Rapport général n° 163 (2021-2022) de M. Jérôme BASCHER , fait au nom de la commission des finances, déposé le 18 novembre 2021

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N° 163

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2021-2022

Enregistré à la Présidence du Sénat le 18 novembre 2021

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2022 ,

Par M. Jean-François HUSSON,

Rapporteur général,

Sénateur

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES ET DISPOSITIONS SPÉCIALES

(seconde partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 13

ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT

COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE : PARTICIPATION DE LA FRANCE AU DÉSENDETTEMENT DE LA GRÈCE, COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : ACCORDS MONÉTAIRES INTERNATIONAUX, COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS : AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS

Rapporteur spécial : M. Jérôme BASCHER

(1) Cette commission est composée de : M. Claude Raynal, président ; M. Jean-François Husson, rapporteur général ; MM. Éric Bocquet, Emmanuel Capus, Bernard Delcros, Vincent Éblé, Charles Guené, Mme Christine Lavarde, MM. Dominique de Legge, Albéric de Montgolfier, Didier Rambaud, Jean-Claude Requier, Mmes Sophie Taillé-Polian, Sylvie Vermeillet, vice-présidents ; MM Jérôme Bascher, Rémi Féraud, Marc Laménie, Stéphane Sautarel, secrétaires ; MM. Jean-Michel Arnaud, Arnaud Bazin, Christian Bilhac, Jean-Baptiste Blanc, Mme Isabelle Briquet, MM. Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Cozic, Vincent Delahaye, Philippe Dominati, Mme Frédérique Espagnac, MM. Éric Jeansannetas, Patrice Joly, Roger Karoutchi, Christian Klinger, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Victorin Lurel, Hervé Maurey, Thierry Meignen, Sébastien Meurant, Jean-Marie Mizzon, Claude Nougein, Mme Vanina Paoli-Gagin, MM. Paul Toussaint Parigi, Georges Patient, Jean-François Rapin, Teva Rohfritsch, Pascal Savoldelli, Vincent Segouin, Jean Pierre Vogel.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 15 ème législ.) : 4482 , 4502 , 4524 , 4525, 4526 , 4527 , 4597 , 4598 , 4601 , 4614 et T.A. 687

Sénat : 162 et 163 à 169 (2021-2022)

L'ESSENTIEL

Troisième mission du budget général de l'État en crédits de paiement (CP) 1 ( * ) , la mission « Engagements financiers de l'État » se compose de sept programmes. Ses CP connaissent une hausse de 13,6 % en 2022 par rapport à la loi de finances initiale 2021, pour atteindre 44,19 milliards d'euros, dont 37,45 milliards d'euros affectés à la charge de la dette 2 ( * ) . Cette dernière représenterait ainsi 8 % des dépenses du budget général, en incluant les prélèvements sur recettes.

Trois facteurs expliquent cette évolution : l'augmentation de la charge de la dette et de la trésorerie de l'État de 7,2 %, le rehaussement des crédits consacrés aux appels en garantie de l'État (+ 34 %, pour un montant total de 3,4 milliards d'euros) et la création du programme 369, qui porte 4,4 % des CP de la mission (1,9 milliard d'euros).

De la prévision révisée pour 2021 au projet de loi de finances pour 2022

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Le besoin de financement de l'État atteindrait quant à lui 302,5 milliards d'euros en 2022, contre 321,1 milliards d'euros en 2021. Si ce niveau est en nette baisse par rapport à 2021 (- 5,8 %) et 2020 (- 2,3 %) il apparaît toujours bien plus élevé que celui d'avant-crise : 220,5 milliards d'euros en 2019, soit 37 % de moins que celui prévu pour 2022. Les émissions nettes à moyen et long terme (260 milliards d'euros) représenteraient 10 % du PIB en 2022, l'endettement représentant la première source de financement de l'État, devant les ressources fiscales et non fiscales (236,4 milliards d'euros en 2022, hors prélèvements sur recettes).

I. DANS UN CONTEXTE DE TAUX TOUJOURS FAVORABLE, ET MÊME SI LA CHARGE DE LA DETTE AUGMENTE EN 2022 SOUS LE DOUBLE-EFFET DE L'INFLATION ET DU VOLUME DES DÉPENSES PUBLIQUES, LA GESTION DE LA DETTE LIÉE À L'ÉPIDÉMIE DE COVID-19 DOIT SE PASSER DE TOUT ARTIFICE

A. EN DÉPIT D'UN NIVEAU DE DÉPENSES PUBLIQUES ÉLEVÉ, LA CHARGE DE LA DETTE SE STABILISE, GRÂCE AU SEUL « EFFET TAUX »

Les crédits demandés pour le programme 117 dans le PLF 2022 progressent de 7 % par rapport à la LFI 2021, pour s'établir à 38,65 milliards d'euros . Ceux dédiés à la trésorerie de l'État diminuent (1,21 milliard d'euros, en baisse de 3,2 %), tandis que ceux affectés à la charge de la dette augmentent (37,45 milliards d'euros, en hausse de 7,5 %). Cette hausse très brutale s'explique en grande partie par l'adoption à l'Assemblée nationale d'un amendement du Gouvernement ouvrant 1,133 milliards d'euros supplémentaires sur ce programme, au titre de la charge de la dette. En tenant compte toutefois de la prévision révisée pour 2021, les crédits de la charge de la dette connaissent certes une augmentation, mais moins forte (+ 3,3 %) . Sur longue période, la valeur nominale des intérêts de la dette apparaît ainsi en nette baisse .

Évolution de la charge de la dette depuis 2011

(en milliards d'euros et en pourcentage)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

Cette évolution est à l'opposé de celle constatée pour l'encours de dette négociable, qui a progressé de 75 % depuis 2011 et atteindrait près de 2 300 milliards d'euros en 2022. En décomposant les facteurs d'évolution de la charge de la dette, il apparaît que l'effet taux demeure toujours extrêmement favorable . Il compense notamment les effets inflation et volume, aucun effort n'ayant été accompli sur ce dernier point par le Gouvernement.

Les facteurs d'évolution de la charge de la dette depuis 2015

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires

B. LA CRÉATION D'UN PROGRAMME POUR RETRACER « L'AMORTISSEMENT DE LA DETTE DE L'ÉTAT LIÉE À LA COVID-19 » RELÈVE DE L'ARTIFICE COMPTABLE

Après s'être interrogé sur les facteurs de risque, limité, à court et moyen terme, ainsi que sur les « faux débats » autour de la dette (maturité, détention), le rapporteur spécial s'est penché, dans ce contexte, sur le choix du Gouvernement de créer un nouveau programme 369. Dédié à l'amortissement de la dette de l'État liée à la covid-19, il est doté de 165 milliards d'euros en autorisations d'engagement , un montant inédit qui place la mission en première place du budget général, et de 1,9 milliard d'euros en CP .

Chaque année, une part de la hausse des recettes fiscales dues à la croissance par rapport à celles de 2020 , fixée par défaut à 5,9 %, serait affectée à ce programme, pour doter ensuite la Caisse de la dette publique , via le compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État ». L'objectif est de retracer l'amortissement de la « dette covid » de l'État d'ici 2042.

Aucun argument économique ou budgétaire, et encore moins de gestion, ne justifie l'isolement de la « dette covid » pour en retracer l'amortissement . Les crédits alloués à ce programme pourraient très bien être utilisés pour réduire le déficit à due concurrence, produisant le même effet sur le tableau de financement de l'État. L'opération proposée par le biais du programme 369 a donc un effet nul sur le stock de dette. Elle pourrait même s'avérer contre-productive : le Gouvernement cherche-t-il à laisser entendre que la dette de l'État hors covid n'est pas amortie ? C'est bien sûr faux : la France honore toujours ses engagements financiers, quel que soit le contexte dans lequel elles ont été contractées. Les titres arrivant à échéance sont amortis, sans qu'il n'y ait besoin d'un programme particulier pour en retracer la typologie.

Ce programme relève donc au mieux d'une opération de communication, d'un artifice comptable et le rapporteur spécial propose donc de le supprimer . Cette tentative du Gouvernement de donner l'impression de traiter le « sujet de la dette » ne suffit pas à masquer le fait que la dépense publique continue d'augmenter, même hors crise et hors relance, et que c'est bien cette absence d'effort sur les dépenses ordinaires qui risque de peser sur la charge de la dette et sur la détérioration de l'endettement public à long terme.

II. SOUS DES HYPOTHÈSES PRUDENTES, LES CRÉDITS PROVISIONNÉS POUR LES APPELS EN GARANTIE DE L'ÉTAT POURSUIVENT LEUR HAUSSE EN 2022

Sur les autres programmes de la mission, le programme 114 « Appels en garantie de l'État » est le seul à avoir été significativement affecté par la crise sanitaire. Ses crédits, évaluatifs et portés à 3,35 milliards d'euros , connaîtraient une nouvelle hausse de 34 % par rapport à la LFI 2021 et même de 336 % par rapport à la prévision révisée pour 2021.

Toutes les actions du programme présentent une hausse de leurs crédits depuis 2020, avec au total une multiplication par 36 des montants alloués, et témoignent de la mobilisation de l'instrument des garanties pour pallier les conséquences de la crise sanitaire sur le tissu économique , via notamment le dispositif des prêts garantis par l'État (PGE).

Le nombre d'entreprises ayant bénéficié d'un PGE au 1 er octobre 2021

L'encours total des PGE au 1 er octobre 2021

La provision pour appel en garantie au titre des PGE dans le PLF 2022

Le taux de sinistralité des PGE a été révisé à la baisse dans le présent projet de loi de finances, avec un taux de pertes global désormais évalué à 3,78 %, soit 5,3 milliards d'euros , pour une perte nette, après prise en compte des recettes de garanties, de 2,5 milliards d'euros. En 2021, le montant des décaissements s'est établi à un niveau bien inférieur que la prévision (environ 20 millions d'euros par mois). Dans ces conditions, la prévision pour 2022 apparaît très prudente. Il convient toutefois de rappeler que la plupart des PGE commenceront à être remboursés d'avril à octobre 2022 , après la deuxième année de différé de remboursement, et que c'est sans doute à partir de l'année prochaine que l'évaluation du coût réel pour les finances publiques de ce dispositif pourra être affinée.

La même prudence est de mise pour les 471 millions d'euros prévus en 2022 pour le risque d'appel au titre de la garantie apportée par la France au Fonds de garantie paneuropéen porté par la Banque européenne d'investissement. Ce fonds a été créé en 2020 pour attribuer des financements au profit des PME européennes, par le biais d'instruments de partage de risques. La France, qui en est le troisième bénéficiaire, s'est engagée pour 4,7 milliards d'euros, sur les 25 milliards d'euros de garantie prévus pour l'ensemble des États membres contributeurs. La sinistralité nette est évaluée à 20 %, avec un coût potentiel maximal de 940 millions d'euros.

III. L'AMORÇAGE D'UNE NORMALISATION DES DÉPENSES DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS » 3 ( * )

Le compte de concours financiers « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » a constitué un instrument privilégié de soutien au secteur des transports face aux conséquences de la crise sanitaire . Trois programmes ont ainsi été créés par loi de finances rectificative en 2020 : le programme 826 pour les avances aux exploitants d'aéroports au titre des dépenses de sûreté-sécurité, les programmes 827 et 828 pour celles respectivement octroyées à Ile-de-France Mobilités et aux autres autorités organisatrices de la mobilité. Un nouveau est créé par le présent projet de loi de finances, pour les avances remboursables destinées au financement des infrastructures de transports collectifs du quotidien de la métropole d'Aix-Marseille-Provence (744 millions d'euros en AE et 100 millions d'euros en CP).

Aux 3,28 milliards d'euros alloués en 2020 et 2021 4 ( * ) , se sont ajoutés les crédits supplémentaires ouverts sur le programme 824, qui retrace les avances au Budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (Bacea). C'est d'ailleurs le seul programme dont la dynamique de dépense se poursuit en 2022 : 707 millions d'euros sont prévus pour 2022 , un niveau certes en baisse par rapport à 2021 (1,26 milliard d'euros en prévision révisée), mais toujours bien plus élevé que celui constaté en 2019 (59,71 millions d'euros).

Enfin, au regard du caractère répété de certaines avances, qui plus est octroyées sur des durées longues qui dépassent le simple soutien de trésorerie, une réflexion doit être menée pour clarifier, dans notre maquette budgétaire, ce qui relève d'une avance et ce qui relève du prêt , et éviter ainsi de voir chaque année les règles des avances contournées.

Réunie le mardi 2 novembre 2021, sous la présidence de M. Dominique de Legge, vice-président, la commission des finances a décidé de réserver son vote sur les crédits de la mission et de proposer au Sénat l'adoption des crédits des comptes spéciaux associés.

Réunie le mardi 9 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de ne pas adopter les crédits de la mission.

Elle a confirmé ses votes le jeudi 18 novembre 2021.

Au 10 octobre, date limite prévue par la loi organique relative aux lois de finances pour l'envoi des réponses au questionnaire budgétaire, le rapporteur spécial avait reçu 95 % des réponses pour la mission « Engagements financiers de l'État », 100 % pour le compte de concours financiers « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » et 0 % pour le compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce ».

PREMIÈRE PARTIE
LA MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT »

Désormais première mission du budget général en autorisations d'engagement et troisième pour les crédits de paiement 5 ( * ) , la mission « Engagements financiers de l'État » se compose de sept programmes , dont un portant sur l'amortissement de la dette Covid créé par le projet de loi de finances pour 2022 :

- le programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État » , dont 97 % des crédits sont alloués au paiement des intérêts de la dette. Ce programme doit permettre de répondre à deux objectifs : (1) garantir la solvabilité de l'État en lui permettant d'honorer ses engagements financiers dans les conditions les moins onéreuses et les plus sûres possibles et (2) s'assurer que le compte de l'État à la Banque de France, « le compte unique du Trésor », est créditeur à la fin de chaque journée 6 ( * ) ;

- le programme 114 « Appels en garantie de l'État » , qui retrace les crédits destinés à couvrir les appels des garanties octroyées par l'État. L'État garantit principalement des dettes émises par des tiers, soit pour leur permettre de bénéficier de conditions de financement plus favorables, soit pour les garantir sur un engagement qu'ils ont pris pour le compte de l'État. Le programme retrace en particulier les crédits engagés dans le cadre de la provision sur les prêts garantis par l'État (PGE) ;

- le programme 145 « Épargne » , qui est destiné à soutenir le secteur du logement et de l'accession à la propriété. Il se distingue toutefois par le poids des 28 dépenses fiscales qui lui sont rattachées, dont le coût est près de 79 fois supérieur aux crédits ouverts sur ce programme ;

- le programme 336 « Dotation du mécanisme européen de stabilité » , qui soutient la contribution française au capital du Mécanisme européen de stabilité (MES) ;

- le programme 338 « Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement », qui est le support budgétaire de la participation de la France à l'augmentation du capital de la Banque européenne d'investissement. À l'instar des années précédentes, il n'est pas doté de crédits dans le projet de loi de finances pour 2022 et n'appellera donc pas de commentaire particulier de la part du rapporteur spécial ;

- le programme 344 « Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque » , qui vise à soutenir les collectivités territoriales ayant souscrit aux prêts structurés à risque ou « prêts toxiques ». Créé par l'article 92 de la loi de finances pour 2014 7 ( * ) , il intervient de deux manières : en apportant une aide au remboursement anticipé des emprunts 8 ( * ) et en prenant en charge une partie des intérêts dus sur les échéances dégradées (15 % des collectivités territoriales aidées) ;

- le programme 369 « Amortissement de la dette de l'État liée à la covid-19 » (nouveau) , qui porte les crédits qui seront affectés à la Caisse de la dette publique pour rembourser une somme équivalente au montant de la dette de l'État liée à la covid-19, évaluée par le Gouvernement à 165 milliards d'euros.

Du fait de ses effets très significatifs sur les constats dressés par le rapporteur spécial, les chiffres présentés ci-après tiendront compte de l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement du Gouvernement ouvrant 1,13 milliard d'euros supplémentaires sur le programme 117, au titre de la charge de la dette 9 ( * ) .

Dans le cadre du présent projet de loi de finances (PLF), les crédits demandés connaissent donc une très nette progression pour s'établir à :

- 207,12 milliards d'euros en autorisations d'engagement (AE), soit une multiplication par cinq par rapport à la loi de finances initiale (LFI) pour 2021, du fait principalement de la création du nouveau programme 369 « Amortissement de la dette de l'État liée à la covid-19 », qui porte 80 % des AE de la mission ;

- 44,19 milliards d'euros en crédits de paiement (CP), soit une hausse de 10,68 % par rapport à la LFI 2021. Trois facteurs expliquent cette évolution : l'augmentation de la charge de la dette et de la trésorerie de l'État de 7,2 %, le rehaussement des crédits consacrés aux appels en garantie de l'État (+ 34 %) et la création du programme 369, qui porte 4,4 % des CP de la mission.

Le tableau ci-après détaille l'évolution des crédits de la mission entre 2021 et 2022 .

Évolution des crédits de la mission « Engagements financiers de l'État »

(en millions d'euros et en pourcentage)

Exécution 2020

LFI 2021

2021 (révisé 10 ( * ) )

PLF 2022

Part dans la mission en 2022

Évolution PLF 2022/ LFI 2021

[117] Charge de la dette et trésorerie de l'État

AE

35 802,15

36 073,00

37 535,00

38 656,00

18,66 %

7,16 %

CP

35 802,15

36 073,00

37 535,00

38 656,00

87,47 %

7,16 %

[114] Appels en garantie de l'État

AE

92,67

2 504,80

767,64

3 350,91

1,62 %

33,78 %

CP

92,67

2 504,80

767,64

3 350,91

7,58 %

33,78 %

[145] Épargne

AE

57,60

61,62

63,64

60,21

0,03 %

- 2,29 %

CP

57,81

61,62

63,64

60,21

0,14 %

- 2,29 %

[336] Dotation du Mécanisme européen de stabilité

AE

98,00

79,00

62,36

57,00

0,03 %

- 27,85 %

CP

98,00

79,00

62,36

57,00

0,13 %

- 27,85 %

[338] Augmentation de capital de la Banque européenne d'investissement

AE

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00 %

CP

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00 %

[344] Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque

AE

0,00

0,00

0,00

0,00

0,00 %

0,00 %

CP

177,51

189,49

189,49

185,64

0,42 %

- 2,03 %

[369] Amortissement de la dette de l'État liée à la covid-19 (nouveau)

AE

165 000,00

79,66 %

CP

1 885,00

4,27 %

Total

AE

36 050,42

38 718,42

38 428,64

207 124,12

100 %

434,95 %

CP

36 228,14

38 907,91

38 618,13

44 194,76

100 %

13,59 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

I. LES CONSÉQUENCES DE LA CRISE SANITAIRE SUR LES ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT SONT SIGNIFICATIVES ET LA GESTION DE LA DETTE DE L'ÉTAT DOIT SE GARDER DE TOUT ARTIFICE COMPTABLE

Les conséquences de la crise sanitaire sur les engagements financiers de l'État sont significatives et touchent particulièrement les crédits affectés aux trois programmes 117 (charge de la dette et de la trésorerie de l'État), 114 (appels en garantie de l'État) et 369 (amortissement de la dette de l'État liée à l'épidémie de covid-19). Ils représentent plus de 99 % des crédits de la mission .

