C. LE PROJET DE LOI ENCOURAGE LA REPRISE D'ENTREPRISE PAR LES SALARIÉS

Le projet de loi relatif à l'économie sociale et solidaire obéit à une logique différente de celle qui anime les deux dispositifs législatifs précités. Il vise à faciliter la transmission des petites et moyennes entreprises (moins de 250 salariés), quels que soient leurs statuts, à leurs salariés, sans modifier les missions et attributions des institutions représentatives du personnel .

1. La reprise des fonds de commerce

L' article 11 prévoit deux cas de figure pour informer les salariés de l'intention de céder une entreprise selon la taille du fonds de commerce.


• Le premier cas concerne les entreprises de moins de 50 salariés (articles L. 141-23 à L. 141-26 nouveaux du code de commerce).

Le projet de loi prévoit que la cession du fonds de commerce ne peut intervenir avant un délai de deux mois à compter de la notification de l'intention de vente du propriétaire. Ce délai a pour objectif de permettre à un ou plusieurs salariés de l'entreprise de présenter une offre d'achat.

Toutefois, cette information préalable n'est pas obligatoire :

- en cas de succession , de liquidation du régime matrimonial ou de cession du fonds à un conjoint , à un ascendant ou à un descendant ;

- pour les sociétés faisant l'objet d'une procédure de conciliation, de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire .

Si la cession n'est pas intervenue dans les deux ans suivant la notification de l'intention de vendre, la procédure d'information préalable des salariés doit être recommencée.

Si le propriétaire n'assure pas l'exploitation du fonds, il doit faire part de son intention de vendre l'entreprise à l'exploitant : dans ce cas, le délai de deux mois débute à partir de la notification par le propriétaire et l'exploitant du fonds doit porter sans délai à la connaissance des salariés la notification.

Mais si le propriétaire est en même temps l'exploitant du fonds, il doit notifier son intention de vendre et informer l'ensemble des salariés, et le délai court à partir de la dernière notification des salariés.

L'information des salariés peut être effectuée selon tout moyen , notamment par voie d'affichage sur le lieu de travail. En contrepartie, les salariés sont tenus à une obligation de discrétion à l'égard des informations communiquées.

Ce délai de deux mois n'est cependant pas intangible . En effet, la cession peut intervenir si les salariés se sont unanimement prononcés pour ne pas présenter d'offre d'achat.

Toute cession intervenue en méconnaissance de ces nouvelles règles de consultation et d'information des salariés encourt l' annulation devant la juridiction civile ou commerciale compétente, à condition que la requête soit présentée par des salariés dans un délai de deux mois à compter de la date de publication de l'avis de cession du fonds.


• Le second cas de figure concerne les entreprises employant entre 50 et 249 salariés (articles L. 141-23 à L. 141-30 nouveaux du code de commerce). Les modalités de l'information préalable des salariés sont très proches de celles prévues pour les entreprises de moins de 50 salariés.

Quelques points méritent toutefois d'être soulignés.

Tout d'abord, le texte ne prévoit pas de délai de deux mois , mais évoque seulement une information anticipée compte tenu de l'existence du comité d'entreprise . L'exploitant du fond doit porter à la connaissance des salariés la notification d'intention de cession et indiquer qu'ils peuvent présenter une offre, parallèlement à l'information et à la consultation du comité d'entreprise prévue à l'article L. 2323-19 du code du travail 6 ( * ) .

Ensuite, le délai de deux ans pendant lequel l'employeur n'est pas tenu d'informer à nouveau les salariés d'un projet de cession est suspendu en cas de nouvelle consultation du comité d'entreprise sur ce projet.

Enfin, l'obligation d'information anticipée des salariés ne s'applique pas aux sociétés qui dépassent, à la clôture d'un exercice social, les seuils européens définissant les petites et moyennes entreprises 7 ( * ) .

2. La cession de la majorité du capital des entreprises

L' article 12 du projet de loi encourage les offres de rachat, présentées par les salariés, des parts sociales ou actions ou valeurs mobilières donnant accès à la majorité du capital des sociétés , en distinguant là encore les entreprises employant moins de 50 salariés et celles occupant entre 50 et 249 salariés.

Les dispositifs prévus par l'article 12 sont similaires à ceux exposés précédemment à l'article 11.

Une différence toutefois mérite d'être relevée s'agissant des sociétés soumises à une réglementation particulière . En effet, certaines sociétés d'exercice libéral (SEL) prévoient qu'une partie du capital doit obligatoirement être détenue par un associé exerçant la profession en question (médecin, avocat, notaire, expert-comptable par exemple). C'est pourquoi les articles L. 240-3 et L. 240-9 du code de commerce adaptent les règles en matière d'information préalable des salariés aux spécificités de ces sociétés, en exigeant que les associés ou actionnaires répondent à des conditions en termes notamment de qualification professionnelle.


* 6 Pour mémoire, cet article indique notamment que le comité d'entreprise est informé et consulté sur les modifications de l'organisation économique ou juridique de l'entreprise, notamment en cas de fusion, de cession, de modification importante des structures de production de l'entreprise, d'acquisition ou de cession de filiales. L'employeur doit alors indiquer les motifs des modifications projetées et consulter le comité d'entreprise sur les mesures envisagées à l'égard des salariés lorsque ces modifications comportent des conséquences pour ces derniers.

* 7 Le projet de loi évoque les seuils prévus à l'article 2 de l'annexe à la recommandation 2003-361-CE de la commission du 6 mai 2003, concernant la définition des micro, petites et moyennes entreprises. Selon ce texte, la catégorie des micro, petites et moyennes entreprises (PME) est constituée des entreprises qui occupent moins de 250 personnes et dont le chiffre d'affaires annuel n'excède pas 50 millions d'euros (ou dont le total du bilan annuel n'excède pas 43 millions d'euros).

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