EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mercredi 12 novembre 2014, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission a procédé à l'examen du rapport de M. Philippe Dominati, rapporteur spécial, sur les programmes « Gendarmerie nationale » et « Police nationale » de la mission « Sécurités » (et article 59 septies ), du rapport de M. Vincent Delahaye, rapporteur spécial, sur le programme « Sécurité et éducation routières » de la mission « Sécurités » et le compte d'affectation spéciale (CAS) « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », et du rapport de M. Jean Pierre Vogel, rapporteur spécial, sur le programme « Sécurité civile » de la mission « Sécurités ».

Mme Michèle André , présidente . - Je salue la présence d'Alain Gournac, rapporteur pour avis de la commission des affaires étrangères sur le programme « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurités ».

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - Les crédits proposés au titre des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » s'élèvent à 17,74 milliards d'euros en autorisations d'engagement et 17,76 milliards en crédits de paiement, en progression respectivement de 1,13 % et de 0,49 % par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale.

Cette hausse reflète pour partie les créations de postes, à hauteur de 405 emplois temps plein (ETP), dont 243 ETP pour la police et 162 ETP pour la gendarmerie, portant le total des créations d'emplois à 1 290 ETP depuis 2013.

Des écarts croissants s'observent entre les prévisions et les exécutions du plafond d'emplois de la gendarmerie nationale : la sous-exécution a atteint 1 810 emplois équivalents temps plein travaillés (ETPT) en 2013, soit 1,86 % des emplois du programme, ce qui traduit la difficulté des gestionnaires à appréhender les comportements individuels des agents. En conséquence, de nombreuses brigades de gendarmerie sont incomplètes.

La stabilisation des dépenses de personnel de la police nationale entre 2014 et 2015 (+ 0,1 milliard d'euros) s'explique par une surévaluation des crédits de titre 2 en loi de finances initiale pour 2014. À périmètre constant, les dépenses de personnel augmentent en réalité de 1,1 % par rapport à 2014. La masse salariale devrait en revanche se stabiliser entre 2015 et 2017, sous l'effet d'un repyramidage (des postes de catégorie A sont supprimés au profit de postes de catégories B et C) et d'une baisse drastique des mesures catégorielles qui seront inférieures à 1 million d'euros en 2017, soit un niveau historiquement bas qui pourrait peser sur l'attractivité des métiers de la sécurité. La baisse en 2014 du taux de l'indemnité de sujétion spéciale de police (ISSP) a d'ores et déjà constitué un frein au recrutement. Enfin, selon la Cour des comptes, le stock d'heures supplémentaires du corps d'encadrement et d'application de la police nationale, estimé à 15 749 000 heures par le ministère de l'intérieur, réévalué à la hausse par rapport aux estimations antérieures (14,6 millions d'heures), requiert la constitution d'une provision, comprise entre 194 et 322 millions d'euros.

Les indicateurs de mission montrent une hausse généralisée de la délinquance en 2013 : les atteintes volontaires à l'intégrité physique des personnes ont augmenté l'an passé, tant en zone police (+ 1,29 %, après + 1,45 % en 2012) qu'en zone gendarmerie (+ 3,2 %) ; les violences physiques non crapuleuses et les violences sexuelles ont crû de 1,1 % en 2013 en zone police et de 9,8 % en zone gendarmerie (au lieu de - 9,2 % en 2012) ; le nombre de cambriolages a progressé de 7 %, tant en zone police qu'en zone gendarmerie pour atteindre un total de 390 000 en 2013 ; enfin, les atteintes aux biens ont augmenté en zones police (+ 2,7 %) et gendarmerie (+ 3,9 %). Les résultats du premier semestre 2014 sont contrastés.

De telles évolutions, en partie imputables à la situation économique, laisseront des traces durables sur le sentiment d'insécurité de nos concitoyens et justifieraient que les données issues des enquêtes conduites par l'Observatoire national de la délinquance et des réponses pénales (ONDRP) soient valorisées dans la préparation des documents budgétaires et utilisées pour élaborer un indicateur pertinent sur ce ressenti, comme notre collègue Jean-Vincent Placé l'avait d'ailleurs proposé l'an dernier. En outre, la création d'un indicateur mesurant la part des activités dédiées à la prévention et à la répression par les forces de police serait également utile et pourrait constituer l'un des objectifs du service statistique ministériel de la sécurité intérieure (SSMSI) créé cette année.

