B. UNE NOUVELLE CONTRIBUTION DES COLLECTIVITÉS TERRITORIALES AU REDRESSEMENT DES FINANCES PUBLIQUES

1. L'évolution des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales depuis 2011

En 2010, dans le cadre de la conférence sur le déficit, le rapport de MM. Gilles Carrez 5 ( * ) et Michel Thénault avait estimé que le dynamisme endogène de la dépense locale comme l'impact de son financement sur les comptes publics imposaient une maîtrise de cette dépense.

Face à ce constat, une partie des concours financiers de l'État en faveur des collectivités territoriales a connu un gel en valeur entre 2011 et 2013. Puis la loi n° 2012-1558 du 31 décembre 2012 de programmation des finances publiques pour les années 2012 à 2017 a posé deux principes portant sur les relations entre l'État et les collectivités territoriales :

- d'une part, l'article 9 prévoit une contribution des collectivités territoriales à l'effort de redressement ;

- d'autre part, l'article 13 prévoit la stabilisation des concours financiers de l'État aux collectivités territoriales en 2013, puis leur diminution en 2014 et en 2015 de 750 millions d'euros, cette baisse de 1,5 milliard d'euros s'imputant sur la dotation globale de fonctionnement.

En janvier 2014, le Gouvernement a annoncé un plan d'économie de 50 milliards d'euros pour les années 2015-2017, afin de ramener le déficit public sous le seuil de 3 % du PIB et de financer le pacte de responsabilité destiné à relancer la compétitivité de l'économie française. La contribution des collectivités territoriales à ce nouvel effort a été fixée à 11 milliards d'euros, soit un abattement annuel de 3,67 milliards d'euros sur trois ans, entre 2015 et 2017, conformément à la loi n° 2014-1653 du 29 décembre 2014 de programmation des finances publiques pour les années 2014 à 2019. Cet effort des collectivités territoriales porte exclusivement sur la dotation globale de fonctionnement qu'elles perçoivent.

2. Une répartition de la baisse de la dotation globale de fonctionnement entre les différents échelons locaux

L'article 10 du projet de loi de finances pour 2016 fixe à 33,1 milliards d'euros le montant de la dotation globale de fonctionnement dont bénéficieraient les collectivités territoriales pour l'exercice 2016. Selon l'exposé des motifs du projet de loi, cette baisse représente 1,89 % des recettes de fonctionnement des collectivités en 2014. Le Gouvernement estime que cet effort devrait être compensé par « le dynamisme des autres recettes des collectivités, en particulier des recettes fiscales » 6 ( * ) .

Les modalités de mise en oeuvre de la baisse de la dotation globale de fonctionnement correspondent à la reconduction des modalités de répartition de la baisse utilisée en 2014, soit une baisse répartie entre les différentes strates territoriales en proportion de leur poids respectif dans les recettes locales. Au sein de chacune des catégories de collectivité, la répartition de cet effort s'effectue au prorata des recettes réelles de fonctionnement pour le bloc communal, de façon péréquée pour les départements et au prorata des recettes totales pour les régions, avec la définition d'une quote-part pour les régions d'Outre-mer.

Répartition entre catégories de collectivités territoriales
de la baisse des concours financiers en 2015 et 2016
(en milliards d'euros)

Bloc communal

Départements

Régions

Total

2015

2,071

1,148

0,451

3,67

2016

2,071

1,148

0,451

3,67

Source : Annexe au projet de loi de finances pour 2016
« Transferts financiers de l'État aux collectivités territoriales »

3. Des conséquences dramatiques sur l'investissement local

Cette nouvelle baisse de la dotation globale de fonctionnement sera plus sensible que la précédente pour les collectivités territoriales. Elle pose de nouveau la question de ses conséquences sur l'investissement local et l'exercice des politiques publiques locales.

Dans son dernier avis budgétaire, votre rapporteur s'était interrogée sur les marges de manoeuvre dont disposaient les collectivités territoriales pour compenser la réduction des dotations. L'impact de la baisse de la dotation globale de fonctionnement, pour la deuxième année consécutive, est difficile à évaluer. Ses effets ne seront pleinement appréciables que dans plusieurs années, d'autant que les collectivités territoriales, en particulier celles du bloc communal, seront également soumises à une réforme de la dotation globale de fonctionnement et à une nouvelle architecture institutionnelle, avec la révision des schémas départementaux de coopération intercommunale et le dynamisme des communes nouvelles.

Dans son troisième rapport sur les finances locales 7 ( * ) , la Cour des comptes s'est inquiétée d'une baisse durable de l'investissement des collectivités territoriales. Elle a notamment relevé une baisse du taux d'épargne brut et de 9,2 % des dépenses d'investissement et estime que « la baisse de la DGF risque d'affecter la capacité de financement des collectivités locales ». Elle précise également que « le risque est grand que l'ajustement budgétaire porte sur les dépenses d'investissement, qui représentaient 55 milliards d'euros en 2014 », plutôt que sur les dépenses de fonctionnement. C'est pourquoi la Cour des comptes préconise, une nouvelle fois, une meilleure maîtrise des dépenses de fonctionnement et une meilleure sélection des investissements afin de concilier contribution au redressement des comptes publics et investissement local.

Ce constat a été plus récemment confirmé par la dernière note de conjoncture de la Banque Postale qui a évalué à 6,6 % la baisse des investissements en 2015, après une baisse de 8,8 % en 2014. Les communes devraient voir leurs dépenses d'investissement baisser de 7,8 % en 2015, après une baisse de 14,1 % en 2014, soit une diminution en volume de 5,3 milliards d'euros. La baisse des dépenses d'investissement des départements s'élèverait à 4,3 % tandis que les régions seraient le seul niveau local à stabiliser son niveau d'investissement (+ 0,3 %).

Si votre rapporteur partage les conclusions du rapport de la Cour des comptes, elle regrette toutefois que la question des conséquences économiques et sociales de la baisse des investissements locaux ne soit pas soulignée. En effet, certains territoires fragiles connaissent une situation difficile, en raison d'un taux de chômage élevé et de la précarisation d'une partie de la population. C'est pourquoi elle se félicite de l'amendement adopté par la commission des finances du Sénat, à l'initiative de son rapporteur général, M. Albéric de Montgolfier, tendant à minorer de 1,6 milliard d'euros la baisse des concours de l'État aux collectivités territoriales, afin de faire face à la chute des investissements des collectivités territoriales et à leurs difficultés financières.


* 5 Alors président du comité des finances locales et rapporteur général du budget de la commission des finances de l'Assemblée nationale.

* 6 Annexe au projet de loi de finances pour 2016 « Transferts financiers de l'État aux collectivités territoriales ».

* 7 « Les finances publiques locales », rapport sur la situation financière et la gestion des collectivités territoriales et de leurs établissements publics, Cour des comptes, octobre 2015.

Page mise à jour le

Partager cette page