II. PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOTRE RAPPORTEURE SPÉCIALE

1. Une démarche de performance au point mort sur le programme « Remboursements et dégrèvements d'impôts d'État »

Le suivi de la performance du programme 200 n'apparaît toujours pas pleinement satisfaisant à deux égards : d'une part, les cibles choisies pour chacun des indicateurs, et quasi invariablement reconduites d'année en année, sont largement en-dessous des réalisations observées depuis plus de cinq ans. Il est permis de douter que ces cibles demeurent un réel facteur de mobilisation des agents et de pilotage du programme .

En outre, à un niveau plus fondamental, la focalisation du programme sur un seul objectif, celui de la rapidité, conduit à ne tenir aucun compte des conditions de travail des agents et de la nécessaire sécurisation des deniers publics . Le rapport annuel de performances indique d'ailleurs que l'objectif est en réalité double : « permettre aux usagers de bénéficier de leurs droits dans les meilleurs délais », mais aussi « garantir le bien-fondé des décisions au regard de la législation ».

Il semble ainsi cette année encore nécessaire de compléter l'objectif de rapidité par un objectif tenant au taux de réclamations contentieuses sur les remboursements et dégrèvements du programme.

Une attention doit en outre être portée sur l'adéquation entre les moyens humains et matériels des services de la DGFiP et les objectifs qui lui sont fixés. Le rapport annuel de performances souligne la mobilisation des services pour atteindre un niveau satisfaisant de l'indicateur 1.1, « en dépit du nombre important de demandes de remboursement de crédit de TVA traitées et de l'importance structurelle de la gestion du CICE ». La capacité des services à assumer sur le long terme des tâches plus nombreuses et plus denses appelle à être surveillée, alors même que votre rapporteure soulignait déjà, à l'occasion de l'examen des crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » inscrits dans le projet de loi de finances pour 2016, l'impact du CICE sur l'administration fiscale.

2. Une insuffisante prévisibilité du CICE

Les écarts relevés par rapport aux prévisions de la loi de finances initiale sont, pour la deuxième année consécutive, largement dus à la gestion du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). Si un temps nécessaire à la montée en puissance du dispositif est concevable, ces écarts interrogent une nouvelle fois sur le manque de préparation du dispositif , ici dans ses aspects budgétaires et comptables.

En analysant l'exécution 2014 , la Cour des comptes relevait que le total des dépenses au titre du CICE avait été de 6,37 milliards d'euros, contre 9,76 milliards d'euros prévus dans la loi de finances initiale . Cette année, les prévisions jointes au projet de loi de finances initiale puis, en novembre 2015, au projet de loi finances rectificative n'ont pas suffisamment anticipé la montée en charge du dispositif . La Cour des comptes souligne ainsi dans la note d'exécution budgétaire que le coût total du CICE pour 2015 a dépassé de 1,2 milliard d'euros la prévision de la loi de finances initiale.

La Cour des comptes formule également cette année une observation concernant la soutenabilité budgétaire de la mission au regard de la montée en charge du CICE. L'exercice 2017 marquera ainsi une nouvelle augmentation du coût budgétaire du CICE avec le remboursement des parts restantes de créances de l'exercice 2013, les entreprises qui n'ont pu imputer ni se voir restituer la totalité de leur créance pouvant demander le remboursement du reliquat à l'issue du troisième exercice.

La comptabilité générale de l'État permet de compléter l'analyse budgétaire, le compte général de l'État consacrant depuis 2014 une partie au CICE. Au compte de résultat , le CICE représente 16,3 milliards d'euros d'obligations fiscales inscrites en minoration de l'impôt sur les sociétés en 2015, soit une progression de 6,6 milliards par rapport à 2014. Cette somme comprend les imputations et les restitutions réalisées durant l'année ainsi que la variation des charges à payer venant s'ajouter au bilan. Sur l'exercice 2015, l'impact du CICE sur le bilan de l'État s'élève à 9,6 milliards d'euros , soit 5,9 milliards d'euros de plus qu'en 2014. Inscrit au sein des autres dettes non financières, ce montant correspond aux charges à payer lors des exercices à venir au titre des créances des millésimes 2014 et 2015 non consommées à la clôture de l'exercice 2015. Si ces éléments sont inhérents à la forme retenue d'un crédit d'impôt, la difficulté à prévoir le coût budgétaire réel sur l'année à venir pose question sur de tels montants

Votre rapporteure présentera dans les semaines à venir un rapport de contrôle budgétaire dans lequel elle développera son analyse de la mise en oeuvre et au pilotage de ce dispositif.

3. Des documents budgétaires relatifs aux remboursements et dégrèvements d'impôts locaux totalement insuffisants

Si les crédits de la mission « Remboursements et dégrèvements » sont évaluatifs et ne constituent pas un plafond de dépense, il n'en demeure pas moins que les dépenses engagées sur cette mission sont de « vraies dépenses », qui représentent d'ailleurs un coût extrêmement important de plus de 100 milliards d'euros chaque année .

Au-delà du montant en jeu, ces crédits correspondent à une véritable politique publique , que ce soit en retraçant le coût du CICE, dispositif majeur de la politique économique du Gouvernement, ou le coût des remboursements et dégrèvements de fiscalité locale à destination des ménages les plus vulnérables.

Pourtant, votre rapporteure spéciale a le sentiment que cette mission ne fait pas l'objet de toute l'attention qu'elle mérite de la part de l'administration, au vu de la qualité des documents budgétaires . Ceux-ci se contentent de constater les dépenses engagées, sans fournir de détail sur les causes sous-jacentes aux évolutions observées au niveau de chaque action.

Elle souhaite donc, comme elle l'a mentionné à plusieurs reprises dans ses rapports spéciaux sur la mission, que ces documents soient considérablement enrichis afin non plus de simplement décrire des évolutions, mais de les expliquer.

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