N° 108

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2014-2015

Enregistré à la Présidence du Sénat le 20 novembre 2014

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des finances (1) sur le projet de loi de finances pour 2015 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Albéric de MONTGOLFIER,

Sénateur,

Rapporteur général.

TOME III

LES MOYENS DES POLITIQUES PUBLIQUES

ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

( Seconde partie de la loi de finances )

ANNEXE N° 22

POLITIQUE DES TERRITOIRES
(IMPULSION ET COORDINATION DE LA POLITIQUE D'AMÉNAGEMENT DU TERRITOIRE ; INTERVENTIONS TERRITORIALES DE L'ÉTAT, POLITIQUE DE LA VILLE)

Rapporteurs spéciaux : MM. Pierre JARLIER et Daniel RAOUL

(1) Cette commission est composée de : Mme Michèle André , présidente ; M. Albéric de Montgolfier , rapporteur général ; Mme Marie-France Beaufils, MM. Yvon Collin, Vincent Delahaye, Mmes Fabienne Keller, Marie-Hélène Des Esgaulx, MM. André Gattolin, Jean Germain, Charles Guené, Francis Delattre, Georges Patient , vice-présidents ; MM. Michel Berson, Philippe Dallier, Dominique de Legge, François Marc , secrétaires ; MM. Philippe Adnot, François Baroin, Éric Bocquet, Yannick Botrel, Jean-Claude Boulard, Michel Bouvard, Michel Canevet, Vincent Capo-Canellas, Thierry Carcenac, Jacques Chiron, Serge Dassault, Éric Doligé, Philippe Dominati, Vincent Eblé, Thierry Foucaud, Jacques Genest, Alain Houpert, Jean-François Husson, Mme Teura Iriti, MM. Pierre Jarlier, Roger Karoutchi, Bernard Lalande, Marc Laménie, Antoine Lefèvre, Gérard Longuet, Hervé Marseille, François Patriat, Daniel Raoul, Claude Raynal, Jean-Claude Requier, Maurice Vincent, Jean Pierre Vogel, Richard Yung .

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 2234, 2260 à 2267 et T.A. 420

Sénat : 107 et 108 à 114 (2014-2015)

LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DE VOS RAPPORTEURS SPÉCIAUX

Les principales observations de votre rapporteur spécial Pierre Jarlier

La mission « Politique des territoires » conserve en 2015 la dimension interministérielle qui la caractérise mais son périmètre est modifié par rapport à la loi de finances pour 2014, ainsi qu'en témoigne l'intégration en son sein du programme 147 « Politique de la ville », auparavant rattaché à la mission « Égalité des territoires et logement », suite au débat d'orientation des finances publiques de juillet 2014. Cette évolution fait suite à la création du Commissariat général à l'égalité des territoires (CGET), qui, placé sous l'autorité du Premier ministre, regroupe depuis 2014 la délégation à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (DATAR), le secrétariat général du comité interministériel des villes (SG-CIV), et l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé). Cette fusion entre trois structures doit permettre de dégager des gains d'efficience et de renforcer les synergies entre les différents acteurs du développement des territoires.

2° En dépit d'un volume de crédits limité, soit 708 millions d'euros en AE et 761 millions d'euros en CP , la mission, se trouve, néanmoins, au coeur de la politique « transversale » de l'aménagement du territoire , laquelle doit représenter au total, en 2015, 5,7 milliards d'euros . Cet effort sera porté par tout ou partie des actions de 31 programmes, relevant de 14 missions.

3° Cet éclatement entre 31 programmes pose un problème de lisibilité de la politique d'aménagement du territoire. La création du CGET aurait à cet égard pu constituer une occasion de rendre plus cohérente la maquette budgétaire , mais différents éléments, tels que le maintien d'une mission consacrée à l'égalité des territoires et au logement , illustrent l'inachèvement d'une telle démarche de rationalisation. Une mission unique devrait pourtant pouvoir porter les principaux dispositifs en matière d'aménagement du territoire, surtout qu'ils sont le plus souvent transversaux et interdépendants . Pour l'heure, à l'exception notable du rattachement du programme 147 « Politique de la ville », la mission est placée en 2015 sous le signe de la continuité avec les actions menées antérieurement .

