F. L'ACTION 06 « COOPÉRATION SANITAIRE » : UNE CONTRIBUTION À UN PROGRAMME INTERNATIONAL SANS LIEN AVEC L'OBJECTIF DE RELANCE

L'action 06 « Coopération sanitaire » a été dotée de 50 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement par la loi de finances pour 2021.

Ces crédits retracent une partie du financement de la France au partenariat Access to COVID-19 Tools Accelerator (ACT-A) qui est un programme initié par l'Organisation mondiale de la santé (OMS) en avril 2020 pour accélérer, au niveau international, la production et la diffusion d'un vaccin.

Financée par plusieurs États, organisations internationales et personnes privées (entreprises, associations...), l'initiative a bénéficié de 18,7 milliards de dollars de financement en octobre 2021, dont 335 millions de dollars versés par la France.

Ainsi, les crédits de l'action « Coopération sanitaire » ne représentent qu'une partie des moyens mobilisés par la France en 2021 en faveur d'ACT-A. Par ailleurs, aucun crédit n'est demandé au titre de cette action en 2022 , alors même que 110 millions d'euros pourraient être ouverts au titre de la mission « Aide publique au développement ».

Cette situation confirme l'analyse du rapporteur selon laquelle cette dépense n'avait pas le caractère d'une mesure de relance en 2021 et aurait dû être retracée, comme ce serait le cas en 2022, au sein des missions qui portent les crédits des contributions de la France aux organisations internationales.

G. L'ACTION 07 « COHÉSION TERRITORIALE » : UN ÉTAGE SUPPLÉMENTAIRE DANS LES DISPOSITIFS DE SOUTIEN AU DÉVELOPPEMENT LOCAL

L'action 07 « Cohésion territoriale » a été dotée en loi de finances pour 2021 de 1 246 millions d'euros en autorisations d'engagement et 369 millions d'euros en crédits de paiement. Dans le projet de loi de finances pour 2022, 11,0 millions d'euros en autorisations d'engagement et 438,4 millions d'euros en crédits de paiement sont demandés .

1. Développement du numérique sur l'ensemble du territoire

Alors que les crédits du plan France Très haut débit (FTHD) font l'objet d'un programme dédié sur la mission « Économie », le Gouvernement a fait le choix d'intégrer les nouveaux moyens qui lui sont dédiés au programme « Cohésion » de la mission « Plan de relance » en 2021.

Le choix de cette maquette budgétaire rajoute un étage supplémentaire à la prise en charge par l'État du plan FTHD, alors que sa participation budgétaire était déjà largement critiquée pour son manque de lisibilité.

La participation de l'État, initialement fixée à 3,3 milliards d'euros d'ici à 2022, devrait ainsi être renforcée de 490 millions d'euros, dont 240 millions d'euros dédiés au déploiement et 250 millions d'euros liés aux usages . Ainsi, pour 2022, il est demandé une nouvelle ouverture de crédits à hauteur de 125 millions d'euros pour les usages et 50 millions d'euros pour alimenter le guichet RIP (réseaux d'initiative publique).

Le financement du plan France Très haut débit

Lancé en 2013, le plan France Très haut débit (FTHD) visait initialement à assurer la couverture de tout le territoire en très haut débit d'ici 2022, dont 80 % en fibre optique jusqu'à l'abonné. Le plan fixait aussi un objectif intermédiaire, et qui a été atteint, de 50 % des foyers couverts en très haut débit en 2017. L'objectif du Gouvernement associé aux nouveaux crédits déployés dans le plan de relance est de permettre la généralisation de la fibre jusqu'à l'abonné (FTTH) d'ici à 2025.

Sur le programme 343 « Plan France Très haut débit » de la mission « Économie » , l'année 2021 est marquée par la montée en puissance des CP du plan FTHD puisqu'ils devraient atteindre 622 millions d'euros, alors qu'ils n'étaient que de 163 millions d'euros en 2019 et de 440 millions d'euros en 2020.

L'objectif : 100 % des locaux éligibles non plus en 2022, mais en 2025

Il convient de distinguer la « couverture » du territoire, qui fait référence au nombre de locaux éligibles au très haut débit et constitue la référence du plan FTHD, de l'accès effectif à une connexion à très haut débit, qui implique le raccordement des locaux et la souscription d'un abonnement. En outre, le débit constaté peut s'avérer différent du débit théorique, notamment avec les technologies intermédiaires.

Les modalités de financement

Le plan France Très haut débit représente plus de 20 milliards d'euros d'investissements sur la période 2014-2022, ainsi répartis :

- 6 à 7 milliards d'euros de financement privé dans la zone d'initiative privée, dite zone « AMII » (zone d'appel à manifestation d'intention d'investissement), qui couvre 55 % de la population et 3 600 communes, dont 106 communes classées en « zone très dense » (ZTD). Dans ces territoires, les plus peuplés et donc les plus rentables, les opérateurs s'engagent à déployer sur fonds propres des réseaux privés mutualisés ;

- 13 à 14 milliards d'euros dans la zone d'initiative publique, sous forme de « réseaux d'initiative publique » (RIP). Dans ces territoires moyennement ou peu denses, qui regroupent 45 % de la population, le déploiement se fait à l'initiative des collectivités territoriales et est financé à parité par les opérateurs privés et par des subventions publiques (État pour 3,3 milliards d'euros, collectivités territoriales, Union européenne). Les réseaux déployés sont publics et ouverts à tous les opérateurs. Le Gouvernement a choisi de compléter ce guichet dans le plan de relance par 240 millions d'euros.

