TITRE II - L'INSERTION PROFESSIONNELLE : UN IMPORTANT EFFORT EN MATIÈRE DE CRÉATION DE PLACES DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE TRAVAIL PROTÉGÉ ET UNE BAISSE DES CRÉDITS DÉJÀ PEU IMPORTANTS POUR L'INSERTION PROFESSIONNELLE EN MILIEU ORDINAIRE QUI RESTE TOUJOURS PROBLÉMATIQUE, QU'IL S'AGISSE DU SECTEUR PUBLIC OU DU SECTEUR PRIVÉ

A. UN IMPORTANT EFFORT EN MATIÈRE DE CRÉATION DE PLACES DANS LES ÉTABLISSEMENTS DE TRAVAIL PROTÉGÉ

En 1994, on comptait 82.206 places en centres d'aide par le travail (CAT) et 13.230 travailleurs en ateliers protégés. Malgré la difficulté de la conjoncture, sans prévoir de nouveaux plans pluriannuels, 1995 a vu la création de 2.000 places en CAT et 500 en ateliers protégés. Afin de contribuer à résorber les effets de l'amendement Creton, un effort tout à fait considérable a été consenti en matière de places en CAT avec la création de 2.750 de celles-ci. Par ailleurs, l'effort est maintenu à 500 emplois pour les ateliers protégés.

1. La situation dans les CAT : un important effort en matière de création de places afin de commencer à résorber les effets de « l'amendement Creton » et la validation législative de l'organisation budgétaire de ces structures

Les crédits en faveur des CAT situés à l'article 10 du chapitre 46-23 du ministère de la solidarité entre les générations croissent en effet de 5,60 % et de 296,223 millions de francs passant de 5.293,974 millions de francs en 1995 à 5.590,197 millions de francs en 1996. Ceci correspond, d'une part, à un ajustement aux besoins chiffrés à 144,973 millions de francs et, d'autre part, à la création de 2.750 nouvelles places pour la somme globale de 151,25 millions de francs, sur la base de 55.000 francs la place.

On ne peut s'empêcher de remarquer, à cet égard, que ce chiffre de 55.000 francs apparaît extrêmement volontariste au regard du coût réel d'une place qui se situe en moyenne à 65.000/70.000 francs, même si évidemment ce coût varie selon le type de CAT et les situations locales.

Votre rapporteur avait fait état, l'an passé, des conclusions du rapport conjoint de l'Inspection Générale des affaires sociales et de l'Inspection Générale des Finances de novembre 1993. Celui-ci estimait, en effet, que la situation financière globale des CAT était relativement difficile, compte tenu des évolutions salariales et de la situation économique, mais que cela recouvrait une grande disparité de situations.

Un certain nombre de dispositions et d'actions ont donc été menées l'an passé et cette année pour tenir compte des propositions de ce rapport notamment quant à la clarification de la situation des CAT. Votre rapporteur souhaite les rappeler succinctement. Ainsi, en 1994, une mission d'appui interministérielle a élaboré des outils d'évaluation physico-financière de l'activité de ces établissements médico-sociaux ainsi que des références professionnelles indicatives.

Le « tableau de bord » des CAT qui en est résulté a, d'abord, été expérimenté à la DRISS (direction régionale et interdépartementale de la Santé et de la Solidarité) de Midi-Pyrénées avant d'être généralisé. Il a donné lieu à une synthèse nationale publiée en février 1995. Cette étude porte sur un échantillon significatif de 933 CAT représentant 76,72 % de l'ensemble et employant 68.239 travailleurs handicapés. Elle a permis incontestablement une meilleure appréciation de la situation des CAT. Ceux-ci ont une capacité moyenne de 7.460 places agréées par établissement, ce qui se traduit par l'emploi de 73,14 travailleurs handicapés ou 74,68 en équivalent temps plein. Or, cette moyenne s'avère insuffisante au regard des capacités optimales fixées par la circulaire budgétaire du 13 janvier 1995 et qui serait de 80 à 120 places. 38,08 % des travailleurs de ces CAT sont logés en foyer.

