Avis n° 152 (2012-2013) de M. David ASSOULINE , fait au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, déposé le 22 novembre 2012

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N° 152

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2012-2013

Enregistré à la Présidence du Sénat le 22 novembre 2012

AVIS

PRÉSENTÉ

au nom de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication (1) sur le projet de loi de finances pour 2013 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE ,

TOME IV

Fascicule 1

MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES : AUDIOVISUEL ET PRESSE

Par M. David ASSOULINE,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : Mme Marie-Christine Blandin , présidente ; MM. Jean-Étienne Antoinette, David Assouline, Mme Françoise Cartron, M. Ambroise Dupont, Mme Brigitte Gonthier-Maurin, M. Jacques Legendre, Mmes Colette Mélot, Catherine Morin-Desailly, M. Jean-Pierre Plancade , vice-présidents ; Mme Maryvonne Blondin, M. Louis Duvernois, Mme Claudine Lepage, M. Pierre Martin, Mme Sophie Primas , secrétaires ; MM. Serge Andreoni, Maurice Antiste, Dominique Bailly, Pierre Bordier, Mme Corinne Bouchoux, MM. Jean Boyer, Jean-Claude Carle, Jean-Pierre Chauveau, Jacques Chiron, Claude Domeizel, Mme Marie-Annick Duchêne, MM. Alain Dufaut, Jean-Léonce Dupont, Vincent Eblé, Mmes Jacqueline Farreyrol, Françoise Férat, MM. Gaston Flosse, Bernard Fournier, André Gattolin, Jean-Claude Gaudin, Mmes Dominique Gillot, Sylvie Goy-Chavent, MM. François Grosdidier, Jean-François Humbert, Mmes Bariza Khiari, Françoise Laborde, M. Pierre Laurent, Mme Françoise Laurent-Perrigot, MM. Jean-Pierre Leleux, Michel Le Scouarnec, Jean-Jacques Lozach, Philippe Madrelle, Jacques-Bernard Magner, Mme Danielle Michel, MM. Philippe Nachbar, Daniel Percheron, Marcel Rainaud, Michel Savin, Abdourahamane Soilihi, Alex Türk, Hilarion Vendegou, Maurice Vincent.

Voir les numéros :

Assemblée nationale ( 14 ème législ.) : 235 , 251 à 258 et T.A. 38

Sénat : 147 et 148 (annexe n° 18 ) (2012-2013)

INTRODUCTION

Mesdames, Messieurs,

Dès 2009, votre rapporteur pour avis avait annoncé :

- que la suppression de la publicité sur France Télévisions était irresponsable du point de vue financier et que son budget en serait affecté au premier coup de grisou économique. Le budget 2012 de la mission « Médias » avait été un élément de preuve, même si le précédent Gouvernement avait préféré le creusement du déficit plutôt que d'assumer ses choix. Le budget 2013, qui est un budget de responsabilité, confirme malheureusement ce sentiment ;

- que cette réforme n'aurait aucun impact sur la qualité des programmes . A cet égard, le rapport 1 ( * ) qu'il a produit avec M. Jacques Legendre démontre l'absence d'effet positif de la réforme ;

- que la mise en place trop rapide de l'entreprise unique aurait des effets néfastes sur le groupe . De facto , les fameuses « synergies » n'ont eu d'existence que dans les rapports commandés par le Gouvernement, sans que la Cour des comptes n'ait pu faire état d'un seul effet positif. Ce n'est probablement pas en 2013 que l'on pourra constater les premiers, même si l'actuel Gouvernement est déterminé à tirer bénéfice d'une fusion qu'il n'a pas préconisée ;

- et que la création de taxes afin de financer la réforme était juridiquement hasardeuse , l'outil de financement de France Télévisions étant la redevance (devenue contribution à l'audiovisuel public). Le présent budget qui s'adosse à une contribution revalorisée confirme cette idée.

Votre rapporteur pour avis ne tire aucune satisfaction d'avoir été clairvoyant sur ces points car il ne peut que déplorer que les effets négatifs de la réforme n'aient pas été mieux anticipés.

Le Gouvernement a dû en tenir compte mais s'est saisi du problème en adoptant une attitude responsable.

Le choix du Gouvernement est simple , c'est celui de la réduction du déficit avec, en parallèle à une augmentation de la contribution à l'audiovisuel public (CAP) une baisse de 42 % de la dotation budgétaire à l'audiovisuel public, qui passe de 603 millions d'euros en 2012 à 434,7 millions d'euros dans le présent projet de loi de finances (PLF).

Conscient du rôle et de l'importance de notre audiovisuel dans la politique culturelle française, il a en revanche mis l'accent sur sa ressource naturelle qu'est la contribution à l'audiovisuel public . Avec son indexation et la majoration de 2 euros de son montant, prévue à l'article 39, son produit serait de 3 397,7 millions d'euros en 2013, contre 3 290,4 millions d'euros en 2012.

Au total, ce sont donc 3 832,5 millions d'euros qui devraient être consacrés à l'audiovisuel public en 2013 , contre 3 909,7 millions d'euros en 2012, soit une baisse de seulement 2 %, à hauteur de 77,2 millions d'euros.

La question qui se pose donc est celle de savoir si cette diminution de crédits peut être prise en charge sans heurts, ni baisse de la qualité de la programmation de notre service public.

Le Gouvernement a fait participer tout le monde à l'effort de redressement des finances publiques en faisant attention à ne pas déstabiliser les entités de l'audiovisuel public dont des baisses de crédits sensibles pourraient fragiliser les missions ou l'existence. Ainsi :

- ARTE-France, dans une période de relance éditoriale, voit ses crédits stagner en euros courants ;

- le groupe Radio France, en dépit des charges d'investissement qu'il supporte, devra lui aussi composer avec une dotation reconduite au même niveau ;

- l'Institut national de l'audiovisuel (INA), qui connaît une baisse des ressources propres, devrait pouvoir continuer à exercer ses missions avec une dotation stable ;

- le fonds d'expression radiophonique locale, qui assure une mission fondamentale pour la diversité de notre paysage radiophonique, voit ses montants stagner une année de plus ;

- enfin l'audiovisuel extérieur de la France bénéficie d'une très légère hausse des crédits, dans un contexte où l'entreprise a été profondément bouleversée, et où l'exercice 2013 relèvera de toute façon de l'équilibrisme budgétaire.

Mais c'est bien France Télévisions, le plus gros contributeur au redressement des finances publiques, qui paie le prix de la réforme de 2009 . Le groupe subit ainsi une baisse de 3,2 % des crédits par rapport à 2012, soit 80 millions d'euros.

Avec une baisse de recettes publicitaires évaluée à 67 millions d'euros, l'effort à produire pour 2013 serait ainsi une diminution de 5 % des dépenses.

Votre rapporteur pour avis estime que France Télévisions est probablement le groupe de l'audiovisuel public le plus capable de diminuer ses dépenses, notamment en raison de son volume d'activités et de financement. Il n'en reste pas moins qu'une telle baisse entraînera à n'en pas douter un très fort déséquilibre du budget 2013 et une démotivation subséquente des personnels.

L'ambition de votre rapporteur pour avis est donc de lisser l'effort budgétaire de France Télévisions sur plusieurs années via un coup de pouce sur la redevance (+ 2 euros sur le territoire métropolitain, + 1 euro en outre-mer), qui permettrait d'augmenter la dotation de 50 millions d'euros et de réduire l'effort à accomplir de 80 à 30 millions d'euros d'économies .

C'est la raison pour laquelle il a proposé un amendement de cette nature à la commission, qui l'a adopté très largement.

Il reste que, dans l'année qui vient et avant le prochain débat budgétaire, des discussions et des décisions pour un financement stable et pérenne de l'audiovisuel public devront inévitablement être engagées.

En ce qui concerne les crédits consacrés à la presse , le soutien public en faveur du secteur se maintient à un niveau relativement stable avoisinant le milliard d'euros si l'on tient compte des aides fiscales indirectes. Les aides publiques directes hors abonnements à l'AFP, d'un montant de 396 millions d'euros, diminuent par rapport à leur niveau de 2012 en raison d'ajustements budgétaires nécessaires dans un contexte contraint et de l'extinction d'un certain nombre de dispositifs. Pour autant, les aides au pluralisme, bénéficiant aux journaux d'opinion à faibles ressources publicitaires, sont rigoureusement préservées.

Votre rapporteur pour avis invite les représentants de l'État et de l'ensemble des familles de presse à se concerter sur une réforme des aides à la presse, en étudiant les modalités d'un ciblage en faveur de la presse d'information politique et générale. Qu'il s'agisse de l'aide au transport postal ou du taux de TVA super-réduit de 2,1 %, ces avantages bénéficient de façon disproportionnée à un nombre important de publications consacrées au divertissement et aux loisirs. N'ayons pas peur de remettre le système tout entier à plat et de conditionner le soutien public à la réalisation de missions d'intérêt général.

Poursuivons inlassablement notre intervention auprès des institutions européennes pour réclamer une fiscalité neutre quelque soit le support de diffusion : les rédactions bi- ou multimédias se généralisent, plusieurs titres célèbres ont basculé vers le tout numérique. Dans ces conditions, l'application d'un taux de TVA de 19,6 % aux services de presse en ligne est devenue un non-sens économique et philosophique . Cette question, primordiale pour l'essor de la presse en ligne et la conversion de nombreux titres au numérique, doit faire l'objet de négociations appuyées auprès de la Commission européenne et de nos partenaires européens, mettant en avant l'intérêt général qu'il y aurait à achever la neutralité fiscale pour l'ensemble des biens et services culturels en Europe.

Il nous faudra également poser la question de l'opportunité, au regard de l'indépendance des médias, de verser des liquidités aussi importantes à la presse. Il convient de garder à l'esprit que la fiscalité modulée en fonction des contenus, d'application neutre, peut constituer un mode d'intervention peut-être plus compatible avec le respect de l'indépendance de la presse, car elle ne contraint pas l'État à opérer une sélection subjective, en préférant certains titres à d'autres au sein d'une même famille.

Enfin, ce qui concerne la distribution de la presse , la réforme adoptée à l'initiative du Sénat l'été dernier porte ses fruits : le Conseil supérieur des messageries de presse et l'Autorité de régulation de la distribution de la presse ont travaillé main dans la main pour répondre au plus urgent. Des décisions fondamentales ont été prises pour préserver les équilibres coopératifs du système, notamment le délai de préavis de retrait d'un titre d'une coopérative ou la péréquation inter coopératives.

PREMIÈRE PARTIE : AUDIOVISUEL

I. LES CRÉDITS CONSACRÉS À L'AUDIOVISUEL DANS LE BUDGET DE L'ÉTAT

Votre rapporteur pour avis n'est pas saisi de l'ensemble des crédits relatifs à l'audiovisuel, puisqu'il ne commente pas les crédits du Conseil supérieur de l'audiovisuel, de Canal France International ou encore d'Unifrance, mais seulement ceux inscrits dans les missions « Médias » et « Avances à l'audiovisuel public ».

A. LA MISSION « MÉDIAS, LIVRE ET INDUSTRIES CULTURELLES »

La mission « Médias, livre et industries culturelles » regroupe les crédits consacrés à la presse (516 millions d'euros dans le PLF 2013), au livre et à la lecture (255,5 millions d'euros), aux industries culturelles (12,5 millions d'euros), à France Télévisions (256,4 millions d'euros), au soutien à l'expression radiophonique locale (29 millions d'euros) et à l'action audiovisuelle extérieure (149,4 millions d'euros).

Source : Commission de la culture et de la communication

Les crédits budgétaires consacrés à la politique en faveur de l'audiovisuel s'établissent globalement à 434,7 millions d'euros dans le PLF 2013 contre 590,3 millions d'euros en 2012 2 ( * ) , soit une baisse de 35,8 %.

On assiste donc à une baisse des crédits de la mission consacrés à l'audiovisuel , liée notamment à l'augmentation du produit de la contribution à l'audiovisuel public (CAP), qui a permis de financer davantage France Télévisions par la mission « Avances à l'audiovisuel public » , que via la mission « Médias ».

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Sur le plan de la présentation budgétaire, les crédits de la mission sont retracés dans deux programmes :

- le programme 313 « Contribution à l'audiovisuel et à la diversité radiophonique » qui retrace les sommes destinées à France Télévisions (action n° 1 « France Télévisions »), qui contient l'action n° 2 « Passage à la télévision tout numérique », laquelle n'est plus abondée 3 ( * ) , et la dotation au fonds de soutien à l'expression radiophonique locale (action n° 3 « Soutien à l'expression radiophonique locale ») ;

- et le programme 115 « Action audiovisuelle extérieure » qui comprend une partie des crédits alloués à la société AEF, ainsi que la subvention versée par la France à la radio franco-marocaine Médi 1 via la Compagnie internationale de radio et de télévision (CIRT).

B. LA MISSION « AVANCES À L'AUDIOVISUEL PUBLIC »

1. Les effets de la contribution à l'audiovisuel public
a) Le produit de la CAP en 2013

Le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public », qui constitue la mission éponyme, retrace en recettes, d'une part, les remboursements d'avances correspondant au produit de la contribution à l'audiovisuel public , déduction faite des frais d'assiette et de recouvrement et du montant des intérêts sur les avances, et d'autre part, le montant des dégrèvements de contribution à l'audiovisuel public pris en charge sur le budget de l'État.

La contribution à l'audiovisuel public (CAP), notamment grâce à l'intervention du Parlement, est au coeur du financement des médias audiovisuels français du secteur public puisqu'elle représente 84,1 % de leur financement .

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Le montant total des recettes de la CAP prévues pour 2013 s'élève à 3 397,7 millions d'euros TTC contre 3 290 millions d'euros en LFI 2012, dont 2 861,9 millions d'euros au titre des encaissements nets (contre 2 764 millions d'euros en LFI 2012) et 535,8 millions d'euros au titre de la prise en charge des dégrèvements (contre 526 millions d'euros en LFI 2012).

Le tableau ci-après récapitule le nombre de redevables particuliers en métropole et en outre-mer, les encaissements bruts et nets de contribution à l'audiovisuel public, la compensation pour dégrèvement et les dotations aux organismes publics de l'audiovisuel.

En millions d'euros

2011 (réalisé)

2012 (prévisions)

2013 (prévisions)

Nombre de redevables (distinguer Métropole et Dom)

26,32

26,55

26,77

Encaissements bruts de redevance

2 731

2 786

2 906

Frais d'assiette et de recouvrement

23

28

28

Coûts de trésorerie

8

16

16

Encaissements nets de redevance

2 700

2 742

2 862

Compensation pour dégrèvement

522

548

536

Dotations aux organismes publics

3 222

3 290

3 398

Source : Réponses au questionnaire budgétaire

La hausse du produit de la CAP est liée :

- à l'augmentation du nombre de redevables qui s'explique par l'évolution naturelle de l'assiette ;

- et à l'augmentation du montant de la contribution à l'audiovisuel public. En 2012, il était fixé, après indexation, à 125 euros en métropole et 80 euros en outre-mer. La simple indexation de la contribution à l'audiovisuel public, prévue par la loi, aurait conduit à l'établissement d'un montant de redevance à hauteur de 127 euros et 81 euros dans les territoires d'outre-mer. Mais l'article 39 du présent PLF prévoit d'augmenter la contribution à l'audiovisuel public (CAP) de 2 euros, la portant ainsi, avant indexation, à 127 euros en France métropolitaine et à 82 euros dans les départements d'outre-mer .

Compte tenu de l'indexation sur l'indice des prix à la consommation hors tabac prévue par le présent projet de loi de finances (1,75 %), ces montants s'élèveraient donc en 2013 à 129 euros en France métropolitaine et à 83 euros dans les départements d'outre-mer.

Le présent rapport s'attachera notamment à déterminer si cette majoration du montant de la CAP permet de garantir, comme l'indique l'exposé des motifs de l'article 39 précité, « l'accomplissement des missions de service public dévolues aux organismes audiovisuels publics ».

Votre commission a considéré (voir infra ), que ces missions ne pourrait être pleinement accomplies qu'avec un soutien à hauteur de 50 millions d'euros, certes relatif, mais qui permettra au groupe France Télévisions de franchir le cap de l'entreprise unique et d'exercer ses missions dans des conditions soutenables.

b) Les dégrèvements de CAP

Un dispositif de dégrèvement de la contribution à l'audiovisuel public a été instauré en 2005 en faveur des personnes âgées, lors de l'adossement de la redevance audiovisuelle à la taxe d'habitation. Ce dégrèvement bénéficie aux personnes âgées de plus de 65 ans au 1 er janvier 2004, sous condition de ressources et de cohabitation, afin que ces personnes, jusqu'alors exonérées de redevance, n'y deviennent pas assujetties à la suite de la réforme. Ce dispositif, initialement mis en place pour les années 2005 à 2007, a été successivement prorogé en 2008, 2009, 2010, 2011 et 2012. L'article 41 du présent projet de loi de finances, tel que modifié par l'Assemblée nationale, propose de proroger définitivement ce régime dit des « droits acquis » qui concerne :

- des personnes âgées de plus de 65 ans au 1 er janvier 2004, non imposables à l'impôt sur le revenu (IR) sur leurs revenus de 2002, non assujetties à l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) en 2002, qui satisfaisaient en 2004 à la condition de cohabitation prévue à l'article 1390 du code général des impôts (CGI) mais ayant un revenu fiscal de référence supérieur au seuil fixé par l'article 1417 I du CGI ;

- et des foyers dont l'un des membres est handicapé, sous certaines conditions.

Le « stock » des droits acquis n'a cessé de diminuer depuis 2005 à un rythme moyen de décroissance de 13 % par an. Ces deux dernières années, la diminution moyenne a été de 10 % par an.

Par ailleurs, sont dégrevées de contribution à l'audiovisuel public les personnes exonérées ou totalement dégrevées de taxe d'habitation qui remplissent certaines conditions de revenus et de cohabitation . Il s'agit des personnes titulaires de l'allocation supplémentaire visée aux articles L. 815-1 et L. 815-24 du code de la sécurité sociale, des contribuables atteints d'une infirmité ou d'une invalidité les empêchant de subvenir par leur travail aux nécessités de l'existence, des bénéficiaires de l'allocation aux adultes handicapées ; des personnes âgées de plus de 60 ans, des personnes veuves et des redevables occupant dans les départements d'outre-mer à titre d'habitation principale un local dont la valeur locative moyenne n'excède pas 40 % (50 % sur délibération de la commune) de la valeur locative moyenne des locaux d'habitation de la commune. Ces dégrèvements ont concerné 3,3 millions de personnes en 2010, pour un coût pour l'État de plus de 400 millions d'euros.

L'article 12 de la loi n° 2008-1249 du 1 er décembre 2008 généralisant le revenu de solidarité active (RSA) et réformant les politiques d'insertion a, quant à lui, instauré, à compter de 2010, un dégrèvement de contribution à l'audiovisuel public pour tous les foyers dont le revenu fiscal de référence est nul, sans distinction de statut (foyers ayant pour seules ressources les minima sociaux non imposables).

