016.

Au total, depuis 2016 et à date, ce sont 625 millions d'euros se décomposant en 290 millions d'euros de subventions et 335 millions d'euros de prêts, qui ont été mis à disposition des collectivités ultra-marines par l'État ou ses opérateurs bancaires sur les thématiques de l'adduction en eau potable et de l'assainissement.

De surcroit, le projet de loi de finances pour 2023 a prévu un effort spécifique en faveur de l'alimentation en eau potable en Guadeloupe pour un montant de 10 millions d'euros en AE et CP. L'aide sera apportée au syndicat gestionnaire au vu de ses engagements d'amélioration de gestion.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : LA DEMANDE D'UN RAPPORT SUR LES CRÉDITS ALLOUÉS PAR L'ÉTAT À L'AIDE POUR LA DISTRIBUTION D'EAU POTABLE ET L'ENTRETIEN DES SYSTÈMES D'ASSAINISSEMENT

Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, reprend un amendement déposé par le député Max Mathiasin et plusieurs de ses collègues prévoyant que le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1 er juillet 2023 un rapport sur l'évaluation des ressources affectées par le budget de l'État à l'aide aux collectivités territoriales pour la distribution d'eau potable et l'entretien des systèmes d'assainissement dans chaque département et région d'outre-mer.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UN RAPPORT UTILE POUR MIEUX APPRÉHENDER L'EXHAUSTIVITÉ DES MOYENS FINANCIERS ALLOUÉS AUX PROBLÉMATIQUES DE L'EAU DANS LES DÉPARTEMENTS D'OUTRE--MER

Les financements du plan « Eau DOM » sont donc nombreux et de source variée. Il en résulte qu'il est difficile d'avoir une vision exhaustive de l'ensemble de ces financements et, surtout, de leur répartition par territoire.

De même, aucun document unique et centralisé n'existe, permettant de faire le bilan complet des opérations menées et des conséquences pour les populations.

Le rapport demandé par le présent article pourra donc utilement présenter les moyens alloués par l'État dans le cadre de ce plan et notamment une situation détaillée par territoire bénéficiaire.

Une telle évaluation apparait nécessaire pour juger de l'efficience de ce plan et de son devenir de son existence initialement prévue pour dix ans.

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article sans modification.

ARTICLE 44 sexies (nouveau)
Remise d'un rapport au Parlement relatif aux crédits budgétaires dédiés à l'aide au fret au sein de la mission « outre-mer »

. Le présent article prévoit la remise par le Gouvernement au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la LFI pour 2023, d'un rapport relatif aux crédits budgétaires dédiés à l'aide au fret au sein de la mission « outre-mer ». Ce rapport doit notamment présenter une liste de solutions à mettre en oeuvre afin de faciliter l'accès à cette aide et permettre la consommation totale des crédits.

Cependant, ce délai de trois mois parait un peu court. il est donc proposé de le porter à six mois.

La commission des finances propose d'adopter cet article ainsi modifié.

I. LE DROIT EXISTANT : UNE AIDE AU FRET AFIN DE SOUTENIR LE DÉVELOPPEMENT ÉCONOMIQUE RÉGIONAL

A. UNE AIDE DESTINÉE AUX ENTREPRISES POUR FAIRE FACE AUX SURCOÛTS DES FRAIS DE TRANSPORT

1. L'instauration d'une aide au fret en 2009

L'article 24 de la loi n° 2009-594 du 27 mai 2009 pour le développement économique des outre-mer (LODEOM) a instauré une aide au fret destinée à couvrir les surcoûts de transport de marchandises au profit d'entreprises situées dans les DROM, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin, Saint-Pierre-et-Miquelon et à Wallis-et Futuna.

En permettant la compensation de ces surcoûts liés à l'éloignement géographique des territoires ultramarins, l'aide au fret vise à encourager le développement endogène des collectivités concernées, favoriser la production locale et faire baisser les prix pour les consommateurs.

2. La base éligible pour le calcul des aides

Le décret n°2017-1476 du 16 octobre 2017 prévoit que l'État apporte aux entreprises situées dans les collectivités régies par l'article 73 de la Constitution, à Saint-Pierre-et-Miquelon, à Saint-Barthélemy, à Saint-Martin et à Wallis-et-Futuna une aide ayant pour objectif de soutenir le développement économique régional en accordant une compensation au surcoût de transport de marchandises produites dans les DOM et à Saint-Martin à l'intérieur des frontières nationales, au surcoût de transport des produits primaires de leur lieu de production au lieu de transformation et aux coûts liés au transport de déchets dangereux qui ne peuvent être traités ou éliminés dans leurs territoires respectifs de production.

La base éligible de l'aide est égale au coût prévisionnel annuel hors taxes des dépenses de transport le plus économique, maritime ou aérien, incluant les assurances, les frais de manutention et de stockage temporaire avant enlèvement et, s'agissant des déchets, les coûts spécifiques de conditionnement et de contrôles de sécurité d'affrètement :

- des matières premières ou produits importés par l'entreprise depuis l'Union européenne ou les pays tiers ou acheminés depuis les collectivités territoriales mentionnées à l'article 1 er pour y entrer dans un cycle de production ;

- des matières premières ou produits issus de la production locale expédiés vers l'Union européenne, y compris vers ces collectivités territoriales ;

- des déchets importés de l'Union européenne, y compris depuis ces collectivités territoriales ou des pays tiers, aux fins de traitement ;

- des déchets expédiés vers l'Union européenne, y compris vers ces collectivités territoriales, aux fins de traitement.