Parallèlement, l'enquête note des disparités importantes selon les départements. Ainsi, si 51,73 % des établissements étudiés avaient un service d'accompagnement, il n'y en avait pas en Corse, le taux était de 30,23 % en Île-de-France et de 81,82 % en Basse-Normandie. De même, la dotation globale de fonctionnement (DGF), qui est en moyenne de 59.515 francs par travailleur handicapé, va de 71.300 francs en Corse à 46.897 francs en Alsace. Quant au chiffre d'affaires annuel par handicapé, en moyenne de 42.903 francs, il oscille entre 33.239 francs en Picardie et 62.154 francs en Franche-Comté. Il faut noter, à cet égard, l'importance de l'effort de l'État par travailleur handicapé, c'est-à-dire l'addition de la DGF et du complément de rémunération, qui est de 102.857 francs non comprise l'allocation différentielle d'allocation aux adultes handicapés. Parallèlement, le ministère des Affaires Sociales, de la Santé et de la Ville a pu s'étonner, de même que votre rapporteur, qu'un aussi grand nombre de CAT, soit 46,84 %, éprouve le besoin d'une subvention interne de fonctionnement qui, théoriquement, n'est prévue que dans des cas exceptionnels (création de la structure, mise en oeuvre d'une nouvelle production ou événement imprévisible).

L'activité de ces CAT, en pourcentage du chiffre d'affaires, se répartit entre 34,09 % de production propre, 34,34 % de sous-traitance, et 31,57 % de prestations propres. C'est la sous-traitance qui engendre la valeur ajoutée la plus forte (61,67 %) contre 58,11 % pour les prestations de services et 34,44 % pour la production propre. Les services du ministère concluent donc qu'il faut encourager les activités les plus rentables.

Quant aux rémunérations des travailleurs handicapés, elles sont de 5 % du SMIC pour 11,42 % des intéressés, 5 à 10 % de celui-ci pour 23,12 % d'entre eux, 10 à 15 % pour 36,42 % et plus de 15 % pour 29,05 %.

L'autonomie de ces travailleurs est assez faible : 21,39 % d'entre eux sont autonomes dans leur logement, 54,4 % le sont dans leurs déplacements. S'agissant du logement, ceux qui ne sont pas autonomes relèvent à 41 % de leur milieu familial, à 38 % d'un établissement d'hébergement. La moyenne horaire de soutien pour les travailleurs handicapés est de 185 heures pour 1.471 heures de travail annuel, soit un ratio de soutien de 12,79 % qui dissimule également des disparités régionales fortes.

Parallèlement, moins de la moitié des CAT et moins de 18 % des travailleurs handicapés sont concernés par une quelconque formule de stages ou de formation, ce qui s'avère tout à fait insuffisant dans une perspective d'ouverture sur l'extérieur et d'intégration.

Enfin, les CAT ont un taux d'entrée annuelle de 6,25 %, soit une arrivée de 5 personnes en moyenne par établissement. Les personnes proviennent principalement des IME (35 %), du milieu familial (35 %), du milieu hospitalier (12 %) ou d'un autre CAT (10 %). Le taux de sortie est faible : 4,69 % soit environ 3 travailleurs avec pour destination un foyer, l'hôpital ou la famille à 42 %, le milieu ordinaire ou l'atelier protégé (18 %), un CAT (15 %) ou la retraite (5%).

Mais ces résultats cachent également de grandes disparités régionales, notamment en matière de milieu ordinaire ou d'ateliers protégés avec 6,49 % en Picardie contre 39,20 % en Bretagne.

Globalement, le taux d'intégration dans le milieu ordinaire de production à partir du milieu protégé s'avère toujours aussi faible : 0,50 %.

