N° 792

SÉNAT

SESSION EXTRAORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 19 juillet 2022

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi,
adopté par l'Assemblée nationale après engagement de la procédure accélérée,
de
règlement du budget et d' approbation des comptes de l' année 2021 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME II

CONTRIBUTIONS DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

ANNEXE N° 15a

Gestion des finances publiques Crédits non répartis

Transformation et fonction publiques

Rapporteurs spéciaux : MM. Albéric de MONTGOLFIER et Claude NOUGEIN

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Daniel Breuiller, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mme Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM. Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canévet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 16 ème législ.) :

10 , 16 et T.A. 2

Sénat :

787 (2021-2022)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS
DES RAPPORTEURS SPÉCIAUX

La mission « Gestion des finances publiques »

1. L'exécution des crédits de la mission en 2021 est conforme à la prévision inscrite en loi de finances initiale , avec un écart de - 0,2 % sur les autorisations d'engagement (AE) et de 0,1 % sur les crédits de paiement (CP). Toutefois, après plusieurs années de baisse tendancielle des crédits consommés, la mission semble avoir atteint un palier . Pour la première fois depuis 2017, les crédits consommés ont légèrement augmenté d'une année sur l'autre, à hauteur de respectivement + 0,36 % et + 0,77 % sur les AE et les CP. Il n'en demeure pas moins que la mission s'inscrit une nouvelle fois à rebours de la dynamique des dépenses du budget général de l'État, qui progressent de 5,1 % en 2021, hors mesures de soutien et de relance.

2. Les dépenses de personnel, qui représentent plus de 83 % des crédits de la mission, jouent un rôle déterminant pour apprécier la bonne exécution des crédits ouverts . Elles ont diminué de 1,2 % entre 2020 et 2021, marquant une nouvelle année de baisse, et ce en dépit d'un schéma de réduction des emplois sous-exécuté pour la première fois depuis 2017 . La sous-exécution demeure toutefois d'une ampleur limitée, avec 1 981 équivalents temps plein (ETP) supprimés en 2021, contre une prévision établie à 2 033 ETP. Là-encore, la mission s'inscrit à l'opposé de la dynamique constatée sur le périmètre de l'État, avec une progression de la masse salariale de 1,9 %.

3. Les rapporteurs spéciaux relèvent avec satisfaction la sanctuarisation des dépenses informatiques de la mission , le budget informatique des trois programmes s'élevant à 488 millions d'euros en 2021, un montant en hausse et inédit. Ces budgets sont appelés à être maintenus voire même renforcés dans le cadre des contrats pluriannuels d'objectifs et de moyens signés par la direction générale des finances publiques (DGFiP) et par la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI). Pour autant, c'est aussi sur ce poste de dépenses que les rapporteurs spéciaux émettent leur plus forte alerte, concernant le défaut de pilotage des projets informatiques, avec d'importants dépassements de délai et de coût de nouveau constatés en 2021.

4. Sur les autres priorités identifiées par les rapporteurs spéciaux pour l'année 2021, à savoir l'adaptation des modalités de travail des agents publics à la suite de la crise sanitaire, la réorganisation territoriale des réseaux de la DGFiP et de la DGDDI ainsi que la lutte contre la fraude fiscale et les trafics de toute nature, les rapporteurs spéciaux soulignent les efforts réalisés par les administrations rattachées à la mission, qui ont le plus souvent dépassé les cibles de performance qu'elles s'étaient fixées .

La mission « Crédits non répartis »

1. En 2021, près de 83,5 millions d'euros en crédits de paiement (CP) ont été exécutés sur la mission « Crédits non répartis », alors que la mission était initialement dotée de 322,5 millions d'euros. Le programme 551 « Provision relative aux rémunérations publiques », initialement doté de 198,5 millions d'euros en CP pour 2021, a fait l'objet d'une exécution à hauteur de seulement 83,5 millions d'euros , afin de financer diverses mesures salariales, dont la majeure partie a été décidée dans le cadre du rendez-vous salarial de la fonction publique.

