V. LES EFFORTS ENGAGÉS POUR GARANTIR UNE PRISE EN CHARGE DE QUALITÉ ÉGALE SUR L'ENSEMBLE DU TERRITOIRE NATIONAL

La direction de la protection judiciaire de la jeunesse (DPJJ), s'est vue confier la charge de l'ensemble des questions intéressant la justice des mineurs (civile et pénale) et la coordination des institutions intervenant à ce titre, par le décret du 9 juillet 2008. Elle est garante de la bonne exécution des décisions de la justice des mineurs, quels qu'en soient les opérateurs .

Rappelons qu'en matière de protection de l'enfance, les compétences sont réparties entre les conseils généraux (pour la protection administrative) et l'Etat (pour la protection judiciaire). Les actions de protection sont exercées par un dispositif de services et d'établissements faisant l'objet d'habilitations par les conseils généraux et/ou les préfets (les directions territoriales de la PJJ sont alors les organismes instructeurs). Le financement des prises en charge des mineurs au titre des mesures administratives et judiciaires civiles est à la charge des conseils généraux depuis la réforme de 1986, confirmée par la loi n° 2007-293 du 5 mars 2007 réformant la protection de l'enfance. Le financement des actions éducatives dans le cadre pénal au titre de l'ordonnance du 2 février 1945 relève de la compétence exclusive de l'État.

Enfin, dans les deux domaines, pénal et civil, les investigations judiciaires sont de la compétence exclusive de l'État (secteurs public et associatif habilité à ce titre) et financées par lui.

Une telle organisation nécessite une analyse conjointe des besoins en matière de protection de l'enfance dans chaque département entre le conseil général, la direction territoriale de la protection judiciaire de la jeunesse et les juridictions . La circulaire d'orientation du 6 mai 2010, relative au rôle de l'institution judiciaire dans la mise en oeuvre de la réforme de la protection de l'enfance, clarifie la répartition des compétences entre la PJJ et les conseils généraux. Elle rappelle ainsi la nécessaire contribution de l'institution judiciaire à la définition d'une politique coordonnée de protection de l'enfance avec les conseils généraux.

Ainsi, deux types d'instances contribuent au repérage et au suivi des situations de mineurs en danger : les observatoires de la protection de l'enfance (ODPE) et les cellules de recueil des informations préoccupantes (CRIP). En outre, la commande publique coordonnée entre la DPJJ et les conseils généraux et la réalisation d'audits conjoints entre la DPJJ et les conseils généraux contribuent également à l'harmonisation de la prise en charge sur le territoire national.

1. Les observatoires départementaux de la protection de l'enfance (ODPE)

L'ODPE, placé sous l'autorité du président du conseil général, est, en vertu de la loi du 5 mars 2007 précitée, l'outil de suivi de la mise en oeuvre du volet protection de l'enfance du schéma départemental d'organisation sociale et médico-sociale. Il comprend des représentants du conseil général, du tribunal de grande instance, des services de l'État (en particulier la PJJ) ainsi que de services, d'établissements et d'associations concourant à la protection de l'enfance.

D'une part, l'ODPE est chargé du recueil, de l'examen et de l'analyse des données relatives à l'enfance en danger dans le département, en s'appuyant notamment sur les informations anonymisées transmises par la CRIP. Ces données, qui font également l'objet d'une transmission à l'Observatoire national de l'enfance en danger (ONED), permettent d'améliorer la connaissance des populations prises en charge par l'aide sociale à l'enfance. D'autre part, la circulaire du 6 mai 2010 précitée exigeant une contribution forte de l'institution judiciaire à la formulation d'analyses et de propositions, cette formulation peut avoir lieu dans le cadre de l'ODPE, de manière à améliorer la concertation sur l'élaboration et le suivi de la politique départementale en matière de protection de l'enfance.

Dans son dernier rapport de mai 2013, l'observatoire national de l'enfance en danger (ONED) relevait qu'à la fin 2012, plus de la moitié des départements avaient installé leurs observatoires et que 19 le prévoyaient à court terme. L'ONED souligne par ailleurs que si les missions de l'ODPE sont définies par la loi de 2007, cette dernière ne pose pas de cadre juridique structurel et pérenne pour cette instance, de sorte qu'elle reste tributaire des moyens que ses membres veulent bien lui consacrer.