Redevables dégrevés de taxe d'habitation et de contribution à l'audiovisuel public

2008

2009

2010

2011

2012
(estimations)

Titulaires de l'allocation supplémentaire

63 688

58 778

54 018

49 316

49 150

Titulaires de l'AAH

332 255

349 638

368 838

389 242

387 929

Contribuables âgés de plus de 60 ans

2 567 279

2 664 104

2 618 002

2 615 529

2 606 705

Infirmes et invalides

136 360

135 304

129 984

125 906

125 481

Veufs et veuves

100 956

117 920

116 729

113 217

112 835

Redevables exonérés dans les départements d'outre-mer

38 121

36 947

36 008

35 518

35 518

Total

3 328 659

3 362 691

3 323 579

3 328 728

3 317 617

Redevables dégrevés de redevance au titre des droits acquis

Personnes âgées de plus de 65 ans, non imposables à l'impôt sur le revenu et à l'impôt de solidarité sur la fortune, mais ayant un revenu fiscal de référence supérieur à 7 165 € pour la première part de quotient familial en 2004

650 226

546 835

507 462

441 506

397 355

Foyer dont l'un des membres est handicapé mais pas le redevable de la taxe d'habitation

18 096

17 067

14 445

12 172

10 955

Total

668 322

563 902

521 907

453 678

408 310

Total

3 996 981

3 926 593

3 845 486

3 782 406

3 725 927

Source : Réponses au questionnaire budgétaire

En 2012, l'estimation des exonérations liées aux « droits acquis » s'élève à 51 millions d'euros , selon l'hypothèse d'une baisse du nombre de redevables exonérés de 10 % par rapport à 2011 et du taux de contribution applicable en 2012.

C'est la mission « Remboursements et dégrèvements » du budget général de l'État qui prend financièrement en charge ces exonérations, en compensant à l'euro près, jusqu'à un certain plafond, le compte de concours financier qui retrace les recettes de la contribution à l'audiovisuel public. Le budget de l'audiovisuel public n'est donc généralement pas impacté par ces exonérations.

En 2013, le coût pour l'État est estimé à 47 millions d'euros. Il prend en compte une poursuite de la baisse du nombre de foyers bénéficiant de ce dégrèvement (- 10 %).

MONTANT DES COMPENSATIONS DE DÉGRÈVEMENTS DE 2005 À 2011

en millions d'euros

2005

2006

2007

2008

2009

2010

2011

Montants LFI

440,0

440,0

509,0

545,7

561,7

561,8

569,8

Montants effectivement versés

469,8

505,1

445,5

520,9

538,8

564,1

522,0

Source : Réponses au questionnaire budgétaire

La ligne « montants LFI » correspond aux plafonds votés en LFI, égaux aux prévisions en PLF du montant des dégrèvements. La ligne « montants effectivement versés » correspond aux crédits de la mission « Remboursements et Dégrèvements » versés en gestion sur le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».

c) La compensation des dégrèvements de CAP : un effet neutre pour l'audiovisuel public

Votre rapporteur pour avis rappelle que les dégrèvements de CAP sont normalement intégralement pris en charge par le budget général de l'État .

À l'occasion de la création du compte (par l'article 46 de la loi n° 2005-1719 du 30 décembre 2005 de finances pour 2006), un plafond annuel a cependant été fixé afin de limiter le montant des dégrèvements de contribution à l'audiovisuel public pris en charge par le budget général (à 440 millions d'euros en LFI 2006, 509 millions d'euros en LFI 2007, 493 en LFI 2008, 488 millions d'euros en 2009, 561,8 millions d'euros en LFI 2010, 569,8 millions d'euros en LFI 2011 , 526,4 millions d'euros en LFI 2012 et 535,8 millions d'euros en PLF 2013 4 ( * ) ).

Il faut en effet rappeler que les crédits consacrés à la prise en charge par l'État du coût des dispositifs d'exonération de redevance étaient auparavant inscrits au chapitre 46-01 du budget des services généraux du Premier ministre, et qu'il s'agissait donc de crédits limitatifs, permettant d'assurer une maîtrise et une visibilité de l'évolution du coût de ces dispositifs pour l'État. La modification du régime de la redevance impliquant la transformation des exonérations en dégrèvements, qui constituent par nature des crédits évaluatifs, l'État a souhaité maîtriser le niveau des moyens qu'il consacre à l'audiovisuel public et garantir leur prévisibilité (en évitant tout risque de dérive incontrôlable du coût des dégrèvements liée à la réforme de la redevance) par la définition d'un plafond de prise en charge de ces dégrèvements .

En contrepartie du plafonnement de la prise en charge par l'État des dégrèvements de redevance, l'article 55 de la loi de finances pour 2005 a institué un mécanisme qui garantit la ressource publique des organismes du service public de l'audiovisuel : si les encaissements de redevance sont inférieurs au montant inscrit en loi de finances initiale, cette garantie-plancher prévoit que le budget général compense à due concurrence ce manque à gagner par une majoration du plafond des dégrèvements pris en charge par l'État. Là encore, les dégrèvements jouent un rôle de variable d'ajustement, mais cette fois-ci en faveur de l'audiovisuel public, qui se voit garantir un minimum de contribution à l'audiovisuel public, même si celle-ci est moins dynamique que prévu. Ce mécanisme, présenté en 2005 comme provisoire et destiné à protéger les ressources des aléas de la transition de l'ancien vers le nouveau régime, a été reconduit de 2006 à 2012 et mis en oeuvre - selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis -en 2005 et 2006, années au cours desquelles l'application de la garantie a provoqué des réévaluations du plafond.

Ce mécanisme de garantie des ressources, pour la première fois présenté de manière claire par le Gouvernement dans le présent projet de loi de finances est sécurisant pour l'audiovisuel public et spécifique au secteur. Il a été activé en 2005, 2006 et 2010, pour des montants respectifs de 29,6 millions d'euros, 65,1 millions d'euros et 2,3 millions d'euros.

Il pourrait être mis en oeuvre en 2012 à hauteur de 22 millions d'euros selon les informations fournies à votre rapporteur pour avis, du fait de la mauvaise estimation par le précédent Gouvernement de l'évolution de l'assiette des redevables.

Aux termes de l'article 40 du présent PLF, si les encaissements de contribution à l'audiovisuel public sont inférieurs à la prévision effectuée en loi de finances (2 861,9 millions d'euros), l'État prendra en charge une part plus importante des dégrèvements (au-delà des 535,8 millions d'euros prévus en PLF 2013) afin que les recettes nettes théoriques liées à la contribution à l'audiovisuel public correspondent aux ressources pour les organismes votées en loi de finances initiale (3 397,7 millions d'euros en PLF 2013).

2. La structuration des programmes

La mission « Avances à l'audiovisuel public » retrace, en dépenses, le montant des avances accordées aux différents organismes affectataires visés au I de l'article 1605 du code général des impôts, à savoir France Télévisions, ARTE-France, Radio France, la holding AEF et l'INA.

La mission comporte ainsi cinq programmes composés chacun d'une action unique :

- le programme 841 « France Télévisions » qui vise à financer le groupe audiovisuel et ses chaînes de service public : France 2, France 3, France 4, France 5 et Réseau France Outre-mer (RFO) ;

- le programme 842 « ARTE-France », qui retrace les dotations allouées au pôle français de la chaîne ARTE ;

- le programme 843 « Radio France » qui correspond au financement de la société Radio France qui produit et diffuse sept chaînes de radio généralistes, thématiques et de proximité : France Inter, France Info, France Culture, France Musique, France Bleu, Le Mouv' et FIP ;

- le programme 844 « Contribution au financement de l'action audiovisuelle extérieure » qui finance la société holding Audiovisuel Extérieur de la France, ses filiales chargées de missions de service public et TV5 Monde. Selon le projet annuel de performance, « les crédits du programme 844 destinés à AEF complètent ceux du programme 115 du budget général intitulé « Action audiovisuelle extérieure ». Votre rapporteur pour avis rappelle que c'est la loi du 5 mars 2009 qui a permis que les recettes issues de la contribution à l'audiovisuel public soient versées à la holding et non plus seulement à Radio France internationale qui était auparavant l'unique entité du groupe AEF pouvant être financée par la contribution à l'audiovisuel public. La fusion a définitivement entériné le principe ;

- et le programme 845 « Institut national de l'audiovisuel », qui constitue la dotation à l'INA dont la mission est d'assurer la conservation des archives audiovisuelles diffusées en France par les radios et les télévisions.

Les crédits attribués à ces organismes sont fixés à 3 397,7 millions d'euros TTC en PLF 2013 contre 3 290,4 millions d'euros TTC en 2012 (LFI et LFR), soit une hausse de 3,26 % .

C. SYNTHÈSE DES CRÉDITS EN FAVEUR DE L'AUDIOVISUEL

Les crédits en faveur des médias audiovisuels sont répartis de la façon suivante :

- la mission « Médias » du budget général regroupe 434,7 millions d'euros dans le PLF 2013 en faveur de France Télévisions, des radios locales et de la société de l'Action extérieure de la France ( holding AEF), contre 603 millions d'euros en 2012, qui s'explique principalement par la baisse des crédits budgétaires dédiés à France Télévisions. A cet égard, votre rapporteur pour avis constate que les médias audiovisuels participent de manière très importante à la politique de redressement budgétaire de la France, avec une baisse des crédits budgétaires de 168,3 millions d'euros ;

- et la mission « Avances à l'audiovisuel public » est dotée de 3 397,7 millions d'euros en faveur de France Télévisions, Radio France, ARTE-France, la holding AEF et l'Institut national de l'audiovisuel (INA), soit une hausse de 3,26 % par rapport à la LFI 2012 . La baisse des dotations budgétaires est ainsi en partie compensée par une augmentation de la recette dédiée à l'audiovisuel public.

Ce sont ainsi au total 3 832,5 millions d'euros qui seraient consacrés en 2013 à l'audiovisuel public et aux radios locales, contre 3 909,7 millions d'euros en 2012 (LFI et LFR), soit une baisse de 2 % par rapport à 2012 (- 77,2 millions d'euros).

Le tableau ci-après récapitule la répartition de ces crédits (en millions d'euros) :

Répartition entre les programmes

2012 (LFI et LFR)

PLF 2013 Crédits de paiement

Évolution (en %)

France Télévisions

Mission Médias, programme 313

441,9

256,4

- 42

CCF « Avances à l'audiovisuel public », programme 841

2 135,5 (TTC)

2091,6 (HT)

2 243,1 (TTC)

2197 (HT)

7,2

Total

2 577,4 5 ( * )

2 499,5

-3

ARTE-France

CCF « Avances à l'audiovisuel public », programme 842

268,1

268,4

0,1

Radio France

CCF « Avances à l'audiovisuel public », mission 843

625,2

624,6

0,1

AEF + Médi I

Mission « Médias », programme 115

148,4

149,4

+ 0,7

CCF « Avances à l'audiovisuel public », programme 844

169,2

169,2

stable

Total

317,6

318,6

0,3

INA

CCF « Avances à l'audiovisuel public », programme 845

92,4

92,4

stable

Expression radio-phonique locale

Mission « Médias », programme 313

29

29

stable

Total

Programmes 313 et 115 de la mission « Médias et industries culturelles » Compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public »

3 909,7

3 832,5

- 2 6 ( * )

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Votre rapporteur pour avis note que les médias audiovisuels dans leur ensemble participent à l'effort de redressement des finances publiques, mais que de fait, c'est le groupe France Télévisions qui supporte les véritables baisses de dotations.

Les ressources en faveur de l'audiovisuel public stricto sensu (sans compter les dotations au fonds de soutien à l'expression radiophonique et au GIP France Télé numérique) s'établissent à 3 803,5 millions d'euros dans le PLF 2013.

GRAPHIQUE SYNTHÉTIQUE DE LA RÉPARTITION
DES CRÉDITS DÉDIÉS À L'AUDIOVISUEL

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

II. ANALYSE DES CRÉDITS PAR OPÉRATEUR : DES BUDGETS TRÈS CONTRAINTS

A. ARTE-FRANCE : UN BUDGET SERRÉ

La dotation publique allouée à ARTE-France s'élève en PLF 2013 à 262,8 millions d'euros HT (268,4 millions d'euros TTC), contre 262,5 millions d'euros HT (268,1 millions d'euros TTC) en 2012 , soit une diminution de 0,1 % là où le contrat d'objectifs et de moyens (COM) pour la période 2012-2016 prévoyait une augmentation de 4,8 %.

Cette baisse s'inscrit dans un contexte économique général difficile, la question étant de savoir si ARTE pourra continuer à mener à bien ses missions.

Votre rapporteur pour avis souligne que le soutien à cette chaîne est pleinement légitime à la fois au vu de la qualité des programmes diffusés et de l'importance de son développement.

1. Un relance éditoriale réussie

L'objectif principal fixé par le nouveau COM d'ARTE était de parvenir à reconquérir son audience sans perdre ni sa singularité de chaîne culturelle européenne , ni son exigence en matière de création.

Afin d'atteindre cet objectif, une nouvelle grille a été lancée dès janvier 2012, dont les éléments principaux étaient :

- un nouveau programme d'avant soirée innovant, sur la case 20 h 00- 20 h 40 tous les jours de la semaine, combinant magazine et oeuvre (fiction ou animation courte) ;

- un décalage du journal d'information à un horaire plus adapté au public français, de 19 h 00 à 19 h 40 ;

- une « verticalisation » de la grille : chaque jour de la semaine, le programme complet de la soirée s'adresse à un public cible donné, afin de le fidéliser dans la durée par une lisibilité accrue de la programmation ;

- un rendez-vous documentaire avec un invité, tous les jours de la semaine, vers 18 h 00, axé sur la découverte ;

- un après-midi culturel tous les dimanches ;

- des évènements documentaires dans l'année, répartis dans les différentes cases documentaires de la grille ;

- et une amélioration de la qualité des productions de fictions et d'animation.

Votre rapporteur pour avis constate que la part d'audience de la chaîne est à nouveau en hausse après sept années de baisse continue : elle s'élève ainsi à 1,7 % pour l'année en cours contre 1,5 % en 2011 , ce qui correspond à une augmentation de 13 %.

En outre, selon le baromètre IFOP de février 2012, ARTE voit sa note globale de satisfaction augmenter en France, passant de 6,2 en 2011 à 6,4 points en 2012. La chaîne obtient ainsi les meilleures notes du paysage audiovisuel français (PAF) sur des critères comme la culture , la dimension européenne , la découverte et le sérieux et progresse beaucoup sur des critères tels que la créativité , la proximité et l' information .

2. ARTE : un média de référence pour la culture et la création européenne

Avec trois quarts de son budget alloués à la production d'oeuvres originales , ARTE-France s'impose comme un acteur important de l'émergence d'auteurs et de nouvelles écritures audiovisuelles, tout en respectant l'équilibre entre les grands genres fondateurs de son identité : le documentaire , le spectacle vivant et la fiction . A ce titre, il est à noter l'importance de séries ambitieuses en coproductions européennes comme Ainsi soient-ils de Rodolphe Tissot dont l'audience des premiers épisodes est un succès (près d'1,5 million de téléspectateurs en moyenne) ou encore d' acquisitions notoires comme celle de la saison 2 de Borgen , série danoise sur le pouvoir politique.

Parmi les téléfilms d'auteurs , on retrouve des succès critiques et publics tels que Just like a woman de Rachid Bouchareb ou encore Les 5 parties du monde de Gérard Mordillat (FIPA d'or 2012).

Des documentaires à succès doivent aussi être mentionnés comme Titanic, l'ultime scénario qui a réuni pas moins de 5,3 % de parts d'audience (pda) et 1,3 million de téléspectateurs ou Les cathédrales dévoilées (4,2 % de pda et 1,2 million de téléspectateurs).

Enfin, la diffusion de spectacles est aussi appréciée à l'instar de Michael Flatley, Lord of the dance (4 % de pda et 558 000 téléspectateurs) ou Françoise Hardy (2,9 % de pda et 574 000 téléspectateurs) ; ARTE Video Night , pour la quatrième année consécutive, propose de son côté un musée éphémère entièrement dédié à l'art vidéo, diffusé au moment de la foire internationale d'art contemporain (FIAC), dans le cadre de partenariats avec de hauts lieux de création, à l'image du Palais de Tokyo en 2012.

La science, l'environnement et la découverte ne sont pas non plus en reste, ARTE-France abordant largement ces questions dans des programmes comme Xenius , un magazine quotidien de connaissance de 26 minutes ou par le truchement de la case ARTE Sciences , diffusée chaque jeudi en deuxième partie de soirée et présentant des films de fiction ou des documentaires traitant des enjeux sociétaux et éthiques de l'avancée de la recherche actuelle.

En tant que pôle de coproduction, ARTE-France respecte aussi l'objectif d'investissement de 3,5 % de son chiffre d'affaires dans la création cinématographique , à travers sa filiale ARTE-France Cinéma : ce sont ainsi environ vingt films et trois long-métrages documentaires qui sont produits par an, les recettes générées étant réinvesties dans la production de nouveaux films. De nombreux prix sont venus récompensés ces films, à Cannes notamment, du Prix d'interprétation féminine à Kirsten Dunst pour Melancholia aux Palmes d'Or pour L'Éternité et un jour de Théo Angelopoulos et Dancer in the dark de Lars Von Trier.

3. Le succès de la « galaxie » numérique

Grâce à une politique innovante, ARTE a acquis une très forte notoriété dans le monde numérique avec des programmes destinés spécifiquement à Internet récompensés par des prix internationaux et en devenant une référence du secteur pour la captation de spectacles vivants retransmis gratuitement en ligne (ARTE Live Web).

Selon les informations fournies à votre rapporteur pour avis, l'audience d'Arte Live Web s'établit au premier semestre 2012 à 320 000 visites (+ 25 % par rapport au premier semestre 2011) et 817 000 pages vues. Les résultats d'Arte Creative sont également en progression (+ 167 % par rapport au premier semestre 2011 avec 142 000 visites).

Cette stratégie de production de programmes non linéaires spécifiques pour l'Internet fixe ou mobile s'est encore développée récemment : ARTE France constitue ainsi l'un des principaux moteurs de la création web dans l'hexagone en accueillant et suscitant de nouvelles expérimentations et de nouvelles écritures à destination d'un public plus jeune. En matière de webdocumentaire, ARTE France coproduit des programmes interactifs comme Code Barre qui interroge le rapport que nous entretenons avec les objets que nous consommons : connecté au site ou via l' application iPhone , le spectateur est invité à scanner le code barre d'objets proches (cigarettes, produits alimentaires, livres...) déclenchant un film lié à celui-ci . On navigue ainsi par thèmes, objets, associations d'idées, décrivant un parcours unique matérialisé par un code personnalisé. L'internaute peut également contribuer à enrichir le dispositif, en envoyant des photos des objets accompagnées de leur histoire, ou en référençant de nouveaux objets dans la base de données de codes barres. Dans le domaine de la webfiction, ARTE France a lancé, après la première expérience Addicts en 2010, 60 secondes , un programme initié pour le web avec une diffusion sur Facebook . Enfin, d'autres projets hybrides, de fiction et de documentaires, sont en cours d'élaboration, comme l'ambitieux projet transmédia Intime conviction qui mettra en scène un procès de cour d'assises faisant se rencontrer des acteurs, des professionnels de la justice et des internautes sollicités en tant que jurés.

Votre rapporteur pour avis considère que cette stratégie est particulièrement pertinente dans un contexte d'évolution technologique rapide, d'augmentation du nombre de chaînes hertziennes et pour une chaîne dont le public est plutôt spécialisé .

L'offre ARTE VOD payante, disponible sur le site artevod.com représente en outre pour ARTE un axe de développement important : elle propose au public 2 600 programmes, enrichis d'environ 400 programmes chaque année - à noter que 600 d'entre eux sont disponibles en format DVD à la demande, service qui permet de faire graver sur DVD sa propre sélection de programmes. Ce service permet de compléter la gamme des services déjà proposés au public : télévision de rattrapage, édition DVD, édition livres, VOD. Notons à cet égard que les ressources propres d'Arte sont en évolution régulière avec une prévision de 2,8 millions d'euros de recettes pour 2013 (+ 4 % par rapport à 2012).