L'Assemblée nationale a adopté l'article 59 septies autorisant les collectivités territoriales à participer, jusqu'en 2017, au financement d'opérations immobilières de la police nationale, de la gendarmerie nationale et de la justice. Il s'agit de la deuxième reconduction d'un dispositif institué par la loi d'orientation et de programmation de la sécurité intérieure (LOPSI) du 29 août 2002. Ce dispositif est bienvenu et nécessaire.

Je salue le courage et l'engagement des forces de sécurité, dont j'ai pu rencontrer les syndicats, ainsi que les directeurs généraux de la police nationale et de la gendarmerie nationale. Je suggère d'adopter sans modification les crédits des programmes « Police nationale » et « Gendarmerie nationale » de la mission « Sécurités », ainsi que l'article 59 septies rattaché. J'estime en conclusion que le bilan négatif en matière d'insécurité pour 2013 commande de renforcer les personnels.

M. Vincent Delahaye , rapporteur spécial . - La politique de sécurité routière a porté ses fruits ; le nombre de tués et blessés sur les routes françaises a fortement diminué entre 2008 et 2013 (3 268 morts en 2013). Il convient de ne pas baisser la garde car le nombre de morts a légèrement augmenté sur les huit premiers mois de l'année 2014. L'objectif du Gouvernement est de passer sous la barre de 3 200 morts en 2015.

Sous réserve du transfert des dépenses de personnel au programme 216, les dépenses du programme 207 « Sécurité et éducation routières » restent stables par rapport à la réalisation 2013. Le bas niveau des taux d'intérêt réduit d'un million d'euros la charge financière de l'État au titre du permis à un euro par jour. Je salue la réforme annoncée du permis de conduire, qui devrait rendre plus attractive la conduite accompagnée, réduire le délai entre deux présentations à l'examen et décharger les inspecteurs de tâches qui n'étaient pas au coeur de leur mission. Je serai attentif à ce qu'elle soit menée à budget constant.

Quant au contrôle de la circulation et du stationnement routier, les recettes attendues pour 2015 s'établissent à 1,671 milliard d'euros, en légère progression par rapport à 2014. Elles se répartissent entre les amendes forfaitaires « radars » (658 millions d'euros), les amendes forfaitaires majorées et les amendes forfaitaires hors radars (1,01 milliard d'euros). Elles contribuent au financement de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF) à hauteur de 249 millions d'euros et à celui de programmes pour les collectivités territoriales (170 millions d'euros sur le programme « radars » et 497 millions d'euros sur le programme 754) ; 45 millions d'euros sont versés au Fonds interministériel de prévention de la délinquance et 440 millions d'euros sont consacrés au désendettement de l'État.

Je me suis interrogé, comme chaque année, sur la politique de l'État en matière de radars, qui fera sans doute l'objet de mon contrôle budgétaire de l'an prochain. Certains de ces équipements vieillissant, on s'efforce d'implanter de nouveaux radars « vitesses moyennes » ou « chantiers », bien plus intelligents que les précédents, mais bien plus chers : 200 000 euros pièce environ. Puisque l'on nous annonce quarante nouveaux radars « vitesse moyenne » et quarante-trois nouveaux radars « chantiers », je proposerai un amendement réduisant les nouvelles installations à vingt de chaque type, pour une économie de 7,35 millions d'euros que je vous propose d'affecter aux collectivités territoriales.

L'Agence nationale de traitement automatisé des infractions (ANTAI), installée à Rennes, gère tous les procès-verbaux ; elle envoie, pour un coût de 15,7 millions d'euros, 17 millions de lettres simples qui arrivent souvent avec beaucoup de retard, alors que les procès-verbaux portent l'indication du nombre de points de permis retirés, information d'ailleurs disponible en ligne. C'est pourquoi je proposerai de supprimer l'envoi de ces lettres et de récupérer les sommes correspondantes. Un troisième amendement diminuera de 15 millions d'euros le fonds de roulement de cette agence. Je ne suis pas parvenu à en obtenir le montant exact, mais je l'estime entre 40 et 50 millions d'euros, la subvention de l'État à cette agence s'élevant à 123 millions d'euros, et un prélèvement de 15 millions d'euros sur le fonds de roulement de l'ANTAI, par une baisse à due concurrence de la subvention de l'État, devrait maintenir le montant du fond au-dessus de son niveau prudentiel.