2. Les cellules de recueil des informations préoccupantes (CRIP)

La loi du 5 mars 2007 précité a prévu la mise en place dans chaque département d'une cellule de recueil des informations préoccupantes (CRIP). Des protocoles relatifs à la mise en oeuvre des CRIP entre le président du conseil général, le représentant de l'État dans le département et les partenaires institutionnels concernés par la protection de l'enfance et le procureur de la République ont ainsi été signés.

La CRIP a une fonction d'orientation des informations préoccupantes qui lui sont transmises. Elle a pour rôle de les centraliser et les évaluer afin de mieux repérer les situations qui nécessitent une intervention. Le cas échéant, elle est chargée de leur traitement, ce qui implique soit la protection de l'enfance contractualisée, soit la saisine de l'autorité judiciaire. La CRIP joue ainsi un rôle important dans la clarification des compétences entre l'autorité judiciaire et le conseil général, en harmonisant des critères de saisine du procureur de la République.

Dans son rapport de mars 2012, l'ONED faisait état de la mise en oeuvre d'une CRIP dans chacun des 101 départements. Toutefois, les signataires des protocoles peuvent varier. En dehors des signataires habituels que sont le Conseil général, le tribunal, le préfet et la PJJ, l'éducation nationale participe dans 88 % des départements, les hôpitaux dans 52 % et des associations dans 30 %.

3. Une commande publique coordonnée entre la DPJJ et les conseils généraux en matière de protection de l'enfance

En application de la circulaire du 6 mai 2010 précitée, les directions territoriales de la PJJ définissent leur politique d'habilitation des établissements en concertation avec les juridictions mais également avec les conseils généraux, afin d'organiser conjointement le dispositif de protection de l'enfance dans son volet judiciaire, civil comme pénal.

En outre, la loi n° 2009-879 du 21 juillet 2009 portant réforme de l'hôpital et relative aux patients, à la santé et aux territoires, a introduit la notion de « commande publique coordonnée de l'État et des conseils généraux » vis-à-vis des associations. Ainsi, les besoins en matière d'équipements en protection de l'enfance, ainsi que la procédure d'appel à projet à laquelle répondent les associations pour pourvoir à ces besoins, doivent être définis conjointement. Cette évolution renforce encore la concertation entre l'État et les conseils généraux.

4. La réalisation d'audits conjoints DPJJ/ conseils généraux

Depuis septembre 2008, la DPJJ s'est progressivement dotée d'une capacité à mener des audits :

- en 2009, 110 audits ont été effectués, dont les deux tiers concernaient des établissements et services du secteur associatif habilité ;

- en 2010, 218 audits ont été effectués, dont les trois quarts concernaient des établissements et services du secteur associatif habilité ;

- en 2011, 222 audits ont été réalisés, 120 dans le secteur public et 102 dans le secteur associatif habilité ;

- enfin en 2012, 203 audits ont été réalisés, 106 dans le secteur public et 97 dans le secteur associatif habilité.

Or, au 30 avril 2013, 55 conventions ont été signées avec les conseils généraux en vue de réaliser des audits conjoints . Au total, de 2009 à fin 2012, 139 audits conjoints ont été réalisés. Dans ce cadre, 32 personnels des conseils généraux ont participé en 2013 à la formation des auditeurs dispensée par l'Ecole nationale de protection judiciaire de la jeunesse. Au total, 146 auditeurs (PJJ et ASE) ont été formés au cours des 8 sessions réalisées depuis 2009 à l'ENPJJ.

Enfin, il convient de souligner que la mise en oeuvre de la MJIE (cf. ci-dessus) permet à la DPJJ de disposer d'une visibilité sur un grand nombre d'actions menées dans le champ de la protection de l'enfance, et contribue ainsi aux efforts d'uniformisation de la prise en charge des mineurs en danger sur l'ensemble du territoire national.

Au bénéfice de ces observations, votre commission des lois a donné un avis favorable à l'adoption des crédits du programme n° 182 : « protection judiciaire de la jeunesse » de la mission « justice » du projet de loi de finances pour 2014.

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