3. Une aide plafonnée et versée sur pièces justificatives

Cette aide au fret finance une partie des dépenses de transport engagées par les entreprises sur justification de leurs frais effectifs.

Le montant de l'aide apportée par l'État ne peut dépasser 25 % de la base éligible, lorsque l'entreprise bénéficie d'une aide financière dans le cadre de l'allocation additionnelle spécifique de compensation des surcoûts liés aux handicaps des régions ultrapériphériques prévue par le Fonds européen de développement économique régional ou d'une aide des collectivités territoriales ou de leurs groupements.

En l'absence de ces aides, le montant de l'aide apportée par l'État peut être porté à 50 % de la base éligible.

L'ensemble de ces aides financières ne peut avoir pour effet de porter le niveau de compensation des coûts de transport au-delà de 100 % de la base éligible.

B. DES BESOINS ET UN NIVEAU DE CONSOMMATION DIFFICILES À ESTIMER

1. Une sous consommation constatée en 2021

En 2021, 4,1 millions en AE et 2,4 millions en CP ont été consacrés au financement de cette mesure pour des montants ouverts en LFI de 7,8 millions d'euros en AE et 6,5 millions d'euros en CP.

Plusieurs phénomènes expliquent cette situation :

- la crise sanitaire, qui a eu pour conséquence le dépôt tardif de dossiers de subventions voire leur report sur 2022 ;

- les mouvements sociaux majeurs dans plusieurs territoires conduisant à la fermeture de plusieurs services administratifs ;

- le processus d'instruction de l'aide au fret qui reste très largement assumé par les autorités de gestion du FEDER. En raison de sa longueur (2 ans et demi en moyenne) et de sa complexité, il est difficile à appréhender tant pour les entreprises que pour les autorités qui en ont la charge.

Toutefois, malgré ces aléas de gestion, 184 subventions ont été attribuées à 98 entreprises. La subvention moyenne s'est établie à 22 484 euros (contre 36 746 euros en 2019 et 32 233 euros en 2020), montant en diminution de 30 % par rapport à 2020.

Cependant, dans l'ensemble des territoires étudiés, seule une certaine typologie d'entreprises du tissu productif a accès à l'aide au fret. Les TPE-PME et les entreprises artisanales peinent à la mobiliser. En effet, les subventions versées en 2021 bénéficient toujours majoritairement aux entreprises de l'industrie manufacturière (66%), tant par le nombre d'établissements bénéficiaires du dispositif que par les montants consacrés. Les autres secteurs bénéficiaires sont, tout comme en 2020 la « production et distribution d'eau ; assainissement, gestion des déchets et dépollution » ainsi que la construction. Ces deux secteurs représentent au total 31 % des subventions octroyées.

Enfin, à noter que l'année 2021 a été marquée par l'étude commanditée par le ministère des outre-mer visant à évaluer la pertinence, la cohérence, l'utilité et l'efficience de l'aide au fret.

L'analyse a mis en évidence la pertinence globale du dispositif national d'aide au fret pour répondre aux besoins des tissus productifs ultramarins. Une meilleure articulation avec l'aide européenne et un meilleur pilotage de ce dispositif par les services déconcentrés de l'État est cependant nécessaire pour en maximiser les impacts.

2. Une volatilité des coûts des transports qui rend difficiles les prévisions de consommation en 2022 et 2023

Si les coûts des transports diminuent légèrement en 2022 par rapport à 2021, ils demeurent à un niveau exceptionnellement haut et leur évolution en 2023 reste difficile à estimer quant au point d'atterrissage de cette baisse.

Évolution de l'indice mondial du fret par conteneur
entre janvier 2017 et aout 2022

(en dollars)

Source : Freightos

En 2022, les crédits ouverts en LFI s'élèvent à 8,3 millions d'euros en AE et 7 millions d'euros en CP. La consommation constatée au 6 octobre 2022 s'établit déjà à 9,4 millions d'euros en AE mais à seulement 1,5 million d'euros en CP.

Pour 2023, les crédits ouverts en PLF sont évalués à 8,3 millions d'euros en AE et 5,85 millions d'euros en CP.

II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ : UN RAPPORT SUR LES CRÉDITS BUDGÉTAIRES DÉDIÉS À L'AIDE AU FRET

Le présent article, retenu par le Gouvernement dans l'élaboration du texte sur lequel il a engagé sa responsabilité en application de l'article 49 alinéa 3 de la Constitution, reprend un amendement déposé par le député Philippe Naillet et plusieurs de ses collègues prévoyant que le Gouvernement remet au Parlement, dans un délai de trois mois à compter de la promulgation de la LFI pour 2023, un rapport relatif aux crédits budgétaires dédiés à l'aide au fret au sein de la mission outre-mer.