Il convient de rappeler ici que ces crédits, contrairement à ceux alloués à la majorité des programmes du budget général, ne sont pas limitatifs mais évaluatifs . Cette dérogation à l'autorisation parlementaire s'explique par la nécessité pour l'État de toujours être en mesure d'honorer ses engagements. Si ce principe rend ces programmes peu pilotables et limite les modifications pouvant être proposées au cours de l'examen parlementaire, il ne doit pas empêcher de s'interroger sur le niveau des crédits alloués aux programmes et sur les hypothèses qui sous-tendent ces abondements.

A. DANS UN CONTEXTE DE TAUX FAVORABLE, MAIS SOUS L'EFFET DE L'INFLATION ET D'UN NIVEAU DE DÉPENSES PUBLIQUES TOUJOURS ÉLEVÉ, LA CHARGE DE LA DETTE AUGMENTERAIT NETTEMENT EN 2022

1. Une augmentation nette de la charge de la dette entre la prévision révisée pour l'année 2021 et le projet de loi de finances 2022
a) Un programme placé sous la responsabilité de l'Agence France Trésor

Le programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État » est placé sous la responsabilité de l'Agence France Trésor (AFT). Service à compétence nationale créé en 2001, l'AFT s'appuie sur un effectif de 43 personnes (27 fonctionnaires et 16 contractuels), pour une masse salariale prévisionnelle estimée à 3,7 millions d'euros en 2021, un montant stable par rapport à l'année 2020. Les dépenses de personnel de l'AFT sont retranscrites dans le programme 305 « Stratégies économiques » de la mission « Économie ».

L'AFT doit en permanence contrôler les risques techniques et financiers qui pourraient nuire à sa mission . Le rapporteur spécial souligne l'expertise reconnue de l'agence dans ces deux domaines .

Au regard de la sensibilité des missions exercées par l'AFT, les dispositifs internes de pilotage des risques financiers et les procédures prudentielles mises en oeuvre sont soumis chaque année à une évaluation externe . L'audit doit mesurer l'adéquation des procédures internes de l'AFT à ses activités et aux risques associés, sous cinq ans angles 11 ( * ) , et en prenant comme référence les dispositions règlementaires en vigueur dans les établissements financiers. Les résultats sont transmis chaque année au Parlement : pour chacun de ces angles, l'AFT a reçu en 2020 la meilleure note possible (1), ce qui signifie que le dispositif existant permet de couvrir de manière satisfaisante les risques identifiés 12 ( * ) .

Sept incidents dans l'exécution des opérations de dette et de trésorerie et susceptibles d'affecter le solde du compte à la Banque de France ont été constatés en 2020, contre treize en 2019. Aucun d'entre eux n'a généré de risque pour la continuité financière de l'État. Le nombre total d'incidents s'est élevé à 83, du fait de difficultés techniques ou informatiques. S'ils sont en hausse par rapport à 2019 (77), cette augmentation s'explique en grande partie par le contexte de la crise sanitaire et la mise en place du télétravail, avec des indisponibilités de connexion ou des erreurs humaines, corrigées rapidement et, ayant conduit, le cas échéant, à un renforcement des procédures de contrôle 13 ( * ) .

b) Une hausse significative des crédits par rapport à la loi de finances initiale pour 2021, qui doit être tempérée pour tenir compte des évolutions intervenues en cours de gestion

Les crédits demandés pour le programme 117 dans le PLF 2022 progressent de 7,2 % par rapport à la LFI 2021, pour s'établir à 38,66 milliards d'euros (AE=CP). Ils sont affectés à deux actions qui connaissent chacune, dans deux sens opposés, de nettes évolutions :

- l'action 01 porte les crédits liés à la gestion de la dette, soit 37,45 milliards d'euros en 2022 (84,3 % des crédits de la mission). Si ce montant est en très nette hausse par rapport à la LFI 2021 (+ 7,5 %), ce constat doit être nuancé (+ 3,3 %) pour tenir compte de la prévision révisée pour l'année 2021, la charge de la dette étant désormais attendue à 36,26 milliards d'euros ;

- l'action 02 correspond à la gestion de la trésorerie et recouvre 3,2 % des crédits du programme, soit un montant de 1,21 milliard d'euros en 2022 . Le montant prévu pour 2022 est en baisse de 3,2 % par rapport à la prévision inscrite en LFI 2021 et de 5,3 % par rapport à la prévision révisée pour 2021 (1,28 milliard d'euros). L'impact budgétaire de la gestion de la trésorerie de l'État est structurellement déficitaire depuis quelques années : les dépôts sur le compte du Trésor à la Banque de France sont rémunérés négativement, tandis que certains correspondants du Trésor bénéficient d'une rémunération positive. La diminution constatée entre 2021 et 2022 provient pour partie d'une modification de périmètre, avec le transfert de la rémunération de l'institut d'émission d'outre-mer du programme 117 vers le programme 305 « Stratégies économiques » de la mission « Économie ».

Évolution des crédits (AE=CP) des deux actions du programme 117

(en millions d'euros et en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Concernant la trésorerie de l'État , le Parlement a autorisé le Gouvernement à prendre par ordonnance les mesures relevant du domaine de la loi et destinées à prescrire le dépôt sur le compte du Trésor des disponibilités des personnes morales soumises aux règles de la comptabilité publique et d'organismes publics ou privés chargés d'une mission de service public, sous conditions 14 ( * ) .

Comme la commission des finances l'avait relevé lors de l'examen de cette disposition 15 ( * ) , la centralisation des trésoreries permet à l'État de diminuer son besoin de financement en permettant notamment de diminuer le recours aux titres de court terme. Ce sont ces titres qui sont particulièrement mobilisés en cas de crise et de hausse brutale du besoin de financement. Entre 2000 et 2020, le niveau des emprunts aurait ainsi été réduit de 200 milliards d'euros, pour une économie cumulée de charge d'intérêts d'environ 70 milliards d'euros.

L'ordonnance a été publiée le 2 décembre 2020 16 ( * ) et complétée par un décret du 14 janvier 2021 17 ( * ) . Elle liste les organismes publics ou privés chargés d'une mission de service public et concernés, à compter du 1 er octobre 2021, par la centralisation au Trésor des disponibilités d'organismes publics ou privés chargés d'une mission de service public 18 ( * ) . L'impact est estimé à trois milliards d'euros 19 ( * ) .

c) Un contexte de taux qui demeure extrêmement favorable et qui explique à lui seul la maîtrise de la charge de la dette en 2022

La charge de la dette 20 ( * ) représenterait 8 % des dépenses du budget général , estimées à 454,6 milliards d'euros en incluant les prélèvements sur recettes, contre 7,4 % en révisé pour 2021 et 8,6 % initialement. Cet écart s'explique par la diminution des dépenses du budget général entre 2022 et 2021, où elles sont désormais attendues à 494,8 milliards d'euros.

Quant à la valeur nominale des intérêts de la dette de l'État, elle connait une nette diminution depuis 2011, avec toutefois une nouvelle dynamique haussière depuis 2021, qui se poursuit en 2022 . Le rebond constaté en 2021 s'expliquait par le sursaut de l'inflation, qui était en revanche proche de 0 en 2020.

Évolution de la charge de la dette depuis 2011

(en milliards d'euros et en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Or, en décomposant les facteurs d'évolution de la charge de la dette, il apparaît que l'effet taux demeure toujours très favorable , et concourt à lui seul à la stabilisation des crédits alloués au remboursement de la dette de l'État. Il compense les trois autres effets : volume, inflation et calendaires (c'est-à-dire le moment de l'année auquel l'État procède aux opérations de financement 21 ( * ) ).

Effets des facteurs d'évolution de la charge de la dette
entre la prévision révisée pour 2021 et le PLF 2022

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires et les modifications apportées aux crédits du programme 117

À l'instar des années passées, le Gouvernement ne peut donc se prévaloir d'une maîtrise de la charge de la dette que sous l'effet d'un contexte clément, mais indépendant de sa volonté.

Les facteurs d'évolution de la charge de la dette depuis 2015

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Aucun effort, même avant la crise sanitaire, n'a été accompli pour réduire la charge de la dette autrement qu'en profitant d'un environnement de taux favorable. Dans son avis sur le projet de loi de finances 2022, le Haut Conseil des finances publiques ne manque pas de relever que « le poids des dépenses publiques dans le PIB serait en 2022 près de deux points au-dessus de son niveau de 2019 [...], en dépit du net rebond de l'activité et de l'extinction de la plupart des dépenses engagées pour répondre à la crise sanitaire » 22 ( * ) . De même, hors dépenses de soutien et de relance qui sont, elles, logiquement en diminution, la dépense publique sous norme pilotable connaîtrait une augmentation très significative de près de 18 milliards d'euros par rapport à la prévision pour 2021.

(1) 2021 et 2022 marquent le rebond de l'effet inflation sur la charge de la dette

L'évolution de l'inflation a conduit a profondément revoir les prévisions pour les crédits affectés à la charge de la dette sur la période 2020-2022 . Une partie des obligations assimilables du Trésor (OAT), qui représente au total un peu moins de 10 % de l'encours de dette négociable de l'État, est indexée sur l'inflation française (OATi) et sur l'inflation en zone euro (OAT€i). De manière mécanique, une chute de 0,1 point de l'inflation se traduit par une économie de 200 millions d'euros sur la charge de la dette.

En 2020, deux milliards d'euros avaient été annulés dans le cadre de la deuxième loi de finances rectificative (LFR) 23 ( * ) du fait d'une inflation moindre que celle anticipée pour l'année (- 1 point par rapport à l'anticipation de la loi de finances initiale). En 2021 au contraire, la LFR du 19 juillet 24 ( * ) a conduit à ouvrir 1,9 milliard d'euros de crédits supplémentaires, du fait d'une inflation plus forte qu'anticipée (1,4 % en France et 1,6 % en zone euro contre des hypothèses de respectivement 0,6 % et 0,8 %).

En 2022, l'estimation initiale de la provision pour charge d'indexation du capital des titres indexés s'appuyait sur un taux d'inflation (prix à la consommation hors tabac) de 1,5 % , qui correspondait à la prévision retenue pour la France et la zone euro dans le cadrage macroéconomique du projet de loi de finances pour 2022. Elle s'élevait à 4,1 milliards d'euros , contre 2,9 milliards d'euros en prévision révisée pour 2021. Or, l'amendement adopté par l'Assemblée nationale en première lecture a conduit à ouvrir 1,1 milliard d'euros supplémentaires au titre de la charge de la dette, dont 800 millions d'euros dû à une révision à la hausse des prévisions d'inflation en zone euro .

(2) Le contexte de taux continue de contribuer à la maîtrise de la charge de la dette, en dépit d'un niveau de dépenses toujours plus élevé

La diminution de la charge de la dette sur longue période provient d'un contexte de taux extrêmement favorable, qui permet à la France de financer ses nouvelles émissions et de refinancer ses titres à un coût toujours plus faible . Le taux apparent de la dette s'est ainsi établi à 1,25 % en 2020, contre 3,2 % en 2011.

Ainsi, selon les données de l'AFT, le taux moyen pondéré sur les émissions de dette d'État à moyen et long terme, les obligations assimilables du Trésor (OAT), ressort sur les trois premiers trimestres de l'année 2021 à - 0,06 % , à comparer à un taux historiquement bas de - 0,13 % en 2020, un taux de 0,11 % en 2019, une moyenne de 1,52 % sur la période 2009-2018 et une moyenne de 4,15 % sur la période 1998-2008.

Le constat est identique pour les titres de court-terme, les bons du Trésor à taux fixe et à intérêt précompté (BTF). Leur niveau s'est élevé à - 0,64 % en moyenne sur les trois premiers trimestres 2021 , contre - 0,56 % en 2020 et - 0 ,58 % en 2019.

C'est ce contexte de taux qui explique le paradoxe apparent entre, d'une part, une diminution à long terme de la charge de la dette et, d'autre part, une augmentation en parallèle de l'encours de dette négociable , avec une accélération très nette depuis 2020, du fait des réponses apportées par le Gouvernement à la crise sanitaire et à ses effets sur le tissu économique national.

Ainsi, en 10 ans, l'encours de la dette négociable de l'État a augmenté de plus de 65 % , dont 14 % entre 2020 et 2022. Il atteindrait près de 2 300 milliards d'euros en 2022, contre 2 000 milliards d'euros en 2020 et 1 690 milliards d'euros à la fin de l'année 2017. Sur la même période, la charge de la dette a connu une trajectoire inverse, avec une baisse de près de 20 % (cf. graphique supra ).

Évolution de l'encours de la dette négociable de l'État depuis 2012

(en milliards d'euros et en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

D'après les projections du Gouvernement 25 ( * ) , la dette devrait atteindre, à la fin de l'année 2021, 115,3 % du PIB, soit près de 2 800 milliards d'euros, contre 116,2 % du PIB initialement prévu. Elle connaîtrait un reflux de plus d'1,8 point en 2022 pour atteindre 113,5 points de PIB , du fait du rebond du PIB et d'un moindre déficit par rapport à 2021, hors dépenses nouvelles annoncées lors du dernier trimestre 2021.

Ce ratio, s'il est élevé, ne pourra pas être drastiquement réduit à court et à moyen terme sans aspect récessif, d'autant que la croissance peut justement conduire à le faire diminuer. Il demeure néanmoins un critère, parmi d'autres, à prendre en compte pour apprécier la soutenabilité de la dette publique française .

2. Alors que le besoin de financement de l'État se maintient à un niveau élevé, la vigilance, et non l'alarmisme, s'impose face à la charge de la dette de l'État
a) Un besoin de financement de l'État en baisse de près de 7 % par rapport à 2021, mais toujours bien plus élevé que le niveau d'avant crise
(1) Le « retour à la normale » n'est pas encore amorcé

Le besoin de financement de l'État devrait atteindre 302,5 milliards d'euros en 2022 , contre 321,1 milliards d'euros après révision pour l'année 2021 (293 milliards d'euros dans la prévision initiale). Si ce niveau est en nette baisse par rapport à 2021 (- 5,8 %) et 2020 (- 2,3 %) il apparaît toujours bien plus élevé que celui d'avant-crise : 220,5 milliards d'euros en 2019, soit 37 % de moins que celui prévu pour 2022.

Évolution du besoin de financement de l'État

(en milliards d'euros et en pourcentage)

2020 (exécuté)

LFI 2021

2021 (révisé) 26 ( * )

PLF 2022

Évolution 2022 / LFI 2021

Évolution 2022 / 2021 révisé

Besoin de financement

Amortissement de titres d'État à moyen et long terme

136,1

118,3

118,3

147,9

25,02 %

25,02 %

Valeur nominale

130,5

117,5

117,5

144,3

22,81 %

22,81 %

Suppléments d'indexation dus

5,6

0,8

0,8

3,6

350,00 %

350,00 %

Amortissement des autres dettes (dettes reprises, etc...)

2,2

1,3

1,3

3,1

138,46 %

138,46 %

Déficit budgétaire

178,1

173,3

205,2

155,1

- 10,50 %

- 24,42 %

Autres besoins de trésorerie

- 6,9

0,1

- 3,7

- 3,6

- 2,70 %

Total

309,5

293,0

321,1

302,5

3,24 %

- 5,79 %

Ressources de financement

Émissions de titres à moyen et long termes, nettes des rachats

260

260

260

260

0,00%

0,00%

Ressources affectées à la Caisse de la dette publique et consacrées au désendettement

0

0

0

1,9

Variation de l'encours de titres à court terme

54,7

19,5

5

5

- 74,36 %

0,00%

Variation des dépôts des correspondants

27,8

7

8,9

0

- 100,00 %

- 100,00%

Variation des disponibilités du Trésor à la Banque de France et des placements de trésoreries de l'État

-63,4

0

33,4

32,1

- 3,89 %

Autres ressources de trésorerie 27 ( * )

30,4

6,5

13,8

3,5

- 46,15 %

- 74,64 %

Total

309,5

293,0

321,1

302,5

3,24 %

- 5,79 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

85 % des émissions de titres à moyen et long terme prévues pour l'année 2021 ont d'ores et déjà été réalisées par l'AFT , dans de très bonnes conditions 28 ( * ) . 260 milliards d'obligations à moyen et long terme devront également être émis par la France en 2022, un chiffre stable depuis 2020 et la déformation brutale du besoin de financement de l'État.

En revanche, en 2021 et en 2022, la part des bons du Trésor à taux fixe et à intérêt précompté (BTF) dans les ressources de financement devrait connaître une variation moins élevée qu'entre 2019 et 2020 29 ( * ) , où ces titres ont servi de variable d'ajustement pour éviter de trop bouleverser le programme d'émission de titres à moyen et long terme en cours d'année et pour donner de la visibilité aux investisseurs. La part des BTF dans l'encours de dette négociable devrait rester stable en 2022 , avant d'éventuellement amorcer une trajectoire de baisse, pour reconstituer cette marge de sécurité, en cas de nouvelle crise et de hausse brutale du besoin de financement de l'État.

Évolution de la part des BTF dans
l'encours de dette négociable de l'État

(en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Les émissions nettes à moyen et long terme représenteraient 10 % du PIB en 2022 , contre 10,6 % en 2021 et 11,3 % 30 ( * ) en 2020. Si cette part baisse, elle s'écarte toujours significativement de la moyenne constatée ces dix dernières années, où elle oscillait entre 8,0 % et 8,9 %.

Part du programme de financement à moyen et long terme
de la dette de l'État dans le PIB

(en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les données publiées par l'Agence France Trésor dans le bulletin mensuel du mois de septembre 2021 .

La persistance de cet écart témoigne non seulement de la violence de la crise sanitaire et de ses effets sur les finances publiques françaises, mais également, et le rapporteur spécial a eu l'occasion de le souligner, du choix du Gouvernement de ne pas maîtriser les dépenses publiques ordinaires, hors mesures d'urgence et de relance de l'économie.

Conséquence, l'endettement est devenu la première source de financement de l'État en 2020. Ses charges totales, avec amortissement des titres arrivés à échéance, sont aujourd'hui majoritairement couvertes par des émissions de dette à moyen et long terme et non par les ressources du budget général, c'est-à-dire les ressources fiscales et non-fiscales (241,3 milliards d'euros, avec déduction des prélèvements sur recettes).

À l'instar des années 2020 et 2021, et contrairement à la prévision initiale 31 ( * ) , la majorité des ressources de financement de l'État sera par ailleurs affectée, en 2022, au financement du déficit (5 % du PIB - 155,1 milliards d'euros), et non à l'amortissement des titres de moyen et de long terme .

Décomposition du besoin de financement de l'État

(en milliards d'euros et en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Le maintien à 260 milliards d'euros en 2022 des émissions de titres à moyen et long terme, montant inédit fixé en 2020 et en 2021, s'explique donc par la hausse des emprunts arrivant à maturité et appelés à être renouvelés (147,9 milliards d'euros). D'après les données figurant dans le compte général de l'État pour l'année 2020 32 ( * ) , 15 % des OAT devaient arriver à échéance d'ici la fin de l'année 2021 (6 %) et 2022 (9 %) . 26 % des titres négociables à moyen et long terme seront exigibles entre la fin de l'année 2022 et la fin de l'année 2025.

(2) De très bonnes conditions d'émission pour les titres de la dette française

Selon les informations communiquées en audition, les émissions de BTF et d'OAT se déroulent toujours dans de très bonnes conditions , la crise sanitaire et les emprunts massifs des souverains n'ayant pas fragilisé l'exécution du programme de financement des États.