4° Le programme 112 « Impulsion et coordination de la politique d'aménagement du territoire » (PICPAT), est le programme « historique » de la mission. Il retrace les moyens mis à la disposition du nouveau CGET. Les crédits demandés à ce titre pour 2015 s'élèvent à 222,53 millions d'euros en AE et 270,58 millions d'euros en CP, soit une baisse respective de 18 % et de 4 % par rapport à la loi de finances pour 2014 . Ils visent à financer des dispositifs aussi divers que les contrats de plan État-régions, la prime d'aménagement du territoire, le plan d'accompagnement du redéploiement des armées, les pôles de compétitivité, les pôles d'excellence rurale... Une évaluation renforcée de ces politiques apparait nécessaire . Par ailleurs, l'effort de désendettement du programme, qui concernait le Fonds national d'aménagement et de développement du territoire (FNADT), continue de porter ses fruits puisque sa situation reste saine. Dans ce contexte, il conviendra de conserver pour les prochains exercices un équilibre dans la répartition entre les AE et les CP du programme en vue de garantir sa soutenabilité .

Vingt-trois dépenses fiscales sont rattachées au PICPAT pour un montant total de 443 millions d'euros , nettement supérieur aux crédits du programme. Le rapport, rendu public en septembre 2011, du comité d'évaluation des dépenses fiscales et des niches sociales, s'était montré critique sur ces dispositifs, jugés trop peu efficaces. Déjà, en octobre 2010, le Conseil des prélèvements obligatoires avait évoqué des dispositifs à « l'efficacité incertaine ». Ces mesures doivent faire l'objet d'un meilleur ciblage afin de bénéficier aux zones les plus fragiles . En effet, certains de nos territoires, en souffrance accentuée, ont des besoins plus marqués. En cette période de rigueur budgétaire, il est donc plus que jamais nécessaire de mieux cibler les dispositifs et d'éviter le saupoudrage. Et de manière à mieux concentrer ces dispositifs, une évaluation rigoureuse de leurs performances est indispensable.

6° Le programme 162 « Interventions territoriales de l'État » (PITE) regroupe quatre actions, correspondant à quatre plans interministériels de portée régionale. Elles concernent respectivement la qualité de l' eau en Bretagne , le plan d' investissements en Corse , l'écologie du marais poitevin et la présence de chlordécone en Guadeloupe et en Martinique . Globalement, ces actions doivent bénéficier en 2015 de 30,15 millions d'euros en AE (- 18 % par rapport à 2014) et de 33,65 millions d'euros en CP (- 11,5 % par rapport à 2014) , la majorité de ces crédits se trouvant affectée à l'action relative à la Corse. Cette dernière action, en outre, sera une nouvelle fois abondée par des fonds de concours , à hauteur de 20 millions d'euros en AE et 10 millions d'euros en CP , en provenance de l'Agence de financement des infrastructures de transport de France (AFITF). Des efforts doivent être fournis s'agissant du dispositif de suivi de la performance du programme.

7° De manière générale, pour plus de lisibilité et d'efficacité, votre rapporteur spécial suggère de passer d'une logique de guichet à une logique de projets . L'État doit apporter des moyens opérationnels contractualisés issus de différentes missions pour être en mesure d'engager de vraies politiques de développement local. Les expériences du programme européen de développement rural LEADER ou encore des projets de revitalisation des centres-bourgs, représentent de bonnes initiatives et il faut aller plus loin dans une stratégie intégrée d'accompagnement des projets de territoire . En ce sens, des contrats ruraux de cohésion territoriale devraient être engagés dans une logique pluriannuelle, partenariale et concertée, sur le modèle des contrats urbains de cohésion sociale qui seront remplacés par des contrats de ville au 1 er janvier 2015.

*

Les principales observations de votre rapporteur spécial Daniel Raoul

1° Le programme 147 a été déplacé de la mission « Égalité des territoires, logement et ville » à la mission « Politique des territoires », à la suite de la création du Commissariat général à l'égalité des territoires , service placé auprès du Premier ministre qui regroupe désormais les activités du secrétariat général du comité interministériel des villes (SG-CIV), de la Délégation à l'aménagement du territoire et à l'attractivité régionale (DATAR) et de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSé). Il est d'ailleurs pris acte du report d'un an , au 1 er janvier 2016, du transfert des activités de l'ACSé à l'État et de la dissolution de l'agence (article 57 ter rattaché à la mission).

Plus largement, le programme 147 s'inscrit dans le cadre de la mise en oeuvre de la loi n° 2014-173 du 21 février 2014 de programmation pour la ville et la cohésion urbaine et tient compte de la nouvelle géographie prioritaire de la politique de la ville.