Ce rapport devra présenter une liste de solutions à mettre en oeuvre afin de faciliter l'accès à cette aide, notamment en permettant une consommation totale des crédits.

III. LA POSITION DE LA COMMISSION DES FINANCES : UN RAPPORT UTILE POUR MIEUX COMPRENDRE LA SOUS-CONSOMMATION DE L'AIDE AU FRET

L'aide au fret est un dispositif de guichet et intervient dans de nombreux territoires en complément d'aides européennes attribuées par la région. Les dépenses évoluent donc en fonction des dossiers déposés, des factures transmises et des évolutions des prix mondiaux des transports de marchandises.

Chaque année, des AE sont engagées mais non consommées et nécessite des retraitements ex-post d'engagements juridiques anciens non consommés.

Dans ce contexte, un rapport pourrait s'avérer pertinent afin de comprendre cette situation et les difficultés relatives à la consommation des CP, notamment dans un contexte où l'aide au fret peut constituer un soutien important pour les entreprises qui rencontrent des difficultés.

Cependant, un délai de trois mois pour réaliser un rapport parait un peu court. C'est pourquoi il est proposé de porter ce délai à six mois à compter de la promulgation de la LFI pour 2023 par l'amendement II-19 .

Décision de la commission : la commission des finances propose d'adopter cet article ainsi modifié.

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 16 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a procédé à l'examen du rapport de MM. Georges Patient et Teva Rohfritsch, rapporteurs spéciaux, sur la mission « Outre-mer ».

M. Claude Raynal , président . - Nous passons à l'examen des crédits de la mission « Outre-mer » et des articles 44 quater à 44 sexies .

M. Georges Patient , rapporteur spécial de la mission « Outre-mer » . - La mission « Outre-mer » a pour principal objectif le rattrapage des écarts persistants entre l'outre-mer et la métropole et la convergence des niveaux de vie dans le domaine socio-économique.

Les crédits présentés dans le projet de loi de finances (PLF) pour 2023 s'élèvent à 2 701 millions d'euros en autorisations d'engagement (AE) et 2 524,9 millions d'euros en crédits de paiement (CP), soit une hausse de 1,7 % en AE et de 1,3 % en CP par rapport à la loi de finances initiale (LFI) de 2022.

Cependant, cette hausse en valeur signifie une contraction des crédits de la mission en volume, qui s'établissent à 2 589,7 millions d'euros en AE et à 2 420,8 millions d'euros en CP, soit une baisse de plus de 100 millions d'euros en AE et CP par rapport à 2022.

En réintégrant le bandeau « maladie » transféré vers la sécurité sociale à compter de 2023, les crédits, corrigés de l'inflation, enregistrent une hausse de 187,6 millions d'euros en AE et de 181,6 millions d'euros en CP. Cette hausse résulte cependant du seul effet mécanique de l'action n° 1 du programme 138 relatif aux exonérations des charges sociales des entreprises qui sont des dépenses de guichet.

Ces précisions méthodologiques et de périmètre étant faites, je commencerai par une présentation rapide des crédits du programme 123, qui concerne les conditions de vie outre-mer.

Entre la loi de finances initiale pour 2022 et le PLF 2023, ce programme enregistre une hausse de 60,9 millions d'euros et 43,4 millions d'euros en CP. Plusieurs mesures nouvelles, pour un montant total de 35,1 millions d'euros en AE et 23,1 millions d'euros en CP, expliquent en partie cette hausse : une hausse de 10 millions d'euros en AE et 4 millions d'euros en CP pour le renforcement de l'assistance technique auprès des collectivités ; un effort spécifique en faveur de l'alimentation en eau potable en Guadeloupe pour un montant de 10 millions d'euros ; des dispositifs de garantie pour les petites et moyennes entreprises et de subventions pour la lutte contre le changement climatique dans le Pacifique seront développés par la société de gestion des fonds de garantie d'outre-mer pour un montant de 7 millions d'euros en AE et 1 million d'euros en CP ; 3 millions d'euros en AE et CP seront ouverts pour participer à la diversification agricole ; un soutien de 5,1 millions d'euros en AE et CP sera attribué pour la réforme de la fonction publique territoriale à Wallis-et-Futuna.

Si l'on peut se réjouir de ces augmentations de crédits, il parait cependant nécessaire de souligner que les crédits ouverts au titre de la ligne budgétaire unique (LBU) ne permettent pas de répondre aux besoins dans ce domaine, notamment concernant la résorption de l'habitat insalubre. C'est pourquoi nous vous proposons un amendement visant à augmenter de 4 millions d'euros en AE et CP les crédits alloués à cette résorption. Cette ouverture se justifie d'autant plus que les AE et CP ouverts les dernières années ont été intégralement consommés.

