B. LUTTER CONTRE LES FORMES ÉMERGENTES D'ADDICTION

Les drogues ne constituent qu'une partie des causes d'addiction. Les addictions dites « sans substance » ou « comportementales » sont connues depuis longtemps. Il en est ainsi de l'addiction au jeu décrite dès le XIX ème siècle. Elles tendent à se développer avec l'essor des nouvelles technologies de l'information et de la communication. Il est donc nécessaire de suivre leur développement afin de proposer des mesures de régulation et de définir éventuellement la prise en charge adaptée. Il est notamment regrettable que l'instance chargée du suivi du développement des jeux en ligne n'ait toujours pas vu le jour, et que l'impact sur la santé et la réussite des jeunes que peuvent avoir les jeux vidéo et les nouvelles technologies ne fassent pas l'objet d'une réflexion plus approfondie.

1. Un retard regrettable dans la mise en place du comité consultatif des jeux

La loi relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne 6 ( * ) organise, depuis le 1 er juillet 2010, l'ouverture à la concurrence du marché français des jeux sur internet. Le niveau élevé de risque sanitaire lié au jeu en ligne, dénoncé de longue date par la commission des finances ainsi que par la commission des affaires sociales du Sénat 7 ( * ) , a conduit le législateur à souhaiter la mise en place d'un comité consultatif des jeux (CCJ), prévu à l'article 1 er de la loi.

Les caractéristiques du comité consultatif des jeux

1) Il doit être placé auprès du Premier ministre, et non plus des trois principaux ministères de tutelle, afin de conforter sa vocation transversale et interministérielle.

2) Il doit être compétent pour l'ensemble du secteur des jeux et investi de missions de centralisation, de conseil et d'avis, ainsi que de coordination. Il doit être ainsi chargé de centraliser les informations en provenance des autorités de contrôle et des opérateurs de jeux et d'assurer la cohérence de la régulation au regard des objectifs généraux. Il doit pouvoir également formuler des avis sur tout projet de texte législatif ou réglementaire que lui transmettrait le Gouvernement sur le secteur des jeux.

3) Il doit comporter un collège de dix-neuf membres, présidé par un membre du Parlement dont le mandat est de cinq ans non renouvelable, un observatoire des jeux et deux commissions spécialisées, dénommées respectivement « commission consultative pour la mise en oeuvre de la politique d'encadrement des jeux de cercles et de casinos » et « commission consultative pour la mise en oeuvre de la politique d'encadrement des jeux et paris sous droits exclusifs ». Les membres de ces commissions doivent être pour l'essentiel des membres du collège.

4) Le collège du CCJ doit être chargé :

- d'émettre un avis, à la demande du Gouvernement ou de l'autorité de régulation des jeux (Arjel), sur l'ensemble des questions relatives au domaine des jeux d'argent et de hasard et sur tout projet de texte relatif au secteur des jeux que lui transmet le Gouvernement ;

- de proposer au Gouvernement les évolutions législatives et réglementaires qui lui paraissent nécessaires pour assurer la cohérence de la politique des jeux d'argent et de hasard au regard des objectifs d'intérêt général ;

- de réunir les informations et de procéder ou faire procéder aux études relatives au secteur des jeux tant dans ses aspects économiques, sociaux et culturels, qu'au regard des problématiques d'ordre public et de santé publique ;

- et d'émettre un avis sur les actions d'information du public concernant les dangers du jeu excessif.

5) L'observatoire des jeux doit être composé de huit membres, désignés pour cinq ans, renouvelables une fois. Il doit avoir pour mission de conseiller le collège dans sa mission auprès du Gouvernement ainsi que, à leur demande, les commissions spécialisées. Son secrétariat doit être assuré par les services du Premier ministre.

6) La commission consultative pour la mise en oeuvre de la politique d'encadrement des jeux de cercles et de casinos doit être chargée d'examiner les demandes d'autorisation de jeux dans les cercles et les casinos et reprendre donc les attributions de l'actuelle commission supérieure des jeux.

7) La commission consultative pour la mise en oeuvre de la politique d'encadrement des jeux et paris sous droits exclusifs doit être chargée de conseiller les ministres chargés du budget et de l'agriculture dans la mise en oeuvre de la politique d'encadrement des jeux et paris exploités par La Française des jeux et des paris exploités par le PMU, et peut prescrire la réalisation d'études nécessaires à sa mission.

Cet organisme était conçu pour être le pendant régulateur et sanitaire à l'ouverture à la concurrence des jeux en ligne. Or, malgré l'existence d'un projet de décret communiqué dès le mois de janvier 2010 au rapporteur de la commission des finances du Sénat, le texte permettant la création du comité consultatif des jeux et nommant ses membres n'est toujours pas paru . L'essor des acteurs privés en matière de jeu et l'augmentation du nombre de joueurs ne sont donc suivis que par l'autorité en charge de délivrer les agréments aux opérateurs, dont ce n'est pas la mission.

Les informations recueillies par votre rapporteur tendent à indiquer que la difficulté viendrait du refus par les services du Premier ministre d'assurer le secrétariat du conseil consultatif des jeux. Pareil dysfonctionnement administratif est particulièrement préjudiciable à la politique de lutte contre les addictions et votre commission souhaite qu'il y soit mis fin le plus rapidement possible. Votre commission vous propose donc un amendement pour supprimer la mention de l'intervention des services du Premier ministre, afin qu'une solution opérationnelle soit trouvée rapidement. Ceci étant, elle reconnaît le caractère organisationnel et réglementaire de cette mesure, qu'avait d'ailleurs déjà celle figurant dans la loi relative à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne.


* 6 Loi n° 2010-476 du 12 mai 2010.

* 7 Avis n° 227 (2009-2010) de Nicolas About, fait au nom de la commission des affaires sociales, déposé le 27 janvier 2010 sur le projet de loi relatif à l'ouverture à la concurrence et à la régulation du secteur des jeux d'argent et de hasard en ligne.

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