À titre d'illustration, les taux de couverture moyen des adjudications 33 ( * ) se sont élevés à 218 % pour les OAT en 2020 (235 % en 2019 et 207 % en 2018) et à 277 % pour les BTF (315 % en 2019 et 286 % en 2018). Ils demeurent très supérieurs aux cibles, fixées par convention à 200 % pour les adjudications de BTF et à 150 % pour celles d'OAT.

L'AFT procède également chaque année à des rachats anticipés de titres arrivant à échéance . Ces rachats ont ainsi atteint 29,5 milliards d'euros en 2020, marquant une baisse par rapport à 2019 (47,4 milliards d'euros), la crise sanitaire ayant conduit à les réduire au deuxième trimestre. Au 31 juillet 2021, les rachats effectués ont porté sur un volume de 13 milliards d'euros, dont 12 milliards d'euros à échéance 2022 et 1 milliard d'euros à échéance 2023 34 ( * ) .

(3) En dépit d'une forte augmentation des émissions des États, il n'y a pas, pour le moment, « d'embouteillage » à craindre sur le marché des titres souverains

Certes, la dégradation du déficit et de la dette n'est pas propre à la France : la crise sanitaire a conduit de nombreux pays à mobiliser leurs finances publiques pour soutenir l'économie, puis la relancer.

Évolution du montant des émissions brutes de moyen et long terme pour différents émetteurs européens depuis 2015

(en milliards d'euros)

NB : pour 2021, il s'agit d'une estimation à partir des rachats déjà effectués.

Source : commission des finances, d'après les réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial

Toutefois, l'augmentation de l'endettement a été plus forte en France que chez ses voisins : de 97,6 points de PIB en 2019 à 115,3 points de PIB en prévision pour 2021, contre 60 points de PIB à 71 points de PIB pour l'Allemagne par exemple. La stabilisation du poids de la dette publique dans le PIB devrait par ailleurs être plus tardive en France : aucune réduction durable de l'endettement public n'est prévue avant 2027 d'après les informations transmises par le Gouvernement dans le programme de stabilité.

De manière générale, la France se distingue par une absence d'effort antérieurement à la crise, avec une trajectoire du taux de dette/PIB qui restait bien supérieure à celle de la plupart de ses voisins et qui, surtout, ne diminuait pas 35 ( * ) . Ces dernières années, même en période de croissance, la France n'a pas saisi les opportunités qui s'offraient à elle pour restaurer ses finances publiques.

Or, il n'est pas certain que les écarts de taux avec l'Allemagne et l'émetteur européen se maintiennent si la France ne retrouve pas aussi rapidement que ses voisins une trajectoire de stabilisation puis d'assainissement de ses finances publiques. De nombreux observateurs estiment qu'il s'agit là d'un « faux problème », mais aucun d'entre eux n'est en mesure de prévoir avec certitude ce qu'il pourrait se passer sur les marchés primaires et secondaires à horizon de cinq ou dix ans . Pour reprendre les termes de la Cour des comptes : « un environnement de taux bas n'efface pas la dette et n'assure donc pas la soutenabilité des finances publiques à moyen et long terme » 36 ( * ) . C'est à ce titre que la vigilance s'impose, sans pour autant céder à l'alarmisme et réduire drastiquement et indistinctement le déficit, au risque de pénaliser la croissance.

L'Union européenne s'est par ailleurs jointe, depuis le mois de juin 2021, aux émissions massives de titres par les États membres puisqu'elle doit financer le plan de relance NextGenerationEU , avec un volume à émettre d'ici 2026 de 800 milliards d'euros, soit environ 150 milliards d'euros par an. Dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques, la Cour des comptes avait souligné « la nécessaire prise en compte par l'Agence France Trésor de la montée en puissance de la Commission européenne en tant qu'émetteur » 37 ( * ) .

En audition, le directeur général de l'Agence France Trésor a confirmé que l'arrivée de ce nouvel acteur ne s'était pas traduite par un « embouteillage » sur le marché des titres souverains , qui aurait eu pour conséquence de dégrader les conditions d'emprunt et donc à terme d'aggraver la charge de la dette française. Lorsqu'un nouvel émetteur, d'une taille aussi importante, se présente sur le marché, le principal enjeu est celui de la coordination. La Commission européenne a réalisé d'importants progrès sur ce point, avec une transparence accrue sur son calendrier d'émissions.

b) Évaluer les facteurs de risque à moyen et long terme pour la charge de la dette
(1) À moyen terme, le niveau des taux devrait rester modéré, mais dépendra de l'action de la Banque centrale européenne et des anticipations des agents économiques

Comme rappelé précédemment, le taux moyen de l'OAT à 10 ans, titre de référence, s'établit en moyenne pour les huit premiers mois de l'année à 0,04 %, après - 0,12 % en 2020. À fin octobre, il s'établissait à plus de 0,2 %.

Dans ce contexte, les hypothèses de taux inscrites dans les documents budgétaires apparaissent raisonnables , avec une légère marge de hausse : 0,3 % à la fin de l'année 2021 et 0,75 % à la fin de l'année 2022 en moyenne pour les OAT à 10 ans, soit au-dessus du niveau évalué par le Consensus Forecasts . C'est, selon l'Agence France Trésor, également en ligne avec les prévisions de croissance : la reprise macroéconomique peut s'accompagner d'une remontée des taux. Le spread avec l'Allemagne reste lui stable, à environ 34 points de base (0,01 %). Il pourrait s'accroître l'an prochain, alors que la BCE se prépare à ralentir le rythme de ses achats sur le marché secondaire.

Si la moyenne remonte, le contexte de taux demeure pour le moment favorable à la France, qui continue de refinancer des titres qui ont parfois été émis à des taux bien plus élevés. Tout le stock de la dette n'a pas encore été renouvelé , même si l'effet taux sera amené à ralentir. Le taux implicite 38 ( * ) de la dette négociable de l'État a fortement diminué ces 25 dernières années, passant ainsi de 6,6 % en 1996 à 3,6 % en 2010, 1,3 % en 2020 et 1,2 % attendu pour 2026 39 ( * ) . S'il y avait un choc de taux de 1 %, ce taux pourrait remonter à 1,8 % en 2026.

Ainsi, et même si les brusques remontées de taux observées en mars 2020 40 ( * ) et en mai 2021 se sont révélées fugaces, elles pourraient également indiquer une tension conduisant à un rehaussement modéré mais durable des taux. Or, du fait de sa trajectoire d'endettement, fortement dégradée, la France reste exposée à une remontée des taux. Une hausse pérenne des taux de 1 % 41 ( * ) se traduirait par une charge de la dette croissante au fur et à mesure que le stock se renouvellerait . D'année en année, du fait de la dégradation de la dette, ce supplément de charge augmente : la charge de la dette pourrait quasiment doubler en dix ans .

Impact d'un choc de taux de 1 % sur la charge
des OAT et des BTF

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

La hausse des taux au début de l'année 2021, puis à la mi-mai, avec un taux approchant les 0,25 % pour les OAT françaises à 10 ans, s'explique en grande partie par la remontée des anticipations d'inflation, en lien avec la reprise économique. Le niveau des taux des OAT à 10 ans s'est ensuite rapproché des 0 % puis à nouveau au-delà de 0,20 % en octobre .

L'action de la Banque centrale européenne (BCE) pour répondre aux conséquences de la crise sanitaire et économique sur le financement des États de la zone euro a toutefois permis de normaliser les conditions de financement, de réduire les écarts de taux ( spread ) entre les émetteurs souverains et d'alimenter la liquidité des marchés financiers.

Elle a notamment assoupli ses programmes d'endettement sur les marchés du crédit et a ouvert un programme d'urgence d'achat de titres au mois de mars 2020, pour un montant initial de 750 milliards d'euros, porté à 1 350 puis 1 850 milliards d'euros. Ce dernier a conduit à un resserrement progressif des spread : de 66 points de base (pb - 0,01) entre la France et l'Allemagne au mois de mars 2020 à 28 pb au mois de septembre, de 279 pb à 139 pb pour l'Italie et de 147 pb à 77 pb pour l'Espagne 42 ( * ) .

Achats en cumulé de la Banque centrale européenne
depuis 2015

(en milliards d'euros)

Source : commission des finances, d'après les données publiées par la Banque centrale européenne sur ses programmes d'achats d'actifs

En cumulatif et au 30 septembre 2021, la BCE a acquis pour 510,6 milliards d'euros de titres de dette française depuis la mise en oeuvre du programme PSPP au mois de mars 2015, et 246,5 milliards d'euros dans le cadre du programme PEPP 43 ( * ) .

La politique monétaire devrait demeurer accommodante, en dépit de la remontée de l'inflation (cf. infra ). Révisées au mois de juillet 2021, les orientations de politique monétaire de la BCE indiquent que les taux d'intérêt directeurs resteront à leur niveau actuel ou à des niveaux plus bas tant que l'inflation n'atteindra pas durablement 2 %.

Accommodante ne veut cependant pas dire qu'il n'y aura pas des ajustements apportés aux actions des banques centrales. La Fed pourrait bientôt amorcer un ralentissement du rythme de ces rachats d'actifs, tandis que le Gouverneur de la Banque d'Angleterre a annoncé que, si c'était justifié, une hausse des taux directeurs pourrait intervenir avant la fin du programme d'achat d'urgence, prévue au mois de décembre 2021. A contrario , la BCE devrait continuer ses achats de dette, tout en en abaissant le volume de 80 à 70 milliards d'euros 44 ( * ) . À court terme, il est probable qu'il n'y aura pas d'évolution majeure avant la fin de l'année 2021, la BCE devant se prononcer au mois de décembre sur l'avenir du PEPP après le mois de mars 2022 45 ( * ) .

À fin septembre 2021, le spread français à 10 ans contre l'Allemagne se situait à 36 points de base (taux OAT à 0,14 %), et à 108 points de base pour l'Italie (taux à 10 ans à 0,86 %), 68 points de base pour l'Espagne (taux à 10 ans à 0,46 %), tandis que le spread allemand contre le taux à 10 ans américain se situait à 174 points de base (taux américain à 10 ans de 1,51 % pour un taux allemand à 10 de - 0,22 %) 46 ( * ) .

(2) Du risque de déflation en 2020 aux craintes des effets d'une inflation trop élevée en 2021 et 2022

Il convient tout d'abord de rappeler que l'inflation, lorsqu'elle se double d'une reprise économique dynamique, conduit à un accroissement des recettes fiscales et du PIB, ce qui conduit à diminuer le besoin de financement de l'État et le poids de la dette.

Néanmoins, son évolution a également un impact direct sur la charge de la dette, en modifiant le niveau de la provision pour indexation du capital des titres indexés . En 2020, marquée par une inflation quasiment nulle, cette provision s'est élevée à 458 millions d'euros. En 2022, elle devrait atteindre plus de 4,8 milliards d'euros , du fait de la hausse de l'inflation constatée depuis le début de l'année 2021.

Déjà, lors de l'examen de la mission « Engagements financiers de l'État » pour le PLF 2021, le rapporteur spécial relevait que la donnée inflation était une véritable inconnue, et potentiellement un facteur de risque très élevé 47 ( * ) : cela se concrétise désormais.

En effet, à côté de son effet immédiat sur la charge de la dette, l'inflation a également un effet plus indirect sur cette dernière : prise comme indicateur de l'évolution des politiques monétaires des banques centrales et de la reprise économique, elle peut aussi conduire à relever les anticipations sur les taux à long terme. Ainsi, c'est en partie sous l'effet d'une anticipation de la hausse de l'inflation et de la reprise que les taux d'intérêt ont connu leurs hausses aux mois de mai et d'octobre 2021. De même, tout anticipation d'un resserrement de la politique monétaire, une fois la cible d'inflation atteinte (2 %) se répercute sur les spread , avec un accroissement des taux des pays qui souffriraient le plus d'une diminution du soutien de la politique monétaire de la BCE.

En rythme annuel, l'inflation a atteint 3 % en zone euro et 5 % aux États-Unis, même si les gouverneurs de la BCE et de la Fed s'accordent à dire que ce haut niveau d'inflation serait transitoire , du fait des difficultés d'approvisionnement qui accompagnent la reprise économique, et devrait décroître à court terme . Le Gouverneur de la Banque de France, M. Villeroy de Galhau, a réitéré ce constat le 9 octobre 2021, en estimant que l'inflation redescendrait sous les 2 % en rythme annuel d'ici la fin de l'année 2022 48 ( * ) . La prévision de la BCE pour 2023 s'établit ainsi à 1,5 %. Le transitoire semble néanmoins durer et le retour à des niveaux de chômage plus faibles pourraient amener à des tensions salariales dans un contexte national préélectoral.

(3) La plus grande incertitude pèse sur l'effet volume

Dans l'appréciation de la dette souveraine française par les agences de notation 49 ( * ) , ce n'est pas tant le niveau en absolu qui est scruté, en particulier depuis la crise sanitaire, que les perspectives de redressement à moyen et long terme et le comportement passé. Par exemple, l'absence de consolidation dans la période précédant la crise est un facteur d'importance dans l'évaluation de la perspective (négative ou stable selon les agences) de l'évolution de la notation française, aujourd'hui AA (S&P, Fitch) ou Aa2 (Moody's).

Le Gouvernement a fait un premier pas en publiant le programme de stabilité pour la période 2021-2027, mais certaines conclusions semblent déjà caduques au regard du nouveau plan d'investissement et des nouvelles dépenses engagées par le Gouvernement dans le cadre du présent projet de loi de finances et dont les annonces égrènent l'automne . Ce dernier n'envoie pas le bon signal, avec une augmentation des dépenses hors soutien et hors relance d'environ 12 milliards d'euros (cf. supra ).

Or, la trajectoire d'endettement public dans le programme de stabilité repose sur une maîtrise stricte de la croissance de la dépense, de 0,7 % en volume entre 2022 et 2027. À titre de comparaison, les dépenses pilotables de l'État ont crû de 0,7 % entre 2017 et 2018 et de 2,3 % entre 2018 et 2019 50 ( * ) .

Le rapporteur spécial reprendra ici les termes du Haut Conseil des finances publiques : « la soutenabilité à moyen terme des finances publiques appelle à la plus grande vigilance » 51 ( * ) . Cette vigilance semble aujourd'hui davantage devoir s'exercer sur l'effet volume, l'évolution des taux devant demeurer relativement favorable à moyen-terme .

(4) La soutenabilité de la charge de la dette, un enjeu d'avenir

La charge de la dette doit être retenue comme un indicateur primordial de la soutenabilité des dépenses publiques, dans la lignée des approches classiques défendues par Olivier Blanchard ou Hélène Rey. Cette dernière indique qu'il faut inclure, dans cette appréciation, la dynamique de la charge de la dette rapportée au PIB, ce qui permet de tenir compte des taux d'intérêt et de la croissance 52 ( * ) . Cette dynamique est nettement orientée à la baisse depuis 2011, du fait d'un environnement favorable.

Évolution depuis 2011 de la charge de la dette
rapportée au PIB

(en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Tout en rappelant qu'il n'y a pas de « dette magique », Olivier Blanchard 53 ( * ) soutient également une approche par la charge de la dette, qui dépend des taux d'émission. C'est une approche que reprend la Cour des comptes dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques en 2021 : « la dette publique émise doit être compatible avec les ressources que peuvent mobiliser les administrations publiques pour en payer les charges d'intérêts , y compris dans les situations défavorables » 54 ( * ) .

C'est donc un critère important pour définir des marges de manoeuvre, que ce soit pour réagir à une situation de crise, en soutenant les acteurs économiques, ou pour se préparer aux défis à venir, tels la transition écologique ou numérique.

c) Une situation qui ne doit pas conduire à raviver de « faux débats » sur la gestion de la dette de l'État
(1) L'allongement de la maturité de la dette n'est pas une solution

À la fin de l'année 2020, la maturité de la dette française s'élevait à 8,2 ans , soit le même niveau qu'à la fin de l'année 2019. Ainsi, en dépit de l'accroissement de la part de BTF en réponse à la crise sanitaire, la maturité de la dette n'a pas évolué en 2020, du fait de la hausse en parallèle de la maturité moyenne des émissions à moyen et long terme par rapport à 2019 (11,5 ans en 2020 contre 11,1 ans en 2019). Retraitée de l'effet de la variation des BTF, la maturité de la dette française aurait atteint 8,4 ans à la fin de l'année 2020. Ce niveau correspond d'ailleurs à la maturité observée à la fin du mois d'août 2021, avec une durée moyenne à l'émission des titres à moyen et long terme de 12,8 ans.

L'allongement quasi-ininterrompu de la maturité de la dette française, de 7,1 ans en 2015 à 8,4 années, s'explique par :

- un facteur structurel : l'accès, grâce à l'unification du marché des capitaux, à la demande des fonds de pension européens, plus demandeurs de titres à maturité longue ;

- un facteur conjoncturel : la baisse des taux d'intérêt, qui emporte avec elle deux conséquences : d'une part les investisseurs sont prêts à se tourner vers des maturités plus longues pour obtenir un rendement supérieur et, d'autre part, hors période de crise, le volume des encours de titres de court terme diminue du fait de l'entrée en trésorerie de primes à l'émission.

Le rapporteur spécial rappelle, comme il a eu l'occasion de le faire l'année dernière ainsi que dans son rapport d'information consacré à la syndication 55 ( * ) , que l'augmentation de la maturité de la dette de l'État ne constitue pas une « solution miracle » pour diminuer durablement la charge des intérêts . Pour assurer la sécurité des émissions, et pour garantir le meilleur prix dans l'intérêt du contribuable, les titres choisis, avec leur maturité, doivent répondre à la demande des investisseurs, au risque sinon de nuire à la bonne exécution du programme de financement de l'État. Alors que la liquidité de la dette française constitue l'un de ses principaux atouts, il serait extrêmement dommageable de la mettre en péril en choisissant d'émettre sur des titres de maturité très longue, pour profiter des « taux bas », alors même que la demande des investisseurs est plus faible sur ces segments. Le contribuable risquerait in fine de payer plus cher cet allongement de la maturité, ce qui en retour accroîtrait la charge de la dette.

C'est donc la flexibilité qui devrait constituer le premier critère d'appréciation de la maturité de la dette publique, plutôt que la question de l'allongement ou non de sa durée. À titre d'exemple, alors qu'en 2019 la maturité moyenne des émissions de moyen et de long terme réalisées en cours d'année atteignait 11,1 ans, elle n'était plus que de 8,2 ans au premier semestre 2020, les investisseurs s'étant reportés vers des titres de plus courte échéance.

La France se situe par ailleurs légèrement au-dessus de la moyenne européenne hors Royaume-Uni 56 ( * ) : la maturité de la dette allemande était de plus de sept ans en 2019, identique à celle de la dette italienne, la dette espagnole ayant une maturité d'un peu moins de huit ans.

(2) Les débats sur la détention de la dette de l'État doivent se garder de donner une importance disproportionnée à la nationalité des détenteurs

La détention de la dette française est fréquemment au coeur des débats sur l'endettement public , comme l'ont rappelé les discussions en séance publique sur la proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques 57 ( * ) . Plusieurs amendements ont ainsi été déposés pour inclure, dans le rapport sur la dette publique qui serait transmis chaque année par le Gouvernement au Parlement, davantage d'informations sur les acheteurs et les détenteurs des titres français.

Évolution de la détention de la dette négociable
de l'État ces 10 dernières années

(en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les données publiées dans le bulletin mensuel de septembre 2021 par l'Agence France Trésor, à partir des données de la Banque de France

La hausse de la part des résidents (français) résulte mécaniquement des programmes de rachat mis en place par la Banque centrale européenne . Ces programmes sont à près de 90 % exécutés par la Banque de France, par définition un détenteur résident. Retraitée de l'impact des opérations de politique monétaire, la dette négociable de l'État est détenue pour un tiers par des résidents et pour deux tiers par des non-résidents, un ratio stable ces dix dernières années 58 ( * ) .