Le procès-verbal électronique a remplacé le carnet à souches, 15 600 outils de verbalisation électronique ayant été répartis entre police nationale et gendarmerie. Ce sont 1 954 communes qui en ont doté leurs polices municipales : le fonds d'amorçage destiné à aider les communes à les acquérir a été prorogé jusqu'en 2015.

M. Jean Pierre Vogel , rapporteur spécial . - Les crédits du programme « Sécurité civile » ne couvrent qu'une partie des moyens consacrés à la sécurité civile : les moyens de l'État forment 48 % des crédits de paiement de la politique transversale de sécurité civile, lesquels s'élèvent à 915,7 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2015 ; surtout, le budget total des services départementaux d'incendie et de secours (SDIS) atteint 4,36 milliards d'euros dans les budgets primitifs pour 2014, soit cinq fois les crédits inscrits aux missions du budget de l'État, répartis entre 2,49 milliards d'euros pour les départements et 1,87 milliard d'euros pour les communes et les établissements publics de coopération intercommunale (EPCI). La politique de sécurité civile relève bien d'une responsabilité partagée, et il est heureux que le ministre de l'intérieur ait confirmé le 4 octobre dernier le rôle de l'échelon départemental comme niveau d'organisation de la réponse opérationnelle des SDIS, tout en pérennisant leur mode de financement par les collectivités territoriales et l'État.

Les crédits de paiement du programme « Sécurité civile » (439,55 millions) augmentent de 0,6 % sous l'effet d'une hausse des dépenses de personnel. La progression des crédits d'investissement (+ 4,8 millions d'euros) doit être relativisée puisque, en 2013, les opérations d'investissement ont été une variable d'ajustement de l'exécution budgétaire par le report d'une partie de ces dépenses en 2014.

Les autorisations d'engagement (401 millions d'euros) sont en recul de 31,9 % : l'inscription de 167 millions d'euros d'autorisations d'engagement en loi de finances initiale pour 2014 pour la passation du nouveau marché de maintien en condition opérationnelle des avions a entraîné mécaniquement une diminution des autorisations d'engagement pour l'année 2015 par rapport à 2014.

Le schéma d'emploi du programme présente une diminution de 24 emplois équivalent temps plein (ETP), ce qui n'empêche pas une nette hausse des dépenses de personnel, portées à 166,61 millions d'euros, soit une augmentation de plus de 3,7 millions d'euros par rapport aux crédits ouverts en loi de finances initiale pour 2014. Cette progression traduit en réalité la correction d'une sous-budgétisation chronique des dépenses de personnel.

Cette année voit la refonte et la simplification du dispositif de performance : cinq objectifs et neuf indicateurs sont proposés, au lieu de neuf objectifs et onze indicateurs en 2014. Cette évolution accroît la lisibilité des moyens affectés à la politique de sécurité civile, alors que les crédits du programme ne représentent qu'un peu plus de 0,1 % des dépenses du budget de l'État. Cependant, le changement d'indicateur mesurant la disponibilité des hélicoptères interdit les comparaisons d'une année sur l'autre, alors qu'apparaissaient les conséquences néfastes du vieillissement de la flotte.

Le renouvellement de la flotte aérienne a été trop longtemps différé. Le remplacement des neuf Tracker, dédiés à l'attaque des feux naissants, est toujours prévue à l'horizon 2020 ; le ministère de l'intérieur m'a sobrement indiqué que la direction générale de la sécurité civile et de la gestion des crises lui remettrait des propositions techniques pour le renouvellement de la composante Tracker, en étudiant différents modèles économiques (achat, location). En outre, comme l'a précisé le ministère de l'intérieur, la flotte d'avions d'investigation et de coordination Beechcraft 200 a un âge moyen de 27 ans mais des réponses devraient être apportées puisque le nouveau marché de maintenance prévoit leur rénovation. Par ailleurs, toujours selon le ministère de l'intérieur, l'équipement de deux des trois avions de la flotte en moyens optroniques contribuera à moderniser l'approche des missions de recherche des feux de forêt et à développer de nouvelles missions subsidiaires au profit du ministère. Ces choix engendrant des dépenses de maintenance accrues, il serait utile d'effectuer des simulations comparant les surcoûts liés au maintien de la flotte actuelle et le coût de nouveaux appareils.

