C. DE NOUVELLES MESURES FISCALES VOLONTARISTES EN MATIÈRE DE LOGEMENT FIGURENT DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 2014

Votre rapporteure pour avis avait relevé l'année dernière que le projet de loi de finances pour 2013 comprenait plusieurs mesures fiscales volontaristes en matière de logement. Il s'agissait notamment du renforcement de la taxe sur les logements vacants (TLV) ou de la création d'un nouveau dispositif d'incitation à l'investissement locatif, le « Duflot ».

Le projet de loi de finances pour 2014 comprend lui aussi plusieurs dispositions fiscales volontaristes, annoncées par le Président de la République le 21 mars 2013, à l'occasion du lancement du Plan d'investissement pour le logement , et qui confirment la priorité donnée par le Gouvernement à la politique du logement.

Les trois principales dispositions fiscales dans le domaine du logement sont :

- la réforme du régime d'imposition des plus-values immobilières (article 18) ;

- l'abaissement du taux de TVA applicable à la construction et à la rénovation des logements sociaux (article 19) ;

- la création d'un régime fiscal favorisant l'investissement institutionnel dans le logement intermédiaire (article 55).

1. La réforme du régime d'imposition des plus-values immobilières vise à redynamiser le marché immobilier

Votre commission des affaires économiques a souligné à plusieurs reprises la nécessité d'une réforme des plus-values immobilières .

Notre collègue Claude Bérit-Débat soulignait ainsi, à l'occasion de l'examen du projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social, qu'« il est aujourd'hui indispensable, dans un contexte où le foncier est rare et cher, qu'une fiscalité progressive soit mise en place sur les terrains constructibles laissés nus, ceci afin de décourager la rétention foncière » 30 ( * ) .

Comme le souligne le Gouvernement, « les modalités d'imposition des plus-values immobilières incitent à la rétention des ressources foncières et immobilières par leurs propriétaires . Elles participent, de ce fait, à l'atonie du marché immobilier et pèsent sur l'activité du secteur du bâtiment » 31 ( * ) .

Le dispositif en vigueur , du fait de l'abattement progressif pour durée de détention qui aboutit à une exonération totale au terme d'un délai de trente ans de détention, génère un comportement attentiste des propriétaires, qui sont incités à conserver leurs biens longtemps pour réduire l'impôt ou y échapper , et contribue à la paralysie du marché immobilier.

Dans ce contexte, l'article 18 du projet de loi de finances pour 2014 propose une réforme du régime d'imposition des plus-values immobilières :

- pour les cessions de terrains à bâtir, l'abattement pour durée de détention est supprimé à compter du 1 er janvier 2014, ce qui devrait contribuer à la libération de foncier pour la construction de logement ;

- pour les cessions de biens autres que des terrains à bâtir, il est prévu l'application de la cadence et du taux d'abattement pour durée de détention rendus applicables par instruction fiscale dès le 1 er septembre 2013, ceci afin d'éviter un blocage du marché dans l'attente de l'entrée en vigueur de la réforme ;

- un abattement exceptionnel de 25 % est par ailleurs applicable depuis le 1 er septembre 2013 et pour une durée d'un an pour la détermination de l'assiette imposable des plus-values immobilières.

Votre rapporteure pour avis estime que réforme va dans le bon sens. Elle s'interroge cependant sur son impact , alors qu'elle a pour objet d' « assurer une plus grande neutralité de la fiscalité » 32 ( * ) : le retour à une fiscalité neutre risque d'être insuffisant pour modifier les comportements des propriétaires privés et les inciter à vendre leurs terrains pour construire des logements ou à utiliser eux-mêmes les droits à construire.

À ses yeux, il conviendrait de réfléchir à une démarche non pas neutre mais incitative, à même de déclencher un réel choc d'offre foncière. Elle souhaite que la remise à plat de la fiscalité annoncée par le Premier ministre n'élude pas la rénovation de la fiscalité immobilière et permette cette évolution.

2. L'abaissement du taux de TVA applicable à la construction et à la rénovation des logements sociaux, une mesure forte au service des objectifs ambitieux fixés par le Président de la République

À l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2013, votre rapporteure pour avis a souligné l'importance de maintenir un taux de TVA réduit pour le logement social .

Elle relevait alors que les professionnels du bâtiment et les bailleurs sociaux avaient constaté l'impact négatif du relèvement de 5,5 % à 7 % du taux de TVA opéré par la loi de finances rectificative pour 2011 33 ( * ) : ce relèvement a conduit, d'après l'Union sociale pour l'habitat (USH), à un accroissement des dépenses des bailleurs sociaux de l'ordre de 225 millions d'euros 34 ( * ) .

Face à la perspective d'un relèvement du taux réduit de TVA de 7 à 10 % , suite aux annonces faites le 7 novembre 2012 par le Premier ministre dans le cadre du Pacte national pour la croissance, la compétitivité et l'emploi, votre rapporteure pour avis estimait « indispensable que le secteur du logement social ne subisse pas les effets d'un relèvement du taux de TVA qui lui est applicable [qui] empêcherait d'atteindre l'objectif de construction de 150 000 logements sociaux par an fixé par le Président de la République » 35 ( * ) .