2. Les rapporteurs spéciaux notent que le recours au programme 551 pour financer des mesures décidées plusieurs mois avant la programmation budgétaire tend à se systématiser et à devenir une véritable solution de facilité pour le Gouvernement, sans pour autant s'accompagner des éléments nécessaires à la bonne information du Parlement . Il est en effet regrettable que le contenu et le coût des mesures financées par l'intermédiaire de ce programme ne fassent pas l'objet d'une définition plus précise lors de la budgétisation initiale. Les rapporteurs spéciaux soulignent également que des crédits du programme 551 ont été utilisés pour financer des mesures non présentées dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances pour 2022 , ce qui peut être interprété comme un contournement de l'autorisation budgétaire accordée par le Parlement au Gouvernement.

3. Le programme 552 «Dotations pour dépenses accidentelles et imprévisibles », initialement doté de 124 millions d'euros en CP, a fait l'objet d'une ouverture de crédits supplémentaires à hauteur de 1,5 milliard d'euros en cours d'année pour répondre à la persistance de la crise sanitaire. Ces crédits, tout comme la dotation initiale, n'ont toutefois fait l'objet d'aucune mesure de répartition. L'amélioration de la situation sanitaire a en effet permis de ne pas recourir à l'utilisation des crédits ouverts en LFI et surtout en LFR, dont le montant particulièrement élevé avait par ailleurs suscité le scepticisme de la commission des finances du Sénat, qui avait proposé de les réduire.

La mission « Transformation et fonction publiques »

1. Le périmètre de la mission « Transformation et fonction publiques » , auparavant dénommée « Action et transformation publiques », a été modifié par la loi de finances initiale pour 2021 pour intégrer le programme 148 « Fonction publique » , auparavant rattaché à la mission « Gestion des finances publiques ». La mission, qui reprend le nom du ministère homonyme, était donc composée de cinq programmes à vocation interministérielle en 2021. Cette évolution ne s'est toutefois pas traduite par une exécution plus satisfaisante de ses crédits . Au contraire, et à l'instar des années précédentes, la consommation des crédits s'est avérée largement en-deçà du volume des crédits autorisés par le Parlement.

2. La consommation des crédits s'avère en outre difficile à évaluer du fait du montant très important des reports d'autorisations d'engagement de 2020 à 2021 et des décisions prises en cours de gestion . Ainsi, à partir des seuls crédits prévus en loi de finances initiale, la consommation des AE a été 2,5 fois supérieure à la prévision et celle des CP inférieure de 34 %. Toutefois, en tenant compte des mouvements intervenus en cours de gestion, la sous-consommation des CP n'est plus « que » de 10,5 %, contre - 42,2 % pour les AE. Les rapporteurs spéciaux qui, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2021, avaient appelé à la plus grande vigilance sur les crédits demandés, ont donc vu leurs craintes confirmées.

3. Un motif de satisfaction provient toutefois de la hausse continue des crédits consommés d'une année sur l'autre (+ 170 % en AE et + 63 % en CP), même si leur niveau reste très en-deçà de la montée en charge attendue par le Gouvernement sur cette mission.

4. Lors de l'examen de la mission dans le cadre du projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes de l'année 2020, et dans le cadre de leur travail de contrôle budgétaire, les rapporteurs spéciaux avaient émis plusieurs recommandations appelant d'une part à davantage de sincérité budgétaire et à un meilleur suivi des projets financés par les programmes de la mission , et, d'autre part, à la modification des indicateurs de performance , qui ne permettent pas d'apprécier les objectifs visés par les fonds portés par les programmes de la mission. Ils ont constaté avec regret que les difficultés relevées dans le cadre de ce contrôle persistent, avec des retards très conséquents dans la mise en oeuvre des projets sélectionnés . Un seul exemple : alors que le programme 348, dédié à la rénovation de 38 cités administratives, devait se terminer à la fin de l'année 2022, les travaux n'avaient réellement commencé que pour 10 cités à la fin de l'année 2021. Or, la crise sanitaire ne peut servir de seul élément de justification : avant même l'engagement des travaux, les processus de sélection et de contractualisation avaient déjà connu d'importants retards.

