C. LA POSSIBILITÉ DE CRÉER UN GROUPEMENT D'ASSUREURS POUR RENDRE LE MARCHÉ PLUS ATTRACTIF (ARTICLE 7)

La refonte globale de la gouvernance proposée par le présent projet de loi ne pourra bénéficier aux exploitants agricoles qu'à condition que le marché de l'assurance multirisque climatique devienne plus attractif pour les assureurs . Ainsi, l'étude d'impact du projet de loi constate que « le dispositif de gestion des risques climatiques « à trois étages » (...) pourrait nécessiter la mise en place d'un cadre partenarial renforcé entre les entreprises d'assurances voire dans l'harmonisation d'une partie de leurs tâches » 12 ( * ) .

En effet, la constitution d'un groupement d'assureurs peut apporter une solution aux défaillances structurelles de ce marché assurantiel , en permettant une meilleure connaissance des risques du marché par la mise en commun de données relatives à la sinistralité, et une réelle mutualisation des risques entre les assureurs, cette dernière « permettrait de favoriser une large couverture des agriculteurs y compris en direction des territoires et des filières les plus exposées » 13 ( * ) .

La solution du groupement d'assureurs n'est d'ailleurs pas novatrice pour la couverture des risques mal appréhendés par le marché , à l'image de la Gestion de l'assurance et de la réassurance des risques attentats et actes de terrorisme (GAREAT).

Le régime « GAREAT »

Créé en 2002 à la suite des attentats terroristes du 11 septembre 2001, le « GAREAT » est une structure de marché prenant la forme d'un groupement d'intérêt économique à but non lucratif . Il se compose de deux sections :

- la section des grands risques, comprenant les risques dont les capitaux assurés s'élèvent à 20 millions d'euros ;

- la section des risques petits et moyens qui gère les risques dont les capitaux sont inférieurs à 20 millions d'euros.

Les risques couverts sont les dommages aux biens résultant d'attentats ou d'actes de terrorisme subis sur le territoire français. Les assureurs adhérents à ce groupement cèdent la gestion de ces risques à celui-ci. Le groupement bénéficie de la garantie illimitée de l'État , via la caisse centrale de réassurance (CCR), en application de l'article L. 431-10 du code des assurances.

Source : commission des finances

Dans cette perspective, le I de l'article 7 du présent projet de loi prévoit une habilitation du Gouvernement à légiférer par ordonnance visant à « permettre aux systèmes de production agricole de surmonter durablement ces aléas et de garantir un large accès des exploitants agricoles à un régime d'assurance contre ces risques ». L'objectif de cette habilitation est clairement établi : il s'agit de lever les freins structurels au développement du marché de l'assurance multirisque climatique en évitant une éviction du marché des exploitants agricoles qui présenteraient un risque trop important pour l'assureur. À ce titre, cette habilitation à légiférer par ordonnance constitue la clé de voûte opérationnelle de la réforme proposée.

Pour ce faire, la rédaction proposée de l'habilitation est construite sous la forme d'une palette d'options, étant entendu que le champ de l'habilitation pourra ne pas être complètement épuisé 14 ( * ) .

Ainsi, le 1° du I prévoit de mettre à la charge des assureurs qui souhaitent commercialiser des contrats MRC bénéficiant de la subvention des obligations diverses , consistant à :

- partager les données qu'ils détiennent ;

- mutualiser les risques assurés ;

- élaborer une tarification technique commune ;

- exercer en commun certaines activités liées à ces produits d'assurance ;

- proposer un de ces produits à tout exploitant agricole qui en fait la demande ;

- encadrer les procédures d'évaluation et d'indemnisation des sinistres ;

- assurer les missions du réseau d'interlocuteurs agréés prévu à l'article 3 du présent projet de loi.

Le 2° du I permet la création d'un groupement, dont la forme juridique n'est pas encore arrêtée, chargé « de tout ou partie » des obligations précitées, laissant ainsi une certaine marge de manoeuvre quant aux missions de ce groupement . L'Assemblée nationale a complété cette disposition en adoptant en séance un amendement du rapporteur, Frédéric Descrozaille, avec un avis de sagesse du Gouvernement, prévoyant l'obligation d'adhérer à ce groupement pour les assureurs qui souhaitent commercialiser des contrats MRC subventionnés.

Le 3° du I permet à l'ordonnance de compléter les missions de la Caisse centrale de réassurance (CCR) , afin de lui permettre de concourir aux nouvelles obligations à la charge des assureurs et à la mise en oeuvre de ce groupement.

Le 4° du I précise que l'ordonnance définira les modalités de contrôle et les sanctions administratives permettant d'assurer l'effectivité des dispositions du présent projet de loi, et le 5° du I prévoit que l'ordonnance fixera les obligations déclaratives incombant aux exploitants agricoles qui ne sont pas assurés. Enfin, le 6° et le 7° du I prévoient respectivement que l'ordonnance précisera les conditions dans lesquelles les dispositions du projet de loi seront appliquées aux contrats en cours, et apportera les dispositions législatives nécessaires pour assurer le respect de la hiérarchie des normes, la cohérence rédactionnelle et l'harmonisation du droit.

Le II de l'article 7 prévoit que les ordonnances prévues en application du I sont prises dans un délai de neuf mois à compter de la promulgation du présent projet de loi, à l'exception de l'ordonnance relative aux obligations à la charge des assureurs, la constitution du groupement et les missions de la CCR, qui est prise dans un délai de six mois . Ce délai plus restreint est issu de l'adoption par la commission des affaires économiques de l'Assemblée nationale d'un sous-amendement du rapporteur, afin de trouver un compromis entre l'exigence de rapidité et le délai nécessaire aux consultations techniques pour la préparation de cette ordonnance. En outre, un projet de loi de ratification est déposé devant le Parlement dans un délai de trois mois à compter de la publication de chacune des ordonnances prévues au I de l'article 7.


* 12 Étude d'impact, p. 36.

* 13 Idem.

* 14 Comme l'ont rappelé le Conseil d'État dans son avis sur le projet de loi portant réforme des outils de gestion des risques climatiques en agriculture (§10) et les auditions menées par les rapporteurs.

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