Les crédits d'intervention de la politique de la ville sont préservés , avec en particulier 332 millions d'euros en autorisations d'engagement et en crédits de paiement sur l'action 1 « Actions territorialisées et autres dispositifs spécifiques de la politique de la ville ».

Plus globalement, avec 456 millions d'euros en autorisations d'engagement et 457 millions d'euros en crédits de paiement, le programme 147 « Politique de la ville » connaît une baisse de respectivement 10 % et 8 % qui ne porte pas préjudice aux actions menées dans le cadre de la politique de la ville .

En effet, cette réduction des crédits s'explique principalement par la mise en extinction progressive de l'exonération de charges sociales applicable dans les zones franches urbaines (ZFU) au 31 décembre 2014 et par les modes de calculs applicables depuis 2009 pour les exonérations déjà accordées. En seconde délibération, afin de « garantir le respect de la norme de dépense en valeur de l'État », l'Assemblée nationale a minoré de 6,83 millions d'euros les autorisations d'engagement et les crédits de paiement du programme 147 « Politique de la ville » en indiquant que cette baisse ne porterait que sur le coût de ces exonérations sociales, compte tenu des dernières prévisions de leur montant.

3° Les dépenses fiscales associées au programme restent importantes , d'autant que le taux réduit de TVA pour les opérations d'accession sociale à la propriété devrait être applicable dans l'ensemble des quartiers prioritaires de la politique de la ville (article 7 du projet de loi de finances pour 2015) et que le dispositif d' exonération du bénéfice réalisé par les entreprises en ZFU devrait être prolongé, tout en étant plus encadré, jusqu'en 2020 (article 22 du projet de loi de finances rectificative pour 2014 déposé à l'Assemblée nationale le 12 novembre 2014). L'article 42 ter du projet de loi de finances pour 2015 prévoit également le prolongement, jusqu'en 2020 et sous certaines conditions, de l 'abattement de 30 % de taxe foncière sur les propriétés bâties pour les constructions de logement sociaux, en l'étendant aux quartiers prioritaires de la politique de la ville.

4° La mise en oeuvre de la politique de la ville dépasse très largement les seuls crédits budgétaires inscrits dans le programme 147 . Les crédits de droit commun doivent, en effet, être prioritairement mobilisés , tant au niveau national que local. Les crédits spécifiques à la politique de la ville ne constituent qu' un complément permettant de produire un effet de levier . Le Gouvernement doit poursuivre ses efforts en ce sens.

5° La situation financière de l'Agence nationale pour la rénovation urbaine (ANRU) reste préoccupante pour l'avenir, compte tenu de la baisse annoncée de la contribution d'Action logement à 850 millions d'euros par an . Votre rapporteur spécial regrette, en particulier, qu'Action logement doive contribuer pour 150 millions d'euros supplémentaires en 2015 au financement du Fonds national d'aide au logement (FNAL) plutôt qu'à la rénovation urbaine (soit une participation totale de 300 millions d'euros aux dépenses du FNAL pour 2015).

Votre rapporteur spécial espère que cette baisse de financement n'entraînera pas de blocage pour les opérations en cours du programme national de rénovation urbaine (PNRU) ni de retard dans le lancement du nouveau programme national de renouvellement urbain (NPNRU).

6° Sous réserve de cette remarque concernant le financement de la rénovation urbaine, votre rapporteur spécial avait proposé d'adopter les crédits consacrés à la politique de la ville mais la commission des finances a décidé de proposer de ne pas adopter les crédits de la mission « Politique des territoires » .

En application de l'article 49 de la LOLF, pour le retour des réponses du Gouvernement aux questionnaires budgétaires concernant le présent projet de loi de finances, la date limite était fixée au 10 octobre 2014 .

À cette date, votre rapporteur spécial Pierre Jarlier avait reçu l'ensemble des réponses pour le programme 162 (PITE, suivi par le ministère de l'intérieur) et 81 % pour le programme 112 (PICPAT, suivi par le ministère de l'égalité des territoires et du logement), ce qui représentait au total plus de 86 % de l'ensemble des réponses attendues pour deux des trois programmes dont se compose jusqu'en 2014 la mission « Politique des territoires » .

À cette date, votre rapporteur spécial Daniel Raoul avait reçu 61 % des réponses pour le programme 147 « Politique de la ville ».

A la même date, le document de politique transversale (DPT) « Aménagement du territoire » annexé au présent projet de loi de finances n'était toujours pas diffusé. Il a néanmoins été rendu public dans les semaines suivantes.

De même, le document de politique transversale (DPT) « Ville » a été rendu public le 29 octobre 2014.

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