I. L'EXÉCUTION DES CRÉDITS DE LA MISSION « GESTION DES FINANCES PUBLIQUES » EST CONFORME AUX OBJECTIFS ÉNONCÉS EN LOI DE FINANCES INITIALE ET S'EST DÉROULÉE SANS DIFFICULTÉ MAJEURE

La mission « Gestion des finances publiques » porte les politiques publiques relevant du ministère chargé des comptes publics , ainsi que l'essentiel des effectifs des ministères économiques et financiers . Son périmètre a été modifié en loi de finances initiale pour 2021 1 ( * ) , avec le rattachement du programme 148 « Fonction publique » à la mission « Transformation et fonction publiques ».

La mission « Gestion des finances publiques » se compose donc désormais de trois programmes :

- le programme 156 « Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local », qui porte les crédits alloués à la direction générale des finances publiques (DGFiP) ;

- le programme 302 « Facilitation et sécurisation des échanges », qui porte les crédits alloués à la direction générale des douanes et des droits indirects (DGDDI) ;

- le programme 218 « Conduite et pilotage des politiques économiques et financières », qui est placé sous la responsabilité de la secrétaire générale des ministères économiques et financiers. Il retrace les crédits et les effectifs des cabinets des ministres et secrétariats d'États, des directions et services en charge de missions transversales (le budget, les achats de l'État...), de l'inspection générale des finances, du secrétariat général du ministère et de toutes les directions et entités exerçant des missions nécessaires au pilotage des politiques publiques ministérielles transversales ou interministérielles (expertise, conseil, contrôle), telle que la direction interministérielle de la transformation publique (DITP), rattachée au programme 218 en 2019.

Les trois programmes de la mission sont de poids inégaux, les programmes 156 et 302 portant plus de 90 % des crédits de paiement (CP) consommés en 2021 .

Répartition par programme des crédits de paiement de la mission
« Gestion des finances publiques » consommés en 2021

(en % et en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

A. L'EXÉCUTION DES CRÉDITS EN 2021 DÉMONTRE QUE LA MISSION S'INSCRIT UNE NOUVELLE FOIS À REBOURS DE LA DYNAMIQUE OBSERVÉE SUR LE BUDGET GÉNÉRAL DE L'ÉTAT, AVEC UNE RATIONALISATION DES CRÉDITS ET DES DÉPENSES DE PERSONNEL

1. L'exécution des crédits de la mission est conforme à la prévision inscrite en loi de finances initiale pour 2021
a) Une stabilisation des crédits consommés au cours de l'exercice 2021

L'écart constaté entre les crédits demandés sur la mission en loi de finances initiale pour 2021 et l'exécution des crédits en 2021 témoigne d'une gestion rigoureuse : il s'élève à - 0,2 % en autorisations d'engagement (AE) et à + 0,1 % en crédits de paiement (CP) . La mission s'inscrit une nouvelle fois à rebours de la dynamique des dépenses du budget général de l'État, qui progressent de 5,1 % en 2021 2 ( * ) , hors mesures de soutien et de relance.

Exécution des crédits de la mission
« Gestion des finances publiques » en 2021

(en % et en millions d'euros)

Programme

Exécution 2020

LFI 2021

Exécution 2021

Exécution 2021 / exécution 2020

Exécution 2021 / LFI 2021

[ 156] Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

AE

7655,7

7651,9

7611,9

- 0,57 %

- 0,52%

CP

7576,7

7591,4

7552,7

- 0,32 %

- 0,51%

[ 218 ] Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

AE

889,2

942,7

903,6

1,62 %

- 4,15%

CP

893,7

939,0

916,3

2,53 %

- 2,41%

[302] Facilitation et sécurisation des échanges

AE

1565,4

1572,6

1631,2

4,20 %

3,72%

CP

1557,3

1564,9

1636,3

5,07 %

4,56%

TOTAL MISSION

AE

10 110,3

10 167,2

10 146,6

0,36 %

- 0,20 %

CP

10 027,7

10 095,3

10 105,4

0,77 %

0,10 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Tout en appréciant la mobilisation des trois responsables de programme pour maîtriser la dépense publique, les rapporteurs spéciaux s'interrogent chaque année lors de l'examen du projet de loi de finances sur la soutenabilité et le réalisme d'une baisse continue des crédits ouverts et consommés sur le périmètre de la mission. 2021 semble de ce point de vue marquer un certain palier : pour la première fois depuis 2017, les crédits consommés augmentent légèrement d'une année sur l'autre , à + 0,36 % en AE et + 0,77 % en CP par rapport à 2020, après - 1,2 % (AE) et - 1 % (CP) entre 2019 et 2020, - 2,8 % (AE) et - 1,5 % (CP) entre 2018 et 2019 et - 1,4 % (AE) et - 1,2 % (CP) entre 2017 et 2018.