De manière générale, c'est moins l'origine géographique des investisseurs qui importe que leur typologie et, surtout, leur diversité, entre des investisseurs institutionnels qui se positionnent à long terme et d'autres plus spéculatifs qui revendent très rapidement les titres acquis. Pour assurer la liquidité de la dette française et la sécurité des émissions de l'État, y compris en cas de choc susceptible d'affecter un segment de la demande, il faut des investisseurs de toute origine et de toute catégorie, intéressés par tout type de maturité .

Nature des détenteurs de la dette négociable de l'État
à la fin du deuxième trimestre 2021 59 ( * )

(en pourcentage)

NB. La catégorie « autres détenteurs » parmi les résidents correspond pour la quasi-totalité aux achats de l'Eurosystème.

Source : commission des finances, d'après les données publiées par la Banque de France

Le Fonds monétaire international (FMI) publie quant à lui des données permettant de disposer de davantage de renseignements sur les investisseurs non-résidents. Le champ de l'étude va au-delà de la dette souveraine, puisqu'il couvre les titres obligataires publics et privés émis dans un pays donné, mais ses résultats peuvent être utilisés pour approcher l'origine et la catégorie des acheteurs de la dette française. En décembre 2020, 60 % des investisseurs non-résidents étaient européens, 12 % asiatiques et 9 % américains. Les banques centrales représentaient également une part prépondérante des acheteurs : le secteur public non-résident détiendrait 18 % de la dette française, le secteur bancaire non-résident 5 % et le secteur non bancaire non-résident 25 %.

Il est fréquent que des observateurs questionnent l'absence de données plus précises sur les détenteurs de la dette française, allant jusqu'à s'interroger sur un éventuel problème de transparence . Ce n'est pas le cas .

Il faut rappeler ici que la détention de titres français ne peut pas et ne doit pas être assimilée à un actionnariat : elle ne donne lieu à aucun pouvoir de décision sur la gestion de la dette française, à aucun droit pour le détenteur, si ce n'est celui d'être remboursé.

Par ailleurs, la mise à disposition de données plus détaillées que celles qui sont déjà publiées par la Banque de France à intervalle trimestriel ou par le FMI sur une base semestrielle se heurte à deux obstacles majeurs :

- d'une part, la sensibilité des investisseurs à la transmission de ce type d'informations, en vertu de la confidentialité des transactions. Il serait en outre contreproductif de choisir d'isoler les achats d'un investisseur et de lui donner ainsi l'impression de le « surveiller », ce qui pourrait en retour le conduire à se retirer au moins partiellement de la base des investisseurs. Il y aura certes toujours un autre investisseur pour acquérir des titres de dette, mais certainement à un prix moins élevé, et donc à un coût plus élevé pour le contribuable ;

- d'autre part, une impossibilité matérielle à assurer un suivi quotidien des échanges de titres. Ce sont en moyenne 15 milliards d'euros de titres qui changent de main chaque jour 60 ( * ) . Disposer d'une image à un instant t n'aurait ainsi que peu de sens et pourrait difficilement être exploité.

3. La France devrait perdre son titre de premier émetteur d'obligations « vertes » en faveur de la Commission européenne

L'encours de l'OAT verte 25 juin 2039 61 ( * ) a atteint 28,9 milliards d'euros au premier semestre 2021 , du fait de trois abondements en 2020 et d'un abondement en 2021. Les réémissions sont soumises à une double-condition : l'expression d'une demande en ce sens des spécialistes en valeur du Trésor et l'existence d'un montant suffisant de dépenses vertes éligibles. Il incombe en effet à l'AFT de justifier d'un montant équivalent de dépenses éligibles. Chaque année, le respect de ce dernier principe est en effet certifié par des contrôleurs indépendants 62 ( * ) , la certification ayant toujours été positive jusqu'ici.

Surtout, une seconde OAT verte, à échéance 2044, a été lancée au mois de mars 2021 , pour un montant de sept milliards d'euros. À la fin du mois de septembre 2021, ce titre a fait l'objet de deux nouvelles émissions, portant son encours à 11,4 milliards d'euros. L'encours total des OAT vertes s'élevait donc, au mois de septembre 2021, à plus de 40,2 milliards d'euros .

Le montant des dépenses éligibles en 2020
selon les quatre objectifs de l'OAT verte

(en millions d'euros et en %)

Source : commission des finances, d'après les données publiées dans « OAT verte. Rapport d'allocation et de performance 2020 »

Le montant des dépenses vertes éligibles auxquelles seront adossées les émissions des obligations vertes de l'État en 2021 s'élève à 15 milliards d'euros pour l'année 2021 63 ( * ) . Le doublement de ce montant par rapport aux années 2018 à 2020 s'explique par la suppression du compte d'affectation spéciale « Transition énergétique » et donc le rattachement au budget général des soutiens de l'État aux énergies renouvelables, auparavant financés par une taxe affectée 64 ( * ) . C'est ce qui a justifié la création de la seconde OAT verte et permis à la France de conserver son rang, avec l'objectif également de créer un second point vert sur la courbe des OAT, l'échéance de la première OAT étant à 2039.

La France devrait toutefois perdre son titre de premier émetteur d'obligations vertes au profit de la Commission européenne , dans le cadre de son programme d'émissions visant à financer le plan de relance NextGenerationEU . Lors de l'émission de sa première obligation verte le 12 octobre 2021, la Commission européenne a levé un montant inédit sur ce canal, avec 12 milliards d'euros émis à 0,45 % et à échéance 2037 65 ( * ) . Son programme d'obligations vertes devrait atteindre 250 milliards d'euros d'ici la fin de l'année 2026, soit 30 % du programme total d'émissions au titre du plan de relance.

Le rapporteur spécial s'est interrogé sur les conséquences de l'arrivée de ce nouvel acteur sur le marché des obligations vertes , qui plus est au regard des montants en jeu. L'un des premiers impacts pourrait être la diminution du « green premium », qui rend les OAT vertes moins chères à l'émission pour le contribuable. Toutefois, la demande toujours plus forte de la part des investisseurs pour des titres verts conduit à minorer cette crainte, tout comme le fait que chaque nouvelle émission verte est plus largement souscrite qu'une émission « traditionnelle » de maturité comparable.

Avant d'émettre sa première obligation, la Commission européenne avait publié au mois de septembre 2021 un cadre pour les obligations vertes 66 ( * ) , qui reprend les principes définis par l'association internationale des marchés de capitaux (ICMA). Ce cadre a fait l'objet d'une évaluation indépendante. Il reviendra ensuite à chaque État membre destinataire des fonds , puisque les plans de relance nationaux doivent consacrer au moins 37 % de leurs dépenses à des investissements et à des réformes utiles au climat, d'informer la Commission des dépenses vertes effectuées . Les rapports d'affectation seront eux aussi soumis à un contrôle indépendant.

B. DANS CE CONTEXTE, LA CRÉATION DU PROGRAMME 369 POUR AMORTIR LA DETTE DE L'ÉTAT LIÉE À LA COVID-19 N'EST NI NÉCESSAIRE NI SOUHAITABLE NI JUSTE

Dans le cadre du présent projet de loi de finances, le Gouvernement propose de modifier la maquette budgétaire de la mission « Engagements financiers de l'État » en créant un nouveau programme (P369) dédié à l'amortissement de la dette de l'État liée à la covid-19.

Au regard de l'ensemble des éléments précédemment décrits, le rapporteur spécial estime que la création de ce programme relève de l'effet de communication et d'un simple artifice comptable . Il proposera donc à la commission des finances du Sénat de le supprimer.

1. Un fonctionnement complexe et des interrogations persistantes sur un amortissement de la dette de l'État d'ici 2042

Le programme 369 vise à retracer l'amortissement du surcroît de la dette de l'État en 2020 et en 2021 liée à la crise sanitaire, 70 milliards d'euros ayant déjà été repris au titre des années 2020 et 2021 pour la sphère sociale par le biais de la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades) 67 ( * ) . 165 milliards d'euros sont ouverts en AE sur ce programme, un montant inédit à l'échelle du budget général, et 1,9 milliard d'euros en crédits de paiement . En prévisionnel, 2,3 milliards d'euros et 2,8 milliards d'euros (CP) seraient ouverts en 2023 et en 2024.

La dette de l'État liée à la covid-19 est en effet évaluée à 165 milliards d'euros, intérêts compris . Cette estimation repose sur le calcul des écarts de déficits en 2020 et en 2021 par rapport à ceux qui étaient anticipés à la fin de l'année 2019 68 ( * ) , et retraités du plan de relance, mais pas de l'activité partielle de longue durée 69 ( * ) .

Sans revenir sur la méthode de calcul et son montant- il y en a presque autant qu'il y a d'économistes et en aucun cas la dette covid n'est aujourd'hui close, il convient de relever que chaque modalité d'identification de la « dette covid » comprend des biais statistiques . Celle proposée par le Gouvernement par exemple ne tient pas compte des effets de long terme de la crise sanitaire sur l'économie française ; une alternative aurait pu constituer en un calcul du supplément de déficit généré chaque année jusqu'au retour de la France à sa trajectoire de croissance potentielle 70 ( * ) .

Les crédits de paiement inscrits sur le programme 369 correspondront à une part, par défaut fixée à 5,9 %, de la hausse des recettes fiscales due à la croissance par rapport à celles de 2020 (256 milliards d'euros). Par ailleurs, la formule de calcul pourra être modifiée au cours du temps , l'objectif initial étant d' amortir la « dette covid » d'ici 2042 . Si les recettes fiscales nettes sont en baisse par rapport à la prévision, alors la dotation au programme 369 diminue par rapport à l'échéancier prévisionnel, et inversement. Ainsi, les recettes fiscales en 2022 devraient encore augmenter de 5,2 milliards d'euros par rapport à la prévision transmise au mois de septembre dans le PLF, mais il n'y a aucune information à ce stade sur la conséquence de cette révision pour les crédits du programme 369 . Par ailleurs, si la révision de la croissance 2021 à près de 7 % ne manquera pas de créer des recettes supplémentaires, elle créera aussi de nouvelles dépenses, liées notamment aux dépenses énergétiques.

Les crédits du programme seront affectés à la Caisse de la dette publique (CDP), via une dotation au programme 732 du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État » 71 ( * ) . Un contrat devra également être conclu entre l'État et la CDP pour détailler le circuit de remboursement et les montants en provenance de la CDP seront ensuite utilisés pour amortir les titres de dette arrivant à échéance.

La caisse de la dette publique

Établissement public national à caractère administratif créé par l'article 32 de la loi de finances rectificative du 11 juillet 1986, la CDP a pour principale mission d'exécuter toute opération concourant à la qualité de la signature de l'État. Elle peut ainsi intervenir sur le marché secondaire pour assurer la liquidité de la dette publique et amortir ses titres.

Sa création répondait au souhait de disposer d'un véhicule permettant d'affecter le produit des privatisations à la diminution de la dette. La dernière opération effectivement réalisée dans ce cadre a eu lieu en 2015, pour un montant de 0,8 milliard d'euros.

Source : commission des finances, à partir des documents budgétaires et des réponses au questionnaire du rapporteur spécial

2. Un isolement de la dette covid qui ne répond à aucune justification économique ou de crédibilité budgétaire

Le rapporteur spécial, s'appuyant sur les auditions conduites dans le cadre de son rapport d'information sur la syndication, reprend ici à son compte les propos d'une personne entendue dans ce cadre : il n'y a aucun argument économique ou budgétaire de nature à justifier l'isolement de la « dette covid », les recettes fiscales supplémentaires pourraient tout aussi bien servir à réduire le déficit budgétaire courant .

La CDP s'écarte ainsi de son schéma de fonctionnement habituel, puisqu' il ne s'agira pas dans le cadre du programme 369 de céder un actif pour rembourser une partie de la dette, mais d'ouvrir des crédits budgétaires pour les consacrer au remboursement de la dette . L'opération est donc nulle pour le stock de dette . Il n'y aurait eu d'effet réel sur le stock de la dette que si les crédits ouverts correspondaient effectivement à des économies sur d'autres postes de dépense. Même dans ce cas cependant, il n'aurait pas été nécessaire de créer ce programme : la diminution du déficit budgétaire résultant de l'économie aurait eu le même effet.

Le rapporteur spécial insiste sur le fait qu' il ne s'agit pas là d'un cantonnement de la dette covid : il n'y a pas création d'une « caisse » séparée chargée de la gestion de cette dette, il n'y a toujours bien qu'une seule dette de l'État. Cantonner la dette, en la « fragmentant », aurait d'ailleurs coûté plus cher en gestion à l'État, et donc au contribuable. Dans ses choix, le Gouvernement a au moins pris la peine de ne pas perturber la gestion de la dette, ce qui illustre par ailleurs le fait que la création de ce programme est avant tout et seulement une opération de communication, dénuée de tout effet budgétaire.

Outre son inutilité, cette opération, qui relève donc de l'effet d'annonce, pourrait même s'avérer contre-productive : le Gouvernement cherche-t-il à laisser entendre que la dette de l'État hors covid n'est pas amortie ? C'est bien évidemment faux : la France honore toujours ses engagements financiers et ses dettes, quel que soit le contexte dans lequel elles ont été contractées. Les titres arrivant à échéance sont amortis, sans qu'il y ait besoin d'un programme particulier pour en retracer la typologie .

Il faut par ailleurs souligner que les crédits ainsi ouverts sur le programme 369 ne financeront pas les titres émis pour la « dette covid », puisque c'est impossible . L'Agence France Trésor n'a pas émis de souches « spéciales covid » en 2020 et en 2021 qu'elle pourrait ensuite retracer : elle a simplement exécuté le programme de financement de la France, dont les émissions servent à la fois à financer le déficit (dont une part n'était pas liée à l'épidémie) et à refinancer les titres arrivés à échéance.

Enfin, la concrétisation même de cette opération de communication s'annonce difficile, puisqu'elle suppose que les Gouvernements successifs conservent ce programme. Les crédits de paiement ouverts en 2022 ne couvrent que 1,14 % des autorisations d'engagement.

Pour conclure, le rapporteur spécial tient à rappeler que tous les efforts du Gouvernement pour donner l'impression de traiter le « sujet de la dette » ne suffiront pas à masquer le fait que la dépense publique continue d'augmenter, même hors crise et hors relance , et que c'est bien cette absence d'efforts sur les dépenses ordinaires qui risque de peser sur la charge de la dette et sur la détérioration de l'endettement public à moyen et long terme.

C. L'AUGMENTATION DES CRÉDITS DÉDIÉS AUX APPELS EN GARANTIE DE L'ÉTAT S'EXPLIQUE PAR LA MOBILISATION DE CET INSTRUMENT POUR RÉPONDRE AUX CONSÉQUENCES DE LA CRISE SANITAIRE

1. Le moindre risque d'appels en garantie anticipé pour 2021 explique en grande partie le dynamisme des crédits constaté en 2022

Dans le cadre du présent projet de loi de finances, les crédits du programme 114 « Appels en garantie de l'État » connaissent de nouveau une forte hausse (+ 34 %), certes moindre que celle constatée entre les lois de finances initiale pour 2020 et pour 2021 (multiplication des crédits par 26). Toutefois, retraité des annulations intervenues lors des deux lois de finances rectificatives pour 2021 (respectivement 995 millions d'euros et 742 millions d'euros), les crédits évaluatifs du programme font plus que quadrupler et augmentent de 336 % . 3,35 milliards d'euros sont ainsi provisionnés pour couvrir les appels en garantie de l'État en 2022.

Toutes les actions du programme présentent une hausse de leurs crédits depuis 2020 , afin de tenir compte des conséquences de la crise sur le tissu économique. Ne devraient-ils pas d'ailleurs être pris en compte dans le calcul la dette covid ?

Évolution des crédits des actions du programme 114 entre 2021 et 2022 (AE = CP)

(en millions d'euros et en pourcentage)

2020

LFI 2021

PLF 2022

Part dans les crédits du programme

Évolution 2022 / LFI 2021

Évolution 2022 / 2020

01 - Agriculture et environnement

0,08

1,10

0,85

0,03 %

- 22,73 %

1014,17 %

02 - Soutien au domaine social, logement, santé

40,00

57,00

50,40

1,50 %

- 11,58 %

26,00 %

03 - Financement des entreprises et industrie

7,12

1602,20

2657,65

79,31 %

65,88 %

37245,91 %

04 - Développement international de l'économie française

45,48

113,00

128,00

3,82 %

13,27 %

181,46 %

04.02 Assurance-prospection

41,52

107,00

109,00

3,25 %

1,87 %

162,55 %

04.03 Garantie de change

0,00

1,00

1,00

0,03 %

0,00 %

04.06 Garantie du risque exportateur

3,96

5,00

18,00

0,54 %

260,00 %

354,41 %

05 - Autres garanties

0,00

731,50

514,01

15,34 %

- 29,73 %

Total

92,67

2504,80

3350,91

100,00 %

33,78 %

3516,00 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

La mobilisation très forte de l'action 03 , dont les crédits ouverts en PLF 2022 (2,66 milliards d'euros) sont 370 fois supérieurs à l'exécution constatée en 2020 et 66 % plus élevés qu'en LFI 2021, s'explique par le fait que cette action supporte l'un des plus importants dispositifs mis en place par le Gouvernement pour soutenir les entreprises : les prêts garantis par l'État (PGE), ouverts initialement jusqu'au 31 décembre 2021. L'article 39 quater du projet de loi de finances pour 2022, introduit par simple amendement du Gouvernement, propose néanmoins de prolonger ce dispositif jusqu'au 30 juin 2022.

Ce dispositif a été plébiscité en 2020 avec un taux de recours par près d'un tiers des entreprises et au-delà de 50 % dans les secteurs les plus touchés. Au 1 er octobre 2021 72 ( * ) , il y avait 698 851 entreprises bénéficiaires de PGE, pour un encours total de 142,5 milliards d'euros 73 ( * ) . 70 % des PGE ont toutefois été conclus sur les quatre premiers mois de l'année 2020.

Répartition des entreprises bénéficiaires
de prêts garantis par l'État au 6 août 2021

(en pourcentage)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Un nouveau dispositif de garantie a été créé dans le cadre de la loi de finances pour 2021 74 ( * ) , celui des fonds investis dans des prêts participatifs « Relance » et des obligations « Relance » octroyés à des PME ou à des ETI . L'État apporte sa garantie jusqu'au 30 juin 2022, en ouvrant la possibilité de couvrir jusqu'à 30 % de l'encours total des fonds bénéficiant de la garantie, plafonné à 20 milliards d'euros. Son démarrage est néanmoins difficile, avec un très faible taux de recours, malgré un engagement de Place de 11 milliards d'euros. Une mission a été confiée à Gérald Pfauwadel, conseiller national à la sortie de crise du ministère de l'économie, des finances et de la relance, pour relancer les prêts participatifs. Le recours à ce dispositif pourrait toutefois s'accroître après l'extinction des PGE et des autres dispositifs de soutien.