4. Une gestion d'ARTE-France rigoureuse

Compte tenu des dépenses de personnel liées à l'arrivée d'une nouvelle équipe dirigeante, à la mise en place d'une nouvelle organisation au sein de l'entreprise et à la conception d'une nouvelle grille de programmes, la part des charges de personnel dans les dépenses totales est passée de 7,4 % en 2010 à 8,3 % en 2011. Il reste que le projet annuel de performance prévoit que les frais de personnel restent très limités : la stratégie multimédias est ainsi opérée grâce un important redéploiement de personnel dans une chaîne pour laquelle aucun départ à la retraite n'est prévu avant 2017.

Par ailleurs, les frais de structure sont maintenus à un faible niveau et devraient même diminuer en 2013 du fait des économies engendrées par la renégociation anticipée du bail du siège social du groupe.

Ces différents éléments montrent que les ajustements du budget 2013 ne pourront se faire que sur les dépenses de programmes, dont une baisse est déjà prévu e (142,3 millions d'euros en 2013 contre 151 millions d'euros en 2012).

5. Les conclusions de votre rapporteur pour avis : un maintien nécessaire des crédits

Dans un contexte de concurrence élargie (arrivée des nouvelles chaînes de la TNT et de la télévision connectée), les objectifs prioritaires d'ARTE-France de relance éditoriale et de développement du numérique doivent passer par une diminution la plus faible possible du budget consacré aux programmes.

Votre rapporteur pour avis considère ainsi que la faiblesse des marges de manoeuvre du groupe dans les coûts fixes impose un maintien a minima de la dotation prévue pour 2013 , à hauteur de 262,8 millions d'euros.

B. RADIO FRANCE : LE MAINTIEN DU CAP

La dotation publique allouée à Radio France via le programme 843 « Radio France » s'élève en PLF 2013 à 611,7 millions d'euros HT (624,6 millions d'euros TTC), en baisse de 0,1 % par rapport à 2012 (612,1 millions d'euros HT). Cette dotation est inférieure à la trajectoire prévue par le COM, qui prévoyait un montant de 636,8 millions d'euros.

Ce budget représente 16,4 % des ressources issues de la contribution à l'audiovisuel public. A ce stade, Radio France anticipe que les recettes publicitaires seraient au mieux stables en 2013 par rapport au budget initial de 2012.

Au vu des informations communiquées à votre rapporteur pour avis, le succès des antennes de Radio France en 2012 est patent.

Elles bénéficient en premier lieu de l'augmentation du nombre d'auditeurs de la radio, observée depuis 2011, après six années de baisse, qui se poursuit en 2011-2012 : du lundi au vendredi, l'audience cumulée du média, à 82,1 %, a ainsi progressé de 0,3 point. La durée d'écoute reste stable pour la troisième saison à 174 minutes en moyenne.

Sur la période 2011-2012, l'auditoire de Radio France s'accroît quant à lui en semaine comme le week-end . Du lundi au vendredi, l'audience cumulée, à 26,7 % (14 millions d'individus âgés de 13 ans et plus), progresse de 1,2 point, soit un gain de 672 000 auditeurs :

- l'audience cumulée de France Inter, à 10,8 %, progresse de 0,6 point, obtenant ainsi son meilleur résultat depuis neuf ans. Le succès des émissions telles que Comme on nous parle de Pascale Clark ou Là-bas si j'y suis de Daniel Mermet montre que la qualité est compatible avec l'audience ;

- l'audience cumulée de France Info, à 9 %, progresse de 0,3 point. Elle est particulièrement élevée le matin entre 7 h 00 et 9 h 00 avec 2,2 millions d'auditeurs.

- pour la troisième saison de suite, l'audience cumulée de France Bleu se situe au-dessus des 7 %. Elle rassemble chaque jour 3,8 millions d'auditeurs (7,2 % en audience cumulée). Le maillage du territoire par le réseau France Bleu se poursuivra en 2013. Le gouvernement a ainsi confirmé la création de la 44 e station du réseau France Bleu à Saint-Étienne ;

- France Culture connaît une audience cumulée de 1,9 % en progression de 0,2 point depuis la saison précédente. C'est le niveau le plus élevé obtenu par France Culture, avec près d'un million d'auditeurs à l'écoute un jour moyen de semaine.

- après le tassement d'audience observé au cours des saisons 2009-2010 et 2010-2011, l'audience de France Musique a atteint 1,5 %, soit près de 800 000 auditeurs, en progression de 0,2 point ;

- l'audience cumulée de Fip s'établissait à 368 000 auditeurs au cours de la saison 2010-2011. La station a rassemblé cette saison 79 000 auditeurs supplémentaires et son auditoire atteignant 447 000 auditeurs.

En revanche, l'audience du Mouv' est en forte baisse puisqu'elle s'établit à 0,4 %, contre 0,5 % en 2011 et 0,7 % en 2010. La direction de Radio France reconnaît au demeurant que « les changements importants intervenus dans les programmes du Mouv' ont entraîné une baisse de l'auditoire » . Cependant, lors de son audition du 15 novembre 2013, M. Jean-Luc Hees, président de Radio France, a indiqué une audience remontée à 0,5 % sur les derniers mois. Formulons le voeu que cette progression soit durable.

Votre rapporteur pour avis se félicite de la réussite des radios du groupe qui, tout en assurant pleinement ses missions de service public, parvient à réunir des audiences importantes.

Il considère cependant que la rencontre entre le service public et le public jeune constitue un impératif, qui justifiait la création du Mouv' à la fin des années 1990, et qui reste pleinement d'actualité. Le succès de cette radio au milieu des années 2000 a au demeurant montré que le défi pouvait être relevé.

Le président de Radio France a reconnu, lors de son audition à l'Assemblée nationale que l'on « ne peut pas ignorer une catégorie qui représente 15 à 30 % de la population (...) et ensuite regretter que les jeunes n'aient pas accès à l'information, à la culture, à l'éducation, à des divertissements de qualité. Nous avons un rôle à jouer. Même si la tâche est difficile, nous ne lâcherons pas ». Dans un contexte budgétaire difficile, il a ensuite annoncé l'augmentation de 30 % du budget de cette radio , qui reste celui d'une radio locale.

S'agissant des investissements, le projet de réhabilitation de la Maison de la Radio suit son court et son achèvement est prévu pour 2016. Il grève forcément les autres projets de modernisation de l'entreprise.

Aux termes du PAP, Radio France approfondira, en 2013, la démarche déjà engagée en matière de rationalisation de sa gestion. Ses efforts devraient se traduire par des économies structurelles portant en priorité sur les achats et les charges externes, et par une « accélération de la modernisation de l'entreprise » , sans que cette expression soit rendue explicite dans le projet annuel de performances.

Force est en fait de reconnaître que les perspectives d'économies à réaliser sont très faibles dans les prochaines années . La principale mesure prise par le ministère de la culture afin de limiter l'augmentation des dépenses de Radio France a été de renoncer à préempter des fréquences pour Radio France sur la radio numérique, estimant que cela « engendrerait des surcoûts significatifs pour les radios publiques, liés à la nécessité devant laquelle elles se trouveraient de diffuser à la fois en modulation de fréquences et en numérique » . Les frais entraînés par une double diffusion constituent au demeurant le principal frein au développement de la radio numérique terrestre, dont les rapports de MM. Marc Tessier et David Kessler avaient souligné l'importance du coût.

Votre rapporteur pour avis tire de ces analyses une double conclusion :

- le groupe Radio France doit garder le cap sur ses ambitions culturelles ;

- l'État ne peut pas baisser à court ou moyen terme la dotation versée à cet acteur essentiel de notre audiovisuel public.

C. L'INSTITUT NATIONAL DE L'AUDIOVISUEL : LA SAUVEGARDE DES FONDAMENTAUX

La dotation de l'Institut national de l'audiovisuel s'élève à 90,5 millions d'euros HT en PLF 2013, soit la même somme qu'en 2012. Ces moyens représentent une baisse de 2,5 % par rapport à ceux prévus par le COM négocié en 2009 .

Votre rapporteur pour avis note en outre que le budget 2013 sera d'autant plus contraint que :

- les objectifs de ressources propres prévus dans le COM ne sont pas atteints, et seront même inférieurs de 10 % à ceux anticipés (- 4,2 millions d'euros). Leur part dans le budget total est ainsi prévu à 29 % en 2013 (33,2 % en 2012). Cette évolution sera difficile à contrarier à court terme dans la mesure où les droits audiovisuels dévolus par la loi tendent à se restreindre, du fait notamment de la baisse des activités de production des chaînes de l'audiovisuel public. Votre rapporteur pour avis précise à cet égard qu'une réflexion sur ce thème sera engagée en 2013 par la commission de la culture, de l'éducation et de la communication à travers la constitution d'un groupe de travail ;

- les charges de personnel affichent une hausse de 2,5 % par rapport au budget prévisionnel 2012, notamment suite à la mise en place de l'accord collectif, rendu nécessaire par la caducité de la convention collective de la communication et de la production audiovisuelle prévue par la loi du 5 mars 2009 ;

- l'INA a déjà puisé dans sa capacité de diminution des charges d'exploitation à travers un plan d'économie sur les procédures d'achat et de numérisation.

Dans ce contexte, l'INA devra se concentrer sur ses trois missions principales que sont :

- la conduite de sa mission de sauvegarde des archives et d'enrichissement de sa collection ;

- la valorisation de sa collection ;

- et la transmission des savoirs et des compétences.

S'agissant de la sauvegarde du patrimoine, selon les informations fournies à votre rapporteur pour avis, il est prévu pour la période 2012-2014, d'une part de poursuivre la sauvegarde et la numérisation des fonds TV et radio sur le périmètre initial, et d'autre part, d'étendre le périmètre du plan de sauvegarde et de numérisation (PSN) aux autres fonds menacés de dégradations apparues postérieurement à l'expertise menée en 2003 . Cette extension se ferait selon cinq axes :

- la préservation des fonds de RFO. L'audit VERITAS de fin 2002 ne tenait pas compte des fonds qui n'avaient pas encore été collectés, ce qui était le cas des fonds conservés en outre-mer . L'INA a mené une expertise d'évaluation de la volumétrie des fonds RFO et mis en évidence le mauvais état de ce fonds et l'urgence à le sauvegarder ; qui a été confirmée par les premiers travaux effectués sur les fonds guyanais et martiniquais. Selon l'INA, le fonds télévisuel de l'ensemble des stations de RFO est estimé entre 125 000 et 150 000 heures pour un coût total de numérisation estimé à 7,5 millions d'euros, notamment financé par les investissements d'avenir. Votre rapporteur pour avis est particulièrement convaincu par l'importance de sauvegarder ce patrimoine télévisuel et radiophonique d'outre-mer, qui constitue un enjeu de mémoire majeur ;

- la préservation des 1/2 pouce Betacam. Le fonds total Betacam détenu par l'INA est estimé aujourd'hui à 370 000 heures sur lesquelles, fin 2011, 166 491 ont été numérisées soit 67 %.

- la sauvegarde des supports optiques CD déposés par Radio France ;

- la restauration des bandes magnétiques radio 6,25 mm (30 000 heures) et des disques 78 tours (8 500 heures), qui devrait débuter en 2013. Il est envisagé de traiter prioritairement une sélection de programmes (par exemple : les concerts des années 1949 à 1956 enregistrés en 76 cm par seconde, les enregistrements du Club d'Essai de Pierre Schaeffer, les premières émissions de variétés dont le support est fragilisé du fait de nombreuses communications, etc.). Cette sélection est évaluée à 10 000 heures sur bandes 6,25 mm ;

- la sauvegarde des fonds radiophoniques régionaux. L'INA envisage de sauvegarder une sélection de 10 000 heures représentatives du fonds régional (sur une volumétrie totale estimée à 50 000 heures).

D. LE SOUTIEN À L'EXPRESSION RADIOPHONIQUE LOCALE : UNE DIMINUTION DIFFICILE DES CRÉDITS

Aux termes de l'article 80 modifié de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication, les radios locales associatives dont les ressources commerciales issues de la publicité sont inférieures à 20 % de leur chiffre d'affaires total, qui accomplissent une mission de communication sociale de proximité, peuvent bénéficier d'une subvention versée dans le cadre du Fonds de soutien à l'expression radiophonique .

La dotation inscrite dans le PLF 2013 afin d'abonder ce fonds s'élève à 29 millions d'euros , soit la même somme qu'en 2012 et 2011.

Votre rapporteur pour avis rappelle qu'aux termes du décret n° 2006-1067 du 25 août 2006, quatre types de subventions sont prévus :

- la subvention d'installation, bénéficiant uniquement aux radios associatives nouvellement autorisées par le CSA (16 000 euros au maximum) ;

- la subvention d'équipement, destinée à financer les projets d'investissement en matériel radiophonique d'un service de radio, à hauteur de 50 % au maximum de leur montant et dans la limite de 18 000 euros par période de cinq ans ;

- et les subventions de fonctionnement. Elles prennent deux formes : la subvention d'exploitation , dont l'attribution annuelle revêt un caractère automatique, est déterminée selon un barème fixé par arrêté conjoint des ministres chargés de la communication et du budget ; la seconde subvention de fonctionnement, introduite par la réforme de 2006, est la subvention sélective à l'action radiophonique . Cette dernière est attribuée par le ministre chargé de la communication sur proposition d'une commission consultative, et a pour objet de soutenir les services de radio qui ont réalisé des actions particulières dans un certain nombre de domaines tels que l'emploi, l'intégration, la lutte contre les discriminations, la culture et l'éducation.

Mme Martine Martinel, rapporteure pour avis des crédits relatifs à l'audiovisuel à l'Assemblée nationale, dans son rapport sur le PLF 2013, a considéré que certains programmes spécifiques étaient développés de manière opportuniste et qu'ils devraient faire l'objet d'un contrôle particulier (5,48 millions d'euros au titre de la subvention sélective à l'action radiophonique, contre 4,4 millions d'euros en 2010).

La question de la « soutenabilité » du financement sera au demeurant posée dès l'exécution 2013 : en effet, le soutien de l'État aux radios associatives comprenait une augmentation de 2 millions d'euros par rapport à 2009 qui devait permettre de soutenir les radios associatives pour le passage à la radio numérique terrestre (RNT). Le lancement de la RNT n'ayant pas eu lieu, les 2 millions d'euros ont alors servi à résorber le décalage de trésorerie du FSER. En 2011 et 2012, ces 2 millions d'euros ont été reconduits en LFI et, malgré l'absence de lancement de la RNT, ils ont été distribués principalement en subventions sélectives (1,1 M€ en 2011), mais aussi en subvention automatique (0,8 M€), le reliquat ayant servi à réduire marginalement le décalage de trésorerie. La question se posera en 2013 de verser un montant d'aide inférieur aux crédits votés, afin d'anticiper un éventuel lancement de la RNT ou de résorber le décalage de trésorerie.

Votre rapporteur pour avis, attaché à l'activité de ces radios qui jouent un rôle culturel et social important au niveau local, considère qu'une analyse plus globale devrait être menée sur le financement de ces radios.

En effet, l'origine des recettes des radios est très variable, les différentes aides du fonds ne représentant en moyenne que 40% de leurs ressources :

- les recettes publicitaires jouent un rôle non négligeable pour une soixantaine de radios pour lesquelles elles dépassent 10 % de leur chiffre d'affaires. Cette part est limitée à 20 % si les radios veulent bénéficier du FSER ;

- et les autres ressources dont bénéficient les radios de catégorie A proviennent des aides à l'emploi versées pour le compte de l'État par le CNASEA (principal bailleur public après le FSER), de l'Agence nationale pour la cohésion sociale et l'égalité des chances (ACSE), des subventions des collectivités territoriales, du produit de certaines activités radiophoniques ou non radiophoniques, des cotisations et des dons. La part des dons des communautés ou institutions religieuses est parfois considérable pour les radios confessionnelles.

Cette analyse pourrait porter sur le rendement de la taxe prévue à l'article 302 bis KD du code général des impôts, et sur son éventuelle réaffectation au Fonds de soutien, sur le nombre de radios associatives aidées ou encore sur leur capacité à disposer de ressources propres.

E. L'AEF : UN EXERCICE D'ÉQUILIBRISTE POUR 2013

Votre rapporteur pour avis n'est pas chargé de l'analyse des crédits dédiés à l'audiovisuel extérieur de la France au titre de la commission de la culture, de l'éducation et de la communication, confiée à Mme Claudine Lepage, qui établit un rapport spécifique sur ce secteur.

Néanmoins, le groupe AEF dispose d'une part de la contribution à l'audiovisuel public et sa situation doit donc être analysée finement dès lors que l'on souhaite travailler sur la juste répartition de son produit.

Au vu de l'analyse très complète de Mme Claudine Lepage, il apparaît que l'AEF sera dans une situation budgétaire compliquée en 2013, qui ne permettra pas de dégager des marges de manoeuvre.

Votre rapporteur pour avis prend donc acte de ce constat et en tirera les conséquences, notamment sur le montant de contribution à l'audiovisuel public dont il sera nécessaire de disposer en 2013.

F. FRANCE TÉLÉVISIONS : LE PRIX À PAYER DE LA RÉFORME ?

1. Le budget prévu pour 2013 : la nécessité d'un nouveau COM

Le présent projet de loi de finances prévoit que France Télévisions reçoive les dotations suivantes :

- 2 196 millions d'euros HT (soit 2 243,1 millions d'euros TTC), contre 2 091,6 millions d'euros TTC en 2012, au titre du programme 841 « France Télévisions » de la mission « Avances à l'audiovisuel public », ce qui correspond à une augmentation des crédits de plus de 7 % ;

- et 256,4 millions d'euros au titre du programme 313 « Contribution au financement de l'audiovisuel » de la mission « Médias », ce qui correspond à une baisse de 42 % de la dotation budgétaire .

Les crédits globaux de France Télévisions pour l'année 2013 s'élèvent donc à 2453,3 millions d'euros HT, soit une baisse de 3 % par rapport à 2012.

Votre rapporteur pour avis a constaté que de très nombreux chiffres circulaient sur le financement de France Télévisions et souhaite à cet égard apporter quelques éclairages.

Les évolutions suivantes ont été constatées entre le PLF 2012 et le budget réel de France Télévisions pour 2012 :

- une diminution des crédits de 15 millions d'euros en LFI 2012 ;

- une réduction supplémentaire de 6 millions d'euros en LFR 2012 ;

- le report de crédits publicitaires de 28 millions d'euros de 2011 sur le budget 2012 s'est accompagné d'une baisse équivalente de la dotation et n'a donc eu de conséquence sur le budget de France Télévisions pour 2012 ;

Sur le sujet des ressources publicitaires, il peut être rappelé que la précédente majorité avait été particulièrement visionnaire en modifiant l'article 53 de la loi n° 86-1067 du 30 septembre 1986 relative à la liberté de communication dans la loi n° 2011-1977 du 28 décembre 2011 de finances pour 2012 (article 133), afin de prévoir que la compensation de l'État pour la suppression de la publicité soit réduite « à due concurrence du montant des recettes propres excédant le produit attendu de ces mêmes recettes tel que déterminé par le contrat d'objectifs et de moyens ».

Non seulement cette disposition risquait de décourager la régie publicitaire de France Télévisions dont les éventuels surplus auraient été sans intérêt pour le groupe, mais témoignait d'une méconnaissance de l'évolution du marché publicitaire des groupes audiovisuels, qui sera négative dans le court et moyen terme. Cette disposition ne trouvera aucune application en 2013 et devra, selon votre rapporteur pour avis, être supprimée au même titre que celle prévoyant la suppression de la publicité en 2016 sur les écrans diurnes de France Télévisions, dans le prochain texte de loi relatif à l'audiovisuel ;

- et un gel des crédits pour 2012, à une hauteur méconnue pour l'instant, devrait être réajusté en loi de finances rectificative de fin d'année.

