C. L'AIDE A LA SCOLARITÉ

1. La réforme du système de bourses

Conséquence de la suppression, décidée en 2012, de la prise en charge des frais de scolarité des lycéens (PEC), un nouveau dispositif d'aide à la scolarité est entré en vigueur en 2013 , les moyens auparavant affectés à la PEC étant redéployés en faveur des bourses scolaires destinées aux élèves de la maternelle à la classe de terminale.

Cette réforme répondait à la fois à une exigence d'équité (mieux prendre en compte les ressources réelles des familles) et à un souci de maîtrise de la dépense publique :

- ainsi, les règles d'attribution ont été modifiées, le montant de la bourse étant désormais fonction du revenu net disponible par personne (déduction faite des impôts, des charges sociales et des frais de scolarité) rapporté au coût de la vie locale (grâce à un indice de parité de pouvoir d'achat, calculé selon des règles objectives) ;

- en outre, une logique d'enveloppe a été introduite pour limiter les dérives budgétaires : le montant total des bourses distribuées ne peut excéder l'enveloppe attribuée en loi de finances à l'AEFE ; les propositions d'attribution présentées par les conseils consulaires des bourses doivent s'inscrire dans le cadre des enveloppes limitatives qui leur sont notifiées par l'AEFE, un ajustement étant possible dans le cadre du dialogue de gestion avec l'agence et des outils de pilotage pouvant être utilisés : péréquation entre postes, mécanismes locaux de régulation (plafonnement des tarifs notamment), utilisation de la réserve d'intervention, variation de la contribution progressive de solidarité (contribution des familles).

En outre, des adaptations au dispositif ont été adoptées lors de la commission nationale des bourses de décembre 2013 :

- certains éléments du barème ont été ajustés afin de mieux prendre en compte les situations spécifiques. C'est le cas des seuils d'exclusion liés aux patrimoines mobilier et immobilier, initialement fixés de manière homogène (100 000 euros pour le patrimoine mobilier et 200 000 euros pour le patrimoine immobilier), qui ont été revus afin de tenir compte des réalités locales. Ainsi, trois seuils ont été retenus pour le patrimoine immobilier (150 000 euros, 200 000 euros et 250 000 euros) et deux pour le patrimoine mobilier (50 000 euros et 100 000 euros).

- les difficultés spécifiques auxquelles sont confrontés certains postes sont prises en compte , l'enveloppe qui leur est attribuée pouvant être modulée à la hausse, dans la limite des moyens disponibles.

- le rôle des conseils consulaires de bourses (CCB) dans le dispositif a été renforcé . Ainsi, les CCB sont désormais systématiquement informés du résultat de l'instruction des dossiers et du dialogue de gestion.

Ils peuvent ajourner ou rejeter des dossiers initialement considérés comme recevables par les postes ou au contraire « rattraper » des dossiers qui avaient été proposés à l'ajournement ou au rejet par les postes lors de l'instruction.

Enfin, ils ont la possibilité de moduler, à la hausse ou à la baisse , les quotités théoriques obtenues par l'application stricte du barème. Néanmoins, compte tenu du caractère limitatif de leurs enveloppes, toute modulation à la hausse doit être compensée par d'autres à la baisse, voire par le rejet du dossier. Cette possibilité de modulation a été utilisée lors des dernières campagnes de bourses afin de corriger l'inadéquation entre le niveau de l'aide issu de l'application du barème et la situation réelle des familles. Lors de la campagne 2015/2016 du rythme nord, les CCB ont ainsi modulé la quotité de bourses de 15,4 % des familles bénéficiaires : 9,8 % à la hausse et 5,6 % à la baisse.

2. Bilan de la réforme

Le nouveau dispositif de bourses a été mis en place à la rentrée de septembre 2013 pour les pays du rythme Nord (soit la très grande majorité des pays, pour lesquels l'année scolaire s'établit de septembre à juin de l'année suivante) et à la rentrée de janvier 2014 pour les pays du rythme Sud (soit une quinzaine de pays, dont l'Australie, le Rwanda et quelques pays d'Amérique centrale, dont l'année scolaire est calée sur l'année civile).

Les premières années de mise en oeuvre permettent de tirer les enseignements suivants 16 ( * ) :

- entre 2012 et 2015, le nombre de familles bénéficiant de bourses est resté stable (autour de 15 800), le nombre de boursiers ayant quant à lui légèrement diminué (de 26 300 en 2012 à 25 900 en 2015 , soit 21 % des élèves français du réseau) ;

- la dérive budgétaire (se traduisant par une augmentation annuelle des dépenses de bourses de 13 % entre 2007 et 2012) a été contenue , le coût moyen des bourses ayant été stabilisé autour de 4 000 euros ;

- le barème est davantage progressif : on observe une répartition plus équilibrée de la dépense de bourses entre les familles, avec une baisse du nombre de familles titulaires de bourses à 100 % (dont la proportion passe de 59 % en 2012 à 42 % en 2015) et une hausse du nombre de familles bénéficiant de quotités intermédiaires (20 % des familles bénéficient d'une quotité entre 70 et 90 % contre 14 % auparavant) ;

Source : MAEDI

- un rééquilibrage entre zones géographiques a été amorcé avec une progression de l'aide en Afrique, au Maghreb , en Amérique centrale et Sud et en Asie et une baisse dans les zones Amérique du Nord et Europe.

Source : Cour des comptes 17 ( * )

Comme le souligne une récente communication de la Cour des comptes 1 , le poids des Etats-Unis (4,6 % des boursiers, 12 % du montant des bourses) reste élevé, du fait des frais de scolarité pratiqués (20 741 euros par an au Lycée français de New York) malgré le plafonnement instauré pour le calcul des bourses.

