II. UNE DÉPENSE FISCALE TOUJOURS PLUS ÉLEVÉE QUI RESTE LE LEVIER FONDAMENTAL DE LA MISSION

En volume, et comme les années précédentes, le principal levier d'aide aux entreprises reste de nature fiscale, et non budgétaire, compte tenu de l'importance des dépenses fiscales associées à la mission « Économie ».

A. UN MONTANT CUMULÉ QUI DEVRAIT ATTEINDRE 28,9 MILLIARDS D'EUROS

Le montant cumulé des dépenses fiscales de la mission, pour leur écrasante majorité rattachées au programme 134, est évalué par le Gouvernement à 28,9 milliards d'euros en 2018 . Par rapport aux évaluations faites pour 2017, le montant de dépense fiscale fait donc apparaître une croissance de 4 milliards d'euros, soit une nouvelle augmentation de 16 %.

Cette hausse s'explique avant tout par le fonctionnement « à plein régime » du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE). Le montant de dépense fiscale associée est estimé à 20,9 milliards d'euros, en hausse de 4,5 milliards par rapport à 2017 compte tenu de l'augmentation de 6 % à 7 % du montant du CICE dans le cadre de la loi de finances initiale pour 2017 dont les effets sont décalés d'un an eu égard à la technique du crédit d'impôt.

Montant des dépenses fiscales associées à la mission « Économie »

(en milliards d'euros)

Chiffrage pour 2013

Chiffrage pour 2014

Chiffrage pour 2015

Chiffrage pour 2016

Chiffrage pour 2017

Chiffrage pour 2018

Programme 134

7,736

16,582

16,866

20,737

24,862

28,801

dont CICE

-

6,438

12,410

12,898

16,451

20,964

dont taux réduit (7 % puis 10 %) de TVA dans la restauration

3,1

2,290

2,310

2,544

2,615

2,683

dont déduction exceptionnelle de 40 % de l'amortissement pour certains biens

-

-

0,350

0,080

0,450

0,720

Programme 305

-

-

-

0,039

0,038

0,037

Source : PAP PLF 2015 à 201 8.

Pour autant, votre rapporteur relève que le montant total réel de la dépense fiscale rattachée à la mission ne peut être connu de façon précise , le Gouvernement n'étant pas en mesure de renseigner les montants de plusieurs dispositifs.

B. UNE DÉPENSE FISCALE FORTEMENT CONCENTRÉE SUR LE CRÉDIT D'IMPÔT POUR LA COMPÉTITIVITÉ DES ENTREPRISES

Le crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi (CICE) représente à lui seul 20,8 milliards d'euros, soit plus de 72 % du montant total de la dépense fiscale rattachée à la mission.

Les résultats de ce dispositif ont fait l'objet d'une appréciation mitigée de la part du comité de suivi du CICE.

Avis du comité de suivi du CICE
(3 octobre 2017)

« Après examen et discussion des travaux disponibles, le comité identifie une première série de résultats qui lui paraissent significatifs.

« Le comité considère comme avéré le fait que le CICE s'est en partie diffusé dans l'ensemble du système productif, le long de chaînes de valeur dès le début de la mise en place du dispositif, en 2013 et 2014. Les entreprises les plus bénéficiaires ont transmis une partie de leur CICE à leurs entreprises clientes ou donneuses d'ordre, en réduisant ou en limitant la hausse des prix des biens et services qu'elles leur vendent. Cette transmission du CICE par les prix, qui a concerné plus spécifiquement certains secteurs d'activité, est de nature à affecter les résultats des travaux d'évaluation microéconométriques menés, car ces derniers ne visent à capter que les effets du CICE directement perçu par les entreprises.

« Le comité note que le CICE a conduit à une amélioration des marges des entreprises, mais cet effet n'est que partiellement identifiable avec les méthodes microéconométriques employées.

« Le comité tient pour robustes les résultats des équipes de recherche qui concluent à l'absence d'impact de court terme du CICE, c'est-à-dire en 2013 et 2014, sur l'investissement, la recherche et développement et les exportations. Cette absence d'effet à court terme n'est pas surprenante, si l'on considère que les décisions d'investissement présupposent l'accroissement effectif des marges et qu'elles peuvent nécessiter du temps pour être mises en oeuvre.

« Il constate que cette absence d'impact semble perdurer en 2015, mais s'interroge sur la capacité des méthodes employées à ce jour pour capter de tels impacts, en particulier sur l'investissement, à moyen terme.

« Le comité constate que la prise en compte de l'année 2015 dans les travaux d'évaluation ne lève pas toutes les incertitudes entourant l'effet du CICE sur l'emploi. Un effet positif mais modéré, concentré sur les entreprises les plus exposées au CICE, lui paraît le plus vraisemblable, de l'ordre de 100 000 emplois sauvegardés ou créés sur la période 2013-2015 (mais dans une fourchette large, allant de 10 000 à 200 000 emplois). Le comité privilégie en cela la méthodologie retenue par l'équipe TEPP, renforcée depuis par des estimations complémentaires. En revanche, le volume d'emplois sauvegardés sur la période grâce à l'effet du préfinancement sur les défaillances d'entreprise se révèle modeste (moins de 3 000 emplois sauvegardés, uniquement sur 2013), et moindre qu'envisagé par le comité dans son rapport de l'an passé.

« Sur un certain nombre d'autres points, le comité estime que les résultats disponibles ne permettent pas de trancher ou demeurent relativement fragiles :

« - Le comité constate ainsi qu'une forte incertitude demeure quant à la décomposition de l'effet du CICE sur l'emploi par niveaux de qualification.

«  - Il relève que les effets du CICE sur les salaires demeurent difficiles à déceler. À la lumière des données de 2015, deux résultats semblent émerger mais méritent de faire l'objet d'un réexamen dans la durée. D'une part, le CICE aurait plutôt joué positivement sur les salaires des cadres et professions intellectuelles supérieures. D'autre part, la dynamique des salaires sur les trois premières années d'implémentation du CICE ne semble pas avoir été spécifiquement affectée par le seuil de 2,5 Smic à partir duquel un salarié ne bénéficie plus de la mesure. Plus précisément, on n'observe pas de ralentissement des salaires spécifiquement au voisinage de ce point, que ce soit pour les salariés en place ou pour les nouveaux recrutements.

« - Enfin, le comité note qu'en l'état les estimations relatives à l'effet du CICE sur les dividendes sont extrêmement fragiles en raison des données utilisées et ne permettent pas de conclure.

« De façon générale, l'ensemble des travaux quantitatifs et qualitatifs menés depuis 2014 font apparaître une très grande diversité de comportements économiques des entreprises face au CICE. L'identification d'un effet global, résultant de cette diversité, n'en est rendue que plus difficile . »

En outre, il faut regretter que le CICE ait été orienté uniquement vers les bas salaires, ce qui a réduit d'autant ses effets potentiels au profit des entreprises innovantes qui, structurellement, emploient en majorité des salariés disposant de compétences techniques recherchées justifiant des niveaux de rémunérations élevés.

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