L'interruption de la trajectoire tendancielle de baisse des crédits consommés sur la mission s'explique principalement par la sur-exécution des crédits demandés par la Douane, due en partie toutefois à un fait de gestion qui lui est exogène. 73 millions d'euros ont ainsi été ouverts en loi de finances rectificative pour la mise en paiement des mises à disposition tardives des droits de douanes à l'Union européenne. En effet, lorsque la Commission identifie un phénomène de fraude aux ressources propres de l'Union 3 ( * ) , elle exige ensuite auprès des États concernés le paiement d'une compensation équivalente au montant éludé, en estimant que les ressources propres n'ont pas été correctement collectées.

b) Une mission très peu bouleversée par la crise sanitaire

À l'instar du constat dressé par les rapporteurs spéciaux pour l'année 2020, la crise sanitaire n'a que très peu affecté les crédits de la mission en 2021, et ce même si ses administrations ont été pleinement mobilisées pour répondre à ses conséquences. Les mouvements de crédits intervenus en cours de gestion ont donc été limités .

Mouvements de crédits intervenus en gestion
au cours de l'exercice 2021

(CP, en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

La gestion de la crise sanitaire a engendré un coût net de 3,7 millions d'euros en 2021 4 ( * ) , contre huit millions d'euros en 2020. Certaines dépenses supplémentaires (41,3 millions d'euros) devraient se poursuivre en 2022, telles que la prise en charge des frais de repas liée au contexte sanitaire, le déploiement du télétravail ou encore la suppression du jour de carence.

2. Les dépenses de personnel poursuivent leur baisse, bien que, pour la première fois depuis 2017, le schéma de réduction des emplois ait été légèrement sous-exécuté

Les dépenses de personnel (titre 2) occupent une place prépondérante dans les crédits de la mission. Si leur montant a diminué de 1,2 % entre 2020 et 2021 , pour s'établir à 8,37 milliards d'euros , leur part dans les crédits de la mission s'est stabilisée, à près de 83 %, confirmant par-là leur rôle déterminant pour apprécier la qualité de la gestion des responsables de programme. Pour autant, et pour la première fois depuis 2017, le schéma d'emploi de la mission a été sous-exécuté, à hauteur de 52 équivalents temps plein (ETP), contre une suppression de 397 ETP supplémentaires en 2020, 135 ETP en 2019 et 452 ETP en 2018.

Toutefois, et en dépit de la sous-exécution du schéma d'emploi prévu pour 2021, la mission s'inscrit là-aussi à l'opposé de la dynamique du budget général de l'État, marqué par une progression des dépenses de personnel de 1,9 %, en dépit d'une baisse des effectifs (- 3 750 ETP). Le constat pourrait s'inverser en 2022 : alors que les ministères économiques et financiers sont, en proportion de leur masse salariale, ceux qui bénéficient des mesures catégorielles les plus importantes 5 ( * ) , la revalorisation par ailleurs du point d'indice de 3,5 % au 1 er juillet 2022 6 ( * ) devrait se traduire par une augmentation significative des dépenses de personnel.