La Cour des comptes observe toutefois que de moins en moins de nouvelles familles entrent dans le dispositif , la réforme semblant avoir profité aux familles déjà bénéficiaires.

En outre, si le nombre de familles monoparentales a augmenté (28,6 % dans le rythme nord en 2015/2016, contre 23,5 % en 2012/2013 et 34,1 % dans le rythme sud en 2015, contre 26,9 % en 2013), cette augmentation s'expliquerait, selon la Cour des comptes non pas par un barème plus favorable aux familles monoparentales mais par l'augmentation de leur proportion parmi les demandeurs .

Enfin, la question des éventuelles déscolarisations pour raisons financières reste posée.

Certains sénateurs représentant les Français établis hors de France ont signalé un risque d'exclusion des familles à revenu moyen, qui renonceraient à scolariser leurs enfants dans un établissement français.

Les éléments transmis à ce sujet à vos rapporteurs par le MAEDI tendent à démontrer que la proportion de boursiers non scolarisés à la rentrée reste constante depuis 10 ans (soit moins de 2 000 élèves). Le premier motif invoqué est le départ de la circonscription consulaire, le motif financier restant faible (moins de 6 % à la rentrée 2015).

Tout en soulignant qu'une non-scolarisation pour raisons financières reste difficile à objectiver et qu'elle n'entraîne pas automatiquement une déscolarisation (un autre établissement pouvant être choisi), la Cour des comptes n'en rapporte pas moins les indices d'une nette augmentation des non inscriptions pour raisons financières d'élèves boursiers, tout particulièrement pour le rythme nord : le nombre de cas recensés passe en effet de 35 (soit 1,9 % des boursiers non scolarisés du rythme nord) en 2012-2013 à 174 en 2013-2014 , à 159 cas en 2014-2015 et avant de redescendre à 98 cas en 2015-2016 .

Vos rapporteurs continueront naturellement d'être attentifs à cette question.

? Les crédits d'aide à la scolarité pour 2017

Pour 2017, la dotation destinée à l'attribution des bourses scolaires sur critères sociaux diminue de 8 %, passant de 115,5 à 110 millions d'euros, soit une baisse de 15,5 millions d'euros , qui, selon le ministère, sera compensée par le reliquat d'un excédent de trésorerie constaté dans les comptes de l'Agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE) à la suite d'un changement de méthode comptable 18 ( * ) .

En effet, entre 2013 et 2015, la dotation budgétaire en LFI dédiée à l'aide à la scolarité a augmenté de 14 %. Cette augmentation était cependant supérieure à l'évolution des besoins, qui sont restés quasiment stables entre 2013 et 2015. Ce différentiel positif entre le montant des subventions versées à l'AEFE et le coût réel des campagnes de bourses est venu alimenter le résultat d'exploitation de l'AEFE, qui a atteint 42 millions d'euros fin 2014 .

Cette soulte a autorisé des annulations de crédits en 2015 et 2016,  ainsi qu'une baisse de la dotation inscrite au programme 151 en 2016 (-10 millions d'euros), sans que soit affecté le montant finalement affecté aux bourses . De fait, celui-ci n'a cessé d'augmenter : de 100 millions d'euros en 2015 (dont 10,4 millions d'euros issus de la soulte), elle est passée à 106 millions d'euros en 2016 (dont 19 millions d'euros issus de la soulte) et devrait atteindre 110 millions d'euros en 2017 (dont 12,7 millions d'euros issus de la soulte).

2014

2015

2016

2017

(prévisionnel)

Montant inscrit en LFI

118 800 000 €

125 500 000 €

115 500 000 €

110 000 000 € *

Réserve légale

-8 316 000 €

-10 400 000 €

-9 240 000 €

?

Annulations en LFR

-4 000 000 €

-26 000 000 €

-19 000 000 €

Montant versé par la DFAE à l'AEFE

106 484 000 €

89 460 000 €

87 260 000 €

Coût effectif des campagnes de bourses imputées sur l'exercice

95 760 734 €

99 702 429 €

104 000 000 € (prévisionnel)

109 500 000 € *

Source : réponse au questionnaire budgétaire

La dotation pour 2017 permettra de financer le solde (60 %) de la campagne 2016/2017 du rythme nord, la totalité de la campagne 2017 du rythme sud et la première partie (40 %) de la campagne 2017/2018 du rythme nord.

Pour autant, la promesse de réaffecter intégralement aux bourses les économies liées à la suppression de la prise en charge des frais de scolarité n'est pas tenue.

En outre, la souplesse apportée par la soulte ne pourra jouer au-delà de 2017. Une réévaluation de l'enveloppe sera indispensable l'année prochaine , sauf à diminuer l'aide effectivement apportée aux familles, une évolution qui serait difficilement supportable alors que les frais de scolarité ne cessent, quant à eux, d'augmenter.

*****

À l'issue de sa réunion du mercredi 16 novembre 2016, la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées a donné un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Action extérieure de l'Etat ».


* 16 MAEDI.

* 17 Communication de la Cour des comptes à la commission des finances du Sénat en application de l'article 58-2° de la loi organique n° 2001-692 du 1er août 2001 relative aux lois de finances « L'enseignement français à l'étranger : insuffler une nouvelle dynamique », 20 octobre 2016.

* 18 Liée au décret n° 2012-1246 du 7 novembre 2012 relatif à la gestion budgétaire et comptable publique.

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