B. LE PROJET DE LOI CONSACRE L'EXISTENCE DE CES COOPÉRATIVES

L'article 32 du projet de loi consacre l'existence des CAE au sein de la loi n° 47-1775 du 10 septembre 1947 portant statut de la coopération.

Cet article prévoit que l'objet principal des coopératives d'activités et d'emploi est l'appui à la création et au développement d'activités économiques par des entrepreneurs personnes physiques.

Ces coopératives mettent en oeuvre un accompagnement individualisé des personnes physiques et des services mutualisés.

Les statuts de ces structures doivent par conséquent déterminer les moyens mis en commun par la coopérative et les modalités de rémunération de ces personnes, dans les conditions prévues par un décret en Conseil d'Etat.

C. LE CADRE JURIDIQUE DU CONTRAT DES ENTREPRENEURS SALARIÉS ASSOCIÉS DOIT ETRE SÉCURISÉ

Il s'est avéré que les critères classiques du contrat de travail ne convenaient pas aux spécificités des entrepreneurs dans les coopératives d'activité et d'emploi, compte tenu de l'absence de lien de subordination, et des modalités de calcul de la rémunération fondée sur le chiffre d'affaires réalisé par l'entrepreneur.

Selon les informations fournies par le Gouvernement à votre rapporteure pour avis, quelques contentieux récents risquent de fragiliser le développement des coopératives d'activité et d'emploi. Ainsi, dans un arrêt du 18 octobre 2012, le tribunal correctionnel de Nantes a condamné une CAE pour travail dissimulé, car le temps de travail prévu dans le contrat de travail de l'entrepreneur ne correspondait pas au temps de travail effectif.

Les contentieux sont pour l'instant rares, en partie grâce à une forme de compréhension des différents corps de contrôle qui tiennent compte de la dimension sociale des CAE, mais ils plaident pour une sécurisation juridique du contrat des entrepreneurs.

Créer un contrat spécifique pour les entrepreneurs salariés des CAE, reprenant l'essentiel des dispositions protectrices du code du travail, sans le confondre avec un contrat de travail de droit commun : tel est l'objectif de l'article 33 du projet de loi.

L' article 33 comporte deux volets. D'une part, il introduit un nouveau titre III « entrepreneurs associés d'une coopérative d'activité et d'emploi », composé de dix articles, dans le livre III, de la septième partie du code du travail. D'autre, part il modifie le code de la sécurité sociale pour rendre obligatoire l'affiliation aux assurances sociales des entrepreneurs associés.

1. Les dispositions du code du travail

Le nouveau titre III comporte deux chapitres : le premier fixe les dispositions générales (deux articles), le second détermine la mise en oeuvre des dispositions relatives aux entrepreneurs associés (huit articles).

• Le chapitre I er comprend les articles L. 7331-1 et L. 7331-2.

L'article L. 7331-1 pose comme principe général que les dispositions du code du travail s'appliquent aux entrepreneurs salariés associés d'une coopérative d'activité et d'emploi, sous réserve des dispositions particulières du nouveau titre III. Ce principe d'assimilation est fondamental , puisque toutes les dispositions du code du travail s'appliqueront au contrat des entrepreneurs salariés associés, sauf disposition contraire expresse.

L'article L. 7331-2 du code du travail prévoit qu'un entrepreneur associé de coopérative d'activité et d'emploi doit remplir deux conditions :

- première condition : il doit créer et développer une activité économique en bénéficiant des services individuels et collectifs mis en oeuvre par une coopérative d'activité ;

- seconde condition : il doit conclure un contrat écrit et précis avec cette coopérative.

Pour remplir la première condition , deux possibilités sont ouvertes :

- soit l'individu est déjà associé de la coopérative ;

- soit il le devient dans un délai maximum de trente-six mois à compter de la conclusion de son contrat avec la coopérative. Cette durée de trente-six mois est minorée, le cas échéant, de la durée du Cape (voir supra ) préalablement conclu avec la coopérative, ou de la durée de tout autre contrat le liant à celle-ci.

Quant à la seconde condition liée au contrat entre l'entrepreneur et la coopérative, le projet de loi prévoit qu'il doit comprendre les six items suivants :

- les objectifs à atteindre et les obligations d'activité minimale de l'entrepreneur salarié associé ;

- les moyens mis en oeuvre par la coopérative pour appuyer et contrôler l'activité économique de l'entrepreneur salarié associé ;

- le montant de la contribution de l'entrepreneur salarié associé au financement des services mutualisés mis en oeuvre par la coopérative dans les conditions prévues par les statuts de celle-ci ;

- les modalités de calcul et le montant de la rémunération de l'entrepreneur salarié associé, par application des dispositions de l'article L. 7332-4 ;

- la mention des statuts en vigueur de la coopérative ;

- les conditions dans lesquelles sont garantis à l'entrepreneur salarié associé ses droits sur la clientèle apportée, créée et développée par lui, ainsi que ses droits de propriété intellectuelle .