La hausse des crédits sur l'action 04, et en particulier sur l'assurance prospection, provient, elle, à la fois des mesures de soutien et de relance :

- sur le volet soutien, les quotités maximales pour les produits « garantie des cautions » et « garantie des préfinancements » ont été relevées pour les garanties « risque exportateur » délivrées aux entreprises avant le 31 décembre 2020. Les prévisions pour appels en garantie sont par conséquent relevées à 18 millions d'euros pour 2022, pour compenser le déficit induit pour l'année 2021 ;

- de manière plus conséquente, sur le volet relance, les dispositifs de soutien aux petites et moyennes entreprises (PME) dans leur démarche de prospection à l'export ont été renforcés. 14,8 millions d'euros sont ouverts à ce titre sur l'action 03 « Plan de soutien à l'export » du programme 363 « Compétitivité » de la mission « Plan de relance », auxquels s'ajoutent 82 millions d'euros ouverts sur cette action du programme 114 de la mission « Engagements financiers de l'État ».

Hors la provision pour risque d'appel en garantie pour le Fonds paneuropéen créé par la Banque européenne d'investissement (cf. infra ), l'action 05 porte un autre risque d'appel lié à la crise sanitaire, au titre des prêts et garanties consentis par l'Agence française de développement (AFD). En particulier, une dotation nouvelle de 17 millions d'euros est destinée à couvrir les appels sur la garantie octroyée à 80 % sur les prêts consentis par les banques locales du secteur privé africain aux PME affectées par la crise sanitaire.

2. Les prévisions demeurent prudentes pour 2022, avec la probabilité que l'ensemble des risques ne se matérialisent pas dès l'année prochaine

Les crédits du programme 114 sont évaluatifs et s'appuient sur de multiples hypothèses quant aux risques de défaillances des acteurs bénéficiaires de la garantie de l'État. Il s'agit là d'un exercice difficile , les prévisions étant construites au début du second semestre de l'année n-1 , en regardant à la fois les appels en garantie passés et les risques à venir, compte tenu du contexte macroéconomique et des comportements des agents, par définition incertains.

La programmation des crédits dans le présent PLF apparaît pour le moins prudente , et devra probablement être ajustée en cours d'année ou en fin de gestion, à l'instar des annulations de crédits intervenues pour l'année 2021 à hauteur de 995 millions d'euros, soit 40 % des crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2021 lors de la première loi de finances rectificative, puis 742 millions d'euros lors de la deuxième loi de finances rectificative. Ces annulations proviennent d'un taux de sinistralité moindre qu'anticipé, de surcroît dans le contexte où la plupart des entreprises ont opté pour la possibilité de disposer d'une seconde année de différé de remboursement.

Il convient certes de conserver une marge de précaution , avec l'idée qu'il vaut peut-être mieux que le Parlement autorise un niveau de crédits légèrement surévalué dans le cadre de l'examen du PLF, au lieu d'accorder des ouvertures en cours d'année, qui pourraient inquiéter quant à l'impact budgétaire des garanties pour l'État.

Pour les principaux dispositifs de garantie, les hypothèses, plutôt conservatrices, sont les suivantes :

- 2,65 milliards d'euros prévus pour les appels au titre des PGE , contre 1,29 milliards d'euros en 2021. Le Gouvernement prévoit en effet désormais un « pic des appels en garantie » au second semestre 2022 , du fait du différé d'amortissement pouvant aller jusqu'à deux ans (option prise par 80 % des entreprises bénéficiaires 75 ( * ) ) et du « gel » des faillites, avec un niveau de défaillance des entreprises inférieur à la normale 76 ( * ) ;

- 471 millions d'euros prévus pour le risque d'appel au titre de la garantie apportée par la France au Fonds de garantie paneuropéen porté par la Banque européenne d'investissement (BEI). Ce fonds a été créé en 2020 pour attribuer des financements au profit des PME européennes, par le biais d'instruments de partage de risques. La France, qui en est le troisième bénéficiaire, s'est engagée pour 4,7 milliards d'euros, sur les 25 milliards d'euros de garantie prévus pour l'ensemble des États membres contributeurs. La BEI estime que le taux brut de sinistralité serait de 33,6 %, soit un impact budgétaire potentiel de 1,6 milliard d'euros pour la France, qui pourrait être concentré sur les premières années d'existence du fonds, puisqu'il vise surtout à garantir les portefeuilles de prêts de court-terme. Toutefois, la sinistralité nette , qui tient compte de la rémunération de la garantie et des gains escomptés sur le portefeuille, serait plutôt de l'ordre de 20 %, soit un coût potentiel pour la France de 940 millions d'euros . À noter que la prévision de consommation des crédits pour 2021 a été ramenée à deux millions d'euros.

Le rapporteur spécial s'est plus particulièrement intéressé aux PGE , qui portent, en termes de crédits budgétaires, le risque d'appel le plus important sur le programme , et d'autant plus que le remboursement d'environ 80 % des prêts doit débuter au deuxième semestre 2022. 5 millions d'euros de pertes, avec appel de la garantie de l'État, ont été constatées en 2020 et 110 millions d'euros à la fin du mois de juillet 2021 . Le rythme mensuel de décaissement des crédits au titre des appels en garantie est d'environ 20 millions d'euros, soit bien moins que la prévision initiale (plus de 100 millions d'euros).

L'année dernière, Bpifrance estimait que la sinistralité des PGE pourrait varier de 3 % à 7 % des dossiers 77 ( * ) . Dans une étude remise à la commission des finances du Sénat au mois d'avril 2021, l'Institut des politiques publiques évaluait le taux de sinistralité à 5,4 %, avec un coût net pour les finances publiques de 2,7 % des montants garantis 78 ( * ) (3,8 milliards d'euros) .

Cette estimation est plus proche de l'hypothèse sur laquelle repose désormais la programmation des crédits pour 2022, construite avec la Banque de France 79 ( * ) . Le taux de pertes global est évalué à 3,78 %, soit 5,3 milliards d'euros 80 ( * ) , pour une perte nette - après prise en compte des commissions de garanties - de 2,5 milliards d'euros . Cette révision à la baisse des taux de sinistralité et du coût pour les finances publiques s'appuie sur les données actualisées transmises par la Fédération bancaire française sur la durée des remboursements notamment. Elle tient également compte du fait qu'environ 5 % des PGE ont déjà été remboursés.

L'étude précitée de l'IPP relevait que la capacité d'investissement des bénéficiaires n'avait pas été entamée par rapport aux non-bénéficiaires à la fin de l'année 2020 et que les taux de faillite étaient particulièrement bas, y compris pour les entreprises dans les secteurs les plus touchés par la crise sanitaire. Elle ajoutait une hausse, mécanique, de l'endettement brut des entreprises bénéficiaires, sans pour autant que le taux d'endettement net - trésorerie déduite - suive la même trajectoire 81 ( * ) . L'Institut en concluait que la capacité de remboursement était bonne, sous la réserve que la conjoncture économique poursuive son rétablissement .

Il convient néanmoins de relever que la sinistralité pourrait augmenter au cours du temps : pour la majorité des entreprises, le deuxième anniversaire du PGE et donc le début des remboursements auront lieu au deuxième trimestre 2022. Le deuxième semestre 2022 pourrait à cet égard être plus sensible et susciter quelques craintes .

Toutefois, les dernières données de la Banque de France, qui plus est dans une conjoncture économique favorable, sont encourageantes . Sur 650 836 entreprises bénéficiaires, 3 944 font l'objet d'une procédure judiciaire pour cessation de paiement (0,6 %). Ces entreprises ont emprunté 394 millions d'euros, soit 0,28 % de l'encours total 82 ( * ) . L'impact budgétaire n'est pas encore connu : les banques peuvent faire appel de la garantie dès le placement de l'entreprise en liquidation judiciaire ou en redressement, même si ce n'est pas automatique. Le service de cotation des entreprises de la Banque de France a par ailleurs analysé les bilans annuels de plus de 244 000 entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 750 000 euros. Parmi elles, 14 %, dont 3 % ayant eu recours à un PGE, sont jugées « sensibles » , puisqu'elles ont connu à la fois une hausse de leur endettement financier brut et une baisse de leur trésorerie. La moitié dispose cependant d'une cotation élevée auprès de la banque de France, les 7 % restantes étant plutôt des petites entreprises, dans le secteur de l'hôtellerie et de la restauration.

Enfin, au regard de l'importance de ce dispositif et de sa prolongation par la voie d'un amendement du Gouvernement au projet de loi de finances pour 2022, le rapporteur spécial s'est penché sur la recommandation de la Cour des comptes, qui estime qu'un indicateur de performance devrait être mis en place sur les PGE , afin de suivre les taux de défaillance (prévisions actualisées et réalisation) et de donner des informations sur la santé financière des entreprises ayant bénéficié de ce dispositif 83 ( * ) . Il a interrogé sur ce point la direction générale du Trésor (DG Trésor), responsable du programme, dans son questionnaire budgétaire, ainsi qu'en audition. Selon les représentants de la DG Trésor, un tel indicateur est difficile à mettre en place : il faut trouver une cible qui ait de la pertinence à long terme et qui relève de la performance budgétaire, ce qui écarterait un suivi du taux de défaillance. Il serait par exemple plus pertinent d'évaluer le nombre d'entreprises ayant résisté aux turbulences économiques grâce au PGE, mais c'est une évaluation ex post .

La DG Trésor étudierait également la possibilité d'introduire un indicateur retraçant la célérité du paiement des appels en garantie par Bpifrance aux banques , au nom et pour le compte de l'État 84 ( * ) . Cet indicateur apporterait certes une information supplémentaire, mais peu significative sur les conséquences du PGE pour les entreprises et pour les finances publiques. La DG Trésor souligne pourtant dans les documents budgétaires la sensibilité de la provision pour appel en garantie au comportement de remboursement des entreprises et aux perspectives économiques.

II. LES CRÉDITS DES AUTRES PROGRAMMES DE LA MISSION NE SONT PAS AFFECTÉS PAR LES EFFETS DE LA CRISE SANITAIRE ET S'INSCRIVENT DANS LA DYNAMIQUE CONSTATÉE CES DERNIÈRES ANNÉES

A. LES PRIORITÉS DU PROGRAMME 145 SONT DAVANTAGE PORTÉES PAR LES DÉPENSES FISCALES QUI LUI SONT ATTACHÉES QUE PAR LES CRÉDITS BUDGÉTAIRES OCTROYÉS EN LOI DE FINANCES

1. Des crédits budgétaires qui poursuivent leur baisse...

Le programme 145 « Épargne » se compose de deux actions :

- l'action 01 - Épargne logement , qui porte 99,9 % des crédits du programme . Ces crédits correspondent aux primes que peuvent obtenir, sous certaines conditions (date d'ouverture et souscription d'un prêt épargne logement), les détenteurs d'un compte épargne-logement (CEL) ou d'un plan d'épargne logement (PEL) ;

- l'action 02 - Instrument de financement du logement , qui retrace l'intervention de l'État au niveau des prêts du secteur aidé géré par le Crédit foncier et des prêts conventionnés contrôlés par la SGFGAS (Société de gestion des financements et de la garantie de l'accession sociale à la propriété). Ce dispositif est en voie d'extinction .

Le tableau ci-dessous illustre la poursuite de la diminution des crédits attribués au programme , qui s'explique principalement par l'utilisation des produits d'épargne logement non plus comme un outil d'accession à la propriété mais comme un outil d'épargne. Un second effet devrait jouer à plus long-terme, la suppression de la prime pour les produits ouverts à compter du 1 er janvier 2018. Cette trajectoire baissière, qui devrait s'inscrire dans la durée, demeure toutefois conditionnée au comportement des épargnants. Le dispositif de prime est en effet une dépense de guichet, le nombre de PEL ou de CEL bénéficiaires et le montant global des primes à payer n'étant pas contingentés.

Évolution des crédits du programme 145

(en crédits de paiement et en millions d'euros)

2020

LFI 2021

PLF 2022

Évolution 2022/2021

Épargne logement

57,71

62,20

60,13

- 3,32 %

Instrument de financement du logement social

0,10

0,15

0,08

- 49,38 %

Total

57,81

62,35

60,21

- 3,43 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

2. ... et des dépenses fiscales dont le coût ne cesse de progresser, à l'inverse de leur évaluation

À l'instar des années précédentes, force est de constater que ce sont moins les crédits budgétaires que les dépenses fiscales qui portent les politiques publiques attribuées au programme 145. La Cour des comptes avait par le passé attiré l'attention sur la diversité des moyens consacrés aux politiques publiques de l'État, en particulier ceux autres que le budget général, et qui faisaient généralement l'objet d'un moindre suivi 85 ( * ) . Le programme 145 est particulièrement représentatif de cette tendance : le coût des 28 dépenses fiscales, avant même révision, serait au moins 78 fois supérieur aux crédits budgétaires demandés dans le PLF 2022 .

Le rapporteur spécial appelle depuis plusieurs années à une meilleure évaluation de ces dépenses fiscales et de leur pertinence , en se concentrant d'abord sur celles dont le coût n'est pas du tout évalué ainsi que sur celles qui présentent un coût inférieur à 500 000 euros, avec quelques milliers de bénéficiaires. Un tel exercice est en effet de nature à permettre de proposer la suppression des dispositifs obsolètes . Il semble que cette recommandation, relayée également notre collègue députée et rapporteure spéciale de la mission « Engagements financiers de l'État », ait enfin été entendue. Ainsi, dans le cadre de l'article 10 du présent projet de loi de finances, deux dépenses fiscales rattachées au programme pourraient être supprimées :

- l'exonération des lots d'obligations et primes de remboursement attachées à des emprunts négociables émis avant le 1 er janvier 1992. Cette dépense fiscale avait été créée en 1959. Ni son coût budgétaire ni le nombre de bénéficiaires ne sont connus ;

- sur initiative de Mme Peyrol 86 ( * ) , l'exonération du prélèvement libératoire pour les produits des emprunts contractés hors de France et pour les intérêts des obligations et des titres de créances négociables souscrits par un non-résident. Créée en 1973, cette dépense fiscale ne faisait l'objet d'aucun chiffrage, ni d'aucune évaluation sur le nombre de bénéficiaires.

Au-delà des deux actions sur lesquelles sont ouvertes les crédits, et c'est d'ailleurs ce qui justifie le rattachement de ces 28 dépenses fiscales, le programme 145 est en effet destiné à encourager les placements dans plusieurs produits d'épargne règlementée ainsi que la constitution d'une épargne de long terme . Ces objectifs sont bien sûr absolument légitimes et certaines dépenses fiscales doivent être préservées , par exemple celle exonérant de prélèvements les intérêts des livrets règlementés ou encore celles encourageant le développement des plans d'épargne salariale et de retraite d'entreprise, ou encore l'assurance vie.

Ce qui est beaucoup plus problématique en revanche, c'est bien l'absence de progrès constatée d'années en années sur l'évaluation du nombre de bénéficiaires et du coût de ces dépenses fiscales .

Évaluation des dépenses fiscales dans les PLF 2021 et 2022

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

La moitié des dépenses fiscales n'est pas chiffrée et la moitié ne fait pas l'objet d'une évaluation dont le niveau de fiabilité est au moins « bon ». C'est bien loin de la moyenne constatée sur l'ensemble des 475 dépenses fiscales du PLF 2021 où 13 % n'étaient pas chiffrées et 30 % l'étaient via un ordre de grandeur 87 ( * ) . Le principal facteur d'explication sur le défaut d'évaluation, pour le nombre de bénéficiaires, serait l'absence d'obligation déclarative, et donc de données fiscales liées, même si la direction de la législation fiscale a également indiqué qu'il revenait d'abord à chaque administration compétente au fond de procéder à l'évaluation de ses dispositifs 88 ( * ) . Conséquence toutefois , le coût réel de ces dispositifs est régulièrement actualisé , avec une sous-estimation récurrente en loi de finances initiale.

Évolution des estimations des cinq plus grandes dépenses fiscales
attachées au programme 145 et de leur coût total depuis 2019

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Dans le graphique ci-dessus, les prévisions du coût total pour 2021 et 2022 n'incluent respectivement pas trois et quatre dépenses fiscales pour lesquelles l'estimation chiffrée n'est pas encore disponible, leur coût total s'étant élevé à 1,06 milliard d'euros en 2019 et à 1,25 milliard d'euros en 2020. L'une d'entre elles, l'exonération des sociétés de placement à prépondérance immobilière à capital variable » a vu son coût pour 2020 être réévalué de 850 millions d'euros à un milliard d'euros . Il est à la fois curieux et dommageable que le chiffrage, même évaluatif, de cette dépense fiscale ne soit pas disponible dès le projet de loi de finances initiale.

B. POUR LA DEUXIÈME ANNÉE CONSÉCUTIVE, LES CRÉDITS AU TITRE DU PROGRAMME 336 SONT OUVERTS DÈS LA LOI DE FINANCES INITIALE

Le programme 336 soutient la contribution française au capital du mécanisme européen de stabilité (MES) 89 ( * ) . La contribution de la France au MES est légèrement supérieure à 20 % de son capital, composé à la fois de parts libérées (80,5 milliards d'euros au total dont 16,3 pour la France) et de parts appelables (624,3 milliards d'euros au total dont 126,3 pour la France). La participation de la France aux parts libérées a déjà été versée, sous la forme de cinq tranches de 3,3 milliards d'euros.

En parallèle de cette contribution au capital, la France s'est engagée à rétrocéder au MES les intérêts perçus sur les dépôts placés auprès de la Banque de France. L'Allemagne a pris un engagement similaire pour les dépôts placés auprès de la Bundesbank. En effet, en 2017, le MES s'est vu retirer la dérogation lui permettant de ne pas payer les intérêts négatifs sur ses facilités de dépôt placées auprès des banques centrales nationales composant l'Eurosystème (taux de - 0,4 %), ce qui affectait son capital.

Or, malgré cet engagement réciproque, et quasiment certain, le programme n'était pas, jusqu'en 2021, doté de crédits dès la loi de finances initiale , alimentant, à l'Assemblée nationale comme au Sénat, une critique sur l'insincérité de la budgétisation du programme 336 . En cours d'année, le Gouvernement était ainsi obligé soit de recourir à la mission « Crédits non répartis » au titre des dépenses accidentelles, ce qui peut sembler critiquable pour une dépense qui résulte d'un engagement de l'État, soit de faire voter une disposition en loi de finances rectificative. La Cour des comptes appelait également à ouvrir ces crédits dès l'examen du PLF.

Selon les explications transmises par la direction générale du Trésor, trois incertitudes rendaient difficile l'estimation ex ante des montants devant être rétrocédés au MES au cours de l'année à venir et ont donc justifié le choix de ne pas ouvrir de crédits dès la LFI :

- l'incertitude sur l'engagement réciproque de l'Allemagne, bien qu'il se soit toujours concrétisé ;

- l'incertitude sur l'évolution mensuelle du montant du dépôt du MES, notamment sous l'effet des nouvelles participations d'États membres au mécanisme. En effet, la France avait la volonté, sous peine de cesser sa participation, de peser sur les négociations visant à ce que d'autres États membres s'engagent à rétrocéder les intérêts au MES, chose faite avec l'engagement des Pays-Bas (fin 2019) et de l'Italie (début 2020) de procéder à cette opération ;

- une incertitude sur le montant exact des intérêts à rétrocéder en période de taux négatifs.

Il est dans tous les cas bienvenu que le programme 336 soit désormais, et pour la deuxième année consécutive, doté de crédits budgétaires dès l'examen par le Parlement du projet de loi de finances. 57 millions d'euros sont ainsi prévus dans le PLF 2022 pour couvrir les rétrocessions au MES au titre de l'année 2021, contre 79 millions d'euros dans le PLF 2021, pour les rétrocessions au titre de l'année 2020 90 ( * ) . Le montant définitif sera notifié en début d'année.