Il conviendrait également de mutualiser l'usage des hélicoptères avec les forces de police et de gendarmerie, voire au niveau interministériel, par exemple avec les acteurs de la santé publique. Une flotte nationale unique de la sécurité civile, de la gendarmerie et du service d'aide médicale urgente (SAMU) pourrait être envisagée, en définissant chaque année le crédit d'heures alloué à chacune des missions et les règles de priorité d'emploi entre ces services, afin d'homogénéiser le parc aérien, de réduire le coût de sa maintenance et d'optimiser son utilisation.

Le projet ANTARES (Adaptation nationale des transmissions aux risques et aux secours) vise une meilleure interopérabilité des systèmes de communication des forces de sécurité. Son coût total d'investissement s'élèvera, d'ici 2018, à quelque 118 millions d'euros pour l'État, qui supportera la mise en oeuvre et le financement des relais radio constituant toute l'infrastructure du réseau. Pour leur part, les SDIS prendront en charge les postes mobiles équipant les véhicules et les postes fixes des casernes, ainsi que l'adaptation technique des dispositifs radio équipant les centres de traitement de l'alerte et le centre opérationnel départemental d'incendie et de secours.

Il est regrettable que, depuis 2013, les efforts d'investissement consentis par les SDIS ne soient plus soutenus par les crédits du Fonds d'aide à l'investissement (FAI), dont une part importante concourait spécifiquement, depuis 2007, au financement d'Antares.

Le Gouvernement concentre ses investissements, en 2015 et 2016, sur la couverture par ANTARES de l'ensemble du territoire national ; s'établissant à 95 %, le taux de couverture pose toujours le problème de « zones blanches », notamment dans les départements ruraux. Ce taux correspond en outre vraisemblablement aux résultats d'une modélisation de la couverture radio à l'aide de modèles informatiques. Les mesures effectuées sur le terrain font apparaître des chiffres sensiblement inférieurs. Il convient d'envisager des solutions techniques afin d'améliorer la couverture du territoire, tout en veillant à ce que leur coût ne soit pas excessif.

À cette fin, je propose la création d'un nouvel objectif de performance « Couverture optimale du territoire national par le réseau ANTARES en vue de la protection des populations », auquel serait associé un indicateur de la part de la population couverte par le réseau, renseigné notamment par des mesures de couverture réalisées sur le terrain.

Sous le bénéfice de ces observations, je vous propose d'adopter sans modification les crédits du programme « Sécurité civile », qui correspond à la mise en oeuvre d'une politique régalienne.

M. Alain Gournac , rapporteur pour avis . - Je m'associe aux félicitations que Philippe Dominati a adressées aux gendarmes. Le programme « Gendarmerie » aurait dû comporter un effort en faveur du logement de nos gendarmes, dont les piètres conditions de vie affectent directement leur moral et celui de leurs familles. Il ne prend pas suffisamment en compte les nouveaux risques auxquels ils sont exposés, comme les jets d'acide. Il convient enfin de bien expliquer les regroupements de brigades : le directeur général de la gendarmerie nous a présenté les inconvénients de brigades trop petites, mais leur départ aurait de lourdes répercussions sur les communes et les cantons.

M. Yvon Collin . - Philippe Dominati a souligné dans son rapport le surcoût record de 38,7 millions d'euros pour l'envoi de gendarmes en opérations extérieures en 2010, puis la diminution de cette charge. S'explique-t-elle par des missions différentes, ou par la raréfaction des volontaires ?

M. Marc Laménie . - Les trois rapports font apparaître les liens étroits entre les composantes de cette mission. Si les effectifs de la gendarmerie augmentent légèrement, des petites brigades restent incomplètes. Le principe des communautés de brigades est-il performant ? Beaucoup de postes dans la hiérarchie ne sont pas pourvus. En tant que maire d'une petite commune, j'ai longtemps eu pour interlocuteurs les pompiers et les gendarmes, qui passent désormais plus de temps enfermés dans leurs brigades. Celles de proximité consacrent beaucoup de temps à des missions sociales, malgré un manque criant de moyens humains. Comment les effectifs se répartissent-ils entre l'état-major et le terrain ? Certaines brigades ont de grandes difficultés à obtenir des véhicules neufs, les leurs ayant parfois 300 000 kilomètres au compteur. Le recrutement de gendarmes adjoints de réserve, qui représente une formation pour les jeunes, est-il toujours d'actualité ?

