2. Un cadre légal validé par le Conseil constitutionnel

La jurisprudence du Conseil constitutionnel 44 ( * ) , a admis que la Constitution ne faisait pas obstacle à ce que « des fonctions normalement réservées à des magistrats de carrière puissent être exercées à titre temporaire par des personnes qui n'entendent pas pour autant embrasser une carrière judiciaire ».

Le Conseil a toutefois strictement encadré le recours à des personnes extérieures au monde judiciaire, en subordonnant la mise en place de ce dispositif à une série de garanties , afin de respecter la double exigence constitutionnelle de l'indépendance des magistrats du siège (article 64 de la Constitution) et de l'égal accès aux emplois publics (en vertu de l'article 6 de la Déclaration des droits de l'Homme et du citoyen de 1789).

- En premier lieu, le Conseil constitutionnel a posé l'obligation d'une limitation du nombre de ces magistrats dans les juridictions, traduisant le caractère nécessairement exceptionnel de l'exercice de fonctions judiciaires par des personnes autres que des magistrats de carrière 45 ( * ) .

- En deuxième lieu, afin de respecter le principe d'indépendance , le Conseil constitutionnel a posé une série de conditions  jugées indispensables parmi lesquelles  :

§ la mention du caractère non renouvelable de la durée des fonctions dans le statut des magistrats nommés à titre temporaire, le Conseil ayant estimé dans sa décision du 21 février 1992 que le renouvellement d'un juge dans des fonctions du siège était susceptible de porter atteinte à son indépendance dès lors qu'il pourrait impliquer une appréciation sur la manière dont ce dernier aurait exercé ses fonctions ;

§ la soumission des magistrats exerçant à titre temporaire au statut de la magistrature 46 ( * ) ;

§ l'établissement d'un régime d'incompatibilité 47 ( * ) .

- En troisième lieu, le Conseil a émis une série d'observations relatives au principe d'égal accès aux fonctions :

§ en matière disciplinaire, il a accepté qu'une sanction spécifique aux magistrats exerçant à titre temporaire soit prévue, estimant dans sa décision n° 94-355 du 10 janvier 1995 qu'étaient prises « en compte les particularités de la situation des intéressés » ;

§ sur les critères de recrutement, le Conseil constitutionnel a imposé l'obligation de vérifier « l'aptitude à juger » et « la compétence juridique des intéressés », estimant que ces éléments conditionnaient en grande partie la valeur des jugements rendus.

Il existe donc déjà en théorie de nombreuses voies d'accès complémentaires aux fonctions juridictionnelles pour une durée limitée. Le dispositif proposé est-il alors particulièrement adapté aux candidats ?

* 44 Dans ses décisions n° 92 - 305 DC du 21 février 1992, n° 94 - 355 DC du 10 janvier 1995 et n° 98 - 396 DC du 19 février 1998.

* 45 La jurisprudence du Conseil constitutionnel en la matière reste cependant assez souple, ce dernier ayant validé l'augmentation du nombre de magistrats recrutés à titre temporaire, s'agissant des conseillers de cour d'appel en service extraordinaire recrutés jusqu'au 31 décembre 1999 ou des conseillers et avocats généraux à la Cour de cassation en service extraordinaire.

* 46 Le Conseil a estimé qu'« il importe [...] que les intéressés soient soumis aux droits et obligations applicables à l'ensemble des magistrats sous la seule réserve des dispositions spécifiques qu'impose l'exercice à titre temporaire de leurs fonctions ». Notons toutefois à cet égard que le Conseil constitutionnel, dans sa décision précitée du 10 janvier 1995, a validé certaines dérogations relatives à l'obligation de résidence au siège de la juridiction à laquelle appartiennent ou sont rattachés ces magistrats, ou encore au régime de rémunération, après avoir estimé qu'elles trouvaient « une justification dans la spécificité des conditions dans lesquelles ces magistrats sont recrutés et exercent leurs fonctions ».

* 47 Décision n° 94-355 DC du 10 janvier 1995.

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