Le tableau suivant résume ces évolutions de crédits et les compare à la dotation 2013, qui s'élève à 2 453,3 millions d'euros hors taxes.

RESSOURCES PUBLIQUES ATTRIBUÉES À FRANCE TÉLÉVISIONS EN 2012 ET 2013

(en millions d'euros)

Montant de la dotation en 2012 (hors taxes)

Évolution entre 2012 et LFI 2013 (en valeur absolue)

Évolution entre 2012 et LFI 2013 (en %)

PLF 2012

2554,4

-101,1

- 3,9 %

LFI 2012

2554,4 - 15 = 2539,4

- 86,1

- 3,4 %

LFR 2012

2539,4 - 6 = 2533,4

- 80,1

- 3,2 %

Montant réellement déboursé par l'État du fait du report de 28 millions d'euros

2533,4 - 28 = 2505,4

- 52,1

- 2 %

Source : Direction générale des médias et des industries culturelles et commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat

Votre rapporteur pour avis considère que la meilleure comparaison doit être faite avec la somme votée en LFR 2012 , qui est la plus pertinente du point de vue des sommes dont France Télévisions a réellement bénéficié.

La diminution des crédits entre 2013 et 2012 prévue dans le présent PLF est donc de 80,1 millions d'euros , ce qui représente une baisse de 3,2 %.

Notons qu'à ces difficultés s'ajoutent celles relatives aux recettes publicitaires. Alors qu'elles étaient anticipées à hauteur de 451,9 millions d'euros (471,9 millions d'euros dans le COM) elles devraient s'établir à 425 millions d'euros en 2012 et sont prévues à hauteur de 359 millions d'euros pour 2013.

Le groupe ne sera donc pas à l'équilibre en 2012 et c'est une diminution de recettes de 67 millions d'euros qui est anticipée pour 2013 !

Votre rapporteur pour avis se félicite que la trajectoire de recettes commerciales ait été revue afin d'être conforme à la réalité alors que le précédent COM était notoirement trop optimiste, mais s'inquiète très fortement de ces prévisions .

Dans le bleu budgétaire, il est souligné que « la prévision de ressources publiques et publicitaires de France Télévisions pour 2013 s'établit à 2 811 millions d'euros HT, soit une baisse de 152,9 millions d'euros HT par rapport au niveau 2012 de ressources prévu pour le budget 2012 (- 5,2 %) » , avec une diminution de 86 millions d'euros des concours publics et de 67 millions d'euros de publicité.

Votre rapporteur pour avis considère quant à lui que la juste comparaison fait apparaître une diminution des ressources de plus de 147,1 millions d'euros entre 2012 et 2013 , soit 4,9 % de son budget.

Même si France Télévisions n'appliquait pas la « charte du parrainage » mise en place volontairement à partir de 2010, cette baisse reste extrêmement importante (le « coût » du dispositif pour le groupe est inférieur à 10 millions d'euros).

RESSOURCES DE FRANCE TÉLÉVISIONS EN 2012 ET 2013

2012 (LFI + LFR)

PLF 2013

Évolution en valeur absolue

Évolution en %

Dotation budgétaire et CAP

2533,4

2453,3

80,1

- 3,2 %

Recettes publicitaires

425

359

67

- 15,6 %

Total

2958,4

2812,3

147,1

- 4,9 %

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication

Le montant de cette baisse correspond à 5 % du budget de France Télévisions, ce qui constituerait un effort très considérable pour le groupe, qu'il n'arriverait probablement pas à effectuer .

Par rapport au COM, l'écart serait même de 200 millions d'euros (6,7 %) : votre rapporteur pour avis considère donc qu'il est nécessaire d'entrer rapidement dans une phase de négociation d'un nouveau COM, conforme aux attentes de l'État s'agissant de la trajectoire financière du groupe .

En attendant, il a essayé d'analyser précisément les charges de France Télévisions afin de savoir si la somme inscrite au PLF 2013 pourrait suffire à les financer.

Votre rapporteur pour avis notait dans son rapport 7 ( * ) sur le PLF 2012 que « si le fonctionnement de France Télévisions paraît a priori garanti en 2012, une lecture plus attentive des crédits montre que son financement n'est pas assuré, ne serait-ce qu'à moyen terme, et que l'entreprise a été profondément fragilisée par la réforme menée en 2009 ».

Cette analyse est pleinement confirmée pour 2013 et le rapport relatif au bilan de la loi du 5 mars 2009 8 ( * ) , a approfondi l'analyse sur les effets terriblement négatifs de la réforme menée par le précédent gouvernement.

2. Un groupe malmené en raison d'une réforme mal menée
a) La fusion du groupe, source de confusion

La loi n° 2009-258 du 5 mars 2009 relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision a refondu les dispositions de l'article 44 de la loi du 30 septembre 1986 afin de substituer aux différentes sociétés existantes une société nationale de programme unique, dénommée France Télévisions. En lui conférant la qualité de société nationale de programme, le législateur a donné à la société France Télévisions pour objet principal non plus simplement de coordonner l'activité des chaînes mais de concevoir et de programmer directement des émissions audiovisuelles .

La constitution de l'entreprise unique s'est effectuée par une fusion-absorption juridiquement ordonnée par l'article 86 de la loi du 5 mars 2009 et réputée intervenir à la date du 1 er janvier 2009. Les statuts de la nouvelle société nationale de programme unifiée ont ensuite été approuvés par le décret n° 2009-1263 du 19 octobre 2009.

Outre les aspects sociaux, la mise en place de l'entreprise unique représentait un défi important d'adaptation en interne, qui n'était pas justifié aux yeux de votre rapporteur pour avis par l'intérêt de cette réforme.

Votre rapporteur pour avis saluait l'année dernière la capacité de la direction de France Télévisions et des syndicats à négocier un accord sur l'avenant à la convention collective des journalistes, qui a été signé le 15 septembre 2011. Il s'agissait d'un défi important imposé par la réforme. Il espérait qu'un texte de substitution à la convention collective des personnels techniques et administratifs soit signé avant le 8 octobre 2012. Ce n'est finalement pas le cas et votre rapporteur pour avis souligne que parmi les grands acteurs de l'audiovisuel public, seul l'INA est parvenu à signer un accord avant cette date, alors que l'AEF, Radio France et France Télévisions peinent à y parvenir .

Votre rapporteur pour avis et M. Jacques Legendre constataient dans le rapport précité sur le bilan de la loi du 5 mars 2009, que la fusion s'est traduite par :

- « des hausses de coûts en matière de ressources humaines (avec une croissance régulière des effectifs de l'entreprise commune tout au long de la période : 10 207 ETP en 2010, 10 358 en 2011, 10 403 prévus au budget 2012). S'agissant du plan de départs à la retraite mis en place en 2009, comme le note la Cour des comptes, l'objectif initial était de 900 départs fin 2012 avec un taux de remplacement de 25 %, finalement ont été constatés 520 départs avec un taux de remplacement de 75 % ;

- une augmentation potentielle de la masse salariale : l'alignement des statuts des collaborateurs des ex-sociétés fusionnées et les négociations sociales commune à l'ensemble de la sphère de l'audiovisuel public pourraient, selon des évaluations récentes, représenter un coût salarial pérenne d'environ 40 millions d'euros ;

- des accroissements de frais immobiliers : la fusion juridique des chaînes a entraîné l'occupation (prise à bail ou acquisitions) de nouvelles surfaces (dans un document présenté au conseil d'administration du 19 octobre 2011, France Télévisions signale ainsi que « la situation actuelle est la plus élevée en termes de coûts puisque trois implantations immobilières nouvelles sont venues s'ajouter aux implantations existantes au début de l'année 2010 »). Par ailleurs, le prix moyen du mètre carré occupé par France Télévisions va croissant : le prix du mètre carré de surface utile brute locative passe en effet de 295 euros en 2009 à 308 euros en 2010, puis à 311 euros estimé début 2013, et ce sans prise en compte des augmentations indiciaires de loyer ;

- des coûts de conseils en stratégie : d'après un audit mené par la direction de l'Audit Interne de FTV, les prestations de conseil sur la mise en place et l'organisation de l'entreprise commune ont coûté plus de 14 millions d'euros auxquels viennent s'ajouter entre autres des prestations de conseil en stratégie et des prestations spécifiques aux ressources humaines ou à la direction financière ».

- « enfin, l'instabilité de l'organigramme, selon le Contrôle général économique et financier, n'a pas été propice à la mise en place des synergies, parce que le changement d'organisation a fortement occupé les esprits. De plus, la « redécentralisation » opérée en faveur des différentes antennes s'est probablement faite au détriment d'éventuelles économies ».

Votre rapporteur pour avis note que si l'instabilité de l'organigramme peut être imputée à l'actuelle direction, les autres effets sont pour la plupart dus à des effets automatiques de la fusion. A cet égard, la discussion parlementaire et l'éclairage gouvernemental ont été insuffisants au moment des débats sur la loi du 5 mars 2009 et l es conséquences néfastes apparaissent clairement aujourd'hui.

Au vu du dernier rapport de la Cour des comptes, les premières économies pourraient être observées à partir de 2013, dans le meilleur des cas, mais il est évident qu'elles seront loin d'atteindre les 150 millions d'euros nécessaires pour assumer la baisse des crédits prévue .

b) Des finances non financées

Votre rapporteur pour avis avait souligné dans son rapport sur le PLF 2012 que le financement de la suppression de la publicité n'avait absolument pas été assuré par le Gouvernement.

En effet :

- la taxe sur les recettes de publicité des éditeurs de télévision instaurée par la loi du 5 mars 2009 précitée a vu son taux passer de 3 % du montant des recettes annuelles, à 0,5 % jusqu'à la suppression totale de la publicité sur France Télévisions. Le montant des sommes encaissées, qui devait avoisiner les 50 millions d'euros, s'est donc élevé à 17,8 millions d'euros en 2010, 17 millions d'euros en 2011 et est estimé à 18 millions d'euros en 2012 ;

- la taxe prévue à l'article 302 bis KH du code général des impôts (CGI) sur les prestations fournies par les opérateurs de communications électroniques a fait l'objet d'un avis motivé de la part de la Commission européenne, qui estime qu'elle est incompatible avec l'article 12 de la directive « autorisation », laquelle prévoit que les taxes imposées aux opérateurs de télécommunications doivent être spécifiquement et directement liées à la couverture des coûts administratifs et réglementaires du secteur des télécommunications. La France ayant décidé de ne pas se conformer à cet avis, la question sera tranchée par la Cour de justice des communautés européennes (CJCE), probablement au début de l'année 2013.

Le montant du produit de cette taxe, qui s'est élevé à 255 millions d'euros en 2010, et 251 millions d'euros en 2011, devrait être à la même hauteur en 2012.

PRODUIT DES TAXES INSTITUÉES AUX ARTICLES 302 BIS KG ET KH
ET DOTATION BUDGÉTAIRE DE FRANCE TÉLÉVISIONS

(en millions d'euros)

Taxes instituées

2009

2010

2011

2012 (prévisionnel)

Total sur la période

302 bis KG

Publicité

27,7

17,8

17

18

80,5

302 bis KH

Communications électroniques

185,9

255

251

251

942,9

Total

213,6

272,8

268

269

1 023,4

Sommes versées à France Télévisions au titre de la dotation budgétaire

415

423,3

361,9 (389,9 prévus initialement)

451,9

1 652,1

Manque à gagner pour l'État

201,4

150,5

93,9

182,9

628,7

Effet cumulé avec un éventuel remboursement des sommes versées au titre de la taxe « télécoms »

387,3

405,5

344,9

433,9

1 571,6

Source : Commission de la culture, de l'éducation et de la communication du Sénat

Le montant cumulé de ces deux taxes se fixe à environ 270 millions d'euros, ce qui est éloigné des 450 millions d'euros prévus initialement et encore bien loin des 300/350 millions d'euros nécessaires afin de neutraliser la réforme de l'audiovisuel public sur les comptes de l'État .

C'est bien évidemment à cette aune qu'il faut lire, d'une part les difficultés actuelles de l'audiovisuel public, et d'autre part le choix du Gouvernement de proposer une augmentation de 2 euros du montant de la redevance, afin d'apporter 50 millions d'euros au financement de la réforme.

A cela s'ajoute le risque précité et très réel de voir la Commission européenne demander à la France de rembourser plus d'un milliard d'euros aux opérateurs télécoms.

Si une telle décision était prise, elle devrait entraîner une réaction rapide de la France destinée à éviter son effet dévastateur pour les finances publiques.

c) Les dépenses d'avenir de France Télévisions
(1) Le volontarisme numérique de France Télévisions

Comme la presse écrite avant lui, le monde audiovisuel fait sa révolution numérique : les innovations technologiques, la multiplication des écrans, l'arrivée de nouveaux acteurs sur le marché ont déjà modifié le paysage et le modifieront profondément ces prochaines années.

L'audiovisuel public se doit de suivre les usages et les technologies au service des téléspectateurs et de l'ambition culturelle qu'on peut avoir pour lui. Dans ce cadre, France Télévisions axe son développement sur une stratégie de « média global ».

Dans ce cadre, FTV adopte une stratégie de distribution la plus large possible (ensemble des supports de communication et des terminaux), passant par l'intégration d'une logique multi-supports en amont de la conception des programmes, le développement de nouveaux services et l'acquisition des droits sur les nouveaux médias.

Pour répondre à cet objectif, FTV déploie sa stratégie autour de cinq axes majeurs :

- bâtir des offres transversales en matière d'information et de sport .

Selon les informations fournies à votre rapporteur pour avis, l'offre existante jusqu'à la fin de l'année 2011 avait peu d'impact, en rassemblant seulement 15 % des pages vues sur l'ensemble des sites Internet du groupe (chiffres juillet 2011). En 2011, la priorité a été donnée au développement d'une offre d'information nationale, avec la création d'une plateforme d'information en continu traitant l'actualité en temps réel : francetvinfo.fr.

L'offre sportive a également été remodelée autour du lancement de la plate-forme sport « sport.francetv.fr », de la couverture des principaux événements sportifs, en particulier ceux dont France Télévisions détient les droits (Roland Garros, Tour de France, Tournoi des VI Nations, etc.). Votre rapporteur pour avis souligne à cet égard la qualité du dispositif mis en place pour les Jeux Olympiques de Londres, avec la possibilité de regarder la quasi-totalité des épreuves en direct, sur tous les supports (internet, mobile, tablette, télévision connectée) ;

- veiller à la projection des programmes dans l'univers du numérique.

Des partenariats avec les réseaux sociaux ont ainsi été lancés tels que celui entre Facebook et l'émission Mots croisés ;

- développer la télévision sur tous les écrans et tous les supports.

En mobilité, le retard sur la diffusion des directs a été comblé par le lancement de l'application France Télévisions (disponible sur iPad et iPhone) en avril 2011. L'application propose ainsi l'accès en direct aux chaînes nationales et ultramarines tandis que les 24 chaînes régionales de France 3 sont accessibles depuis cette année 2012. Près de 1 200 programmes, issus des 38 chaînes du groupe (France 2, France 3, France 4, France 5, France Ô, plus les 24 régions de France 3 et les 9 chaînes « 1ère » ultramarines) sont également disponibles en rattrapage sur l'application.

Votre rapporteur pour avis se réjouit en outre très fortement de la refonte de pluzz.fr, dont la nouvelle version est déjà disponible en version beta , avec un accès très aisé à l'ensemble des émissions de France Télévisions, notamment à partir d'un programme des chaînes de l'ensemble de la semaine écoulée . Ce site Internet permet ainsi aux redevables de la contribution à l'audiovisuel public de visionner les programmes de toutes natures qu'ils ont pu manquer pendant la semaine, et constitue une réelle plus value pour l'offre du service public ;

- se préparer à l'arrivée d'Internet sur les téléviseurs. France Télévisions développe de nombreuses initiatives sur ce terrain comme, par exemple, le lancement d'un guide de programme en août 2011 sur France 2 HD et France 4, puis en novembre sur France 2SD, France 3, France 5 et France Ô. Il a la particularité d'être accessible en mode « non connecté » à Internet mais aussi en mode « connecté » avec plus de contenus ;

- innover et développer. Le groupe renforce, conformément à ses missions de service public, ses actions dans la création et dans l'éducation.

Plusieurs « web documentaires » (Manipulations, l'expérience web, Doisneau ou le destin des Halles de Paris, Amours 2.0 et La campagne à vélo) ont ainsi été lancés. En matière de fiction, la stratégie vise à travailler sur les séries puissantes du groupe qui sont capables de rassembler d'importantes communautés.

En matière éducative, le groupe développe, en lien avec le ministère de l'éducation nationale, une offre de vidéos et de services associés à destination d'une part du grand public et d'autre part des établissements scolaires à l'image de l'opération Ciné-lycée en 2010 et Culture Lycée en 2012. Inaugurée le 21 mars 2012, cette plate-forme Internet de vidéo à la demande permet aux lycéens d'accéder à plus de 150 films ainsi qu'à d'autres oeuvres (danse, musique, opéra, théâtre et arts visuels) et leur propose d'organiser les séances dans leur établissement.

France Télévisions a ainsi alloué au développement numérique un budget de 56,5 millions d'euros en 2011 et de 63 millions d'euros en 2012, et un budget au moins équivalent devrait y être consacré en 2013.

Votre rapporteur pour avis souligne à cet égard que les dépenses pour le numérique de la BBC s'élevaient à 233 millions d'euros en 2011 (244,8 millions d'euros en 2010), dont 125,8 millions d'euros pour les contenus, 21,1 pour les coûts de distribution et 47 pour l'infrastructure.

L'iPlayer de la BBC représente ainsi 12 % de l'ensemble des visites de sites de vidéo au Royaume-Uni, ce qui est particulièrement exceptionnel.

Le fait que le groupe audiovisuel britannique soit propriétaire des programmes qu'il diffuse change cependant la donne et votre rapporteur pour avis note à cet égard que la commission de la culture, de l'éducation et de la communication lancera un groupe de travail sur la question de la gestion des droits en 2013 . Le débat mérite en effet d'être ouvert tant il peut paraître sujet à discussion que les programmes financés par le contribuable ne puissent pas participer à la construction d'un patrimoine audiovisuel public .

Votre rapporteur pour avis regrettait que le contrat d'objectifs et de moyens ne détaille pas l'investissement prévu en matière numérique de 2012 à 2015.

Il considère que le prochain COM devra se pencher sur cette question. Il est d'ores et déjà évident que les dépenses en matière de numérique sont l'un des enjeux majeurs de développement du groupe et de pérennisation de la puissance du service public de l'audiovisuel.

S'agissant des bénéfices tirés de la numérisation de la diffusion, votre rapporteur pour avis souhaite évoquer la question de la possibilité pour le téléspectateur de disposer de la version originale des programmes étrangers , retransmis sur les chaînes de télévision. Il s'agit d'un élément de renforcement de la qualité de l'offre du service public. Il salue à ce titre l'existence de versions multilingues pour les séries étrangères (France 4 depuis 2012, France 2 à partir de 2013) et encourage France Télévisions à continuer sur cette voie (films, extension aux chaînes concernées).

(2) La question de la chaîne jeunesse

Le groupe France Télévisions a pour ambition de mettre en place avec France 4 une chaîne pour jeunes adultes (15-34 ans) populaire de service public.

Votre rapporteur pour avis ne conteste pas cette ambition mais insiste sur l'importance de créer une offre jeunesse spécifique , qui soit largement dédiée à l'animation.