M. Michel Canevet . - Je suis, moi aussi, préoccupé par le défaut d'investissement dans les gendarmeries et par les conditions de logements, souvent indécentes. J'apprécie que le rapporteur approuve la prorogation de la possibilité donnée aux collectivités locales d'intervenir, notamment par crédit-bail, conformément à la loi de 2002. Les crédits en cours répondront-ils aux besoins identifiés ? On nous propose le renouvellement de 2 000 véhicules de gendarmerie sur les 26 500 du parc, soit une durée moyenne d'utilisation de près de quatorze ans à ce rythme de renouvellement. Est-ce normal ? Je m'étonne enfin du refus de L'ANTAI de communiquer le niveau de son fonds de roulement. Cette rétention d'information n'est pas acceptable.

M. Jean-Claude Boulard . - Où en est-on de la dépénalisation des amendes de stationnement ? Une meilleure maîtrise de cette ressource bénéficierait aux finances des collectivités locales. Gilles Carrez et moi étions parvenus à convaincre, il y a trois ans, de l'opportunité d'une revalorisation de ces amendes de onze à dix-sept euros, mais cela n'a manifestement pas suffi à les rendre dissuasives : certains continuent à préférer s'y exposer plutôt que de payer un parking...

M. Jacques Genest . - L'État abandonne ses missions régaliennes. Il est facile pour les préfets de faire état de nombreux procès-verbaux, mais qu'en est-il des statistiques des atteintes aux biens et aux personnes ? Il faudrait des effectifs pour améliorer la protection de nos concitoyens. Sur l'immense plateau ardéchois, il y a trois brigades - tout va bien quand les cinq gendarmes peuvent mettre de l'essence dans leurs véhicules ! Le rapport nous a également montré dans la gendarmerie une armée mexicaine, composée surtout de capitaines et de colonels - cela fait des débouchés....

En tant que président de l'association des maires ruraux de mon département, je sais d'expérience que les gendarmes ne sont plus proches des élus : j'en arrive à ne plus connaître leur nom. Nous assistons à un transfert de la délinquance du milieu urbain au milieu rural : nous avons désormais nous aussi des hold-up dans nos commerces - trois dans la même nuit, une chose inouïe chez nous - et ils restent impunis.

M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général . - Les saisies d'avoir criminels sont en augmentation. Pourquoi ne pas mettre les véhicules concernés à la disposition des forces de l'ordre, plutôt que d'attendre à grands frais qu'ils deviennent inutilisables ?

M. Jean-Claude Requier . - Je ne suis pas un chaud partisan des radars, mais j'aurai appris aujourd'hui la différence entre radars « chantiers » et radars « tronçons ». Quant aux gendarmes, je rejoins Jacques Genest : on les voit bien moins au contact de la population et des élus. Au lieu de faire des tournées avec leur fourgonnette, ils restent dans leurs brigades face à leurs ordinateurs. Leur rôle de prévention était pourtant efficace. Il faut qu'ils soient au bord des routes et des chemins, puisqu'il reste des coins de France où il y en a encore...

M. Éric Doligé . - Avance-t-on vers un règlement du problème des numéros d'urgence 18 et 15, qui coûte une fortune ? La majorité des départements sont contraints d'installer pour les pompiers et pour les hospitaliers des centres d'alerte revenant de trois à cinq millions d'euros.

La participation des communes au budget du SDIS est limitée à l'inflation, les départements assumant la différence. Elles se sont souvent entendues pour que cette participation soit prise en charge par l'intercommunalité, afin d'égaliser les contributions. Selon l'humeur du sous-préfet, cet arrangement est accepté ou non. Un amendement pourrait-il autoriser les intercommunalités à prendre la responsabilité des SDIS ?