Schéma d'emplois de la mission
« Gestion des finances publiques » en 2021

(en ETP)

Prévision

LFI 2021

Sorties

dont départs

en retraite

Entrées

Exécution

2021

Écart exécution/LFI

[156] Gestion fiscale et financière de l'État et du secteur public local

- 1 800

6 565

4 408

4 787

- 1 778

- 1,22 %

[218] Conduite et pilotage des politiques économiques et financières

- 55

927

251

902

- 25

- 54,55 %

[302] Facilitation et sécurisation des échanges

- 178

773

530

595

- 178

0,00 %

Total pour la mission

- 2 033

8 265

5 189

6 284

- 1 981

- 2,56 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

La sous-exécution du schéma d'emploi sur le programme 218 s'explique d'une part par le report de recrutements de 2020 à 2021, du fait de la crise sanitaire, et, d'autre part, par le renforcement des services mobilisés dans le cadre du plan de relance. Pour la DGFiP, le faible écart constaté sur son schéma d'emplois intervient après plusieurs années de suppressions d'effectifs plus élevées que prévues. Surtout, il ne doit pas masquer le fait que la DGFiP connait d'importantes difficultés de recrutement sur concours et hors concours, et qu'elle a recouru de manière bien plus importante aux contractuels en 2021 (891, contre 94 en 2020).

Concernant la Douane, le schéma d'emploi est respecté, malgré le report en 2021 du recrutement de 100 ETP pour faire face au Brexit . Lors de son audition devant la commission des finances 7 ( * ) , la directrice générale Isabelle Braun-Lemaire avait estimé que ces recrutements étaient nécessaires : au premier trimestre 2021, la charge et le rythme de travail étaient déjà supérieurs aux estimations, alors même que le trafic voyageurs n'avait pas encore retrouvé son niveau antérieur à la crise sanitaire.

De nouveau, les rapporteurs spéciaux relèvent qu'il est encore très difficile de distinguer, dans l'évolution de ces dépenses de personnel, ce qui relève des effets des transformations engagées dans les administrations de la mission , notamment au sein de la DGFiP (mise en oeuvre du prélèvement à la source, suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales, dématérialisation des démarches), mais également de la DGDDI (progression de la dématérialisation des procédures, unification du recouvrement et transfert de la gestion et du recouvrement de certaines taxes de la DGDDI vers la DGFiP). La Cour des comptes a ainsi réitéré sa recommandation de mieux documenter l'évolution des schémas d'emploi en fonction des transformations des missions en cours 8 ( * ) , une recommandation à laquelle ne peuvent que souscrire les rapporteurs spéciaux.

L'exécution du schéma d'emploi contribue à la diminution du plafond d'emploi de la mission, exprimé en équivalents temps plein travaillés (ETPT).

Plafonds d'emplois de la mission
« Gestion des finances publiques »

(en équivalents temps plein travaillés, ETPT)

2014

2015

2016

2017

2018

2019

2020

2021

Plafond d'emplois de la mission prévu en LFI

134 746

131 862

129 296

128 023

126 536

123 501

121 581

119 660

Plafond d'emplois de la mission exécuté

131 575

128 875

126 699

125 370

123 484

121 499

119 113

117 108

Écart

- 2,35 %

- 2,27 %

- 2,01 %

- 2,07 %

- 2,41 %

- 1,62 %

- 2,03%

- 2,13 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

L'écart structurel qui existe depuis 2014 entre les plafonds d'emplois prévus et exécutés (en équivalents temps plein travaillé [ETPT]) pour le ministère chargé des comptes publics s'est à nouveau accru en 2021, avec un taux de vacance sous plafond de 2,13 %. Pour rappel, sa nette diminution en 2019 avait conduit la Cour des comptes, dans son analyse de l'exécution budgétaire de la mission, à ne pas reconduire sa recommandation portant sur la réduction de cet écart, mais les rapporteurs spéciaux avaient appelé à poursuivre cet effort de prévision pour donner une image plus correcte des emplois portés par la mission . Au regard de l'exécution 2021, ils maintiennent leur recommandation.

3. La hausse sensible des dépenses de fonctionnement est en grande partie liée à des événements intervenus en cours de gestion et sur lesquels il était difficile d'agir pour les administrations

L'année 2021 se caractérise par une sur-exécution significative des dépenses de fonctionnement (+ 11,4 % en CP), qui progressent de 11,6 % entre 2020 et 2021 . Au contraire, et à l'instar des années précédentes, les dépenses d'investissement sont très largement sous-exécutées , à hauteur de 25,7 % (CP), après - 38,4 % en 2020, - 33,5 % en 2019 et - 34,4 % en 2018. Seuls les crédits d'investissement portés par le programme 156 ont été sur-exécutés (+ 9,9 %). Un motif de satisfaction provient toutefois de la hausse de 30 % des investissements entre 2019 et 2021 (+ 30,6 millions d'euros) , après plusieurs années de stagnation.