A cet égard, il estime qu'une cohabitation des deux cibles sur un même canal est possible et l'appelle de ses voeux. La stratégie du groupe France Télévisions est plutôt celle d'un développement uniquement numérique des programmes pour enfants.

Votre rapporteur pour avis n'est pas convaincu par ce choix. Ce débat important mérite probablement une étude approfondie sur les attentes du public en matière de programmation jeunesse , que le CSA, France Télévisions ou l'État pourrait commander ou produire en 2013.

d) La définition d'un modèle de financement crédible : l'actualité du débat

Le titre de cette partie dans le rapport pour avis sur le projet de loi de finances pour 2012 s'intitulait : « La définition d'un modèle de financement crédible ». Rien n'avait été fait l'année dernière sur ce sujet, alors que les problèmes étaient pendants depuis la réforme très décevante de 2009.

Votre rapporteur pour avis estimait que « la contribution à l'audiovisuel public (devait être) le socle du financement du secteur parce qu'à travers son affectation, elle garantit l'indépendance de ce média majeur qu'est l'audiovisuel » .

Cette année, le Gouvernement s'est saisi du problème en proposant une hausse de la contribution à l'audiovisuel public qui permet de dégager 50 millions de recettes supplémentaires.

Cette stratégie s'est accompagnée d'un resserrement de la contrainte budgétaire de l'ensemble des acteurs de l'audiovisuel public , avec un budget constant pour Radio France, l'INA et ARTE, et en très légère augmentation pour l'AEF. Le groupe France Télévisions, qui est en partie financé par une dotation budgétaire, est cependant tout particulièrement concerné puisqu'une diminution de près de 3 % de ses crédits est prévue .

Ce sera d'autant plus difficile à prendre en charge que le groupe France Télévisions est celui qui dépend le plus de ses ressources propres, qui sont anticipées comme étant en forte baisse en 2013.

Après une analyse approfondie du budget 2013 du groupe, votre rapporteur pour avis en est venu à la conclusion qu'une telle baisse des crédits aurait deux conséquences :

- un déséquilibre qu'on peut déjà anticiper du budget 2013 , dans la mesure où à crédits et recettes publicitaires supérieures, l'exécution 2012 est déjà assez fortement déficitaire, et où les marges de manoeuvre en termes de baisse de dépenses sont très limitées ;

- et un risque de démotivation du groupe devant une réduction aussi importante de ses recettes, impossible à compenser par les efforts de productivité qui pourraient être réalisés en interne.

Votre rapporteur pour avis ne conteste donc absolument pas le principe de la contribution de France Télévisions à l'effort de redressement des finances publiques, loin s'en faut, mais considère que la stratégie de l'État sera d'autant plus efficace qu'elle sera pleinement crédible : à cet égard, une baisse plus modérée de la dotation de France Télévisions, à hauteur d'une trentaine de millions d'euros serait davantage susceptible d'être compensée par France Télévisions, via une baisse de ses dépenses, et permettrait donc finalement à l'État d'atteindre son objectif de rationalisation de la dépense publique.

50 millions de crédits supplémentaires seraient nécessaires pour atteindre cet objectif. Ils peuvent être obtenus par une augmentation de 2 euros du montant de la contribution à l'audiovisuel public, que votre rapporteur pour avis a donc proposée à la commission.

Celle-ci a adopté l'amendement proposé (voir ci-joint), consciente qu'il était nécessaire afin de rendre soutenable le budget 2013 du groupe.

e) L'élargissement aux résidences secondaires et le rétablissement de la publicité après 20 heures : une poire pour la soif ?

Votre rapporteur pour avis note que les effets de la réforme de 2009, notamment en termes de financement, ne sont malgré tout pas encore résorbés.

Il considère ainsi qu'une éventuelle annulation de la taxe « télécoms » par la CJUE devrait entrainer une décision de la part de l'État.

Votre rapporteur n'a pas de tabou sur le sujet mais un cap à tenir : celui du financement pertinent de l'audiovisuel public.

Le retour de la publicité sur les écrans nocturnes de France Télévisions ou le rétablissement des résidences secondaires dans l'assiette de la contribution à l'audiovisuel public sont des pistes dont il faudra sérieusement discuter.

DEUXIÈME PARTIE : PRESSE

I. RENDEZ-VOUS 2013 : L'INDISPENSABLE RÉFORME DES AIDES PUBLIQUES DIRECTES ET INDIRECTES EN FAVEUR DE LA PRESSE

A. UN EFFORT RAISONNÉ DE MAÎTRISE BUDGÉTAIRE DANS UN CONTEXTE CONTRAINT

Conformément à une revendication de longue date portée par votre rapporteur pour avis, le programme 180 « Presse » regroupera, pour la première fois en 2013, l'intégralité des crédits budgétaires dédiés au soutien de la presse avec le rattachement des crédits en faveur de l'aide au transport postal de la presse au titre de la mission de service public de transport et de distribution de la presse . Ce transfert des crédits du programme 134 « Développement des entreprises et de l'emploi » de la mission « Économie » vers le programme 180 participe d'un objectif de renforcement de la lisibilité de la politique publique de soutien à la presse .

Le total des aides versées directement aux éditeurs et à d'autres organismes ou personnes chargées de la fabrication, de la distribution et de la diffusion de la presse devrait ainsi s'établir à 516,1 millions d'euros en crédits de paiement, contre 542,7 millions d'euros en 2012, soit une diminution de 5 % . Parmi ces aides, 119,6 millions d'euros étant consacrés aux abonnements de l'État à l'Agence France-Presse (AFP), en augmentation par rapport à 2012, le montant des aides directes en faveur de la presse s'élève à 396,5 millions d'euros en crédits de paiement, contre 420,7 millions d'euros en 2012, soit une diminution de 5,75 %.

Le montant prévisionnel des aides indirectes consenties à la presse correspond, selon le projet annuel de performances annexé au projet de loi finances, à un total d'environ 271 millions d'euros de dépenses fiscales, soit une augmentation de moins de 2 % par rapport à leur niveau de 2012, mais de près de 50 % par rapport à leur montant en 2011. Ces aides indirectes sont principalement constituées de l'application aux publications de presse d'un taux super-réduit de TVA de 2,1 % , correspondant à une dépense de 270 millions d'euros, le reste provenant marginalement de la déduction spéciale en faveur des entreprises de presse et de la réduction d'impôt pour souscription au capital des sociétés de presse.

Le chiffrage du manque à gagner à raison de l'application aux publications de presse d'un taux de TVA de 2,1 % est réalisé par rapport à un assujettissement des publications de presse à un taux de 7 % et non pas par rapport au taux normal de TVA de 19,6 % (qui, du reste, s'applique pourtant aux services de presse en ligne y compris lorsqu'ils présentent un caractère d'information politique et générale). Selon la Cour des comptes, dans son rapport sur l'exécution budgétaire de la mission « Médias, livre et industries culturelles » pour l'exercice 2011, le coût de la dépense fiscale par rapport au taux normal de TVA en 2011 (19,6 %), serait de 977,9 millions d'euros .

S'ajoute à ces aides indirectes l'exonération de contribution économique territoriale pour les entreprises de presse , susceptible de constituer une dépense fiscale avoisinant les 210 millions d'euros.

Au total, on peut ainsi évaluer l'effort inscrit au budget général de l'État en faveur de la presse écrite à près de 997,1 millions d'euros dans le projet de loi de finances pour 2013 .

Le budget général de l'État n'intègre pas le déficit accusé par La Poste dans son activité de transport de la presse, évalué à 313 millions d'euros en 2011 et constituant, indirectement, une aide publique supplémentaire au bénéfice des titres de presse. Dans ces conditions, le soutien public total consenti au secteur de la presse peut être estimé à plus de 1,3 milliard d'euros .

B. LA RÉFORME CLÉ DES AIDES À LA PRESSE : UNE DÉMARCHE LONGUE ET INACHEVÉE

1. Le décret du 13 avril 2012 n'est que la première étape d'une réforme de grande ampleur

A l'instar des préconisations formulées par notre collègue député Michel Françaix, rapporteur pour avis sur les crédits de la presse de la commission des affaires culturelles et de l'éducation de l'Assemblée nationale, votre rapporteur pour avis réclame de longue date une réflexion approfondie sur un ciblage des aides à la presse en faveur de la presse d'information politique et générale , contribuant à l'exercice par le lecteur de sa citoyenneté dans le cadre d'un débat éclairé. Si le projet de loi de finances pour 2013 maintient une forme de statu quo quant aux critères d'attribution des aides à la presse, un véritable débat devra être organisé entre les représentants de l'État et des différentes familles de presse sur les orientations suivantes :

- la priorisation de l'attribution des aides au profit des publications, quotidiennes ou périodiques, considérées comme présentant un caractère d'information politique et générale dans les conditions prévues à l'article D. 192 du code des postes et des télécommunications électroniques ;

- le maintien d'un principe de solidarité entre les familles de presse , quotidiens et magazines, en vue de la préservation des équilibres coopératifs des systèmes de distribution de la presse.

Sur un total d'aides à la presse avoisinant le milliard d'euros chaque année, les publications ne contribuant pas nécessairement à l'information politique et générale bénéficient d'une part substantielle du soutien public, en particulier au travers des aides indirectes et de l'application d'un taux de TVA super-réduit de 2,1 %.

La réforme des dispositifs de soutien public à la presse est un long chemin, qui s'appuie d'ores et déjà sur une série de rapports multipliant les diagnostics et les préconisations convergents :

- en 2009, le rapport de MM. Bruno Mettling et David Lubek, de l'inspection générale des finances, établit un diagnostic de l'impact socio-économique des aides publiques à la presse et propose une méthodologie d'évaluation rigoureuse et systématique de ces aides ;

- en 2010, le rapport de M. Aldo Cardoso préconise la rationalisation de la gouvernance des aides à la presse et un renforcement des mécanismes de contrôle de leur attribution , afin de garantir un pilotage stratégique et une gestion opérationnelle des dispositifs. Il recommande la mise en place d'un forum garantissant des échanges permanents entre l'administration et le secteur de la presse sur l'organisation des aides ;

- en 2011, la commission de concertation présidée par M. Roch-Olivier Maistre et réunissant les représentants des principales familles de presse publie un rapport précisant les modalités d'application des mesures visant à réformer la gouvernance des aides à la presse telles que proposées par le rapport de M. Cardoso.

Ces travaux ont abouti à la publication du décret n° 2012-484 du 13 avril 2012 relatif à la réforme des aides à la presse et au fonds stratégique pour le développement de la presse . Ce texte vise à réformer la gouvernance des aides publiques directes à la presse selon deux modalités principales :

- pour les entreprises bénéficiant d'un montant significatif d'aides publiques, une convention d'une durée de trois ans est signée avec l'État pour fixer les engagements réciproques et s'assurer d'un suivi régulier . Des incitations, sous forme de bonifications, peuvent être accordées à celles de ces entreprises ayant fait un effort particulier, notamment en matière de respect des normes de qualité et de responsabilité sociale des entreprises. Il est prévu une évaluation régulière de l'efficacité et de la pertinence des différentes aides. L'état annuel des montants maxima attribués ainsi que la ventilation par bénéficiaire sont désormais rendus publics ;

- un fonds stratégique pour le développement de la presse est créé, qui fusionne les deux principaux fonds d'aide aux projets industriels (le fonds d'aide à la modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale 9 ( * ) ) et numériques (le fonds d'aide au développement des services de presse en ligne 10 ( * ) ). Le fonds comprend trois sections : modernisation et mutation industrielle, innovations numériques, conquête de nouveaux lectorats. Ce fonds est piloté par un comité d'orientation paritaire présidé par un haut fonctionnaire.

Votre rapporteur pour avis considère que ce nouveau cadre réglementaire pose les conditions d'un renforcement du contrôle et de l'évaluation des différents dispositifs d'aide à la presse, afin de s'assurer en particulier que les fonds publics perçus ne se convertissent pas en subventions d'exploitation des entreprises de presse et qu'ils ne soient pas utilisés, en dernier ressort, pour alimenter en partie la rémunération des journalistes. En effet, le financement indirect des salaires des journalistes par le biais d'aides publiques constituerait un détournement du soutien financier de l'État, incompatible avec l'indépendance des médias d'information.

Votre rapporteur pour avis insiste sur le fait que le critère de production de contenus doit être sensiblement revalorisé dans l'attribution des aides au titre du fonds stratégique, afin de ne pas tenir compte uniquement des projets d'investissements lourds et des innovations coûteuses qui favorisent, pour l'heure, les grands groupes de presse à forte structure capitalistique.

2. Le ciblage des aides en faveur de la presse d'information politique et générale doit être approfondi

L'aide au transport postal de la presse constitue, de loin, le dispositif le plus coûteux mis en place au bénéfice de la presse. D'un montant de 249,4 millions d'euros en 2013, l'aide accuserait une baisse de 4 % par rapport à son niveau de 2012.

Pour autant, il convient de rappeler que l'activité de transport de la presse est encore largement déficitaire dans les comptes de La Poste : en raison d'une insuffisante couverture des coûts complets du transport postal de la presse par la revalorisation des tarifs négociée avec les éditeurs et la compensation versée par l'État au titre des charges de service public, La Poste a accusé un déficit de 313 millions d'euros en 2011 sur son compte « Presse ».

Le montant total des aides accordées par des opérateurs publics (État et La Poste) au transport postal de la presse est ainsi porté à 562,4 millions d'euros.

Or, notre collègue député Michel Françaix, rapporteur pour avis sur les crédits de la presse de la commission des affaires culturelles et de l'éducation, souligne que 46 % de l'avantage tarifaire postal demeuraient attribués en 2008 à des titres de presse ne présentant pas de caractère d'information politique et générale , dont 20 % pour seulement huit magazines couvrant l'actualité télévisuelle accaparant à eux seuls 53 millions d'euros d'avantage tarifaire postal 11 ( * ) .

ÉVOLUTION DU COMPTE « PRESSE » DE LA POSTE

(hors presse administrative)

(en millions d'euros)

2005

2006

2007

2008

2009

2010 (e)

2011 (e)

Recettes

695

700

704

705

655

662

670

dont chiffre d'affaires

453

466

475

473

425

420

429

dont contribution de l'État

242

234 (a)

229 (b)

232 (c)

230 (f)

242

241 (g)

Coûts (coûts complets)

-1 252

-1 174 (d)

-1 119

-1 122

-1 041

-1 032

-983

Contribution de La Poste (déficit)

-557

-474

-414

-417

-386

-370

-313

( a) 8 millions d'euros de gel budgétaire sur le programme 134.

(b) 8,1 millions d'euros de gel budgétaire sur le programme 134 + 4,3 millions d'euros non budgétés + solde interfonds non réglé au profit de La Poste à hauteur de 0,7 million d'euros, soit un manque à gagner de 13,1 millions d'euros.

(c) 9,6 millions d'euros de gel budgétaire sur le programme 134 + 1,6 million d'euros non compensés sur le programme 180 au titre du remboursement des sommes avancées par La Poste sur le ciblage.

(d) Volume des coûts complets selon les nouvelles règles 2007 approuvées par l'ARCEP - L'impact de cette modification de règles est de - 42 millions d'euros.

(e) A partir de 2009, le périmètre d'analyse est restreint à l'activité relevant strictement du cadre de la mission de service public de transport et de distribution de la presse - l'impact est de - 33 millions d'euros sur le chiffre d'affaires et de - 46 millions d'euros sur les coûts complets (hors présence territoriale).

(f) En 2009, la contribution versée par l'État à La Poste au titre de la mission de service public de transport et de distribution de la presse a été de 230 millions d'euros. La part des crédits inscrits sur le programme 180 au titre de cette contribution, soit 83 millions d'euros, a été versée en totalité.

( g) L'État reste redevable de 554 000 euros au titre de sa contribution de l'année 2011, non encore versés à ce jour, sur le programme 134.

Source : La Poste

Le Syndicat de la presse quotidienne régionale (SPQR) s'interroge lui-même sur le bien fondé d'une aide massive au transport postal de la presse qui va pour moitié seulement à la presse d'information politique et générale. Il rappelle que le montant hors aide facturé par La Poste par exemplaire (hors suppléments et hors préparation) est affiché à 0,66 euro, un chiffre pour le moins surprenant. En effet, lorsque la presse quotidienne régionale porte un quotidien national sept jours sur sept, le prix moyen facturé hors aide est de 0,45 euro. La comparaison avec nos voisins est également éclairante : les quotidiens belges sont facturés par le service postal de ce pays 0,2 euro par exemplaire acheminé.

Dans ces conditions, non seulement les parlementaires mais également les représentants de la presse contribuant au débat citoyen sont en droit de se demander si l'aide au transport postal bénéficie réellement à la presse. Ce mode de transport apparaît, de plus, sensiblement moins avantageux tant en termes de fidélisation des lecteurs abonnés qu'en termes de coût par rapport au portage.

Cette absence de ciblage spécifique de l'attribution des aides sur les titres d'information politique et générale vaut également pour les avantages fiscaux dont bénéficie le secteur de la presse dans son ensemble. En effet, comme le démontre M. Michel Françaix dans son rapport précité, la presse hors information politique et générale capte à elle seule près de 61 % de la dépense fiscale correspondant à l'application du taux super-réduit de 2,1 % aux publications de presse inscrites sur la liste de la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP).

L'ensemble de ces analyses conduisent votre rapporteur pour avis à réclamer la mise en place d'une concertation entre l'État, les opérateurs publics et privés chargés de la distribution de la presse et les représentants des différentes familles de presse afin de déterminer les modalités d'un meilleur ciblage des aides à la presse en faveur des titres d'information politique et générale . Il se félicite, en particulier, de la décision de la Cour des comptes de lancer au cours de l'année 2012 une enquête sur les aides à la presse, pilotée par la 3 e chambre, présidée par M. Patrick-Aubert Lefas. Il convient de ne pas attendre la veille de l'examen de la prochaine loi de finances pour entreprendre une vaste concertation sur la réforme des aides publiques à la presse.

3. La fiscalité en faveur de la presse doit faire l'objet d'une refonte globale
a) Opérer une refonte des taux de TVA applicables à la presse
(1) Vers une fiscalité neutre quelque soit le support de diffusion

Votre rapporteur pour avis est, de longue date, partisan de la mise en place d'une fiscalité neutre quelque soit le support de diffusion utilisé. Dès lors que les rédactions bi- ou multimédias se généralisent au sein des entreprises de presse et qu'un certain nombre de titres ont désormais basculé entièrement vers le tout numérique en supprimant leur édition « papier » ( Newsweek dernièrement), il semble logique que les services de presse en ligne se voient appliquer un taux de TVA équivalent à celui qui aurait prévalu en cas de diffusion imprimée.

À l'occasion de l'examen du projet de loi de finances pour 2012, le Sénat avait adopté, à l'initiative de votre rapporteur pour avis, un amendement visant à étendre à la presse en ligne le bénéfice du taux de TVA super-réduit de 2,1 % , jusqu'ici réservé à la presse imprimée, comme il l'avait fait pour le livre numérique au nom du principe de neutralité technologique. Malheureusement, cette disposition avait été supprimée en dernière lecture par l'Assemblée nationale sur demande du précédent gouvernement.