Les commissions de sécurité sont entièrement financées par les collectivités, alors qu'elles sont entièrement à la disposition de l'État. Pourquoi celui-ci ne prendrait-il pas à sa charge les 70 millions d'euros annuels qu'elles représentent ?

Pourrait-on, enfin, établir une hiérarchie des activités des gendarmes en fonction de leur importance, de manière à ce qu'ils enquêtent sur les cambriolages, plutôt que de faire des contrôles d'alcoolémie sur les routes à dix heures du matin ?

M. Dominique de Legge . - Non seulement les dotations de la gendarmerie baissent, mais le rapport nous apprend qu'elles sont affectées pour moitié au solde d'engagements antérieurs. Cet écart entre les objectifs affichés et les moyens est inquiétant : les véhicules doivent à présent durer non pas treize, mais bien vingt ans. Dans ces conditions, combien passeraient le contrôle technique ?

M. Antoine Lefèvre . - La mutualisation des moyens des SDIS et du SAMU serait une bonne chose. Dans mon département de l'Aisne, de nouvelles structures destinées au SDIS pourraient accueillir le SAMU, mais celui-ci fait des difficultés. Nos concitoyens ont du mal à le comprendre... La mutualisation des hélicoptères est également à souhaiter, pour des raisons d'économies comme de meilleure couverture du territoire.

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - Selon le directeur général de la gendarmerie nationale, les gendarmes engagés en opérations extérieures ont diminué de 262 à 172 entre l'automne 2013 et l'automne 2014 : il n'y a pas de contrainte particulière sur ce budget.

La gendarmerie souffre en revanche d'un écart de 1,8 % entre son plafond d'emplois et ses effectifs réels, soit plus de 1 800 postes. La concentration des brigades fera passer les effectifs des plus nombreuses d'entre elles de dix-huit à vingt-quatre gendarmes. La suppression d'une partie des brigades ne pourra s'effectuer qu'en contact avec les élus.

Quant à la hiérarchie des missions, il est frappant que lors des années d'élections, le seul établissement des procurations par les services de police et de gendarmerie suffit à absorber le bénéfice des emplois créés, soit l'équivalent de plus de 700 postes.

Des arbitrages ont été pris en vue de la mutualisation des matériels et de l'immobilier, mais les marges de manoeuvre sur l'intendance et le fonctionnement sont limitées pour des programmes dont 88 % des dépenses relèvent du titre 2. Les espoirs des hauts fonctionnaires comme des syndicats reposent sur les gains de mutualisations futures.

Priorité fixée par la hiérarchie de la gendarmerie, le logement des gendarmes bénéficiera d'un programme spécial de réhabilitation à hauteur de près de 30 millions d'euros par an en 2013, 2014 et 2015, au détriment sans doute du renouvellement des véhicules et autres matériels. Je partage vos inquiétudes sur les investissements nécessaires pour la modernisation de la gendarmerie.

Le problème des véhicules se pose également pour la police nationale, dont les syndicats aimeraient disposer des automobiles saisies. Il est vrai que ces grosses cylindrées ne sont guère adaptées aux missions ordinaires de la police et de la gendarmerie, et que les juges seraient réticents à les mettre à disposition...

M. Daniel Raoul . - Cela a bien été fait pour des voitures allemandes dans le Morbihan. Le stockage coûte cher et la valeur vénale des véhicules finit par diminuer considérablement.

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - Ce sera effectivement une piste à approfondir.

Mme Michèle André , présidente . - Je me souviens que Michel Charasse, quand il était ministre, s'était saisi de cette question. Que le sujet ne soit pas neuf ne nous dispense pas de rechercher une solution efficace.

M. Philippe Dominati , rapporteur spécial . - S'agissant enfin des missions effectuées, sur un plafond global d'emplois de 97 215 gendarmes, le maintien de l'ordre et la sécurité publique représentent 44 900 emplois équivalents temps plein travaillé (ETPT), la sécurité routière 11 100 ETPT et les missions judiciaires 24 800 ETPT. Les budgets pour 2014 et 2015 auraient dû confier la responsabilité du transfèrement des prisonniers à la justice. La tranche 2013 de transfert n'a pas été réalisée, et les opérations doivent reprendre en 2015.

