Sénats d'Europe - Les Sénats et la représentation des collectivités locales



Palais du Luxembourg, 6 juin 2001

Mme Alicja Grzeskowiak, Présidente du Sénat polonais :

Le Sénat en Pologne n'a pas de lien organique institutionnel avec les collectivités territoriales. Il est tout simplement la seconde chambre législative. Le Sénat n'a également aucune compétence particulière par rapport aux collectivités territoriales.

Ce lien ne concerne pas non plus le mode d'élection des sénateurs, élus au suffrage universel direct. Une place au Sénat correspond environ à 370 000 habitants. Par le passé, il y avait en Pologne des projets pour remplacer le Sénat par une chambre qui représenterait les collectivités territoriales. Donc pendant les travaux sur la Constitution actuellement en vigueur, il y avait l'idée de constituer la chambre des collectivités locales, mais celle-ci ne fut pas soutenue par la majorité. Personnellement, j'étais opposée à cette transformation du Sénat en chambre des collectivités territoriales, car en fait ces propositions étaient limitées au changement du mode d'élection des sénateurs et à la restriction des compétences législatives.

Le manque de lien formel entre le Sénat et les collectivités territoriales ne signifie pas pour autant le manque de lien entre les pouvoirs publics. Le Sénat du premier mandat, à savoir celui qui a été convoqué en 1989, lors des premières élections démocratiques en Pologne, a voté une résolution sur le rétablissement des collectivités territoriales en Pologne, et il a également initié les travaux législatifs allant dans ce sens.

Le Sénat a également convoqué la commission des collectivités territoriales qui, de concert avec la commission constitutionnelle que j'ai présidée à l'époque, coordonnait les travaux du Sénat sur la réforme des collectivités.

Je me souviens du jour où justement en tant que présidente de la commission constitutionnelle du Sénat en 1990, j'ai présenté l'initiative du Sénat pour procéder aux amendements à la Constitution qui rendraient possible le rétablissement et l'activité des collectivités locales.

A l'époque, j'ai souligné le fait que le Sénat voyait dans les collectivités locales l'expression de tendances démocratiques. La nature et la portée des problèmes transmis aux collectivités territoriales constituaient d'ailleurs la mesure de la subjectivité politique des citoyens et de la liberté politique au sein de l'État.

A l'issue de cette initiative législative du Sénat, on adopta les lois qui rétablissaient les collectivités territoriales au niveau de la commune. L'introduction des niveaux supérieurs de collectivités locales suscitait encore à l'époque des réserves. On voulait par ailleurs encore acquérir davantage d'expérience sur le fonctionnement de ces collectivités territoriales qui pendant si longtemps n'existaient pas en Pologne.

Ainsi, c'est donc le Sénat, en tant que première chambre du Parlement, élue démocratiquement, qui amena à l'instauration de la démocratie locale. Dans environ 2 500 communes polonaises, les élections locales de 1990 furent par conséquent les deuxièmes élections libres en Pologne.

L'achèvement de la réforme, entamée par le Sénat de la première législature, n'a eu lieu que durant l'actuel quatrième mandat du Parlement. Nous avons introduit les niveaux supérieurs des collectivités territoriales au niveau de la voïvodie et au niveau du pawiat. Les projets de réforme furent présentés par le gouvernement, mais la Diète et le Sénat jouèrent un rôle prépondérant dans la formation du contenu de la nouvelle législation sur les collectivités territoriales.

Le Sénat, en tant qu'inspirateur du rétablissement des collectivités territoriales en Pologne, s'intéresse toujours de façon toute particulière à leur développement. C'est principalement la commission des collectivités territoriales et de l'administration d'État qui s'en occupe.

Pour terminer, il importe de dire qu'à l'issue des réformes des collectivités territoriales, initiées par le Sénat, beaucoup de sénateurs ont commencé à soutenir les initiatives locales de ces collectivités. Certains se sont même présentés aux élections locales et furent élus dans leurs organes dirigeants. Cependant, la nouvelle loi électorale à la Diète et au Sénat, votée cette année, interdit le double mandat : parlementaire et local. En effet, l'expérience a prouvé qu'il est nécessaire de procéder à une séparation plus forte entre les collectivités territoriales et le pouvoir législatif, conformément au principe constitutionnel de la séparation des pouvoirs.

Cependant, cela ne signifie pas que les sénateurs aient rompu tous les liens avec les collectivités territoriales. La loi en vigueur sur l'exercice du mandat de député et de sénateur accorde aux sénateurs le droit de participer aux sessions des organes constituant les collectivités territoriales qui font partie de la circonscription qui les a élus. Le sénateur a aussi le droit de présenter ses motions et ses remarques, et d'intervenir auprès des organes de l'administration des collectivités territoriales pour régler la question qu'il présente en son nom propre ou au nom de ses électeurs.

Je pense que le Sénat de la Pologne, en exerçant ses droits dans le domaine de la législation, continuera toujours à exprimer l'intérêt qu'il porte à la problématique des collectivités territoriales.

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