Certes, il est vrai que la législation communautaire constitue, pour l'heure, une véritable difficulté afin de garantir un traitement fiscal équitable de la presse imprimée et de la presse en ligne pour lequel votre rapporteur pour avis milite de longue date . Les autorités communautaires persistent à nous opposer que le droit de l'Union européenne n'autorise pas l'application d'un taux réduit de TVA aux publications de presse communiquées via un service fourni par voie électronique. Pour autant, l'obstination de votre rapporteur pour avis, unanimement soutenu par la commission de la culture du Sénat, avait déjà permis d'engranger une victoire de poids avec l'adoption par le Parlement de l'alignement de la fiscalité applicable aux livres numériques sur celle applicable aux livres imprimés. En cohérence avec ces efforts, la commission de la culture est tout aussi déterminée à étendre le bénéfice de cette égalité de traitement fiscal à l'ensemble des biens et services culturels, y compris la presse d'information politique et générale qui remplit une mission d'intérêt général en éclairant le débat citoyen .

Les modalités selon lesquelles les États membres de l'Union sont autorisés à fixer le taux applicable aux opérations assujetties à la TVA sont déterminées par la directive 2006/112/CE du Conseil du 28 novembre 2006, dite « directive TVA ». Les paragraphes 1 et 2 de l'article 98 de cette directive prévoient que soit un, soit deux taux réduits, qui ne peuvent être inférieurs à 5 %, peuvent être appliqués aux livraisons de biens et aux prestations de services des catégories limitativement énumérées en son annexe III. La sixième de ces catégories comprend les livraisons de biens suivants : « la fourniture de livres, sur tout type de support physique, y compris en location dans les bibliothèques (y compris les brochures, dépliants et imprimés similaires, les albums, livres de dessin ou de coloriage pour enfants, les partitions imprimées ou en manuscrit, les cartes et les relevés hydrographiques ou autres), les journaux et les périodiques, à l'exclusion du matériel consacré entièrement ou d'une manière prédominante à la publicité ».

C'est sur ce fondement, combiné avec une disposition transitoire permettant le maintien des taux inférieurs à 5 % qui préexistaient à l'établissement, en 1992, de la liste reprise dans l'annexe III, que le taux de 2,1 % est aujourd'hui appliqué en France métropolitaine, sur le fondement de l'article 298 septies du code général des impôts, aux opérations de « ventes, commissions et courtages portant sur les publications qui remplissent les conditions prévues par les articles 72 et 73 de l'annexe III » du même code. Ceci constitue l'une des principales mesures du régime économique de la presse écrite.

En revanche, si l'annexe III de la directive TVA mentionne bien les « journaux et périodiques », elle semble principalement viser les publications imprimées. En effet, l'article 98, paragraphe 2 de la directive 2006/112/CE exclut explicitement du bénéfice d'un quelconque taux réduit les services fournis par voie électronique . Ces règles ne permettent pas d'assimiler une publication communiquée par un service fourni par voie électronique à un journal ou à un périodique imprimé pour le bénéfice du taux super-réduit de TVA de 2,1 %. Ainsi, la possibilité pour la France d'assujettir l'ensemble des publications, dont celles communiquées par un service fourni par voie électronique, à un taux réduit de TVA est conditionnée par une évolution du droit de l'Union européenne.

À l'heure où l'équation économique de la presse en ligne se cherche encore, le secteur s'accommode difficilement d'une fiscalité alourdie par rapport à la presse papier . Aussi, les pouvoirs publics français s'emploient-ils à remédier à cette situation en obtenant une modification du droit européen. C'est notamment dans cette perspective que, par lettre de mission du 9 décembre 2010, le Président de la République de l'époque a demandé à M. Jacques Toubon de mener des concertations au niveau européen sur la fiscalité des biens et services culturels fournis par voie électronique.

En mai 2007, la Commission européenne avait déjà publié une étude sur les taux réduits de TVA appliqués aux biens et services dans les États membres. Celle-ci constate, d'une part, que des arguments économiques et d'efficacité fiscale plaident en faveur d'un taux unique de TVA, mais, d'autre part, que l'adoption de taux réduits pour favoriser la consommation de certains biens et services peut se défendre dans certains domaines strictement délimités. Dans sa communication du 5 juillet 2007, la Commission a ajouté à cette analyse strictement économique une dimension politique : elle y reconnaît que des objectifs d'intérêt général (elle cite notamment la culture) peuvent justifier l'application de taux réduits .

Le 7 juillet 2008, la Commission européenne a présenté une proposition de directive du Conseil visant à modifier la directive TVA afin d'accorder aux États membres la flexibilité nécessaire pour autoriser, à titre permanent, l'application de taux réduits de TVA à certains services spécifiques. Son aboutissement a été un accord politique trouvé difficilement au mois de mars 2009 sur une nouvelle directive 2009/47/CE du Conseil du 5 mai 2009. Cette directive n'intéresse toutefois que marginalement le secteur de la culture et de la communication, en ce qu'elle étend les dispositions applicables aux livres sur support papier aux seuls « livres audio ». Il s'agit, au nom du principe de neutralité, d'étendre l'application du taux réduit de TVA aux livres enregistrés sur un support physique tel que disque compact ou cédérom. Les enregistrements contenant des éléments supplémentaires restent soumis au taux normal. Cette avancée, modeste, ne constitue donc en rien une remise en cause de l'exclusion du bénéfice de tout taux réduit de TVA pour les services prestés par voie électronique.

Qui plus est, cet accord politique de mars 2009 comporte une déclaration dans laquelle plusieurs États membres soit s'opposent à toute nouvelle extension des taux réduits de TVA (notamment l'Allemagne), soit soumettent cette extension à la suppression concomitante de catégories existantes (notamment le Danemark) . Au-delà, les perspectives d'évolutions potentielles s'agissant des principaux enjeux pour le secteur de la culture et des médias (en particulier la possibilité d'appliquer un taux réduit aux produits culturels prestés par voie électronique - presse en ligne, vidéo, livre numérique et musique à la demande) ont été renvoyées à la nouvelle Commission qui a pris ses fonctions en février 2010.

La Commission européenne a, dans un premier temps, souligné dans sa communication sur la stratégie numérique européenne publiée en mai 2010, que « les défis de la convergence devraient être abordés à l'occasion de tout réexamen de la politique générale, y compris en matière fiscale ». Ensuite, le livre vert sur l'avenir de la TVA que cette dernière a adopté le 1er décembre 2010, souligne que « le système de TVA de l'Union européenne a évolué moins vite que l'environnement technologique et économique , marqué par la transformation rapide des modèles commerciaux, le recours accru aux nouvelles technologies, l'importance croissante des services - qui représentent aujourd'hui environ 70 % de l'activité économique - et, plus généralement, la mondialisation de l'économie ».

Par ailleurs , le livre vert pose la question de mettre au même niveau les biens culturels, qu'ils soient sur un support numérique ou pas . En effet, il indique : « De plus, il subsiste des incohérences dans les taux de TVA appliqués à des biens ou services comparables. Ainsi, les États membres peuvent appliquer un taux réduit à certains biens culturels mais doivent appliquer le taux normal aux services en ligne concurrents de ces biens, comme les livres ou les journaux électroniques . Conformément à la « stratégie numérique pour l'Europe », les défis de la convergence entre les environnements numériques et physiques doivent être pris en compte à l'occasion de tout réexamen de la politique générale, y compris en matière fiscale ».

En outre, le rapport de Mme Sanchez-Schmidt, députée européenne, intitulé « Libérer le potentiel des industries culturelles et créatives », adopté par le Parlement européen en séance plénière le 12 mai 2011, insiste « sur la nécessité de réfléchir aux conditions optimales permettant le développement du marché unique, notamment en matière de fiscalité, par exemple, concernant les retenues à la source applicables aux revenus de droits d'auteur, et en permettant la mise en place d'un taux de TVA réduit pour les biens et services culturels diffusés sur support physique ou distribués en ligne, afin de favoriser leur essor ».

Dans ce contexte, la position française continue d'être relayée régulièrement auprès de la Commission européenne et de nos partenaires au sein de l'Union, tant en bilatéral qu'à l'occasion de débats à l'échelle de l'Union. Ces différentes démarches ont amené les institutions européennes et les États membres à affirmer ou réaffirmer leurs positions en la matière.

Ainsi, dans sa communication sur l'avenir de la TVA du 6 décembre 2011, la Commission estime que la révision de la structure actuelle des taux de TVA devrait répondre aux principes directeurs selon lequel « des biens et services similaires devraient être soumis au même taux de TVA et le progrès technologique devrait être pris en considération à cet égard, de façon à ce que l'on puisse répondre au défi consistant à assurer la convergence entre les supports physiques et électroniques ».

Ensuite, la Commission souligne dans sa communication sur le commerce électronique du 11 janvier 2012 l'impact significatif du taux de TVA sur l'évolution de l'offre, tout en rappelant la nécessité de prendre en compte les progrès technologiques dans la convergence à réaliser entre l'environnement en ligne et physique. En outre, le Parlement européen s'est à nouveau prononcé par deux fois en faveur de l'adoption d'un taux réduit de TVA, similaire à celui s'appliquant aux mêmes oeuvres sur support physique (« l'Union européenne pourrait permettre aux États membres d'appliquer, de manière temporaire, un taux réduit de TVA sur les services à contenu culturel fournis par voie électronique ») 12 ( * ) .

Enfin, un certain nombre d'États sont sensibles à l'enjeu de compétitivité des industries culturelles européennes et au lien pouvant exister entre baisse du taux de TVA et la réduction du téléchargement illégal. A ce stade, le Luxembourg, la Suède, les Pays-Bas et l'Italie soutiennent la position française. Un autre groupe d'États membres pourrait être favorable à terme ou à tout le moins ne pas s'opposer à la révision de l'annexe III de la directive TVA : Malte, la République tchèque, la Lituanie, la Pologne et l'Espagne. En revanche, l'Allemagne, le Royaume-Uni, le Danemark, l'Autriche, le Portugal et la Finlande semblent à ce stade rester franchement opposés à la réflexion .

Dans une allocution devant les membres de l'Association européenne des éditeurs de journaux (ENPA) réunis en assemblée générale à Nicosie, le 25 mai 2012, la commissaire européenne à l'éducation, à la culture, au multilinguisme et à la jeunesse, Mme Androulla Vassiliou, a dénoncé « une discrimination à l'encontre des publications en ligne qui sont soumises à un taux de TVA plus élevé que les journaux imprimés » et a estimé que « le taux zéro ou réduit devrait être maintenu pour la presse imprimée et que la presse numérique devrait bénéficier d'un traitement semblable » 13 ( * ) .

Si la France continue d'insister auprès de ces interlocuteurs sur l'urgence qu'il y a à faire avancer ce dossier au niveau européen, il demeure que le travail de conviction à mener reste important, puisque la révision éventuelle des structures des taux de TVA s'effectuera à l'unanimité des États membres au Conseil . Dans un contexte économique et fiscal difficile de surcroît, la possibilité d'appliquer des taux réduits de TVA à l'ensemble de la presse en ligne (et, au-delà, aux services culturels en ligne) est donc un objectif de négociation de moyen terme.

(2) Réfléchir à une modulation du taux de TVA en fonction du contenu

S'il est indispensable de conserver le taux de TVA super-réduit de 2,1 % pour la presse d'information politique et générale, quelque soit le support de diffusion considéré, il peut être envisagé, en revanche, d'appliquer aux autres familles de presse ne présentant pas ce caractère d'information politique et générale un taux de TVA intermédiaire plus élevé , de 5,5 % ou 7 %. La difficulté consiste précisément à établir une distinction aussi claire et acceptable que possible auprès des acteurs du secteur entre une presse d'information politique et générale et une presse consacrée principalement au divertissement et aux loisirs .

b) Encourager la production de valeur ajoutée informative

Votre rapporteur pour avis avait déjà alerté les pouvoirs publics sur la nécessité d'examiner l'opportunité et la faisabilité d'une mesure proposée par le Syndicat de la presse quotidienne nationale en vue de mieux valoriser la production de valeur ajoutée en matière de presse. Dans cette logique, les éditeurs proposaient d'instaurer un prélèvement, au maximum de 1 %, sur l'abonnement à Internet pour financer la création des contenus de presse sur Internet . Un tel dispositif, au niveau français, était censé préfigurer de l'instauration d'un dispositif fiscal au niveau européen, en vue de redistribuer, au profit des producteurs de contenus, la valeur captée sur la toile par les intermédiaires de la technologie et agrégateurs de contenus d'actualité ( Google, Apple, Facebook ...).

Le Syndicat de la presse quotidienne nationale (SPQN) a indiqué, au mois de février 2012, qu'un prélèvement sur la croissance numérique frappant les fournisseurs d'accès à Internet, les moteurs de recherche, les fabricants, etc., pourrait rapporter entre 140 et 150 millions d'euros.

L'Association de la presse d'information politique et générale, présidée par Mme Nathalie Collin, milite pour une rémunération plus juste des contenus numériques de la presse . Face au risque de captation de la valeur ajoutée journalistique produite par la presse d'information par les moteurs de recherche et agrégateurs qui tirent des ressources considérables de la publicité accompagnant cette diffusion, les éditeurs français ont interpelé les pouvoirs publics sur la nécessité d'instaurer un nouveau droit voisin au bénéfice des organismes de presse ouvrant droit à une rémunération équitable de l'exploitation des contenus de presse par des prestataires d'un service de référencement ou par l'exploitant d'un moteur de recherche.

Ce dispositif, appelé « taxe Google » en raison du principal moteur de recherche et de son volet d'informations « Google Actualités » visés par les critiques des éditeurs, s'inspire d'un projet de loi adopté par le gouvernement allemand et en cours d'examen par le Bundestag, surnommé « Lex Google ». Ce texte viserait à contraindre les moteurs de recherche à rémunérer les journalistes et les éditeurs de presse dont les contenus feraient l'objet d'une reproduction sur des flux gérés par des agrégateurs. Un projet de loi similaire avait été présenté au Parlement belge, mais son examen avait été écarté en raison des menaces de déréférencement des sites d'information belges formulées par les moteurs de recherche visés. Le Portugal a lui-même ouvert une réflexion sur les modalités de la rémunération des producteurs de contenus diffusés sur les moteurs de recherche.

Après avoir rencontré les représentants de la presse d'information politique et générale et du moteur de recherche Google, le Président de la République a enjoint chacun des acteurs à négocier un accord sur une éventuelle rémunération des contenus de presse diffusés par les agrégateurs d'actualités . A défaut d'un tel accord, la question de la redistribution de la valeur ajoutée informative entre la presse et les moteurs de recherche pourrait alors être traitée par la voie législative.

M. Marc Schwartz, conseiller référendaire à la Cour des comptes, a été nommé par la ministre de la culture et de la communication en novembre 2012 médiateur dans les négociations entre Google et les éditeurs de presse sur les modalités d'une rémunération des contenus de presse référencés par les moteurs de recherche.

La mise en place de cette concertation est symbolique du problème global de la rémunération des producteurs de contenus face aux grands acteurs du référencement sur la toile et de la communication électronique.

C. PRIVILÉGIER UNE RÉORIENTATION DES AIDES À LA PRESSE VERS LES PRATIQUES INNOVANTES ET LES VOIES D'AVENIR

Aussi bien dans le domaine de la distribution et de la diffusion de la presse que dans celui modernisation sociale et industrielle des entreprises de presse, les aides publiques ont vocation à être recentrées sur l'accompagnement de méthodes et politiques innovantes qui permettront de faire émerger un modèle économique solide, durable et compétitif pour le secteur de presse. Le critère de la production de contenus doit néanmoins constituer une valeur cardinale dans l'attribution des aides publiques, en prenant soin de rééquilibrer la répartition des fonds publics entre les grands groupes de presse, en mesure de porter des projets d'investissements ambitieux, et les publications d'opinion, aux ressources publicitaires et capitalistiques limitées, indispensables au pluralisme de la presse .

1. Renforcer l'aide au portage au bénéfice de la presse quotidienne nationale

D'un montant de 37,6 millions d'euros en 2013, l'aide au portage de la presse accuse une diminution de plus de 16 % par rapport à son niveau de 2012 . Le dispositif mis en place par l'État en faveur du développement du portage comprend également une exonération des charges patronales pour les vendeurs-colporteurs et porteurs de presse de 16,9 millions d'euros en 2013, soit une augmentation de 9 % par rapport à 2012. Le montant combiné de ces deux aides s'établit à 54,5 millions d'euros, soit une diminution de 10 % par rapport à 2012.

Comme il a eu l'occasion de le souligner dans son avis sur le projet de loi de finances pour 2012, votre rapporteur pour avis rappelle que la répartition par famille de presse des crédits du fonds d'aide au portage en 2011 plaide clairement pour une accentuation de l'effort en faveur du portage des quotidiens nationaux, dès lors que l'aide continue d'être accaparée par les quotidiens régionaux.

Type de presse

Montant total de l'aide

Pourcentage par rapport à la dotation du fonds

Presse quotidienne nationale (PQN)

17 127 261 €

25,36 %

Presse quotidienne régionale (PQR)

41 347 378 €

61,23 %

Presse quotidienne départementale (PQD)

6 748 527 €

9,99 %

Presse hebdomadaire régionale (PHR)

1 341 817 €

1,98 %

Hebdomadaire nationaux (France et étranger)

711 612 €

1,05 %

Presse quotidienne d'outre-mer (PQOM)

243 773 €

0,36 %

Hebdomadaires régionaux

184 €

0,00027 %

Montant total de l'aide

67 520 552 €

100,00 %

Source : Direction générale des médias et des industries culturelles du ministère de la culture et de la communication

La presse quotidienne nationale (PQN) constitue le segment de presse le plus dynamique en matière de portage, en affichant une progression de plus de 33 % sur les cinq dernières années. C'est pourquoi votre rapporteur pour avis invite le Gouvernement à privilégier une réorientation du fonds d'aide au portage en faveur de la PQN , en accordant une place prépondérante à l'aide au flux récompensant l'augmentation du nombre d'exemplaires portés par rapport aux deux années antérieures à l'attribution de l'aide, selon des conditions précisées dans le cadre d'une convention pluriannuelle conclue avec les éditeurs de la PQN.

Votre rapporteur pour avis se félicite des avancées significatives réalisées par les éditeurs dans le sens d'une régularisation du statut des porteurs et vendeurs-colporteurs, via la conclusion de nouvelles conventions collectives. Il tient également à saluer les efforts réalisés par la presse quotidienne régionale afin de favoriser le portage des quotidiens nationaux par la mutualisation de son réseau : ce sont plus de 16 millions d'exemplaires de quotidiens nationaux que la presse quotidienne régionale a portés en 2011, soit une progression de 53 % par rapport à 2009. Près de 70 000 exemplaires transitent chaque jour par les réseaux de portage de la presse quotidienne régionale.

D'une façon générale, votre rapporteur pour avis souhaite que la réforme des aides à la presse permette un rééquilibrage entre l'aide au portage , qui fait la preuve de son efficacité tant en termes de coût qu'en termes de fidélisation du lectorat, et l'aide au transport postal , insuffisamment ciblée sur la presse citoyenne, particulièrement coûteuse, en particulier pour La Poste, et qui favorise, du reste, un mode de distribution peu respectueux de l'environnement.

2. La section 2 du fonds stratégique pour le développement de la presse devrait faire l'objet d'une réorientation vers la presse d'information politique et générale

La dotation du fonds stratégique pour le développement de la presse, qui s'établit en 2013 à 33,5 millions d'euros, est en diminution de 12,5 % par rapport à son niveau de 2012. Créé par le décret du 13 avril 2012 précité, il fusionne deux fonds d'aide à la modernisation :

-  le fonds d'aide à la modernisation de la presse quotidienne et assimilée d'information politique et générale, créé en 1999 (section 1) ;

- le fonds d'aide au développement des services de presse en ligne, créé en 2009 (section 2).