De surcroit, malgré une augmentation des crédits alloués aux dispositifs de soutien exceptionnel aux collectivités, les crédits ouverts pour les contrats de redressement en outre-mer (Corom) restent stables dans le PLF initial. Ils ont été augmentés de 30 millions d'euros à l'Assemblée nationale. Cependant, dans ce contexte économique qui accentue la dégradation de la situation financière des collectivités d'outre-mer, nous estimons que ce dispositif pourrait utilement être renforcé pour s'étendre à un nombre plus important de collectivités. Or, les ouvertures de crédits pour ces contrats adoptées à l'Assemblée nationale, et retenues dans le texte du Gouvernement, seraient destinées, à hauteur de 20 millions d'euros, au syndicat de l'eau de Guadeloupe. Il nous parait donc nécessaire d'ouvrir 20 millions d'euros en AE et CP pour les Corom. C'est le sens de l'amendement que nous vous proposons.

M. Teva Rohfritsch , rapporteur spécial de la mission « Outre-mer » . - On peut s'interroger sur la consommation des crédits des contrats de transformation et de convergence. Gageons que leur prolongation d'une année permettra d'engager le plus de crédits possible. En revanche, concernant spécifiquement le contrat de développement et de transformation de la Polynésie, signé en 2021 et couvrant la période 2021-2023, le maintien du rythme d'engagement des AE pourrait permettre une consommation intégrale d'ici à la fin du contrat.

Concernant le programme 138 « Emploi outre-mer », les crédits enregistrent une baisse de 15,6 millions d'euros en AE et de 11,2 millions d'euros en CP entre la LFI 2022 et le PLF 2023.

Dans le détail, les crédits alloués aux exonérations de charges enregistrent une baisse apparente de 61,9 millions d'euros, qui résulte de la mise en oeuvre d'une mesure de périmètre visant à transférer le « bandeau maladie » vers la sécurité sociale pour un montant de 264,53 millions d'euros sans modification du dispositif sur le fond.

À périmètre constant, les crédits prévus pour 2023 au titre de la compensation des exonérations de cotisations sont en hausse de plus de 202,7 millions d'euros. Cependant, dans un contexte économique incertain venant accroître les difficultés rencontrées par certaines entreprises, il est délicat, à ce stade, d'avoir une prévision fine de ce que pourrait être le besoin réel en 2023 en raison des éventuelles conséquences sur l'emploi et les salaires de l'inflation. Nous nous montrerons donc attentifs, en cours d'année, au niveau de consommation de ces crédits.

Par ailleurs, les crédits alloués au service militaire adapté (SMA) enregistrent une hausse de 44,6 millions d'euros en AE et 50,4 millions d'euros en CP, qui s'explique par la création de deux nouvelles compagnies, en Polynésie et à Mayotte, et par le déploiement, à tous les territoires, du SMA 2025+, qui a notamment pour objectif d'ouvrir le dispositif à de nouveaux publics.

Ce dispositif, qui a démontré son efficacité et son extension à des mineurs ou des mères célibataires, permettra, sans aucun doute, une meilleure professionnalisation et intégration de ces personnes. Les recrutements sont cependant freinés depuis quelques années par plusieurs phénomènes : décalage de croissance démographique entre les différents territoires, crise sanitaire... Les crédits supplémentaires, en finançant certains investissements sur les lieux d'accueil, permettront d'apporter une première solution au décalage démographique entre les territoires. Nous devrons, toutefois, être vigilants sur les taux d'insertion des prochaines années dans un contexte économique difficile.

Enfin, les crédits destinés au financement de l'économie c'est-à-dire les microcrédits, l'aide au fret, le prêt de développement outre-mer (PDOM) sont stables entre 2022 et 2023 à 24 millions d'euros. Cette stabilité, bien que louable, pourrait cependant s'avérer insuffisante pour couvrir les besoins réels en 2023. En effet, dans le contexte économique actuel, la situation des entreprises pourrait se détériorer et le recours au microcrédit ou au PDOM pourrait alors enregistrer une hausse par rapport à l'année 2021 voire 2022. Or, pour rappel, en 2020, année de crise sanitaire, ces crédits avaient été consommés à hauteur de 8 millions de plus que les ouvertures en loi de finances. Afin d'anticiper ce besoin, nous vous proposons un amendement pour ouvrir 5 millions d'euros supplémentaires en AE et CP.

M. Georges Patient , rapporteur spécial . - Les dépenses fiscales rattachées à la mission enregistrent une nouvelle hausse, passant de 6 916 à 7 090 millions d'euros. Nous nous réjouissons toutefois que des évaluations aient récemment été menées et que d'autres soient prévues pour 2023. Ces évaluations demeurent un exercice complexe, donc incomplet et à la fiabilité relative, mais elles représentent un préalable nécessaire à une réflexion plus large sur les dépenses fiscales.

M. Teva Rohfritsch , rapporteur spécial . - Enfin, en complément des crédits portés par la mission « Outre-mer » et des dépenses fiscales, les outre-mer bénéficient de crédits en provenance d'autres programmes du budget général.

Ainsi, le montant total des contributions budgétaires s'élève, en PLF 2023, à 20,1 milliards d'euros en AE et 21,7 milliards d'euros en CP, soit une hausse de 1,1 % en AE et de 3,7 % en CP par rapport à la LFI 2022. Depuis 2018, l'effort total a augmenté de 3,6 milliards d'euros en AE et 5,4 milliards d'euros en CP.