Votre rapporteure pour avis ne peut , dans ces conditions, que se féliciter que l'article 19 du projet de loi de finances prévoie l'abaissement à 5 % du taux de TVA applicable à la construction et à la rénovation des logements sociaux , ceci conformément aux annonces faites par le Président de la République à l'occasion du lancement du Plan d'investissement pour le logement.

Comme l'indique l'évaluation préalable des articles du projet de loi de finances pour 2014, le relèvement d'un point de TVA correspond à un coût supplémentaire de 1 200 euros par logement social neuf . Autrement dit, l'abaissement à 5 % du taux de TVA applicable à la construction des logements sociaux permet aux bailleurs sociaux non seulement d'éviter le surcoût résultant de la hausse annoncée du taux réduit de 7 à 10 %, qui aurait été de 3 600 euros par logement neuf réalisé, mais aussi d'économiser des fonds propres par logement social réalisé, à hauteur de 2 400 euros par logement par rapport à la situation actuelle.

Votre rapporteure pour avis relève aussi avec satisfaction que cette mesure ne concerne pas seulement la construction mais aussi les travaux de rénovation dans les logements sociaux, répondant à des objectifs de réalisation d'économies d'énergies, à l'amélioration de l'accessibilité aux personnes handicapées, à la mise aux normes des logements et des immeubles ainsi qu'à la protection des populations et des locataires.

Cependant, les députés ont, à l'initiative de M. Christian Eckert, rapporteur général de la commission des Finances, adopté un amendement modifiant l'article 19 afin de relever de 5 à 5,5 % le taux de TVA applicable à la construction et à la rénovation des logements sociaux.

Votre rapporteure pour avis prend acte de cette amodiation de l'article 19 mais la regrette car elle modifie de fait les termes du pacte signé entre l'Etat et le mouvement HLM.

3. Des dispositifs fiscaux destinés à assurer le retour des investisseurs institutionnels sur le marché du logement

L'année dernière, votre rapporteure pour avis, constatant que « depuis deux décennies, les investisseurs institutionnels, les « zinzins », c'est-à-dire les banques ou les sociétés d'assurance, ont déserté le secteur du logement » 36 ( * ) , avait appelé le Gouvernement à proposer des mesures pour inciter les investisseurs institutionnels à s'intéresser de nouveau au secteur du logement.

Comme l'illustre le tableau suivant, depuis 1984, la part des bailleurs institutionnels dans le secteur locatif a été divisée par quatre .

Source : Réponse au questionnaire budgétaire.

Le 21 mars 2013, le Président de la République a annoncé, à l'occasion du lancement du Plan d'investissement pour le logement, son souhait de promouvoir une offre de logements intermédiaires par la mise en place d'un régime juridique spécifique à destination des classes moyennes. Ce régime sera mis en oeuvre par voie d'ordonnance, en application de la loi du 1 er juillet 2013 37 ( * ) .

L'article 55 du projet de loi de finances pour 2014 s'inscrit dans ce cadre : il vise à susciter une offre nouvelle de logements intermédiaires dans les zones les plus tendues du territoire , ce qui pourrait permettre de libérer des places dans les logements sociaux actuels par la gestion plus fluide des parcours résidentiels.

Il introduit ainsi au bénéfice des investisseurs institutionnels un taux réduit de TVA de 10 % pour la construction de logements intermédiaires dans le cadre d'opérations de construction mixtes, comprenant la construction d'au moins 25 % de logements sociaux, et prévoit une exonération temporaire de taxe foncière sur les propriétés bâties (TFPB) pour ces logements.

Votre rapporteure pour avis se félicite de ce dispositif qui incitera les investisseurs institutionnels à s'intéresser de nouveau au secteur du logement . Elle recommande la plus grande cohérence entre ces politiques incitatives en faveur de l'investissement logement et les préconisations du ministère des finances quant à l'orientation des actifs des banques, assurances et mutuelles. Le Gouvernement a fixé un objectif de construction de 10 000 logements supplémentaires par génération.


* 30 Rapport n° 757 (2011-2012) fait au nom de la commission des affaires économiques sur le projet de loi relatif à la mobilisation du foncier public en faveur du logement et au renforcement des obligations de production de logement social et sur la proposition de loi de Mme Nicole Borvo Cohen-Seat et plusieurs de ses collègues, pour une stratégie foncière publique en faveur du logement, M. Claude Bérit-Débat, p. 25.

* 31 Projet de loi de finances pour 2014, p. 77.

* 32 Projet de loi de finances pour 2014, p. 77.

* 33 Article 13 de la loi n° 2011-1978 du 28 décembre 2011 de finances rectificative pour 2011.

* 34 Cf. Avis n° 149 (2012-2013), Ibid., p. 39.

* 35 Avis n° 149 (2012-2013), Ibid., p. 39.

* 36 Ibid., p. 41

* 37 Loi n° 2013-569 du 1 er juillet 2013 habilitant le Gouvernement à adopter des mesures de nature législative pour accélérer les projets de construction.

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