Exécution par titre des crédits de la mission
« Gestion des finances publiques » en 2021

(en % et en millions d'euros)

Titre

Exécution 2020

LFI 2021

Exécution 2021

Exécution 2021 / exécution 2020

Exécution 2021 / LFI 2021

Titre 2 - Personnel

AE

8 471,0

8 467,9

8 366,0

- 1,24 %

- 1,20 %

CP

8 471,0

8 467,9

8 366,0

- 1,24 %

- 1,20 %

Titre 3 - Fonctionnement

AE

1421,1

1 416,0

1558,4

- 5,06 %

10,05 %

CP

1 347,3

1 349,2

1 503,7

11,61 %

11,45 %

Titre 5 - Investissement

AE

127,4

187,6

122,1

- 4,21 %

- 34,93 %

CP

118,7

182,5

135,5

14,19 %

- 25,75 %

Titre 6 - Intervention

AE

90,5

95,3

99,9

10,36 %

4,75 %

CP

90,6

95,3

99,8

10,23 %

4,72 %

Titre 7 - Opérations financières

AE

0,3

0,3

0,3

20,92 %

0,00 %

CP

0,3

0,3

0,3

23,33 %

0,00 %

TOTAL MISSION

AE

10 110,3

10 167,2

10 146,6

0,36 %

- 0,20 %

CP

10 027,7

10 095,3

10 105,4

0,77 %

0,10 %

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Ce double écart de gestion sur les dépenses de fonctionnement et d'investissement s'explique en grande partie par les dépenses informatiques : des crédits initialement demandés sur le titre 5 ont finalement été exécutés sur le titre 3. C'est une difficulté récurrente ces dernières années, qui doit appeler les responsables de programme à résorber la surestimation des crédits d'investissement demandés en loi de finances initiale. Pour la Douane, un problème similaire a été relevé pour l'identification des dépenses allouées aux moyens de surveillance, alors qu'une partie des projets d'acquisition (titre 5) est substituée par de la location (titre 3) 9 ( * ) .

La hausse des dépenses de fonctionnement tient également à l' accroissement du télétravail au sein des administrations de la mission : la Douane a par exemple dû acquérir de la bande passante supplémentaire pour permettre le fonctionnement étendu du réseau en télétravail, tandis que la DGFiP et le secrétariat général ont acquis du matériel pour leurs agents. Enfin, la dépense exceptionnelle liée la mise en paiement des mises à disposition tardives des droits de douane à l'Union européenne relève elle aussi du titre 3.


* 1 Cette modification de périmètre s'est accompagnée d'une modification du nom de la mission, auparavant dénommée « Gestion des finances publiques et des ressources humaines ».

* 2 Cour des Comptes, « Le budget de l'État en 2021. Résultats et gestion », juin 2022.

* 3 En l'état, il s'agissait d'une minoration systématique et significative de la valeur déclarée lors de l'importation de textiles et de chaussures en provenance de Chine.

* 4 D'après les données transmises par les responsables de programme de la mission à la Cour des comptes et présentées dans la note d'analyse de l'exécution budgétaire de la mission en 2021 .

* 5 Cour des Comptes, « Le budget de l'État en 2021. Résultats et gestion », juin 2022.

* 6 Décret n° 2022-994 du 7 juillet 2022 portant majoration de la rémunération des personnels civils et militaires de l'État, des personnels des collectivités territoriales et des établissements publics d'hospitalisation.

* 7 Audition de la directrice des douanes et des droits indirects , Isabelle Braun-Lemaire, devant la commission des finances du Sénat le 6 avril 2021.

* 8 Cour des comptes, « Note d'analyse de l'exécution budgétaire de la mission en 2021 ».

* 9 Selon les informations contenues dans le rapport annuel du contrôleur budgétaire et comptable ministériel près le ministère de l'économie, des finances et de la relance relatif à l'exécution budgétaire et à la situation financière et comptable ministérielle de l'année 2021.

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