Ces crédits en provenance d'autres missions budgétaires permettent, entre autres, de financer les cinq plans thématiques outre-mer : le plan d'actions pour les services d'eau potable et d'assainissement en Guadeloupe, Guyane, Martinique, la Réunion, Mayotte et Saint-Martin (Plan eau DOM) ; le plan Séismes Antilles ; le plan Sargasses 2 ; le plan Logement outre-mer (PLOM) ; et le plan Chlordécone.

Par ailleurs, parmi ces contributions, figurent les crédits du plan de relance. Nous notons que, en juin 2022, 1,39 milliard d'euros a été ouvert en AE pour l'outre-mer dans le cadre du plan de relance, soit environ 100 millions d'euros de moins que les premières annonces prévues à hauteur de 1,5 milliard d'euros pour les outre-mer. À la même date, 38,6 % des AE et 10,1 % des CP ont été consommés.

Ces taux sont décevants et doivent nous conduire à être vigilants à l'avenir notamment pour éviter des redéploiements en cas d'absence de consommation. Toutefois, les crédits du plan de relance se sont accompagnés d'un effet levier important sur le financement des collectivités et ont permis de financer des projets indispensables aux territoires d'outre-mer et de renforcer des dispositifs existants comme les contrats de convergence ou la ligne budgétaire unique. À cet égard, il est important de souligner que lorsqu'ils ont été orientés sur des dispositifs existants, les crédits ont été intégralement consommés.

Mme Micheline Jacques , rapporteur pour avis de la commission des affaires économiques sur la mission « Outre-mer » . - J'ai donné, pour la commission des affaires économiques, un avis favorable à cette mission « Outre-mer », puisque son budget tient compte des attentes, même si les objectifs de dépenses fixés ne sont pas toujours atteints. Je le considère comme un budget de transition, puisque notre nouveau ministre de l'outre-mer a prévu de grands projets avec des feuilles de route pour les territoires. Il a pour mission de faire des territoires ultramarins des territoires d'innovation et de développement de valeurs.

Je salue les efforts qui ont été fournis en faveur du service militaire adapté (SMA), avec, désormais, la prise en charge des mineurs à partir de 16 ans, ce qui permettra de récupérer les jeunes en décrochage scolaire.

Je remercie les deux rapporteurs spéciaux pour leur travail.

M. Thani Mohamed Soilihi , rapporteur pour avis de la commission des lois sur la mission « Outre-mer » . - J'ai écouté avec intérêt le rapport de mes éminents collègues, auquel je n'ai rien à ajouter. Je souhaiterais même, avec leur permission, dupliquer leurs amendements qui visent à abonder certains dispositifs.

Je voudrais souligner, cependant, le problème récurrent de sous-consommation des crédits. Il s'agit des collectivités les plus en difficulté de la République, et il est consternant de constater que les crédits qui leur sont alloués ne sont pas consommés dans leur intégralité à la fin de l'année. C'est inacceptable et nous devons absolument trouver une solution.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Je remercie les rapporteurs spéciaux pour leur rapport. Je partage leurs observations relatives à la difficulté de consommer les crédits alloués, un problème auquel il est urgent d'apporter une réponse. En effet, tous les ans se joue une bagarre démocratique pour obtenir des crédits et ils ne sont pas entièrement consommés, ce qui discrédite notre travail. Peut-être avez-vous des préconisations à nous soumettre sur cette question.

M. Thani Mohamed Soilihi , rapporteur pour avis . - En effet, lorsque ces sommes sont annoncées, nous sommes les premiers à nous en réjouir et à répercuter l'information auprès de la population. Et quand, un an plus tard, les sommes n'ont pas été consommées, nous passons pour des menteurs, le citoyen se moquant totalement des explications techniques. La seule chose qu'il voit, c'est que les réalisations ne sont pas au rendez-vous et il en veut à l'élu qui fait le lien entre les institutions de la République et nos territoires.

Mme Isabelle Briquet . - Mes commentaires seront bien moins pertinents que ceux qu'aurait pu tenir Victorin Lurel s'il avait pu être présent aujourd'hui.

Si nous pouvons noter avec satisfaction l'augmentation des crédits, avec la réserve qui a été donnée tout à l'heure sur leur niveau de consommation, elle ne permet pas de répondre à l'ensemble des problématiques. Il manque en effet des mesures spécifiques pour protéger le pouvoir d'achat et, à ce sujet, je souhaiterais savoir si nos rapporteurs peuvent nous dire où en est la démarche dite « Oudinot du pouvoir d'achat », qui a été annoncée.

L'aide au fret n'a pas été réévaluée, alors que le prix des billets d'avion est un problème systémique.

Même s'il convient de noter qu'un effort a été réalisé sur la question de la gestion de l'eau, l'urgence du droit d'accès à l'eau nécessiterait une politique bien plus volontariste. Au-delà des financements, sans doute des politiques spécifiques pourraient être mises en place.

Enfin, s'agissant du renforcement du service militaire adapté, il serait souhaitable de repenser la formation pour éviter les échecs scolaires.