En outre, sa troisième section reprend l'objectif du fonds d'aide à la distribution et à la promotion de la presse française à l'étranger (qui est de favoriser la diffusion, hors de France, des quotidiens et des publications périodiques français qui apportent une contribution significative au rayonnement de la pensée et de la culture françaises), tout en étendant cet objectif de conquête de nouveaux lectorat à des publics présents sur le territoire français : public jeune ou publics « empêchés » (personnes incarcérées par exemple).

Le fonds est destiné à financer :

- au titre de sa première section : les opérations de mutation et de modernisation industrielles de la presse quotidienne imprimée ;

- au titre de sa deuxième section : les innovations technologiques de la presse en ligne ;

- au titre de sa troisième section : les investissements en faveur de la conquête de nouveaux lectorats pour les différentes familles de presse éligibles au fonds.

Le point commun entre les différentes actions soutenues par le fonds stratégique est la notion d'investissement : investissement matériel et industriel pour la première section, investissement numérique pour la deuxième, et investissement dans la conquête de parts de marché pour la presse pour la troisième.

Le décret du 13 avril 2012 procède à une extension du champ des bénéficiaires des aides : les entreprises de presse éditrices d'au moins une publication quotidienne apportant régulièrement des informations et des commentaires sur l'actualité de l'ensemble des disciplines sportives (soit concrètement L'Équipe ) deviennent éligibles à la première section du nouveau fonds ; les quotidiens gratuits d'information deviennent également éligibles à la première section du fonds pour la part de leurs tirages réalisés dans une imprimerie de presse. Ces catégories de presse étaient déjà éligibles au fonds d'aide au développement des services de presse en ligne, créé en 2009, mais pas au fonds de modernisation de la presse.

L'opération « Mon journal offert », conduite sur la période 2009-2011, a rencontré un vif succès auprès des jeunes . Sur plus de 900 000 demandes enregistrées, ce sont 630 000 jeunes qui ont bénéficié d'un abonnement gratuit au quotidien de leur choix, financé à parts égales par l'État et les éditeurs. Supprimée par le précédent Gouvernement en 2012, elle ne sera pas reconduite en 2013. Il est à noter que la section 3 du fonds stratégique pour le développement de la presse prévoit déjà des crédits en faveur des stratégies innovantes consacrées à la conquête et à la fidélisation de nouveaux lectorats, en particulier les jeunes.

L'objectif de fidélisation des jeunes doit demeurer prioritaire : si les pouvoirs publics n'y sont pas parvenus durablement dans le cadre de l'opération « Mon journal offert », la recherche de nouveaux moyens permettant d'attirer ce lectorat vers une lecture assidue de la presse constitue assurément un enjeu d'avenir .

En outre, le fonds stratégique apportera des progrès en matière de gouvernance des aides :

- un comité de pilotage unique, rassemblant les représentants des différentes familles de presse éligibles au fonds sous l'autorité d'un président, proposera l'attribution des aides ;

- la répartition des crédits entre les trois sections sera déterminée par le directeur général des médias et des industries culturelles en fonction des demandes présentées par les éditeurs. La répartition pourra être ajustée en cours d'année en fonction des besoins ;

- le fonds unique permettra une meilleure répartition des projets entre les trois sections : lorsqu'une demande d'aide porte sur un projet susceptible d'être examiné à la fois dans le cadre de la première et de la deuxième section du fonds (cas des projets bi-média, de plus en plus nombreux dans la presse), elle sera affectée à la première section.

Enfin, pour répondre au souhait de la mission présidée par M. Aldo Cardoso de conditionner le maintien de certaines aides à la formalisation d'une stratégie de redressement des titres, toute attribution de subvention au titre du fonds stratégique sera subordonnée à la conclusion avec l'État d'une convention cadre formalisant la stratégie de développement de l'entreprise et les objectifs poursuivis pour les projets susceptibles de bénéficier d'une aide au titre du fonds pour les trois années à venir.

Pour 2012, la répartition des crédits entre les trois sections du fonds a été fixée selon la clé de répartition suivante :

- section 1 : 45 % ;

- section 2 : 40 % ;

- section 3 : 15 %.

Le comité d'orientation du fonds stratégique s'est réuni pour la première fois le 10 juillet 2012 dans sa formation relative à la première section, et le 12 juillet 2012 dans sa formation relative à la deuxième section.

Votre rapporteur pour avis a constaté une augmentation significative de nombre de titres de presse magazine ne présentant pas de caractère d'information politique et générale bénéficiaires du fonds d'aide au développement des services de presse en ligne (désormais section 2 du fonds stratégique). En effet, la ventilation de cette aide par familles de presse fait apparaître l'évolution suivante au cours de la période 2009-2011 :

Presse quotidienne nationale

Presse quotidienne régionale et locale

Autre presse locale

Presse magazine d'opinion

Presse magazine et spécialisée non IPG

Pure players IPG

Autres pure players

2009

32 %

37 %

3 %

16 %

7 %

6 %

-

2010

23 %

25 %

2 %

16 %

16 %

15 %

3 %

2011

22 %

4 %

3 %

22 %

25 %

15 %

9 %

Source : Direction générale des médias et des industries culturelles

Entre 2009 et 2011, la presse quotidienne nationale et la presse locale ont connu une diminution du nombre de leurs bénéficiaires de l'aide au développement des services de presse en ligne, alors que les aides aux projets de la presse magazine, de la presse spécialisée et des pure players (services de presse en ligne sans édition papier) ont progressé. Le nombre de dossiers présentés par les pure players a considérablement augmenté : 74 dossiers présentés en 2011, contre 23 en 2010 et 6 en 2009.

Par conséquent, votre rapporteur pour avis souhaite interpeller le Gouvernement sur la nécessité de favoriser le développement de la diffusion sur support numérique de la presse d'information politique et générale , en particulier au sein de la presse quotidienne.

II. UN SYSTÈME COOPÉRATIF DE DISTRIBUTION AUX ABOIS

A. LA RÉFORME DES MÉCANISMES DE RÉGULATION DOIT ÊTRE APPROFONDIE

Discutée pied à pied avec l'ensemble des acteurs du secteur de la distribution de la presse par votre rapporteur pour avis, et Jacques Legendre, auteur du texte, la loi n° 2011-852 du 20 juillet 2011 relative à la régulation du système de distribution de la presse a permis de mettre un terme à une situation de blocage permanent dans laquelle l'instance professionnelle de régulation, le Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP) ne parvenait pas à faire évoluer les règles de la distribution de la presse en l'absence de compétence normative clairement affirmée dans la loi n° 47-585 du 2 avril 1947 relative au statut des entreprises de groupage et de distribution des journaux et publications périodiques, dite loi « Bichet ».

La loi a ainsi mis en place un système de régulation bicéphale , au sein duquel les professionnels du secteur de la distribution élaborent en concertation les normes régissant la distribution de la presse, leur caractère exécutoire reposant sur leur validation par l'Autorité de régulation de la distribution de la presse (ARDP). Ce fonctionnement dual a, pour l'heure, fait la preuve de son efficacité : les questions de fonds sont instruites dans des délais raisonnables par le CSMP qui démontre une très grande réactivité et les considérations juridiques et de respect des principes de solidarité coopérative sont prises en charge par l'ARDP. Le CSMP a salué ainsi les apports significatifs de l'ARDP au travail normatif, dans le cadre de relations de confiance et transparentes.

La loi du 20 juillet 2011 a constitué une étape importante dans la résolution des problèmes structurels du secteur de la distribution de la presse. Les éditeurs et le CSMP ont pleinement pris conscience de l'urgence des réformes qui s'imposaient. Depuis l'entrée en vigueur de la loi précitée, le CSMP a pris plusieurs décisions de portée générale, majeures pour l'avenir du secteur, qui ont été totalement ou partiellement rendues exécutoires par l'ARDP :

- décision n° 2011-01 relative à la fixation des conditions de rémunération des agents de la vente de presse, adoptée par l'assemblée du CSMP le 1er décembre 2011 (exécutoire) ;

- décision n° 2011-02 relative à l'assortiment des titres servis aux points de vente de presse, adoptée par l'assemblée du CSMP le 22 décembre 2011 (exécutoire) ;

- décision n° 2011-03 relative à la mise en place d'une péréquation inter-coopératives pour le financement de la distribution de la presse quotidienne d'information politique et générale, adoptée par l'assemblée du CSMP le 22 décembre 2011 (partiellement exécutoire) ;

- décision n° 2012-01 fixant la durée de préavis à respecter par les éditeurs qui retirent la distribution d'un titre de presse à une messagerie de presse ou qui se retirent d'une société coopérative de messageries de presse dont ils sont associés, adoptée par l'assemblée du CSMP le 21 février 2012 (exécutoire) ;

- décision n° 2012-02 relative à la fourniture par les sociétés coopératives de messageries de presse et les entreprises commerciales mentionnées à l'article 4 de la loi du 2 avril 1947 des documents et informations relatifs à leur situation économique et financière, adoptée par l'assemblée du CSMP le 28 juin 2012 (exécutoire) ;

- décision n° 2012-03 fixant la participation financière forfaitaire aux frais de dossier en matière de conciliation, les modalités de paiement de cette participation et le barème sur lequel est fondé le calcul des frais d'une procédure de conciliation, adoptée par l'assemblée du CSMP du 10 mai 2012 ;

- décision n° 2012-04 du 26 juillet 2012 fixant le schéma directeur des dépositaires centraux de presse pour la période 2012-2015 (décision en cours de transmission à l'ARDP en vue de devenir exécutoire).

Pour autant, votre rapporteur pour avis, qui militait dès l'été 2011 pour une réforme encore plus ambitieuse de la régulation du système de distribution de la presse, est conscient des limites de l'organisation bicéphale introduite par la loi du 20 juillet 2011. Les marges de manoeuvre de l'ARDP dans l'élaboration des normes de régulation demeurent extrêmement contraintes : dans une logique somme toute assez binaire, l'autorité ne peut que décider de valider ou de rejeter les projets de décision soumis par le CSMP, sans disposer d'une véritable capacité d'amendement qui serait pourtant la bienvenue compte tenu de son niveau d'expertise juridique et de son autorité morale. Les interventions de l'ARDP se réduisent encore à celles d'un juge administratif chargé de prévenir toute erreur manifeste d'appréciation du droit en vigueur .

Votre rapporteur pour avis constate, dans ces conditions, que l'idée selon laquelle l'intervention de l'ARDP dans la régulation du système de distribution devrait prendre de l'ampleur commence à faire son chemin au sein de la communauté des éditeurs. S'il est vrai que le CSMP assume les responsabilités qui lui sont confiées par la loi, le fait est que les décisions prises sont rapidement remises en cause dans le cadre du procès en légitimité plus général qui lui est traditionnellement adressé. L'ARDP, en raison de l'indépendance reconnue des magistrats qui la composent et de l'absence de conflits d'intérêts en son sein, a vocation à s'imposer comme la seule instance en mesure de faire prévaloir l'intérêt général du secteur sur les intérêts particuliers des parties en présence . Les menaces de recours systématique à la voie contentieuse formulées par certains acteurs du secteur (dont en particulier les Messageries lyonnaises de presse) contre des décisions pourtant incontournables (telles que la durée du préavis de départ en fonction de l'ancienneté de la relation commerciale entre les éditeurs et la coopérative de messageries ou les conditions de la péréquation inter-coopératives) plaident pour la constitution d'une autorité administrative indépendante de plein exercice, composée de magistrats, d'experts et de personnalités qualifiées issues du secteur et dont l'indépendance serait clairement établie, à laquelle serait attribué un véritable pouvoir normatif de régulation du système de distribution de la presse .

La préservation des équilibres coopératifs du système de distribution de la presse est aujourd'hui le principal défi pour l'avenir du secteur. Le réseau coopératif de distribution a été historiquement mis en place afin de garantir la diffusion sur l'ensemble du territoire de la presse quotidienne nationale. La presse magazine bénéficie, aujourd'hui, des mécanismes de solidarité coopérative qui articulent ce système. Il apparaît donc logique qu'elle en assume une partie des surcoûts. Les Messageries lyonnaises de presse (MLP) tirent profit, pour l'heure, de cette architecture sans pour autant participer dans des conditions d'équité à la soutenabilité financière de cette solidarité coopérative . En effet, l'ARDP a reconnu que la presse magazine, majoritaire au sein des MLP, bénéficie de la qualité d'un réseau de distribution mutualisé qui s'est développé, historiquement, pour permettre en tous lieux et dans des délais très contraints la distribution des quotidiens 14 ( * ) .

Or, les barèmes de la distribution ayant été revalorisés avant l'été 2012, les conditions semblent réunies pour que les MLP soient en mesure de participer, de façon effective, au financement de ces mécanismes de solidarité dans le cadre de la péréquation inter-coopérative.

La société coopérative Presstalis, pour sa part, entendait que les règles de la péréquation prennent en compte les surcoûts historiques de distribution qu'elle assume. Conformément aux recommandations de l'ARDP, il a été convenu que le nouveau système de péréquation s'appuiera sur une évaluation objective des surcoûts, en ne retenant que les surcoûts industriels. L'objectif de la péréquation inter-messageries consiste à faire supporter aux Messageries lyonnaises de presse une partie du coût de la distribution des quotidiens qui constitue la charge la plus lourde au sein des comptes de Presstalis. En effet, les éditeurs de la presse magazine représentés au sein du conseil d'administration de Presstalis sont de moins en moins disposés à participer au financement de la distribution des quotidiens, les éditeurs des quotidiens ne s'acquittant que de 60 % du coût de la distribution de leurs titres. Votre rapporteur pour avis rappelle que l'esprit de responsabilité doit conduire chacun des acteurs en présence à prendre conscience de la nécessité de coopérer afin de garantir la viabilité du système de distribution .

La décision n° 2012-05 du CSMP instituant un mécanisme de péréquation entre coopératives de messageries de presse s'appuie sur les conclusions du rapport établi par le cabinet Mazars qui a permis d' isoler les charges spécifiques résultant des contraintes structurelles de la distribution de la presse quotidienne (contraintes horaires, travail de nuit et du dimanche, schéma logistique particulier).

Semble progressivement s'imposer l'idée selon laquelle les deux principales sociétés de messageries de presse en présence sur le marché de la distribution doivent renforcer leur coopération, voire étudier les conditions d'un rapprochement. Face à l'opposition manifestée par les MLP contre une fusion à terme des deux messageries, certains préconisent la mise en place d'une société commune de moyens chargée de mutualiser les frais de transport . Quelle que soit la décision qui sera prise quant aux modalités de ce rapprochement de plus en plus incontournable, force est de constater que l'on s'achemine petit à petit vers un nouveau système monopolistique de distribution régulé . Dans ces conditions, le renforcement des prérogatives normatives de l'ARDP semble d'autant plus inéluctable , face aux limites de l'autorégulation par les éditeurs au sein du CSMP.

B. LE SAUVETAGE FINANCIER DE PRESSTALIS : UNE OPÉRATION DE TOUS LES DANGERS

L' accord tripartite conclu, le 5 octobre 2012, entre la direction de Presstalis, les éditeurs des coopératives qui lui sont associées et l'État permet de garantir la poursuite de l'exploitation de la messagerie, sous le contrôle du tribunal de commerce de Paris. Votre rapporteur pour avis salue les efforts significatifs consentis par l'État et les éditeurs au sauvetage financier de Presstalis :

- l'État abondera le plan de sauvetage de Presstalis en augmentant l'aide à la modernisation de la presse quotidienne nationale de 15 millions d'euros sur 2012-2013, à hauteur de 5 millions d'euros en 2012, puis 10 millions d'euros en 2013. Il prévoit également la mise en place d'un prêt au titre du fonds pour le développement économique et social de 20 millions d'euros en deux tranches de 10 millions d'euros en 2012 puis 2013 ;

- les éditeurs ont consenti à une augmentation de capital correspondant à 0,5 % du chiffre d'affaires de distribution de la presse de Presstalis (soit 7 millions d'euros), à une augmentation d'un point du barème (soit 15 millions d'euros), ainsi qu'à des délais de règlement des soldes et des règlements définitifs correspondant à une facilité de trésorerie de l'ordre de 10 millions d'euros. En outre, les éditeurs ont donné leur accord pour que Presstalis utilise la trésorerie issue des opérations de ventes de la presse, pour un montant maximum de l'ordre de 90 millions d'euros.

Néanmoins, votre rapporteur pour avis s'inquiète de la perspective de la mise en oeuvre par l'entreprise Presstalis d'un plan social à caractère conventionnel particulièrement lourd . Si certains avancent un chiffre de 1 250 salariés potentiellement concernés par ce plan, la direction de Presstalis indique que cet effectif pourrait être inférieur à l'échelle globale du plan de restructuration.

Dans ces conditions , votre rapporteur pour avis estime qu'il n'est pas possible de renvoyer les organisations syndicales représentatives dos au mur , en les réduisant à choisir entre un plan social conventionnel ou la mort de Presstalis. Une telle situation, potentiellement explosive, accélérerait la dégradation continue de la vente au numéro et l'éclatement anarchique du système de distribution, et serait fatale pour nombre de titres de presse .

Par conséquent, des solutions de reclassement ou d'accompagnement et de réinsertion devraient pouvoir être trouvées pour les salariés exposés au plan social.

Le système de distribution ne peut se permettre de repousser les réformes courageuses qu'appelle la relance de la vente au numéro, dans un marché bouleversé par l'essor de la consultation et de l'achat de la presse en ligne, notamment grâce aux tablettes digitales et le basculement accéléré d'un certain nombre de titres sur le « tout numérique » . Le secteur prévoit une diminution de la vente au numéro de 8 % en 2012. Cette baisse devrait atteindre - 25 % sur les quatre prochaines années .

III. L'AGENCE FRANCE-PRESSE : PRÉSERVER UN FLEURON MONDIAL DE L'INFORMATION

L'État verse à l'Agence France-Presse (AFP) le prix des abonnements annuels qu'il a souscrits au profit de certains de ses services, sur le fondement de la convention du 18 septembre 1958, modifiée à plusieurs reprises par avenants. Le montant de ces abonnements s'établit, en 2013, à 119,6 millions d'euros contre 117,5 en 2012, conformément à la norme d'évolution figurant dans le contrat d'objectifs et de moyens (COM) entre l'État et l'AFP conclu en décembre 2008 et qui couvre une période de cinq ans, de 2009 à 2013.

Afin d'améliorer la compatibilité de ce dispositif avec le droit communautaire, il convient de distinguer plus clairement le montant des abonnements payés par l'État pour bénéficier des services commerciaux de l'agence et les compensations qui seraient dues par l'État au titre de l'accomplissement de missions d'intérêt général préalablement définies. Une mesure législative a été insérée dans la dernière proposition de loi du député Jean-Luc Warsmann relative à la simplification du droit, qui contenait déjà un article relatif au régime juridique des agences de presse.

Ainsi, l'article 100 de la loi n° 2012-387 du 22 mars 2012 relative à la simplification du droit et à l'allègement des démarches administratives a complété l'article 13 de la loi n° 57-32 du 10 janvier 1957 portant statut de l'Agence France-Presse, afin de prévoir expressément, parmi les ressources de l'agence, « la compensation financière par l'État des coûts nets générés par l'accomplissement de ses missions d'intérêt général ». La compensation par l'État des missions d'intérêt général de l'AFP devrait notamment permettre de compenser en partie les coûts induits par l' entretien d'un réseau mondial , en tant que principale mission d'intérêt général.