Le stock d'heures supplémentaires effectuées dans la police nationale - plus de 15 millions ! - est un important sujet de préoccupation. Les fonctionnaires les soldent habituellement lors de leur départ à la retraite, ce qui fait courir le risque d'effectifs très insuffisants sur le terrain. Je rappelle que, selon la Cour des comptes, le coût de ce stock d'heures s'élève à plus de 320 millions d'euros.

M. Vincent Delahaye , rapporteur spécial . - Je ne m'étonne plus vraiment de l'attitude de l'ANTAI, puisque j'attends toujours réponse à mes questions sur la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique. Il nous faut être persévérants...

La dépénalisation des amendes, votée en janvier 2014, sera normalement mise en oeuvre à partir du 1er janvier 2016, ce qui modifiera le CAS « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers ». La loi de simplification de la vie des entreprises comporte d'ailleurs, de façon un peu étonnante, une autorisation donnée au Gouvernement de prendre une ordonnance sur ce point.

Les radars « chantiers » sont disposés dans les zones des chantiers, qui se déplacent, mais autour desquels on a constaté que les automobilistes avaient tendance à ne pas respecter les limitations de vitesse.

M. Jean Pierre Vogel , rapporteur spécial . - Le problème du 15 et du 18 a été résolu au niveau européen par l'institution du 112, mais les SDIS semblent très attachés au 18 et le SAMU au 15. Sans doute faudrait-il créer des centres communs de traitement des appels, ce qui contribuerait à la maîtrise de la masse salariale. Des protocoles ont été mis en place dans certains départements, avec des formations communes aux différents opérateurs. Un seul numéro et des plateformes communes constitueraient certainement l'idéal. Cependant, un département qui avait opéré ce choix a fait marche arrière au bout de trois ans.

Depuis la loi de départementalisation de 1996, il est interdit aux EPCI d'assumer la compétence correspondant aux attributions « incendie », mais certains préfets ont fermé les yeux. Le président d'un conseil général, qui était aussi celui du SDIS, a souhaité demander aux EPCI d'assumer cette compétence, de manière à réduire considérablement le nombre de ses interlocuteurs. La généralisation de cette évolution est à souhaiter. Encore faudrait-il que les collectivités restituent bien les recettes correspondantes.

Je suis d'accord avec Éric Doligé au sujet des commissions de sécurité : les préventionnistes et leur secrétariat doivent être à la charge de l'État.

Sur la mutualisation de la flotte, les mêmes hélicoptères EC 135 sont utilisés par la gendarmerie et le SAMU, la sécurité civile employant des EC 145 un peu moins rapides. Une mutualisation de leurs flottes aériennes serait donc possible et bienvenue.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat d'adopter les crédits de la mission « Sécurités », ainsi que l'article 59 septies.

Article 34

M. Vincent Delahaye , rapporteur spécial . - L'amendement n° 1 réduit le nombre de nouveaux radars installés en remplacement d'anciens et affecte les sommes économisées à l'équipement des collectivités territoriales.

L'amendement n° 1 est adopté.

M. Vincent Delahaye , rapporteur spécial . - L'amendement n° 2 prélève 15 millions d'euros sur le fonds de roulement de l'ANTAI.

M. Richard Yung . - Abstention.

M. Daniel Raoul . - L'amendement n° 2 est-il d'appel ?

M. Vincent Delahaye , rapporteur spécial . - Oui, il faut disposer des données exactes pour ajuster, le cas échéant, le montant du prélèvement.

L'amendement n° 2 est adopté.

Article additionnel rattaché

M. Vincent Delahaye , rapporteur spécial . - L'amendement n° 3 supprime l'obligation inscrite au code de la route de notifier à l'intéressé un retrait de points par lettre simple.

L'amendement n° 3 est adopté.

Article 34

L'amendement n° 4, conséquence de l'amendement n° 3, est adopté.

À l'issue de ce débat, la commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits du compte d'affectation spéciale « Contrôle de la circulation et du stationnement routiers », ainsi modifiés, ainsi que d'un amendement portant article additionnel rattaché.

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Réunie à nouveau le jeudi 20 novembre 2014, sous la présidence de Mme Michèle André, présidente, la commission des finances a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption des crédits de la mission et du compte spécial tels que modifiés par ses amendements, ainsi que l'adoption d'un article additionnel après l'article 64.

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