Source : commission des finances

Comme l'a déjà souligné le rapporteur spécial l'an passé, sur le plan budgétaire, la participation de l'État au plan France Très haut débit est toujours plus complexe. Elle était, dans un premier temps, portée par le fonds national pour la société numérique (FSN) 53 ( * ) pour un montant total de 900 millions d'euros, dans le cadre des programmes d'investissements d'avenir (PIA). Les crédits restants, soit 2,4 milliards d'euros, sont inscrits depuis 2014 sur le programme 343 « Plan France Très haut débit » de la mission « Économie ».

Alors que 280 millions d'euros en AE ont été ouverts via le recyclage d'AE en cours d'exercice sur le guichet du réseau d'initiative publique 54 ( * ) , le Sénat, à l'initiative de la commission des finances du Sénat, a été à l'initiative d'une dotation complémentaire de 30 millions d'euros portée par la troisième loi de finances rectificative pour 2021 .

Les ouvertures (ou réouvertures) d'autorisations d'engagement devraient ainsi atteindre 800 millions d'euros depuis février 2020, si l'on comptabilise les crédits dédiés aux usages. Il s'agit d'un effort important, que le rapporteur spécial tient à saluer.

Cependant, il y a lieu de demeurer attentif à ce que ces crédits nouveaux soient débloqués le plus rapidement possible pour permettre aux collectivités territoriales de candidater vite et de lancer leurs projets. D'après les réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial, la priorité ayant été donnée aux crédits du PIA, moins de la moitié des crédits ouverts sur le plan France Très haut débit en 2021 seront consommés cette année, le reste devant faire l'objet d'un report à 2022.

Le confinement ayant en outre engendré des coûts supplémentaires importants sur les chantiers de déploiement de la fibre, il serait nécessaire de disposer d'informations fiabilisées sur le niveau de ces surcoûts afin d'évaluer à moyen terme le montant des crédits devant être engagés pour parvenir à l'objectif de couverture intégrale du territoire d'ici à 2025.

Enfin, les crédits ouverts en 2022 doivent financer le recrutement de 4 000 conseillers numériques France services . Alors qu'aucun crédit ne devrait être prévu à ce titre au-delà de 2022, le rapporteur spécial s'interroge sur la portée de ces recrutements, alors que le besoin d'accompagnement des publics fragiles sur les territoires est réel et ne saurait se résoudre par un renfort aussi ponctuel , limité à l'année 2022. Le niveau particulièrement élevé du nombre de conseillers sur une période aussi restreinte ne peut que susciter des interrogations.

2. Soutien aux actions de développement local, dont outre-mer

Une partie des crédits 2021 pour la nouvelle génération de contrats de plan État-région (CPER) et des contrats de plan interrégional État-région (CPIER), qui relèvent du programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » de la mission « Cohésion des territoires » sont désormais inscrits au plan de relance. Plus largement, c'est également le cas de nombreux dispositifs à destination des collectivités, en particulier gérés par l'Agence nationale de la cohésion des territoires (ANCT), qui ont vocation à être portés à terme par la mission « Cohésion des territoires » .

En gestion en 2021, 100 millions d'euros en AE et 27 millions d'euros en CP ont été transférés du programme 364 vers le programme 112 . Ces crédits se sont ventilés de la façon suivante : 62 millions d'euros en AE et 11,8 millions d'euros pour les CPER ; 13 millions d'euros en AE et 10 millions d'euros en CP pour le programme « Fabrique des territoires » ; 8 millions d'euros en AE et 3 millions d'euros en CP pour d'autres programmes de l'ANCT et enfin 16 millions d'euros en AE et 2 millions d'euros en CP pour le plan de transformation et d'investissement pour la Corse (PTIC).

Concernant les CPER et CPIER, les crédits du plan de relance doivent financer essentiellement des projets déjà identifiés et prêts à démarrer, ce qui est la justification du placement de ces crédits dans la mission « Plan de relance » et non sur la mission « Cohésion des territoires ».

Comme indiqué l'année dernière, le choix de placer une partie des crédits CPER au sein de la mission « Plan de relance » n'est toutefois pas évident et nuit à la lisibilité de la politique contractuelle de l'État . En tout état de cause, étant donnée la différence de temporalité entre des contrats de plan s'étalant sur cinq ans et le plan de relance, l'intégralité des crédits devrait revenir au sein du programme 112 en 2023.