A côté de cette enquête tout à fait importante pour connaître la situation réelle des CAT, un certain nombre de dispositions ont été arrêtées, notamment dans le domaine budgétaire pour tenir compte des recommandations du rapport IGAS/IGF. Ainsi, les crédits budgétaires pour 1995 ont-ils inclus une part prioritairement affectée aux établissements dont la situation semblait la plus inéquitable. Cette mesure a, semble-t-il, été acceptée par les associations gestionnaires, dans la mesure où elle permettait de remettre à plat certains avantages octroyés aux CAT les plus anciens ou les moins rigoureux. Parallèlement, la procédure d'allocation régionalisée des ressources, instituée par le décret du 6 décembre 1994 a été appliquée aux CAT. Pour 1996, ces dispositions continueront, bien entendu, d'être appliquées.

Ainsi, à la suite de la « journée technique nationale » du 11 mai 1995, organisée par le ministère, des réunions régionales ou interrégionales ont été ou vont être organisées au cours du deuxième semestre de 1995 pour aider les services déconcentrés à mettre en oeuvre, pour la campagne budgétaire 1996, une procédure d'allocation des crédits plus juste et efficace, comprenant une renégociation des conventions et un examen des dépenses de fonctionnement « au premier franc ».

Par ailleurs, après négociation avec les associations et les différents partenaires concernés, le ministère, par le biais de l'article 68 de la loi n° 95-116 du 4 février 1995 portant diverses dispositions d'ordre social, a fait procéder à la validation législative de la séparation budgétaire de l'activité sociale et de l'activité commerciale des CAT dont le principe avait été supprimé du fait de l'annulation ( ( * )6) d'une partie du décret du 30 décembre 1985 sur le financement des CAT, par un arrêt du Conseil d'État du 25 janvier 1993, pour défaut de base légale.

La nouvelle rédaction de l'article 68 du code de la famille et de l'aide sociale, telle qu'elle figure à l'article 68 précité, distingue donc très clairement au sein du budget des CAT les charges de l'activité sociale, financées par la dotation globale de l'État, et celles de l'activité de production, en principe autofinancées sous réserve d'une contribution exceptionnelle et temporaire (CET) financée par la dotation globale de l'État et appelée à remplacer la SIF (subvention interne de fonctionnement) qui apparaissait déviée de ses buts initiaux.

Le décret d'application en date du 9 mai 1995 de la loi du 4 février 1995 précitée modifie les articles 11 à 15 du décret du 21 décembre 1977 et fixe donc le nouveau dispositif budgétaire et comptable des CAT. Il reprend, en fait, largement les dispositions du décret de 1985 précité. Ce nouveau décret a été commenté par la circulaire interministérielle DAS-CP n° 95/29 du 25 août 1995 adressée aux préfets et trésoriers payeurs généraux.

L'application de ce nouveau dispositif n'interviendra bien évidemment que dans le cadre de la campagne budgétaire 1996. Toutefois, il s'agit, en fait, de clarifications techniques qui ont largement fait l'objet d'une concertation. Peu de bouleversements sont à attendre. Cependant, ceci devrait contribuer à limiter les contentieux qui s'étaient fait jour sur le financement de certaines charges de fonctionnement des CAT, depuis l'arrêt du Conseil d'État de 1993.

Évolution des structures de travail protégé.

(1) : Source SESI Enquête ES

dnd : données non disponibles

2. La situation des ateliers protégés : une évolution contrastée des crédits et les suites de l'audit réalisé l'an passé

Les crédits consacrés, en 1996, aux ateliers protégés, qui sont situés respectivement pour les actions déconcentrées à l'article 30 du chapitre 44-71 du ministère du travail, du dialogue social et de la participation, et pour les subventions d'investissement, à l'article 50 du chapitre 66-72 du même ministère, évoluent différemment.

En effet, pour tenir compte de la création de 500 emplois pour 1996, l'article 30 du chapitre 44-71 croît de 4,503 millions de francs (et de 3,60 %) passant ainsi de 125,5 millions de francs à 129,653 millions de francs. En revanche, si les subventions d'investissement croissent bien en crédits de paiement de 3 millions de francs et de 15,62 %, passant de 19,2 millions de francs en 1995 à 22,2 millions de francs en 1996, les autorisations de programme passent, elles, à 23 millions à 20 millions baissant de 3 millions et de 13,05 %.