C. L'ACCOMPAGNEMENT DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AYANT SOUSCRIT DES EMPRUNTS TOXIQUES, PAR LE BIAIS DU PROGRAMME 344, SE POURSUIT

Le programme 344 « Fonds de soutien relatif aux prêts et contrats financiers structurés à risque » a été créé en loi de finances pour 2014 pour accompagner les collectivités territoriales ayant souscrit à des prêts dits « toxiques » . Il est aujourd'hui en voie d'extinction, plus de 85 % des dossiers ayant été traités.

Le fonds est à la fois financé par l'État (environ 85 millions d'euros) et par le secteur bancaire , par le biais d'une taxe additionnelle à la taxe systémique 91 ( * ) , qui devrait représenter près de 100 millions d'euros en 2022. À ces crédits de paiement s'ajoutent, sous la forme de fonds de concours , 11,5 millions d'euros en provenance de la société de financement local et de sa filiale la Caisse française de financement local (10 millions d'euros), ainsi que de Dexia (1,5 million d'euros), toutes trois non assujetties à la taxe systémique. Le montant total des crédits de paiement proposés dans le présent projet de loi de finances s'élève à 185,64 millions d'euros, soit une baisse de 2 % par rapport à la LFI 2021 (189,5 millions d'euros). Il correspond à l'échéancier établi pour les décaissements du fonds, avec une hypothèse maximaliste sur le taux de recours.

La programmation et l'exécution de ces crédits n'appellent pas de remarque particulière, aucune difficulté de gestion n'ayant été remontée. Lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2021, le rapporteur spécial avait relayé une recommandation de la Cour des comptes 92 ( * ) concernant l'annulation des autorisations d'engagement (AE) devenues sans objet . En effet, il est maintenant quasiment certain que le fonds ne mobilisera pas l'ensemble des AE qui lui ont été accordées, les dossiers présentés par les collectivités territoriales représentant finalement un montant moindre que celui anticipé lors de la création et du renforcement du fonds.

La réponse apportée l'année dernière avait été pour le moins prudente, l'administration indiquant qu'elle pourrait « initier l'instruction d'un dossier de retrait d'AE d'ici la fin de l'année 2020 » 93 ( * ) , ce qui nécessitait par ailleurs la signature d'un avenant à la convention signée avec l'Agence de services et de paiement, chargée de verser les aides aux collectivités bénéficiaires. La demande a toutefois bien été effectuée, en accord avec la direction du budget. Ce sont désormais 120 millions d'euros d'AE devenues sans objet qui ont été annulées, une marge de précaution de cinq millions d'euros ayant été conservée . En tout, les annulations d'AE s'élèvent à 463,5 millions d'euros, rapprochant ainsi le niveau d'AE - un peu plus de 2,54 milliards d'euros - du besoin de financement réel - les collectivités ont déposé des dossiers pour un montant total d'engagement du fonds de 2,53 milliards d'euros au 31 décembre 2020.

SECONDE PARTIE
LES COMPTES SPÉCIAUX

I. LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES AUX DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS » A ÉTÉ FORTEMENT MOBILISÉ POUR SOUTENIR LE SECTEUR DES TRANSPORTS FACE AUX CONSÉQUENCES DE LA CRISE SANITAIRE

A. L'AMORÇAGE D'UNE NORMALISATION DES DÉPENSES DU COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS, À L'EXCEPTION DE CELLES DU PROGRAMME 824, DÉDIÉ AU BUDGET ANNEXE « EXPLOITATION ET CONTRÔLE AÉRIENS »

Le compte de concours financiers (CCF) « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » retrace désormais sept catégories d'organismes bénéficiaires d'avances :

- sur le programme 821 , les avances à l'Agence de services et de paiement (ASP) au titre du préfinancement des aides de la politique agricole commune . Ces avances sont généralement d'une durée très courte, en tout cas inférieure à un an ;

- sur le programme 823 , les avances du Trésor à des organismes distincts de l'État gérant des services publics , dont font partie par exemple la Cité de la musique ou encore les chambres de commerce et d'industrie. Pour 2022, un montant de 210 millions d'euros est proposé pour FranceAgrimer, à la fois pour répondre aux crises agricoles et pour couvrir ses besoins de trésorerie dans le cadre du préfinancement du Fonds social européen. 7,4 millions d'euros sont par ailleurs de nouveau ouverts pour l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger ;

- sur le programme 824 , les avances du Trésor à d'autres services de l'État, qui se résument en réalité exclusivement aux avances octroyées au budget annexe « contrôle et exploitation aériens » (Bacea). Au 15 septembre 2021, le montant des avances consenti au Bacea s'élevait à 800 millions d'euros, avec toujours une durée maximale de remboursement fixée à 10 ans. Le montant des avances pouvant être octroyé en 2022 s'élèverait à 707 millions d'euros ;

- sur le programme 825 , les avances du Trésor à l' office national d'indemnisation des accidents médicaux, des affections iatrogènes et des infections nosocomiales (Oniam) afin de couvrir l'indemnisation des victimes du Benfluorex si les Laboratoires Servier refusaient d'y accéder. Aucune avance n'a encore été demandée. Si cela fait maintenant quatre ans que ces avances ne sont pas utilisées, leur inscription en loi de finances initiale, à hauteur de 15 millions d'euros, répond à un principe de précaution. En 2017 par exemple, les Laboratoires Servier avaient refusé de payer les indemnisations pour deux dossiers et l'Oniam les avait assignés en justice ;

- sur le programme 826 , les avances aux exploitants d'aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité , créé par la troisième loi de finances rectificative (LFR) pour 2020 94 ( * ) . Ces avances visent à compenser la chute des recettes de la taxe d'aéroport, acquittée par les compagnies aériennes et affectée au financement des dépenses de sûreté-sécurité. Versées en 2020 et 2021 à 86 exploitants, elles ont une durée maximale de 10 ans , la première échéance de remboursement devant intervenir en 2024 . Aucun crédit n'est prévu en 2022 ;

- sur le programme 827 , les avances à Île-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de covid-19 , créé par la quatrième loi de finances rectificative pour 2020 95 ( * ) . L'avance a été octroyée pour une durée maximale de 16 ans, avec une première échéance de remboursement en 2023. Dans le cadre du deuxième projet de loi de finances rectificative, 800 millions d'euros supplémentaires ont été octroyés, contre une prévision nulle dans le cadre de la loi de finances initiale. Pour le moment, aucun crédit n'est en revanche prévu pour 2022 ;

- sur le programme 828 , les avances destinées à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité (AOM) à la suite des conséquences de l'épidémie de covid-19, également créé par la quatrième LFR pour 2020. Si la date de remboursement ne peut être ultérieure au 1 er janvier 2031 et la durée de remboursement inférieure à six ans 96 ( * ) , les AOM bénéficiaires peuvent toutefois choisir, dans le respect de ces conditions, de ne commencer à rembourser les avances qu'au moment où les recettes tarifaires et le versement mobilité sont revenus à leur niveau moyen pour les années 2017 à 2019 (clause dite de « retour à meilleure fortune »). Là-encore, aucun crédit n'est ouvert en 2022.

Au 31 décembre 2020, le montant résiduel des avances octroyées depuis la création du compte s'élevait à 3,62 milliards d'euros .

Les avances sur les deux nouveaux programmes créés pour soutenir les autorités organisatrices de la mobilité (P827 et P828) ont ainsi toutes été engagées en 2020 . Pour ce qui concerne les avances aux AOM (programme 828), et selon les informations transmises en réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial, 750 millions d'euros ont bien été ouverts lors de la quatrième loi de finances rectificative pour 2020 sur ce programme, mais le décret d'application et le traitement des dossiers sont intervenus trop tardivement pour que ces avances soient effectivement octroyées aux autorités organisatrices de la mobilité bénéficiaires avant la fin de l'année 2020. Les crédits ont donc fait l'objet d'un arrêté de report en 2021 , plus de 583 millions d'euros ayant été consommés au mois de septembre 2021. L'assiette de calcul de la dotation pourrait par ailleurs être modifiée, conduisant éventuellement au versement de dotations complémentaires en 2021, dont le montant n'est pas encore connu. Par conséquent, aucun crédit n'a été ouvert en loi de finances initiale en 2021 et en 2022.

Il devait en être de même pour le programme 826, dédié aux exploitants d'aéroports. Toutefois, lors de l'examen du projet de loi de finances pour 2021, l'Assemblée nationale a adopté en nouvelle lecture, sur initiative du Gouvernement, un amendement 97 ( * ) ouvrant 250 millions d'euros de crédits . Cette avance complémentaire devait venir pallier les prévisions toujours dégradées du produit de la taxe d'aéroport, du fait d'un trafic aérien encore inférieur à son volume pré-crise sanitaire.

A contrario , les programmes 821 et 825 présentent une dotation en crédits indépendante des effets de la crise sanitaire. Sur le programme 823, pour les avances octroyées aux organismes distincts de l'État et gérant des services publics, la situation est différente en 2021, 325 millions d'euros supplémentaires ayant été ouverts dans le cadre du deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2021.

Évolution des dépenses, des recettes et du solde du compte
de concours financiers entre 2021 et 2022

(en crédits de paiement et en millions d'euros)

2020 (exécution)

LFI 2021

PLF 2022

Évolution 2022 / LFI 2021

Dépenses

[821] Avances à l'Agence de services et de paiement

8 108

10 000

10 000

0,00 %

[823] Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics

90

358

334

- 6,59 %

[824] Avances à des services de l'État

1 250

1 061

707

- 33,34 %

[825] Avances à l'Ondiam

0

15

15

0,00 %

[826] Avances aux exploitants d'aéroports touchés par la crise de covid-19 au titre des dépenses de sûreté-sécurité

300

250

0

- 100,00 %

[827] Avances remboursables destinées à soutenir Ile-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19

1 175

0

0

[828] Avances remboursables destinées à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19

0 98 ( * )

0

0

Total des dépenses

9 748

11 684

11 056,40

- 5,37 %

Recettes

[821] Avances à l'Agence de services et de paiement

8 108

10 000

10 000

0,00 %

[823] Avances à des organismes distincts de l'État et gérant des services publics

89

299

225

- 24,92 %

[824] Avances à des services de l'État

106

177

322

81,96 %

[825] Avances à l'Ondiam

0

15

15

0,00 %

[826] Avances aux exploitants d'aéroports

0

0

0

[827] Avances remboursables destinées à soutenir Ile-de-France Mobilités à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19

1 175

0

0

[828] Avances remboursables destinées à soutenir les autorités organisatrices de la mobilité à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19

0

0

0

Total des recettes

9 479

10 491

10 562

0,67 %

Solde

- 269

- 1 192

- 495

83,57 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Sur le volet « dépenses », et dans le présent PLF, la normalisation du CCF semble donc bien amorcée, à l'exception toutefois du programme 824 et des avances octroyées au Bacea . Elles connaîtraient certes une diminution d'un tiers entre 2022 et la loi de finances initiale pour 2021 (1,06 milliard d'euros), et même de 44 % s'il est tenu de la prévision révisée pour 2021 et de l'ouverture de 200 millions d'euros supplémentaires en loi de finances rectificative 99 ( * ) . Malgré cette diminution, et avec un volume prévisionnel de 707 millions d'euros pour 2022, le niveau des avances s'écarte durablement de celui constaté en 2019 (59,71 millions d'euros, 12 fois moins qu'en 2022).

Le Bacea avait en effet engagé, entre 2015 et 2019, une trajectoire de désendettement, qui s'était traduite par une diminution du stock d'avances. Cette dynamique vertueuse a été interrompue par la crise sanitaire. Déjà, entre la loi de finances initiale pour 2020 et le projet de loi de finances pour 2021, le montant des avances pouvant être accordées au Bacea avait été multiplié par 15. Les prévisions du trafic aérien, qui restent bien inférieures au niveau constaté en 2019, ont conduit à accroître fortement le besoin en trésorerie du budget annexe.

La normalisation amorcée dans le présent projet de loi se traduit par un rétablissement du solde , attendu en déficit de 500 millions d'euros en 2022 , contre près de 1,4 milliard d'euros en prévision révisée pour 2021 .

Ce solde se trouverait toutefois dégradé de 100 millions d'euros supplémentaires en 2022 , après l'adoption par l'Assemblée nationale d'un amendement du Gouvernement créant un nouveau programme au sein du compte de concours financiers. Le programme, intitulé « Avances remboursables destinées au financement des infrastructures de transports collectifs du quotidien de la métropole d'Aix-Marseille-Provence » , serait doté de 100 millions d'euros en crédits de paiement pour l'année 2022 et de 744 millions d'euros en autorisations d'engagement.

B. DES INTERROGATIONS PERSISTANTES SUR LES RÈGLES RÉGISSANT LES AVANCES

L'article 24 de la loi organique relative aux lois de finances définit les règles applicables aux avances. Ainsi, une avance doit être accordée pour une durée déterminée et doit être assortie d'un taux ne pouvant être inférieur aux obligations du Trésor à même échéance 100 ( * ) . À ce taux initial s'ajoutent les frais de gestion ainsi que, dans certains cas, une prime de risque destinée à couvrir l'État en cas de défaillance du bénéficiaire. Seul un décret en Conseil d'État peut permettre de déroger à ces obligations. Dans les faits cependant, il arrive fréquemment que des avances soient octroyées sans prime, soit parce que le bénéficiaire a par le passé remboursé sans difficulté une précédente avance, soit parce qu'il dispose de ressources certaines, propres à lui permettre de faire face à ses obligations.

Les principaux indicateurs inscrits dans le projet annuel de performance du CCF ont trait aux deux conditions encadrant l'utilisation des avances : le respect de la neutralité budgétaire pour l'État et le respect de la durée initiale des avances . En effet, si ce dernier critère n'était pas respecté, l'avance se transformerait de facto en subvention. Le rapporteur spécial relève que le premier indicateur ne devrait pas être strictement respecté en 2021, ni même en 2022. Cet écart s'explique par la possibilité, en application d'un décret en Conseil d'État du 7 décembre 2020 101 ( * ) , d'assortir l'avance octroyée à Île-de-France Mobilités d'un taux d'intérêt inférieur à celui des obligations du bons du Trésor de même échéance.

Deux éléments sont à relever et invitent à s'interroger sur le fonctionnement de ces avances. Le premier concerne leur récurrence , au profit de plusieurs organismes - en excluant le Bacea de ce périmètre - qui bénéficient chaque année ou presque d'un droit de tirage. Pour certains, ces avances permettent d'apporter la trésorerie nécessaire au financement de projets d'investissement , alors même que leur qualité d'organismes d'administration centrale ne leur permet pas de recourir à l'emprunt pour une durée supérieure à un an.

Le deuxième concerne la durée des avances . Le recueil des normes comptables de l'État 102 ( * ) , dans la partie normative de sa règle n° 7, fixe la durée des avances à deux ans maximum, renouvelable une fois sur autorisation expresse. Sur une durée supérieure à quatre ans, l'État doit consentir un prêt. Or, comme indiqué précédemment, la plupart des avances octroyées cette année ou les années passées ont des durées qui excèdent très largement les deux et quatre ans. Ainsi, plus de 95 % des avances avaient une maturité résiduelle supérieure à cinq ans en 2021 . De même, le caractère répété des avances revient également à contourner cette limitation. Dans ces situations, l'octroi d'une avance s'éloigne de l'esprit du dispositif, supposé ne servir que de relais de trésorerie temporaire pour les organismes bénéficiaires.

Il ne s'agit pas ici de remettre en cause le bien-fondé de l'octroi de certaines avances sur une durée très longue, comme par exemple celles à destination des AOM, avec une clause de retour à meilleure fortune, ou encore du secteur aérien. Toutefois, ces dispositifs auraient très bien pu prendre la forme de prêts, sans conséquence aucune sur le taux d'intérêt ou sur les modalités de remboursement par rapport à l'octroi d'une avance . Dans la maquette budgétaire du projet de loi de finances, ces fonds seraient portés par un compte de prêts, et non d'avances, ce qui permettrait de clarifier ces différentes modalités et éviterait de voir les règles et le principe même des avances contournés de façon aussi systématique .

II. LES VERSEMENTS DU COMPTE D'AFFECTATION SPÉCIALE « PARTICIPATION DE LA FRANCE AU DÉSENDETTEMENT DE LA GRÈCE » SE POURSUIVENT, APRÈS UN AJUSTEMENT DE LA TRAJECTOIRE EN 2021

Le compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » se compose de deux programmes :

- le programme 795 pour les dépenses au titre du versement de la France à la Grèce des revenus perçus sur les titres grecs ;

- et le programme 796 pour les dépenses au titre des rétrocessions de trop-perçus à la Banque de France.

Les recettes du compte sont constituées des revenus perçus sur la détention d'obligations souveraines grecques acquises soit par les banques centrales nationales au titre du programme ANFA ( Agreement on Net Financial Assets ), soit par la Banque centrale européenne, par l'intermédiaire des banques centrales nationales, dans le cadre du programme pour les marchés de titres SMP ( Security market programme ). La décision de reverser ces produits à la Grèce se justifiait par la volonté d'aider la Grèce à réduire son besoin de financement , pour participer au rétablissement de la soutenabilité de sa dette publique .

Évolution des crédits du CAS « Participation de la France
au désendettement de la Grèce » entre 2021 et 2022

(en millions d'euros)

2021

2022

Évolution 2021/2020

Dépenses

[795] Versement de la France à la Grèce des revenus perçus sur les titres grecs

117,95

98,9

- 16,15 %

Action 01 - Rétrocession des profits ANFA

0

0

Action 02 - Rétrocession des profits SMP

117,95

98,9

[796] Rétrocession de trop-perçus à la Banque de France

0

0

-

Total des dépenses

117,95

98,9

- 16,15 %

Recettes

Produit des contributions de la Banque de France

132,77

0

- 100,00 %

Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires

Au regard des normes budgétaires, deux raisons justifient le recours à un compte d'affectation spéciale (CAS) :

- l'article 123 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne interdit formellement aux banques centrales nationales de financer les États membres de la zone euro ;

- la nécessité d'isoler les flux vers la Grèce au sein du budget de l'État, qui n'est que le vecteur de l'opération de reversement.

Cette opération de reversement avait été interrompue en 2015 avec l'arrêt du programme d'assistance financière à la Grèce pour non-respect de ses engagements, avant d'être réactivée par un accord de l'Eurogroupe du 22 juin 2018. La Banque de France et le ministre de l'économie et des finances ont donc signé, le 13 mai 2019, une troisième convention par laquelle la Banque de France s'est engagée à verser 116,92 millions d'euros en 2019 et 84,08 millions d'euros en 2020 au titre des revenus qu'elle a reçus de la détention d'obligations grecques dans le cadre du SMP .

Les revenus correspondants seront ainsi reversés à la Grèce depuis le MES et deux fois par an, de 2018 à 2022, sous réserve que la Grèce satisfasse aux conditions fixées pour cette période. Par exemple, l'un des versements prévu au mois de juillet 2020 a été reporté au mois de mars 2021 (121,2 millions d'euros), faute d'un accord au sein du groupe de travail de l'Eurogroupe dans le cadre de la surveillance renforcée de la Grèce. En 2022, il est prévu un versement de 98,9 millions d'euros, le 15 janvier .