Évolution des crédits dédiés à la politique contractuelle de l'État avec les collectivités territoriales hors contrats de relance et de transition écologique

(en millions d'euros et en %)

LFI 2021

PLF 2021 (112 +Plan de relance)

PLF 2022 (112 +Plan de relance)

Évolution 2022/2021 hors plan de relance

Évolution 2022/2020

Évolution 2022/2021

dont plan de relance

dont plan de relance

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

AE

CP

Contrat de projets État-Régions

66

101

144

121

144

137

0%

-17%

33%

36%

0%

13%

Contrat de convergence et de transformation

5

0,8

5

0,8

5

2

0%

200%

21%

-41%

0%

200%

Pactes territoriaux

3

0,5

3

0,5

12

3

265%

465%

11%

-55%

265%

465%

Plan de transformation et d'investissement pour la Corse

11

3

-100%

-100%

Total

75

103

164

126

162

142

12%

-13 %

31 %

28 %

-1 %

13 %

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire

En 2022, la ventilation de l'enveloppe de crédits de 8 millions d'euros en AE et 96,1 millions d'euros en CP est la suivante :

- 52,6 millions d'euros en CP pour les projets dans le cadre des CPER et CPIER ;

- 12 millions d'euros en CP pour les projets dans le cadre du PTIC ;

- 16,5 millions d'euros en CP pour le programme « Fabriques des territoires » ;

- 7 millions d'euros en CP pour les actions conduites dans le cadre de l'Agenda rural ;

- 8 millions d'euros en AE et en CP pour financer la remise en état d'infrastructures transférées à la collectivité de Polynésie.

3. Plan « Avenir Montagnes »

Le Premier ministre a annoncé en mai 2021 la création du plan « Avenir Montagnes » pour les territoires de montagne particulièrement affectés par la crise sanitaire.

En 2021, le plan devait bénéficier de redéploiement de crédits internes à l'action « Cohésion territoriale » sur la mission « Plan de relance » . En PLF 2022, 46,2 millions d'euros en CP et 116 millions d'euros sont prévus . Ces crédits devraient être ensuite transférés au programme 112.

Ces montants sont destinés à financer, d'une part, le soutien à l'ingénierie des collectivités de montagne par l'ANCT et, d'autre part, au financement du fonds Avenir Montagnes Investissement abondé à parité par l'État et les régions.

Un protocole d'accord par région précisant une liste de projets et les engagements financiers de l'État, des régions, et, le cas échéant, des autres collectivités territoriales, a été établi en septembre 2021 . Ces protocoles d'accord seront ensuite réintégrés par voie d'avenant aux CPIER de massif 2021-2027 .

4. Développement et modernisation du réseau routier national et territorial et entretien des ouvrages d'art des collectivités territoriales
a) Le développement et la modernisation du réseau routier national bénéficieront de 250 millions d'euros répartis sur 2021 et 2022

D'après la direction générale des infrastructures, des transports et de la mer (DGITM), 60 millions d'euros d'AE devraient être consommées en 2022 pour le développement et la modernisation du réseau routier national, contre 85 millions d'euros en 2020 et 125 millions d'euros en 2021. Sur ces crédits en 2021, 90,1 millions d'euros en CP ont été dédiés aux infrastructures routières et ouvrages d'art nationaux.

La gestion de ces crédits devrait être assurée par l'AFITF en 2022 comme en 2021.

b) 100 millions d'euros sur deux ans pour le renforcement des ponts

100 millions d'euros sont prévus en 2021 et 2022 pour l'entretien des ouvrages d'art, dont 60 millions d'euros pour ceux des collectivités territoriales et 40 millions d'euros pour ceux du réseau routier national. D'après la DGITM, l'enveloppe totale de 40 millions d'euros d'autorisations d'engagement relative au renforcement des 7 ouvrages sur le réseau routier national non concédé sera intégralement mise en place en 2021. L'année dernière, 13 millions d'euros en CP ont été accordés aux ouvrages d'art des collectivités territoriales

Deux opérations ont été engagées en travaux à ce jour : le viaduc d'Autreville (Grand Est) et le pont de Kourou (Guyane) pour un montant total de 23,1 millions d'euros, les autres seront engagées au second semestre 2021 et en 2022.

Les crédits destinés aux collectivités territoriales devraient être gérés par la direction générale des collectivités locales (DGCL) et ceux destinés aux routes nationales par l'AFITF.

5. Une aide au développement d'une offre de tourisme durable

En 2021, la présente action portait 50 millions d'euros en AE pour soutenir le secteur touristique. Une dotation de 15 millions d'euros en CP est prévue pour 2022. Ces crédits visent en particulier à soutenir les restaurants en milieu rural et à améliorer le bilan énergétique des hébergements touristiques. Au cours de cette année et s'agissant de ce dernier aspect, 65 partenaires ont été sélectionnés pour une aide d'environ 4 millions d'euros et près de 600 diagnostics ont été réalisés chez des professionnels du tourisme. Concernant les établissements en milieu rural, 200 projets ont été déposés en 2021 dont une vingtaine seront sélectionnés pour environ 1,3 million d'euros.


* 53 Géré par la Caisse des dépôts et consignations (CDC).

* 54 Il s'agit de recyclage d'autorisations d'engagement déjà votées par le Parlement, appartenant donc à l'enveloppe globale de 3,3 milliards d'euros.

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