Deux objectifs sont poursuivis dans la fixation des sommes versées par l'État : l'absence de sur-compensation des missions d'intérêt général et la préservation de l'indépendance financière de l'AFP . In fine , les sommes que l'État versera à l'AFP ne devraient pas évoluer significativement par rapport au montant actuel des abonnements, mais elles se répartiront entre abonnements commerciaux et compensation des missions d'intérêt général (MIG). La définition précise des MIG que l'État compenserait et les modalités de calcul de cette compensation font actuellement l'objet d'un travail interministériel associant la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC) du ministère de la culture, l'agence des participations de l'État (APE) et la direction du budget.

Ces travaux permettront d'engager une modification du contrat d'objectifs et de moyens de l'AFP qui pourrait intervenir très prochainement, anticipant l'échéance du COM en cours, sous réserve de la suite des échanges avec la Commission européenne.

Le rapport de gestion de l'AFP pour l'exercice 2011 indique que le chiffre d'affaires de l'agence s'établit à 281,4 millions d'euros , soit un écart positif de 1,2 million d'euros par rapport au budget et une légère progression à périmètre constant par rapport à 2010. Comme le souligne la direction de l'AFP, ces résultats sont le signe d'une bonne performance commerciale , dans un contexte national et international récessif.

* *

*

Compte tenu de ces observations, votre rapporteur pour avis propose de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de l'audiovisuel et de la presse au sein de la mission « Médias ».

EXAMEN EN COMMISSION

Réunie le mardi 20 novembre, sous la présidence de Mme Marie-Christine Blandin, présidente, la commission examine le rapport pour avis de M. David Assouline sur les crédits des programmes « Audiovisuel » et « Presse » de la mission « Médias, livre et industries culturelles » du projet de loi de finances pour 2013.

Un débat s'engage après l'intervention du rapporteur pour avis.

M. Jacques Chiron . - Ne faudrait-il pas se diriger vers un transfert de la dotation de l'État vers la contribution à l'audiovisuel public dès cette année ? On pourrait pérenniser le principe d'une indexation de la redevance sur l'inflation à laquelle s'ajouterait une part supplémentaire fixe, ce qui permettrait à la télévision publique de devenir moins dépendante de la dotation.

Le rapport de la mission d'information de notre commission à Londres montre que dans un certain nombre de pays européens c'est la CAP qui rend libre l'audiovisuel public.

Lors de l'audition du président de France Télévisions, il avait été évoqué de remettre des écrans publicitaires entre 20 heures 30 et 20 heures 40. C'est dans cette tranche horaire que la rentabilité de la publicité est la plus forte. Bien entendu, il faudrait l'exclure après 20 heures 40.

M. André Gattolin . - La proposition d'une augmentation automatique de la redevance est intéressante car son taux est relativement peu élevé en France par rapport à d'autres pays. Je ne peux que l'approuver.

Cependant, la redevance, ça se mérite. Nous devons demander à France Télévisions de réaliser de vrais efforts de gestion. Il n'existe pas aujourd'hui de système sérieux de contrôle des coûts, notamment vis-à-vis des producteurs extérieurs. Leurs taux de marge peuvent donc être particulièrement élevés, ou alors ils ne sont pas connus. Certaines entreprises se mettent en situation de dépendance. De fait lorsqu'une émission doit être supprimée, le producteur animateur argue qu'il se trouve dans une position de quasi-salariat et donc l'émission est reconduite.

La ministre a évoqué la question de remettre à jour un nouveau contrat d'objectifs et de moyens (COM). Les relations avec les producteurs ont été négligées par le précédent COM. 4 à 5 % du budget de France Télévisions partent dans une gestion discutable, selon les spécialistes des médias.

S'agissant de la réforme des aides à la presse, il faut se fixer des objectifs en termes de nature de titres participant au pluralisme. Le premier critère devrait être aujourd'hui la défense et la protection du métier de journaliste. Depuis deux ans, dans notre pays, le nombre de journalistes titulaires de la carte de presse diminue. C'est une tendance globale dans tous les pays d'Europe et développés, alors que les titres se multiplient. Il faut trouver le moyen d'aider les titres papier et ceux en ligne, sachant que, pour ces derniers, certains personnels ne traitent pas l'information mais font uniquement du « repiquage ». Je regrette que ce projet de loi de finances ne réforme pas en profondeur les aides à la presse.

Je partage votre analyse sur la neutralité fiscale entre papier et numérique, mais il faut l'approfondir au regard des positions de Bruxelles. D'autres pays l'opèrent déjà.

M. Pierre Laurent . - Nous sommes favorables à l'augmentation de la redevance et donc à l'amendement proposé. Cet amendement ne répond pas cependant au problème du déséquilibre structurel du budget de France Télévisions. Il ne sera pas possible de le résoudre de la même manière l'année prochaine.

Une loi sur l'audiovisuel est envisagée pour 2013. J'ai une question sur le champ de cette loi. Une réflexion doit être conduite sur le rapport aux producteurs extérieurs, sur le problème des droits pour permettre de dégager d'autres types de ressources pour France Télévisions. Si nous ne nous attaquons pas à ces problèmes, l'augmentation de la redevance sera un cache-misère face aux difficultés structurelles et croissantes.

La redevance constitue une ressource pérenne qui aurait dû être revalorisée plus régulièrement. Il faut se pencher aussi sur l'environnement du paysage audiovisuel français qui a été profondément bouleversé.

Il faut exiger des évolutions des méthodes de travail de France Télévisions. Entre l'évolution du travail des rédactions et la réalité des annonces à l'interne, notamment sur l'avenir des rédactions nationales et régionales de France 3, les écarts sont parfois très importants. On doit s'interroger sur la manière dont France Télévisions envisage la rationalisation des moyens. Cela peut aussi conduire à des mesures qui mettraient en cause le potentiel rédactionnel de la chaîne, alors qu'il pourrait déboucher sur une dynamique du service public compte tenu de son importance. Je remarque, par ailleurs, que la direction de France Télévisions a annoncé, après l'échec de la renégociation de la convention collective, qu'elle appliquerait sans accord les objectifs de sa refonte.

Beaucoup de problèmes sont soulevés. Notre vote positif sur l'amendement n'est en aucun cas un quitus à la trajectoire donnée.

La réforme des aides à la presse doit avancer plus rapidement. La distribution des aides à la modernisation profite, en raison des critères établis, aux entreprises les plus riches car elles sont proportionnelles au volume des investissements. Aujourd'hui, le système ne fait qu'amplifier les inégalités existantes. Le système de distribution reste profondément en danger malgré les propos optimistes du rapporteur pour avis. S'il était profondément déstabilisé, inévitablement, même avec une réforme des aides à la presse, ce serait la disparition de nouveaux titres de la presse nationale et régionale. Tous ces chantiers doivent être traités dans la première partie de l'année 2013.

Mme Catherine Morin-Desailly . - Vous avez évoqué la question de l'héritage. Ce texte a été largement débattu au sein de notre assemblée pour lequel il y a eu des positions nuancées. Il y a aussi l'héritage de la crise et des déficits publics qui n'est pas nouveau. Il faut être mesuré par rapport à cette question.

Vous avez parlé d'un budget de responsabilité. La responsabilité est aussi, dans le cadre de la continuité républicaine, d'assumer ce qui est inscrit dans la loi, à savoir que la suppression de la publicité devait être compensée à l'euro près. Le retour de la publicité après 20 heures est un faux débat puisque les recettes publicitaires sont en forte baisse sur l'ensemble des chaînes de l'audiovisuel.

Le consensus sur la proposition d'amendement dépend du périmètre du débat. Le plan d'économies pour France Télévisions est plus que drastique. 30 millions d'euros d'économies ont déjà été réalisés en 2012. Il me semble plus difficile d'absorber les 150 millions d'euros. J'ai l'impression que vous n'aviez pas la même exigence sous la précédente mandature. Quelles pistes d'économies proposez-vous ?

Le deuxième préalable du consensus est la discussion sur la redevance considérée dans son ensemble. Une des propositions est de l'augmenter. Nous n'y sommes pas forcément opposés puisque notre groupe a toujours milité en ce sens. Si on veut être stratégique et dégager très rapidement l'audiovisuel des dotations de l'État, il faut accélérer les recettes fournies par la redevance. Mais c'est sur l'assiette qu'il faut travailler.

J'ai été surprise de la réponse de la ministre, lors de son audition, sur la taxation des résidences secondaires. Je n'ai pas eu de réponse claire lors de l'examen de la loi de 2009. Notre commission a souvent réclamé l'instauration d'un groupe de travail sur la redevance. Elle n'a jamais été mise en place. Les deux euros supplémentaires rapportent 50 millions d'euros, et une demi-contribution assise sur les résidences secondaires 100 millions d'euros. Il faut plaider pour l'élargissement de l'assiette à l'ensemble des terminaux qui permettent de recevoir la télévision. C'est un principe de justice et de neutralité technologique, de même que, pour les résidences secondaires, c'est une question de justice fiscale. Je plaiderai volontiers pour ces deux mesures. C'est à l'aune de cet ensemble de mesures qu'il faut examiner le budget 2013.

Cette augmentation devrait être autonome et fixée par une autorité indépendante pour que le montant de la redevance puisse couvrir les justes besoins de financement de l'audiovisuel public, comme nous l'avions proposé avec M. Michel Thiollière, mon co-rapporteur, lors des débats sur la loi de 2009.

La vigilance s'impose pour les autres acteurs de l'audiovisuel public dans les années à venir car les budgets sont très tendus.

Je partage le principe d'un alignement du taux de TVA entre la presse papier et la presse en ligne, qui permet l'émergence du secteur.

M. Jean-Pierre Plancade . - Il est à souligner, comme le disait Jean Jaurès, que « seul l'optimisme était républicain ». Vous avez souligné tous les problèmes qui se posent. L'effort maximal est demandé à France Télévisions. Vous avez raison de proposer 2 euros supplémentaires même si ce n'est pas suffisant. C'est un moyen d'assurer l'indépendance de l'audiovisuel public. Sur l'élargissement de l'assiette, nous devons y réfléchir.

M. Jean-Pierre Leleux . - La grande victime de ce budget 2013 est France Télévisions, qui affrontera la situation la plus difficile.

J'ai des interrogations sur la fragilité des COM. Celui de France Télévisions a volé en éclat face à la difficulté budgétaire. Se pose la question de la solidité et la validité de toute réflexion pluriannuelle. En Allemagne, le respect du COM est de valeur constitutionnelle. Une crise permet de réfléchir sur de nombreuses orientations, comme c'est le cas pour France Télévisions, tant en termes de dépenses que de ressources. Le groupe a réalisé de nombreux efforts. Il devra les poursuivre. Il y a matière, même si les obstacles sont nombreux.

Avoir une position claire sur la publicité sur les chaînes publiques de télévision est indispensable. Notre attitude est trop influencée par des considérations financières. La publicité à la télévision est un élément fondamental de la différenciation entre service public et chaînes privées. Dans le contexte de la baisse sensible des ressources publicitaires à la télévision en général, aggravé par la situation du marché et l'arrivée le 12 décembre de six nouvelles chaînes, nous devrions faire un choix. Je pense qu'il faut la supprimer complètement. Comment financer ?

Le Sénat a toujours été assez unanime sur l'augmentation de la redevance toutes tendances confondues pour pérenniser le financement de France Télévisions sans le rendre trop tributaire d'une dotation plus ou moins importante de l'État. Son montant étant assez faible en France, elle mérite d'être augmentée.

Il faut d'abord commencer par les résidences secondaires, plus que d'en augmenter le montant pour l'ensemble de la population. Il faut réfléchir à la redevance à l'écran avec l'arrivée de la télévision connectée et les mutations profondes que cela entraîne.

M. David Assouline, rapporteur pour avis des crédits de l'audiovisuel et de la presse . - La contribution à l'audiovisuel public est déjà indexée. Chaque année, est prévue une indexation de 2 euros supplémentaires, qui rapportera 50 millions d'euros. Cette année, le gouvernement propose une augmentation supplémentaire de 2 euros, ce qui veut dire encore 50 millions d'euros. Je propose que la commission présente un autre amendement pour l'augmenter encore de 2 euros, soit au total une enveloppe de 150 millions d'euros. Cela veut dire au moins 300 millions d'euros sur trois ans.

L'année dernière, malgré la crise, on nous a proposé une baisse des crédits sans désendettement de l'État. Aujourd'hui, nous voulons réduire le déficit de l'État. Cela touche forcément tous les programmes.

L'essentiel est de pérenniser le financement de l'audiovisuel public pour que tout le périmètre soit maintenu. S'il y a une baisse de la dotation, avec les augmentations envisagées de la redevance, elle est moindre. Au final, ce seront 30 millions d'euros de moins, c'est-à-dire le même effort demandé l'année dernière par le précédent gouvernement. Après le vote de cet amendement, on ne pourra plus dire que l'effort budgétaire demandé à France Télévisions est beaucoup plus important qu'ailleurs. Il permet de ramener cet effort à un niveau soutenable.

Il est indispensable, dans le cadre de la prochaine loi audiovisuelle et de la préparation du prochain budget, de revoir complètement le financement de l'audiovisuel public.

On est face à un rendez-vous puisque la taxe qui rapporte le plus et qui permet de compenser la perte de publicité est contestée par la Commission européenne. En 2013, la Commission devrait définitivement nous condamner à ne plus percevoir la taxe. Il s'agit d'un manque à gagner de 300 millions d'euros. Il faut déjà envisager le financement pour l'année prochaine. L'élargissement de l'assiette aux résidences secondaires et la réouverture du débat sur la publicité après 20 heures, même de façon restreinte, seront la panoplie de ce que nous devrons étudier ensemble pour répondre aux besoins de financement. Ce consensus, je ne l'ai jamais eu avec les députés. Je ne sais si, en cumulant toutes ces propositions d'augmentation de la redevance, l'UMP nous aurait soutenus. Faisons les réformes de façon échelonnée pour qu'elles soient comprises.

La section 2 du fonds stratégique pour le développement de la presse est consacrée au développement des services de presse en ligne. Je suis d'accord avec M. André Gattolin pour que l'attribution de ces crédits se fasse sous conditions. Aujourd'hui, le dispositif n'étant basé que sur les investissements dans les innovations technologiques, ce sont uniquement les groupes puissants qui bénéficient des aides. La refonte des aides à la presse n'était pas possible en quelques mois.

Nous maintenons les aides au pluralisme à leur niveau de 2012. Les quotidiens à faible revenu publicitaire continueront de bénéficier d'une aide de plus de 9 millions d'euros.

Je ne demande pas un consensus sur tous les points mais il existe pour dégager 2 euros supplémentaires pour aider France Télévisions.

Mme Marie-Christine Blandin, présidente . - Je mets aux voix le vote sur l'amendement présenté par M. David Assouline.

M. Michel Savin . - Pour ma part, il n'y a pas de consensus sur ce vote. A titre personnel, je voterai contre cet amendement. Une seule augmentation de 2 euros est largement suffisante.

M. Jean Boyer . - Je me rallie à la position de Mme Catherine Morin-Desailly. Je m'abstiendrai. Il importe de ne pas être négatif, ni de bloquer les projets. Je pense qu'en matière de télévision, les consommateurs que nous sommes devront être plus des décideurs. Dans le domaine du sport, la télévision française n'est plus maîtresse de ses programmes. Elle est liée à tel ou tel sponsor. Il est facile de critiquer, il est plus difficile de construire.

Mme Catherine Morin-Desailly . - Nous aurons cette discussion en séance. L'augmentation généralisée de la redevance, nous l'avons eue à l'Assemblée nationale. C'est une question de justice fiscale. Il est nécessaire d'élargir l'assiette.

M. Jean-Pierre Leleux . - L'augmentation de la redevance est inéluctable. Dans quel calendrier ? En fonction de quelle assiette ? Je suis davantage partisan de remettre en place une demi-redevance sur les résidences secondaires pour des raisons d'équité fiscale. Je m'abstiendrai donc sur cet amendement.

L'amendement présenté par M. David Assouline est adopté.

* *

*

La commission décide de donner un avis favorable à l'adoption des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » du projet de loi de finances pour 2013.

AMENDEMENT PRÉSENTÉ PAR LE RAPPORTEUR POUR AVIS AU NOM DE LA COMMISSION DE LA CULTURE, DE L'ÉDUCATION ET DE LA COMMUNICATION

A M E N D E M E N T

Article 39

I. Remplacer les montants :

127 € et 82 €

par les montants :

129 € et 83 €

II.- Pour compenser la perte éventuelle de recettes résultant pour l'État du I, compléter cet article par un paragraphe ainsi rédigé :

... - La perte de recettes résultant pour l'État de la modification des montants de la contribution à l'audiovisuel public est compensée, à due concurrence, par la création d'une taxe additionnelle aux droits prévus aux articles 575 et 575 A du code général des impôts.

LISTE DES PERSONNES AUDITIONNÉES

Conseil supérieur des messageries de presse (CSMP)

MM. Jean-Pierre ROGER, président, et Guy DELIVET, directeur général

Autorité de régulation de la distribution de la presse (ARDP)

M. Roch-Olivier MAISTRE, président

Presstalis

Mme Anne-Marie COUDERC, présidente du conseil d'administration, et M. Stéphane BRIBARD, directeur de la communication extérieure


* 1 Rapport n° 572 (2011-2012) sur le bilan de l'application de la loi n° 2009-258 du 5 mars 2009, relative à la communication audiovisuelle et au nouveau service public de la télévision, par MM. David Assouline et Jacques Legendre, sénateurs, au nom de la commission pour le contrôle de l'application des lois.

* 2 Entre le PLF 2012 et la loi n° 2012-354 du 14 mars 2012 de finances rectificative, les crédits budgétaires affectés à l'audiovisuel public ont subi une réduction des crédits de 30 millions d'euros (20 millions d'euros en LFI 2012 et 10 millions d'euros en LFR).

* 3 Elle n'a été abondée en 2012 que par le report de versements effectués au groupement d'intérêt public France Télé numérique en 2011, à savoir 4 000 euros.

* 4 L'article 40 du projet de loi de finances pour 2013 précise le montant prévisionnel de prise en charge des dégrèvements de CAP par le budget de l'État. Par ailleurs, les 538 millions d'euros correspondant à cette prise en charge sont inscrits dans la mission 200 « Remboursements et dégrèvements » (sous action 12-06).

* 5 Cette somme tient compte de reports de crédits de 2011 sur l'année 2012, à hauteur de 28 millions d'euros.

* 6 Cette diminution n'est plus que de 1,3 % si le report de crédits à France Télévisions de recettes commerciales réalisées en 2011 n'est pas comptabilisé.

* 7 Médias, livre et industries culturelles : audiovisuel et presse - avis n° 110 (2011-2012) du 17 novembre 2011, Tome V, Fascicule 1 - par M. David Assouline.

* 8 Communication audiovisuelle et nouveau service public de télévision, rapport n° 572 (2011-2012), par MM. David Assouline et Jacques Legendre, sénateurs, au nom de la commission pour le contrôle de l'application des lois.

* 9 Créé par le décret n° 99-79 du 5 février 1999.

* 10 Créé par le décret n° 2009-1379 du 11 novembre 2009.

* 11 Avis n° 252 tome VI, présenté au nom de la commission des affaires culturelles et de l'éducation sur le projet de loi de finances pour 2013, mission « Médias, livre et industries culturelles », programme « Presse », par M. Michel Françaix, député.

* 12 Rapport d'initiative sur l'avenir de la TVA de M. David Casa (n° 2011/2082) - Résolution du Parlement européen sur la modernisation de la législation sur la TVA dans le but de stimuler le marché unique du numérique de Mme Marielle Gallo et M. Jean-Paul Gauzes (n° B7-0648/2011).

* 13 Correspondance de la presse, 29 mai 2012.

* 14 Délibération ARDP n° 2012-07 relative à la décision n° 2012-05 du CSMP.

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