M. Jérôme Bascher . - Les territoires outre-mer ont subi de gros déficits d'investissement, et ce au profit de mesures de substitution, d'aides aux personnes, à savoir des palliatifs.

Savez-vous exactement ce qui est possible de faire et la somme totale qu'il conviendrait d'investir pour remettre les infrastructures de réseaux aux normes - eau, téléphonie, assainissement, hôpitaux, etc. ? Une mission a-t-elle été réalisée pour chiffrer le retard en termes d'investissement et le financement qu'il conviendrait d'allouer ?

M. Georges Patient , rapporteur spécial . - Le gros problème dans les outre-mer, c'est la sous-consommation des crédits votés, alors même que les collectivités locales doivent faire face à un déficit structurel important. Or, nous savons très bien qu'en outre-mer, plus encore que dans l'Hexagone, ce sont les collectivités locales qui sont motrices en matière de développement économique. Nous nous battons depuis très longtemps pour que leur équilibre financier soit rétabli. C'est un préalable indispensable pour qu'elles puissent investir. Des crédits sont votés en matière d'investissement, mais depuis très longtemps, les collectivités locales sont discriminées au titre des recettes de fonctionnement. Premièrement au niveau de la péréquation, nous en avons beaucoup parlé, et le Président avait fini par reconnaître, qu'il y avait un écart de 85 millions d'euros avec les communes de l'Hexagone. Un plan de rattrapage a été mis en oeuvre, mais l'écart était en réalité de plus de 165 millions d'euros.

Par ailleurs, en matière de contribution au redressement des finances publiques, les communes d'outre-mer, qui sont les plus pauvres, ont également fortement contribué. Et nous pouvons chiffrer à 400 millions d'euros la perte en matière de recettes de fonctionnement.

Dans le dernier rapport que j'ai élaboré avec Jean-René Cazeneuve, nous avons initié les contrats de redressement en outre-mer, pour permettre à ces communes de se remettre à flot et de pouvoir utiliser tous les crédits d'investissement mis à leur disposition. À ce jour la situation est la suivante : 62 % des communes des départements et régions d'outre-mer (Drom), qui sont dans le réseau d'alerte, présentent un déficit structurel en section de fonctionnement, alors qu'elles bénéficient de crédits d'investissement. Or, tant que leurs charges et leurs dépenses de fonctionnement ne seront pas équilibrées elles auront les plus grandes difficultés à utiliser les crédits d'investissement ouverts

Je suis un peu déçu de voir que le rapporteur général a rejeté mon amendement relatif aux Corom que j'avais déposé sur le PLFR.

M. Teva Rohfritsch , rapporteur spécial . - Concernant la sous-consommation des crédits, un sujet récurrent évoqué chaque année, nous avons formulé des recommandations dans notre rapport d'information sur le fonds exceptionnel d'investissement (FEI) outre-mer et dans celui réalisé pour suite à donner au rapport de la Cour des comptes au titre de l'article 58-2° de la loi organique relative aux lois de finances (Lolf) sur les financements de l'État en outre-mer. Nous restons positifs en espérant que ces conclusions seront prises en compte et qu'elles seront intégrées par le Gouvernement.

Il y a aussi un effet progressif de montée en charge de l'ingénierie locale, puisque nous avons augmenté les crédits qui y sont consacrés. Il faut installer les équipes et les élus doivent s'approprier cet outil et recourir de manière plus systématique à ces plateformes d'ingénierie locale. Nous allons donc observer avec vous cette évolution. Je pense qu'il faut un cycle de deux à trois ans pour pouvoir tirer des conclusions sur les efforts consentis en la matière. Mais des sujets restent intangibles, notamment la rareté du foncier, les coûts d'aménagement du foncier sur des îles avec des plaines assez étroites à forte densité de population. Nous ne pouvons ignorer ces éléments géographiques contraignants.

L'inflation et l'écart du coût de la vie sont deux sujets qui s'additionnent, mais qui sont distincts. Il existe le bouclier qualité-prix (BQP), mis en place par M. Lurel, mais nous observons que l'évolution des taux d'inflation varie en fonction des territoires. Un certain nombre d'entre eux connaissent une croissance de l'inflation inférieure à la métropole, et d'autres, supérieure, ce qui souligne encore une fois l'hétérogénéité des territoires d'outre-mer.

L'exonération de la TVA a été mise en oeuvre dans les Drom.

L'aide au fret est effectivement un sujet majeur, et fait l'objet de l'un de nos amendements, visant à augmenter de 5 millions d'euros les crédits dédiés au financement de l'économie, qui recouvrent les micro-crédits aux entreprises, les prêts de développement outre-mer (PDOM) mais également l'aide au fret.

D'autre part, les crédits alloués à la continuité territoriale ont été augmentés de 5 millions d'euros par l'Assemblée nationale pour faire face à la hausse des prix des billets d'avion - il faut distinguer la hausse du prix du fret et celle du billet d'avion. Nous souhaitons vivement que vous puissiez nous appuyer sur cet amendement.