III. À L'INSTAR DES ANNÉES PRÉCÉDENTES, LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « ACCORDS MONÉTAIRES INTERNATIONAUX » N'EST PAS DOTÉ DE CRÉDITS

Le compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux » n'est plus abondé depuis plusieurs années , du fait des niveaux de réserves importants détenus par les banques centrales concernées et, par conséquent, de la faible probabilité d'un appel en garantie de l'État pour assurer la convertibilité des monnaies de la Zone franc 103 ( * ) . Il ne fait d'ailleurs plus l'objet de documents annuels de performance.

Bien que non doté en crédits, ce compte ne peut être supprimé puisqu'il constitue le pendant budgétaire des accords de coopération monétaires passés entre la France et 15 pays africains, dans le cadre de la Zone franc.

Pays

Unité monétaire

Parité fixe

Union monétaire ouest-africaine (UMOA)

Bénin, Burkina Faso, Côte d'Ivoire, Guinée Bissau, Mali, Niger, Sénégal et Togo

Franc CFA émis par la Banque centrale des États de l'Afrique de l'Ouest (XOF)

1 euro = 656 XOF

Union monétaire d'Afrique centrale (UMAC)

Cameroun, Centrafrique, Congo, Gabon, Guinée équatoriale, Tchad

Franc CFA émis par la Banque des États de l'Afrique centrale (XAF)

1 euro = 656 XAF

Union des Comores

Franc comorien émis par la Banque centrale des Comores (KMF)

1 euro = 492 KMF

Le Parlement a adopté au mois de janvier 2021 le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et les Gouvernements des États membres de l'Union monétaire ouest-africaine (UMOA) 104 ( * ) .

Le nouvel accord, signé le 21 décembre 2019 à Abidjan, a mis fin à l'obligation faite à la Banque centrale des États d'Afrique de l'Ouest de centraliser au moins 50 % de ses réserves de change auprès du Trésor 105 ( * ) , tout en maintenant les piliers de la coopération monétaire entre la France et l'UMOA, à savoir la parité fixe avec l'euro et la garantie de convertibilité illimitée et inconditionnelle apportée par la France 106 ( * ) . La BCEAO a depuis retiré une partie de ses dépôts auprès du Trésor.

LES MODIFICATIONS APPORTÉES
PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE

SUR LA MISSION « ENGAGEMENTS FINANCIERS DE L'ÉTAT »

L'Assemblée nationale a adopté, avec un avis personnel 107 ( * ) favorable de la rapporteure spéciale Bénédicte Peyrol, un amendement du Gouvernement ouvrant 1,133 milliard d'euros sur le programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État » de la mission « Engagements financiers de l'État » .

Cet amendement vise à tirer les conséquences, sur la charge de la dette, de la révision à la hausse des prévisions d'inflation en zone euro (+ 0,8 million d'euros) et de l'intégration des émissions de dette et des taux effectivement constatés entre début septembre et mi-octobre, qui ont un effet sur la ventilation du programme d'émissions futures (+ 0,3 million d'euros). Les modifications apportées par cet amendement ont été prises en compte dans les données présentées en amont par le rapporteur spécial, le montant des crédits ouverts ayant significativement bouleversé ses constats et ses observations sur la mission « Engagements financiers de l'État », et plus particulièrement sur la charge de la dette.

SUR LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS « AVANCES À DIVERS SERVICES DE L'ÉTAT OU ORGANISMES GÉRANT DES SERVICES PUBLICS »

L'Assemblée nationale a adopté, avec un avis personnel 108 ( * ) favorable de la rapporteure spéciale Valérie Rabault, un amendement du Gouvernement ouvrant 744 millions d'euros en autorisations d'engagement et 100 millions d'euros en crédits de paiement sur le compte de concours financiers « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » .

Ces crédits portent, sur un nouveau programme, les avances remboursables destinées au financement des infrastructures de transports collectifs du quotidien de la métropole d'Aix-Marseille-Provence . Ils s'inscrivent dans le cadre du plan « Marseille en Grand », présenté le 2 septembre 2021. Ces avances remboursables complètent une subvention de 256 millions d'euros. 75 % de l'effort d'un milliard d'euros promis pour soutenir la mobilité au sein de la métropole et désenclaver les quartiers du nord de la ville prendra donc la forme d'avances, dont les conditions de remboursement n'ont pas encore été précisées .

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 2 novembre 2021, sous la présidence de M. Dominique de Legge, vice-président, la commission a examiné le rapport de M. Jérôme Bascher, rapporteur spécial, sur la mission « Engagements financiers de l'État », le compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » et les comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».

M. Jérôme Bascher , rapporteur spécial de la mission « Engagements financiers de l'État », du compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » et des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ». - Je commencerai par les trois comptes spéciaux. Le compte d'affectation spéciale (CAS) « Participation de la France au désendettement de la Grèce » n'appelle aucun commentaire particulier de ma part. Nous continuons de reverser à la Grèce les revenus perçus par la Banque de France sur la détention d'obligations souveraines grecques, pour participer à la réduction de son besoin de financement et au rétablissement de la soutenabilité de sa dette publique.

À l'instar des années précédentes, le compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux », qui constitue le pendant budgétaire de nos accords de coopération dans le cadre de la Zone franc, n'est pas doté de crédits. Je vous proposerai de l'adopter.

Le compte de concours financiers « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics » porte des avances traditionnelles, par exemple celle d'une dizaine de milliards d'euros à l'Agence de services et de paiement au titre du préfinancement des aides de la politique agricole commune, versées par l'Union européenne. Toutefois, il y a aussi des crédits ouverts pour des avances au profit d'acteurs touchés par la crise sanitaire, par exemple sur le programme 824, qui porte les avances octroyées au budget annexe « Contrôle et exploitation aériens » (Bacea). L'avance atteint 707 millions d'euros, contre une cinquantaine de millions d'euros avant la crise sanitaire. De manière plus générale, on peut s'interroger sur ces avances : certaines d'entre elles se répètent d'année en année, sur des durées parfois très longues. On est donc parfois plus près d'un soutien budgétaire ou d'un prêt, qui devraient être reconnus comme tels, que d'une avance au sens de nos règles comptables.

J'en viens désormais à la mission « Engagements financiers de l'État », en commençant par les programmes qui n'appellent que de brèves remarques de ma part. Le programme 336, qui porte la rétrocession par la France des intérêts perçus sur les dépôts du mécanisme européen de stabilité (MES) auprès de la Banque de France, est doté de crédits pour la deuxième année consécutive. Ce n'était pas le cas avant, avec des ouvertures en cours d'année : or, il est plus sincère sur le plan budgétaire de voter dès la loi de finances initiale les crédits portant cette rétrocession.

Un mot également sur le programme 145 « Épargne », dont les crédits visent à financer les primes d'épargne logement versées lors de la mobilisation des comptes épargne logement (CEL) ou de la clôture des plans d'épargne logement (PEL). Les crédits sont très faibles, ces dispositifs sont peu mobilisés dans le contexte de taux actuel, et ces livrets sont désormais un outil d'épargne plutôt que de financement du logement.

À l'inverse, les crédits demandés sur le programme 114 « Appels en garantie de l'État » atteignent près de 3,3 milliards d'euros, ce qui est considérable. Sur ce montant, 2,65 milliards d'euros sont provisionnés pour faire face au défaut éventuel de paiement d'entreprises ayant contracté un prêt garanti par l'État (PGE). La majorité des entreprises devront commencer à rembourser leur prêt à compter de l'été prochain, nous aurons alors une idée plus claire du risque de sinistralité et du taux de défaillance. Les premières nouvelles sont rassurantes : beaucoup d'entreprises ont vu leur trésorerie augmenter et elles devraient pouvoir bénéficier à plein de la reprise économique si les conditions sanitaires se maintiennent.

Ce qui est plus critiquable en revanche, c'est la création du programme 369 pour retracer l'amortissement de la dette de l'État liée à la covid-19, doté de 165 milliards d'euros en autorisations d'engagement, et qui relève de l'artifice comptable. La première critique, c'est le montant retenu. Qu'est-ce que la dette ? C'est la somme des déficits. Or, nous ne connaissons ni le déficit 2021, ni celui que nous projetons pour l'an prochain, puisque pas un jour ne passe sans que le Gouvernement n'annonce une dépense nouvelle - voyez le Premier ministre, qui a présenté ce matin le Contrat d'engagement jeune ... Nous ne connaissons pas plus la prévision de recettes - l'Insee table sur une croissance de 7 % en 2021, ce qui se traduira mécaniquement par un surcroît de recettes fiscales. En réalité, on ne connait pas encore l'ampleur de la dette de l'État liée à l'épidémie de covid-19, puisque des mesures sont encore actives. Le Gouvernement se contente d'afficher un écart de dépenses avec les lois de finances précédentes et de reporter ces chiffres, sans contenir la dette.

Face aux 165 milliards d'euros, incomplets, inscrits comme « dette Covid-19 », les crédits de paiement s'élèvent à 1,9 milliard d'euros pour 2022, le but est de retracer l'amortissement de ces 165 milliards d'euros d'ici 2022.Nous nous en souvenons, le ministre de l'économie, des finances et de la relance avait indiqué que tout surplus de croissance irait à l'amortissement de la dette, on voit qu'il n'en sera finalement rien, avec des dépenses nouvelles.

Avec la création de ce programme, le Gouvernement ne fait que de l'affichage. Il faut par ailleurs se méfier des termes utilisés, il ne s'agit pas ici d'un cantonnement de la dette, comme on le fait pour la dette sociale avec la Caisse d'amortissement de la dette sociale (Cades), mais d'un isolement de son amortissement.

Pour l'ensemble de ces raisons, la création de ce programme n'ayant aucune justification économique, budgétaire ou de gestion, il me semble que nous devons envisager sa suppression.

M. Jean-François Husson , rapporteur général . - Merci pour cette présentation pédagogique et claire. Je me souviens du ministre des finances nous parlant de cantonnement de la dette, nous avons ici de la mystification. La Commission européenne s'apprête à émettre jusqu'à 800 milliards d'euros de dette d'ici à 2026. Y aura-t-il des conséquences pour le programme d'émissions de la France ?

M. Jérôme Bascher , rapporteur spécial . - Il n'y a pour l'instant pas « d'embouteillage » à craindre sur les marchés souverains, d'autant qu'il y a eu des efforts de coordination. La Commission européenne publie désormais son calendrier d'émissions sur six mois et fait preuve de plus de transparence, ce qui facilite cette coordination. Nous devons également suivre le sujet de la dette « verte » : si la France était jusqu'ici le premier émetteur d'obligations vertes, elle va désormais être dépassée par l'Union européenne. C'est un sujet qui appellera toute notre attention : sur le marché des obligations vertes, il reste encore d'importantes marges de progrès en termes d'harmonisation et de régulation. Chaque pays a ses règles, et la France dispose sans doute du cadre le plus contraignant, y compris en termes de vérification.

Une information importante : l'endettement est, pour la première fois de notre histoire, le premier moyen de financer l'ensemble des charges de l'État, avec l'amortissement des titres arrivés à échéance.

Mme Christine Lavarde . - Le MES est financé à 80 milliards d'euros par des fonds propres. Il peut également être abondé à hauteur de 620 milliards d'euros par le biais de contributions appelées principalement auprès de quatre bailleurs principaux, dont la France. Ces sommes sont-elles provisionnées dans les comptes de l'État ? Si, demain, un pays de l'Union avait des difficultés de paiement, comment notre pays pourrait-il remplir ses obligations à l'égard du MES ?

M. Sébastien Meurant . - Vous parlez de mystification, d'artifice comptable, c'est dire que la situation est grave, et ce budget peu sérieux. Je veux signaler, en plus des PGE, la question des remboursements à l'Urssaf, après la suspension du prélèvement des cotisations : est-ce que les défaillances possibles sont évaluées ?

M. Arnaud Bazin . - Quelques 3,35 milliards d'euros sont provisionnés pour les appels en garantie de l'État, dont 2,65 milliards d'euros pour les PGE. Ce montant paraît en rapport avec le risque évalué, mais sachant que l'encours atteint 142,5 milliards d'euros, avez-vous des éléments plus précis pour évaluer le risque en volume et le moment où les risques de défaillance seront les plus importants ?

Mme Sylvie Vermeillet . - La dette liée à la covid-19 est estimée à 165 milliards d'euros, 1,9 milliard d'euros est inscrit en crédits de paiement : comment, dans ce cadre, pouvons-nous retracer le remboursement de cette somme en vingt ans, d'ici 2042 ?

Mme Isabelle Briquet . - L'inflation marque le coup sur nos finances, mais le Gouvernement ne définit pas pour autant de stratégie de gestion de la dette : on le voit à l'absence de restructuration de la dette de SNCF-Réseau ou sur la question du financement du logement, dont les outils ne sont pas du tout adaptés à la mesure des besoins et à l'objectif de relance de la production de logements. Je déplore également l'absence d'intégration du programme France 2030, qui ne nous permet pas d'avoir l'évaluation la plus juste possible des engagements financiers de l'État pour 2022. En réalité, le Gouvernement gère la dette au présent, sans perspective, alors qu'il nous faut au contraire définir une stratégie de sortie de crise.

M. Vincent Delahaye . - Je ne suis favorable ni au cantonnement de la dette covid ni à son isolement, qui n'en font que complexifier l'analyse. Je souscris donc à l'idée du rapporteur de proposer la suppression de ce programme.

Le niveau de défaillance envisagé pour les entreprises ayant souscrit des PGE apparait faible : ne risquons-nous pas de sous-estimer le risque de défauts de paiement ? Si beaucoup d'entreprises ont profité des PGE pour accroître leur trésorerie, d'autres en avaient un réel besoin, pour répondre à leurs difficultés. Pour ces dernières, il sera plus difficile de rembourser : le taux de sinistralité de 3,8 % pourrait alors être trop optimiste.

Nous finançons nos dépenses avec la dette plus qu'avec l'impôt, ce qui apparait dangereux à terme. Nous ne pouvons que constater le résultat d'une gestion calamiteuse des finances publiques. Je défends à cet égard l'amendement récemment voté sur la transparence de la détention de la dette. Pourquoi ne disposons-nous pas chaque année d'une telle information ?

M. Jérôme Bascher , rapporteur spécial . - Sur le mécanisme européen de stabilité et le capital potentiellement appelable de la France, les sommes sont inscrites en hors bilan pour la France, à hauteur de 126 milliards d'euros.

Je partageais le scepticisme de certains d'entre vous sur la provision pour risque au titre des PGE, mais il faut reconnaître que les dernières données sont rassurantes. La Banque de France observe peu de défaillances s'agissant des entreprises ayant bénéficié d'un PGE. Sur les 650 836 entreprises ayant bénéficié d'un PGE, 3 944 font l'objet d'une procédure judiciaire, soit 0,6 % du total ; elles ont bénéficié de garanties à hauteur de 394 millions d'euros équivalant à 0,28 % des encours. Le service de cotation des entreprises de la Banque de France a par ailleurs analysé les bilans annuels de plus de 244 000 entreprises dont le chiffre d'affaires est supérieur à 750 000 euros. Parmi elles, 14 %, dont 3 % ayant eu recours à un PGE, sont jugées « sensibles ». La moitié dispose cependant d'une cotation élevée auprès de la Banque de France et la reprise économique est également un facteur conjoncturel favorable. Vous savez que des prêts participatifs ont été mis en place pour prendre le relais des PGE, mais, pour l'instant, ils ne fonctionnent pas, le taux de recours est très faible, les entreprises n'en ayant pas encore exprimé le besoin.

Attention, je le répète, la dette de l'État liée à l'épidémie de covid-19 ne fait pas l'objet d'un cantonnement, le programme 369 vise simplement à en retracer l'amortissement Inscrire 1,9 milliard d'euros en crédits de paiement, sur un total de 165 milliards d'euros de dette, s'apparente effectivement à de l'affichage. Il reviendra par ailleurs aux futurs gouvernements de continuer à doter ce programme de crédits de paiement.

Il est vrai que l'impact de l'inflation sur nos finances publiques et sur le pouvoir d'achat est au coeur de l'actualité. Il faut néanmoins rappeler que, dans la mesure où l'inflation accroit le PIB en valeur, elle permet de réduire le ratio de dette sur PIB. La gestion de la dette tient compte de cette inflation, d'autant qu'une partie de nos OAT (obligations assimilables du Trésor) sont indexées sur l'inflation en France et en zone euro. La logique est similaire s'agissant du financement du logement. Concernant le logement social, la gestion de l'actif et du passif est indexée sur l'inflation, qui agit sur le coût de la construction comme sur les aides au logement.

Enfin, s'agissant de la transparence des détenteurs de notre dette publique, j'estime qu'il ne s'agit pas là du premier sujet, la vraie question étant celle de notre capacité à placer notre dette, dans les meilleures conditions possibles pour l'État et le contribuable. Nous disposons de données trimestrielles de la Banque de France sur la nature des détenteurs, et de données du Fonds monétaire international (FMI) sur leur origine géographique, pour la détention des titres publics et privés. Il y a deux obstacles à la publication de données plus fines sur la détention de notre dette. Tout d'abord, on ne pourrait l'observer qu'à un instant t, ce qui nous donnerait finalement que peu d'informations pour une analyse approfondie. Les titres changent en effet de main très régulièrement. Ensuite, de nombreux acheteurs, et on peut par exemple penser aux banques centrales d'Amérique latine ou d'Asie, ne souhaitent pas rendre public le montant et le profil de leurs achats en euros. On peut toutefois approcher ce volume par le biais des données du FMI, en regardant la détention des actifs en euros d'une banque centrale et en la rapportant au volume de titres émis par les pays de la zone euro chaque année. Or, la France est l'un des premiers émetteurs de dette de la zone euro. Il faut surtout se féliciter que notre dette continue d'être achetée dans des conditions encore très favorables pour le contribuable et pour le financement de nos déficits, même si ces acheteurs veulent conserver une certaine discrétion...

La commission a décidé de réserver son vote sur les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».

La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption, sans modification, des crédits du compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » et des comptes de concours financiers « Accords monétaires internationaux » et « Avances à divers services de l'État ou organismes gérant des services publics ».

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* *

Réunie à nouveau le mardi 9 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission des finances a décidé de ne pas adopter les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État », précédemment réservés.

M. Jérôme Bascher , rapporteur spécial . - Je serai bref, je suis défavorable à l'adoption des crédits de cette mission. Juste avant-hier, le Gouvernement a cru bon d'ajouter un amendement ouvrant 1,1 milliard d'euros de dépenses supplémentaires, liées, d'une part, à la révision à la hausse de la prévision d'inflation en zone euro et, d'autre part, au contexte des taux d'intérêt. En outre, le ministre de l'économie, des finances et de la relance, a annoncé hier une prolongation du dispositif des prêts garantis de l'État (PGE) jusqu'au 30 juin 2022.

La commission a décidé de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission « Engagements financiers de l'État ».

*

* *

Réunie à nouveau le jeudi 18 novembre 2021, sous la présidence de M. Claude Raynal, président, la commission a confirmé sa décision de proposer au Sénat de ne pas adopter les crédits de la mission et d'adopter les crédits des comptes spéciaux.

LISTE DES PERSONNES ENTENDUES

Direction générale du Trésor

- Mme Emmanuelle IVANOV-DURAND, secrétaire générale adjointe ;

- M. Manuel CHÂTEAU, chef du bureau Affaires budgétaires et comptables ;

- M. Rémi SAPPIA, adjoint au chef de bureau Affaires budgétaires et comptables ;

- M. Étienne FLORET, adjoint au chef de bureau « financement et développement des entreprises ».