Il faut noter, à cet égard, que sur les 23 millions d'autorisations de programme inscrits en loi de finances initiale, 5,750 millions ont fait l'objet de gels de crédits. En définitive, seulement 17,25 millions ont été délégués. En revanche, en terme de crédits de paiement, les dépenses nettes pour 1995 auront été de 19,529 millions de francs.

Capacité en Centres d'Aide par le Travail et en Ateliers Protégés Fin 1994

Source : pour les CAT : DAS/TSIS/TS2/HB pour les AP : Délégation à l'Emploi

Votre rapporteur avait déjà mentionné l'an passé la réalisation d'une mission d'audit sur la situation économique des ateliers protégés au regard de leur impératif d'insertion dans le tissu économique local et national en septembre 1994.

Cet audit concluait que la situation économique des ateliers protégés relativement bonne mais avec de grandes disparités. De plus, il estimait cette situation était très précaire du fait de la situation économique difficile qui menaçait les marchés de sous-traitance et d'un fréquent mon clientélisme mais il constatait également une grande capacité d'adaptation à la demande dans la mesure où les ateliers protégés changeraient régulièrement de production.

Pour tenir compte de ces remarques, un plan de modernisation des ateliers protégés est en préparation. Il devrait porter, selon les informations fournies à votre rapporteur, sur la création d'un fonds de garantie destiné à cautionner les emprunts bancaires, l'institution d'une interface commerciale entre les entreprises donneuses d'ordre et les ateliers protégés afin de faciliter les démarches commerciales des structures, notamment des petits ateliers protégés et sur l'aménagement de la subvention de fonctionnement qui doit prendre en compte le handicap des salariés mais aussi les projets de développement économique et commercial des ateliers.

Par ailleurs, subsiste le problème de l'application de la circulaire CDE n° 94-40 du 10 octobre 1994 relative à la garantie de ressources des travailleurs handicapés et à la nature et à l'assiette des charges sociales compensables, dans les ateliers protégés mise en oeuvre le 1er janvier 1995. En effet, au moment de sa parution, une inquiétude réelle avait surgi sur ses conséquences sur la situation des ateliers protégés dans la mesure où elle supprimait la prise en charge par l'État des cotisations de formation continue, transport et autres sur le complément de rémunération versé dans le cadre de la garantie de ressources aux travailleurs handicapés.

A propos de la garantie de ressources, que votre rapporteur étudie dans le cadre du travail protégé dans la mesure où elle est versée quasiment en totalité dans ce secteur, on peut dire qu'elle croîtra fortement en 1996, conformément à l'article 40 du chapitre 44-71 des crédits du ministère du travail, du dialogue social et de la participation, de 8,2 %, soit + 362,448 millions de francs, passant de 4.420,062 millions en 1995 à 4.782,51 millions en 1996. Cette croissance se décompose en trois parts inégales : l'ajustement aux besoins de la dotation pour un montant de 202,79 millions de francs, la création de 2.750 places en CAT pour 134,93 millions de francs et celle de 500 emplois en ateliers protégés pour 24,72 millions de francs.

A côté de cette croissance globale des crédits par le milieu protégé soit, en tout, + 6,76 % soit 666,174 millions de francs de plus ce qui fait passer l'aide de l'État de 9,858 milliards de francs en 1995 à 10,524 milliards en 1996, pour ce secteur, les mesures en faveur du milieu ordinaire de production qui bénéficiaient déjà de moyens peu importants enregistrent une chute globale des montants qui leur sont affectés. Ces derniers passent, en effet, de 106,434 millions de francs en 1995 à 87,573 millions de francs en 1996, enregistrant ainsi une baisse de 18,86 millions de francs et de 17,78 %.

* (6) Sur un recours de la Fédération des établissements hospitaliers et d'assistance privés à but non lucratif (FEHAP)

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