Concernant les écarts en termes d'équipements publics entre les outre-mer et la métropole, il y a effectivement eu des tentatives pour mesurer ces écarts. Les dernières données en la matière dataient d'un rapport de 2012. Dans nos différents rapports, et notamment celui sur le FEI, nous avons essayé de les mettre à jour au regard des données dont nous disposons. Il en ressort que les écarts en termes d'équipements publics restent forts.

Les besoins sont différents selon les territoires, avec des caractéristiques démographiques distinctes. Sans entrer dans le détail, Mayotte, qui a une démographie très dynamique, présente des besoins en infrastructures liées à l'enfance ou à l'enseignement plus importants que dans d'autres territoires d'outre-mer. Les efforts sont sans fin en la matière dans la mesure où nous n'avons pas de prise sur ces taux de croissance démographiques très importants.

Vous avez indiqué que, pendant la crise, nous avons enregistré un investissement public moins appuyé. Cela aussi dépend des territoires. Si je prends l'exemple de la Polynésie française, nous avons pu, au contraire, en faire une forme de bouclier pour l'emploi, et les dépenses d'investissement ont été particulièrement accentuées sur la période de manière à jouer une fonction contracyclique à un moment où l'économie en avait le plus besoin, puisque le tourisme était à l'arrêt.

M. Claude Raynal , président . - Évidemment, il s'agit d'amendements appelant le Gouvernement à lever le gage dans la mesure où vous demandez, à chaque fois, une somme supplémentaire et non pas un transfert de crédits au sein de la mission.

L'amendement n° II-16 est adopté .

L'amendement n° II-17 est adopté.

L'amendement n° II-18 est adopté .

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Outre-mer », sous réserve de l'adoption de ses amendements.

EXAMEN DES ARTICLES RATTACHÉS

Article 44 quater (nouveau)

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 44 quater .

Article 44 quinquies (nouveau)

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter, sans modification, l'article 44 quinquies .

Article 44 sexies (nouveau)

M. Claude Raynal, président. - Les rapporteurs spéciaux nous proposent un amendement pour repousser de trois mois la date limite de dépôt du rapport demandé au Gouvernement sur les crédits budgétaires dédiés à l'aide au fret au sein de la mission « outre-mer ».

L'amendement n° II-19 est adopté.

La commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter l'article 44 sexies , sous réserve de l'adoption de son amendement.

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 17 novembre 2022, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé ses décisions.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Cabinet du Ministère de l'Intérieur et des Outre-mer

- M. Guillaume VAILLE, conseiller budgétaire ;

- Mme Lou LE NABASQUE, conseillère parlementaire.

Direction générale des Outre-mer (DGOM)

- Général Claude PELOUX, commandant du service militaire adapté (SMA) ;

- M. Marc DEMULSANT, sous-directeur de l'évaluation, de la prospective et de la dépense de l'État ;

- Mme Isabelle RICHARD, sous-directrice des politiques publiques.

Fédération des Entreprises des Outre-mer (FEDOM)

- M. Hervé MARITON, président ;

- M. Laurent RENOUF, délégué général ;

- M. Guillaume GALLET de SAINT-AURIN, vice-président de la commission économique.

Union Sociale pour l'Habitat Outre-mer (USHOM)

- Mme Sabrina MATHIOT, directrice.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2023.html


* 1 Rapport d'information n° 727 (2021-2022) du 22 juin 2022 - par MM. Georges PATIENT et Teva ROHFRITSCH .

* 2 Il n'existe pas d'étude complète depuis 2015.

* 3 Prêt locatif social.

* 4 Logement locatif social.

* 5 Logement locatif très social.

* 6 Subvention à l'amélioration des logements à usage locatif et à occupation sociale.

* 7 Prêt à taux zéro.

* 8 Prêt social de location accession.

* 9 Le Fonds régional d'aménagement foncier et urbain (FRAFU) coordonne les interventions financières de l'Union européenne, de l'État, des collectivités territoriales, en vue d'assurer la constitution de réserves foncières et la réalisation d'équipements.

* 10 Cf. Rapport d'information du Sénat fait au nom de la délégation sénatoriale aux outre-mer sur la politique du logement dans les outre-mer (juillet 2021).

* 11 Loi n° 2017-256 du 28 février 2017 de programmation relative à l'égalité réelle outre-mer.

* 12 Estimation de l'Union sociale pour l'habitat (USH).

* 13 Lancé en septembre 2017 à Toulouse par le Président de la République, le plan pour le Logement d'abord et la lutte contre le sans-abrisme fait de l'accès direct au logement une priorité pour la réinsertion des personnes sans domicile.

* 14 À Mayotte et en Guyane, lorsque des locaux ou installations édifiés sans droit ni titre constituent un habitat informel et présentent des risques graves pour la salubrité, la sécurité ou la tranquillité publique, le représentant de l'État dans le département peut, par arrêté, ordonner aux occupants de ces locaux et installations d'évacuer les lieux et aux propriétaires de procéder à leur démolition à l'issue de l'évacuation.

* 15 Pour le même périmètre comprenant : la Guadeloupe, la Martinique, la Réunion, la Guyane et Mayotte.

* 16 Source : projet annuel de performance 2023.