• Le chapitre II comprend huit articles, consacrés à la mise en oeuvre du contrat liant l'entrepreneur associé à la coopérative d'activité et d'emploi.

L'article L. 7332-1 autorise l'employeur à fixer dans le contrat une période d'essai dont la durée maximale, renouvellement compris, ne peut excéder huit mois.

Toutefois, lorsque les parties ont préalablement conclu un Cape pour la création ou la reprise d'une activité économique, ou tout autre contrat, la durée de ces contrats est prise en compte pour le calcul de cette durée de huit mois.

L'article L. 7332-2 prévoit que la coopérative doit appliquer les dispositions relatives à la durée du travail , aux repos et aux congés d'une part, à la santé et à la sécurité au travail d'autre part, que si elle a elle-même fixé les conditions de travail, de santé et de sécurité au travail ou les a acceptées.

Le projet de loi prévoit que dans tous les cas, les entrepreneurs associés bénéficient de tous les avantages accordés aux salariés par la législation sociale, notamment en matière de congés payés.

L'article L. 7332-3 , par coordination avec ce qui est prévu pour le Cape, prévoit que les dispositions du titre II du livre IV de la cinquième partie du code du travail en faveur des travailleurs privés d'emploi sont applicables aux entrepreneurs associés d'une coopérative d'activité et d'emploi. Ainsi, les entrepreneurs associés bénéficient des mêmes droits que les autres salariés en matière d' indemnisation chômage .

La rémunération de l'entrepreneur associé est définie à l'article L. 7332-4 . Elle est fonction du chiffre d'affaires de son activité, après déduction des charges d'exploitation directement et exclusivement liées à son activité et de la contribution qu'il acquitte auprès de la coopérative.

La coopérative met à la disposition de l'entrepreneur un état des comptes faisant apparaître le détail des charges et des produits liés à son activité. Il s'agit là d'un changement substantiel par rapport à l'avant-projet envoyé pour avis au Conseil d'Etat, qui prévoyait que c'était l'entrepreneur qui devait faire la démarche de demander l'état des comptes.

Les modalités de calcul et de versement de la rémunération à l'entrepreneur et de déclaration auprès des organismes sociaux sont précisées par un décret en Conseil d'Etat.

En vertu de l'article L. 7332-5 , les entrepreneurs associés bénéficient également de la garantie des rémunérations en cas de sauvegarde, de redressement ou de liquidation judiciaire pour les rémunérations de toute nature dues au titre des quatre-vingt-dix derniers jours de travail .

La coopérative d'activité et d'emploi est responsable, conformément aux dispositions de l'article L. 7332-6 , des engagements pris à l'égard des tiers dans le cadre de l'activité économique développée par l'entrepreneur associé. Selon les informations fournies du Gouvernement, dès lors que les contrats sont conclus au nom de la coopérative, elle seule est engagée juridiquement sur le plan civil à l'égard des tiers. C'est une responsabilité civile, contractuelle, qui n'exclut pas la responsabilité délictuelle et pénale de l'entrepreneur.

L'article L. 7332-7 prévoit que le régime dont bénéficie l'entrepreneur cesse de produire ses effets à défaut pour lui de devenir associé de la coopérative d'activité et d'emploi dans le délai de trente-six mois. La cessation du régime intervient à l'expiration de ce délai.

L'article L. 7332-8 prévoit que le conseil de prud'hommes est seul compétent pour connaître des litiges relatifs aux conditions de travail de l'entrepreneur associé d'une coopérative d'activité et d'emploi. En outre, cet article prévoit la nullité de toute clause attributive de juridiction incluse dans un contrat conclu entre un entrepreneur associé et une coopérative d'activité et d'emploi.

2. Les dispositions du code de la sécurité sociale

L'article L. 311-2 du code de la sécurité pose comme principe général que toutes les personnes salariées ou travaillant à quelque titre que ce soit pour un ou plusieurs employeurs doivent être affiliées aux assurances sociales du régime général.

L'article L. 311-3 du code de la sécurité sociale précise la liste des professions particulières concernées par cette obligation générale d'affiliation . Ainsi, pas moins de trente et une professions sont mentionnées, allant des travailleurs à domicile et des voyageurs et représentants de commerce, en passant par les administrateurs des groupements mutualistes et les présidents des sociétés coopératives de banque.

Le projet de loi vise à compléter cette liste en y incluant les entrepreneurs salariés associés d'une coopérative d'activité et d'emploi.

Par ailleurs, le projet de loi étend aux entrepreneurs associés la législation relative aux accidents du travail et aux maladies professionnelles, prévue aux articles L. 411-1 et suivants du code de la sécurité sociale, en complétant et actualisant l'article L. 412-8. Le Gouvernement pourra ainsi, s'il le souhaite, adapter par décret les règles qui en découlent aux entrepreneurs salariés associés.

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