Agence France Trésor

- M. Cyril ROUSSEAU, directeur général ;

- M. Philippe GUYONNET-DUPERAT, responsable du pôle trésorerie de l'État.

LA LOI EN CONSTRUCTION

Pour naviguer dans les rédactions successives du texte, le tableau synoptique de la loi en construction est disponible sur le site du Sénat à l'adresse suivante :

http://www.senat.fr/dossier-legislatif/pjlf2022.html


* 1 Hors Remboursements et dégrèvements.

* 2 L'ensemble des prévisions chiffrées ci-après tient à la fois compte de l'adoption d'un amendement du Gouvernement à l'Assemblée nationale majorant les crédits du programme 117 « Charge de la dette et trésorerie de l'État » de la mission « Engagements financiers de l'État » à hauteur d'1,133 milliard d'euros dans le cadre du projet de loi de finances pour 2022, et des annulations de crédits intervenues sur la mission dans le cadre du deuxième projet de loi de finances rectificative pour l'année 2021.

* 3 La note de présentation examine également le compte d'affectation spéciale « Participation de la France au désendettement de la Grèce » et le compte de concours financiers « Accords monétaires internationaux ».

* 4 En incluant l'octroi d'une avance supplémentaire de 800 millions d'euros à Ile de France Mobilité dans le cadre du deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2021.

* 5 Hors remboursements et dégrèvements.

* 6 L'article 123 du traité sur le fonctionnement de l'Union européenne dispose qu'il « est interdit à la Banque centrale européenne et aux banques centrales des États membres, ci-après dénommées "banques centrales nationales", d'accorder des découverts ou tout autre type de crédit aux institutions, organes ou organismes de l'Union, aux administrations centrales, aux autorités régionales ou locales, aux autres autorités publiques, aux autres organismes ou entreprises publics des États membres; l'acquisition directe, auprès d'eux, par la Banque centrale européenne ou les banques centrales nationales, des instruments de leur dette est également interdite ». Concrètement, la Banque de France ayant l'interdiction d'autoriser l'État à être en découvert, le compte unique du Trésor doit toujours être positif en fin de journée.

* 7 Article 92 de la loi n°2013-1278 du 29 décembre 2013 de finances pour 2014 .

* 8 L'aide au remboursement est apportée dans la limite d'un taux maximal de 75 % des indemnités de remboursement anticipé, auquel s'ajoute un taux complémentaire maximal de 5 % pour les situations les plus graves.

* 9 Le périmètre « PLF 2022 » correspond donc à la somme des crédits demandés lors du dépôt du PLF et de ceux ouverts lors de l'examen de la mission « Engagements financiers de l'État » à l'Assemblée nationale.

* 10 Dans le présent rapport, le montant révisé pour 2021 s'entendra du montant révisé indiqué dans les documents budgétaires du projet de loi de finances 2022, auxquels sont ajoutées ou soustraites les ouvertures ou les annulations de crédits proposées dans le cadre du deuxième projet de loi de finances rectificative pour 2021.

* 11 Les cinq angles sont les suivants : le système de contrôle des opérations et des procédures internes, l'organisation comptable et du traitement de l'information, les systèmes de mesure des risques et des résultats, les systèmes de surveillance et de maîtrise des risques, et enfin le système de documentation et d'information.

* 12 Selon les résultats de l'audit, repris également dans le rapport annuel d'activité de l'Agence France Trésor pour l'année 2020 .

* 13 D'après les informations figurant dans le projet annuel de performances de la mission « Engagements financiers de l'État » annexé au projet de loi de finances pour 2022 et les réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

* 14 Article 58 de la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne .

* 15 Avis n° 444 (2019-2020) de M. Albéric de MONTGOLFIER, fait au nom de la commission des finances, déposé le 19 mai 2020 sur le projet de loi portant diverses dispositions urgentes pour faire face aux conséquences de l'épidémie de covid-19.

* 16 Ordonnance n° 2020-1496 du 2 décembre 2020 relative à la centralisation des disponibilités de certains organismes au Trésor et prise en application de l'article 58 de la loi n° 2020-734 du 17 juin 2020 relative à diverses dispositions liées à la crise sanitaire, à d'autres mesures urgentes ainsi qu'au retrait du Royaume-Uni de l'Union européenne.

* 17 Décret n° 2021-29 du 14 janvier 2021 relatif à la centralisation des disponibilités de certains organismes au Trésor et au régime des dérogations à l'obligation de dépôt au Trésor.

* 18 Le Fonds de garantie des dépôts et de résolution, l'IFP-Énergies nouvelles, le Commissariat à l'énergie atomique, France Compétences, l'Agence nationale pour la rénovation urbaine, Pôle Emploi, l'Institut de France et ses académies, l'Institut national de l'audiovisuel, la Monnaie de Paris, l'EPIC Bpifrance, le Conseil économique, social et environnemental, les autorités publiques indépendantes, l'Agence française d'expertise technique internationale et l'Agence nationale pour la gestion des déchets radioactifs.

* 19 Estimation hors rapatriement de la trésorerie de Pôle Emploi. Un arrêté ministériel doit en effet venir fixer les conditions de dépôt des fonds de Pôle Emploi.

* 20 Y compris la dette de SNCF Réseau reprise par l'État (programme « Charge de la dette de SNCF Réseau reprise par l'État » de la mission « Écologie, développement et mobilité durables »).

* 21 Selon les réponses apportées au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial, « l'effet calendaire est la variation du coût budgétaire des opérations d'émission et de rachats de titres à moyen et long terme l'année où elles ont lieu. Cette variation retrace les différences entre les dates, les volumes et les taux des opérations conduites les deux années ».

* 22 Haut Conseil des finances publiques. Avis n° HCFP-2021-4 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2022 , 17 septembre 2021.

* 23 Loi n° 2020-473 du 25 avril 2020 de finances rectificative pour 2020.

* 24 Loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021.

* 25 Dans le cadre du deuxième projet de loi de finances rectificative pour l'année 2021.

* 26 À noter, si la hausse du déficit anticipé pour 2021 ne s'est pas traduit par une modification du programme d'émission à moyen et long terme ni par une plus forte variation de l'encours des titres de court terme, c'est parce qu'il a été décidé de recourir à une contribution de 32,8 milliards d'euros du compte du Trésor. En effet, le déficit budgétaire constaté pour l'année 2020 a été moindre que prévu dans le cadre de la quatrième loi de finances rectificative (inférieur de 45,2 milliards d'euros), en grande partie du fait de la moindre sollicitation des dispositifs de soutien. Résultat, les ressources de financement mobilisées en 2020 se sont traduites par une augmentation de 63,4 milliards d'euros du niveau du compte du Trésor en 2020, qui a pu ensuite être mobilisé. Ces informations proviennent du bulletin mensuel de l'Agence France Trésor pour le mois de juin 2021 . Ce sont également des mouvements de trésorerie qui expliquent que la révision à la hausse du déficit prévu pour 2022 dans le cadre de l'examen du projet de loi de finances ne se soit pas traduite par un rehaussement des émissions de titres.

* 27 Il s'agit des primes à l'émission. Pour une description détaillée de ce dispositif, se reporter à l' annexe 13 « Mission Engagements financiers de l'État » du rapporteur spécial Jérôme Bascher , dans le rapport général n° 138 (2020-2021) fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021, par M. Jean-François Husson.

* 28 Agence France Trésor, Bulletin mensuel du mois de septembre 2021 .

* 29 Pour une discussion détaillée du recours par l'Agence France Trésor aux BTF durant l'année 2020, se reporter à l' annexe 13 « Mission Engagements financiers de l'État » du rapporteur spécial Jérôme Bascher , dans le rapport général n° 138 (2020-2021) fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021, par M. Jean-François Husson.

* 30 Chiffre définitif.

* 31 Avec un déficit initialement attendu à 4,8 % du PIB, soit 143,4 milliards d'euros.

* 32 Compte général de l'État . Annexe au projet de loi de règlement du budget et d'approbation des comptes pour l'année 2020.

* 33 Le taux de couverture moyen est égal à la moyenne pour chaque adjudication du rapport entre volume demandé et volume servi, pondéré par le volume servi.

* 34 Selon les données inscrites dans le rapport annuel d'activité de l'Agence France Trésor pour l'année 2020 et les réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

* 35 Selon la Cour des Comptes, dans son rapport sur la situation et les perspectives des finances publiques publié en juin 2020 , il n'y a quasiment que l'Italie et la France en zone euro qui n'ont pas été en mesure, entre 2014 et 2019, de réduire le poids de la dette dans le PIB.

* 36 Cour des comptes, « Une stratégie de finances publiques pour la sortie de crise », juin 2021.

* 37 Cour des comptes, « La situation et les perspectives des finances publiques », 22 juin 2021.

* 38 Le taux implicite de la dette correspond à la charge de la dette en comptabilité maastrichtienne divisée par l'encours de dette en début d'année.

* 39 Selon les données inscrites dans le projet annuel de performances de la mission « Engagements financiers de l'État » , annexé au projet de loi de finances pour 2022.

* 40 Pour une description plus détaillée, se reporter à l' annexe 13 « Mission Engagements financiers de l'État » du rapporteur spécial Jérôme Bascher , dans le rapport général n° 138 (2020-2021) fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021, par M. Jean-François Husson.

* 41 Par convention, à déficit constant.

* 42 Selon les données publiées par l'Agence France Trésor dans son rapport annuel d'activité pour l'année 2020 .

* 43 D'après les données publiées par la Banque centrale européenne, d'une part sur le programme d'achat de titres du secteur public , d'autre part sur le programme d'achats d'urgence face à la pandémie .

* 44 D'après l'article de Jörg Krämer, chef économiste chez Commerzbank, dans le bulletin mensuel de l'Agence France Trésor du mois de septembre 2021 .

* 45 Ibid.

* 46 Selon les données transmises en réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

* 47 Annexe 13 « Mission Engagements financiers de l'État » du rapporteur spécial Jérôme Bascher , dans le rapport général n° 138 (2020-2021) fait au nom de la commission des finances sur le projet , adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021, par M. Jean-François Husson.

* 48 D'après la retranscription de l'émission « On n'arrête pas l'économique » de France Inter par la Banque de France (9 octobre 2021).

* 49 Le rapporteur spécial avait consacré un plus ample développement aux agences de notation dans le cadre de l' annexe 13 « Mission Engagements financiers de l'État » du rapporteur spécial Jérôme Bascher , dans le rapport général n° 138 (2020-2021) fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021, par M. Jean-François Husson.

* 50 Selon les données inscrites dans le tome 1 du rapport préparatoire au débat d'orientation des finances publiques , publié en juin 2021.

* 51 Haut Conseil des finances publiques. Avis n° HCFP-2021-4 relatif aux projets de lois de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2022 , 17 septembre 2021.

* 52 Tribune de Hélène Rey dans les Échos , 10 décembre 2020.

* 53 Interview d'Olivier Blanchard dans les Échos , le 27 janvier 2021.

* 54 Cour des comptes, « La situation et les perspectives des finances publiques », 22 juin 2021.

* 55 Se reporter ainsi à l' annexe 13 « Mission Engagements financiers de l'État » du rapporteur spécial Jérôme Bascher , dans le rapport général n° 138 (2020-2021) fait au nom de la commission des finances sur le projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale, pour 2021, par M. Jean-François Husson et au rapport d'information n° 607 (2020-2021) de M. Jérôme Bascher , fait au nom de la commission des finances.

* 56 La maturité de la dette britannique était proche de 18 ans en 2019. Comme indiqué en réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial, cette maturité plus longue s'explique par la nature des investisseurs acheteurs de sa dette, et notamment le poids des fonds de pension, qui concentrent par ailleurs leurs investissements sur le segment obligataire.

* 57 Dossier législatif de la proposition de loi organique relative à la modernisation de la gestion des finances publiques.

* 58 Selon les informations publiées dans le bulletin mensuel du mois de mai 2021 par l'Agence France Trésor.

* 59 Dernières données disponibles, publiées dans le bulletin mensuel du mois de septembre 2021 par l'Agence France Trésor, à partir des données de la Banque de France.

* 60 Selon les informations publiées dans le bulletin mensuel du mois de mai 2021 par l'Agence France Trésor.

* 61 Pour une discussion plus détaillée de ces obligations, ainsi que des obligations thématiques de manière générale, se reporter au rapport d'information n° 607 (2020-2021) de M. Jérôme Bascher , fait au nom de la commission des finances.

* 62 Agence France Trésor, « OAT verte. Rapport d'allocation et de performance 2020 ».

* 63 Communiqué de presse de l'Agence France Trésor en date du 25 janvier 2021 : « OAT verte : annonce du montant des dépenses vertes éligibles pour l'année 2021 ».

* 64 Suppression du compte d'affectation spéciale « Transition écologique » au 1 er janvier 2021.

* 65 Communiqué de presse de la Commission européenne en date du 12 octobre 2021 : « NextGenerationEU : La Commission européenne lance avec succès la première émission d'obligations vertes pour financer une reprise durable ».

* 66 Communiqué de presse de la Commission européenne en date du 7 septembre 2021 : « NextGenerationEU: la Commission européenne se prépare à émettre 250 milliards d'euros d'obligations vertes NextGenerationEU ». Il accompagne la taxonomie des investissements durables, même si cette grille de lecture est spécifique au secteur privé, certaines dépenses propres au service public, telles le soutien à des organismes de recherche par exemple, n'étant pas prises en compte.

* 67 Lois organique n° 2020-991 et ordinaire n° 2020-992 du 7 août 2020 relatives à la dette sociale et l'autonomie.

* 68 La formule est donc la suivante : (Déficit constaté en 2020 - prévision du déficit 2020 en projet de loi de finances pour 2020) + (déficit révisé pour 2021 - prévision du déficit 2021 en projet de loi de finances pour 2021 = (178,1-93,1) + (172,2-92,2) = 165 milliards d'euros.

* 69 Les crédits dédiés à l'activité partielle de longue durée étaient portés par l'action 01 « Sauvegarde de l'emploi » du programme 364 « Cohésion » de la mission « Plan de relance ».

* 70 Une solution suggérée au rapporteur spécial lors des auditions conduites dans le cadre de son rapport d'information sur la syndication .

* 71 Les crédits ouverts sur le programme 369 alimentent le programme 732 du compte d'affectation spéciale « Participations financières de l'État », qui alimente en retour la Caisse de la dette publique.

* 72 Selon les données transmises en audition par la direction générale du Trésor.

* 73 À noter qu'un tableau de bord interactif a également été mis en place pour suivre les prêts garantis par l'État.

* 74 Article 209 de la loi n° 2020-1721 du 29 décembre 2020 de finances pour 2021 .

* 75 La durée de remboursement maximale est de six ans : deux ans de différé et quatre ans de remboursement, ou un an de différé et cinq ans de remboursement.

* 76 Selon les informations transmises dans le projet annuel de performances de la mission « Engagements financiers de l'État » , annexé au projet de loi de finances pour 2022.

* 77 Sur la base de l'encours total constaté au mois d'octobre 2021.

* 78 Conclusions reprises dans le rapport d'information n° 583 (2020-2021) de M. Jean-François HUSSON, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances. Se reporter également au rapport n° 32 de l'Institut des politiques publiques, « Rapport d'évaluation de la contrainte pour les entreprises du remboursement des prêts garantis par l'État », avril 2021.

* 79 D'après les données transmises en réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

* 80 Sur la base d'un encours total de 150 milliards d'euros.

* 81 Un constat qui doit toutefois être nuancé. Pour une discussion détaillée, se reporter au rapport d'information n° 583 (2020-2021) de M. Jean-François HUSSON, rapporteur général, fait au nom de la commission des finances.

* 82 135 milliards d'euros comme base de référence pour l'étude.

* 83 Cour des comptes, « Mission Engagements financiers de l'État - Note d'analyse de l'exécution budgétaire 2020 », avril 2021.

* 84 Selon les réponses au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

* 85 Cour des comptes, Le budget de l'État en 2019 (résultats et gestion) , 28 avril 2020.

* 86 Amendement n° I-1137 déposé par Mme Bénédicte Peyrol à l'article 10 du présent projet de loi de finances, adopté par l'Assemblée nationale avec un avis favorable du rapporteur général, M. Laurent Saint-Martin, et du Gouvernement.

* 87 Selon les données inscrites dans le projet annuel de performance de la mission « Gestion des finances publiques » , annexé au projet de loi de finances pour 2022.

* 88 En réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

* 89 Le traité instituant le Mécanisme européen de stabilité a récemment fait l'objet d'un accord de modification. Le projet de loi autorisant la ratification de cet accord a été examiné en première lecture par le Sénat. Voir ainsi le rapport n° 65 (2021-2022) de M. Jean-Marie MIZZON, fait au nom de la commission des finances, déposé le 20 octobre 2021.

* 90 Dans le cadre du deuxième projet de loi de finances rectificative pour l'année 2021, ce montant est ramené à 63,64 millions d'euros.

* 91 Article 26 de la loi n°2014-1655 du 29 décembre 2014 de finances rectificative pour 2014.

* 92 Cour des comptes, « Mission Engagements financiers de l'État - Note d'analyse de l'exécution budgétaire 2019 », avril 2020.

* 93 Réponse au questionnaire budgétaire du rapporteur spécial.

* 94 Loi n° 2020-935 du 30 juillet 2020 de finances rectificative pour 2020 .

* 95 Loi n° 2020-1473 du 30 novembre 2020 de finances rectificative pour 2020 .

* 96 Sauf accord du bénéficiaire.

* 97 Amendement n° 1154 déposé par le Gouvernement et modifiant l'article 35 (État D) du projet de loi de finances pour 2021.

* 98 Explications supra.

* 99 Loi n° 2021-953 du 19 juillet 2021 de finances rectificative pour 2021 .

* 100 Le contexte des taux d'intérêts négatifs a conduit l'Agence France Trésor à appliquer un taux plancher de 0 % assorti d'une prime reflétant la différence de qualité entre la signature de l'État et du bénéficiaire. Deux raisons justifient ce choix : (1) ne pas faire peser une charge budgétaire supplémentaire pour l'État ; (2) ne pas déresponsabiliser les tiers bénéficiant d'une avance.

* 101 Décret n° 2020-1528 du 7 décembre 2020 relatif au taux d'intérêt du prêt accordé par l'État à l'établissement public « Ile-de-France Mobilités » à la suite des conséquences de l'épidémie de la covid-19.

* 102 Recueil des normes comptables de l'État , à jour de l'arrêté du 28 juillet 2021 portant modification des règles relatives à la comptabilité générale de l'État.

* 103 Pour une discussion détaillée des principes de fonctionnement de la Zone franc, se reporter au rapport d'information n° 729 (2019-2020) de Mme Nathalie Goulet et M. Victorin Lurel, fait au nom de la commission des finances, déposé le 30 septembre 2020.

* 104 Promulguée et désormais loi n° 2021-108 du 3 février 2021 autorisant l'approbation de l'accord de coopération entre le Gouvernement de la République française et les Gouvernements des États membres de l'Union monétaire ouest-africaine.

* 105 Dans les faits, il arrivait fréquemment que cette part soit dépassée.

* 106 Pour une description détaillée du contenu, du contexte et des conséquences de ce nouvel accord de coopération, se reporter au rapport n° 289 (2020-2021) de M. Jérôme Bascher, sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord de coopération entre la France et l'UMOA, fait au nom de la commission des finances, déposé le 20 janvier 2021.

* 107 L'amendement n'a pas été examiné par la commission des finances de l'Assemblée nationale.

* 108 Ibid.

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