* 17 Exécution retraitée du nettoyage d'anciens engagements juridiques, 147,7 millions d'euros sans retraitement.

* 18 Exécution retraitée du nettoyage d'anciens engagements juridiques, 182,5 millions d'euros sans retraitement.

* 19 Exécution retraitée du nettoyage d'anciens engagements juridiques, 182,6 millions d'euros sans retraitement.

* 20 En raison de cette signature tardive les opérations prévues dans le cadre du CCT, et qui ont été engagées en 2019 pour un montant de 8,4 millions d'euros ont été rattachées en exécution, au précédent contrat de développement, signé le 30 juillet 2014 et modifié par avenant du 11 juin 2018.

* 21 Régions et départements.

* 22 IEDOM, Rapport annuel sur les délais de paiement pratiqués par les entreprises et les organismes publics des DCOM , édition 2021, juin 2022.

* 23 Le délai clients correspond au délai moyen d'encaissement des règlements des clients , en tenant compte des délais eux-mêmes accordés par l'entreprise.

* 24 IEOM, Les délais de paiement en Polynésie française en 2020 , juin 2022.

* 25 Cette contribution, encadrée par une convention du 16 avril 2015, s'élevait à 12 millions d'euros par an en contrepartie d'un engagement du Pays de poursuivre les réformes structurelles au redressement des comptes sociaux de Polynésie.

* 26 Rapport d'information n° 727 (2021-2022) du 22 juin 2022 - par MM. Georges PATIENT et Teva ROHFRITSCH, fait au nom de la commission des finances.

* 27 Les chiffres de 2022 correspondent aux objectifs annuels. Compte tenu des difficultés de recrutement actuelles liées à l'obligation vaccinale à la concurrence avec le CEJ et les baisses démographiques locales.

* 28 Depuis 2014, les volontaires stagiaires en poursuite de formation à Périgueux ne sont plus comptabilisés car ils l'ont déjà été au sein d'un régiment outre-mer. Mesure prise suite à une recommandation de la Cour des comptes.

* 29 Exécution 2020 établie à 32,1 millions d'euros en AE et 32,6 millions d'euros en CP pour des ouvertures en LFI de 24,3 millions d'euros en AE et 23 millions d'euros en CP.

* 30 Exécution 2021 établie à 18,5 millions d'euros en AE et 18,86 millions d'euros en CP pour des ouvertures en LFI de 24,3 millions d'euros en AE et 23 millions d'euros en CP.

* 31 ACT : aide à la continuité territoriale, PME : passeport, mobilité études, PMFP : passeport pour la mobilité de la formation professionnelle, PMSP : passeport mobilité stage professionnel.

* 32 d du 3 du I de l'article 25.

* 33 Cour des comptes, Le logement dans les départements et les régions d'outre-mer, rapport public thématique, septembre 2020.

* 34 Article 17 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

* 35 Article 15 de la loi n° 2018-1317 du 28 décembre 2018 de finances pour 2019.

* 36 Chiffrage direction du budget. Celui de la DGOM s'établit à 55 millions d'euros.

* 37 Article 29 de la loi n°2019-1479 du 28 décembre 2019 de finances pour 2020.

* 38 Règlement d'exemption n° 651/2014 de la commission du 17 juin 2014 déclarant certaines catégories d'aides compatibles avec le marché intérieur en application des articles 107 et 108 du traité (RGEC).

* 39 Quartiers mentionnés au II de l'article 9-1 de la loi n° 2003-710 du 1er août 2003 d'orientation et de programmation pour la ville et la rénovation urbaine.

* 40 Quartiers mentionnés à l'article 5 de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine.

* 41 Immeubles situés sur l'île de Tahiti, dans les communes de Nouméa, Dumbéa, Païta, Le Mont-Dore, Voh, Koné et Pouembout et à Saint-Martin.

* 42 Tel qu'indiqué dans le tome II des voies et moyens annexé au PLF 2022, page 13.

* 43 Rapport d'information n° 637 (2021-2022) du 24 mai 2022 - par MM. Georges PATIENT et Teva ROHFRITSCH

* 44 1/ développer l'emploi, la production et l'investissement outre-mer 2/ offrir une véritable égalité des chances à la jeunesse outre-mer 3/ garantir la sécurité des citoyens outre-mer 4/ améliorer les conditions de vie des citoyens outre-mer 5/ promouvoir un aménagement durable et la transition écologique des territoires ultramarins 6/ valoriser les atouts outre-mer 7/ plan d'urgence face à la crise sanitaire et plan de relance 8/ fonctionnement des administrations publics 9/ dotations aux collectivités territoriales et aux institutions.

* 45 Rapport de janvier 2020 de Michèle Chay et Sarah Mouhoussoune au nom de la délégation à l'outre-mer du CESE.

* 46 La gestion du Syndicat Intercommunal d'eau et d'assainissement de Mayotte (SIEAM) a fait l'objet de deux rapports de la Chambre régionale des comptes soulignant des investissements et un entretien des réseaux d'eau potable négligés pendant des années.

* 47 Données issues de l'observatoire des services publics de l'eau et de l'assainissement.

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